L’A FRIQUE EN DÉV EL OPPEMENT P R É S E N TAT I O N G É N É R A L E Perspectives L’école au service de l’apprentissage en Afrique Sajitha Bashir, Marlaine Lockheed, Elizabeth Ninan, et Jee-Peng Tan PRÉSENTATION GÉNÉRALE Perspectives L’école au service de l’apprentissage en Afrique Sajitha Bashir, Marlaine Lockheed, Elizabeth Ninan et Jee-Peng Tan Ouvrage publié conjointement par l’Agence Française de Développement et la Banque mondiale Cette brochure présente une vue d’ensemble et le sommaire du rapport intitulé Perspectives : L’école au service de l’apprentissage en Afrique, doi : 10.1596/978-1-4648-1260-6. La version intégrale du rapport définitif, une fois publiée, sera affichée en format PDF sur le site https://openknowledge.worldbank.org/. Des exemplaires du rapport peuvent également être commandés à l’adresse https://Amazon.com. Pour toute citation, reproduction et adaptation, veuillez utiliser la version définitive du rapport. © 2018 Banque internationale pour la reconstruction et le développement / Banque mondiale 1818 H Street, N.W., Washington, D.C. 20433 Téléphone : 202-473-1000 ; Internet : www.worldbank.org Certains droits réservés Cet ouvrage est l’œuvre des services de la Banque mondiale avec la contribution de collaborateurs extérieurs. Les constatations, interprétations et conclusions qui y sont exprimées ne reflètent pas nécessairement les vues de la Banque mondiale, de son Conseil des Administrateurs ou des pays que ceux-ci représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données figurant dans cet ouvrage. Les frontières, les couleurs, les dénominations et toute autre information figurant sur les cartes du présent ouvrage n’impliquent, de la part de la Banque mondiale, aucun jugement quant au statut juridique d’un territoire quelconque et ne signifient nullement que l’institution reconnaît ou accepte ces frontières. Rien de ce qui figure dans le présent ouvrage ne constitue ni ne peut être considéré comme une limitation des privilèges et immunités de la Banque mondiale, ni comme une renonciation à ces privilèges et immunités, qui sont expressément réservés. Droits et licences L’utilisation de cet ouvrage est soumise aux conditions de la licence Creative Commons Attribution 3.0 IGO (CC  BY 3.0 IGO) http://creativecommons.org/licenses/by/3.0/igo. Conformément aux termes de la licence Creative Commons Attribution, il est possible de copier, distribuer, transmettre et adapter le contenu de l’ouvrage, notamment à des fins commerciales, sous réserve du respect des conditions suivantes : Mention de la source—L’ouvrage doit être cité de la manière suivante : Bashir, Sajitha, Marlaine Lockheed, Elizabeth Ninan et Jee-Peng Tan. 2018. Perspectives : L’école au service de l’apprentissage en Afrique. Brochure de présentation générale. Banque mondiale, Washington, DC License : Creative Commons Attribution CC BY 3.0 IGO. Traductions—Si une traduction de cet ouvrage est produite, veuillez ajouter à la mention de la source de l’ouvrage le déni de responsabilité suivant : Cette traduction n’a pas été réalisée par la Banque mondiale et ne doit pas être considérée comme une traduction officielle de cette dernière. La Banque mondiale ne saurait être tenue responsable du contenu de la traduction ni des erreurs qu’elle pourrait contenir. 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Des exemples de composantes peuvent, entre autres, comprendre des tableaux, des graphiques et des images. Pour tous renseignements sur les droits et licences, s’adresser au service des publications et de la diffusion des connaissances de la Banque mondiale, Groupe de la Banque mondiale, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433, USA ; e-mail : pubrights@worldbank.org. Image de couverture et illustrations : Bill Pragluski de Critical Stages, LLC. Collection l’Afrique en développement Créée en 2009, la collection «  L’Afrique en développement  » s’intéresse aux grands enjeux sociaux et économiques du développement en Afrique subsaharienne. Chacun de ses numéros dresse l’état des lieux d’une prob- lématique et contribue à alimenter la réflexion liée à l’élaboration des poli- tiques locales, régionales et mondiales. Décideurs, chercheurs et étudiants y trouveront les résultats des travaux de recherche les plus récents, mettant en évidence les difficultés et les opportunités de développement du continent. Cette collection est dirigée par l’Agence française de développement et la Banque mondiale. Pluridisciplinaires, les manuscrits sélectionnés émanent des travaux de recherche et des activités de terrain des deux institutions. Ils sont choisis pour leur pertinence au regard de l’actualité du développement. En tra- vaillant ensemble sur cette collection, l’Agence française de développement et la Banque mondiale entendent renouveler les façons d’analyser et de compren- dre le développement de l’Afrique subsaharienne. Membres du comité consultatif Agence française de développement Gaël Giraud, chef-économiste Thomas Melonio, directeur exécutif, direction « Innovations, recherche et savoirs » Pierre Icard, directeur, département « Valorisation des savoirs sur le développe- ment durable » Sophie Chauvin, responsable, division « Edition et publication » Hélène Djoufelkit, directrice adjointe, département « Diagnostics économiques et politiques publiques » Banque mondiale Albert G. Zeufack, chef-économiste, région Afrique Markus P. Goldstein, économiste spécialiste, région Afrique iii Sommaire de la présentation générale Table des matières de l’ouvrage vii Remerciements ix Abréviations xi Présentation générale 1 Introduction et cadre de l’étude 1 Évaluer le capital de connaissances en Afrique subsaharienne 10 L’universalisation inachevée de l’éducation de base 23 Gestion efficace et soutien aux enseignants 35 Accroissement des dépenses et des processus budgétaires pour améliorer la qualité 45 De la science à la prestation de services : combler le déficit de capacités institutionnelles 53 Résumé des conclusions 59 Perspectives 63 Notes 64 Bibliographie 67 v Table des matières de l’ouvrage Résumé Exécutif Chapitre 1 À l’épreuve des faits : Contextes et progrès Chapitre 2 Accent sur l’apprentissage Chapitre 3 L’universalisation inachevée de l’éducation de base Chapitre 4 Gestion des enseignants Chapitre 5 Utilisation des ressources budgétaires pour améliorer la qualité Chapitre 6 De la science à la prestation de services : combler le déficit de capacités institutionnelles Chapitre 7 Conclusions et recommandations Chapitre 8 Perspectives vii Remerciements Perspectives : L’école au service de l’apprentissage en Afrique est la première étude approfondie des chances qu’a l’Afrique subsaharienne de parvenir à assurer à tous une éducation de base de qualité. L’étude a été préparée par une équipe de base constituée de Sajitha Bashir, practice manager pour l’éducation ; Marlaine Lockheed, enquêtrice principale  ; Elizabeth Ninan, spécialiste principale de l’éducation et chef d’équipe de projet ; et Jee-Peng Tan, consultante principale en éducation. Fadila Caillaud, chef de programme et chef d’équipe de projet et, Sue Berryman, Ernesto Cuadra, Kebede Feda, Keith Hinchliffe,  Ramahatra Rakotomalala, Michele Riboud et Serge Theunynck ont grandement contribué à l’étude. Salman Asim, Natasha De Andrade Falcao, Saori Imaizumi, Eema Masood, Martin Moreno, Quynh Nguyen, Tanya Savrimootoo et Armend Tahirsylaj ont assuré l’analyse des recherches. German Caruso, Luis Crouch, Pierre Varly et Quentin Wodon ont enrichi le document de leurs analyses contextuelles. Les monographies des pays ont été préparées par Anais Loizillon qui a bénéficié du concours d’Eunice Yaa Brimfah Ackwerh, Ruth Charo, Hamoud Abdel Wedoud Kamil, Mouhamadou Moustapha Lo, Deborah Newitter Mikesell, Hiroshi Saeki, Shobhana Sosale et Girma Woldetsadik. M. Fred O. Matiang’I, ancien secrétaire général du ministère de l’Éducation du Kenya  ; Mme Leela Devi Dookun-Luchoomun, Ministre de l’Éducation et des Ressources Humaines, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique de l’île Maurice  et ; Mme Hassana Alidou, Ambassadeur de la République du Niger aux États-Unis et au Canada, ont tous généreusement accepté de relire la présentation générale de l’étude et ont donné de précieuses indications à l’équipe. L’équipe exprime sa gratitude pour la supervision et le soutien apportés par le pôle mondial d’expertise en éducation de la Banque mondiale, notamment à ix x   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Jaime Saavedra, directeur principal  ; Luis Benveniste, directeur  ; Meskerem Mulatu, practice manager et ; Halil Dundar, practice manager. Nos remercie- ments s’adressent aussi à Makhtar Diop, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique et à Lynne Sherburne-Benz, conseillère régionale principale, pour leur rôle moteur et leur détermination à améliorer la qualité de l’éducation dans la région. L’équipe salue aussi les précieuses contributions des experts ayant examiné l’étude, notamment Samer Al-Samerai, Halil Dundar et Toby Linden qui l’ont examinée au stade de la note conceptuelle. Amit Dar, David Evans, Birger Fredriksen, James Habyarimana, Juan Manuel Moreno et un expert ayant requis l’anonymat, ont fait des observations détaillées sur l’intégralité de l’ouvrage. L’équipe a, en outre, bénéficié des conseils et des observations de Deon Filmer, Toby Linden et Halsey Rogers, ainsi que de nombreuses autres personnes durant la préparation de l’étude. L’équipe est reconnaissante à Rosario Aristorenas, Germaine Ethy et Celia dos Santos pour le soutien administratif et logistique apporté pendant toute la durée de l’étude. Abréviations CONFEMEN Conférence des ministres de l’Éducation des États et gouvernements de la francophonie EGRA Évaluation des compétences fondamentales en lecture SIGE Système d’information et de gestion de l’éducation PASEC Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN PIRLS Programme international de recherche en lecture scolaire (Progress in International Reading Literacy Study) PISA Programme international pour le suivi des acquis des élèves SACMEQ Consortium de l’Afrique australe et orientale pour le pilotage de la qualité de l’éducation SDI Indicateurs de prestation de services STEP Enquête sur les compétences au service de l’emploi et de la productivité TIMSS Tendances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences (Trends in International Mathematics and Science Study) ISU Institut de statistique de l’UNESCO UNESCO Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture xi Présentation générale Introduction et cadre de l’étude Le capital de connaissances est vital pour le développement futur de l’Afrique Grâce au capital de connaissances, les pays peuvent exploiter la mine d’informa- tions présente dans le monde pour développer leurs économies et améliorer le bien-être de leurs citoyens. À l’instar des autres régions, l’Afrique subsaharienne se doit de développer cette ressource pour ne pas rester à la traîne. La région entre dans une nouvelle phase de développement économique marquée par une diversification de l’économie et une urbanisation plus importantes, une intégra- tion économique plus étroite dans les marchés régionaux et internationaux et, un plus grand potentiel de création de nouveaux emplois dans des secteurs très productifs. La jeunesse, qui représente une proportion importante et grandis- sante de la population du continent, est la clé de la réalisation de cette transfor- mation, à condition qu’elle parvienne à l’âge adulte et accède au marché de l’emploi, dotée des qualités propres à faciliter l’acquisition, l’adaptation et la dif- fusion de nouvelles connaissances et technologies. Une jeunesse instruite aide- rait aussi à réduire les inégalités de revenus, à promouvoir la mobilité sociale, à encourager la cohésion sociale et, à relancer la transition de la fécondité qui est stagnante en Afrique subsaharienne. La scolarisation des enfants dans le primaire est la première étape de la construction du capital de connaissances de la région et, les pays d’Afrique sub- saharienne s’y sont employés au cours des 25 dernières années. De ce point de vue, la région a fait d’énormes progrès. Pour que ce capital de connaissances induise une transformation socioéconomique, il faudra cependant que tous les jeunes de la région totalisent 9 à 10 années d’éducation de base et soient dotés des compétences appropriées en lecture, en calcul et en science. Un grand nombre d’entre eux doit être instruit et formé au-delà de l’éducation de base. Le capital de connaissances reste faible, même si la donne s’inverse rapidement. 1 2   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Cet ouvrage porte sur la manière d’améliorer les acquis scolaires dans ­l’éducation de base tout en y élargissant l’accès et l’achèvement. Il tire des ­ enseignements—de la région et pour la région—sur “ ce qui fonctionne ” en matière de renforcement de l’apprentissage et sur la manière de mieux mettre en œuvre ce qui a réussi ailleurs. Cet ouvrage apporte également, à la documentation existante, ses nouvelles analyses approfondies fondées sur un ensemble de données multiples puisées dans la région et qui intègrent les résultats sur l’apprentissage, l’accès à l’école et le parcours scolaire des enfants au niveau de l’éducation de base. De la science à la prestation de services : Un cadre conceptuel L’étude repose sur un cadre conceptuel, « de la science à la prestation de ser- vices  », qui met en exergue trois grands domaines qui influencent l’apprentissage : • Les facteurs contextuels (sociaux, culturels, économiques, politiques et sécu- ritaires) qui affectent l’apprentissage de par leur incidence sur le comporte- ment et les capacités des enfants, des ménages et des gouvernements. • La science fait référence aux choix, basés sur des faits, de politiques et de programmes qui sont censés produire des résultats. • La prestation de services se réfère à l’exécution de ces politiques et ­ programmes, dans les écoles et les salles de classe, lieux d’apprentissage formel. Étant donné l’importance du contexte national dans la mesure des progrès réalisés et dans l’élaboration des stratégies d’amélioration, l’étude a défini des catégories permettant de classer les pays d’Afrique subsaharienne d’après les progrès accomplis en matière d’éducation au cours des 15 dernières années. Ces progrès ont aussi été examinés par rapport aux difficultés auxquelles ces pays étaient confrontés au début des années 90. Cette catégorisation permet de déga- ger d’éventuelles tendances sur la manière dont les pays ont surmonté des pro- blèmes communs, particulièrement d’ordre institutionnel et managérial, pour étendre la couverture éducative et améliorer l’apprentissage. Ceci permet à un pays de se comparer à d’autres pays dans la même situation, que ce soit dans le passé ou à l’heure actuelle. La catégorisation constitue aussi un bon point de départ pour évaluer les chances de progrès en matière d’éducation de base au cours des années à venir, tandis que les pays continuent d’œuvrer pour atteindre les objectifs de développement durable d’ici 2030.1 En ce qui concerne les leviers de l’apprentissage dans le contexte des pays d’Afrique subsaharienne (la science), l’étude rassemble des données tirées des sources suivantes : a) les analyses originales des corrélats de l’apprentissage à l’aide d’évaluations de l’apprentissage réalisées dans plus d’une vingtaine de pays de la région et ; b) un nombre croissant d’évaluations d’impact dans les pays de Présentation générale   3 la région et d’autres pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Comme pour la catégorisation des pays, ces analyses tiennent aussi compte des facteurs contextuels qui affectent l’apprentissage, en retenant surtout ceux qui touchent les enfants et les ménages. Pourtant, les données de la science ne suffisent pas pour obtenir des résultats sur le terrain. Des politiques et programmes solides doivent aussi être mis en œuvre de manière efficace (la prestation de services). L’école est le principal prestataire de services éducatifs, et les enseignants et l’administration sont les principaux acteurs impliqués. Il est essentiel que des institutions d’appui assurent le renforcement et la supervision systématiques de ces agents de pre- mière ligne. De telles institutions doivent s’assurer que les écoles se dotent d’en- seignants, d’installations, de supports didactiques et pédagogiques et d’autres intrants nécessaires afin d’offrir aux élèves un environnement propice à l’ensei- gnement et à l’apprentissage. Ces institutions doivent aussi offrir le soutien pro- fessionnel et l’encadrement dont ont besoin les enseignants et les dirigeants des écoles pour aider leurs élèves à mieux apprendre. Dans la présente étude, l’analyse de l’apprentissage met en lumière une grave crise de l’apprentissage en Afrique subsaharienne. Les systèmes éducatifs de la région, ainsi que toutes les principales politiques et interventions doivent, sans tarder, s’attaquer à ce qui peut être assimilé à une véritable catastrophe qui touche des cohortes d’âge successives. L’étude relève et examine quatre domaines prioritaires qui aideront les pays à mieux aligner leurs systèmes sur un pro- gramme d’apprentissage efficace, et à combler le fossé entre la science et la pres- tation de services au niveau de l’école et de la salle de classe. Il s’agit des interventions suivantes : • Achever le programme d’universalisation de l’éducation de base de qualité. Il s’agit de pallier les principales insuffisances de la prestation de services qui entravent l’entrée des enfants en première année d’étude, ainsi que leur apprentissage et leur progression scolaire ultérieure au niveau de l’éducation de base, de même que les fortes disparités dans l’apprentissage qui augmen- tent considérablement les risques de décrochage chez les enfants pauvres en milieu rural, déjà soumis à des pressions économiques les incitant à aban- donner les études. • Assurer une gestion et un encadrement efficaces des enseignants. Les ensei- gnants sont au cœur du processus d’enseignement et d’apprentissage et il est donc très important que les pays s’attaquent aux graves problèmes recensés dans la présente étude, notamment en ce qui concerne le recrutement, la préparation, le déploiement, la supervision et l’encadrement des enseignants au niveau de l’école. L’absentéisme est élevé chez les enseignants qui, par ail- leurs, n’ont pas les connaissances et les compétences suffisantes, ni un cadre de travail propice pour être efficaces. 4   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE • Augmenter le financement de l’éducation et consacrer les dépenses et les ­ rocessus budgétaires à l’amélioration de la qualité. Il faut des ressources plus p importantes et mieux alignées pour mettre en œuvre les bonnes idées ­ destinées à réaliser le programme d’actions de l’Afrique subsaharienne en matière d’éducation de base. Actuellement, dans de nombreux pays de la région, les dépenses par élève sont insignifiantes et ces faibles ressources sont généralement mal utilisées, comme en témoigne la répartition aléatoire des enseignants, les grandes disparités observées entre les écoles en termes de disponibilité du matériel didactique et des conditions de base, et les lacunes en matière d’apprentissage qui en résultent. • Combler le déficit de capacités institutionnelles. Comme cette étude le précise, remédier aux faiblesses des systèmes d’éducation de base en Afrique subsaha- rienne passe par un ensemble d’activités complexes, y compris la planifica- tion, la coordination, les négociations, la supervision des opérations, le suivi, les ajustements à mi-parcours, l’évaluation, la collecte et l’analyse des don- nées et, la communication. Ces fonctions sont, pour l’heure, fortement frag- mentées et la plupart des ministères de l’éducation de la région ne disposent pas des capacités techniques suffisantes pour les assumer. Il est vital d’agir dans ces quatre domaines prioritaires pour faire progresser les aspirations de la région en matière d’éducation de base. L’un des postulats de base de la présente étude est que les pays d’Afrique subsaharienne peuvent certes apprendre des systèmes éducatifs plus performants des pays à revenus plus élevés. Mais ils devraient aussi regarder de près d’autres pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, particulièrement en Afrique subsaharienne, qui ont fait des pro- grès à partir de situations similaires ou pires que les leurs. Ces pays seraient une source d’inspiration particulièrement pertinente. Cependant, apprendre d’autres pays ne doit pas leur faire oublier la tâche essentielle qui consiste en l’adaptation locale – notamment, l’examen attentif des contraintes et des opportunités locales. Contrastes entre les pays : Progrès en matière d’éducation et défis contextuels Depuis la Conférence mondiale sur l’éducation pour tous (EPT) qui s’est tenue à Jomtien (Thaïlande) en 1990, les progrès accomplis par l’Afrique sub- saharienne pour l’universalisation de l’enseignement primaire sont remar- quables. Le taux brut de scolarisation moyen au primaire a augmenté dans la région, passant de 68% en 1990 à 98% en 2015 ; le nombre d’enfants scolarisés passant de 63 millions à 152 millions d’élèves, dont 78% d’enfants en âge d’être scolarisés au primaire.2 En Afrique subsaharienne, les systèmes éducatifs offrent de plus en plus la possibilité aux enfants qui achèvent les études pri- maires d’accéder à l’enseignement secondaire ; ils emploient également des millions d’enseignants. Présentation générale   5 Vingt-cinq années d’une expansion de l’éducation de base soutenue et contrastée Les exemples de l’Éthiopie, du Mozambique et du Togo (graphique P.1) permet- tront d’illustrer le rythme et la diversité des trajectoires en termes d’expansion. En 1990, dans ces pays, seule une fille sur cinq censée être en dernière année du primaire l’était effectivement. En 2015, la proportion était passée à 53%, 45% et 79% respectivement. L’étude définit quatre groupes de pays et décrit les différentes trajectoires empruntées par chacun vers l’expansion de l’éducation de base, en se fondant sur les taux bruts de scolarisation dans le primaire, la proportion d’enfants non scolarisés et les taux de rétention dans l’éducation de base. Bien que la durée des études dans le primaire et dans le premier cycle de l’enseignement secondaire n’est pas la même dans tous les pays d’Afrique subsaharienne, dans le présent ouvrage, les données ont été examinées de manière standardisée, en considérant la première année de scolarisation jusqu’à la sixième année comme étant l’ensei- gnement primaire et la septième à la neuvième année comme étant le premier cycle de l’enseignement secondaire. Les quatre groupes de pays sont les suivants (tableau P.1) : • Les pays « confirmés » (Groupe 1) affichent des taux bruts de scolarisation élevés dans l’année de référence (2000) et, vers 2013, de faibles taux de Graphique P.1  Taux brut d’admission des filles en dernière année du cycle primaire en Éthiopie, au Mozambique et au Togo en 1990 et en 2015 100 TBA en dernière année du primaire 80 Togo, 79 60 Éthiopie, 53 Mozambique, 45 40 20 ~18 0 1990 2015 Source : Base de données de l’Institut de statistique de l’UNESCO (ISU) (consultée le 30 mars 2017) http://data​ .uis.unesco.org. Note : Le taux brut d’admission en dernière année du primaire est défini comme le nombre total des nouveaux élèves admis en dernière année d’études primaires, indépendamment de leur âge et est exprimé en pourcentage de la population théoriquement en âge d’entamer cette dernière année. 6   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE non-scolarisation dans le primaire pour les enfants d’âge scolaire et, des taux de rétention dans le primaire proches de 100% (au cours de l’année la plus récente pour laquelle des données sont disponibles). • Les pays « ayant émergé » (Groupe 2) ont enregistré des taux bruts de scola- risation élevés dans le primaire en 2000 et en 2013 et, de faibles taux d’enfants non scolarisés, mais dont les taux de rétention dans le primaire sont encore en-deçà de 80%. • Les pays « émergents » (Groupe 3) ont fait des progrès en matière de scolari- sation et avaient de faibles taux bruts de scolarisation observés dans le pri- maire en 2000 qui ont augmenté pour dépasser 90% en 2013 ; cependant, le taux d’enfants non scolarisés est élevé et les taux de rétention au primaire sont faibles. • Les pays « en retard » (Groupe 4) qui ont globalement peu avancé : leurs taux bruts de scolarisation dans le primaire étaient faibles en 2000 et en 2013 ; le taux d’enfants non scolarisés est élevé et les taux de rétention dans le primaire sont faibles. Sur le graphique P.2, les pays sont classés à l’intérieur de chaque groupe selon leurs taux bruts de scolarisation vers 2013.3 Certes, ces taux s’améliorent, mais plus de 50 millions d’enfants en âge de fréquenter l’école primaire ou le premier cycle du secondaire sont non scolarisés et, la plupart n’ont jamais été inscrits à l’école. Les pays « en retard » (Groupe 4) sont ceux qui ont le plus à faire pour élargir la couverture de leur système éducatif ; mais les pays appartenant aux quatre groupes ont l’ambition commune d’améliorer les acquis scolaires, comme nous le verrons plus loin dans ce document. Tableau P.1  Définition des quatre niveaux de progrès dans l’enseignement primaire dans les pays d’Afrique subsaharienne, 2000–2013 Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4 Mesure confirmés ayant émergé émergents en retard Taux brut de scolarisation, 2000 Élevé Élevé Faible Faible Taux brut de scolarisation, 2013 ~ 100% Élevé Élevé Faible Taux de non-scolarisation, année la plus récente Faible Faible Haut Élevé pour laquelle des données sont disponibles Taux de rétention dans l’enseignement ~100 % Faible Faible Faible primaire, 2013 Note : Les taux bruts de scolarisation sont élevés s’ils sont égaux ou supérieurs à 90% et faibles s’ils sont inférieurs à 90%. Les taux de non-scolarisation sont élevés s’ils sont égaux ou supérieurs à 20% et faibles s’ils sont inférieurs à 20%. Les taux de rétention sont élevés s’ils sont égaux ou supérieurs à 80% et faibles s’ils sont inférieurs à 80%. Présentation générale   7 Graphique P.2  Évolution de l’accès à l’enseignement primaire dans 45 pays d’Afrique subsaharienne, par Groupes, de 2000 à 2013 160 140 120 Pourcentage 100 80 TBS 60 40 20 0 Afrique du Sud Zimbabwe Maurice Ghana Congo Botswana Kenya Lesotho Cap Vert Namibie Sao Tomé-et-Principe Eswatini Gabon RDC Tanzanie Comores Cameroun Ouganda Togo Rwanda Malawi Nigeria Gambie Côte d’Ivoire Mauritanie Éthiopie Zambie Mozambique Guinée-Bissau Bénin Burundi Sierra Leone Madagascar Angola Érythrée Niger Soudan Mali Sénegal Guinée équatoriale Burkina Faso Guinée RCA Libéria Tchad Groupe 1a Groupe 2b Groupe 3c Groupe 4d Confirmés Ayant émergé Émergents En retard Enfants non-scolarisés Taux brut de scolarisation 2000 Taux brut de scolarisation 2013 Sources : Pour le taux brut de scolarisation (TBS) et le taux de rétention : analyse de la base de données de l’Institut de statistique de l’UNESCO (ISU) (consultée le 18 juillet 2016) http://data.uis.unesco.org ; l’Institut international de planification de l’éducation (IIPE) de l’Unesco, Pôle de Dakar, version 19 de la base de données des indicateurs. S’agissant du pourcentage d’enfants non scolarisés : analyse des micro-données tirées de l’enquête Emploi de l’année la plus récente (Afrique du Sud), des Enquêtes en grappes à indicateurs multiples (Mauritanie, Soudan et Zimbabwe), des Enquêtes démographiques et de santé (Bénin, Burundi, Cameroun, Gabon, Gambie, Kenya, RDC et Sénégal), et des Études sur la mesure des niveaux de vie (tous les autres pays ayant fait des enquêtes auprès des ménages). Pour les pays n’ayant pas fait d’enquêtes auprès des ménages (Cap Vert, Érythrée, Guinée équatoriale, Guinée-Bissau, île Maurice et République centrafricaine) : analyse de la base de données de l’ISU. Note : Chaque pays est présenté dans son groupe organisé en fonction de son taux brut de scolarisation dans le primaire en 2013, indiqué par un losange bleu. Le taux brut de scolarisation dans le primaire vers 1995-2000 est représenté par une ligne rouge (en fonction de la dernière année pour laquelle le pays dispose de données) ; les taux supérieurs à 100% représentent les élèves qui n’ont pas l’âge d’être scolarisés dans le primaire mais qui y sont quand même inscrits. Pour simplifier la présentation, le graphique ne reprend pas les données sur les taux de rétention utilisées dans la définition des groupes de pays. Ces données sont exposées dans le 1er chapitre du livre. a. les pays « confirmés », (Groupe 1), se caractérisent par de forts taux bruts de scolarisation enregistrés en 2000, et proches de 100% en 2013 ; de faibles taux de non-scolarisation (inférieurs à 20%) au cours de l’année la plus récente pour laquelle des données existent et ; un taux de rétention de près de 100% dans l’enseignement primaire en 2013. b. les pays « ayant émergé », (Groupe 2), se caractérisent par des taux bruts de scolarisation élevés (égaux ou supérieurs à 90%) en 2000 et en 2013 ; de faibles taux de non-scolarisation (inférieurs à 20%) au cours de l’année la plus récente pour laquelle des données existent et ; un faible taux de rétention (inférieur à 80%) dans l’enseignement primaire en 2013. c. les pays « émergents », (Groupe 3), se caractérisent par des taux bruts de scolarisation faibles (inférieurs à 90%) en 2000, et élevés (égaux ou supérieurs à 90%) en 2013 ; des taux de non-scolarisation élevés (égaux ou supérieurs à 20%) au cours de l’année la plus récente pour laquelle des données existent et ; un faible taux de rétention (inférieur à 80%) dans l’enseignement primaire en 2013. d. les pays « en retard », (Groupe 4), se caractérisent par des taux bruts de scolarisation faibles (inférieurs à 90%) en 2000 et en 2013 ; des taux de non-scolarisation élevés (égaux ou supérieurs à 20%) au cours de l’année la plus récente pour laquelle des données existent et ; un faible taux de rétention (inférieur à 80%) dans l’enseignement primaire en 2013. 8   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Des défis sociaux et économiques extrêmement différents Les pays d’Afrique subsaharienne ont été confrontés à des difficultés écono- miques et sociales extrêmement différentes qui ont mis à mal leurs systèmes éducatifs. L’étude en a principalement recensé sept, à savoir : une forte popu- lation globale, l’augmentation rapide de la population en âge scolaire, le recul ou la stagnation du produit intérieur brut (PIB) par habitant, de fortes inéga- lités de revenus, des niveaux élevés de pauvreté, la grande diversité linguis- tique et, la fréquence des conflits. Sur la base du nombre de défis auxquels un pays a fait face, du début jusqu’au milieu des années 90, il est possible de dire qu’il a fait face à peu de défis, quelques défis ou à de nombreux défis. Parce que les conditions varient considérablement d’un pays à l’autre à l’intérieur de chaque groupe, leur classification est inévitablement simplifiée, mais reste pertinente.4 Le tableau P.2 combine les deux dimensions : a) les défis initiaux et b) les progrès dans l’enseignement primaire. Ce cadre bidimensionnel permet aux pays d’Afrique subsaharienne de s’autoévaluer, d’apprendre des autres et d’identifier les politiques et stratégies de mise en œuvre prometteuses utilisées par des pays confrontés aux mêmes défis. Comme l’on pouvait s’y attendre, l’ampleur des défis auxquels un pays a fait face dans les années 90 semble avoir une incidence sur les progrès accomplis dans le secteur de l’éducation. Les pays ayant connu peu de défis se retrouvent principalement dans le groupe des pays « confirmés », et ceux ayant fait face à de nombreux défis sont dans le groupe des pays « en retard ». Le grand nombre de pays qui sont dans les groupes « ayant émergé » et « émergents » indique bien que l’Afrique subsaharienne doit encore atteindre son objectif d’accroître l’accès des enfants à l’enseignement primaire et empêcher l’abandon scolaire. Trois des pays les plus peuplés de la région - la République Démocratique du Congo (82  millions d’habitants), l’Éthiopie (102  millions d’habitants) et le Nigeria (186 millions d’habitants) - figurent dans ces groupes et ensemble totalisent plus de 40 pourcent de la population non scolarisée de la région. La plupart des pays du groupe « en retard » sont soit francophones, soit en proie à des crises prolongées, notamment de violents conflits (Érythrée, Libéria et Soudan par exemple). Les conflits qui touchent de nombreux pays d’Afrique subsaharienne compromettent l’évolution du secteur de l’éducation. Ainsi, quelques années de conflit en Côte d’Ivoire ont fait reculer d’une décennie le nombre d’années d’études moyen. Pourtant, l’ampleur des défis n’augure pas nécessairement de l’importance des progrès réalisés en matière d’éducation. Certains pays confrontés à de  nombreux défis, il y a 25  ans, sont néanmoins dans le Groupe 1 (« ­confirmés »). D’autres ayant connu moins de défis au cours de la même période ont fait moins de progrès. Ainsi, il est possible de surmonter Présentation générale   9 Tableau P.2  Progrès dans l’enseignement primaire par rapport aux défis initiaux dans les pays d’Afrique subsaharienne, par Groupes, entre 1990 et 2015 Ampleur des défis dans les années Groupe 1 : Groupe 2 : Groupe 3 : Groupe 4 : 90a Confirmés Ayant émergé Émergents En retard Peu Botswana, Cap Vert, Comores Mauritanie Eswatini, Ghana, Lesotho, île Maurice, Sao Tomé-et-Principe Quelques Congo, Gabon, Cameroun, Malawi, Bénin, Côte d’Ivoire, Burkina Faso, Guinée, Namibie Tanzanie, Togo Gambie, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Madagascar, Sierra Mali, Sénégal Leone, Zambie Nombreux Afrique du Sud, RDC, Rwanda, Angola, Burundi, République Kenya, Zimbabwe Ouganda Éthiopie, Mozambique, centrafricaine, Tchad, Nigeria Érythrée, Libéria, Niger, Soudan Source : Défis initiaux compilés d’après Lewis, Simons et Fennig 2016 ; UN DESA 2015 ; base de données des indicateurs du développement dans le monde (juillet et octobre 2016), https://data.worldbank.org/products​ /wdi ; Armed Conflict Location & Event Data (ACLED) version 6, https://www.acleddata.com/data/ ; détails fournis dans le 1er chapitre du livre. Note : Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2. Le tableau ne retient pas les Seychelles, la Somalie et le Soudan du Sud qui ne disposent pas de données sur les progrès réalisés en matière de scolarisation. a. Les pays sont classés par rapport à chacun des sept défis recensés (les détails sont présentés au 1er chapitre du livre). Considérant les 38 pays disposant de données sur l’ensemble des sept défis identifiés et les 2 pays ne disposant de données que sur six de ces défis, les pays ayant connu « peu de défis » appartiennent au quartile le moins touché par au moins trois des défis ; les pays ayant connu « de nombreux défis » se trouvent dans le quartile le plus touché par au moins trois des défis et ; tous les autres pays figurent dans la catégorie de ceux ayant connu « quelques défis ». Il existe des exceptions, trois pays initialement classés comme ayant connu « quelques défis » (Afrique du Sud, Éthiopie et Zimbabwe) et un pays d’abord classé comme ayant connu « peu de défis » (Rwanda) ont été reclassés comme ayant connu « de nombreux défis » sur la base de la connaissance du pays par les services de la Banque mondiale. Pour six des huit pays ne disposant pas de données pour deux défis ou plus (Érythrée, Guinée équatoriale, Libéria, île Maurice, Soudan et Togo), le classement s’est fait sur la base des données disponibles et la connaissance du pays par les services de la Banque. les  défis  et d’améliorer l’accès à l’éducation, comme l’illustre ces faits saillants : • Dans le groupe des pays ayant connu « de nombreux défis », l’Afrique du Sud, le Kenya et le Zimbabwe ont maintenu des taux bruts de scolarisation élevés dans le primaire, tandis que le Rwanda et l’Ouganda ont fortement amélioré les leurs et réduit les taux de non-scolarisation. • Dans le groupe des pays ayant connu «  quelques défis  », le Cameroun, le Malawi, la Tanzanie et le Togo ont amélioré leurs taux bruts de scolarisation dans le primaire et réduit la non-scolarisation, alors que plusieurs pays du même groupe ont enregistré de modestes, voire faibles progrès. • Dans le groupe des pays ayant connu « peu de défis », les Comores et la Mauritanie ont moins progressé que plusieurs pays ayant été confrontés à plus de défis au départ. 10   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Évaluer le capital de connaissances en Afrique subsaharienne Le capital de connaissances d’un pays est difficilement mesurable. Le nombre moyen d’années d’études, l’indicateur le plus couramment utilisé par le passé, est aujourd’hui considéré comme inapproprié et inadapté. Il est remplacé par une variété d’outils de mesure directe des compétences en lecture, calcul et autres aptitudes. Cependant, comparer les pays sur la base de l’apprentissage est loin d’être simple. Les données varient en fonction des tests utilisés pour l’évaluation de l’apprentissage, ainsi que de l’étendue de la couverture nationale. Près de la moi- tié des pays d’Afrique subsaharienne participent à des évaluations de l’appren- tissage à grande échelle, au niveau régional ou international. Cependant, il n’est possible de comparer que les pays ayant participé à la même évaluation. La plupart des évaluations visent essentiellement l’apprentissage dans le primaire, mesurent quelques aptitudes et ne sont généralement pas comparables dans le temps. Certains des pays les plus peuplés de la région (RDC, Éthiopie et Nigeria) n’ont participé qu’à peu d’évaluations. Malgré ces limites, les informations dis- ponibles suffisent pour donner une idée des niveaux d’apprentissage des diffé- rents groupes d’âge. Augmentation du capital de connaissances à partir de faibles niveaux Le graphique P.3 présente la participation et la performance des pays à diverses évaluations récentes de l’apprentissage au niveau régional et international. Chaque point indique la performance d’un pays à une évaluation : les points verts signifient qu’au moins 75% des élèves ont atteint le niveau minimum de compétences requis à cette évaluation, tandis que les points rouges indiquent que moins de 25% ont atteint ce niveau. Si l’on exclut la plupart des pays du Groupe 1 et le Burundi, dans la quasi-totalité des évaluations, moins de 50% des élèves ont atteint le niveau minimum absolu d’apprentissage. Dans de nom- breuses évaluations des pays des Groupes de 2 à 4, moins de 25% des élèves ont atteint ce niveau. Quel est le niveau minimum de compétence requis ? Il varie clairement d’une évaluation à l’autre et reflète ce que l’on attend des élèves, généralement lorsqu’ils atteignent un niveau d’étude précis.5 Le « niveau minimum » correspond à un score bas dans toutes les évaluations. Ainsi, en ce qui concerne la lecture dans les petites classes, il s’agira de tout score au-dessus de zéro. Pour le test de lecture SDI, destiné aux enfants en quatrième année d’études, le niveau minimum sera la capa- cité à lire une phrase à haute voix. En ce qui concerne le test SACMEQ en mathé- matiques, pour les enfants en sixième année, ce sera la capacité à traduire une information verbale en opérations arithmétiques.6 Pour le test TIMSS en mathé- matiques destiné aux élèves en huitième année d’études (généralement en neu- vième année en Afrique subsaharienne), il s’agira de la connaissance des nombres Présentation générale   11 Graphique P.3  Proportion de participants aux tests ayant atteint le niveau minimum lors de récentes évaluations de l’apprentissage en Afrique subsaharienne, par pays et par Groupe Proportion de participants ayant atteint le niveau minimum ≥75 50–74 25–49 <25 Maurice Botswana Kenya Afrique du Sud Congo Eswatini Seychelles Lesotho Namibie Zimbabwe Ghana Togo Cameroun Ouganda Malawi Tanzanie Rwanda Burundi Bénin Côte d’Ivoire Zambie Éthiopie Mozambique Nigeria Sénégal Burkina Faso Tchad Niger Mali Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4 Sources : Tiré de la base de données EdStats de la Banque mondiale sur l’évaluation des compétences fondamentales en lecture (EGRA) (consultée le 4 janvier 2017), http://datatopics.worldbank.org/education/ ; Bold et col. 2017 ; PASEC 2015 ; Martin et col. 2016 ; MOEST 2017 ; Mullis et col. 2016 ; Valerio et col. 2016 ; Walker 2011. Note : Le graphique récapitule les résultats de sept évaluations récentes dans trois matières (lecture, mathématiques et science) pour différentes années d’études et groupes d’âge : Le test EGRA en lecture pour la deuxième et la troisième année de scolarisation ; le test PASEC (Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN) en mathématiques et en lecture pour la deuxième et la sixième année ; le test SDI (Indicateurs de prestation de services) en mathématiques et en lecture pour la quatrième année de scolarisation ; le test SACMEQ (Consortium de l’Afrique australe et orientale pour le pilotage de la qualité de l’éducation) IV en mathématiques et en lecture pour la sixième année ; le test TIMSS (Tendances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences) 2015 en mathématiques et en sciences pour la huitième et la neuvième année ; le test PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) 2009 Plus en mathématiques, lecture et sciences destiné aux élèves âgés de 15 ans et ; l’enquête STEP (Enquête sur les compétences au service de l’emploi et la productivité) sur les adultes en milieu urbain, âgés de 15 à 64 ans pour les compétences en lecture. Les pays sont présentés par ordre décroissant à l’intérieur de chaque groupe, en fonction du nombre d’évaluations auxquelles chaque pays a participé. Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2. entiers et décimaux. Pour tous les pays, une proportion de 75% des élèves affi- chant une performance minimale serait une cible raisonnable (ce qui signifie que tous les points seraient en vert sur le graphique P.3). Augmenter le niveau d’alphabétisation au sein de la population adulte L’un des indicateurs les plus largement accessibles de l’apprentissage est la pro- portion des personnes en âge de travailler qui déclarent savoir lire et écrire. Il ressort des enquêtes auprès des ménages que le taux de jeunes qui déclarent savoir lire et écrire est élevé : dans l’ensemble des 35 pays disposant de données, 12   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE 70% au moins des jeunes de 15 à 19 ans déclarent savoir lire et écrire. Pourtant, les tests de compétence en lecture - mesures des opérations cognitives requises pour les tâches diverses et complexes que doivent accomplir les adultes au ­quotidien - donnent à penser que ces chiffres seraient surestimés (OCDE 2013). Par exemple, 83% des jeunes au Ghana et 93% au Kenya indiquent qu’ils sont « alphabétisés », mais moins de 47% des jeunes adultes (15 à 34 ans) au Ghana et 65% au Kenya ont démontré qu’ils avaient un niveau d’alphabétisation fonctionnelle.7 L’alphabétisation fonctionnelle semble s’améliorer dans les deux pays car les jeunes travailleurs affichent de meilleures performances que leurs aînés. Parmi les travailleurs âgés de 35 ans au moins, seulement 27% au Ghana et 55% au Kenya ont démontré qu’ils avaient un niveau d’alphabétisation fonctionnelle - nettement moins que les pourcentages correspondants chez les travailleurs plus jeunes. Les améliorations récentes dans la couverture éducative et le niveau d’instruction semblent changer la donne dans ces deux pays qui appartiennent d’ailleurs au Groupe 1 des pays ayant fait le plus de progrès dans l’enseignement primaire. Des compétences faibles qui s’améliorent chez les jeunes générations Si les jeunes générations améliorent leur capital de connaissances, le niveau général des compétences des adultes augmentera rapidement en raison de la proportion élevée de jeunes dans les pays d’Afrique subsaharienne. La plupart des jeunes de la région se lanceront sur le marché du travail avec le niveau d’ins- truction acquis au premier cycle de l’enseignement secondaire (environ neuf années d’études) ou moins (premier cycle du secondaire inachevé ou environ six années d’enseignement primaire). Il est donc instructif d’évaluer les compé- tences de ces jeunes personnes à la fin de ces cycles. Les niveaux d’apprentissage dans le premier cycle du secondaire jadis faibles, s’améliorent. Les données sur l’apprentissage dans le premier cycle du secon- daire (approximativement de la septième à la neuvième année d’études) sont peu nombreuses en Afrique subsaharienne. Les quatre pays ayant participé à l’une des deux évaluations internationales, ci-après, représentent une source de données : Le test TIMSS ou le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) Plus.8 Les évaluations nationales constituent une autre source de données, même si dans la plupart des cas, leurs propriétés de mesure ne leur permettent pas de rendre compte des évolutions dans le temps. La moyenne des scores au test TIMSS en mathématiques des élèves en hui- tième ou en neuvième année au Botswana, au Ghana et en Afrique du Sud, et la moyenne des scores à l’étude PISA Plus des élèves de 15 ans à l’île Maurice - tous des pays du Groupe 1 - étaient nettement en-deçà de celles des élèves d’autres pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, et plusieurs écarts types en-­ dessous des scores des élèves des pays à revenu élevé. Présentation générale   13 Le Ghana et l’Afrique du Sud ont tout de même considérablement progressé par rapport à une position initiale peu reluisante et, une proportion grandis- sante d’élèves de huitième et de neuvième année a atteint le score de référence international qualifié de bas en mathématiques, lors des évaluations les plus récentes (TIMSS 2011 ou 2015) par rapport aux précédentes (TIMSS 2003 ou 2007).9 Les résultats de l’évaluation nationale de l’apprentissage en Éthiopie montrent aussi des améliorations entre 2011 et 2015 dans toutes les matières pour les élèves en huitième année d’études. Un nombre considérablement moins élevé d’élèves a obtenu des notes en-deçà du minimum en 2015, comparé à 2011. En mathématiques par exemple, la proportion de ces élèves est passée de 45% en 2011 à 38% en 2015. Les performances évaluées à la fin du cycle primaire s’améliorent aussi dans certains pays. C’est le cas notamment des performances des élèves en sixième année de scolarisation dans plusieurs pays d’Afrique australe et orientale. La moyenne des scores au test SACMEQ en mathématiques et en lecture a aug- menté entre 2007 et 2013, mais les scores pourraient ne pas être totalement comparables au fil du temps (graphique P.4). Graphique P.4  Scores moyens au test SACMEQ en mathématiques pour la sixième année de scolarisation, pays participants d’Afrique australe et orientale, par Groupes, entre 2000 et 2013 700 Maurice Kenya 600 Eswatini Botswana Afrique du Sud Tanzanie Zimbabwe Lesotho Ouganda Mozambique 500 Namibie Malawi Zambie 400 SACMEQ SACMEQ SACMEQ SACMEQ SACMEQ SACMEQ SACMEQ SACMEQ SACMEQ II III IV II III IV II III IV Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Sources : Tiré des données dans Bethell 2016 ; MOEST 2017. Note : SACMEQ = Consortium de l’Afrique australe et orientale pour le pilotage de la qualité de l’éducation qui a évalué les compétences des élèves de sixième année en mathématiques en 2000 (SACMEQ II), 2007 (SACMEQ III), et 2013 (SACMEQ IV). Le Mozambique et la Tanzanie n’ont fourni aucune donnée au titre du SACMEQ IV. Les données des Seychelles et de Zanzibar ne sont pas indiquées. Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2 ; aucun pays du Groupe 4 n’a participé à l’évaluation SACMEQ. 14   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE La tendance de la performance des pays au test SACMEQ est assez constante, les pays du Groupe 1 enregistrant généralement les moyennes les plus élevées. Le Kenya et l’île Maurice obtiennent régulièrement les meilleures performances. En dépit des nombreuses difficultés qu’il a connues ces dix dernières années, le Zimbabwe s’en sort relativement bien. Par ailleurs, le Malawi (Groupe 2) et la Zambie (Groupe 3) affichent des performances relativement faibles qui se sont néanmoins améliorées en 2013. En moyenne, dans tous les 14 pays participants, les performances d’un tiers des élèves de sixième année ne dépassaient pas le niveau élémentaire en lecture et en calcul : 32% en lecture et 31% en mathématiques. Sur les 10 pays francophones ayant participé au Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN (PASEC) 2014, la moitié seulement des élèves évalués a atteint un niveau de « compétence suffisant » en mathématiques et en lecture.10 La langue dans laquelle l’évaluation a été réalisée semble avoir influencé ces résultats, comme le révèle la prochaine section sur les lacunes dans l’apprentissage. La plupart de ces pays appartiennent au Groupe 4 des pays « en retard » qui sont encore loin de l’objectif d’universalisation de l’enseignement primaire. Seul un des pays a connu quelques défis dans les années 90, six ont connu quelques défis et quatre de nombreux défis. Une analyse des différentes évaluations de l’enseignement primaire réalisées récemment en Afrique subsaharienne permet de dresser les principaux constats suivants : • Au milieu et en fin de cycle primaire, les élèves ont du mal à lire et à écrire. Les éva- luations SDI d’élèves en quatrième année en lecture et en mathématiques dans 10 pays ont corroboré certaines des conclusions tirées lors d’autres évaluations.11 Les scores étaient globalement faibles, en moyenne en dessous de 50% dans six pays ; les élèves ont enregistré de meilleures performances en Éthiopie, au Kenya et au Sénégal, alors que ceux du Malawi, du Mozambique12 et de l’Ouganda avaient des scores relativement plus faibles. L’examen détaillé du test SDI en lecture montre que dans sept pays, les élèves en quatrième année n’ont pas encore acquis les compétences de base : dans cinq des pays concernés, moins de 10% des élèves pouvaient lire un paragraphe et, dans quatre de ces pays, moins de 20% pou- vaient lire une phrase (graphique P.5). Le Botswana et l’Afrique du Sud ont par- ticipé au Programme international de recherche en lecture scolaire (PIRLS) qui évalue également les compétences en lecture des élèves de quatrième année. Les élèves en sixième année au Botswana et en cinquième année en Afrique du Sud ont enregistré des scores considérablement inférieurs à ceux de leurs homolo- gues de quatrième année en Amérique latine et au Maroc. • Le problème des faibles résultats scolaires se pose dès les petites classes. L’enseignement de la lecture, qui est vital pour l’évolution scolaire de l’enfant, est largement inefficace dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne. Les tests d’évaluation des compétences fondamentales en lecture (EGRA) Présentation générale   15 Graphique P.5  Compétences sélectionnées en lecture, élèves en quatrième année dans sept pays SDI, par Groupes, pour l’année la plus récente 100 80 Pourcentage 60 40 20 0 Kenya Tanzanie Togo Ouganda Mozambique Nigeria Sénégal Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4 l’élève peut lire une lettre (%) l’élève peut lire un mot (%) l’élève peut lire une phrase (%) l’élève peut lire un paragraphe (%) Source : Tiré des données dans Bold et col. 2017. Note : SDI = Indicateurs de prestation de services. Les tests en lecture ont été faits en portugais au Mozambique ; en français au Sénégal et au Togo ; à la fois en kiswahili (70% de participants pour un score moyen de 70%) et en anglais (30% de participants pour un score moyen de 40%) en Tanzanie ; et en anglais au Kenya, au Nigeria et en Ouganda. Dans tous les pays, chaque enfant passait individuellement le test de langue devant un agent recenseur qui lui donnait les instructions dans une langue qu’il comprend. Deux autres pays participants, Madagascar et le Niger, ne sont pas inclus dans l’analyse. Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2. menés dans plusieurs pays de la région montrent que 50 à 80% des enfants en deuxième année étaient incapables de répondre à une seule question tirée d’un court passage qu’ils avaient lu dans la langue d’enseignement. Un grand nombre ne pouvait lire le moindre mot. • Les compétences en lecture sont plus élevées lorsque l’enseignement est dispensé dans la langue parlée à la maison ou dans une langue locale. Plus de 50% des enfants en deuxième ou troisième année au Burundi, en Éthiopie et en Tanzanie (dans tous ces pays l’enseignement dans les petites classes est dispensé en langues locales) ont obtenu des scores supérieurs à zéro au test EGRA en compréhension de la lecture. En Tanzanie par exemple, 60% des enfants en deuxième année ont obtenu des scores supérieurs à zéro en Kiswahili, contre 5% seulement pour ceux évalués en anglais. Les scores au test SDI en lecture des élèves tanzaniens en qua- trième année, évalués en Kiswahili, étaient également de loin plus élevés que les scores de ceux évalués en anglais (70% contre 40%).13 Importantes lacunes dans l’apprentissage liées à la langue et à la situation socioéconomique des ménages Les importantes lacunes dans l’apprentissage des élèves indiquent que certaines populations sont délaissées, ce qui laisse présager des inégalités dans les progrès économiques et sociaux à l’âge adulte, susceptibles par ailleurs de miner la cohé- sion sociale globale. 16   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Plusieurs caractéristiques de l’élève sont fortement associées aux acquis de l’apprentissage. Les nouvelles analyses faites dans le cadre de cette étude ont mis en évidence des problèmes de performance persistants et importants dans de nombreux pays. Les élèves issus de ménages à la situation socioéconomique précaire, moins habitués à parler la langue d’enseignement et vivant dans des communautés rurales, obtiennent généralement des performances plus faibles aux tests de lecture et de mathématiques que ceux issus de familles moins défa- vorisées ; dans certains cas, les différences dans la performance sont liées au genre. L’écart de performance entre les enfants qui parlent la langue d’enseigne- ment (et de l’évaluation) au moins de temps en temps à la maison et ceux qui ne le font pas est particulièrement frappant (graphique P.6). Malheureusement, ces caractéristiques des élèves se confondent parfois avec celles liées à la qualité des écoles, également source de disparités. Les élèves en milieu rural viennent généralement de familles plus défavorisées et moins habi- tuées à la langue d’enseignement officielle. Les écoles accueillant des élèves pauvres, en milieu rural, ont généralement moins de ressources d’apprentissage que celles qui accueillent des élèves plus favorisés en milieu urbain. Dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, l’apprentissage est large- ment inégal d’une école à l’autre. Pour les 25 pays disposant de données prove- nant d’évaluations d’apprentissage internationales et régionales, la part de variance dans les scores des élèves qui est imputable aux différences entre les écoles dépasse la moyenne internationale en lecture dans quasiment tous les pays sauf un et la moyenne en mathématiques dans 16 des pays (graphique P.7).14 D’après les mêmes données, les inégalités entre les écoles sont plus prononcées dans les pays francophones que dans les pays d’Afrique australe et orientale. Des écarts importants entre les écoles sont généralement révélateurs d’inégalités dans l’environnement d’apprentissage. En Afrique subsaharienne, les écoles accueillant les élèves moins défavorisés ont plus de ressources, mettent davan- tage l’accent sur le succès académique et connaissent moins de problèmes de discipline. Nouvelles recherches sur l’amélioration de l’apprentissage dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire Comment les pays d’Afrique subsaharienne peuvent-ils relancer l’apprentissage pour tous en réduisant les inégalités ? Pour répondre à cette question, cette étude décrit sommairement les stratégies qui ont fait leur preuve dans des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire en général, et dans des pays d’Afrique subsaharienne en particulier. Elle enrichit aussi les connaissances sur la région, grâce à une analyse originale des enquêtes récentes. Les données mondiales proviennent de l’analyse des évaluations internatio- nales de l’apprentissage sur les corrélats de l’apprentissage des élèves, ainsi que des évaluations d’impact d’interventions spécifiques, soigneusement conçues. Les résultats soulignent les différences considérables entre les pays à revenu Présentation générale   17 Graphique P.6  Langue d’enseignement et langue parlée à la maison : lacunes dans l’apprentissage en deuxième et cinquième/sixième année de scolarisation en Afrique subsaharienne, par Groupes de pays, 2014 a. PASEC Début de scolarité b. PASEC Fin de scolarité primaire, 2ème année primaire, 5ème/6ème année Groupe 1 Lecture 481 95 577 449 71 521 Congo Math 515 60 574 449 44 493 Lecture 456 89 545 456 50 506 Togo Groupe 2 Math 457 82 539 470 60 530 Burundi Cameroun Lecture 456 79 535 463 62 525 Math 458 73 531 449 45 494 Lecture 563 66 629 522 7 529 Math 533 72 606 587 12 599 Groupe 3 Lecture 453 54 507 468 54 522 d'Ivoire Côte Math 444 38 482 450 29 478 Lecture 446 36 481 498 34 532 Bénin Math 440 44 483 466 40 506 Lecture 423 106 529 388 39 427 Niger Math 426 103 528 393 34 427 Lecture 481 98 579 502 57 559 Sénégal Math Groupe 4 509 67 576 510 45 556 Lecture 494 52 546 491 48 540 Burkina Faso Math 497 24 521 493 55 548 Lecture 466 46 512 420 16 436 Tchad Math 468 67 535 442 12 454 350 500 650 350 500 650 N´utilise jamais la LE à la maison Ampleur de l’écart N’utilise jamais la LE à la maison Source : Tiré de l’analyse des micro-données du Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN (PASEC) 2014 (http://www.pasec.confemen.org/pasec2014/). Note : Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2. élevé et les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire—différences qui doivent être prises en compte lors de l’adaptation des solutions aux contextes locaux. Évaluations des enquêtes internationales Dans tous les pays, l’apprentissage de l’élève est corrélé à trois caractéristiques liées à l’enseignant et à la salle de classe : les connaissances de l’enseignant, les 18   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Graphique P.7  Décomposition des scores en lecture et en mathématiques en sixième année dans 25 pays d’Afrique subsaharienne a. Décomposition de la variance des b. Décomposition de la variance des scores en lecture, 6ème année scores en mathématiques, 6ème année PIRLS 2011 (4e an.) TIMSS 2011 (4e an.) Seychelles Seychelles Tanzanie Zambie Lesotho Eswatini Zanzibar Burundi Maurice Mozambique Burundi Lesotho Malawi Zanzibar Eswatini Maurice Zambie Malawi Mozambique Tanzanie Botswana Botswana Botswanaa Botswanaa Côte d’Ivoire Côte d'Ivoire Burkina Faso Namibie Kenya Ouganda Niger Zimbabwe Zimbabwe Kenya Ouganda Niger Namibie Burkina Faso Bénin Congo Sénégal Sénégal Togo Cameroun Congo Bénin Cameroun Afrique du Sud Afrique du Sud Togo Tchad Tchad 0 50 100 0 50 100 Variation au niveau de l’école (SACMEQ III) Variation au niveau de l’école (PASEC 2014) Variation au niveau de l’école (Autre) Variation au niveau de l’élève Moyenne internationale Sources : Basé sur l’analyse des micro-données du PASEC 2014 (http://www.pasec.confemen.org/pasec2014) ; Hungi (2011) ; ainsi que Martin et col. (2013). Note : Les graphiques montrent le pourcentage d’écart imputable aux écoles par rapport aux élèves dans des modèles multiniveaux « vides », en mathématiques et en lecture. Les modèles vides excluent toute variable indépendante, soit au niveau de l’école, soit au niveau de l’élève. Les références internationales pour les écarts imputables à l’élève par rapport à ceux liés à l’école en lecture (pour le Programme international de recherche en lecture scolaire [PIRLS]) et en mathématiques (pour le test Tendances de l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences [TIMSS]) sont indiquées par des lignes verticales sombres. PASEC = Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN ; SACMEQ = Consortium de l’Afrique australe et orientale pour le pilotage de la qualité de l’éducation. a. la deuxième mention du Botswana dans chaque tableau montre les résultats des tests administrés aux élèves en 6e année pour la participation du pays au PIRLS 2011 (en lecture) et au test TIMSS 2011 (en mathématiques), respectivement. Présentation générale   19 pratiques pédagogiques et le temps d’enseignement. Certes, la certification for- melle de l’enseignant n’est pas toujours corrélée à l’apprentissage de l’élève, mais une bonne maîtrise des sujets par l’enseignant est associée à un meilleur appren- tissage, tant dans les pays à revenu élevé que dans ceux à faible revenu et à revenu intermédiaire (Bold et col. 2017 ; Hill, Rowan et Ball 2005). Les pra- tiques pédagogiques spécifiques qui améliorent l’apprentissage sont celles qui consistent notamment à dispenser un enseignement de qualité, à utiliser la pédagogie directe, à communiquer avec les élèves sur leurs performances, à donner des devoirs et à questionner les élèves (Hattie 2009). En ce qui concerne le temps d’enseignement, il convient de distinguer les heures de cours officielles du temps réel d’enseignement. Dans l’enseignement primaire et dans le premier cycle de l’enseignement secondaire, le temps d’en- seignement officiel est quasiment le même dans tous les pays, tandis que le véritable temps d’enseignement peut considérablement varier, même entre écoles d’un même pays. Le temps d’apprentissage supplémentaire est associé à un meilleur apprentissage des élèves dans de nombreux pays (Alfaro, Evans et Holland 2015 ; Lockheed, Prokic-Breuer et Shadrova 2015). Le temps d’ensei- gnement peut être augmenté en réduisant la scolarisation à double vacation, en rallongeant la journée de classe ou l’année scolaire, en minimisant l’absentéisme des enseignants (notamment les absences autorisées) et en veillant à ce que les enseignants soient dans leurs salles de classe et qu’ils y enseignent. En revanche, les corrélations entre l’apprentissage des élèves et les différences dans les facteurs liés au système et ceux liés à l’école ne sont pas les mêmes dans les pays à revenu élevé et ceux à plus faible revenu. Les systèmes éducatifs ins- taurent différentes incitations et relations de responsabilité entre les acteurs du système (autorités, chefs d’établissement, enseignants et parents, par exemple). La plupart des données empiriques sur la corrélation positive entre certains facteurs liés au système et l’apprentissage de l’élève proviennent d’études réalisées dans les pays à revenu élevé. D’après les dernières études, ces facteurs n’ont pas forcément le même effet dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (Hanushek, Link et Woessmann 2013). Il en va de même des corrélations entre l’apprentissage de l’élève et les caractéristiques de l’école, comme l’infrastructure physique et le type d’école (Lockheed, Prokic-Breuer et Shadrova 2015). Récentes évaluations réalisées dans les pays d’Afrique subsaharienne Les nouvelles micro-données utilisées pour les analyses effectuées dans la présente étude proviennent des dernières évaluations à grande échelle menées dans près d’une trentaine de pays d’Afrique subsaharienne.15 L’analyse des modèles de régression multiniveaux de l’apprentissage a conduit aux constations suivantes : • Les écoles accueillant les élèves défavorisés affichaient un faible niveau d’ap- prentissage et possédaient moins de ressources pédagogiques, comme indiqué dans les résultats ci-après : 20   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE –– La situation socioéconomique moyenne des élèves à l’école était l’un des cor- rélats les plus importants de l’apprentissage, particulièrement dans les pays des Groupes 1 et 2. Par exemple, les scores en mathématiques des élèves dans des écoles plus favorisées du point de vue socioéconomique étaient considérable- ment plus élevés que ceux des élèves des écoles moins favorisées lors du test TIMSS 2015 au Botswana et en Afrique du Sud, au SACMEQ IV (2013) au Kenya et au PASEC 2014 dans 9 des 10 pays francophones participants. Les écarts dans la performance allaient d’environ 50% de l’écart type d’un score au test TIMSS 2015 et au SACMEQ IV, à plus de 100% de l’écart type d’un score au PASEC 2014 au Cameroun, au Congo, au Sénégal et au Togo. –– La situation socioéconomique moyenne des élèves était fortement corrélée à la disponibilité des ressources pédagogiques de base, comme les manuels. –– Les enseignants des écoles accueillant des élèves à la situation socioécono- mique précaire au Botswana et en Afrique du Sud ont indiqué plus de diffi- cultés liées aux infrastructures et aux ressources pédagogiques–notamment les ressources technologiques- que leurs homologues des écoles accueillant des élèves plus favorisés. • Certaines particularités des salles de classe et des écoles ont été corrélées à l’ap- prentissage des élèves après vérification des statistiques sur les effets du milieu d’origine de l’élève, comme le montrent les résultats suivants : –– La bonne maîtrise des sujets par l’enseignant et de meilleures pratiques pédagogiques ont été fortement corrélées à un meilleur apprentissage des élèves dans les deux pays disposant de micro-données pertinentes : le Kenya et le Malawi. –– Les manuels (en nombre suffisant pour être emportés à la maison par les élèves) ont été associés à un meilleur apprentissage au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire et au Sénégal. –– La multiplication des ressources pédagogiques - livres pour chaque élève, ressources didactiques en classe et mobilier de classe - a été corrélée à un meilleur apprentissage au Bénin, au Cameroun, au Tchad et au Togo. –– De meilleures installations scolaires ont été associées à un meilleur apprentissage au Bénin, au Burkina Faso, au Kenya, et au Malawi. –– Des effectifs réduits ont été corrélés à un meilleur apprentissage au Burundi et au Kenya. • De grandes différences existent entre pays dans les caractéristiques des écoles et des salles de classe en corrélation avec l’apprentissage. D’où la nécessité pour les pays d’examiner les conditions prévalant dans leurs écoles et salles de classe pour déterminer les stratégies les mieux adaptées à leur situation. Présentation générale   21 Évaluations d’impact dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire Une méta-analyse récente d’évaluations d’impact de haute qualité de plus de 200 interventions réalisées dans 52 pays à faible revenu et à revenu intermé- diaire (dont 21 en Afrique subsaharienne) donne une idée des actions spéci- fiques que les pays de la région pourraient envisager pour relancer l’apprentissage ou améliorer la fréquentation scolaire (Snilstveit et col. 2015). L’une des inter- ventions les plus importantes, à savoir les cours de rattrapage, a été jugée efficace dans d’autres pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Aucune étude n’a été faite en Afrique subsaharienne sur cette intervention durant la période de référence. Pourtant, si l’on considère qu’un grand nombre de jeunes apprenants a du mal à acquérir les fondamentaux en lecture et en mathématiques, cette intervention pourrait générer des résultats positifs. Le graphique P.8 présente l’impact de diverses interventions dans le domaine de l’éducation en Afrique subsaharienne et dans l’ensemble des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. L’importance de l’impact est représentée en unités d’écarts types (généralement désigné sous le vocable d’« ampleur de l’ef- fet »)16 de l’apprentissage et de l’assiduité de l’élève. Le graphique indique à la fois quelles interventions sont les plus efficaces (la pédagogie structurée par exemple) et celles qui le sont moins (comme la gestion des subventions scolaires au niveau des écoles). Les interventions les plus efficaces pour renforcer l’apprentissage en Afrique subsaharienne sont les suivantes : • Pédagogie structurée : un ensemble constitué de la formation de l’enseignant, du soutien pédagogique continu et des ressources et matériels destinés à l’en- seignant et à l’élève, qui améliore l’apprentissage de l’élève de plus d’un quart d’un écart type (graphique P.8) • Temps d’enseignement supplémentaire : allongement de la journée de classe ou de l’année scolaire, réalisable en Afrique subsaharienne par une plus grande assiduité des enseignants en classe. • Programmes d’alimentation  : fourniture de repas à l’école ou de rations à emporter. • Plus d’enseignants : recruter un nombre suffisant d’enseignants pour ramener les effectifs par classe à une taille plus propice à l’enseignement. Les interventions les plus efficaces pour renforcer l’assiduité en Afrique sub- saharienne sont les suivantes : • Interventions multiniveaux : interventions ciblant non seulement les élèves, mais aussi les parents, les enseignants et les écoles. • Transferts monétaires : transferts conditionnels qui aident à améliorer l’assi- duité à l’école des élèves issus des familles défavorisées. 22   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Graphique P.8   Efficacité des interventions dans l’éducation dans les pays d’Afrique subsaharienne par rapport à l’ensemble des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire a. Interventions pour stimuler b. Interventions pour augmenter l’apprentissage la fréquentation Pédagogie 0.28 structurée 0.18 0.45 Multiniveau Heures 0.25 0.18 supplémentaires 0.14 Alimentation 0.13 Transferts 0.21 scolaire 0.10 monétaires 0.13 Recrutement 0.13 des enseignants 0.08 Nouvelles écoles 0.19 0.12 (hygiène) 0.14 Multiniveau 0.10 Partenariats 0.11 public-privé 0.05 Suivi 0.10 communautaire 0.04 Bourse au 0.10 mérite 0.08 Suivi 0.06 Alimentation 0.09 communautaire 0.11 scolaire 0.09 Transferts 0.06 monétaires 0.01 Incitations pour 0.04 0.05 les enseignants 0.01 Suivi 0.07 Construction de 0.02 nouvelles écoles 0.11 0.01 Déparasitage 0.04 Incitations pour 0.01 les enseignants 0.04 Matériels aux –0.02 Bourses 0.01 écoles –0.01 au mérite 0.01 Administration –0.05 scolaire 0.00 Pédagogie 0.00 Santé à –0.09 structurée 0.02 l'école-paludisme 0.10 nt nt nt nt nt nt t le e fe ibl rta rta rta rta ea ea ib 'ef Fa Fa ag ag po po po po sd ur ur Im m Im m Pa co co i i ès ès En En Tr Tr Ampleur de l’effet Ampleur de l’effet Pays d’ASS Tous les pays à revenu faible et intermédiaire Source : Snilstveit et col. 2015. Note : Les « heures supplémentaires » désignent le temps d’enseignement additionnel à travers l’allongement d’une journée d’école ou de l’année scolaire. Le terme « multiniveau » renvoie aux interventions qui ciblent tous les niveaux : les élèves, les enseignants, les écoles et les parents. La « pédagogie structurée » est un ensemble comprenant la formation de l’enseignant, le soutien pédagogique continu et les supports didactiques. « L’ampleur de l’effet » décrit l’efficacité d’une intervention, représentée par unité d’écart type : une ampleur de l’effet inférieure à 0,1 est « faible » ; de 0,1 à 0,25 elle est « encourageante » et ; supérieure à 0,25 elle est « importante ». Présentation générale   23 • Installations sanitaires à l’école : particulièrement importantes pour améliorer le taux de fréquentation des filles dans le premier cycle du secondaire. • Suivi communautaire : aide à améliorer l’assiduité des enseignants et garantit que les conditions scolaires essentielles sont en place. Pour résumer, les pays d’Afrique subsaharienne peuvent accéder à un nombre grandissant de données sur l’apprentissage des élèves. L’apprentissage dans les petites classes est important et la langue d’enseignement influe sur la qualité de l’apprentissage. Les connaissances des enseignants et leurs modes d’enseigne- ment sont fortement corrélés à l’étendue de ce que les élèves apprennent. Les écoles qui accueillent les élèves des milieux défavorisés sont généralement dépourvues des ressources didactiques et pédagogiques de base. Les interven- tions prometteuses doivent être mises en œuvre avec efficacité pour qu’elles se traduisent en résultats positifs sur le terrain. L’ expérience des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire qui affichent de bonnes performances montre qu’en mettant l’accent sur quelques domaines clés, on peut obtenir des résultats remarquables. Une définition plus sélective des prio- rités allègera aussi la charge reposant sur des organismes d’exécution relative- ment faibles, et permettra à ceux-ci de renforcer leurs capacités en apprenant par la pratique. La prochaine section examine les quatre domaines prioritaires retenus dans cette étude qui aideraient les pays à mieux aligner leurs systèmes afin d’améliorer l’apprentissage et l’accès. L’universalisation inachevée de l’éducation de base Pour que les niveaux de scolarisation remarquables atteints au cours des 20 der- nières années se traduisent par des améliorations dans l’apprentissage, la rétention et l’achèvement, les fondements de l’apprentissage en première et deuxième années de scolarisation doivent être solides pour tous les enfants. Les pays d’Afrique subsaharienne doivent se donner pour cible de veiller à ce que la plupart des enfants acquièrent les compétences de base en lecture et en mathé- matiques dès la fin de la deuxième année de scolarisation et puissent progresser dans leur scolarité sans redoubler ou décrocher. Pour y parvenir, ces pays doivent chercher à réduire les redoublements excessifs dans les petites classes, améliorer la transition du primaire au premier cycle du secondaire et accroître la scolarisa- tion dans le premier cycle de l’enseignement secondaire. Résoudre la « congestion » dans les petites classes pour favoriser la progression et l’apprentissage Trois types de problèmes - qui sont inter-reliés et s’amplifient mutuellement - créent une « congestion » dans les petites classes : a) retards dans la progression, 24   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE b) médiocrité de l’environnement d’apprentissage et des pratiques pédagogiques et, c) l’enseignement dans une langue qui n’est pas familière aux enfants. Retards dans la progression des élèves des petites classes Dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne, le nombre d’enfants scolarisés en première et deuxième année dépasse largement le nombre d’enfants des cohortes d’âge pertinent, parfois de 20, voire de 50%. Cette situation résulte du fait que non seulement à la base, des enfants trop jeunes de même que des enfants trop âgés s’inscrivent en première année, mais également que des élèves redoublent la première et la deuxième année parfois plusieurs fois. Le problème dure depuis plus de 10 ans dans de nombreux pays de la région, ce qui détériore les conditions d’apprentissage et exerce une lourde pression sur les ressources budgétaires. Cette augmentation des inscriptions dans les petites classes s’observe parti- culièrement dans les pays où l’accès à l’école a rapidement augmenté au cours des 10 dernières années. Le problème est mis en exergue par les quatre facteurs suivants : un taux brut d’admission constamment élevé en première année17 ; un taux de scolarisation constamment élevé en première année par rapport au groupe d’âge pertinent ; un taux de scolarisation constamment bas en deuxième année par rapport à la première année et ; un faible taux de scolarisation dans l’enseignement préscolaire. Un indice (« indice de congestion » dans les petites classes) a été calculé pour évaluer le problème des retards dans la progression dans les petites classes, en utilisant les données disponibles dans 103  pays (­graphique P.9).18 Sur les 10  pays affichant les plus mauvais indices dans le monde, huit sont en Afrique subsaharienne. Il s’agit par ordre décroissant des pays suivants  : Rwanda, Madagascar, Ouganda, Guinée-Bissau, Burundi, Éthiopie, Sierra Leone et Togo. Quatorze des 20 pays affichant les plus mauvais indices sont en Afrique subsaharienne. évolution de l’indice au fil du temps (qui n’est pas représentée sur le L’  graphique P.9) indique que dans certains pays, les élèves progressent ­ mieux  dans  les petites classes et que dans d’autres, le problème s’aggrave. Les pays d’Afrique subsaharienne qui ont vu leur indice s’améliorer sont les suivants (par ordre décroissant) : Cap Vert, Sao Tomé-et-Principe, île Maurice et Afrique du Sud—tous des pays du Groupe 1. (Au niveau mondial, il s’agit aussi du Mexique, du Pérou et du Vietnam). Les pays dont l’indice a reculé sont les suivants : Bénin, Burundi, Éthiopie, Guinée-Bissau et Madagascar—tous des pays du Groupe 2 ou du Groupe 3. Tous les pays qui ont reculé ont appliqué une approche du type « big bang » au processus d’universalisation de l’enseignement primaire au début des années 90 ou des années 2000 et affichent une forte crois- sance démographique. La réussite des pays du Groupe 1 et de certains pays d’Amérique latine montre qu’il est possible de réduire l’impasse dans les petites classes en l’espace Présentation générale   25 Graphique P.9  Classement des pays d’Afrique subsaharienne selon « l’indice de congestion » dans les petites classes 3 Cap Vert Sao Tomé-et-Principe Tanzanie Maurice 2 Indice de congestion dans les petites classes Burkina Faso Mali Guinée Côte d‘Ivoire Gambie Ghana Afrique du Sud 1 Sénégal Niger Zimbabwe Eswatini 0 Namibie Botswana Congo Comores –1 Guinée équatoriale Lesotho RCA Cameroun –2 RDC Angola Bénin –3 Tchad Togo Sierra Leone –4 Éthiopie Burundi Guinée-Bissau –5 Ouganda Madagascar Rwanda –6 Source : Analyse des données démographiques de l’UNDESA et des indicateurs de l’éducation de la base de données de l’Institut de statistique de l’UNESCO (ISU), (consultée le 9 novembre 2016), http://data.uis​ .unesco.org. Note : La valeur de l’indice correspond au score normalisé prévu, estimé après analyse factorielle des quatre indicateurs suivants : le taux brut d’admission en première année, le taux de scolarisation en première année, le taux de scolarisation en deuxième année par rapport à la première année et, le taux brut de scolarisation dans l’enseignement préscolaire. Les valeurs supérieures à zéro révèlent une grande efficacité et les valeurs inférieures à zéro indiquent moins d’efficacité respectivement, dans les petites classes. Un pays dont la valeur est -2 ou +2 se situe à peu près à 2 écarts types de la valeur moyenne de la combinaison linéaire de tous les indicateurs. de 10 à 15 ans. L’expérience de l’Afrique du Sud est particulièrement louable à cet égard. Peu de temps après l’abolition de l’apartheid en 1991, le gouvernement a commencé à mettre l’accent sur la progression des élèves, en appliquant les trois stratégies suivantes : a) compiler les données par âge et par classe ; b) fixer des normes de scolarisation dans des classes adaptées à l’âge et les disséminer auprès des autorités scolaires au plus bas niveau de la hiérarchie et ; c) soutenir l’expansion de l’enseignement préscolaire. Médiocrité de l’environnement d’apprentissage et des pratiques pédagogiques Les conditions d’apprentissage ne peuvent qu’être médiocres en présence d’effectifs pléthoriques. Au Malawi par exemple, l’effectif moyen en première année est de 150 élèves environ et de près de 125 élèves en deuxième année. Face à de tels effectifs, il est impossible d’enseigner efficacement, d’autant plus que le niveau des élèves varie considérablement. Généralement, les écoles attribuent les salles de classe existantes aux groupes plus restreints des classes supérieures, l’enseigne- ment des plus petits étant dispensé à l’air libre. Pour ne rien arranger, les 26   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE enseignants assignés aux petites classes sont souvent les moins expérimentés ou formés, en particulier en matière de lecture et de calcul pour les plus jeunes. En outre, les efforts fournis par les gouvernements pour recruter plus d’enseignants et construire davantage de salles de classe entraînent des pressions budgétaires qui privent les élèves d’ouvrages imprimés et d’autres ressources pédagogiques. La langue d’enseignement dans les petites classes et la transition vers une langue internationale De toute évidence, il est souhaitable que dans les petites classes les élèves reçoivent un enseignement dans la langue qu’ils parlent à la maison pour acqué- rir les compétences en lecture et en calcul.19 Les élèves du Burundi et de la Tanzanie—deux pays où l’enseignement dans le cursus primaire est dispensé dans une langue locale que les enfants connaissent—ont eu de meilleurs scores que leurs camarades d’autres pays participant aux tests du PASEC et du SACMEQ respectivement. L’Éthiopie applique désormais la même politique et affiche de meilleurs scores que les sept autres pays d’Afrique subsaharienne participant aux tests EGRA. Dans certains pays, l’enseignement est dispensé dans la langue familiale durant les premières années de la scolarité. Une langue «  internationale  » (anglais, français, portugais, par exemple) est ensuite utilisée dans la deu- xième moitié du primaire. Dans d’autres pays, la langue internationale peut être introduite comme une matière à part entière dans les petites classes. De nombreux pays d’Afrique subsaharienne n’ont pas de politique linguistique. Et quand il en existe une, elle n’est généralement pas appliquée de façon pra- tique, en formant les enseignants dans cette langue, en les déployant dans les zones linguistiques pertinentes et en fournissant le matériel imprimé appro- prié. Seuls certains pays, parmi lesquels, l’Afrique du Sud, le Burundi, ­ l’Éthiopie et la Tanzanie possèdent une politique officielle sur la langue d’enseignement qui est systématiquement appliquée. ­ Actions politiques à mener dans les petites classes Les politiques à mettre en œuvre pour réduire la « congestion » et améliorer l’apprentissage dans les petites classes sont les suivantes : • Réduire les redoublements déguisés et officiels en première année de scolari- sation en agissant au niveau de l’école, en informant les communautés et les parents, et par le contrôle et le suivi effectués par les administrateurs. • Élargir progressivement les programmes destinés à la petite enfance, tout en fixant des normes de qualité, afin de désengorger les petites classes et égale- ment, renforcer l’apprentissage. • Rapprocher les écoles et les salles de classe de l’endroit où vivent les enfants, en construisant des écoles multigrades, mais surtout et aussi en faisant appel à la géo-cartographie pour mieux situer les nouvelles écoles et salles de classe. Présentation générale   27 • Améliorer l’environnement d’apprentissage en réduisant les effectifs, en four- nissant du matériel de lecture imprimé aux enfants, en formant et en enca- drant les enseignants sur l’utilisation de ce matériel. • Harmoniser les programmes, la formation des enseignants, les matériels et l’évaluation en fonction de la nécessité pour tous les enfants d’acquérir les compétences de base en lecture et en calcul dans les petites classes. • Adapter ou élaborer de nouvelles politiques sur la langue d’enseignement, notam- ment en ce qui concerne la formation des enseignants, sur la base du constat que les enfants des petites classes assimilent mieux les compétences fondamentales lorsque les enseignements leur sont dispensés dans une langue familière, avant qu’ils ne passent à une langue officielle ou internationale. Accroître l’accès et la progression au niveau de l’éducation de base L’ accès à l’enseignement primaire s’est considérablement amélioré dans la région, même si les coûts élevés de la scolarisation des enfants - en termes de dépenses directes et des coûts indirects du manque à gagner économique- demeurent une contrainte dans de nombreux pays. En comparaison, l’accès aux classes du premier cycle de l’enseignement secondaire est faible (bien qu’il s’améliore), surtout en ce qui concerne les filles, les enfants issus de familles pauvres et les enfants en milieu rural. L’insuffisance des établissements d’ensei- gnement du premier cycle du secondaire est un important frein à l’accès, et la sélection des élèves opérée par les examens sanctionnant la fin des études primaires pousse de nombreux enfants à l’abandon scolaire. ­ Inégalités persistantes dans le primaire et le premier cycle du secondaire D’importants écarts dans l’accès à l’enseignement existent en Afrique subsaha- rienne, comme en témoignent les comparaisons suivantes : • Enfants pauvres/enfants riches. Quelques pays d’Afrique subsaharienne seu- lement offrent un accès comparable au niveau du primaire à tous les enfants, quel que soit le niveau de revenu de leur famille. Il s’agit du Botswana, du Kenya et du Lesotho dans le Groupe 1 ; du Malawi, du Togo et de l’Ouganda dans le Groupe 2 ; de la Sierra Leone et de la Zambie dans le Groupe 3 ; et du Tchad dans le Groupe 4. De fortes disparités dans l’accès par quintile de revenu persistent dans un grand nombre de pays d’Afrique francophone : le Bénin (taux brut de scolarisation de 114% pour le quintile le plus riche contre 58% pour l’autre) ; le Mali (101% contre 41% respectivement) et ; le Sénégal (103% contre 60%). Ces écarts s’agrandissent quand les enfants passent au premier cycle du secondaire. • Enfants en milieu rural/enfants en milieu urbain. De même, les enfants en milieu rural accèdent moins à l’enseignement primaire que les enfants en 28   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE milieu urbain. Ainsi, au Libéria, au Mali et au Niger où quasiment tous les enfants urbains sont scolarisés, 50% seulement des enfants en âge d’être sco- larisés dans le primaire vont à l’école en milieu rural. Une fois encore, le fossé s’élargit dans le premier cycle du secondaire. • Filles/garçons. En dépit des progrès remarquables fournis en matière d’égalité des sexes dans l’enseignement primaire, la plupart des pays d’Afrique sub- saharienne sont encore à la traîne dans le premier cycle du secondaire. Dans de nombreux pays, le mariage et les grossesses précoces sont des facteurs importants qui empêchent les filles d’entamer ou d’achever le premier cycle du secondaire. Peu de passages au premier cycle de l’enseignement secondaire En 2013, environ 27% des enfants ayant achevé leur sixième année de scolarisa- tion, en Afrique subsaharienne, n’ont pas continué en classe supérieure,20 ce qui a compromis les progrès de la région vers la réalisation de ses objectifs. La pro- portion d’enfants scolarisés dans le premier cycle du secondaire a certes aug- menté, passant de 41% en 2000 à 66% en 2014, mais ce taux régional est le plus bas au monde, loin derrière le taux moyen de 80% affiché par l’Asie du Sud qui possède le second taux régional le plus bas (UNESCO 2016). Seule une poignée de pays du Groupe  1 a réussi à universaliser l’accès au premier cycle du secondaire. Le graphique P.10 présente les différences dans le premier cycle de l’enseigne- ment secondaire par groupes de pays. Le taux brut de scolarisation est généra- lement élevé dans les pays du Groupe 1 ; dans les pays des trois autres groupes, il se situe encore en-deçà de 50%, malgré les importantes avancées enregistrées depuis 2000. Les pays de la région adoptent différentes démarches pour parve- nir à l’universalisation de l’enseignement primaire et du premier cycle de l’ensei- gnement secondaire. On peut ainsi observer trois tendances : • Avancées aussi bien dans le primaire qu’au premier cycle du secondaire. Les pays affichant cette tendance sont les suivants : Burundi, Cameroun, Éthiopie, Madagascar, Mozambique, Tanzanie et d’autres des Groupes 1 et 2. Le taux brut de scolarisation de l’Éthiopie dans le premier cycle du secon- daire est passé de 17% en 2000 à 56%, celui de la Tanzanie de 20% à près de 60%. Au Burundi, la hausse a été encore plus spectaculaire, de moins de 10% à près de 50%. • Avancées dans le premier cycle du secondaire, mais pas dans le primaire. Cette tendance s’observe dans les pays francophones. Bien qu’un grand nombre de ces pays soient encore loin d’avoir universalisé l’enseignement primaire, quelques-uns ont pu très rapidement élargir la couverture dans le premier cycle du secondaire. Au Sénégal par exemple, le taux brut de scolarisation dans le premier cycle du secondaire est passé de 20% en 2000 à 58% en 2013. Présentation générale   29 Graphique P.10  Taux bruts de scolarisation dans le premier cycle du secondaire dans 34 pays d’Afrique subsaharienne, par Groupes, en 2000 et l’année la plus récente 120 TBS dans le premier cycle du secondaire 100 80 60 40 20 0 Congo Lesotho Eswatini Ghana Zimbabwe Cap Vert Maurice Botswana Namibie Afrique du Sud Tanzanie Cameroun Comores Ouganda Malawi Togo Burundi Mozambique Madagascar Éthiopie Guinée-Bissau Mauritanie Côte d’Ivoire Bénin Gambie Zambie Nigeria Niger Tchad Burkina Faso Sénégal Guinée Mali Guinée équatoriale Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4 Confirmés Ayant émergé Émergents En retard 2000 Année la plus récente Sources : Analyse de la base de données de l’Institut de statistique de l’UNESCO (ISU) (consultée le 18 juillet 2016) http://data.uis.unesco.org ; Institut international de planification de l’éducation (IIPE) de l’Unesco, Pôle de Dakar, version 19 de la base de données des indicateurs. Note : TBS = taux brut de scolarisation. Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2. • Avancées dans l’enseignement primaire, mais statu quo dans le premier cycle de l’enseignement secondaire. Trois pays anglophones (Malawi, Ouganda et Zimbabwe) ont universalisé l’enseignement primaire, mais en 15 ans, ils ont à peine amélioré la couverture dans le premier cycle du secondaire. En raison des disparités observées dans l’achèvement des études primaires et du coût élevé de l’enseignement secondaire, le premier cycle du secondaire accueille, dans une large mesure, les enfants issus de familles riches, les enfants vivant en milieu urbain et les garçons. L’accès est particulièrement limité pour les enfants en milieu rural ; dans certains pays d’Afrique subsaharienne, le taux brut de scolarisation dépasse les 100% en milieu urbain, tandis que dans les zones rurales il reste en-deçà de 50%. Abandons scolaires : les enfants pauvres, en milieu rural et les filles La plupart des pays d’Afrique subsaharienne doivent impérativement mettre en place des mesures pour garder les élèves à l’école. Le graphique P.11 montre le « taux de longévité scolaire », qui correspond au pourcentage d’une cohorte 30   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Graphique P.11  Taux de longévité scolaire jusqu’en neuvième année, dans quelques pays d’Afrique subsaharienne 100 100 Ghana, 90 100 97 RDC, 83 90 91 Nigeria, 83 80 80 Sénégal, 82 Taux de longévité scolaire 72 Kenya, 80 70 68 Côte d‘Ivoire, 76 60 Éthiopie, 57 56 50 Mozambique, 49 Burkina, 46 40 Rwanda, 38 36 30 Ouganda, 31 20 Malawi, 16 10 0 e1 e2 e3 e4 e5 e6 e7 e8 e9 né né né né né né né né né An An An An An An An An An Sources : Analyse des micro-données (année la plus récente) des Études sur la mesure des niveaux de vie, réalisées par la Banque mondiale (Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Kenya, Malawi, Ouganda, RDC et Rwanda) et ; Enquêtes démographiques et de santé (Éthiopie, Ghana, Mozambique, Nigeria et Sénégal). Note : Le « taux de longévité scolaire » correspond au pourcentage d’une cohorte d’élèves inscrits en première année, au cours d’une année scolaire donnée qui, éventuellement, parviennent jusqu’en sixième et neuvième année, sans tenir compte des redoublements. Ces taux sont estimés à l’aide de la méthode de la cohorte reconstituée. d’élèves inscrits en première année, au cours d’une année scolaire donnée qui, éventuellement, parviennent jusqu’en sixième et neuvième année, sans tenir compte des redoublements. À titre d’exemple, au Mozambique, il est estimé que 72% des enfants qui s’inscrivent en première année parviendront jusqu’en 6ème année, tandis que moins de la moitié achèvera la 9ème année. Pour les pays du Groupe 1 tels que le Ghana et le Kenya, les taux de longévité scolaire sont nettement plus élevés. Pour les pays d’Afrique subsaharienne des Groupes 2 et 3, retenir les élèves de la première à la neuvième année est un défi majeur qui requiert toute l’atten- tion des responsables politiques. Pour les pays du Groupe 4, il conviendrait de mettre l’accent sur l’amélioration de l’accès à l’éducation en première année et le maintien d’un taux de rétention élevé tout au long du cycle de l’éducation de base. Pour les pays du Groupe 1, l’étape la plus importante vers l’universalisation de l’achèvement des études primaires est de retenir le maigre pourcentage d’élèves qui abandonnent leurs études en mettant en place des programmes ciblés, destinés aux enfants des milieux défavorisés et vulnérables. Les micro-données extraites des enquêtes auprès des ménages dans douze pays font apparaître les raisons principales des taux élevés d’abandon, telles que Présentation générale   31 déclarées par les parents. Pour les enfants en âge d’être scolarisés dans le pri- maire, les raisons les plus courantes sont le coût élevé de la scolarisation, la mauvaise qualité de l’enseignement, la distance de l’école et le fait que les enfants sont trop jeunes. En ce qui concerne le premier cycle de l’enseignement secon- daire, le coût est également cité dans les 12 pays comme étant le principal fac- teur d’abandon des études chez les enfants âgés de 12 à 15 ans, suivi de la qualité de l’enseignement. Le mariage (et les grossesses chez les filles) constituent un autre facteur important de décrochage scolaire. Lorsque les filles atteignent la puberté, leur famille les considère souvent comme étant « nubiles ». Si les facteurs poussant les filles à abandonner leurs études de façon prématurée sont multiples, le mariage des enfants demeure la principale cause de disparité entre les sexes dans l’éducation au niveau de l’en- seignement secondaire en Afrique (Wodon et col. 2017). Au Burkina Faso, en Ouganda et au Sénégal, les parents déclarent que le mariage des enfants (et les grossesses précoces) est la principale raison d’abandon des études pour les filles, mais pas pour les garçons. En Éthiopie, les familles déclarent qu’un pourcentage important de garçons comme de filles décroche en raison du mariage des enfants (23% et 29% respectivement). Singulièrement, la RDC et le Mozambique déplorent plus de garçons décrocheurs que de filles, en raison du mariage des enfants qui, au même titre que les grossesses, constitue le défi le plus épineux et la principale cause d’abandon des études au deuxième cycle du secondaire. Les examens à fort enjeu constituent un frein à la progression Dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne, les examens nationaux entravent la progression des élèves du cycle primaire au premier cycle du ­secondaire, et du premier au deuxième cycle du secondaire. Dans 28 des 43 pays pour lesquels des données existent, ces examens sont administrés à tous les niveaux d’éducation : primaire, premier et deuxième cycle du secondaire. D’où la tendance, dans certaines écoles, à retenir les élèves plus lents en les faisant redoubler, de façon à augmenter le nombre de candidats et ainsi, les taux de réussite aux examens. Une étude a estimé que près de la moitié des retards en matière d’univer- salisation de l’éducation primaire dans les pays francophones d’Afrique sub- saharienne pourraient être attribuée au taux élevé de redoublements dans ces pays (Bernard, Simon et Vianou 2005). Les pays qui ont pris des mesures pour consolider l’enseignement primaire et le premier cycle de l’enseignement secondaire en un cycle d’« éducation de base » consistant en 8 à 9 années de scolarisation ont, de façon générale, éliminé les examens à la fin du primaire. La suppression des examens à la fin du primaire se traduit en général par deux changements notables : a) la réduction du pic de redoublements dans l’an- née où l’examen est administré et dans celle qui la précède et, b) une hausse du 32   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Graphique P.12  Taux de passage du primaire au premier cycle du secondaire avant et après la suppression de l’examen de fin d’études primaires au Botswana, 1984 à 1999 100 Examens abolis Taux de passage effectif du primaire au premier cycle du secondaire 80 60 40 1984 1987 1990 1993 1996 1999 Source : Base de données de l’Institut de statistique de l’UNESCO (ISU) (consultée le jeudi 17 août 2017) http:// data.uis.unesco.org. Note : En 1987, le Botswana a éliminé l’examen national de fin d’études primaires. « Le taux de passage réel » mesure la transition d’un niveau d’éducation donné à un niveau d’éducation supérieur, sans tenir compte des redoublements. taux de passage au premier cycle du secondaire. L’expérience du Botswana illustre parfaitement ces changements. En 1987, le pays a éliminé les examens à la fin de l’école primaire qui servaient par le passé à sélectionner les élèves pour le passage au premier cycle du secondaire. À la suite de ce changement de poli- tique, le taux de transition entre le primaire et le premier cycle du secondaire a rapidement augmenté, passant de  50% environ avant  1987 à près de  90% en 1994 (graphique P.12). Les inscriptions dans le premier cycle du secondaire devraient doubler d’ici à 2030 En 2015, environ 53 millions d’enfants étaient scolarisés dans le premier cycle du secondaire en Afrique subsaharienne (graphique P.13). Si la région poursuit sa croissance au rythme observé ces 15 dernières années, il est prévu que les classes du premier cycle du secondaire (de la septième à la neuvième année) voient l’inscription d’approximativement 47 millions d’enfants supplémentaires, d’ici à 2030. En outre, 9 autres millions d’enfants seront dans le système si les pays veillent à ce que tous les enfants qui entrent dans le système éducatif achèvent leur scolarité sans décrocher. Malgré les défis considérables occasionnés par l’accroissement anticipé des inscriptions, des fenêtres d’opportunités se dessinent. Il faudra de nouvelles res- sources financières importantes qui seront investies dans les infrastructures scolaires et dans les supports pédagogiques, de même que dans la formation et Présentation générale   33 Graphique P.13  Taux de scolarisation prévus dans le premier cycle du secondaire en Afrique subsaharienne, 2015 – 2030 120 106 106 107 109 108 101 104 94 9 100 87 78 81 80 71 72 74 69 47 En millions 60 53 40 53 20 0 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 Accroissement de la scolarisation du fait de la croissance démographique et de l’atteinte de la cible du taux d’achèvement du premier cycle du secondaire en 2028 Accroissement de la scolarisation du fait de la poursuite des tendances antérieures Scolarisation dans l’année de référence Total des inscriptions de la 7e à la 9e année Sources : Sur la base des prévisions de l’ensemble des données des Études sur la mesure des niveaux de vie par la Banque mondiale et la base de données de l’Institut de statistique de l’UNESCO (ISU) (consultée le 18 juillet 2016), http://data.uis.unesco.org. Note : « Le premier cycle du secondaire » correspond aux années d’études de la septième à la neuvième année. le recrutement des enseignants – autant de pressions qui, sans nul doute, met- tront à mal les capacités financières et de gestion des pays d’Afrique subsaha- rienne, mais qui permettront, par ailleurs, d’améliorer le système grâce à la gestion judicieuse de ces nouveaux investissements. Actions politiques à mener pour garantir l’éducation de base D’après les analyses, les politiques ci-après contribueront à améliorer l’accès à l’éducation de base ainsi qu’à l’achèvement de ce cycle d’études. L’amélioration de l’accès passe par les mesures spécifiques suivantes : • Rapprocher les écoles des enfants qui vivent en milieu rural en construisant des établissements d’enseignement du premier cycle du secondaire plus petits ou en ajoutant des classes dans les écoles primaires existantes. Ces mesures pourraient exiger des changements dans l’ensemble classique des services fournis dans les écoles (par exemple un laboratoire interdiscipli- naire au lieu de laboratoires distincts pour chaque matière, une biblio- thèque dans les classes plutôt que dans une salle séparée), ainsi que dans les méthodes de recrutement des enseignants appelés à travailler dans les régions éloignées (recrutement local plutôt que des enseignants origi- naires d’autres régions). Les pensionnats sont une option pour les enfants 34   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE qui vivent très loin de l’établissement, mais certaines études ont estimé qu’ils coûtent cher et ne sont pas aussi rentables que les externats (Ngeno, Simatwa et Ayodo 2012). • Faire fonctionner les écoles selon le modèle de la double vacation en milieu urbain où les écoles surpeuplées sont un problème. • Mobiliser et réglementer de façon efficace le secteur privé de façon à ce qu’il appuie l’expansion du réseau d’écoles. Parmi les mesures visant à réduire les abandons scolaires dans l’éducation de base, on peut citer les suivantes : • Compenser les coûts de scolarisation directs et indirects au moyen de transferts monétaires ciblés pour les ménages ruraux et démunis qui ont des enfants en âge d’aller à l’école. Les filles devraient aussi être ciblées pour l’accès au premier cycle du secondaire. • Éliminer les examens de fin d’études primaires qui limitent l’accès au premier cycle du secondaire. • Faire en sorte que les écoles se dotent d’installations sanitaires séparées pour les filles. L’absence d’eau et de toilettes dans les écoles du premier cycle du secondaire est un facteur dissuasif pour les filles (et pour les garçons). La quasi-totalité des écoles du premier cycle du secondaire dans les pays du Groupe 1 ont accès à l’eau potable et ont installé des toilettes séparées pour les filles et pour les garçons, tandis que seule la moitié environ des écoles dans la plupart des pays du Groupe 4 s’est dotée de ces installations. Dans nombre de pays des Groupes 2 et 3, ces ins- tallations sont inexistantes dans une grande majorité des établissements. Les politiques destinées à améliorer la pertinence et la qualité des enseigne- ments dans le premier cycle du secondaire sont notamment les suivantes : • Revisiter les programmes afin d’en améliorer la pertinence. Les programmes scolaires appliqués dans les établissements d’enseignement secondaire de nombreux pays d’Afrique subsaharienne remontent aux années 70, époque à laquelle ils n’étaient destinés qu’à une minorité d’élèves. Ces programmes sont mal adaptés aux profils de plus en plus diversifiés des élèves inscrits au premier cycle du secondaire. Une refonte complète du programme revient très cher et s’est par ailleurs heurtée à des résistances dans certains pays, mais elle peut néanmoins constituer un vecteur de changement de l’ensemble du système, en rapprochant l’éducation des besoins d’une société moderne. • Tirer pleinement parti de la refonte des programmes scolaires. Les nouveaux programmes peuvent s’avérer inefficaces si les enseignants ne sont pas for- més pour les dispenser, et si les élèves et les enseignants n’ont pas accès aux supports pédagogiques révisés. Ainsi, parallèlement à la révision des pro- grammes, les enseignants et chefs d’établissement doivent avoir plus de Présentation générale   35 possibilités de se perfectionner, et de nouveaux supports pédagogiques doivent être élaborés pour l’enseignement au premier cycle du secondaire. • Faire appel à la technologie pour améliorer l’enseignement et l’apprentissage. L’Afrique subsaharienne devrait tirer avantage du taux de pénétration élevé de la téléphonie mobile dans la région et des coûts de plus en plus faibles des supports numériques pour utiliser la technologie. Au vu des contraintes liées à l’infrastructure et à la connectivité, le recours à la technologie doit néces- sairement passer par un processus itératif. Le recours à la technologie et aux supports numériques doit tout de même être activement envisagé, au regard du coût élevé de la construction de laboratoires classiques et du faible niveau de connaissance des contenus et de compétences des enseignants. Gestion efficace et soutien aux enseignants Les enseignants sont les principaux acteurs de l’amélioration de l’apprentis- sage des élèves. La façon dont les pays d’Afrique subsaharienne recrutent, ­perfectionnent, déploient, gèrent et encadrent leurs enseignants influera largement sur la qualité de l’apprentissage de leurs élèves. Les connais- sances ne manquent pas quant aux ingrédients essentiels de l’apprentissage, mais leur mise en place exige de prendre en compte les défis de mise en œuvre et d’économie politique qui surviennent dès lors qu’il s’agit de gérer des pres- tataires de services dispersés et de multiples relations principal-agent. Recrutement des enseignants Dans les pays d’Afrique subsaharienne en général, les effectifs d’enseignants ont rapidement augmenté ces 15  dernières années—une croissance de  4,1% en moyenne par an dans l’enseignement primaire et de 6,6% par an au niveau du secondaire. Cette tendance devra impérativement se poursuivre pour répondre aux besoins à venir.21 Pour tirer avantage de cette croissance, les stratégies de recrutement des enseignants doivent tenir compte des points suivants : • À l’heure actuelle, la plupart des enseignants sont issus du segment le plus éduqué de la population nationale active. Dans la présente étude, l’analyse des micro-données d’enquêtes menées dans 13  pays d’Afrique subsaha- rienne révèle que les enseignants du primaire sont plus susceptibles que d’autres professionnels d’avoir un diplôme postsecondaire, et les enseignants du secondaire d’avoir un diplôme universitaire.22 Au Kenya, les candidats à la formation d’enseignant dans les cursus universitaires ont enregistré des scores légèrement inférieurs à ceux des étudiants inscrits dans d’autres filières aux examens d’entrée à l’université (voir détails à l’encadré P.1). • Toutes choses étant égales par ailleurs, les revenus des enseignants du ­primaire sont inférieurs d’environ 9% à ceux des autres travailleurs ­ diplômés de l’enseignement 36   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE supérieur, à en croire les micro-données provenant des 13 pays. Les revenus des enseignants du secondaire ne sont statistiquement pas différents de ceux d’autres travailleurs diplômés de l’enseignement supérieur. Les enseignants sont plus sus- ceptibles que d’autres professionnels et employés de bureau d’avoir un deuxième emploi (probabilité de 12 points de pourcentage chez les enseignants du primaire et de 9 points de pourcentage chez les enseignants du secondaire). En règle géné- rale, le second emploi est dans le domaine de l’agriculture. E N C A D R É P. 1 Qui accède à la profession d’enseignant au Kenya? L’admission à des programmes de formation des enseignants et à d’autres cursus dans les établissements d’enseignement supérieur au Kenya dépend, en grande partie, des résultats obtenus au Certificat d’enseignement secondaire du Kenya (KCSE), un exa- men national administré par le Conseil national des examens du Kenya (KNEC). Le Kenya Universities and Colleges Central Placement Service (KUCCPS) est l’entité qui assure le placement des candidats dans les universités et les écoles supérieures publiques, sur la base des résultats obtenus au KCSE, pour leur admission dans les divers programmes. L’analyse des micro-données du KNEC sur les admissions au cours de l’année 2015 permet de faire les constations, ci-après, sur la qualité des futurs enseignants du pri- maire et du secondaire au Kenya : • Environ 12 000 et 85 000 candidats ont respectivement été admis à des formations postsecondaires diplômantes et à des formations universitaires (toutes disciplines confondues). • À peu près 17% des nouveaux étudiants ont été admis dans des programmes de formation des enseignants ; la vaste majorité (96%) s’est dirigée vers les formations universitaires, tandis que 4% seulement ont opté pour les formations postsecon- daires diplômantes plus courtes. • Une analyse de régression a révélé que pour les formations postsecondaires diplô- mantes, ceux qui ont été admis à la formation des enseignants avaient obtenu à l’examen du KCSE des scores supérieurs (de 10% environ) à ceux des étudiants admis dans les autres filières. • Toutefois, parmi ceux admis à des programmes universitaires, ceux ayant été placés dans des programmes de formation des enseignants ont obtenu des résultats infé- rieurs (de 5% environ) aux étudiants admis dans d’autres programmes. • Les différences au niveau des scores sont infimes, ce qui laisse penser que les pro- grammes de formation des enseignants au Kenya attirent toujours des candidats rela- tivement qualifiés parmi les cohortes d’étudiants diplômés de l’école secondaire. Source : Analyse des micro-données du KNEC. Présentation générale   37 • La diversification des économies aidant, l’on assistera à une compétition plus marquée pour attirer des diplômés de l’enseignement supérieur relativement peu nombreux. Le secteur de l’éducation pourrait ne pas être en mesure de retenir ses enseignants qualifiés. Tel est plus particulièrement le cas chez les enseignants formés en mathématiques, en sciences ou en langue étrangère. De nombreux pays sont déjà confrontés à des pénuries dans ces disciplines. Renforcer la formation des enseignants Au sortir de leurs programmes de formation, les enseignants ne sont pas dotés de connaissances pédagogiques et des contenus, ni de compétences pédago- giques suffisantes, comme le démontre les constats suivants23 : • Connaissance des contenus : Certes, presque tous les enseignants des 13 sys- tèmes éducatifs ayant participé au SACMEQ 2007 ont obtenu des résultats supérieurs au minimum requis en lecture, mais au moins 10% des ensei- gnants de cinq pays n’ont pas atteint le niveau de connaissance des contenus requis pour enseigner les mathématiques en sixième année. Au Ghana et au Kenya, l’enquête sur les compétences au service de l’emploi et de la produc- tivité (STEP) des adultes actifs, notamment des enseignants, a révélé qu’au Ghana, 80% des enseignants du primaire et 65% des enseignants du secon- daire n’atteignaient pas le niveau 3 de l’évaluation des capacités en lecture et en écriture, pourtant considéré comme le seuil d’alphabétisation minimum pour enseigner la lecture de façon efficace. Au Kenya, 72% des enseignants du primaire et du secondaire n’ont pas atteint le niveau 3. • Compétences pédagogiques : Dans le cadre des enquêtes SDI, seul un peu plus d’un tiers des enseignants des pays enregistrant les meilleures performances - Kenya et Tanzanie - a répondu correctement aux questions pédagogiques (pla- nification des leçons, évaluation des capacités des élèves et évaluation des progrès des élèves dans l’apprentissage, par exemple). Dans les pays enregistrant les plus mauvaises performances - Mozambique, Nigeria et Togo - c’est un cinquième des enseignants qui est concerné. Les enseignants capables d’évaluer les capacités des élèves et leurs progrès scolaires ne représentaient qu’une petite minorité ; leur proportion va de 6% à 33% sur l’ensemble des pays étudiés. En outre, les pratiques pédagogiques sont rudimentaires dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne. Dans les pays où les enquêtes SDI ont été réali- sées, il apparaît à l’observation que la plupart des enseignants utilisent des pra- tiques d’enseignement de base (écrire au tableau), mais peu recourent à des pratiques exigeant davantage d’efforts (collecter ou corriger les devoirs) ou davantage de compétences (poser des questions incitant les élèves à répondre en utilisant de nouvelles applications par rapport à ce qui leur a été enseigné) (Molina et Martin 2015). 38   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, la faiblesse de la connais- sance des contenus par les enseignants et leur manque de connaissances et de compétences pédagogiques alimentent le cercle vicieux de la mauvaise qualité : la faiblesse des acquis cognitifs, chez les enseignants actuels et futurs, influe sur l’apprentissage ultérieur des élèves, ce qui, par conséquent, rend plus difficile l’amélioration de la qualité du réservoir d’élèves à partir duquel les futures cohortes de nouveaux enseignants seront recrutées. L’interruption de la spirale de dégradation de la qualité exige des change- ments radicaux au niveau de la formation initiale des enseignants. Il importe de réformer cette formation initiale afin de mettre l’accent sur le développement des connaissances et des compétences dont les enseignants ont besoin, et de pallier les lacunes des nouveaux étudiants. De plus, en Afrique subsaharienne, la plupart des enseignants ne bénéficient ni de perfectionnement ni d’un encadrement. Les données disponibles donnent à penser que l’encadrement des enseignants de la région n’est ni systématique ni efficace. Moins de 50% des enseignants du primaire affirment qu’ils bénéficient d’un soutien pédagogique régulier de la part de leurs responsables d’établisse- ment. La plupart des enseignants qui ont bénéficié d’une formation continue ou d’un perfectionnement professionnel les jugent inefficaces.24 Déploiement équitable des enseignants Dans l’ensemble des quatre groupes de pays, le recrutement et le déploiement rapides de nouveaux enseignants s’est généralement traduit par une baisse du nombre moyen d’élèves par enseignant. Les reculs les plus remarqués se sont pro- duits dans les pays des Groupes 3 et 4. Pourtant, dans plusieurs pays des Groupes 2, 3 et 4, le nombre moyen d’élèves par enseignant demeure au-dessus de 45.25 Si certains pays ont réussi à déployer les enseignants en fonction du nombre d’élèves inscrits, de nombreux autres ont encore du mal à assurer cette fonction de base.26 Le nombre d’élèves par enseignant devrait plus ou moins être constant dans l’ensemble des écoles pour donner à tous les élèves des possibilités d’ap- prentissage égales. Malheureusement, ce n’est pas le cas dans certains pays. Au Ghana, par exemple, le même nombre d’enseignants est déployé dans les écoles comptant 500 élèves que dans celles qui n’en comptent que la moitié. En Côte d’Ivoire par contre, le nombre d’enseignants déployés dans les écoles est plus régulièrement fonction du nombre d’élèves que comptent les établissements. Au niveau du primaire, les pays du Groupe 1 (Afrique du Sud, Eswatini, Lesotho, île Maurice et Zimbabwe) ont mieux réussi le déploiement des ensei- gnements. Ces pays présentent des caractéristiques communes, à savoir : des systèmes de petite envergure ou matures ; un accroissement modeste du corps enseignants (dans certains cas de légers reculs sont même observés) ; peu de problèmes contextuels au départ. Parmi les pays qui ont réussi, on peut aussi citer la Gambie et le Mozambique (Groupe 3). La performance du Mozambique Présentation générale   39 est particulièrement remarquable car il lui fallait déployer 40% d’enseignants supplémentaires dans ses écoles primaires publiques entre 2010 et 2015. La plupart des pays des Groupes 2, 3 et 4 ont recruté un grand nombre d’en- seignants, sans être néanmoins capables de les déployer dans les écoles qui en avaient besoin. Les pays suivants se sont particulièrement illustrés par leurs piètres résultats : Cameroun, RDC et Togo (groupe 2) ; Bénin, Congo, Côte d’Ivoire et Tanzanie (groupe 3) et ; Burkina Faso, Sénégal et Tchad (groupe 4). Le besoin de professeurs spécialisés dans l’enseignement secondaire com- plique davantage le processus d’affectation du personnel enseignant dans les écoles. Trois pays – la Côte d’Ivoire, le Kenya et le Zimbabwe – montrent bien qu’il est possible d’assurer l’affectation harmonieuse du personnel enseignant dans les établissements d’enseignement secondaire. Les pays qui ne parviennent pas à assurer cette cohérence dans les affectations au niveau de l’enseignement secondaire ont généralement le même problème au niveau du primaire. Il n’en demeure pas moins que certains s’en sont mieux sortis au niveau du primaire que du secondaire (notamment l’île Maurice et le Mozambique). Gestion des enseignants La tâche la plus importante, en matière de gestion des enseignants, consiste à veiller à ce que ces derniers soient présents et dispensent leur enseignement. Malheureusement, l’absentéisme des enseignants dans les écoles, comme dans les classes est relativement courant dans les pays d’Afrique subsaharienne. Parmi les neuf pays dont les écoles ont été visitées, l’analyse des micro-données de l’étude SDI a révélé que les taux d’absentéisme observés chez les enseignants des écoles primaires se situaient en moyenne entre seulement 5% en Éthiopie et  43%  au Mozambique. Dans tous les pays, les enseignants étaient plus fréquemment absents de leur classe que de leur école, tandis que les taux ­ ­ d’absentéisme observés chez les enseignants étaient nettement supérieurs dans les écoles rurales du Mozambique, de l’Ouganda et du Togo. L’ absentéisme des enseignants dans les écoles est en grande partie le résul- tat d’absences autorisées. Il n’en demeure pas moins que les enfants sont privés de précieuses heures de cours car, généralement, aucun remplaçant ne leur est fourni. Dans quatre des neuf pays s’étant prêtés aux enquêtes SDI (Éthiopie, Kenya, Ouganda et Tanzanie), l’absence d’un enseignant signifiait que dans plus de la moitié des classes concernées, les enfants se retrouvaient livrés à eux-mêmes. Les motifs d’absence autorisée chez les enseignants comprennent la maladie, les naissances, les congés statutaires et les activités de formation. Ces deux dernières raisons représentent au moins 40% des motifs cités dans les neuf pays et jusqu’à trois quarts des motifs en Éthiopie et au Kenya. Les absences non autorisées ou pour des raisons inconnues représentaient entre un quart et un tiers des motifs invoqués au Mozambique, au Togo et en Ouganda. 40   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE La formation pourrait permettre aux responsables d’établissement d’amé- liorer la gestion de leur personnel et de réduire l’absentéisme, mais elle peut s’avérer insuffisante en l’absence de mesures visant à améliorer l’éthique de responsabilité à l’échelle de l’école. D’après l’évaluation PASEC de 2014, la proportion de chefs d’établissement ayant reçu une formation en gestion au cours des deux années précédentes n’était que de 43% en moyenne, allant de 21% au Tchad à  58% au Niger (PASEC 2015). Même un renforcement modeste de la gestion du personnel dans les écoles – au moyen d’outils et de formations simples consistant à focaliser l’attention des enseignants et des chefs d’établissement sur sept tâches essentielles – peut faire une différence, en particulier dans les systèmes où les capacités initiales sont faibles (Lassibille et col. 2010). Conditions essentielles propices à l’enseignement et à l’apprentissage dans toutes les écoles De trop nombreuses écoles primaires n’offrent pas actuellement les conditions minimales propices à un enseignement et à un apprentissage efficaces. Un ensei- gnant qualifié, doté des connaissances pédagogiques et des contenus, ainsi que des compétences essentielles est un facteur très important, mais cinq autres caractéristiques de l’école sont également primordiales : • Un nombre raisonnable d’élèves par enseignant (pas plus de 50 élèves par enseignant). • Des services de base tels que les toilettes pour les filles et l’électricité. • L’ accès aux manuels pour la lecture et les mathématiques. • L’ assiduité en classe à la fois des enseignants et des élèves. • Un environnement scolaire exempt d’abus et de violence. L’ étude définit des seuils minimum de réalisation de ces conditions de base et considère qu’il est essentiel qu’un ensemble intégré d’au moins cinq des six conditions soit atteint ou dépassé pour que les enseignants puissent efficace- ment aider leurs élèves à apprendre. Dans quelle mesure les écoles primaires des pays d’Afrique subsaharienne garantissent-elles ces conditions ? Les micro-données provenant des évaluations SACMEQ III (2007) et PASEC 2014 fournissent la réponse à cette question (graphique P.14). Les conditions sont meilleures dans les pays du Groupe 1, quoique de façon inégale : Au Botswana, au Eswatini et à l’île Maurice, plus de 70% des écoles dépassent les seuils pour au moins cinq des six conditions, alors qu’au Lesotho, à peine plus d’un tiers des établissements scolaires sont concernés. Au Kenya et au Malawi - deux pays disposant de données pour le SACMEQ IV (2013) qui ont pu être analysées au moment de la présente étude  - la situation s’est dégradée entre 2017 et 2013, le nombre d’écoles Présentation générale   41 Graphique P.14  Répartition des écoles primaires d’Afrique subsaharienne par rapport à l’existence des conditions essentielles propices à un enseignement et à un apprentissage efficaces, par Groupes de pays Eswatini 78 Maurice 75 Botswana 72 Kenya 63 Groupe 1 Namibie 55 Kenya (2013) 51 Zimbabwe 48 Afrique du Sud 43 Lesotho 35 Congo 3 Tanzanie 37 Malawi 35 Groupe 2 Malawi (2013) 17 Togo 12 Ouganda 11 Cameroun 9 Mozambique 49 Côte d'Ivoire 37 Groupe 3 Zambie 33 Bénin 27 Burundi 24 Sénégal 35 Groupe 4 Burkina Faso 20 Niger 16 Tchad 4 Nombre d’écoles (%) 0–1 condition remplie 2 conditions remplies 3 conditions remplies 4 conditions remplies 5 conditions remplies 6 conditions remplies Sources : Sur la base de l’analyse des micro-données provenant du SACMEQ III 2007 et du PASEC 2014. Note : Les chiffres figurant dans la colonne de droite représentent le pourcentage d’écoles qui réunissent au moins cinq des six conditions prévues pour l’ensemble des services minimum. Les six conditions sont les suivantes : a) des enseignants qualifiés, dotés des connaissances pédagogiques et des contenus, ainsi que des compétences adéquates ; b) pas plus de 50 élèves par enseignant ; c) services de base tels que des toilettes pour les filles et l’électricité ; d) accès aux manuels pour la lecture et les mathématiques ; e) assiduité en classe à la fois des enseignants et des élèves et ; f) un environnement scolaire exempt d’abus et de violence. Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2. Les données du SACMEQ de 2007 et de 2013 pour le Kenya et le Malawi ont permis d’avoir deux séries de résultats. 42   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE réunissant cinq des six conditions étant passé des deux tiers à la moitié au Kenya, et d’un tiers à moins d’un cinquième au Malawi. Dans les autres pays SACMEQ, notamment ceux des Groupes 2 et 3, de nom- breuses écoles sont en grande difficulté. La situation n’est guère plus reluisante parmi les pays du PASEC. La situation du Burundi est paradoxale : seul un tiers des écoles primaires réunit au moins cinq des six conditions requises, mais curieu- sement, les élèves de ce pays obtiennent régulièrement les meilleurs résultats aux examens du PASEC. Les caractéristiques uniques de ce pays – une population adulte qui sait lire et écrire, une seule langue, des effectifs raisonnables dans les classes, des enseignants tous formés et bénéficiant de contrats d’emploi réguliers, un niveau d’encadrement élevé des enseignants dans l’établissement – peuvent sans doute suffire pour combler l’absence des conditions traditionnellement considérées comme essentielles pour un apprentissage de qualité. La grande diversité des conditions essentielles dans les écoles de la région souligne la nécessité d’une approche nuancée dans le soutien aux enseignants, à travers la gestion de leurs conditions de travail. Dans les pays où la plupart des écoles réunissent les six conditions essentielles offrant un cadre minimum propice à l’apprentissage, il conviendrait, dans la mesure du possible, de pri- vilégier davantage l’efficacité des enseignants – que ce soit à travers la prépa- ration, la formation continue ou des mesures d’incitation. Dans les cas où les contraintes sont particulièrement importantes – notamment dans les écoles qui ne réunissent guère plus de trois ou quatre des conditions essentielles – la priorité pourrait être de combler ces lacunes, en particulier lorsqu’elles appa- raissent comme des obstacles majeurs à l’efficacité de l’enseignement. Quoi qu’il en soit, comme en témoigne l’exemple du Burundi, il semble possible – même dans les pays très pauvres ne disposant pas à l’heure actuelle des res- sources pour assurer l’ensemble des conditions essentielles dans toutes les écoles – de promouvoir l’apprentissage en concentrant les efforts sur la prépa- ration, la formation et l’encadrement des enseignants, et en veillant à mainte- nir des effectifs de taille raisonnable dans les classes pour permettre aux enseignants de faire leur travail. Actions politiques pour améliorer l’efficacité des enseignants La gestion des enseignants se heurte aujourd’hui à des défis particuliers dans les pays d’Afrique subsaharienne. Dans de nombreux pays, l’on trouve à la fois des enseignants formés ou non formés, qualifiés, non qualifiés, voire sous-qualifiés, qui ont une connaissance moyenne et variable des contenus, des compétences et de l’efficacité de l’enseignement. Les enseignants ne sont pas bien déployés à travers les écoles et leur travail influe trop peu sur l’apprentissage des élèves, faute d’une supervision et d’un encadrement systématiques au niveau de l’école. Dans le même temps, les pays de la région sont confrontés à des pressions pour maintenir le rythme rapide de recrutement d’enseignants dans les décennies à Présentation générale   43 venir, afin de faire face à l’augmentation continue de la scolarisation, en parti- culier au niveau du premier cycle de l’enseignement secondaire. Dans ce contexte, il est primordial de rationaliser la mosaïque des approches, afin de garantir aux enseignants potentiels et en exercice, un système intégré de préparation et de perfectionnement professionnel, ainsi qu’un appui et une supervision appropriés sur leur lieu de travail. Ces pays doivent également faire en sorte que les politiques et programmes d’enseignement soient en cohérence avec les politiques plus générales, comme celles sur la langue d’enseignement et celles privilégiant l’enseignement des mathématiques et des sciences au premier cycle du secondaire. Les mesures destinées à améliorer les connaissances et les compétences pro- fessionnelles des enseignants sont notamment les suivantes : • Remanier les programmes de formation des enseignants afin de mieux les har- moniser sur le plan du contenu et de la conception avec les programmes scolaires et les priorités systémiques concernant l’apprentissage des élèves à l’école (aptitudes à l’enseignement de la lecture et du calcul dans les petites classes ; enseignement dans la langue locale ; connaissance des mathéma- tiques et des sciences et ; aptitudes en langues étrangères pour les futurs enseignants du secondaire, par exemple). • Améliorer les stages pratiques grâce à une meilleure supervision des ­ enseignants stagiaires, à une réflexion orientée sur l’expérience pratique de l’enseignement, et un accès accru des enseignants en formation aux vidéos et autres ressources numériques qui illustrent les bonnes pratiques en matière d’enseignement. • Permettre aux enseignants en exercice de mieux maîtriser leur travail grâce au perfectionnement professionnel continu destiné à améliorer leur connaissance des contenus et leurs compétences pédagogiques, avec des options pour les différents enseignants en fonction des besoins, notam- ment l’intégration des nouveaux enseignants, la formation programma- tique ou thématique en cours d’emploi (par opposition aux ateliers ponctuels) adaptée aux besoins recensés, l’orientation et l’accompagne- ment en classe pour les enseignants en difficulté et l’apprentissage par les pairs. • Veiller à la qualité des programmes de formation des enseignants en établissant des critères de référence relatifs au contenu et à la pertinence de ces pro- grammes ainsi que le suivi et l’évaluation de l’impact sur les compétences des enseignants et leur efficacité sur le plan de l’amélioration de l’apprentissage (notamment par la définition des conditions d’accréditation des prestataires de formation, les critères de sélection des stagiaires et de certification de l’achèvement concluant des programmes). 44   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Les mesures destinées à renforcer le leadership des chefs d’établissement et des autres responsables en matière de gestion et d’enseignement sont notam- ment les suivantes : • Proposer des formations ciblées aux chefs d’établissement et aux conseil- lers pédagogiques (ou encadreurs) afin de renforcer leurs capacités à accompagner et à orienter systématiquement les enseignants sous leur responsabilité. • Fournir aux chefs d’établissement des outils simples de gestion de leurs écoles (pour le suivi de l’assiduité des enseignants, le contrôle des stocks de matériel scolaire, le maintien d’un climat scolaire exempt d’abus, par exemple). • Renforcer les capacités institutionnelles de sorte que les responsables pédago- giques puissent assurer le suivi et l’évaluation des programmes et des poli- tiques visant à améliorer les compétences et l’efficacité professionnelles des enseignants. Les mesures destinées à améliorer la répartition des enseignants dans les écoles ainsi que leur assiduité sur le lieu de travail sont notamment les suivantes : • Mobiliser les principaux acteurs autour de l’élaboration de normes d’affectation et de déploiement des enseignants sur la base de données fiables provenant de toutes les sources pertinentes. • Rationaliser les politiques en matière de congés des enseignants afin de réduire les absences autorisées en période scolaire, et envisager le recrutement éven- tuel de remplaçants. • Renforcer les mesures d’incitation à l’intention des chefs d’établissement et de la communauté locale afin de réduire les absences du personnel enseignant. Les mesures destinées à assurer que toutes les écoles offrent les conditions minimales propices à l’enseignement et à l’apprentissage comprennent notam- ment ce qui suit : • Accorder en priorité une aide supplémentaire aux écoles qui présentent de sérieuses lacunes sur le plan de l’environnement physique (effectifs plétho- riques, absence de toilettes), de l’accès aux ressources pédagogiques (manque d’enseignants qualifiés et de manuels), et du milieu scolaire (forte prévalence de comportements violents et perturbateurs). Les mesures destinées à renforcer l’éthique de responsabilité et les incitations en vue du développement d’un corps enseignant plus efficace sont notamment les suivantes : • Entretenir un dialogue permanent avec les enseignants par le biais de leurs syndicats ou d’autres intervenants clés en vue de favoriser un sentiment d’ap- propriation mutuel du programme d’apprentissage et de ses défis. Présentation générale   45 • Convenir d’un plan d’action axé sur les résultats afin de lever les principaux obs- tacles à l’amélioration des résultats scolaires, notamment les plaintes au sujet des conditions de travail ; des rémunérations et de l’évolution des carrières ; des normes d’éthique professionnelle ; et des critères et processus de certification et de recrutement des enseignants, ou de sélection des chefs d’établissement. Accroissement des dépenses et des processus budgétaires pour améliorer la qualité La plupart des pays d’Afrique subsaharienne auront besoin de plus de ressources pour s’acquitter de la tâche largement inachevée d’assurer l’accès universel à une éducation de base de qualité. Ils devront également faire un usage plus efficace des ressources en vue d’optimiser les résultats d’apprentissage de leurs enfants. En 2014, la valeur médiane des dépenses publiques par élève en Afrique sub- saharienne s’élevait à 208 dollars pour l’enseignement primaire et 412 ­ dollars pour le secondaire ($ PPA constant de 2013), contre 451 et 665 dollars, respec- tivement, en Asie du Sud, la région ayant le deuxième niveau de dépenses publiques par élève le plus faible. Une part importante des dépenses d’éducation en Afrique subsaharienne est également constituée des salaires des enseignants, ce qui laisse peu de ressources à consacrer aux intrants essentiels pour un ensei- gnement de qualité. Financements et dépenses en matière d’éducation en Afrique subsaharienne Le budget de l’État central domine le financement public de l’éducation partout en Afrique subsaharienne, la contribution des gouvernements locaux dans le cadre de systèmes décentralisés étant marginale. Les ménages sont souvent un élément important, et parfois la principale source de financement global du système éducatif. Le financement assuré par l’État est complété, à divers degrés, par l’aide pro- venant d’autres pays. Ce flux de fonds est relativement modeste et fortement concentré dans quelques pays. En 2014, la moyenne régionale annuelle de l’aide à l’enseignement primaire par enfant scolarisé était de 8 dollars ; les pays des Groupes 2 et 3 ont reçu très peu d’aide (tableau P.3). Les pays d’Afrique subsaharienne consacrent une part plus importante de leurs dépenses publiques pour l’éducation à l’enseignement primaire (environ 43 pour- cent) par rapport à d’autres régions (30-34 pourcent). Comme on pouvait s’y attendre, les pays des Groupes de 2 à 4, qui ont encore besoin d’universaliser l’enseignement primaire, consacrent une plus grande part de leurs dépenses publiques en matière d’éducation (environ 50 pourcent) à l’enseignement 46   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE Tableau P.3  Aide totale à l’enseignement primaire par enfant scolarisé en Afrique subsaharienne, par Groupes de pays Dollars constants de 2014 Groupe de pays De 0 à 10 dollars De 11 à 20 dollars Plus de 21 dollars Groupe 1 : Congo (<1) Zimbabwe (15) Eswatini (21) Afrique du Sud (1) Seychelles (24) Kenya (6) Sao Tomé-et-Principe (26) Lesotho (8) Namibie (34) Ile Maurice (9) Botswana (40) Ghana (10) Groupe 2 : Togo (1) Malawi (12) Néant Cameroun (1) Rwanda (14) Ouganda (3) RDC (4) Comores (8) Tanzanie (8) Groupe 3 : Angola (2) Zambie (14) Néant Nigeria (2) Mozambique (15) Côte d’Ivoire (3) Éthiopie (16) Mauritanie (3) Gambie (18) Bénin (7) Sierra Leone (19) Burundi (7) Madagascar (8) Groupe 4 : Tchad (3) Guinée (11) Sénégal (31) Guinée équatoriale (3) Niger (13) Libéria (41) Érythrée (3) Burkina Faso (16) Soudan (6) Mali (18) Sources : Compilé à partir des données sur l’aide provenant de la base de données des activités relatives à l’aide du Système de notification des pays créanciers (SNPC) de l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) disponible en ligne à https://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=CRS1, consulté le 12 octobre 2017 ; données sur la scolarisation de l’UNESCO 2016 (tableau 2) ; données sur la scolarisation de l’UNESCO 2016, tableau 2, sauf pour l’Angola, le Nigeria et le Soudan pour lesquels les données proviennent de la base de données de Institut de statistique de l’UNESCO, ISU.Stat (consultée le 12 octobre 2017), http://data.uis.unesco.org. Note : Les fourchettes des dépenses correspondent aux versements bruts en dollars courants de 2014. Les chiffres entre parenthèses représentent l’aide par enfant inscrit dans l’enseignement primaire. Les pays sont classés à l’intérieur de chaque cellule dans l’ordre croissant du montant de l’aide par enfant. L’aide à l’enseignement primaire est estimée en utilisant l’aide directe à l’enseignement primaire (définie au sens large) à partir du SNPC-OCDE, de même que l’appui budgétaire général et l’aide non spécifiée par niveau, qui est estimée comme allant vers l’enseignement primaire (en utilisant la proportion reflétée dans les tableaux relatifs à l’aide de l’UNESCO). Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2. primaire, tandis que les pays du Groupe 1 consacrent une part plus importante (presque 40%) à l’enseignement secondaire (graphique P.15). Chose frappante cependant, les pays du Groupe 4 dépensent, en moyenne, près d’un quart de leur budget public pour l’éducation au profit de l’enseignement supérieur, quasiment le même montant que celui consacré à l’enseignement secondaire. Dans certains Présentation générale   47 Graphique P.15  Part moyenne des dépenses publiques consacrées à l’éducation par niveau d’éducation et Groupes de pays en Afrique subsaharienne, 2014 50 Part des dépenses publiques consacrées 40 à l’éducation (%) 30 20 10 0 Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4 Primaire Secondaire Tertiaire Source: Élaboré à partir des tableaux statistiques de l’UNESCO (2016) pour l’exercice se terminant en 2014 - version longue, tableau 16. Engagement financier national en faveur de l’éducation : dépense publique. Note: Les données portent sur 26 pays ayant un cycle d’enseignement primaire de six ans. Pour les définitions des groupes de pays, voir le tableau P.1 et le graphique P.2. pays (Éthiopie, Guinée et Tchad), une part disproportionnée du budget va à l’en- seignement supérieur, même si beaucoup reste à faire dans le primaire (non repré- senté sur le graphique). Faible financement public des dépenses non salariales Les dépenses pour les intrants non salariaux tels que la formation des ensei- gnants, le soutien pédagogique et le matériel approprié pour les enfants demeurent une priorité secondaire dans beaucoup de pays d’Afrique subsaha- rienne. La Zambie est un cas typique, en 2013, 89 pourcent du total des dépenses au titre de l’enseignement de base et secondaire étaient destinées aux salaires, 8,5% aux infrastructures (principalement dans les établissements d’enseignement secondaire), et 2,5% aux subventions scolaires. Une part négli- geable de 0,2 pourcent des dépenses totales était destinée aux manuels sco- laires (Banque mondiale 2016). Au Ghana, les traitements représentaient environ 97% en moyenne des dépenses publiques pour l’éducation de base (Darvas et Balwanz 2014). Hormis certains pays à revenu intermédiaire du Groupe 1, la plupart des pays de la région misent énormément sur les bailleurs de fonds pour financer les manuels scolaires, la formation des enseignants, et même les subventions aux 48   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE établissements scolaires. Alors qu’elle est inévitable pour les pays les plus pauvres, cette dépendance à l’égard de l’aide étrangère pour faire face à des dépenses ordi- naires essentielles de fonctionnement du système crée des problèmes de pérennité et expose le système éducatif à des chocs importants, en cas de retrait de l’aide. Malgré la suppression officielle des frais de scolarité, de nombreux pays continuent de compter sur les contributions des ménages pour compenser les faibles niveaux de dépenses publiques consacrées aux intrants scolaires non salariaux. Ces contributions représentent environ 35% en moyenne des dépenses totales de l’éducation dans 18 pays d’Afrique subsaharienne (UNESCO 2015).27 Cette dépendance à l’égard des ménages a tendance à renforcer les iné- galités dans la qualité de l’offre scolaire. Dans les zones rurales où les revenus des ménages varient en fonction du climat, cette situation rend également vul- nérable l’éducation des enfants de ces zones aux conditions locales. Inégalités en matière de dépenses publiques pour l’éducation de base En Afrique subsaharienne, les dépenses publiques pour l’éducation profitent en grande partie aux plus nantis parce que l’écrasante majorité des enfants pauvres ne va pas au-delà de l’enseignement primaire. L’inégalité dans la répartition des dépenses pour l’enseignement primaire et pour le premier cycle du secondaire renforce cette distorsion. L’inégalité dans les dépenses publiques pour l’éducation de base résulte de trois facteurs : la répartition des enseignants, la qualité des infrastruc- tures scolaires et, les intrants relatifs à l’enseignement et à l’apprentissage. Dans les communautés les plus défavorisées, les établissements d’enseigne- ment ont tendance à avoir un taux d’encadrement (ratio élève/enseignant) plus élevé, moins d’enseignants bien qualifiés et expérimentés, moins de livres, de matériel didactique et d’équipements scolaires. Ces écoles offrent également moins de commodités qui permettraient d’améliorer les condi- tions de travail et inciteraient les enseignants à préférer travailler dans une école spécifique. En outre, dans de nombreux pays, les pouvoirs publics n’ont pas été en mesure de veiller à ce que les enseignants affectés dans les écoles rurales continuent d’y enseigner après avoir achevé leur affectation initiale. Il existe des écarts considérables entre les régions ou les districts en matière de distance entre l’école et le lieu de résidence des enfants, mais aussi en ce qui concerne les effectifs des classes. Ces écarts sont plus pro- noncés dans le premier cycle de l’enseignement secondaire dans les régions défavorisées qui ont peu d’établissements d’enseignement secondaire du pre- mier cycle par rapport aux écoles primaires. Dans les grands pays d’Afrique subsaharienne, les inégalités en matière de financement de l’éducation entre les régions ou les unités administratives infra- nationales constituent un problème majeur. L’Afrique du Sud et l’Éthiopie ont des systèmes bien développés pour transférer dans les provinces ou dans les Présentation générale   49 régions les fonds destinés au secteur de l’éducation. En Éthiopie, la dévolution des pouvoirs aux régions et aux woredas (districts), conjuguée au système de transferts intergouvernementaux, a permis de réduire globalement les écarts en matière de taux de scolarisation dans les woredas et de faire davantage profiter les ménages défavorisés que les ménages aisés (Khan et col. 2014). En RDC, le système de transfert des fonds est encore embryonnaire. Toutefois, dans le cas du Nigeria, les transferts fédéraux ont continué à accentuer les disparités entre régions (encadré P.2). E N C A D R É P. 2 Relations intergouvernementales et effets sur l’égalité en matière d’éducation au Nigeria Le Nigeria est un État fédéral et les droits des États fédérés sont garantis par la Constitution. L’essentiel des revenus de ces États provient des recettes accumulées dans le compte de l’État fédéral sur la base de formules permettant de déterminer la répartition entre le gouvernement fédéral, les États fédérés et les administrations locales d’une part, et entre les États fédérés d’autre part - peu de choses ayant changé au cours des 50 dernières années. Depuis 2004, dans le cadre de l’action visant à accélérer l’universalisation de l’éduca- tion de base, trois grandes institutions ont été impliquées dans l’offre de cette éducation, à savoir  : les Conseils de l’éducation de base universelle au niveau des États (SUBEB)  ; la Commission de l’éducation de base universelle (UBEC) et le ministère fédéral de l’Éducation. De nombreux défis se posent en l’absence de cohérence entre les responsabilités confiées aux organismes, en vertu de la loi, et l’autorité institutionnelle dont ils sont investis pour s’acquitter de ces responsabilités. Le gouvernement fédéral doit, à travers l’UBEC, répartir l’essentiel de ses fonds d’intervention de manière égale entre tous les États. Cela empêche les États ayant un faible accès à l’éducation de base de se développer. Les dispa- rités en matière d’éducation ne diminueront pas si aucun changement n’est apporté à la répartition des fonds en faveur d’un cadre d’intervention basé sur les résultats et de poli- tiques axées sur les États les plus nécessiteux. Bien que l’UBEC soit juridiquement habilitée à assurer le suivi et à évaluer l’éducation de base, cet organisme n’a pas la capacité de le faire et s’appuie plutôt sur les États, lesquels souffrent souvent d’une faible capacité de collecte de données. Par conséquent, le Nigeria compte parmi les nombreux pays - surtout parmi les plus pauvres - d’Afrique subsaha- rienne qui ne peuvent fournir des renseignements fiables à l’UNESCO. Le pays ne dispose pas non plus d’un système de notification des dépenses au gouver- nement fédéral. Outre les données précises sur les salaires des enseignants du primaire, il ressort de l’étude sur les États, pris individuellement, que les dépenses publiques à tous les niveaux d’éducation représentent 12,5% du total des dépenses publiques, et environ 1,7% du PIB - ces deux mesures étant parmi les plus faibles en Afrique subsaharienne. Source : Banque mondiale 2015. 50   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE La décentralisation de la prise de décisions et du financement en matière d’éducation au profit des collectivités infranationales et des gouvernements locaux ou le recours à l’administration scolaire ne sont pas des formules magiques permettant d’assurer l’équité ou d’améliorer l’apprentissage (Hanushek, Link et Woessmann 2013 ; Snilstveit et col. 2015). La façon dont la stratégie de décentralisation est conçue et mise en œuvre a une forte incidence sur le résultat. Le fonctionnement de l’administration scolaire en Afrique subsaha- ­ rienne diffère de celui d’autres régions car les comités scolaires ont en général un contrôle (voire une influence) limité sur la gestion du personnel enseignant (y compris l’embauche et le licenciement), ainsi que sur le choix du matériel didactique et sur l’établissement du calendrier scolaire. Leur impact sur l’assi- duité des enseignants et sur l’apprentissage des élèves est par conséquent limité. En fin de compte, c’est la disponibilité en temps voulu et la qualité des intrants, en particulier des enseignants à l’école et dans les salles de classe qui importent pour améliorer l’apprentissage. Nécessité d’une mobilisation accrue des ressources internes Dans l’ensemble, la part des recettes internes dans le PIB est plus faible en Afrique subsaharienne que dans d’autres régions, environ 17% en 2013 contre une moyenne mondiale d’environ 25% (FMI 2016). Les pays où cette part est inférieure à la moyenne régionale sont les suivants : l’Éthiopie, Madagascar, le Nigeria, l’Ouganda et la RCA. En l’absence d’une action forte en faveur de la mobilisation des recettes, l’offre d’éducation de base sera menacée, la plupart des pays d’Afrique subsaharienne allouant déjà des parts relativement importantes de leurs dépenses publiques à l’éducation et, étant prévu que les contribu- tions des bailleurs de fonds en faveur de ce secteur seront amenées à stagner ou à décroître. Faire supporter une part grandissante des coûts de l’éducation de base aux ménages risque d’exacerber les inégalités. En Afrique subsaharienne, les ménages contribuent grandement aux dépenses totales pour l’éducation, comme indiqué plus haut. Certes, les ressources des ménages consacrées à l’éducation ne représentent qu’une part relativement faible des dépenses totales de ces ménages, en raison peut-être du fait que les familles pauvres ne scolarisent pas tous leurs enfants. Par conséquent, faire endosser ces coûts aux familles, sans tenir compte de leur capacité à payer peut renforcer les inégalités en matière d’accès. Cependant, en faisant endosser aux ménages une plus grande part des coûts au niveau post-éducation de base, pourrait libérer les ressources de l’État de manière à équilibrer la qualité de l’éducation de base. Inefficacité des processus budgétaires des ministères de l’éducation La façon dont les ressources sont utilisées pour atteindre les objectifs straté- giques du gouvernement dépend de la cohérence entre les allocations Présentation générale   51 budgétaires et les politiques et programmes conçus pour atteindre ces objec- tifs, ainsi que de l’efficacité de la mise en œuvre. Bien que nous ne disposions pas de données permettant d’évaluer les procédures budgétaires ayant spéci- fiquement trait au secteur de l’éducation, les indicateurs de responsabilité en matière de dépenses et de finances publiques (PEFA) relatives aux mécanismes gouvernementaux de planification et d’affectation budgétaire rendent compte des lacunes qui s’observent dans les procédures budgétaires en général, ce qui a nécessairement un impact sur le secteur de l’éducation.28 Il ressort des indicateurs PEFA de 38 pays d’Afrique subsaharienne que la planification budgétaire est faible dans la plupart d’entre eux, y compris dans les pays les plus performants du Groupe 1. Nombreux sont ceux qui ont obtenu des résultats positifs en ce qui concerne le bon déroulement du processus de prépa- ration du budget annuel et l’étendue de la participation à ce processus. Au regard de ces deux aspects des processus de planification budgétaire, le Gabon (Groupe 1) et un certain nombre de pays des Groupes 3 et 4 dont le Burkina Faso, le Burundi, l’Éthiopie et la Gambie, ont obtenu de bons résultats. Cependant, la performance des pays d’Afrique subsaharienne est relativement mauvaise en ce qui concerne la transparence budgétaire, une qualité essentielle permettant de classer correctement les dépenses et d’en effectuer le suivi. En outre, l’élaboration du budget en fonction des politiques n’est pas encore large- ment pratiquée dans les pays d’Afrique subsaharienne, notamment en termes de planification pluriannuelle de la collecte des recettes, des dépenses et du budget de l’État. Les processus d’exécution du budget présentent encore plus de faiblesses, en particulier dans les pays des Groupes 3 et 4. La prévisibilité des fonds affecte la capacité des ministères de l’éducation et leurs services à mettre en œuvre les activités envisagées dans les délais prévus. Moins d’un quart des pays ont reçu une évaluation positive, et plus de la moitié la plus faible note. Ces tendances témoignent de l’incapacité des ministères centraux des finances à prévoir les engagements en espèces et à fournir des informations fiables requises par le secteur de l’éducation pour planifier et mettre en œuvre l’offre de services. D’importantes lacunes s’observent en matière d’efficacité des contrôles sur les dépenses salariales et non salariales. Le contrôle de la masse salariale est parti- culièrement important pour un secteur à forte intensité de main-d’œuvre comme celui de l’éducation. Seulement 35% des pays ont reçu une évaluation positive, 41% ayant été classés au niveau le plus bas. Dans certains pays, la dépense réelle relative aux salaires dans le secteur de l’éducation dépasse les plafonds fixés par le ministère des Finances de plus de 100%. Les faiblesses dans le contrôle des dépenses non salariales sont encore plus alarmantes. Ces indica- teurs permettent d’évaluer la présence et la solidité des mesures visant à main- tenir les obligations de l’État en matière de paiements, dans la limite des allocations budgétaires appropriées, réduisant ainsi au minimum le risque de 52   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE corruption. Seulement 11% des pays ont reçu une évaluation positive, un tiers étant classé au niveau le plus bas. Les évaluations de la dépense publique, dans le secteur de l’éducation, effec- tuées par la Banque mondiale dans 11 pays d’Afrique subsaharienne mettent en évidence d’autres dimensions de la piètre exécution du budget.29 Les taux d’exé- cution sont faibles pour les intrants non salariaux. En 2013, le taux d’exécution du budget au Sénégal était par exemple de 18% pour le matériel didactique, de 25% pour les bâtiments des établissements d’enseignement secondaire des zones rurales, et de 7% pour les écoles primaires. Les gouvernements accordent géné- ralement la priorité au paiement des salaires, mais dans certains pays, même la régularité de ce paiement n’est pas toujours garantie. L’accumulation des arriérés est l’un des principaux motifs de grèves d’enseignants et de perte d’heures de cours. Le comportement des partenaires au développement entrave souvent la mise en œuvre de bonnes pratiques budgétaires. S’agissant des mesures telles que la « prévisibilité de l’aide budgétaire directe », « l’information financière fournie par les bailleurs de fonds pour l’élaboration du budget et l’établissement des rapports sur l’aide aux projets et programmes », ainsi que « la proportion de l’aide gérée en ayant recours aux procédures nationales », la plupart des bailleurs de fonds des pays d’Afrique subsaharienne ont obtenu des évaluations moins élevées que les valeurs maximales et certains ont obtenu les évaluations les plus faibles.30 Dans de nombreux pays, les flux de financements externes se pour- suivent à travers des canaux parallèles, aussi bien pour l’offre de services que pour les transferts financiers. Actions politiques pour cibler les dépenses en matière d’éducation et pour renforcer les processus budgétaires En général, les ministères de l’éducation ne mettent guère l’accent sur l’amélioration des processus budgétaires - planification, préparation, exécution ­ et suivi de l’exécution du budget - susceptibles de contribuer à la réalisation de leurs objectifs. Des améliorations dans les quatre grands domaines ci-après méritent d’être examinées. Les mesures destinées à utiliser des ressources supplémentaires pour amélio- rer l’apprentissage sont notamment les suivantes : • Accroître et protéger le budget destiné aux intrants permettant d’améliorer la qualité autres que ceux liés aux enseignants et renforcer les procédures de gestion des finances publiques liées à l’exécution de ces postes budgétaires. • Recruter des enseignants supplémentaires pour améliorer l’apprentissage dans des domaines tels que la lecture et le calcul dans les petites classes, ainsi que les sciences et les mathématiques au niveau du secondaire. Présentation générale   53 • Envisager l’utilisation d’enseignants suppléants pour réduire la perte des heures de cours du fait des absences autorisées des enseignants Les mesures destinées à réduire les disparités dans les niveaux de prestation sont notamment les suivantes : • Définir et mettre en œuvre des normes minimales pour les installations sco- laires et les supports didactiques. • Cibler les régions et les ménages pauvres en vue d’apporter une aide supplé- mentaire pour corriger les inégalités. Les politiques destinées à améliorer l’efficacité de la dépense publique relative aux salaires et les intrants non salariaux comprennent ce qui suit : • Mettre en œuvre les politiques d’affectation des enseignants existantes. • Payer régulièrement les salaires des enseignants et améliorer le contrôle de la masse salariale et des indemnités. • Établir des mesures de reddition des comptes visant à réduire les absences non autorisées des enseignants. • Renforcer la capacité à améliorer l’exécution du budget non salarial, des achats et de la gestion des contrats de construction, de manuels et d’autres intrants essentiels. Les mesures destinées à renforcer la programmation pluriannuelle des res- sources nécessaires sont notamment les suivantes : • Préparer les prévisions de dépenses sur la base de l’évaluation d’autres options, du rapport coût-efficacité et de l’impact sur d’autres sous-secteurs. De la science à la prestation de services : combler le déficit de capacités institutionnelles Pour la plupart des ministères de l’éducation en Afrique subsaharienne, en par- ticulier ceux qui tentent encore d’assurer un accès universel à l’enseignement primaire, la gestion même des fonctions de base du système est un défi. Ils doivent planifier et gérer le recrutement, la formation, le déploiement et la per- formance des enseignants ; superviser le choix de l’emplacement de nouvelles écoles et les processus de construction ; superviser l’achat et la livraison dans les délais des manuels et du matériel didactique ; assurer la collecte, l’analyse et l’utilisation régulière des données. De plus, l’amélioration de l’apprentissage des élèves dans l’éducation de base exige encore plus de capacités que l’augmentation du taux de scolarisation au niveau primaire - les ministères en charge de l’éducation des pays d’Afrique 54   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE subsaharienne doivent répondre à ces deux exigences. Pour accorder désormais à l’apprentissage l’attention voulue, il faut aligner toutes les politiques et les ins- titutions sur cet objectif, ce qui nécessite des capacités techniques spécialisées ainsi que des capacités « plus abstraites » à diriger, coordonner et changer de cap, selon le besoin. En outre, dans les pays d’Afrique subsaharienne, les sys- tèmes éducatifs sont devenus vastes et complexes : le nombre de fonctions et d’intervenants a augmenté et la gestion du système est de plus en plus décentra- lisée. Une attention particulière est requise pour pouvoir créer un consensus au sein de ce groupe hétérogène. Ces capacités « plus abstraites » sont en fait plus difficiles à créer et à maintenir. S’agissant de capacités, la présente étude identifie cinq domaines qui sont importants pour renforcer le lien entre la science et la prestation de services, à savoir : la production et l’utilisation des données, les capacités techniques, la coordination interinstitutionnelle, l’obligation redditionnelle et les mesures incitatives, ainsi que la négociation et la recherche du consensus avec les parties prenantes. Générer et utiliser des données pour de meilleurs systèmes éducatifs La capacité du ministère de l’Éducation à mettre en place et à utiliser des sys- tèmes de données permettant d’assurer le suivi et d’améliorer la performance du secteur de l’éducation est un indicateur indirect de sa capacité de mise en œuvre. Le bon sens, le discernement professionnel et les leçons du passé sont également précieux ; mais ils doivent compléter et non supplanter les politiques et la prise de décisions fondées sur les données factuelles, adaptées aux opportunités et aux besoins locaux. Plusieurs pays d’Afrique subsaharienne semblent avoir amélioré leurs sys- tèmes de collecte et d’analyse des données au cours des deux dernières décen- nies, avec l’Institut de statistique de l’UNESCO (ISU) et les partenaires au développement qui apportent leur soutien à la formation et un appui infor- matique.31 De nombreux pays ont mis en place des systèmes d’information et de gestion de l’éducation (SIGE) qui recueillent les données sur les élèves, les intrants scolaires et les finances. La proportion de pays qui déclare des don- nées sur divers indicateurs s’est considérablement améliorée entre 2000 et 2014, en particulier pour celles qui ont trait aux élèves. Mais d’importantes insuffisances demeurent : dans bien des pays, même certaines données des plus élémentaires sur les inscriptions, les enseignants et les dépenses ne sont souvent pas facilement disponibles ; de nombreux SIGE ne couvrent pas l’en- semble du secteur de l’éducation (prestataires publics et privés ainsi que tous les niveaux d’enseignement, du préscolaire jusqu’à l’enseignement supérieur) ; et les données existantes sont souvent de piètre qualité. De plus, la plupart des SIGE ne sont pas en mesure d’établir un lien entre les données provenant de sources multiples. Présentation générale   55 Il ressort d’une enquête informelle réalisée dans le cadre de la présente étude que : a) seuls quelques pays avaient compilé des données fiables et en temps voulu sur la fréquentation scolaire des élèves, les apports matériels et financiers et les acquis scolaires, et b) les données sur les enseignants - disponibles pour la plupart des pays - manquaient souvent d’informations sur les qualifications pro- fessionnelles, la rémunération et les affectations. Les données sur les dépenses publiques consacrées à l’éducation sont curieusement très inégales. Les données de l’ISU montrent que dans environ 20% des pays de la région, on ne dispose pas de renseignements concernant la part des dépenses publiques pour l’éduca- tion dans le PIB, ou la part du financement public de l’éducation au profit de l’enseignement primaire ou secondaire. Fait remarquable, plus de la moitié des pays de la région ne fournissent pas de données sur la part de la rémunération des enseignants du primaire dans les dépenses publiques courantes. Les pays d’Afrique subsaharienne doivent procéder à des évaluations natio- nales et accroître leur participation aux évaluations à l’échelle régionale et inter- nationale pour mesurer les performances de leur système. Seulement un tiers environ de pays réalisent régulièrement des évaluations nationales (par exemple, tous les ans ou tous les deux ans), et seul environ un tiers participe aux évalua- tions internationales ou régionales. La plupart de ces évaluations portent sur- tout sur les classes du primaire. L’une des particularités des initiatives relatives aux données dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, y compris le SIGE et certains systèmes d’éva- luation de l’apprentissage, est que dans la majorité des cas ces systèmes ont été mis en place et sont gérés avec les fonds de bailleurs, souvent stimulés par la nécessité de suivre la réalisation des objectifs et des cibles de l’éducation pour tous (EPT). La multiplicité des projets financés par des bailleurs - chacun ayant un champ d’application, une conception technique et une justification propres - se traduit souvent par une inadéquation entre le logiciel et le matériel, des ques- tionnaires compliqués qui se chevauchent, une mise en œuvre irrégulière et, une incohérence et une incompatibilité interne de l’ensemble du système. Les initia- tives financées par les bailleurs sont aussi difficiles à pérenniser en raison de l’absence de ressources pour le maintien et les mises à jour systématiques du système, notamment les ressources humaines nécessaires à cet effet. Insuffisance des capacités techniques fragmentées entre de multiples institutions Pour que l’enseignement et l’apprentissage dans la salle de classe soient efficaces, il est nécessaire que le système dispose d’un ensemble de capacités techniques. Les principaux domaines sont : le développement des programmes d’enseigne- ment, y compris la politique linguistique ; le recrutement, le perfectionnement des enseignants, ainsi que leur encadrement ; l’élaboration, la production et la distri- bution de manuels et de supports didactiques ; l’évaluation de l’apprentissage ; le 56   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE leadership et le soutien scolaires et ; la construction d’écoles. Toutefois, dans la plupart des pays, l’infrastructure institutionnelle globale, qui prend en charge l’ap- prentissage des élèves, n’a pas évolué au même rythme que l’explosion de la scola- risation dans l’enseignement primaire. Dans certains pays, nombre d’institutions essentielles n’existent pas encore ; dans beaucoup d’autres, elles ne sont pas entiè- rement opérationnelles. Comme on pouvait s’y attendre, dans les pays les plus pauvres, il y a une forte dépendance à l’égard de l’assistance technique financée par des bailleurs de fonds intervenant dans ces domaines. Des institutions dotées de mandats clairs sont essentielles. Les pays ayant fait les plus grands progrès dans le domaine de l’éducation (Groupe 1) ont créé un réseau d’institutions d’appui dotées de mandats, de rôles et de responsabilités relativement clairs. Il s’agit notamment de l’Afrique du Sud, du Botswana et de l’île Maurice. Même si elles sont souvent entravées par des contraintes liées à l’expertise et aux moyens techniques, ces institutions ont néanmoins permis à ces pays de réviser régulièrement les curriculums, d’améliorer les programmes de formation des enseignants, de préparer de nouveaux manuels scolaires et des supports didactiques, de procéder régulièrement à l’évaluation de l’apprentissage au niveau national, et d’étalonner internationalement les acquis scolaires de leur système éducatif. Outre l’absence d’un mandat clair (ou parfois l’existence de mandats trop ambitieux) et une définition imprécise des responsabilités, les institutions d’appui de la plupart des pays d’Afrique subsaharienne souffrent souvent de structures de gouvernance inefficaces résultant des disparités en matière d’autonomie et de reddition de comptes, d’un ensemble inadapté de compé- tences liées au recrutement et à la formation dans les institutions publiques, de l’insuffisance des ressources matérielles, ainsi que d’un financement ­ i nadéquat et irrégulier. Il est également nécessaire que des investisse- ments  soient faits dans la formation continue des personnels qualifiés afin qu’ils puissent se tenir au fait des développements dans leurs domaines respectifs. Renforcer la coordination interinstitutionnelle Pour améliorer l’apprentissage, il est nécessaire d’avoir une importante capacité d’organisation permettant de coordonner et d’harmoniser le travail de diffé- rentes institutions, pour s’assurer que ce qu’elles produisent est mis en commun de manière efficace dans la salle de classe. Par exemple, les institutions qui offrent une formation initiale et une formation continue aux enseignants, celles qui fournissent les manuels scolaires et le matériel pédagogique, ainsi que celles qui organisent les examens et les évaluations doivent toutes être coordonnées pour que le contenu des enseignements soit bien harmonisé. Il s’est avéré diffi- cile d’organiser tout ce processus dans des contextes où les capacités sont limitées. Présentation générale   57 L’ une des tâches les plus difficiles dans les environnements de faible capa- cité est la révision du curriculum et les changements nécessaires à apporter en aval dans les manuels scolaires, le matériel pédagogique et didactique, les méthodes d’évaluation, la formation des enseignants et l’encadrement de ces derniers. Par exemple, les changements apportés au programme scolaire dans un certain nombre de pays d’Afrique subsaharienne, y compris l’utilisation des langues nationales dans l’enseignement, n’ont pas été intégrés dans le programme de formation des enseignants (Pryor et col. 2012). Cela ­ illustre l’absence de mécanismes de coordination entre le ministère de l’Édu- cation et les établissements de formation des enseignants permettant de s’as- surer que les programmes de formation initiale des enseignants sont en phase avec les nouveaux curriculum. Le problème se pose avec une acuité particu- lière pour la formation des enseignants du secondaire qui a lieu dans les universités. Mettre en place un système de reddition des comptes et des incitations L’absence d’intrants scolaires nécessaires pour l’enseignement et l’apprentissage, le niveau élevé d’absentéisme des enseignants dans l’école et dans les salles de classe, ainsi que les mauvais résultats en matière d’apprentissage partout en Afrique subsaharienne ont attiré l’attention sur les faiblesses du cadre général de reddition des comptes entre l’administration centrale et les prestataires de services de première ligne d’une part, et entre l’État et la société en général, d’autre part. L’influence de la recherche de rente et du favoritisme dans l’admi- nistration publique en général a également eu des effets néfastes sur le secteur de l’éducation. Les efforts visant à améliorer l’éthique de responsabilité, souvent par le biais d’incitations axées sur la performance des enseignants et des écoles, n’ont guère produit de résultats. La performance du gouvernement en matière de presta- tions de services éducatifs et autres services publics, ainsi que sa réactivité face aux interventions de la société civile dépend, de façon plus générale, de la nature du processus politique, surtout quand il s’agit de dire si la concurrence politique est fondée sur le clientélisme ou sur des interventions programmatiques (Devarajan, Khemani et Walton 2014). La capacité des communautés à jouer un rôle efficace dans le suivi et l’appli- cation de l’obligation redditionnelle dépend aussi de la complexité de la tâche, ainsi que de la formation supplémentaire et du soutien dont ces communautés ont besoin, eu égard au niveau d’instruction relativement faible dans la plupart des pays. Il peut être utile de fournir des informations aux parents et aux com- munautés, mais le succès reposera sur la capacité des écoles et des enseignants à changer leurs pratiques de manière à améliorer l’apprentissage (Bruns, Filmer et Patrinos 2011). La gestion communautaire de la construction des 58   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE établissements scolaires a souvent été d’un bon rapport coût-efficacité, pourvu qu’il y ait un investissement modeste dans la formation, l’élaboration d’outils et de procédures simples, ainsi qu’un encadrement technique. Renforcer la concertation et les négociations avec les intervenants Les systèmes éducatifs sont de plus en plus complexes et font intervenir une pluralité d’acteurs. Il s’agit notamment de représentants élus au niveau national et local, des associations de parents, des associations d’écoles privées et des syn- dicats d’enseignants. Eu égard aux intérêts qu’ils défendent et au niveau de pou- voir qu’ils détiennent, ces acteurs peuvent influer sur la mise en œuvre des décisions et surtout, sur les grandes réformes politiques. Les syndicats d’enseignants constituant un groupe important d’acteurs du secteur de l’éducation, la capacité de négocier et d’atteindre un consensus avec eux est essentielle pour améliorer l’apprentissage des élèves. Le nombre, la com- position et la capacité des syndicats d’enseignants varient d’un pays d’Afrique subsaharienne à l’autre. Au plan politique, le rôle qu’ils jouent dans un processus électoral compétitif diffère également d’un pays à l’autre. En outre, ils sont influencés par la nature du processus politique et par le fait que celui-ci soit essentiellement programmatique ou clientéliste. Les pays qui se sont appuyés sur un grand pourcentage d’enseignants contractuels ou recrutés par la collecti- vité, avec des qualifications formelles insuffisantes et des bas salaires, sont main- tenant confrontés au défi du développement d’un corps enseignant solidaire avec des normes minimales. L’incapacité de collaborer de façon stratégique peut saper les initiatives en matière de réforme et, les ministères de l’éducation doivent développer la capacité de créer un consensus avec les syndicats d’ensei- gnants et avec d’autres acteurs. Actions politiques pour développer les capacités Savoir ce qu’il faut réformer dans un système éducatif n’est qu’une partie de la solution. Le plus grand défi est de savoir comment engager et poursuivre les réformes dans différents contextes nationaux. À cet égard, il y a échec à la fois de la demande et de l’offre. Du côté de la demande, les pays ayant des res- sources limitées ne sont pas disposés à utiliser leurs maigres ressources pour renforcer les capacités à long terme, même s’ils reconnaissent que l’insuffi- sance des capacités est une contrainte. Du côté de l’offre, bien que certaines initiatives aient permis de renforcer les capacités dans des domaines spéci- fiques, ces efforts ont été fragmentaires ou déployés en appui à la mise en œuvre d’un projet. Le succès dépendra en grande partie de la volonté des pays à renforcer les capacités, et de la disponibilité des ressources pour financer le renforcement des capacités à long terme, comme cela a été fait dans le secteur financier ou dans le domaine de la gestion des risques de catastrophe. Présentation générale   59 Les politiques de renforcement des capacités doivent privilégier les actions suivantes : • Assurer en priorité la régularité et la fiabilité des données collectées sur les principaux indicateurs et améliorer l’utilisation des évaluations nationales et régionales de l’apprentissage. Ces données devraient être présentées aux inter- venants et acteurs clés du système à travers des analyses régulières, simpli- fiées et pertinentes. • Créer un pool de spécialistes de l’éducation au niveau national afin d’améliorer les capacités techniques des ministères de l’éducation, grâce à des programmes univer- sitaires ciblés dans les domaines de l’élaboration de curriculum et de matériel éducatif ; de la formation et du perfectionnement du personnel enseignant ; de l’évaluation, du suivi-évaluation ; ainsi que de l’économie de l’éducation. • Participer aux initiatives de gouvernance plus larges pour rendre les ministères de l’éducation et les entités décentralisées plus efficaces, particulièrement dans le domaine de la gestion des finances publiques et des ressources humaines. • Recourir à une approche régionale de renforcement des capacités grâce à un soutien à long terme destiné à surmonter l’« échec du marché » en matière de renforcement des capacités, en développant surtout plusieurs des capa- cités «  plus abstraites  » de leadership - coordination, changement de laculture administrative et recherche du consensus avec les parties prenantes – qui s’acquièrent mieux grâce à l’apprentissage entre pairs, ­ l’échange de connaissances sur les expériences de mise en œuvre et la coo- pération entre les pays. Résumé des conclusions Quel est l’état des lieux dans les pays d’Afrique subsaharienne en matière d’ap- prentissage dans l’éducation de base ? Il ressort de la présente étude que la situa- tion diffère considérablement d’un pays à l’autre. À la lumière des progrès accomplis depuis le milieu des années 90 en vue de l’universalisation de l’ensei- gnement primaire, nous pouvons classer les pays en quatre groupes. Les pays du Groupe 1 - les pays « confirmés », presque tous situés en Afrique orientale et australe, qui ont quasiment réussi la couverture universelle - et pré- sentent les niveaux d’apprentissage les plus élevés. Au fil du temps, plusieurs d’entre eux ont également enregistré de modestes améliorations en matière d’ap- prentissage. Malgré tout, ces niveaux sont bien au-dessous des résultats obtenus par les pays non africains lors des évaluations internationales. Dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne appartenant aux Groupes 2, 3 et 4 qui, d’une manière générale, ont encore du mal à assurer un accès 60   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE universel à l’enseignement primaire, moins de 50% des enfants ont atteint les niveaux minimum de compétence à une série de tests administrés dans diverses classes du primaire. Une question importante qui se pose est celle de la langue d’enseignement ou d’évaluation. Dans les pays où les élèves étaient encadrés et évalués dans la langue parlée à la maison, leurs performances étaient meilleures. Dans chaque pays, les corrélats d’apprentissage les plus forts relatifs au niveau de l’élève sont : une bonne connaissance de la langue d’enseignement, la situa- tion socioéconomique, le fait de se trouver dans une zone urbaine ou rurale et, (dans une moindre mesure) le genre. Ce qui est particulièrement préoccupant, c’est le différentiel important en matière d’apprentissage entre enfants nantis et enfants démunis, et entre enfants des zones urbaines et enfants des zones rurales dans la quasi-totalité des pays, les différences entre les sexes étant moins pro- noncées et variant d’un pays à l’autre. Les différences entre les établissements scolaires comptent pour une grande part dans les disparités dans l’apprentissage des élèves, par rapport aux différences au sein d’un même établissement, ce qui est révélateur de graves inégalités au sein de la population. Chose plus préoccu- pante, cette variation entre établissements dans les acquis scolaires s’explique presque totalement par la situation socioéconomique moyenne des enfants sco- larisés. Toutefois, de meilleures connaissances et pratiques pédagogiques des enseignants, un nombre accru d’heures effectives de cours, de meilleures res- sources pédagogiques et installations scolaires ont contribué à améliorer les acquis scolaires dans de nombreux pays, et ces pratiques peuvent permettre de surmonter certains des problèmes rencontrés dans les écoles fréquentées par des enfants dont la situation socioéconomique est précaire. La présente étude souligne l’importance d’adapter le système éducatif de sorte qu’il soit constamment axé sur les acquis scolaires. Un tel effort suppose de reconnaître et de s’attaquer aux lacunes qui imprègnent les systèmes éduca- tifs de la région. L’étude propose quatre domaines d’intervention permettant d’améliorer l’apprentissage de tous les élèves : 1. La progression des élèves de la première année jusqu’à la fin de l’enseignement de base doit être assurée. Les questions spécifiques à traiter sont : éliminer l’engorgement dans les petites classes en réduisant le redoublement officiel et déguisé ; s’assurer que les effectifs dans chaque classe sont en dessous de 50 ; former et équiper les enseignants pour enseigner la lecture dans les petites classes dans une langue qui est familière aux enfants ; améliorer le taux de passage entre la fin du primaire et le premier cycle du secondaire en amélio- rant l’accès, en particulier en milieu rural et pour les filles ; éliminer les exa- mens dans les premières classes du primaire ainsi que les examens à fort enjeu en fin d’études primaires et ; moderniser les programmes du premier cycle de l’enseignement secondaire, notamment par l’amélioration de la qua- lité de l’enseignement des mathématiques, des sciences et des langues. Présentation générale   61 2. Il est nécessaire que les pays d’Afrique subsaharienne révisent les politiques et programmes liés au recrutement, à la préparation, à l’affectation et à l’assi- duité des enseignants, ainsi qu’au soutien professionnel à leur apporter, des petites classes jusqu’au premier cycle de l’enseignement secondaire. L’exigence de mettre en œuvre des politiques relatives à la langue d’enseignement doit être intégrée dans la programmation et la gestion des enseignants. Les ensei- gnants en service, qui ont un faible niveau de connaissance des contenus et des compétences pédagogiques limitées, ont besoin d’un soutien continu à proximité ou au sein de l’école ; ce soutien porterait sur l’impératif d’amé- liorer l’enseignement de la lecture, les compétences académiques, les mathé- matiques et les sciences. Le redéploiement du personnel enseignant en vue de garantir des taux d’encadrement (ratio élève/enseignant) raisonnables nécessite que l’on combine une planification fondée sur les normes, des négo- ciations, des mesures incitatives et une stricte reddition des comptes. Il est nécessaire d’augmenter les heures de cours grâce à une plus grande présence des enseignants et à un recours éventuel aux enseignants suppléants. Ceux qui rejoignent le corps enseignant doivent être formés sur la base de pro- grammes restructurés de formation initiale des enseignants mettant l’accent sur la maîtrise des contenus, sur les stratégies d’enseignement pratiques et sur le développement professionnel continu. Pour être efficaces, les enseignants ont besoin de conditions minimales dans les écoles ; à l’exception du Groupe 1, dans tous les autres pays, moins de 10% des écoles réunissent actuellement les conditions minimales d’un environnement propice à l’enseignement et à l’apprentissage. 3. De nombreux pays d’Afrique subsaharienne doivent augmenter leurs dépenses publiques pour l’éducation de base par enfant, et la plupart pourraient utiliser leurs ressources budgétaires plus efficacement. Des ressources additionnelles sont nécessaires pour faire face au doublement annoncé des effectifs scolaires dans l’éducation de base au cours des quinze prochaines années. Une plus grande mobilisation des ressources nationales est nécessaire pour répondre à ces exigences. Des améliorations immédiates peuvent être réalisées en amé- liorant la planification budgétaire et les processus d’exécution du budget. Des ressources supplémentaires devraient être affectées au matériel d’appren- tissage afin de répondre aux conditions minimales dans les écoles. Des aspects spécifiques de la gestion des finances publiques—tels que de meil- leurs contrôles de la masse salariale et des indemnités des enseignants, et une meilleure exécution du budget non salarial par la planification des achats et la gestion des contrats—permettront aux gouvernements d’assurer une meil- leure optimisation des ressources. 4. Enfin, il est nécessaire de renforcer les capacités dans quelques domaines essentiels afin de combler le fossé entre le fait de savoir « ce qui fonctionne » et une prestation de services efficace. Certains de ces domaines sont 62   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE spécifiquement techniques - par exemple les programmes scolaires, les lan- gues utilisées pour l’enseignement, l’élaboration et la production des manuels scolaires, le perfectionnement des enseignants et leur évaluation - et doivent être combinés à la capacité de produire et d’exploiter les don- nées. En outre, les ministères de l’éducation doivent renforcer leurs capacités dans les « domaines plus abstraits » indispensables pour coor- donner les différentes fonctions et activités, en vue d’une prestation de services régulière effectuée dans les délais. Il s’agit notamment des capaci- tés à :  a) utiliser des incitations et imposer le respect de l’obligation de rendre compte afin de changer une culture administrative clientéliste et ; b) négocier et rechercher le consensus avec les parties prenantes, en parti- culier avec les enseignants et leurs syndicats. L’«  apprentissage par la pratique » et le recours aux réseaux d’apprentissage par les pairs sont le meilleur moyen de renforcer ces capacités. Comme le montre la présente étude, il existe un nouveau stock de connais- sances sur la façon d’améliorer l’apprentissage dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Le défi qui se pose est de savoir comment engager et poursuivre les réformes dans le contexte spécifique de chaque pays. Pour obtenir des résultats, un tel processus doit nécessairement s’inscrire dans un cycle permanent de mise en œuvre, d’évaluation et de réforme. Dans chaque pays, les responsables et les professionnels de l’éducation doivent avoir la maî- trise de l’ensemble du processus et ce, à tous les niveaux de responsabilité, des ministères de l’éducation aux chefs d’établissements scolaires. La leçon qu’il faut éventuellement tirer de l’expérience des pays très performants est la nécessité de mettre en place ce genre de capacité pour stimuler durablement les acquis en matière d’apprentissage. L’expérience montre aussi que les pays qui adoptent l’état d’esprit qui consiste à se focaliser résolument sur les acquis scolaires et à adapter systématiquement leurs efforts ont plus de chances de réussir. Nombreux sont les pays d’Afrique subsaharienne qui ont mis en œuvre avec succès quelques interventions politiques et fait des progrès notables. Mais force est de constater que très peu ont mis en place une approche globale visant à améliorer l’apprentissage pour tous. La plupart des pays suivent différentes tra- jectoires pour universaliser l’éducation de base de qualité. Le regroupement des pays proposé dans le cadre de la présente étude donne à penser que le contexte sera un facteur majeur, sans être primordial, dans les progrès que les pays accompliront dans les années à venir. Dans les pays du Groupe 1, plusieurs pays vont probablement prendre de l’avance sur les autres grâce à leurs efforts systématiques pour mettre en place les capacités nationales requises pour assurer une gestion cohérente de toute la chaîne complexe des processus qui entrent en jeu dans l’élaboration et la mise en œuvre de réformes, et pour réfléchir sur les résultats. L’île Maurice et Présentation générale   63 l’Afrique du Sud constituent de bons exemples à cet égard. Un deuxième ensemble peut potentiellement s’améliorer, même si les perspectives sont plus incertaines ; il comprend surtout les pays des Groupes 2 et 3 et quelques pays du Groupe 4. Comme le montre l’exemple d’un pays comme le Burundi, le fait d’établir quelques priorités majeures et de s’organiser autour d’elles est une approche pragmatique permettant d’aller plus loin. Enfin, les pays du Groupe 4, qui ont fait face à de nombreuses difficultés au milieu des années 90, sont toujours embourbés dans des problèmes semblables et risquent de rester à la ­ traîne tant du point de vue de la couverture de l’éducation de base que de l’apprentissage. Perspectives Au cours des vingt-cinq dernières années, les pays d’Afrique subsaharienne ont considérablement divergé dans le développement de leurs systèmes éducatifs respectifs. Qu’en sera-t-il dans quinze ans ? Trois défis ayant la plus grande incidence sur leurs chances d’évolution - à savoir les taux de fécondité, la crois- sance économique et les conflits - permettront de les départager. Par exemple, les pays du Groupe 1 ont des taux de fécondité plus faibles, même si le Congo, le Gabon, le Ghana, le Kenya et le Zimbabwe continueront de faire face à la pression démographique pendant un certain temps. Ces pays feront vraisemblablement plus de progrès en matière d’éducation que ceux qui sont confrontés à une « catastrophe démographique », avec un taux de fécondité global de 5 ou plus (18 pays pour lesquels les données sont disponibles).32 Il s’agit de pays du Groupe 2 comme la République Démocratique du Congo, la Tanzanie et l’Ouganda ainsi que plusieurs pays ayant peu progressé ou ayant connu des retards considérables. Dans sept pays, le taux de fécondité total est supérieur à 6. La croissance démographique de toute la région, ainsi qu’une meilleure progression des élèves dans le système d’éducation de base, donnent à penser que le taux de scolarisation dans le primaire augmentera de 50% d’ici 2030. Les inscriptions dans le premier cycle de l’enseignement secondaire vont plus que doubler dans certains pays. La croissance économique a également été variée dans la région, certains pays ayant maintenu des taux de croissance élevés avant et après la crise finan- cière de 2008, et d’autres ayant connu une décélération de l’activité économique. La situation économique des pays dépendra en grande partie du maintien des taux de croissance et les perspectives à cet égard sont incertaines, surtout au regard de la baisse des prix des matières premières. Les pays qui diversifient leurs économies ont de meilleures chances. La croissance économique aura également une incidence sur la capacité des pays d’Afrique subsaharienne ­ à mobiliser davantage de ressources pour l’éducation, ce qui est essentiel pour soutenir l’expansion et promouvoir l’apprentissage. 64   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE En moyenne, les conflits ont augmenté sur le continent, mais dans certains pays ils se sont atténués. La diminution des conflits offre des opportunités pour l’amélioration de l’éducation de base, tandis que l’augmentation des conflits devrait menacer les niveaux d’instruction des pays des Groupes 1 et 2, tout en compromettant les perspectives d’amélioration pour les Groupes 3 et 4. Ces perspectives donnent matière à réflexion. De nombreux pays d’Afrique subsaharienne perdront du terrain face à une démographie galopante et à une croissance économique moins robuste. Pour ces pays, les défis les plus pressants consistent à réduire et à stabiliser la croissance démographique et à mobiliser les ressources internes en faveur de l’éducation. Pour autant, il existe des raisons d’envisager les progrès de l’éducation dans la région avec optimisme. Il est ­possible de pérenniser et de consolider les acquis des deux dernières décennies, notamment en ce qui concerne l’amélioration de la scolarisation et les gains modestes enregistrés dans le domaine de l’apprentissage, surtout dans les pays où nous assistons à un ralentissement de la croissance démographique, où les économies se diversifient davantage et se montrent plus résilientes, et où les conflits se sont apaisés. Notes 1. L’objectif de développement durable (ODD) 4 consiste à « assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’ap- prentissage tout au long de la vie » (ONU 2015). Pour plus d’informations sur l’ODD 4 et ses cibles spécifiques, voir la Plateforme des connaissances des Nations Unies sur le développement durable  : https://sustainabledevelopment.un.org/topics​ /­sustainabledevelopmentgoals. 2. D’après des données provenant de la base de données de l’ISU, (consultée le 2 octobre 2017), htpp://data.uis.unesco.org. 3. Pour simplifier la présentation, le graphique P.2 ne présente que le taux brut de ­scolarisation ainsi que le taux de non scolarisation ; les données sur le taux de réten- tion sont présentées au 1er chapitre du livre. 4. Les pays sont regroupés en fonction de l’ampleur des défis qu’ils ont rencontrés avant 2000 ; voir les détails au 1er chapitre du livre. 5. Chaque évaluation de l’apprentissage est décrite au chapitre 2 du livre. 6. Le SACMEQ est un consortium de 16 systèmes éducatifs d’Afrique australe et orien- tale (la Tanzanie continentale et Zanzibar sont traités séparément). 7. Le Ghana et le Kenya ont participé à l’étude STEP (Enquête sur les compétences au service de l’emploi et de la productivité), en même temps que sept autres pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. L’étude STEP mesure les compétences en lecture des travailleurs âgés de 25 à 64 ans, à l’aide de tests comparables à ceux utilisés dans le Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PIAAC). Présentation générale   65 8. PISA Plus renvoie à l’administration en 2010 du test PISA 2009 dans 10 pays n’ap- partenant pas à l’OCDE (Organisation de coopération et de développement écono- mique (Walker 2011)). 9. Le « score de référence international qualifié de bas » pour le test TIMSS, administré en 8e année d’études en mathématiques, exige des élèves des connaissances élémen- taires en mathématiques, qu’ils puissent additionner et soustraire des nombres entiers, et reconnaître des lignes parallèles et perpendiculaires et des formes géomé- triques familières. 10. Le test du PASEC 2014 n’est pas comparable aux précédents ; d’où l’absence de ten- dances pour cette évaluation. 11. Les enquêtes SDI ont été menées dans neuf pays. Une enquête réalisée il y a peu au Malawi a utilisé un test similaire à celui appliqué pour le SDI. 12. Les scores moyens les plus faibles ont été obtenus par les élèves au Mozambique qui ont aussi obtenu de piètres résultats au SACMEQ IV. 13. En Tanzanie, le Kiswahili est la langue utilisée pour l’enseignement de la première à la septième année. L’anglais devient officiellement la langue d’enseignement en pre- mière année du premier cycle de l’enseignement secondaire. Les scores en mathéma- tiques n’ont pas été influencés par la langue de l’évaluation. 14. Dans tous les pays, l’ensemble des variations est suffisamment important pour chan- ger la donne et, la part des différences entre écoles dans un pays n’a aucun lien avec le score moyen de ce pays à l’évaluation. 15. Les évaluations réalisées sont les suivantes : TIMSS 2015 dans les deux pays d’Afrique subsaharienne y ayant pris part (Afrique du Sud et Botswana, tous deux du Groupe  1)  ; SACMEQ IV (2013) dans les deux pays pour lesquels des données étaient disponibles (Kenya dans le Groupe 1 et Malawi dans le Groupe 2) ; et PASEC 2014 dans tous les 10 pays participants (dans le Groupe 1, le Congo ; dans le Groupe 2, le Cameroun et le Togo  ; dans le Groupe 3, le Bénin, le Burundi et la Côte d’Ivoire et ; dans le Groupe 4, le Burkina Faso, le Niger, le Sénégal et le Tchad). 16. Les ampleurs de l’effet inférieures à 0,20 sont généralement considérées comme «  faibles  », celles supérieures à 0,80 étant considérées comme «  importantes  » (Cohen 1992). 17. Le taux brut d’admission en première année est défini comme le nombre total de nouveaux élèves admis en première année d’études primaires indépendamment de leur âge, et est exprimé en pourcentage de la population théoriquement en âge d’en- tamer cette première année. 18. Un indice synthétique a été calculé à l’aide des quatre indicateurs susmentionnés ; la méthodologie est décrite dans la note du graphique P.9. 19. La « langue familiale » désigne la langue maternelle ou toute autre langue vernacu- laire d’un enfant qui peut être une lingua franca utilisée par la communauté. 20. Cette estimation est tirée de la base de données régionale des indicateurs de l’éducation construite pour cette étude. Dans le présent ouvrage, « Le premier cycle du secon- daire » correspond aux années allant de la septième à la neuvième année d’études. Certains pays considèrent que la première à la septième année ou la première à la huitième année correspondent au « primaire », et que la sixième et la septième année ou la sixième à la huitième année désignent le « deuxième cycle du primaire ». 66   PERSPECTIVES: L’ÉCOLE AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE EN AFRIQUE 21. Ces tendances proviennent des analyses des données de la base de données de l’Ins- titut de statistique de l’UNESCO (consultée le 27 novembre 2016), http://data.uis. unesco.org. 22. Les diplômes postsecondaires sont obtenus à l’achèvement des programmes qui constituent l’enseignement secondaire et qui préparent les élèves soit au marché du travail, soit à l’enseignement supérieur. Les programmes scolaires concernés sont plus vastes que ceux de l’enseignement secondaire, mais pas aussi complexes que ceux de l’enseignement supérieur. Les diplômes universitaires sont obtenus au terme des enseignements supérieurs et ils demandent généralement plus d’années d’études que pour les formations diplômantes. 23. Plusieurs enquêtes internationales, toutes dans des pays anglophones, fournissent des informations sur la connaissance des contenus par les enseignants, des informa- tions contextuelles sur ceux-ci, ainsi que sur leurs perceptions et pratiques en classe. Malheureusement, nous disposons de peu d’informations sur la connaissance des contenus par les enseignants dans les pays francophones ou sur les enseignants du secondaire. 24. Ces constatations sont fondées sur l’analyse faite dans le cadre de la présente étude  des données des enquêtes du SACMEQ III (2007), du PASEC 2014 et du PASEC 2015. 25. Les tendances en matière de recrutement et de déploiement des enseignants par rapport au nombre d’élèves par enseignant sont tirées des analyses des données de la base de données de l’ISU, (consultée le 23 février 2016), htpp://data.uis.unesco.org/. 26. Les résultats utilisés dans cette section sont tirés des analyses des données du SIGE en ce qui concerne les écoles publiques dans 11 pays pour l’enseignement primaire et 8 pays pour le secondaire. Cet ensemble de données a été constitué comme il suit : données SDI pour la Tanzanie en 2014, données PASEC pour 10  pays en 2014, et données SACMEQ pour 14 pays en 2007. 27. Les « dépenses totales de l’éducation » englobent les dépenses publiques et celles des ménages en faveur de l’éducation. 28. Les évaluations publiques nationales du PEFA 2017 (Cadre PEFA 2011 au 30 juin 2017) sont disponibles sous forme de fichier de données (fiche Excel) à l’adressehttps://pefa.org/sites/default/files/PEFA%20Scores-Jun17-N-Public​ -PEFA2011_0.xlsx. 29. La liste de ces évaluations des dépenses publiques est présentée au chapitre 5 du livre. 30. Voir les évaluations publiques nationales du PEFA 2017 (Cadre PEFA 2011 au 30 juin 2017) disponibles sous forme de fichier de données (fiche Excel) à l’adressehttps://pefa.org/sites/default/files/PEFA%20Scores-Jun17-N-Public​ -PEFA2011_0.xlsx. 31. Les données de la présente section proviennent de l’Institut de statistique de l’UNESCO et d’une enquête informelle de la Banque mondiale portant sur 26 pays. 32. Le « taux de fertilité total » représente le nombre d’enfants nés d’une femme si elle vivait jusqu’à la fin de sa période de fécondité et donnait naissance à des enfants conformément aux taux de fertilité applicables à chaque tranche d’âge. Présentation générale   67 Bibliographie Alfaro, P., D. Evans, et P. Holland. 2015. “Extending the School Day in Latin America and the Caribbean.” Policy Research Working Paper 7309, World Bank, Washington, DC. Bernard, J. M., O. Simon, et K. 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Bien que les défis de développement, auxquels l’Afrique subsaharienne est confrontée, sont reconnus de tous, peu sont ceux qui ont mis en place des plans cohérents qui offrent un réel espoir d’amélioration. Perspectives présente un plan d’action fondé sur des données probantes qui non seulement reconnaît les problèmes profonds, mais fournit des propositions spécifiques pour y remédier. En substance, il faut focaliser les efforts sur les compétences humaines de manière rationnelle et pragmatique. – Eric Hanushek, Paul et Jean Hanna Senior Fellow, Institut Hoover, Université de Stanford Ce livre offre au lecteur une perspective claire sur les moyens d’améliorer l’apprentissage au niveau de l’enseignement fondamental en Afrique subsaharienne. Ces recommandations sont basées sur des analyses extrêmement rigoureuses et exhaustives qui s’appuient sur un grand volume de données. Les auteurs mettent en lumière les faibles niveaux d’apprentissage et les facteurs qui y contribuent. Ils n’hésitent pas à soulever des questions difficiles, telles que la nécessité de mettre en œuvre une politique cohérente sur la langue d’enseignement, essentielle pour garantir une bonne base d’apprentissage pour tous les enfants. En utilisant le cadre de “De la science à la prestation de services”, le livre exhorte les décideurs à considérer toute la chaîne, de la conception des politiques, basées sur des connaissances adaptées au contexte local, à leur mise en œuvre. Perspectives : L’École au Service de l’Apprentissage en Afrique est une contribution unique à la littérature, et approprie pour les décideurs politiques africains et les parties prenantes. – Professeur Hassana Alidou, Ambassadeur de la République du Niger aux États-Unis et au Canada Compte tenu de ce que le continent vise une éducation de base universelle pour tous ses enfants d’ici 2030, il doit, en même temps, relever le défi de savoir comment améliorer l’apprentissage. Perspectives permet aux pays de se comparer les uns aux autres et d’identifier des lignes d’action concrètes. Cela oblige les décideurs à se poser des questions notamment “comment avancer ?”, “Que doit-on faire différemment ?”, et à examiner la hiérarchie des interventions qui peuvent stimuler l’apprentissage. Il exhorte, à juste titre, les ministères de l’éducation à renforcer leurs capacités par l’apprentissage par la pratique, et en adaptant continuellement les nouvelles connaissances au contexte local. Perspectives encouragera des échanges francs sur les réformes profondes et nécessaires au sein des politiques éducatives et des prestations de services afin de garantir un meilleur apprentissage à chaque enfant du continent. – Dr. Fred Matiang’I, Secrétaire du Cabinet pour l’Intérieur et la Coordination du Gouvernement National, Gouvernement du Kenya (ancien Secrétaire du Cabinet pour l’Éducation) Perspectives n’aurait pas pu arriver à un moment plus opportun puisque les pays de la région, y compris l’île Maurice, se concentrent davantage sur les résultats d’apprentissage plutôt que de se focaliser uniquement sur les intrants et les processus des systèmes éducatifs. Le livre soulève un point important, celui selon lequel les pays africains ne doivent pas se modeler exclusivement sur les systèmes d’éducation des pays les plus performant dans le monde. Nous avons également beaucoup à apprendre d’autres pays du même niveau de développement, ou du niveau inférieur, en vertu des défis qu’ils ont affrontés et surmontés avec succès. Cela présente des opportunités pour un plus grand partage par les pairs et le réseautage avec ces pays. En effet, un certain nombre de domaines clés qui démontrent les bonnes pratiques aptes à être répliquées sont mis en évidence dans le livre. Cela couvre des domaines aussi variés que les facteurs favorables à l’amélioration de la progression des élèves, le renforcement des capacités des enseignants, l’augmentation des allocations budgétaires axées sur la qualité et l’amélioration des capacités techniques des agences d’exécution dans la région. – Hon. (Mme) Leela Devi Dookun-Luchoomun, Ministre de l’éducation et des ressources humaines, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, République de l’île Maurice SKU 33197