PROGRAMME D’EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI LE SECTEUR DE LA MICROFINANCE NOTE TECHNIQUE AOUT 2015 Cette note technique a été préparée dans le cadre d’une mission du Programme d’évaluation du secteur financier au Mali menée en mars 2015 sous la direction de Mehnaz Safavian (Banque mondiale) et sous la supervision du Pôle Finance et marchés des Pratiques mondiales de la Banque mondiale. Elle présente une analyse technique et des informations détaillées sur lesquelles reposent les conclusions et les recommandations de l’évaluation du PESF. De plus amples informations sur le PESF sont disponibles à www.worldbank.org/fsap. BANQUE MONDIALE POLE FINANCE ET MARCHES DES PRATIQUES MONDIALES -2- Table of Contents Acronyms .............................................................................................................................. 3 Résumé ................................................................................................................................. 4 Contexte ............................................................................................................................... 5 Structure du secteur de la microfinance ................................................................................. 6 La crise de secteur de la microfinance: une typologie ............................................................. 7 Le rôle du cadre légal la crise du secteur de la microfinance ................................................. 11 Stratégies et plans d’action pour l’assainissement du secteur .............................................. 14 Les autres enjeux................................................................................................................. 17 Recommandations .............................................................................................................. 19 Annexe 1: Inclusion financière au Mali ................................................................................ 20 Annexe 2: Le rôle des PTF dans le secteur de la microfinance ............................................... 22 Tables Tableau 1: Décomposition des SFD selon leur statut ............................................................................. 7 Tableau 2: Statistiques sur les 33 SFD en activité (2013) ....................................................................... 8 Tableau 3: Evolution de l’encours des dépôts et des crédits entre 2010 et 2013 .................................. 8 Tableau 4: Evolution des principaux indicateurs des SFD ....................................................................... 9 Tableau 5: Estimation des besoins de mesures de tutelle pour les 33 SFD en activité ........................10 Tableau 6: Principales modifications de la loi microfinance (UEMOA) ................................................12 Tableau 7: Règles prudentielles relative aux SFD .................................................................................13 Tableau 8: Nombre de missions de contrôle ........................................................................................14 Tableau 9: Synthèse du Plan d’urgence pour le secteur de la microfinance au Mali ...........................15 Table 10: Budget de la CCS/SFD ............................................................................................................18 Tableau 11. Indicateurs d’inclusion financière, pourcentage de Maliens de plus de 15 ans ...............20 Tableau 12. Indicateurs d’inclusion financière, en pourcentage des adultes de plus de 15 ans .........21 -3- Acronyms AFD Agence Française de Développement (French cooperation agency) AP/SFD Association Professionnelle des SFD (Professional association of the MFIs) BCEAO Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (Central Bank of West African States) CB – UMOA Banking Commission of UMOA CFA franc Franc CFA (exchange rate : 1 euro = 655.96 FCFA) BNDA Banque Nationale de Développement Agricole (National Agricultural Development Bank) CAEC Caisse Associative d’Épargne et de Crédit des Entrepreneurs et Commerçants (savings and credit financial cooperative for entrepreneurs and merchants) CCS/SFD Cellule de Contrôle et de Suivi des SFD (Control and monitoring unit of the MFIs) CFBM Centre de Formation Bancaire et de Microfinance (banking and microfinance training centre) CIDA Canadian International Development Agency CPA/SFD Centre de Promotion et d'Appui des SFD (centre to promote and support the MFIs) CVECA Caisse Villageoise d'Epargne et de Crédit Autogérée (self-managed village savings and credit financial cooperative) FARM Financement Agricole et Rural au Mali (agricultural and rural financing in Mali) GCNM Groupe Consultatif National de la Microfinance (national advisory group on microfinance) IFAD International Fund for Agricultural Development MFI Microfinance institution MIS Management Information System NGO Non-Governmental Organization OHADA Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (Organization for the Harmonization of Business Law in Africa) PAR Portfolio at Risk PTF Technical and Financial Partner PMR Programme de Microfinance Rurale RMCR Réseau de Micro-institutions de Croissance et de Revenu SFD Système Financier Décentralisé SMS Structure Ministérielle de Surveillance SNDMF Stratégie Nationale de Développement de la Microfinance (national strategy for developing the microfinance sector) WAEMU West African Economic and Monetary Union -4- Résumé Le secteur de la microfinance au Mali est en crise depuis plusieurs années alors même que la population a largement recourt à ses services (environ 1 million de membres souvent issus des zones rurales). Deux des plus grands SFD du pays sont en cessation de paiement et de nombreuses autres structures sont techniquement en faillite et doivent être fermées et liquidées. De nombreux déposants ne sont plus en mesure de récupérer leur épargne et le refinancement des banques s’est tari. Le secteur fait l’objet d’une crise de confiance dont souffre aussi la partie viable du secteur (qui représente entre 80% et 90% du marché). Aucun SFD actif n’est en mesure d’accroitre son portefeuille de prêt (sauf une greenfield récemment installée). Les faiblesses du cadre réglementaire et de supervision (qui a prévalu jusqu’en 2010) constitue l’une des principales raisons de la crise actuelle. Jusqu’en 2010, la combinaison d’une politique d’agrément laxiste et d’un manque de capacité de la structure ministérielle de surveillance (CCS/SFD) a abouti à la présence de trop nombreux SFD avec des lacunes en matière de capacité et de gouvernance (alors même que ces SFD ont une fonction de collecte des dépôts). Le nouveau cadre régional règlementaire et de supervision (en vigueur au Mali depuis 2010) constitue une mesure essentielle pour permettre l’émergence d’un secteur de la microfinance à la fois solide et inclusif. A ce jour, la pleine application de cadre n’en demeure pas moins difficile et lente. L’assainissement du secteur de la microfinance reste la priorité immédiate pour les autorités maliennes et l’adoption de Plan d’urgence pour la microfinance constitue à cet égard une mesure essentielle. Le plan comprend les principales mesures pour assainir le secteur : restructuration ou liquidation de SFD non viable, mécanisme d’indemnisation des déposants, réforme et renforcement de la structure nationale de surveillance (CCS/SFD), renforcement des SFD en activité). Néanmoins, la mise en œuvre du plan reste une tâche difficile en raison notamment du contexte budgétaire tendu et des réserves des donateurs pour participer. Le recouvrement de la confiance du public envers le secteur de la microfinance passe par la capacité du gouvernement malien à mettre en œuvre les mesures du plan d’urgence. L’un des enjeux les plus sensibles sera de réussir à mener la liquidation de quelques SFD de grande taille tout en assurant l’indemnisation des déposants. -5- Contexte Le Mali est vaste pays enclave d’Afrique de l’Ouest avec une population de 16,9 millions d’habitants et PIB par tête de moins de 500$. L’économie est très largement rurale avec plus des 2/3 de la population vivant de l’agriculture, notamment le coton. L’or est le principal produit d’exportation du pays, même si on observe une baisse de la production et que l’industrie fait face à un avenir incertain en raison du caractère limité des réserves actuelles. Le secteur des services (40 % du PIB) est dominé par les activités de commerce. L’industrie, qui emploie tout juste 3 % de la population active, repose principalement sur de petites unités de confection textile et de transformation de produits alimentaires. Une majorité écrasante de la population (plus de 90 %) travaille dans le secteur informel. En 2012, le Mali a connu à une grave crise politique et sécuritaire dont il est en train de se relever. Début 2012, des insurgés ont pris le contrôle du nord du pays, faisant fuir près d’un demi - million de personnes. Quelques mois plus tard, un coup d’État militaire a fini de déstabiliser le pays et a provoqué la suspension de l’aide des bailleurs de fonds. Une intervention militaire conduite par la France a permis au gouvernement de reprendre le contrôle du nord à la mi-2013, et de nouvelles élections – présidentielle et législatives – ont eu lieu plus tard dans l’année pour rétablir l’ordre démocratique. La croissance économique a repris et l’inflation est faible. La croissance du PIB a été nulle en 2012 en raison de la crise politique et n’a atteint que 1,7 % en 2013 en raison de la mauvaise récolte agricole. En 2014, la croissance économique a été soutenue (7,2 %) et elle devrait s’établir à 5,5 % en 2015. Ce taux correspond au taux de croissance annuelle moyen observé durant la dizaine d’années ayant précédé la crise de 2012. L’inflation est faible (1 % en 2014), en deçà de l’objectif de 3 % fixé par la BCEAO. Bien que le secteur financier reste très largement dominé par les banques en termes de volume d’actifs, le secteur de la microfinance touche une clientèle numériquement plus importante. En 2015, 14 banques détenaient environ 97 % de l’actif du secteur financier. Bien que ne pouvant pas être considéré comme un risque systémique pour le système financier malien, le secteur de la microfinance est utilisé par une partie importante de la population (environ 1 million de compte de dépôt). Le total des dépôts du secteur de la microfinance représente environ 3% du total des dépôts du secteur bancaire. La monnaie électronique se développe rapidement, ce qui laisse bien augurer de son implantation dans les zones rurales (ces dernières n’étant pas suffisamment desservies par des succursales ou agences bancaires). Alors que le secteur bancaire apparaît dans l’ensemble solide et rentable, le secteur de la microfinance est confronté à une crise importante depuis environ 6 ans. Deux des plus grands SFD du pays sont en cessation de paiement et de nombreuses autres structures sont techniquement en faillite et doivent être fermes et liquidées. La crise politique de 2012 aggravé la situation et de nombreuses SFD doivent être désormais renforcés. -6- Les difficultés du secteur de la microfinance a des conséquences négatives sur l’accès aux services d’épargne, de crédit et d’assurances pour les ménages, les micro-entrepreneurs et les agriculteurs pauvres. Du côté de l’offre, les SFD offre une large gamme de produits à court terme pour intrants, cultures et commercialisation, des prêts post-récolte et ainsi que du crédit et crédit-bail pour petit équipement. Dans un pays où l’inclusion financière est faible (voir annexe 1), la crise du secteur de la microfinance est d’autant plus préjudiciable pour les agents économiques les plus pauvres que ce secteur constitue l’un des seuls modes d’accès au financement formel (absence de caisse nationale d’épargne et de services postaux au Mali). Structure du secteur de la microfinance Le secteur de la microfinance joue un rôle important pour fournir des services financiers aux ménages les plus pauvres, les microentreprises et les petits agriculteurs. Le nombre de compte (1 million environ) avoisine le nombre de comptes détenus dans les banques. On considère que le secteur de la microfinance s’adresse à 1,4 millions de bénéficiaires1. Les services de microfinance s’adressent aussi bien aux emprunteurs des secte urs rural et urbain ainsi qu’à une partie significative de femmes. On estime que près de la moitié des prêts s’adressent à des emprunteurs ruraux. A partir d’un échantillon couvrant 85% du secteur, il apparait que presque 50% du portefeuille de crédit de ces SFD est destiné à des usages strictement agricoles (intrants, petit équipement, crédit d’entreposage). En 2013, un tiers des usagers étaient des femmes (sans prendre en compte les femmes membres de groupe mutualiste) Dans la zone UEMOA, les institutions de microfinance agréées sont habilitées à pourvoir des services d’épargne et de crédit au public. Au Mali, les SFD se répartissent selon trois statuts légaux : i) les Institutions mutualistes ou Coopératives d’épargne et de crédit (IMEC) comprenant les réseaux ou les caisses unitaires ; ii) les associations ; iii) les sociétés privées (SA, SARL). Les coopératives et leurs réseaux représentent traditionnellement le type dominant d’institutions de microfinance. On compte aujourd’hui 126 SFD inscrits sur le répertoire des institutions autorisées au Mali. 1 Le nombre de compte et le nombre de bénéficiaires diffère étant donné que le compte ouvert pour une institution mutualiste sert un groupe entre 8 et 15 personnes. -7- Tableau 1: Décomposition des SFD selon leur statut 2 IMEC 70 dont: - réseaux* 18 - caisses unitaires 52 Associations 44 Sociétés privées 12 Total 126 * Les 18 réseaux comprennent 247 caisses affiliées. La crise de secteur de la microfinance: une typologie Le secteur de la microfinance au Mali aujourd’hui une crise majeure dont les prémices remontent six ans auparavant. Le déclenchement de la crise date de la fin des années 2000 avec les crises de solvabilité des troisième et quatrième SFD par la taille à cette époque – Union Kondo Jigima and Union Jéméni – laissant aujourd’hui un encours d’épargne estimé à 8,9 milliards de FCFA. Depuis lors, les conséquences de la crise politique de 2012 ont considérablement affaibli l’ensemble du secteur dont les indicateurs financiers se sont détériorés. L’ensemble du secteur de la microfinance est aujourd’hui confrontée à une crise de confiance, dans la mesure que les banques ont arrêté leur refinancement et qu’une partie des déposants n’est pas en mesure de récupérer son épargne. Actuellement, même la partie viable du secteur (qui représente 90% du secteur si certains SFD sont consolidés) est affectée négativement par la crise de confiance. Dans ces conditions, les institutions viables ne sont pas en mesure d’accroitre leur activité (à l’exception d’une greenfield récemment installée). Pour évaluer la situation du secteur de la microfinance au Mali, nous avons décomposé les SFD en 3 catégories : i) les SFD en activité ; ii) les 2 grands SFD en crise ; iii) le reste du secteur regroupant des petites structures avec souvent des faiblesses structurelles. Il convient de souligner que le manque et la qualité des données constituent une contrainte forte. Pour beaucoup de SFD en crise, nous ne disposons pas d’information récente. La qualité des données pour le secteur activité reste relativement faible. i) La crise pour le secteur de la microfinance en activité (33 SFD) Structure A partir des données collectes auprès de la CCS/SFD, on compte 33 SFD en activité fournissant des informations sur une base régulière. A partir de cet échantillon de SFD, 45,5% ont le statut de mutuelle couvrant 62,5% des usagers. Les associations de crédits solidaires sont nombreuses (10 SFD) mais ne comptent que 14,7% des usagers. A la suite des consolidations intervenues ces dernières années, il y a aujourd’hui 5 associations CVECA3 avec 21,7% des usagers. Finalement, 2 Institutions Mutualistes ou Coopératives d’Épargne et d e Crédit. 3 CVECA: Caisse Villageoise d’Épargne et de Crédit Autogérée. -8- les Sociétés anonymes (SA) comptent pour 1,1% des usagers4. Pour les SFD dont les informations sont disponibles, les services financiers sont accessibles dans 702 points de services financiers. Pour les SFD en activité, le total du crédit dépassait légèrement le total des dépôts à fin 2013 (voir tableau 3). Les 6 plus grands SFD5 compte pour 80,9% de l’encours de dépôts du secteur et 81.8% de l’encours de crédit. Tableau 2: Statistiques sur les 33 SFD en activité (2013) Nb. de Nb. De structure Nb. % points de % % en d’usagers services activité Mutualistes 15 45,5% 357 50,9% 585.949 62,5% Associations 15 45,4% 337 48% 341.169 36,4% dont : 10 30,3% 53 7,5% 137.941 14,7% . Association de crédit solidaires . CVECA 5 15,2% 284 40,5% 203.228 21,7% Sociétés anonymes 3 9,1% 8 1,1% 10.697 1,1% Total 2013, ajusté 33 100,0% 702 100,0% 937.815 100,0% Source: CCS/SFD Tableau 3: Evolution de l’encours des dépôts et des crédits entre 2010 et 2013 '000 CFA francs 2010 2013 Variation Encours de dépôt 54.875.777 47.863.030 -12,8% Encours de crédit 71.376.819 66.219.314 -7,2% Source: CCS/SFD Indicateurs financiers Les conséquences de l’instabilité politique en 2012 a conduit à la détérioration de la santé financière du secteur de la microfinance en activité. Les impayés de crédits se sont accrus en 2012 avec un portefeuille à risque à 90 jours s’établissant à 11,8%. En 2013, le PAR 90 a diminué (9,2%) mais se situe encore largement au-dessus de la limite de 5%. Entre 2010 et 2013 (sans tenir compte de l’arrivée de Microcred), le total de bilan a diminué de 24,7% sous l’effet conjugué des pertes enregistrées, la diminution des dépôts et l’arrêt du refinancement des banques et autres institutions financières. Cette tendance a été partiellement compensée par l’arrivée de la greenfield Microcred qui a débuté ses activités en 2014. Microcred comme les autres SFD ne parvenait pas à se faire refinancer auprès des banques. 4 Microcred est la seule SA et la dernière SFD entrée sur le marché. Microcred ne mobilise pas d’épargne et IFC intervient comme investisseur. 5 Ce sont les mutualistes Union Kafo Jiginew, Union Nyèsigiso, Union CAECE; les Associations Soro Yriwaso, RMCR; et la SA Microcred-Mali. -9- Le niveau de rentabilité du secteur s’est détérioré au cours des dernières années, passant d’un total de profit de 1,9 milliards FCFA en 2010 à une perte de 3 milliards FCFA en 2013. En 2013, seuls 14 SFD dégageaient un résultat (hors subvention) positif. De plus, seuls deux SFD, parmi les six plus grands, avaient un résultat positif. Cette détérioration de la rentabilité s’explique par la baisse des revenus liée à la réduction du volume de crédit et par la hausse des provisions (en lien avec la hausse des crédits en souffrance). Tableau 4: Evolution des principaux indicateurs des SFD Évolution de Microcred Total avec 2010 2011 2012 2013 2010 à 2013 2014 Microcred Résultat net (hors subvention) 1 869 093 -759 103 -3 143 762 -2 996 391 -260,3% -2 134 545 -5 130 936 % de SFD avec résultats positifs 57,8% 48,6% 47,1% 43,8% -24,3% 0,0% 42,4% Rendement sur fonds propres 8,9% -3,7% -17,8% -11,7% -55,2% -17,3% PAR 90 jours 7,6% 7,7% 11,8% 9,2% 20,8% 0,8% 8,2% Actif 118 705 965 110 839 350 103 789 407 89 435 962 -24,7% 17 289 950 106 725 912 Fonds propres 20 933 767 20 552 019 17 685 400 25 708 441 22,8% 3 865 275 29 573 716 Taux de capitalisation 17,6% 18,5% 17,0% 28,7% 63,0% 22,4% 27,7% Refinancement par les 45,3% 42,9% 38,3% 28,0% -38,2% 70,6% 33,1% banques* * dette/encours de crédit Sources: CCS/SFD Assainissement du secteur de la microfinance en activité Si le secteur des SFD en activité est dominé par quelques grandes institutions ne nécessitant pas de mesure spécifique de la tutelle, les autres SFD doivent faire l’objet de mesures spécifiques. A partir de l’étude financée par l’AFD (2014) et des discussions avec la Structure ministérielle de surveillance (CCS/SFD), il apparait que 10 des 33 SFD en activité ne nécessiteraient pas de mesures de supervision. Ce groupe inclut les 6 SFD les plus importants par leur taille. Pour le reste du secteur en activité (23 SFD), des mesures spécifiques de supervision seraient nécessaires. Il convient de mener des audits pour avoir une idée précise de la situation réelle de ces SFD, néanmoins, à ce stade, on peut estimer que 8 SFD devraient faire l’objet d’un suivi rapproché et que 7 autres SFD devraient être placés sous administration provisoire. De plus, selon la CCS/SFD, 8 SFD devraient être liquidés. On peut considérer que certains points de services des SFD à liquider pourraient être rattachés à des réseaux existants. - 10 - Tableau 5: Estimation des besoins de mesures de tutelle pour les 33 SFD en activité SFD ne nécessitant pas de mesure de la tutelle 10 SFD nécessitant des mesures de la tutelle 23 Suivi rapproché 8 Administration provisoire 7 Retrait d’agrément et liquidation 8 Estimation: CCS/SFD ii) La crise affectant les deux SFD de grande taille Les crises de solvabilité de deux importants SFD (Union Kondo Jigima and Union Jéméni) ont catalysé la crise du secteur. Depuis 2009, en l’absence de réelle résolution de ces crises, la situation de ces deux SFD a fortement contribué à la détérioration de l’ensemble de la confiance du public envers le secteur. Le total des dépôts pour ces deux structures est estimé à environ 8,9 milliards FCFA, ce qui représente une part écrasante des dépôts compromis dans l’ensemble du secteur au Mali6. Les différentes mesures mises en place par la tutelle (administrations provisoires depuis 2009-2010 (celle de Jéméni ayant été levée en janvier 2015 pour être remplacée par un comité de gestion paritaire) ne devraient pas être en mesure d’éviter la liquidation. Jusqu’à présent, l’absence de mécanisme pour compenser les déposants a empêché les autorités de procéder à la liquidation de ces deux structures. La situation de ces deux SFD (ainsi que ceux de plus petite taille comme CANEF) est d’autant plus préoccupante qu’elle a des effets défavorables sur l’ensemble du secteur (arrêt du refinancement des banques, faible confiance des déposants envers les SFD). iii) La crise dans le reste du secteur de la microfinance Le reste des SFD agréés se compose essentiellement de structure de petite taille (78 SFD7) The rest of the licensed microfinance sector consists essentially in small retail structures (78 licensed MFI). Pour ces SFD, il est essentiel de souligner que nous ne disposons pas de données récentes et que des audits doivent être menés (il est prévu qu’une trentaine d’audit soit prochainement lancé). De plus, pour 23 SFD n’ayant jamais démarré leur activité, il a été présenté pour approbation au Ministère des Finances des dossiers de retrait d’agrément. On estime qu’une telle mesure devrait envisagée pour encore une vingtaine de SFD. Pour les autres SFD (un peu plus d’une trentaine), il est difficile de se prononcer sur leur situation en l’absence d’audits (certains de ces SFD pouvant être en activité). 6 Il semble possible d’estimer que 85% des dépôts compromis dans le secteur serait logé au sein de Kondo Jigima and Jéméni. 7 Le nombre total de SFD (33 SFD en activité + 2 grands SFD en cessation de paiement + 78 petits SFD = 115) ne correspond pas aux 126 SFD enregistrés en 2012 car il y a eu depuis lors 13 regroupements, notamment de CVECA. Il convient de noter que ces regroupements n’ont pas encore obtenu formellement leur agrément. - 11 - Le rôle du cadre légal la crise du secteur de la microfinance La faiblesse du cadre légal avant 2007 La crise du secteur de la microfinance au Mali trouvent ses racines dans les faiblesses du précèdent cadre règlementaire et de supervision (datant de 1993). Il y a une croissance excessive du secteur en raison d’une politique d’agrément trop laxiste. De 2002 à 2010, plus de 300 agréments ou conventions ont été accordés, parfois à des structures ne présentant pas les conditions minimales pour assurer la sécurisation des dépôts des épargnants. Le nombre d’usagers a augmenté de 50% entre 2003 et 2013. Durant cette période, le volume des dépôts et l’encours de crédit ont plus que doublé avec une croissance annuelle moyenne de 12,4% et 13,5% respectivement. L’abondance des fonds en refinancement de la part des institutions financières nationales et internationales a contribué à la forte croissance de l’activité du secteur ; alors même que beaucoup de SFD n’étaient pas en mesure de moderniser leur système de gestion, de re cruter un personnel qualifié et de renforcer les capacités existantes en particulier dans le domaine du risque de crédit. La qualité de la gouvernance a été défaillante que ce soit de la part des techniciens ou des dirigeants élus. La crise du secteur de la microfinance a été accentuée par l’absence d’un cadre réglementaire adéquate, par la faiblesse des exigences de reporting et par la capacité limitée de la supervision menée exclusivement au niveau national jusqu’en 2010. La CCS/SFD8 n’avait pas le budget et le personnel nécessaire pour assurer pleinement son mandat de supervision ; et lorsque des anomalies étaient détectées, il était souvent trop tard. Le renforcement du cadre légal et réglementaire depuis 2010 En 2007, le Conseil des ministres de l’UMOA a adopté une nouvelle loi sur la microfinance qui renforce fortement le rôle des institutions régionales (BCEAO et Commission bancaire de l’UMOA). La loi établit un cadre réglementaire beaucoup plus strict (en te rmes d’agrément, d’obligations prudentielles et de reporting) ; de plus la loi confère un rôle clé à la Commission bancaire pour la supervision du secteur (voir tableau 6). Il est attendu que ce nouveau cadre réglementaire et de supervision participe à la consolidation du secteur (et donc à réduire le nombre de SFD). Au Mali, la nouvelle loi a été adoptée et promulguée en 2010 8 La Cellule de Contrôle et de Suivi des SFD (CCS/SFD) est un service relié directement au secrétariat général du Ministre des Finances. La CCS/SFD compte quatre bureaux : 1) agrément, reconnaissance et convention, 2) analyse financière, surveillance et contrôle, 3) études et statistiques, 4) administration et comptabilité. L’effectif actuel de la CCS/SFD est de 25 agents, dont 16 professionnels. - 12 - Tableau 6: Principales modifications de la loi microfinance (UEMOA) Source: CGAP (2013) Avec la nouvelle loi, toute demande d’agrément requiert l’avis favorable de la BCEAO. Depuis 2010, la CCS/SFD n’a émis qu’un seul agrément. La BCEAO est responsable pour recommander un retrait d’agrément. La nouvelle loi impose des exigences prudentielles strictes (voir tableau 7) et impose aux SFD un reporting plus contraignant. Les SFD avaient jusqu’en juillet 2012 pour se mettre en conformité avec le nouveau cadre, mais des retards ont été observés. Pour beaucoup de SFD, il est difficile de se mettre en conformité avec le nouveau cadre (notamment le respect du nouveau référentiel comptable et l’obligation de fonds de sécurité pour les réseaux mutualistes). Aujourd’hui, 54 dossiers ont été proposés pour régularisation. - 13 - Tableau 7: Règles prudentielles relative aux SFD Norme Limite d’exposition aux risques (% ressources) Max = 200% Couverture des emplois à MLT (% ressources stables) Min = 100% Limite de prêts aux dirigeants/personnel et aux Max = 10% personnes liées (% fonds propres) Limite des risques sur une seule signature (% fonds Max = 10% propres) Norme de liquidité (valeurs réalisables et disponibles/ Min = 100% passif exigibles) Limite des opérations autres qu’activités d’épargne et Max = 5% de crédit (% risques) Constitution de réserve générale Min = 15% Norme de capitalisation (% actifs nets) Min = 15% Limite des prises de participation (% fonds propres) Max = 25% Limite des prises de participations Max = 25% Source: BCEAO La Commission bancaire est dorénavant responsable de la surveillance des grands SFD (ayant un encours d’épargne ou de crédit supérieur à 2 milliards FCAF sur deux exercices successifs) ; alors la CCS/SFD conserve la responsabilité par les SFD de plus petite taille. La CCS/SFD doit produire des rapports réguliers de supervision à la BCEAO. La supervision des SFD est effectuée par des contrôles sur place et sur pièces. La mise en œuvre de la supervision des SFD restent encore problématiques. Contraint par des ressources limitées, les inspections ne sont pas assez nombreuses et le suivi des inspections déjà effectuées est souvent limité. De 2010 à 2014, la CCS/SFD a effectué une vingtaine de mission de contrôle par an. La Commission bancaire a accompagné la CCS/SFD chaque année sur une ou deux missions. Suite aux contrôles sur place, un rapport est transmis aux SFD avec des recommandations. La CCS/SFD effectue peu de missions sur le suivi de la mise en œuvre des recommandations. En 2013 et 2014, la Commission bancaire a effectué des contrôles de SFD de grande taille à deux reprises. La supervision basée sur les risques a été récemment introduit afin de mieux cibler les risques lors des missions de contrôle (choix des SFD à contrôler, aspects particuliers à contrôler au sein des SFD). Par le passé, les stratégies de contrôle ne ciblaient pas les risque d’où la difficulté de détecter à temps les problèmes. De plus, il apparait que certains commissaires aux comptes ont été trop complaisants envers certains SFD aujourd’hui en difficulté (ces cabinets n’ayant pas fait - 14 - l’objet de sanctions). Aujourd’hui, les commissaires aux comptes doivent être approuvés par le Ministre des Finances et la BCEAO (les firmes en défaut ne devraient plus être admises). Tableau 8: Nombre de missions de contrôle 2010 2011 2012 2013 2014 Missions d’inspection effectuées 22 21 18 20 21 dont mission avec la CB UMOA 1 2 1 2 2 Mission de la CB UMOA 2 2 Source: CCS/SFD La supervision sur pièces reste insuffisante. Les rapports statistiques annuels et les rapports financiers des SFD doivent être transmis à la CCS/SFD 6 mois après la fin de l’année financière. En 2014, seuls 22 SFD ont fourni leur rapport annuel de 2013 selon les exigences requises. Des sanctions pécuniaires ont été recommandées pour les SFD accusant un retard dans la transmission des informations, mais les décisions ministérielles pour les appliquer n’ont pas été prises. La CCS/SFD ne disposait pas d’une application informatique uniforme pour saisir les données statistiques et les rapports financiers, permettant de produire les ratios des SFD et du secteur. Néanmoins, une application informatique « Solution Informatisée Centralisée de Suivi des SFD» a été développée par la BCEAO, qui doit démarrer d’ici à la fin de l’année 2015. En 2009, un nouveau référentiel comptable a été adopté pour les SFD de l’UEMOA. L’introduction de ce référentiel comptable pour les SFD a été appuyée par la BCEAO et par un projet sous-régional de Lux Développement. L’intégration du référentiel comptable est encore incomplète, certains SFD, n’ayant pas pu mettre leur système d’information à niveau, font des traitements manuels pour le besoin des rapports. Stratégies et plans d’action pour l’assainissement du secteur Le Plan d’urgence pour le secteur de la microfinance Le Conseil des Ministres a adopté en mars 2015 un plan d’urgence pour le secteur de la microfinance. Ce plan, incluant l’ensemble des acteurs du secteur (notamment le CPA/SFD9 et l’AP/SFD10) est sous la responsabilité de la CCS/SFD et il vise à l’assainissement du secteur de la microfinance. Le Plan d’urgence pour le secteur de la microfinance prévoit les mesures suivantes : i) assainissement du secteur (incluant notamment un mécanisme d’indemnisation des déposants des structures à liquider) ; ii) amélioration de la mise en œuvre du cadre règlementaire ; iii) 9 Le Centre de Promotion et d’Appui des SFD. Le CPA/SFD, sous la tutelle du Ministère du Commerce et de l’Industrie, est la structure dédiée à la promotion du secteur de la microfinance. 10 L’Association professionnelle des SFD est l’organisme représentati f des SFD. La nouvelle loi oblige tout SFD agréé à être membre de l’AP/SFD. En plus du Centre de formation des banques et de la microfinance, l’AP/SFD forme les personnels et les élus SFD. - 15 - renforcement des capacités, de la professionnalisation et de l’autonomie des structures de supervision et de promotion ; iv) accompagnement des SFD viables dans leurs efforts de professionnalisation ; vi) amélioration des infrastructures du secteur. Le plan d’urgence prévoit la plupart des actions d’urgence nécessaires pour assainir le secteur. Il est prévu en particulier : 1) audits financiers et patrimoniaux de SFD en difficulté ; 2) administrations provisoires ; 3) suivis rapprochés ; 4) retraits d’agrément ; et 5) liquidations. Pour les SFD viables, le plan prévoit des appuis en assistance technique. Tableau 9: Synthèse du Plan d’urgence pour le secteur de la microfinance au Mali Objectifs et principales activités Coût (estimé) (million FCFA) Assainissement du secteur de la microfinance 2,119 incluant : - Audits 545 - Mécanisme d’indemnisation des déposants 1,449 - Mesures de supervision 125 Mise en œuvre du cadre réglementaire 130 Renforcement de capacités des structures de supervision et de 1362 promotion incluant: 1,200 - Transformation de la CCD/SFD en Agence et renforcement de ces capacités. Accompagnement des SFD viables 755 incluant : - Diffusion et application des manuels de procédures 350 - Système d’information et de gestion pour les SFD 300 Infrastructure pour le secteur 1,234 incluant : - Création d’un Fonds national de soutien à la microfinance 1,000 - Centrale des risques pour SFD 86 Extension de l’offre de service de services de microfinance 165 TOTAL 5,775 dont: - Partenaires techniques et financiers (PTF) 4,240 (73.5%) - Gouvernement/Ministère des Finances 1,525 (26.5%) Sources: Ministère des Finances. Il est important de relever que le plan inclut un mécanisme d’indemnisation des déposants (1,5 milliards FCFA) ce qui permet d’envoyer un signal sur la volonté de l’Etat d’assainir le secteur. Le mécanisme (ou la règle) est à définir et toute mise en œuvre sera difficile. Plutôt que de solliciter que les PTF abondent intégralement dans le financement de cette activité, il apparait souhaitable que le gouvernement malien contribue financièrement à un tel mécanisme afin d’accroître la crédibilité du plan et d’attirer les bailleurs. - 16 - En l’absence d’audits préalables, il est difficile d’estimer si les fonds prévus pour l’indemnisation (1,5 milliards FCFA) seraient suffisants. Même si on ne dispose pas de données fiables sur les SFD en difficulté et à liquider, des estimations préliminaires suggèrent qu’environ 100.000 déposants seraient concernés par une possible indemnisation pour un montant 20 millions US$. Selon des acteurs du secteur l’indemnisation nette (c’est-à-dire les dépôts auxquels on retranche les crédits impayés) serait bien moindre et l’indemnisation serait gérable. Le Plan d’urgence prévoit la transformation de la CCS/SFD en Agence de contrôle. Cette activité est la deuxième du plan d’urgence en termes de volume de financement (1 milliard FCFA). Cette réforme est importante car la Structure ministérielle de contrôle a besoin d’ indépendance pour pouvoir exercer plus efficacement son mandat. Cette mesure correspond aux bonnes pratiques internationales ; ce type de structure existe déjà au Niger et devrait prochainement voir le jour au Benin. Le budget de fonctionnement d’une telle Agence serait fourni par l’Etat pour un montant annuel d’au moins 500 millions FCFA. Le budget total du plan d’urgence s’élève a un peu moins de 5,8 milliards FCFA. On peut penser que l’assainissement du secteur de la microfinance nécessitera des fonds additionnels, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre des administrations provisoires et de liquidation dont le coût total peut être estimé à 2,8 milliards FCFA . Le financement du plan d’urgence reste un enjeu de taille. L’Agence française de développent (AFD) doit contribuer pour un montant d’environ 1 milliard de FCFA en apportant une assistance technique à la CCS/SFD. Il convient de souligner que le Programme de microfinance rurale (PMR) financera 32 audits de SFD. Pour les activités de redressement des SFD, certains financements auraient été identifiés. Certains PTF interviennent déjà dans la consolidation de SFD en milieu rural (Cooperation canadienne, Terrafina). Le Plan d’actions pour la préservation et la consolidation de la viabilité du secteur de la microfinance dans l’UEMOA En 2012, le Conseil des ministres de l’UEMOA a adapté un plan d’actions régional pour s’attaquer aux principales difficultés du secteur de la microfinance dans la zone. La Direction nationale de la BCEAO pour le Mali est responsable de la mise en œuvre de ce plan. Le plan d’urgence national de 2015 est en phase avec le plan régional UEMOA pour le Mali ; et il sera important de continuer de garder une étroite collaboration entre la Direction nationale de la BCEAO et les autorités maliennes (Ministère des Finances, CCS/SFD) dans la mise en œuvre du plan d’urgence. Le plan régional couvre les principaux enjeux du secteur: 1) consolider la mise en œuvre du cadre juridique ; 2) assurer un suivi des SFD en difficulté ; 3) améliorer la gouvernance ; 4) moderniser le système d’information des SFD ; 5) consolider le dispositif de surveillance (organisation institutionnelle, contrôle sur place, contrôle sur pièce) ; 6) conforter la viabilité - 17 - financière du secteur. Pour chacun des thèmes abordés une série d’activités est définie avec des responsables identifiés (CCS/SFD, BCEAO, AP/SFD), un calendrier et des indicateurs de suivi. Le plan régional comprend la mise en place d’un fonds de garanties des dépôts (pour les banques et la microfinance) qui a été créé en 2014. Il convient de souligner qu’il est peu probable que ce fonds intervienne dans des évènements antérieurs à la création du fonds. En d’autres termes, l’indemnisation des déposants au Mali reste avant tout une tâche qui relève de la responsabilité du gouvernement à travers le plan d’urgence. La Stratégie nationale de la microfinance La Politique nationale de développement de la microfinance couvre la période 2016-2020. C’est un document préparé par le Centre de promotion et d’appui des SFD en associant les principaux partenaires du secteur. Le document comprend 4 axes :  Axe 1: Assainir et améliorer la surveillance du secteur (correspondant au plan d’urgence pour le secteur de la microfinance) ;  Axe 2 : Favoriser un accès large et diversifié aux services financiers et protéger les intérêts des clients ;  Axe 3 : Améliorer l’environnement et les capacités d’intervention des SFD ;  Axe 4 : Renforcer la promotion et l’encadrement du secteur de la microfinance. Le plan d’actions comprend une série d’activités auxquelles sont associées les structures responsables et un chronogramme. Le budget de mise en œuvre est estimé à 35,5 milliards FCFA avec une participation attendu des PTF évalué à 20 milliards FCFA. The action plan contains a series of activities related to these themes, specifying responsibility and timeline. The implementation budget is evaluated at 35.5 billion CFA francs with donors funding expected at 20 billion CFA. Les autres enjeux Le plan d’urgence Si l’adoption du plan d’urgence par le Gouvernement est jalon important, il n’en demeure pas moins que ce plan doit être encore financé dans sa totalité et que la mise en œuvre s’avère relativement lente. Il est largement reconnu que le secteur continuera de stagner sans une pleine mise en œuvre du plan d’urgence. Jusqu’à présent, les ressources financières pour la mise en œuvre du plan ont été limitées (tant de la part du Gouvernement que des PTF). Les mesures d’administration provisoires atteignent rarement leur objectif dans la pratique. Bien que les administrations provisoires soient une mesure relativement courante dans la zone UEMOA, sa mise en œuvre reste difficile en l’absence d’un cadre clair perm ettant de trancher entre redressement ou liquidation. Dans la région et au Mali, les administrations provisoires se souvent caractérisent par une intervention souvent trop tardive (c’est -à-dire sans réelle possibilité de redressement) puis par une durée trop longue (plusieurs années) avant qu’une - 18 - décision soit prise entre redressement ou liquidation. Le plan régional prévoit de produire un guide de mise en œuvre des administrations provisoires. La mise en œuvre des mesures de surveillance rapprochée peuvent être confrontée à certaines difficultés. Ces mesures de supervision ne sont pas délégués a une partie tiers et elles demandent dès lors beaucoup d’effort a la CCS/SFD dont les capacités sont déjà limitées. Le budget et le personnel de la CCS/SFD reste insuffisant. En 2014, le budget consenti par le gouvernement à la CCS/SFD était de 250,8 millions de FCFA. La contribution des PTF a diminué au cours des dernières années pour se situer à 13,3% du budget total de 2014 (289,1 millions FCFA). Les données ne sont pas disponibles pour comparer les budgets des Structures ministérielles de surveillance à travers la zone UEMOA, mais il est probable que le budget de la CCS/SFD soit inferieur par rapport à ce qu’il se fait au Benin ou au Sénégal. Les principales difficultés auxquelles est confrontée la CCS/SFD sont : i) un manque de personnel pour assurer la bonne mise en œuvre du plan d’urgence ; ii) un budget insuffisant pour mener les missions de contrôle ; iii) un taux de rotation du personnel trop important. Table 10: Budget de la CCS/SFD ('000) 2010 2011 2012 2013 2014 Etat 198.158 198.173 167.280 279 939 250.760 PTF 73.420 109.223 8.037 37 307 38.384 Total 271.578 307.396 175.318 317.246 289.144 % des PTF 27,0% 35,5% 4,6% 11,8% 13,3% Source: CCS/SFD Aspects financiers L’absence de refinancement reste une contrainte majeure. Par le passé, les SFD ont fait largement appel aux institutions financières nationales et internationales pour refinancer leur portefeuille de crédit. En 2010, le refinancement des SFD représentaient 45,3% de l’encours de crédit (32,3 milliards FCFA), en 2013, ce pourcentage s’élevait à 28% (21,9 milliards FCFA). Les banques et dans une moindre mesure les institutions financières ont progressivement suspendu leurs lignes de refinancement aux SFD en raison de la crise politique et de la détérioration de la santé du secteur. Le taux d’usure doit être utilisé avec précaution. Le taux d’usure pour le secteur de la microfinance a récemment été abaissé de 27% à 24%11. Tout en limitant le coût excessif du crédit, le taux d’usure peut avoir des effets contre-productifs sur les plus pauvres en limitant leur accès au crédit. En effet, le taux d’usure peut potentiellement empêcher de couvrir pour les SFD les coûts afférents à certains crédits risqués. Dans ces conditions, les clients les plus pauvres (avec 11 Pour les banques, ce taux est passé de 18% à 15%. - 19 - un risque de défaut relativement élevé) sont exclus des services de crédit formels et se tournent vers des sources de financement informel qui peuvent être très coûteuses. Recommandations Assainissement du secteur Le plan d’urgence doit être mis en œuvre aussi rapidement que possible. Etant donné la difficulté d’une telle tâche, il est possible de formuler les sous-recommandations prioritaires suivantes : - Coordination. Le plan d’urgence doit être mis en œuvre en étroite collaboration avec le plan d’action régional pour le Mali. - Audits. La CCS/SFD doit lancer dès que possible les audits sur les SFD en difficulté. - SFD de grande taille en difficulté. Le plan d’urgence doit donner la priorité aux grands SFD et en particulier aux deux grandes structures insolvables qui compromettent le redressement de l’ensemble du secteur. - Participation de l’Etat. Le gouvernement malien devrait contribuer au financement du mécanisme d’indemnisation des déposants afin de renforcer la crédibilité de l’Etat dans sa volonté d’assainir le secteur et de contribuer au retour des PTF. - Transparence. La stratégie de communication doit être suffisamment transparente durant la période de restructuration afin de contribuer au rétablissement de la confiance du public. Renforcement de la CCS/SFD Il est nécessaire que la CCS/SFD se transforme en une agence de contrôle plus indépendante. Les méthodes de contrôle doivent être améliorées et le renforcement de capacités du personnel doit être renforcé. Des budgets spécifiques de fonctionnement pour la CCS/SFD devraient être adoptés durant la période d’assainissement. Consolidation du secteur viable Une assistance technique devrait être apportée aux SFD potentiellement viables afin de consolider ces structures et de préserver le travail d’assainissement déjà engagé. - 20 - Annexe 1: Inclusion financière au Mali L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne et de l’étendue du pays. Elle s’est améliorée au cours des dernières années, mais reste faible, puisque juste 12,4 % de la population âgée de plus de 15 ans est titulaire d’un compte bancaire (contre 7,4 % en 2009, soit un pourcentage légèrement supérieur à la moyenne de l’UEMOA qui est de 12,2 %). Lorsque l’on prend en compte d’autres institutions financières et services, la situation devient plus favorable. Comme le montre le tableau 8 ci-dessous, lorsque les institutions de microfinance, les services financiers numériques, les services d’épargne postale et autres sont pris en considération, cette proportion atteint près de 50 % pour la fin de 2013. Ces chiffres de la banque centrale ne prennent toutefois pas en compte le fait que des personnes peuvent détenir des comptes dans plus d’une institution, de sorte que les chiffres relatifs à l’inclusion financière générale — simplement obtenus en faisant la somme des titulaires de comptes de différents types — sont sans aucun doute surestimés. Tableau 11. Indicateurs d’inclusion financière, pourcentage de Maliens de plus de 15 ans 2009 2010 2011 2012 2013 Comptes dans une banque commerciale 7,3 9,3 11 13 12,4 Institutions de microfinance 12,7 15,7 14,5 13,5 20,4 Inclusion financière au sens large 20 25 25,5 26,5 32,8 Prestataire d’argent électronique au sens large 20 27,4 31,4 35,9 47,9 Source : BCEAO Selon la dernière enquête sur la demande de Findex (2014), le Mali affiche des résultats moins bons que les comparateurs du groupe de pays pairs pour la plupart des indicateurs essentiels de l’inclusion financière. Dans certains domaines (crédit, épargne), la situation s’est détériorée depuis l’enquête précédente qui remonte à 2011. Cette situation est en partie imputable aux caractéristiques géographiques du Mali et au conflit survenu entre les deux enquêtes, ainsi qu’à la crise traversée par le secteur de la microfinance. Des indicateurs représentatifs pour le Mali, l’Afrique subsaharienne et tous les pays à faible revenu sont présentés dans le tableau 12 ci-après. - 21 - Tableau 12. Indicateurs d’inclusion financière, en pourcentage des adultes de plus de 15 ans Afrique Pays à faible Mali subsaharienne revenu Compte dans une institution financière -2014 13,3 28,9 22,3 Compte dans une institution financière -2011 8,2 23,9 21,1 Compte par téléphonie mobile 11,6 11,5 10,0 Possède une carte de débit 4,0 17,9 6,6 Possède une carte de débit (2011) 1,8 15,0 6,3 A épargné dans une IF durant l’année écoulée 2,9 15,9 9,9 A épargné dans une IF durant l’année écoulée (2011) 4,5 14,3 11,5 A emprunté auprès d’une IF 2,7 6,3 0,6 A emprunté auprès d’une IF (2011) 3,7 4,8 11,7 Source : Findex 2014 - 22 - Annexe 2: Le rôle des PTF dans le secteur de la microfinance Peu de PTF sont encore présents en appui au secteur de la microfinance et le financement du plan d’urgence n’est que très partiellement financé. L’AFD a financé récemment un état des lieux du secteur de la microfinance12 et l’Agence doit prochainement participer au financement d’un appui à la CCS/SFD pour la mise en œuvre du Plan d’Urgence du secteur de la microfinance. Le budget de cet appui de l’AFD est de 1,6 millions € (environ 1 milliard FCFA), dont 40% pour défrayer les coûts de l’assistance technique. Un programme de refinancement, financé par le FIDA, est mis en œuvre par le Programme de microfinance rural pour combler le manque de financement des CVECA13. Néanmoins, d’important manque de financement continueront de persister tant que le secteur n’aura pas été assaini. Ce programme vise à soutenir l’accès aux services financiers et la viabilité des SFD. Le prêt du FIDA s’élève à 25 millions USD. Jusqu’à maintenant le PMR a appuyé quatre SFD afin de les consolider et accroître le crédit rural. Le PMR, appuie également les organismes d’encadrement du secteur tels que la CCS/SFD, le CPA/SFD et l’AP/SFD. Le FIDA vient de signer une attente avec la Coopération canadienne afin d’élargir l’intervention du PMR. Le budget de cette entente est de 10,2 US$. Ce complément au budget permettra au PMR d’œuvrer avec 15 autres SFD, du milieu rural, représentant 80% du secteur de la microfinance. La coopération canadienne mène un autre projet de financement rural, intitulé « Financement agricole et rural au Mali » (FARM). Le projet de 15,3 millions US$ vise le renforcement et la professionnalisation des institutions financières pour le financement de l’agriculture et la connaissance des risques liés à l’activité d’agriculture et des mécanismes d’assurance récolte et d’assurance-prêts-récolte. L’ONG Terrafina appuie les CVECA par l’entremise de l’Association pour un Service d’Appui Technique (ASAT). Elle fait également la promotion de l’introduction du crédit warrantage avec les CVECA, mais également avec d’autres SFD. 12 États des lieux du secteur de la microfinance au Mali, Alia développement, mai 2014. 13 CVECA: Caisse Villageoise d’Épargne et de Crédit Autogérée.