R A P P O R T D E L A B A N Q U E M O N D I A L E S U R L E S P O L I T I Q U E S D E D É V E L O P P E M E N T 21776 Genre et développement économique Vers l'égalité des sexes dans les droits, les ressources et la participation Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page i Genre et développement économique Rapport de la Banque mondiale sur les politiques de développement Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page ii Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page iii Genre et développement économique Vers l'égalité des sexes dans les droits, les ressources et la participation Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page iv Catalogage avant publication de la Bibliothèque nationale du Canada Vedette principale au titre Genre et développement économique: vers l'égalité des sexes dans les droits, les ressources et la participation Traduction de: Engendering Development. Comprend des réf. bibliogr. et un index. Publ. en collab. avec: Banque mondiale; Nouveaux Horizons. ISBN 2-89035-369-9 1. Rôle selon le sexe ­ Pays en voie de développement. 2. Femmes dans le développement ­ Pays en voie de développement. 3. Égalité des sexes ­ Pays en voie de développement. I. Banque mondiale. HQ1075.5.D44E5514 2003 305.42'09172'4 C2003-94009-3 Les Éditions Saint-Martin bénéficient de l'aide de la SODEC pour l'ensemble de leur programme de publi- cation et de promotion. Les Éditions Saint-Martin sont reconnaissantes de l'aide financière qu'elles reçoivent du gouvernement du Canada qui, par l'entremise de son programme d'Aide au Développement de l'industrie de l'Édition, sou- tient l'ensemble de ses activités d'édition et de commercialisation. Édition: Vivianne Moreau Traduction française: Pierre Brault Révision linguistique: Geneviève Moulin Crédits de la page couverture Graphisme: Joyce C. Petruzzelli et l'équipe du rapport PRR (The World Bank) Illustration: Tilly Northedge (Grundy & Northedge, Londres) Dépôt légal: Bibliothèque nationale du Québec, 2e trimestre 2003 Imprimé au Québec (Canada) ©2003 The International Bank for Reconstruction and Development / THE WORLD BANK 1818 H Street, N.W. Washington, D.C. 20433, États-Unis Publié par: Pour l'Afrique francophone et Haïti NOUVEAUX HORIZONS Les Éditions Saint-Martin 58, bis, rue La Boétie 5000, rue Iberville, bureau 203 75008 Paris Montréal (Québec) H2H 2S6 France Tél.: (514) 529-0920 Téléc.: (514) 529-8384 st-martin@qc.aira.com © 2003 Éditions Saint-Martin pour l'édition française Les vues et les opinions exprimées dans cet ouvrage sont celles de l'équipe de recherche et ne devraient en aucune manière être attribuées à la Banque mondiale, à son conseil d'administration ou à ses pays membres. Tous droits réservés Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite ou transmise sous aucune forme ou par quelque moyen électro- nique ou mécanique que ce soit, par photocopie, enregistrement ou par quelque forme d'entreposage d'informa- tion ou système de recouvrement, sans la permission écrite de l'éditeur. Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page v Table des matières Avant-propos xi Préface xiii L'équipe de recherche xv Remerciements xvii Résumé 1 Égalité des sexes: en droits, en ressources et en influence 2 En dépit des progrès réalisés, les inégalités fondées sur le genre persistent dans tous les pays 3 Les inégalités fondées sur le genre sont plus évidentes chez les pauvres 6 Les inégalités fondées sur le genre nuisent au bien-être et au développement 8 Pourquoi ces inégalités perdurent-elles? 13 Une stratégie en trois volets visant à promouvoir l'égalité des sexes 15 Défis et voie de l'avenir 28 I. Les inégalités fondées sur le genre à l'aube du XXIe siècle 31 Définition de l'égalité des sexes 34 L'inégalité des droits, des ressources et de l'influence dans les différentes régions 37 Les formes d'inégalités fondées sur le genre dans les régions et les pays étudiés 61 Différences fondées sur le genre et pauvreté 62 II. Les inégalités fondées sur le genre nuisent au développement 75 Les inégalités affectent le bien-être 76 Ce qu'il en coûte à la production et à la croissance économique 86 Les gouvernements aussi sont désavantagés 95 Comment expliquer que les inégalités fondées sur le genre perdurent? 100 Le rôle du gouvernement dans la promotion de l'égalité des sexes 103 V Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page vi GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE III. Les normes sociales, les lois et les institutions économiques 111 La différence entre les sexes, les normes et les coutumes 113 Les lois et les droits 117 Les institutions économiques 129 Les changements institutionnels: quelle est la recette? 145 IV. Pouvoir, motivations et ressources au sein du ménage 153 Qu'est-ce qu'un ménage? 156 Les ménages perpétuent les rôles de chaque genre 157 Maîtrise et répartition des ressources, exercice du pouvoir au sein des ménages 160 Des politiques et des investissements qui favorisent la promotion de l'égalité 171 V. Le développement économique favorise-t-il l'égalité des sexes? 187 Démantèlement de la répartition rigide du travail selon le genre 189 Renforcer la volonté d'investir de façon égale dans le capital humain 198 Réduire la discrimination grâce aux marchés concurrentiels 203 La croissance économique et l'égalité des sexes 204 Le développement engendre-t-il l'égalité des sexes? Points de vue régionaux 209 VI. Une stratégie en 3 volets pour promouvoir l'égalité des sexes 237 Des réformes institutionnelles pour établir des droits égaux et des opportunités économiques égales 241 Vers un développement économique qui incite à participer davantage et à partager les ressources 247 Prendre des résolutions pour corriger les inégalités concernant la maîtrise des ressources et l'influence politique 254 Défis et voie de l'avenir 274 Annexes 279 Remarque et pays concernés dans les tableaux 279 Modèle de régression et estimation des coefficients 293 Salaires relatifs des hommes et des femmes 297 Études expérimentales sur le modèle familial «traditionnel» 303 Études prospectives en éducation 309 Lexique des termes utilisés dans les tableaux 313 Bibliographie 317 Index 345 VI Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page vii TABLE DES MATIÈRES Tableaux Tableau 1 Les inégalités fondées sur le genre concernant les droits fondamen- taux persistent partout au monde 5 Tableau 2 Les disparités entre les sexes tendent à être plus prononcées chez les pauvres 7 Tableau 3 Les disparités entre les sexes s'estompent avec le temps dans les pays à faible revenu ­ sauf pour la représentation parlementaire 8 Tableau 4 Le taux de vaccination des enfants augmente avec le niveau d'ins- truction de la mère 10 Tableau 5 Les taux d'infection au VIH sont plus élevés lorsque les inégalités fondées sur le genre en instruction sont plus grandes 11 Tableau 6 Des progrès plus rapides dans la réduction des inégalités en matière de scolarisation accélèrent la croissance économique 12 Tableau 7 Plus d'égalité dans les droits, moins de corruption 13 Tableau 8 Plus d'égalité en droits ­ plus d'égalité en ressources et en opinions 16 Tableau 9 Les inégalités fondées sur le genre en éducation diminuent lorsque les revenus augmentent 20 Tableau 10 Les investissements en infrastructures d'approvisionnement en eau et en énergie peuvent réduire considérablement le temps consacré aux activités domestiques 21 Tableau 11 L'égalité en matière de droits et de croissance économique encourage l'égalité des sexes dans bien des domaines, de l'éducation à l'influence politique 22 Tableau 12 Des services de garderie abordables signifient plus de femmes sur le marché du travail et de filles à l'école 25 Tableau 13 Le système de pension du Chili affecte la sécurité des hommes et des femmes du troisième âge 27 Tableau 1.1 Les droits des femmes ne sont pas égaux à ceux des hommes 40 Tableau 1.2 Malgré quelques améliorations, des inégalités fondées sur le genre perdurent dans certaines régions en ce qui a trait à l'éducation 43 Tableau 1.3 Partout au monde, les femmes vivent maintenant plus longtemps que les hommes 48 Tableau 1.4 La contribution des femmes au marché du travail: des tendances qui varient en fonction des régions 55 Tableau 1.5 Les femmes et les hommes n'ont pas le même type d'emploi 56 Tableau 1.6 Les femmes sont sous-représentées au Parlement 60 Tableau 1.7 L'écart entre les sexes est important en Asie du Sud ­ plus que dans tous les pays 63 Tableau 1.8 Les disparités entre les sexes tendent à être plus prononcées chez les pauvres 64 Tableau 2.1 Les inégalités fondées sur le genre favorisent la propagation du sida 78 Tableau 2.2 Le taux de vaccination des enfants augmente avec le niveau d'instruction de la mère 82 Tableau 2.3 Réduire l'écart entre les sexes en matière de scolarisation favoriserait la croissance économique 92 VII Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page viii GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 2.4 Plus d'égalité dans les droits, moins de corruption 97 Tableau 3.1 Lorsque les droits sont égaux, l'écart entre les sexes est plus petit 120 Tableau 3.2 La présence des femmes dans le secteur informel varie d'un pays à un autre 143 Tableau 4.1 Les hommes travaillent à l'extérieur tandis que les femmes travaillent au foyer 159 Tableau 4.2 Des services de garderie peu coûteux ont un impact sur la participa- tion des mères au marché du travail 176 Tableau 4.3 Les investissements en infrastructures d'approvisionnement en eau et en énergie peuvent réduire considérablement le temps consacré aux activités domestiques 182 Tableau 5.1 Les femmes travaillent davantage, surtout dans des activités hors marché 191 Tableau 5.2 Les courbes de participation au marché du travail des hommes et femmes plus âgés convergent 196 Tableau 5.3 L'égalité des sexes est plus grande dans les pays à revenu élevé 205 Tableau 5.4 Il y a peu de femmes au Parlement, même dans les pays à revenu élevé 207 Tableau 5.5 Les tendances touchant l'égalité des sexes sont semblables dans les pays novateurs et conservateurs de l'Afrique subsaharienne 223 Tableau 5.6 Un meilleur environnement économique équivaut à une espérance de vie plus grande chez les femmes en Afrique subsaharienne 226 Tableau 5.7 Le nombre de maternelles a diminué dans l'ancienne Union soviétique 230 Tableau 6.1 L'égalité en matière de droits et de croissance économique encourage l'égalité des sexes dans bien des domaines 239 Tableau 6.2 Impact simulé d'une plus grande égalité des droits en matière d'édu- cation, d'espérance de vie et de représentation parlementaire, par région 242 Tableau 6.3 Impact simulé d'un revenu plus élevé sur l'éducation, l'espérance de vie et la représentation parlementaire, par région 249 Tableau 6.4 Impact simulé d'un revenu plus élevé et d'une plus grande égalité des sexes en matière de droits sur l'éducation, l'espérance de vie et la représentation parlementaire, par région 252 Encadrés Encadré 1.1 Évaluation de l'égalité des sexes en matière de droits 39 Encadré 1.2 Le temps des femmes vaudrait-il moins que celui des hommes? 68 Encadré 2.1 Influence de l'égalité des sexes sur la croissance économique 93 Encadré 3.1 Les normes portant sur le genre varient selon les régions, mais les hommes et les femmes sont plus souvent d'accord qu'en désaccord 114 Encadré 3.2 Les droits fonciers des femmes en Afrique 126 Encadré 3.3 Le «mur de verre», le sexisme 131 Encadré 3.4 Coup de pouce international en faveur de l'égalité des sexes 149 VIII Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page ix TABLE DES MATIÈRES Encadré 4.1 Les jeux de pouvoir au sein du ménage 162 Encadré 4.2 Les expériences empiriques du modèle traditionnel 164 Encadré 4.3 Expériences concrètes de subventions concernant la scolarisation des filles 175 Encadré 4.4 Les unités mobiles susu en Afrique de l'Ouest 180 Encadré 5.1 L'ordinateur et l'emploi chez les femmes 195 Encadré 5.2 Un modèle nordique 211 Encadré 5.3 Évaluation de l'incidence des politiques 213 Encadré 5.4 Amortissement des effets de la réforme sur les personnes vulnérables 234 Encadré 6.1 Les coûts budgétaires d'une instruction de base universelle en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 261 Encadré 6.2 Bilan des coûts et des bénéfices de certains programmes de micro- financement et de lutte contre la pauvreté au Bangladesh 263 Encadré 6.3 Une sécurité sociale adéquate pour les hommes et les femmes 269 Encadré 6.4 Programme de protection pour les personnes âgées au Chili 270 Encadré 6.5 L'influence des femmes dans les prises de décisions: des initiatives en Afrique du Sud 273 Grilles Grille 1.1 Les dix principales causes de l'ACVI pour les femmes et les hommes de 15 à 44 ans, 1990 50 Grille 1.2 Salaires relatifs des femmes et des hommes 57 Grille 2.1 Les hommes perdraient (un peu) et les femmes gagneraient beau- coup avec l'équité salariale 90 Grille 2.2 Des comportemants sociaux inacceptables 96 Grille 4.1 Impact des emprunts effectués par des hommes et des femmes sur les dépenses d'un ménage 167 Grille 4.2 Impact des prix sur l'éducation, la santé et la nutrition, par genre 172 Grille 5.1 Impact des prix sur l'éducation, la santé et la nutrition, par genre 202 Grille 5.2 Proportion des femmes sur le marché du travail en Asie de l'Est 214 Grille 5.3 Répartition de la population active féminine par secteur en Asie de l'Est 216 Grille 5.4 Proportion de femmes dans la population active en Europe de l'Est et en Asie centrale 228 Grille 6.1 Actions visant à promouvoir l'égalité des sexes 256 IX Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page x Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xi Avant-propos L A BANQUE MONDIALE EST ENGAGÉE DANS LA CONSTRUCTION d'une société libérée de la pauvreté. Il m'apparaît évident que, dans la poursuite de cet objectif, on doit faire face au fléau des inégalités entre les sexes. Malgré des progrès récents, de grandes disparités entre les hommes et les femmes, autant en matière de droits humains, de ressources, d'opportunités économiques que d'influence politique, exis- tent encore un peu partout dans le monde. Ces inégalités sont liées de façon inextricable à la pauvreté. La pauvreté ne contribue qu'à empirer les inégalités fondées sur le genre. Les inégalités entre les garçons et les filles concernant l'accès à la scolarité ou à des soins de santé adéquats sont plus accentuées parmi les classes défa- vorisées que parmi celles à revenus élevés. Que l'on mesure la richesse en termes de pouvoir sur des ressources comme la terre ou le crédit, ou en termes d'influence sur le processus de développement, les pauvres en ont toujours moins que les mieux nantis et, parmi eux, les femmes sont celles qui en possèdent le moins. Ces inégalités empêchent les femmes de parti- ciper pleinement au développement. Elles se retrouvent ainsi nettement désavantagées puisqu'elles ne peuvent en retirer les bénéfices. De plus, les inégalités fondées sur le genre nuisent au développement. Tandis que les disparités en matière de droits fondamentaux, de scolarité, de crédit, d'emploi et de participation à la vie publique affectent directe- ment les femmes et les jeunes filles, au bout du compte, c'est la société entière qui doit en subir les conséquences. Les données présentées dans ce rapport le démontrent sans l'ombre d'un doute. Le message est clair: choi- sir d'ignorer les inégalités fondées sur le genre entraîne des pertes énormes tant au plan humain que social, empêche les nations de prospérer adéqua- tement et retarde le processus de réduction de la pauvreté. XI Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xii GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Cette affirmation représente un important défi pour ceux qui s'intéres- sent au développement. Quels types de politiques et de stratégies seront les plus aptes à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes et à encourager un développement durable? Le présent rapport analyse une multitude de données sur les effets de réformes institutionnelles, de poli- tiques économiques et de mesures politiques, autant de moyens déployés dans le but d'obtenir une plus grande égalité des sexes. Cette étude com- porte un autre message important: les responsables politiques disposent de précieux instruments dans la poursuite de ce double objectif: soit l'égalité entre les sexes et le développement durable. Cependant, une action efficace exige que ces responsables politiques tiennent compte des réalités locales dans le choix et dans la mise en appli- cation de ces politiques et de ces programmes. Il n'existe pas non plus de formule passe-partout pour promouvoir l'égalité des sexes. La recherche de la solution requiert que l'on consulte les parties intéressées ­ tant les hommes que les femmes ­ sur les questions clés et sur les actions concrètes à entreprendre. Le rapport insiste aussi sur le message suivant: pour obte- nir un développement durable, les questions portant sur la différenciation homme-femme doivent être partie prenante de l'analyse du problème, du projet qui s'ensuit et de sa mise en application. Ce rapport ­ intitulé Genre et développement économique: vers l'égalité des sexes dans les droits, les ressources et la participation ­ propose aux res- ponsables politiques, aux spécialistes du développement et aux membres de la société civile toute une gamme d'outils visant à intégrer l'étude de la différenciation homme-femme aux recherches sur le développement. En d'autres termes, la richesse des analyses présentées ici constitue un apport appréciable à la recherche des stratégies les plus efficaces dans la conquête de l'égalité entre les hommes et les femmes à l'intérieur d'un processus de développement. Ce faisant, cette étude nous est d'un grand secours ­ en tant que responsables politiques et membres de la communauté pour le développement ­ dans la réalisation de notre engagement à construire un monde sans pauvreté. James D. Wolfensohn Président Banque mondiale XII Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xiii Préface L ES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE PORTENT ATTEINTE À l'efficacité du développement de manière fondamentale. Pourtant, ce problème est souvent écarté des dialogues et des lieux de déci- sions politiques, sur les scènes tant nationale qu'internationale. Cela s'ex- plique d'une part par la réticence des responsables politiques à aborder des sujets qu'ils jugent trop liés aux moeurs profondes de la société, à la reli- gion et aux traditions culturelles. D'autre part, on croit plutôt que c'est aux tribunaux et non aux politiciens d'adresser la question de l'écart causé par l'inégalité entre les hommes et les femmes. Enfin, cette négligence s'explique aussi parce qu'on ignore ­ ou fait semblant d'ignorer ­ la nature des disparités entre les sexes ainsi que les coûts qu'elles entraînent, et qui ont pour effet d'altérer le bien-être des gens et les projets de déve- loppement des nations. Cependant, comme le démontre ce rapport, les coûts de ces réticences, de cette apathie et de cette ignorance sont extrê- mement élevés. Ce rapport vise à faire mieux comprendre les liens existant entre les questions relatives aux différences entre les sexes, les politiques publiques et le développement. Ce faisant, nous voulons susciter un intérêt accru et consolider notre engagement à promouvoir l'égalité des sexes. Ce rapport a été rédigé à l'intention d'étudiants et de praticiens du développement, et spécialement pour ceux qui cherchent à comprendre comment les questions relatives aux inégalités fondées sur le genre influencent les poli- tiques de développement et leur mise en application. Nous nous intéres- sons surtout à la situation des pays en voie de développement, mais lorsque les données sont insuffisantes ou font défaut, nous avons recours aux découvertes réalisées dans les pays industrialisés. En effet, nous pou- XIII Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xiv GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE vons tirer de nombreuses leçons de l'expérience de divers pays qui connaissent des étapes de développement distinctes. Ce rapport s'inspire de textes provenant de différentes disciplines et traitant de la relation entre la différenciation homme-femme et le déve- loppement. Il puise ses sources dans un grand nombre de disciplines comme l'économie, le droit, la démographie, la sociologie, etc. Cepen- dant, ce rapport ne prétend pas ­ et il ne le peut pas ­ couvrir de façon approfondie toute la littérature disponible sur le sujet. Nous avons res- treint son ampleur afin de le rendre plus accessible et nous nous sommes concentrés sur les recherches les plus récentes, en particulier sur des études rigoureuses basées sur des expériences concrètes. En fai- sant ce choix, nous sommes conscients d'avoir laissé de côté des études intéressantes mais plus anciennes ainsi que d'autres, récentes mais moins élaborées. Nous avons appliqué les règles généralement accep- tées dans les sciences sociales en nous appuyant sur des sources publiées dans des revues professionnelles et des livres ou, dans les cas de recherches plus récentes, sur des analyses de sondages et des statis- tiques. Dans certains cas où la documentation comportait des lacunes importantes, nous avons mandaté de nouvelles recherches. Ces écrits ont été révisés et ils attendent vos commentaires et suggestions sur le site www.worldbank.org/gender/prr. Enfin, nous aurions pu concevoir ce rapport de bien d'autres manières. Nous avons choisi de l'élaborer autour des principaux axes générateurs d'inégalités entre les sexes. Ainsi, ce rapport se concentre sur le rôle des institutions de la société, telles les normes et les lois, et le rôle des institu- tions économiques, tels les marchés. Il se penche aussi sur les ressources, les prises de décisions et les jeux de pouvoir au sein de la famille. Enfin, il s'intéresse aux changements économiques et aux politiques de dévelop- pement. Dans les pays en voie de développement, beaucoup d'écrits rela- tifs aux différences entre les sexes suggèrent des politiques et des programmes qui nous paraissent négliger des facteurs pouvant éclairer les raisons de ces inégalités. À notre avis, un examen attentif de ces facteurs peut contribuer à la découverte de leviers politiques plus efficaces pour la promotion de l'égalité tant désirée entre les hommes et les femmes. Elizabeth M. King Andrew D. Mason XIV Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xv L'équipe de recherche C E RAPPORT A ÉTÉ RÉDIGÉ PAR ELIZABETH M. KING DU Groupe de recherches sur le développement, et par Andrew D. Mason, du Groupe genre et développement de la division Réduction de la pauvreté et gestion économique. Ils ont obtenu l'appui des autres membres de l'équipe, Ananya Basu, Tai Lui Tan, Claudio E. Montenegro et Lihong Wang, qui ont mené à bien les recherches de fond, compilé et fait l'analyse des informations, préparé les tableaux et les gra- phiques, rédigé plusieurs notes explicatives et annexes et contribué à l'éla- boration de ce rapport. Branko Jovanovic, Cristina Estrada et Owen Haaga ont apporté une aide complémentaire aux travaux de recherche. Jane Sweeney et Anna Marie Marañon ont assuré un excellent soutien administratif et aidé à la production. Bruce Ross-Larson et Molly Lohman ont édité ce rapport et Mark Ingebretsen en a dirigé la production. Il a été préparé sous la direction générale de Karen O. Mason et de Lyn Squire. XV Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xvi Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xvii Remerciements N OUS SOMMES RECONNAISSANTS ENVERS UN GRAND NOMBRE de personnes pour leur appui dans l'élaboration de ce rapport. Ce dernier est le fruit des travaux de recherches et des documents pré- liminaires auxquels ont participé un grand nombre de personnes: Dang Nguyen Anh, Raquel Artecona, Lubia Begum, Jere Behrman, Sudharshan Canagarajah, Jennifer Clement, Alejandra Cox-Edwards, Maureen L. Cropper, Wendy Cunningham, Monica Das Gupta, David Dollar, Deon Filmer, Raymond Fisman, Maria Floro, Marito Garcia, Roberta Gatti, Elena Glinskaya, Anne Tierney Goldstein, Hameeda Hossain, Sara Hossain, Le Ngoc Hung, Vu Tuan Huy, Nadeem Ilahi, Nusrat Jahan, Estelle James, Karin Kapadia, Shahidur R. Khandker, Stephan Klasen, Julian Lampietti, Sunhwa Lee, Vu Manh Loi, Michael Lokshin, Lynellyn Long, Margaret Lycette, Le Thi Phuong Mai, Pratima Paul Majumdar, John Maluccio, Nilufar Matin, Nguyen Huu Minh, Haile Mitiku, Claudio Montenegro, Deepa Narayan, Constance Newman, Christine Poulos, Agnes Quisumbing, Rocio Ribero, Patricia Rice, Yana van der Muelen Rodgers, Sidney Ruth Schuler, Stephanie Seguino, Samita Sen, Talat Shah, Linda Stalker, Tania Sultana, Aysit Tansel, Allison Truitt, Patricia Uberoi, Danning Wang, Lihong Wang, Dale Whittington et Xiaodan Zhang. Nous remercions aussi Monica Fong, Estelle James, Mead Over et A. Waafas Ofosu-Amaah, qui nous ont fourni les données pour les encadrés. Nous tenons également à remercier l'équipe de réviseurs qui nous ont fait bénéficier de leurs judicieuses remarques lors des différentes étapes de la rédaction. Diane Elson, Naila Kabeer, Charlotte Koren, Oystein Kravdal, Marnia Lazreg, Ruvimbo Mabeza-Chimedza, Karen Mason, l'Honorable Effie Owour (Kenya), Lyn Squire, Christopher R. Udry et Martin Weale. Ces personnes nous ont beaucoup aidés par leurs précieux commentaires lors XVII Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xviii GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE de la rédaction des documents préliminaires. Certains auteurs de documents préliminaires ont également commenté le contenu de d'autres études préli- minaires. Nisha Agrawal, Harold Alderman, Jere Behrman, Mark Blackden, Gillian Brown, Paul Collier, Maria Correia, Wendy Cunningham, Monica Das Gupta, Jerri Dell, Kemal Dervis, Annette Dixon, William Easterly, Maria Floro, Nancy Folbre, Louise Fox, Indermit Gill, Anne Tierney Goldstein, Jeffrey Hammer, Roumeen Islam, Emmanuel Jimenez, Roger Key, Stephan Klasen, Reidar Kvam, Mustapha Nabli, Lant Pritchett, Agnes Quisumbing, Vijayendra Rao, Susan Razzaz, Jo Ritzen, Shaha Riza, Yana van der Muelen Rodgers, Wendy Wakeman et Michael Woolcock nous ont fourni leurs commentaires sur l'ébauche du rapport complet. En vue de la rédaction de ce rapport, une série de consultations a été réa- lisée auprès de chercheurs, de responsables politiques, de leaders populaires, de représentants du secteur privé, du personnel d'organismes non gouverne- mentaux et d'organismes donateurs. Nous tenons à remercier particulière- ment toutes ces personnes qui nous ont accordé leur temps précieux et qui ont enrichi le rapport de leurs commentaires. Des membres du Groupe consultatif de la Banque mondiale, de la Commission sur le développement et le genre, ainsi que de l'Équipe de base sur le développement et le genre ont apporté les premiers éléments de cette étude. Des consultations auprès de groupes de donateurs, de militants, de chercheurs et de responsables poli- tiques réalisées au Bangladesh, aux Philippines et au Viêt-Nam, au Centre international de recherches sur la femme, et lors d'ateliers et de séminaires au siège social de la Banque mondiale à Washington D.C., nous ont fourni de précieuses informations sur bon nombre de questions soulevées dans ce rap- port. Certaines consultations ont été organisées à l'étranger par: Nilufar Ahmad (Bangladesh), Rina Jimenez-David (Philippines) et Tosca Bruno-van Vijfeijken (Viêt-Nam). Nilufar Ahmad et Tosca Bruno-van Vijfeijken ont mandaté des recherches au Bangladesh et au Viêt-Nam. Nous remercions également les nombreuses personnes qui ont participé à deux programmes internationaux d'échanges électroniques portant sur ce rapport. Dans le premier cas, il s'agissait d'un échange prolongé de courriels portant sur des concepts du rapport et coordonné par un groupe de colla- borateurs de la société civile: Peggy Antrobus, Eva Charkiewicz, Pat Morris, Ruth Rempel et Gita Sen. Dans le second cas, il s'agissait d'un groupe de dis- cussion sur Internet parrainé par le Forum pour le développement de la Banque mondiale et coordonné par Susan Razzaz et Lihong Wang avec l'aide de Ronald Kim. Nous sommes très reconnaissants à Leah Gutierrez, Michael Kevane, Stephanie Seguino, Gale Summerfield et Mona Zulficar qui ont dirigé avec compétence cet échange électronique pour chaque chapitre. XVIII Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xix REMERCIEMENTS Nous remercions Eveline Herfkens, ministre de la coopération et du développement (Pays-Bas), Irene Santiago et Mona Zulficar, qui ont échangé sur divers aspects de ce rapport lors d'un atelier à la Conférence mondiale sur les femmes (2000), tenue aux Nations Unies à New York. Nous remercions aussi les participants, qui nous ont éclairés quant à la manière dont la communauté internationale envisage les questions rela- tives au genre et au développement. Liliana Longo et Patricia Sader ont apporté une aide généreusement dans la gestion du budget et des contrats. Dawn Ballantyne, Polly Means, Kayoko Shibata et Qinghua Zhao ont apporté un soutien administratif et technique très appréciable lors des différentes étapes de la préparation du rapport. Lawrence MacDonald nous a aidés et conseillés lors du processus de consul- tation. Helene Carlsson a organisé une série de consultations. Roberta Gatti, Masako Hiraga et Sulekha Patel nous ont fourni de précieuses informations dans certaines analyses. Fiona Blackshaw, Meta de Coquereaumont, Paul Holtz, Allison Smith et Alison Strong, de Développement et communica- tions, ont fourni le soutien éditorial. Paola Scalabrin et Heather Worley, du Bureau des publications de la Banque mondiale, ont apporté de précieux conseils et orientations à différentes étapes de la production du rapport. Nous remercions également Masood Ahmed, Kemal Dervis, Emmanuel Jimenez, Jo Ritzen, Joanne Salop et Joseph Stiglitz pour leurs encourage- ments et leur soutien institutionnel lors de la rédaction de ce rapport. Nous voulons remercier de façon particulière le Comité de recherche de la Banque mondiale ainsi que les gouvernements des Pays-Bas et de la Norvège pour leur soutien financier. Les opinions et les vues exprimées dans ce rapport sont celles de leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles de la Banque mondiale ou de ses membres dirigeants. XIX Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page xx Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 1 Résumé L A DISCRIMINATION FONDÉE SUR LE GENRE EXISTE DANS plusieurs secteurs de la vie, partout dans le monde. Il en est ainsi même si des progrès considérables ont été atteints dans la lutte pour l'égalité des sexes durant les dernières décennies. La nature et l'ampleur de cette discrimination varient considérablement d'un pays et d'une région à L'égalité entre l'homme l'autre. Cependant, nous sommes frappés par les dénominateurs communs et la femme est un suivants: les femmes ne jouissent pas des mêmes droits légaux, sociaux et élément primordial du économiques que les hommes, et cela est vrai pour toutes les régions du développement ­ il en monde en voie de développement. Ces inégalités entraînent des écarts constitue même un des importants tant au niveau de l'accès aux ressources et leur maîtrise qu'au objectifs principaux. niveau des opportunités économiques ou de l'influence et du pouvoir poli- tique. Le poids de ces inégalités est plus lourd pour les femmes, bien sûr, mais c'est la société dans son ensemble qui est affectée par ce fardeau, car il porte préjudice à tous les citoyens. Pour ces raisons, promouvoir l'égalité des sexes s'avère d'une importance capitale pour un pays: cette promotion favorise sa croissance, contribue à réduire sa pauvreté et lui permet de gouverner réellement. Ainsi, la lutte pour l'égalité des sexes devient partie prenante d'un programme général de déve- loppement visant à ce que toutes les personnes ­ tant les femmes que les hommes ­ puissent vaincre la pauvreté et améliorer leurs conditions de vie. Le développement économique favorise l'égalité des sexes à long terme de plusieurs façons. Cette hypothèse est confirmée par des preuves provenant de partout au monde. Mais la croissance économique seule ne suffit pas à pro- duire l'égalité. Il faut aussi un appareil institutionnel garantissant des droits égaux et des opportunités égales tant aux femmes qu'aux hommes ainsi que des normes pouvant conjurer les inégalités. Ce rapport propose une stratégie en trois volets visant à promouvoir l'égalité des sexes. 1 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 2 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Ce rapport présente · Réforme des institutions en vue d'établir des droits égaux et des opportunités une stratégie en trois égales pour chaque genre. Cette réforme des institutions, sur les plans légal volets afin de et économique, s'avère nécessaire à l'établissement de droits fondamen- promouvoir l'égalité taux égaux et d'opportunités égales pour les hommes et les femmes. Étant des sexes. donné que, dans de nombreux pays, les femmes ne jouissent pas de droits égaux à ceux des hommes selon la loi, une réforme légale s'impose, en particulier en ce qui concerne la famille, la protection contre la violence, le droit de propriété, la recherche d'emploi et les droits politiques. · Favoriser un développement économique incitant à une participation plus grande et à un partage plus équitable des ressources. Lorsque les revenus aug- mentent et que la pauvreté recule, les inégalités basées sur le genre ont ten- dance à diminuer dans les domaines de l'éducation, de la santé et de la nutrition. Une production accrue, engendrant de nouveaux emplois, entraîne aussi une réduction des inégalités en matière de recherche d'em- ploi. Mettre en valeur les ressources en eau, investir dans l'énergie et dans les infrastructures de transport contribuent à réduire les inégalités fondées sur le genre. · Prendre des mesures pour faire face aux inégalités dans les domaines du par- tage des ressources et de l'influence politique. Étant donné que les réformes institutionnelles et le développement économique peuvent s'avérer insuffisants ­ ou se faire trop attendre ­, des mesures énergiques doivent être prises afin de faire face aux inégalités fondées sur le genre à court et à moyen terme. Égalité des sexes: en droits, en ressources et en influence L E MOT « GENRE » RENVOIE AUX RÔLES ET AUX COMPORTEMENTS sociaux associés aux femmes et aux hommes ainsi qu'aux attentes de la société envers eux. Chaque culture interprète à sa façon les diffé- rences biologiques innées des hommes et des femmes, puis élabore un ensemble d'attentes sociales qui déterminent la conduite appropriée, les droits, les moyens ou les ressources ainsi que le pouvoir propres à chacun. Bien que ces attentes varient d'une société à l'autre, certaines similitudes étonnantes existent. Par exemple, dans presque toutes les sociétés, la respon- sabilité et la garde des nourrissons et des jeunes enfants incombent aux femmes, tandis que le service militaire et la défense nationale sont l'affaire des hommes. Tout comme la race, l'ethnie ou la classe sociale, le genre est un concept social qui détermine en grande partie les opportunités d'un individu et sa participation dans la société et dans l'économie. Certaines sociétés ne sont 2 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 3 RÉSUMÉ pas divisées sur le plan racial ou ethnique, mais toutes connaissent une cer- taine asymétrie des sexes ­ constituée de différences et d'inégalités ­ à divers degrés. Ces asymétries tardent souvent à changer, mais elles sont loin d'être immuables. En effet, elles peuvent parfois se transformer très rapidement en réponse à l'évolution de la société ainsi qu'à des changements de conditions socio-économiques. L'expression égalité des sexes a reçu plusieurs définitions, suivant les diffé- rents contextes de développement. Dans ce rapport, on définit l'égalité des sexes dans les termes suivants: égalité devant la loi, égalité d'opportunités (impliquant l'égalité dans la rémunération pour le travail ainsi que dans l'accès au capital humain et autres sources de production) et, enfin, égalité d'influence (permettant de participer activement au développement et de contribuer à son processus). L'égalité des sexes ne se définit pas par l'égalité tout court pour deux raisons. Premièrement, des cultures et des sociétés empruntent des avenues différentes dans leur recherche de l'égalité des sexes. Deuxièmement, cette égalité implique que les hommes et les femmes sont aussi libres d'opter pour des rôles différents (ou semblables) et libres d'avoir des aspirations différentes (ou semblables) selon leurs priorités et leurs objectifs. Dans ce rapport, on a recours à des données variées et à diverses ana- lyses pour débattre des thèmes relatifs aux inégalités fondées sur le genre dans le monde en voie de développement. Mais il est difficile de se faire une juste opinion à ce sujet et de la mesurer correctement. Il nous manque des données importantes concernant les profondes différences entre les sexes et des analyses plus poussées sur des aspects importants de leur égalité, ce qui constitue un obstacle réel. Puisque les données empiriques s'avèrent souvent plus accessibles dans les pays plus déve- loppés, nous examinons l'expérience de pays industrialisés. Nous pré- sentons une combinaison de petites analyses à l'échelon de pays entiers, et nous examinons des conclusions empiriques provenant de plusieurs études sociales. En dépit des progrès réalisés, les inégalités fondées sur Les inégalités fondées le genre persistent dans tous les pays sur le genre en matière de scolarité et de L A DEUXIÈME MOITIÉ DU XXE SIÈCLE A ÉTÉ TÉMOIN D'UNE santé ont diminué immense amélioration au niveau de la condition de la femme ainsi considérablement, qu'au niveau de l'égalité des sexes dans la plupart des pays en voie mais un écart de développement. important perdure. · À quelques exceptions près, le niveau d'éducation des femmes s'est considérablement amélioré. Le nombre de filles inscrites au cours pri- 3 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 4 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE maire a doublé en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne, au Moyen- Orient ainsi qu'en Afrique du Nord, accusant une montée plus rapide que l'inscription des garçons. Ce fait réduit considérablement le fossé qui existait entre garçons et filles sur le plan de la scolarité. · L'espérance de vie des femmes a augmenté de quinze à vingt ans dans les pays en voie de développement. En investissant davantage pour les femmes et les jeunes filles et en leur facilitant l'accès aux soins de santé, la courbe de longévité escomptée pour l'homme et la femme se redresse dans toutes les régions en voie de développement. Pour la première fois dans les années 1990, la moyenne d'âge des femmes d'Asie du Sud est généralement plus élevée que celle des hommes. · Un plus grand nombre de femmes ont rejoint le marché du travail. Depuis 1970, la participation des femmes au marché du travail a connu une augmentation moyenne de 15 % en Asie de l'Est et en Amérique latine. Cette croissance surpasse celle des hommes, ce qui contribue à rétrécir le fossé entre les sexes dans le domaine de l'em- ploi. L'écart a aussi diminué en ce qui concerne les salaires. En dépit de progrès importants, des inégalités fondées sur le genre per- sistent concernant les droits ainsi que l'accès aux ressources et à l'in- fluence, et cela, dans tous les pays en voie de développement. Dans plusieurs domaines, les progrès sont lents et accidentés. De plus, dans cer- tains pays, des crises socio-économiques ont sérieusement ébranlé les acquis, de sorte que ce qui a été gagné l'a été difficilement. Inégalité des droits C'est un fait qu'en aucune région les hommes et les femmes ne jouis- sent de droits égaux sur les plans social, économique et légal (tableau 1). Dans certains pays, les femmes n'ont pas encore le droit de posséder un terrain, de gérer une propriété, de diriger une entreprise ou même de voyager sans le consentement de leur mari. Dans de nombreux pays de l'Afrique subsaharienne, les femmes peuvent obtenir des droits sur un terrain par l'intermédiaire de leur époux tant que dure leur mariage, mais elles perdent leurs droits en cas de divorce ou de veuvage. En rai- son de ces inégalités concernant leurs droits, les femmes constatent que leurs choix sont restreints dans plusieurs aspects de leur vie quotidienne, ce qui limite leur participation au développement et les empêche d'en tirer des bénéfices. 4 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 5 RÉSUMÉ Tableau 1 Les inégalités fondées sur le genre concernant les droits fondamentaux persistent partout au monde 4 sexes 3 des d'égalité 2 Indice 1 Asie de l'Est Europe de Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique OCDE et région du l'Est et Asie latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique centrale Antilles Nord Note: Une valeur de 1 indique une faible égalité des droits et une valeur de 4, une forte égalité (voir la note 1 à la fin du résumé pour plus d'infor- mations). Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés. Source: Humana (1992); Banque mondiale (1999c). Inégalité des ressources Avec un accès aux De façon systématique, les femmes ont moins de contrôle que les ressources limité et un hommes sur tout un éventail de ressources, incluant l'éducation, les pouvoir affaibli de biens fonciers, l'information et les ressources financières. En Asie du générer des revenus, Sud, les femmes ont une scolarité moyenne équivalant à la moitié de les femmes ne jouissent celle des hommes, et le taux d'inscription des jeunes filles au niveau d'un pouvoir réel qu'à secondaire n'équivaut qu'aux deux tiers de celui des garçons. Beaucoup la maison où elles de femmes ne peuvent posséder de lopins de terre, et celles qui en pos- peuvent peut-être sèdent sont généralement à la tête de petites propriétés, bien inférieures influencer les décisions à celles dirigées par des hommes. Dans la plupart des régions en voie de concernant la développement, les entreprises dirigées par des femmes manquent sou- répartition des vent de ressources pour fonctionner car, contrairement aux entreprises ressources et les dirigées par des hommes, leur accès à la machinerie, aux fertilisants, à investissements. l'information et au crédit est limité. De telles inégalités, tant dans le domaine de l'éducation que dans celui des ressources, nuisent à la par- ticipation des femmes au développement et les empêchent d'obtenir de meilleures conditions de vie pour leur famille. Ces inégalités se tradui- sent aussi par des risques accrus et une plus grande vulnérabilité lors des 5 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 6 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE moments de crises personnelles et familiales, au moment de la vieillesse et durant les périodes de crise économique. Malgré de récents acquis dans le domaine de l'éducation, les femmes demeurent moins bien rémunérées que les hommes pour leur travail, à for- mation et expérience égales. Dans les pays en voie de développement, les femmes sont confinées à des tâches précises et sont majoritairement exclues des postes de direction. Dans les pays industrialisés, les femmes gagnent en moyenne 77% de ce qu'encaissent les hommes, tandis que, dans les pays en voie de développement, le pourcentage se situe à 73%. Et ce n'est que le cin- quième de l'écart entre ces salaires qui peut être expliqué par l'éducation, l'expérience de travail ou les caractéristiques propres à un emploi. Inégalité de l'influence Leur accès aux ressources étant limité et leur capacité de générer des reve- nus affaiblie ­ qu'elles travaillent à leur compte ou à salaire ­, les femmes ont peu d'influence sur la répartition des ressources et sur les investissements, sauf à la maison. Des droits inégaux et un piètre statut socio-économique comparé à celui des hommes limitent aussi leur capacité à influer sur les déci- sions communautaires, sur les plans tant local que national. Les femmes demeurent largement sous-représentées aux assemblées locales et nationales, avec une moyenne de moins de 10% des sièges au Parlement (sauf en Asie de l'Est où elles occupent entre 18 et 19% des sièges). Dans les régions qui ne sont pas en voie de développement, les femmes occupent à peine 8% des positions ministérielles. De plus, on accuse un progrès négligeable dans la plupart des régions depuis les années 1970. En Europe de l'Est, la représen- tation des femmes a chuté de 25 à 7% depuis le début de la transition éco- nomique et politique. Les inégalités fondées sur le genre sont plus évidentes chez les pauvres L ES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE DANS LES DOMAINES DE l'éducation et de la santé sont souvent plus prononcées parmi les classes défavorisées. Une étude récente réalisée dans 41 pays indique que, lors de l'inscription à l'école, les inégalités basées sur le genre sont plus fréquentes chez les pauvres que chez les plus favorisés (tableau 2). On observe également que le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans est plus élevé chez les pauvres que chez les mieux nantis. Des situations semblables apparaissent lorsque l'on compare les pays pauvres aux pays plus riches. Alors que, au cours des 30 dernières 6 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 7 RÉSUMÉ années, la notion d'égalité des sexes a fait des progrès notables dans les domaines de l'éducation et de la santé dans les pays à faibles revenus, les inégalités entre les hommes et les femmes en ce qui a trait à la scolari- sation demeurent encore plus fréquentes que dans les pays à revenus moyens et élevés (tableau 3). Il existe un rapport entre le développement économique et l'égalité des sexes, mais la représentation des femmes au Parlement demeure minimale. Quelques pays à faibles revenus, tels la Chine et l'Ouganda, ont fait des efforts particuliers pour obtenir plus de sièges féminins au Parlement, réalisant ainsi des degrés de représenta- tion féminine supérieurs à ceux des pays à revenus élevés. Cela démontre l'impact que peut produire une opinion publique favorable à l'égalité des sexes. Notons toutefois que ces quelques indicateurs n'apportent pas une infor- mation quantifiable suffisante concernant l'égalité des sexes. Davantage de données concernant d'autres aspects du phénomène sont nécessaires ­ allant du contrôle financier des biens à l'autonomie ­ afin de mieux comprendre ce qui a été réalisé et ce qui reste encore à accomplir. Tableau 2 Les disparités entre les sexes tendent à être plus prononcées chez les pauvres 3,0 2,5 2,0 hommes-femmes pauvres 1,5 les chez scolarisation 1,0 de Rapport 0,5 0,0 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 Rapport de scolarisation hommes-femmes chez les riches Note: Le rapport de scolarisation a trait à la proportion des enfants âgés de 6 à 14 ans inscrits à l'école, indépendamment du niveau. Les ménages pauvres sont définis comme ceux qui sont situés dans les derniers 40% d'une distribution de la «richesse»; les ménages riches sont situés dans les premiers 20%. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés. Source: Filmer (1999). 7 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 8 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 3 Les disparités entre les sexes s'estompent avec le temps dans les pays à faible revenu ­ sauf pour la représentation parlementaire Pays à faible revenu Pays à revenu moyen Pays à revenu élevé 1,2 1,0 0,8 0,6 femmes-hommes 0,4 Rapport 0,2 0,0 1970a 1980b 1990 1995c 1970a 1980b 1990 1995c 1970a 1980b 1990 1995c Espérance de vie Inscription au cours primaire Inscription au cours secondaire Représentation parlementaire Note: Une valeur de 1,0 indique des résultats égaux pour les femmes et les hommes. Le taux de scolarisation brut est l'inscription totale à un niveau scolaire, indépendamment de l'âge, exprimé comme un pourcentage de la population officiellement en âge scolaire correspondant à ce niveau au cours d'une année scolaire donnée. Le rapport de scolarisation femmes-hommes est le rapport de scolarisation féminin brut divisé par le rapport de scolarisation masculin brut. Pour la représentation parlementaire, le rapport est le nombre de sièges détenus par les femmes par rapport aux sièges détenus par les hommes. Toutes les valeurs sont des moyennes démographiques pondérées. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents. a. Les données parlementaires sont de 1975. b. Les données parlementaires sont de 1985. c. Les données d'espérance de vie sont de 1997. Source: WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d). Les inégalités fondées sur le genre nuisent au bien-être et au développement L ES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE AFFECTENT SÉRIEUSEMENT la santé et le bien-être des hommes, des femmes et des enfants en empêchant l'amélioration de leurs conditions de vie. En plus de cau- ser des torts immenses aux personnes elles-mêmes, ces inégalités réduisent la productivité des fermes et des entreprises. Cela a pour effet de nuire à la réduction de la pauvreté et au progrès économique. Elles affaiblissent aussi le gouvernement d'un pays et, du même coup, la solidité de ses politiques de développement. 8 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 9 RÉSUMÉ Incidences sur le bien-être Les inégalités fondées sur le genre causent de nombreux maux. Les torts faits à la vie humaine et à la qualité de cette vie sont parmi les plus regret- tables. Il est difficile d'identifier et de mesurer l'impact de ces inégalités dans toute leur étendue, mais il semble clair que les sociétés aux prises avec ce pro- blème en font largement les frais. Des données provenant de partout au monde témoignent d'une augmentation de la pauvreté, de la malnutrition, de la maladie et d'autres privations pour ces pays. · La Chine, la Corée et l'Asie du Sud connaissent un taux de mortalité Les inégalités fondées féminine excessivement élevé. Pourquoi? Les lois favorisent nettement sur le genre causent de les garçons, et la politique de l'enfant unique en Chine, par exemple, ont nombreux maux. Les occasionné des taux de mortalité infantile plus élevés pour les filles que torts faits à la vie pour les garçons. D'après des statistiques scientifiques, on compterait humaine et à la qualité entre 60 et 100 millions de femmes de plus sur la terre si ce n'était de la de cette vie sont parmi discrimination fondée sur le genre. les plus regrettables. · L'analphabétisme des mères de famille affecte directement leurs jeunes enfants. Une faible scolarité chez les mères se traduit souvent par une négligence dans les soins aux petits, ce qui entraîne une hausse de la mal- nutrition et de la mortalité chez les nourrissons et les enfants. Il est plus facile pour les mamans plus scolarisées d'adopter des comportements appropriés au bien-être et à la santé de leurs enfants, comme la vaccina- tion, par exemple (tableau 4). Ces conclusions s'appuient sur des ana- lyses provenant d'un sondage domestique, lequel rend aussi compte d'autres facteurs susceptibles d'améliorer les soins de santé. · Comme pour la scolarité de la mère, un revenu familial plus élevé signi- fie une meilleure nutrition et un taux de survie infantile plus élevé. De plus, selon une étude réalisée au Bangladesh, au Brésil et en Côte d'Ivoire, lorsque l'argent d'un foyer est administré par la femme plutôt que par l'homme, cela a plus d'impacts positifs pour la famille entière. Malheureusement, des normes sociales trop rigides sur la répartition du travail, jointes à une rémunération moindre pour les femmes, limitent leurs revenus et l'argent qu'elles peuvent gérer. · Les inégalités fondées sur le genre affectant la scolarité et l'emploi contri- buent à la propagation du VIH (tableau 5). L'épidémie de sida se pro- pagera rapidement dans la prochaine décennie, jusqu'à ce qu'une femme sur quatre et un homme sur cinq soient infectés par le VIH. Cette situa- tion existe déjà dans plusieurs pays de l'Afrique subsaharienne. · Bien que les femmes et les jeunes filles, particulièrement les plus pauvres, soient fortement désavantagées par les inégalités fondées sur le genre, les hommes aussi paient le prix des stéréotypes. Dans le monde en transition économique de l'Europe de l'Est, l'espérance de vie des 9 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 10 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 4 Le taux de vaccination des enfants augmente avec le niveau d'instruction de la mère Enfants de 12 à 23 mois qui ont été vaccinés, selon le niveau d'instruction de leur mère 100 80 60 40 Pourcentage 20 0 Asie de l'Est Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles Nord Pas d'instruction Instruction primaire Instruction secondaire et plus Note: Toutes les valeurs régionales sont des moyennes démographiques pondérées. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés. Source: Les données concernant la vaccination sont tirées de sondages récents; Banque mondiale (1999d). hommes a nettement décliné au cours des dernières années. L'augmentation du taux de mortalité chez les hommes ­ le plus élevé en temps de paix ­ est lié au stress et à l'anxiété générés par le taux de chômage qui ne cesse d'augmenter. Incidences sur la productivité et l'économie Porter préjudice à la vie humaine, c'est affecter le développement, car le but ultime du développement n'est autre que l'amélioration de la qualité de vie des personnes. Mais les inégalités fondées sur le genre affectent à la fois la productivité, le rendement et le progrès économique. En suscitant des obs- tacles à la présence des femmes sur le marché du travail, en refusant systé- matiquement aux femmes ou aux hommes l'accès à certaines ressources, à des services publics et à des activités de production, la discrimination fondée sur le genre empêche la croissance économique et, du même coup, l'amélio- ration des conditions de vie. · La mauvaise répartition des ressources entre l'homme et la femme à l'intérieur du foyer cause de nombreuses pertes. Par exemple, au Burkina Faso, au Cameroun et au Kenya, les familles pourraient aug- menter le rendement de leur ferme de 20 % si les femmes avaient 10 Pages préliminaires 16/06/03 14:37 Page 11 RÉSUMÉ Tableau 5 Les taux d'infection au VIH sont plus élevés lorsque les inégalités fondées sur le genre en instruction sont plus grandes 35 urbain milieu en 20 adultes les logarithmes) en 5 chez VIH du (pourcentage, 1 prévalence de auxT 0 0 10 20 30 Écart entre les taux d'alphabétisation chez les femmes et les hommes (pourcentage) Note: Les données comprennent 72 pays (32 en Afrique subsaharienne, 20 en Amérique latine et aux Antilles, 15 en Asie, 4 au Moyen-Orient et 1 pays industrialisé). L'axe vertical mesurant le pourcentage de la population urbaine infectée par le VIH a été transformé en une échelle logarith- mique. Chaque point représente les données d'un pays individuel une fois ôtés les effets d'autres variables sociales comprises dans l'analyse de régres- sion (y compris le PIB per capita, un indice d'inégalité des revenus, la religion et la proportion de la population qui est née à l'étranger). Source: Over (1998). autant de pouvoir que les hommes sur la gestion des ressources et des revenus. · Le fait d'investir peu dans l'éducation des femmes réduit aussi l'ensemble de la production d'un pays. Par exemple, les pays d'Asie du Sud, de l'Afrique subsaharienne, du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord accu- saient le même écart en termes de moyenne d'années de scolarité que l'Asie de l'Est en 1960. Une étude a dévoilé que s'ils avaient travaillé à combler ce fossé (comme l'Asie de l'Est a réussi à le faire entre 1960 et 1992), leur revenu per capita aurait augmenté de 0,5 à 0,9% par année, ce qui consti- tuerait une augmentation substantielle comparativement aux taux de croissance actuels (tableau 6). Une autre étude révèle que, même dans les pays à revenus moyens et élevés où l'inscription scolaire au niveau primaire est plus élevée, une augmentation de 1% du taux d'inscription féminin au niveau secondaire équivaut à une augmentation du revenu per capita de 0,3%. Chacune de ces études vérifie aussi d'autres variables que l'on retrouve communément dans des documents sur le développement. 11 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 12 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 6 Des progrès plus rapides dans la réduction des inégalités en matière de scolarisation accélèrent la croissance économique Croissance annuelle du PIB par tête, 1960-1992 4 3 2 Pourcentage 1 0 Afrique Asie du Sud Moyen-Orient subsaharienne et Afrique du Nord Réelle Projetée Note: La croissance «projetée» représente le taux de croissance moyen projeté du PIB pour une région si les inégalités en matière d'éducation s'étaient réduites aussi rapidement qu'en Asie de l'Est de 1960 à 1992. Source: Klasen (1999a). Incidences sur l'exercice de l'autorité Des droits plus équitables, ainsi qu'une participation plus grande à la vie publique pour les femmes, se traduisent par une plus grande transpa- rence dans les affaires publiques et gouvernementales. Lorsque les femmes exercent une plus grande influence dans la vie publique, le niveau de cor- ruption diminue automatiquement. Cela vaut même lorsque l'on com- pare des pays ayant des revenus (tableau 7), libertés civiles, niveaux de scolarité et institutions légales semblables. Quoique de nature suggestive, ces conclusions viennent renforcer l'idée qu'il devrait y avoir davantage de femmes dans les forces armées et en politique, car leur présence contribue grandement au respect des lois et à la formation d'un bon gouvernement. En affaires, les femmes sont moins enclines que les hommes à verser des pots-de-vin à des administrateurs officiels, peut-être parce qu'elles ont un sens de l'éthique plus aigu, mais aussi parce qu'elles éprouvent une plus grande aversion pour le risque. Une étude menée auprès de 350 entre- prises en Géorgie démontre que les entreprises dirigées par des hommes ou leur appartenant sont plus susceptibles à hauteur de 10 % de verser des 12 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 13 RÉSUMÉ Tableau 7 Plus d'égalité dans les droits, moins de corruption 10 8 6 corruption de 4 Indice 2 0 4,0 4,5 5,0 5,5 6,0 6,5 7,0 Indice des droits économiques et sociaux des femmes Note: L'indice de corruption utilise les données du Guide international du risque dans les pays (ICRG) et le transforme: indice de la corruption = 10 ­ (Indice ICRG ­ 1) X 2. La variable des droits des femmes est l'indicateur des Droits humains économiques et sociaux des femmes (WESHR) élaboré par le Programme des études globales de l'Université de Purdue. Le chiffre contrôle le PIB per capita de chaque pays. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés. Source: Banque mondiale; voir aussi Kaufmann (1998). pots-de-vin à des représentants gouvernementaux que les entreprises dirigées par des femmes ou leur appartenant. Cela est vrai quelles que soient les par- ticularités de l'entreprise (son secteur d'opération et son importance), et les caractéristiques de son propriétaire ou de son gérant (son niveau d'éduca- tion). Par contre, si l'on ne tient pas compte de ces critères, les entreprises gérées par des hommes sont alors deux fois plus sujettes à la corruption. Pourquoi ces inégalités perdurent-elles? S I LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE CAUSENT DU TORT AUX personnes, affectent leur bien-être et nuisent au développement d'un pays, comment expliquer qu'elles existent dans un si grand nombre de pays? Pourquoi certaines inégalités fondées sur le genre sont-elles beaucoup plus difficiles à éliminer que d'autres? Comment expliquer des améliorations rapides dans des domaines comme la santé et la scolarisation, alors que d'autres secteurs comme la participation politique et l'égalité des droits fon- ciers souffrent encore d'un déséquilibre notable? Quels sont donc les facteurs 13 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 14 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE qui s'opposent à l'évolution des relations hommes-femmes et à l'élimination des inégalités fondées sur le genre? Ce sont les institutions, les usages domes- tiques et l'économie. Les institutions sociales et économiques ­ comme les normes, les cou- tumes, les droits, les lois et les marchés ­ ont un impact déterminant sur les relations entre les hommes et les femmes et leurs rôles respectifs. Elles influencent du même coup les ressources auxquelles chacun a accès, les activités dans lesquelles il convient ou non de s'engager, ainsi que les modalités selon lesquelles on peut participer à l'économie et à la société, toujours selon le genre. Ce sont les institutions qui, par leur force inci- tative, renforcent ou découragent les préjugés. Même lorsqu'elles n'éta- blissent pas une distinction claire entre les hommes et les femmes, elles sont généralement influencées, de façon explicite ou implicite, par des normes sociales relatives au rôle propre à chaque genre. Ces institutions sociales se maintiennent par leur propre inertie et peuvent mettre du temps à évoluer, mais elles sont loin d'être stagnantes. Tout comme les institutions sociales, les usages domestiques jouent un Les disparités entre les rôle fondamental dans la détermination, dès le jeune âge, des rôles et des sexes ont envahi les comportements des sexes. De plus, ceux-ci se transmettent de génération institutions, les usages en génération. C'est en famille que se prennent les décisions les plus fon- domestiques ainsi que damentales de la vie, comme l'éducation des enfants, le temps consacré l'économie, et elles au travail et aux loisirs ou les investissements futurs. C'est aussi au sein nuisent à l'évolution de la famille que l'on assigne les tâches et les ressources respectives des normale des relations garçons et des filles, que l'on détermine le degré d'autonomie consenti à entre les hommes et chacun et à chacune ainsi que les attentes différentes de l'un et de l'autre. les femmes. Tout cela contribue à créer, à renforcer ou à tempérer les inégalités fon- dées sur le genre. Mais les familles ne prennent pas ce genre de décision de façon isolée. Elles s'adaptent au contexte communautaire et sont influencées par les usages établis de tout un environnement. La qualité de vie des gens s'améliore dans un contexte économique favorable. C'est pourquoi les mesures économiques et le développement affectent de façon décisive les inégalités fondées sur le genre. Une famille qui a un revenu plus élevé a plus de ressources, et celles-ci sont distri- buées plus équitablement entre les garçons et les filles. Mais les effets du développement économique sur les hommes et les femmes dépend sur- tout des activités rémunérées, comment elles sont organisées, comment les habiletés et les aptitudes sont récompensées, et si les hommes et les femmes y ont un accès égal. En fait, des politiques de développement apparemment ouvertes à tous peuvent produire des résultats déterminés par le genre. Cela dépend en partie de l'influence combinée des institutions sociales et des usages 14 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 15 RÉSUMÉ domestiques : ce sont ces facteurs qui déterminent les rôles et les compor- Des politiques de tements de chacun. La répartition des tâches domestiques fondée sur le développement genre, les normes sociales et les préjugés ainsi que l'attribution inégale des apparemment ouvertes ressources sont autant de facteurs qui empêchent tant les hommes que les à tous peuvent produire femmes de profiter des opportunités économiques ou de surmonter les des résultats crises. Le fait de ne pas reconnaître ces contraintes fondées sur la diffé- déterminés par le rence entre les sexes lorsqu'on doit décider des politiques peut compro- genre. mettre l'efficacité de ces dernières, qu'on les considère du point de vue de l'équité ou de l'efficacité. Donc, les institutions sociales, les usages domestiques et l'économie dans son ensemble sont les facteurs déterminant des opportunités et des projets dans la vie des gens, selon leur genre. Ils constituent du même coup des sujets dont il faut tenir compte dans l'élaboration de politiques visant à faire face aux inégalités persistantes entre les sexes. Une stratégie en trois volets visant à promouvoir l'égalité des sexes L ES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE AFFECTENT GRAVEMENT les personnes et nuisent aux projets de développement des nations. Cette triste situation exige une réaction; elle incite à poser des gestes concrets en faveur de l'égalité des sexes. L'État joue un rôle décisif dans l'amélioration du bien-être de chacun. Pour ce faire, il doit s'efforcer d'obtenir des bénéfices sociaux substantiels en améliorant le statut des femmes et des jeunes filles. Une action à caractère public s'avère particu- lièrement nécessaire car il est très difficile (voire impossible) pour des indi- vidus d'apporter des changements à des institutions sociales et légales qui perpétuent des inégalités fondées sur le genre. Les insuffisances du marché sont également un obstacle : il est en effet difficile d'obtenir des données exactes sur la contribution des femmes au marché du travail, soit qu'elles l'investissent surtout dans des activités non rémunérées, soit que le marché soit inexistant ou sous-développé. En améliorant l'efficacité des institutions sociales et en réalisant une crois- sance économique, on vise à coup sûr un développement à long terme. Cependant, même si l'on réussit cette stratégie, cela ne garantit pas l'égalité des sexes. Pour vraiment atteindre ce but, les politiques visant le changement ins- titutionnel combiné au développement économique doivent d'abord tenir compte des inégalités fondées sur le genre afin de les affronter, et cela, dans les domaines des droits, des ressources et de l'influence. Des programmes d'orien- tations et d'actions concrètes, afin de corriger des inégalités persistantes entre les hommes et les femmes, sont nécessaires. Voici les trois volets de la stratégie: 15 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 16 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE 1. Réforme des institutions en vue d'établir des droits égaux et des oppor- tunités égales pour chaque genre Puisque ce sont les institutions sociales, légales et économiques qui déter- minent l'accès des hommes et des femmes aux ressources, leurs opportunités économiques ainsi que leur pouvoir, un élément primordial dans la conquête de l'égalité des sexes serait l'instauration d'un même terrain sur lequel les hommes et les femmes pourraient évoluer avec les mêmes règles du jeu. Assurer l'égalité au niveau des droits fondamentaux. L'égalité des sexes quant aux droits est un objectif primordial du développement. Les droits sociaux, légaux et économiques permettent aux hommes et aux femmes de participer de façon productive à la société, de s'assurer une bonne qualité de vie et de profiter des nouvelles opportunités que le développement leur apporte. Une plus grande égalité des droits entraîne de façon certaine et sys- tématique une égalité accrue dans les domaines de l'éducation, de la santé et de la participation à la politique, et cela, indépendamment des considéra- tions de revenus (tableau 8). Tableau 8 Plus d'égalité en droits ­ plus d'égalité en ressources et en opinions Inscription au niveau secondaire, 1995 Représentation parlementaire, 1995 1,00 0,8 0,95 0,6 0,90 0,4 femmes-hommes femmes-hommes Rapport Rapport 0,85 0,2 0,80 0,0 Faible égalité en droits Forte égalité en droits Faible égalité en droits Forte égalité en droits Note: Une valeur de 1,0 indique des résultats égaux pour les femmes et les hommes. Le taux de scolarisation brut est l'inscription totale à un niveau scolaire, indépendamment de l'âge, exprimé comme un pourcentage de la population officiellement en âge scolaire correspondant à ce niveau au cours d'une année scolaire donnée. Le rapport de scolarisation femmes-hommes est le rapport de scolarisation féminin brut divisé par le rapport de scolarisation masculin brut. Pour la représentation parlementaire, le rapport est le nombre de sièges détenus par les femmes par rapport au nombre de sièges détenus par les hommes. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents. Source : Humana (1992); WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d). 16 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 17 RÉSUMÉ Si les pays d'Asie du Sud, d'Afrique subsaharienne, du Moyen-Orient et Un élément primordial d'Afrique du Nord faisaient l'effort d'égaliser davantage les droits jusqu'à dans la conquête de atteindre le niveau du «meilleur pays» de leur région respective, la propor- l'égalité serait tion de femmes par rapport aux hommes au Parlement doublerait au l'instauration d'un Moyen-Orient et en Afrique du Nord, et ferait un bond de plus de 60% même terrain sur dans les autres régions. L'augmentation du degré d'égalité pour les droits ne lequel les hommes et produirait qu'un impact mineur sur l'égalité des sexes au niveau de l'éduca- les femmes pourraient tion, mais des améliorations significatives feraient avancer considérablement évoluer, avec les la cause de la parité entre garçons et filles concernant la scolarisation. Ce mêmes règles du jeu. n'est qu'en Asie du Sud que perdurerait l'immense fossé entre les sexes pour ce qui est de la scolarisation, même si on apportait de grandes améliorations. Il est par conséquent très important que les lois soient modifiées afin d'ins- taurer des droits égaux et une protection égale pour les femmes et pour les hommes. Mais il est plutôt rare qu'on réussisse une réforme à coups de lois. Dans plusieurs pays en voie de développement, il s'avère très difficile de réaliser concrètement les réformes légales, précisément en raison de la complexité inhérente aux systèmes légaux locaux. Par exemple, la loi civile de l'Ouganda prévoit des droits égaux pour les conjoints en cas de divorce, mais ce sont les coutumes, aussi consacrées par la loi, qui prévalent lors de la répartition des biens, et les femmes ne peuvent conserver un bien fon- cier. Dans les cas de violence conjugale, des exigences exagérées de preuves et d'autres embûches dans les procédures (parfois jointes à une attitude désobligeante des hommes de loi) viennent contrecarrer le cours de la justice dans de nombreux pays. Dans de tels contextes, des mesures énergiques en vue d'assurer l'application des décisions de l'appareil judi- ciaire s'avèrent absolument nécessaires si l'on veut réellement obtenir une plus grande égalité des sexes sur le plan des droits fondamentaux. La volonté politique est presque toujours déterminante pour la solution de ces problèmes. Instauration de mesures visant à décourager la discrimination fondée sur le genre. La structure des institutions économiques affecte aussi l'égalité de plusieurs façons. Les différents marchés véhiculent un puis- sant éventail de messages, lesquels influencent nos décisions et notre comportement par rapport au travail, à l'épargne, à l'investissement et à la consommation. Les salaires respectifs des hommes et des femmes, ainsi que le prix des marchandises et des services, sont fortement déterminés par les structures du marché. Des observations réalisées au Mexique et aux États-Unis démontrent que les entreprises qui opèrent sur un mar- ché compétitif sont moins enclines à discriminer envers les femmes dans leurs pratiques d'embauche et de rémunération que des entreprises qui 17 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 18 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE jouissent d'un monopole. Une situation semblable se retrouve en Chine, tant rurale que citadine, où les femmes qui détiennent un poste assigné par l'administration obtiennent plus difficilement l'équité salariale que celles qui ont trouvé leur emploi par elles-mêmes et de manière compé- titive. Des politiques et des investissements qui élargissent les marchés et cor- rigent les inégalités fondées sur le genre en matière d'information ­ accompagnés de sanctions pour ceux qui pratiquent la discrimination ­ Des politiques et des constituent un grand encouragement à l'égalité des sexes sur le marché du investissements travail. En Chine et au Viêt-Nam, par exemple, l'élargissement des mar- contribuant à accroître chés agricoles a entraîné une augmentation de la demande pour la main- le commerce et à d'oeuvre féminine dans des entreprises non agricoles, créant ainsi de corriger les disparités nouveaux emplois et de nouvelles sources de revenus. entre les sexes Projet de distribution de services facilitant un accès universel. Le pro- concernant l'accès à jet d'un programme de distribution de services ­ comme le système sco- l'information se laire, les centres de santé, les institutions financières ainsi que les traduisent par une programmes agraires ­ peut encourager un accès plus équitable aux ser- participation plus égale vices. De plus, en impliquant la communauté dans le projet, on répond des hommes et des aux besoins propres de la communauté locale tout en permettant aux femmes à l'économie. femmes de profiter plus facilement des services. Au Bangladesh, au Kenya et au Pakistan, par exemple, la scolarisation des filles comporte plus d'exigences que celle des garçons car les parents se sou- cient davantage de la qualité de l'école ainsi que des services spécifiques offerts, comme des cours dispensés par des professeurs féminins, des écoles unisexes, un transport écolier sécuritaire, etc. Répondre à ces demandes pour- rait augmenter considérablement le nombre d'inscriptions des filles. En cer- tains endroits d'Afrique de l'Ouest, des banques mobiles (connues sous le nom de collecteurs susu au Ghana) se déplacent, offrant des services bancaires aux marchés locaux, aux usines, aux foyers, et éliminent ainsi la nécessité pour les femmes de parcourir de longues distances pour épargner ou emprunter. Au Bangladesh, des programmes de prêts utilisent des tactiques comme des groupes de soutien ou la pression exercée par l'entourage immédiat plutôt que les gages habituellement exigés en nantissement pour assurer les rembourse- ments. Chacun de ces projets a permis à un plus grand nombre de femmes d'accéder à des ressources financières. 2. Favoriser un développement économique incitant à une participation plus grande et à un partage plus équitable des ressources La plupart du temps, le développement économique va de pair avec une amélioration des conditions de vie pour les femmes et les filles et avec une plus grande égalité des sexes, et cela de diverses manières: 18 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 19 RÉSUMÉ · Il appartient aux familles de prendre les décisions vitales concernant le travail, la consommation et les investissements, mais elles le font en partie en fonction des prix et autres facteurs liés au marché. La mou- vance de ces marchés entraîne inévitablement des modifications dans la répartition des ressources. Lorsque le développement économique améliore l'accessibilité et la qualité des services publics, comme les centres de santé et les écoles, cela fait baisser le coût des investisse- ments en capital humain pour la famille. Si le coût baisse davantage pour les femmes que pour les hommes, ou si les investissements pour les femmes s'avèrent plus sensibles aux changements de prix que ceux consentis pour les hommes, les femmes en retirent un bénéfice plus grand. · Lorsque, grâce au développement économique, les revenus augmen- tent et que la pauvreté prend du recul, les inégalités fondées sur le genre diminuent souvent du même coup. Un exemple : les familles à faibles revenus qui doivent rationaliser leurs dépenses en éducation, en soins de santé et en nutrition, le font aux dépens des femmes et des filles. Mais lorsque les revenus familiaux augmentent, leur fardeau s'en trouve allégé; les inégalités fondées sur le genre ont donc ten- dance à s'estomper. Il en va de même pour les droits fondamentaux. Des revenus plus éle- vés se traduisent généralement par une plus grande égalité quant à l'ac- cès aux ressources, que ce soit dans le domaine de la santé ou de l'éducation (tableau 9). S'agissant de l'éducation, on prévoit qu'une croissance des revenus est plus susceptible de survenir dans les régions les plus pauvres ­ en Asie du Sud et dans les pays subsahariens ­, entraînant Le développement ainsi de grandes améliorations, spécialement au niveau des inscriptions économique multiplie au secondaire. Mais grâce aux mêmes analyses, on prévoit aussi que d'im- les opportunités menses augmentations de revenus ­ rejoignant celles de l'OCDE ­ sont économiques et les requises pour atteindre la quasi-égalité en ce qui concerne le nombre ressources tout en d'inscriptions au niveau secondaire dans ces régions. De telles augmen- diminuant les contraintes, tations ne sont évidemment pas réalistes à court ou à moyen terme. Il spécialement chez les faudrait aussi d'immenses augmentations de revenus avant de pouvoir femmes et les jeunes envisager des progrès notables dans la représentation parlementaire. filles. · Lorsque le développement économique multiplie les emplois, cela crée des attentes accrues par rapport au rendement de la main- d'oeuvre. Les familles sont alors fortement encouragées à investir dans la santé et l'éducation des filles, tandis que les femmes sont inci- tées à investir le marché du travail. En transformant le simple encou- ragement en travail concret, le développement économique favorise l'égalité des sexes. 19 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 20 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 9 Les inégalités fondées sur le genre en éducation diminuent lorsque les revenus augmentent Inscription au niveau secondaire, 1995 1,50 1,25 1,00 femmes-hommes 0,75 Rapport 0,50 0,25 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 PIB per capita (en logarithmes) Note: Une valeur de 1,0 indique des résultats égaux pour les femmes et les hommes. Le taux de scolarisation brut est l'inscription totale à un niveau scolaire, indépendamment de l'âge, exprimé comme un pourcentage de la population officiellement en âge scolaire correspondant à ce niveau au cours d'une année scolaire donnée. Le rapport de scolarisation femmes-hommes est le rapport de scolarisation féminin brut divisé par le rapport de scolarisation masculin brut. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents. Source: Banque mondiale (1999d). · Le développement économique facilite l'apparition de nouveaux mar- chés et consolide le marché du travail en augmentant les exigences en main-d'oeuvre et en éliminant certaines failles dans l'utilisation des res- sources humaines. Par exemple, là où le marché du travail est florissant, le travail domestique est effectué par des ouvriers, que ce soit à la ferme ou à la maison, ce qui permet une utilisation plus rationnelle et efficace du temps et réduit le fardeau des femmes. Une telle alternative est impossible lorsque les marchés sont sous-développés ou inexistants. · La croissance économique occasionne des investissements dans les infrastructures, comme les aqueducs, les routes, le transport et le car- burant. Ce genre d'amélioration a pour effet de réduire considéra- blement le temps consacré par les femmes à l'entretien du foyer. Au Burkina Faso, en Ouganda et en Zambie, par exemple, les femmes et les filles épargneraient plusieurs centaines d'heures par an si les réserves d'eau et de combustibles se trouvaient à moins de 30 minutes de marche (tableau 10). Le développement d'infrastructures réduit donc de façon significative le temps accordé aux tâches domestiques routinières, favorise la santé des femmes et leur partici- 20 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 21 RÉSUMÉ Tableau 10 Les investissements en infrastructures d'approvisionnement en eau et en énergie peuvent réduire considérablement le temps consacré aux activités domestiques Moyenne des heures potentielles épargnées par foyer, par an 800 600 400 Heures 200 0 Lusaka rural, Kaya, Mbale, Kasama, Dedougou, Zambie Burkina Faso Ouganda Zambie Burkina Faso Eau potable dans un rayon de 400 mètres Bois de chauffage à 30 minutes de marche Note: Kasama et Dedougou sont déjà dans la cible de 400 mètres. Dans certaines parties de l'Afrique subsaharienne, les femmes représentent les deux tiers ou plus du temps que le ménage consacre à la collecte de l'eau et du combustible, tandis que les enfants, principalement les filles, en repré- sentent 5 à 28%. Source: Barwell (1996). pation à des activités rémunérées, et offre aux jeunes filles un plus grand accès à la scolarité. Bien que le développement économique favorise l'égalité des sexes, son impact n'est ni suffisant, ni immédiat, ni automatique. Son impact dépend en grande partie des droits, de l'accès aux ressources de produc- tion (tels les biens fonciers et le crédit) et de leur maîtrise, ainsi que du degré d'influence. Même lorsque des politiques sociales s'opposent à la discrimination sur le marché du travail ou subventionnent des garderies, le développement économique ne suffit pas à réduire les inégalités fon- dées sur le genre. Cette conclusion découle de l'expérience de pays qui connaissent une économie de transition, soit les pays au taux de crois- sance élevé de l'Asie de l'Est et ceux en voie d'ajustement de l'Amérique du Sud et de l'Afrique subsaharienne. Il faut aussi des politiques sociales qui établissent une distinction entre le travail rémunéré et le travail qui ne l'est pas afin de reconnaître la différenciation sexuée du travail. Ces politiques permettraient d'assurer une protection sociale en cas de crises économiques ou de récessions prolongées. 21 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 22 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE De récents débats portant sur le genre et le développement préconisent deux approches distinctes : celle de la croissance économique et celle de la réforme des institutions et des droits. En fait, ces deux facteurs combinés, le développement économique et le changement institutionnel, consti- tuent les éléments clés d'une stratégie à long terme dans la poursuite de l'égalité des sexes. Par exemple, là où le revenu per capita et l'égalité des droits sont plutôt faibles, une amélioration en matière de droits ou de reve- nus aurait pour effet d'élever le degré d'égalité en matière d'éducation. Une amélioration des droits et des revenus produirait des gains encore plus importants (tableau 11). Des réformes institutionnelles appuyant les droits fondamentaux et des politiques favorisant le développement économique ont pour effet de se renforcer mutuellement. En Afrique subsaharienne, permettre aux femmes de posséder des biens fonciers a eu un impact direct sur la pro- Tableau 11 L'égalité en matière de droits et de croissance économique encourage l'égalité des sexes dans bien des domaines, de l'éducation à l'influence politique Inscription au niveau secondaire, 1995 Représentation parlementaire, 1995 1,05 0,99 1,0 0,96 1,0 0,86 femmes-hommes femmes-hommes 0,19 Rapport Rapport 0,11 0,07 0,06 0,0 0,0 Forte Revenu Forte Revenu égalité en Faible Faible Faible élevé égalité en Faible élevé droits égalité en revenu droits égalité en revenu droits droits Note: Une valeur de 1,0 indique des résultats égaux pour les femmes et les hommes. Les chiffres sont basés sur des simulations dérivées de résultats de régression multiples contrôlant le revenu et les droits. Un score moyen de 2,33 ou moins représente une faible égalité en droits, un score moyen de 2,67 ou plus une forte égalité (voir la note 1 à la fin du résumé pour plus de détails sur l'indice des droits). Les pays à faible revenu et à revenu élevé sont groupés selon la valeur moyenne du PIB per capita. Toutes les valeurs sont des moyennes démographiques pondérées pour chaque caté- gorie. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents. Source: Humana (1992); WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d). 22 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 23 RÉSUMÉ ductivité des terres, augmentant du même coup leurs revenus ainsi que ceux de leurs familles. De façon semblable, lorsque ces femmes jouissent d'un plus grand accès aux institutions d'épargne et de crédit, leur statut économique s'en trouve rehaussé, leur sécurité accrue et le bien-être de leur famille amélioré. Au Bangladesh, lorsque le pouvoir d'emprunt des femmes a augmenté grâce à des programmes de crédit appropriés, leur sta- tut ainsi que leur pouvoir de négociation au sein de la famille ont été rehaussés, sans compter que l'indice de consommation a augmenté dans les foyers. 3. Prise de mesures énergiques propres à confronter les inégalités dans les domaines du partage des ressources et de l'influence politique Comme l'action combinée des réformes institutionnelles et du dévelop- pement tardent ordinairement à donner des résultats, il s'avère souvent nécessaire de recourir à d'autres mesures à court et à moyen terme. Ces mesures sont des pas concrets vers la correction de formes précises de dis- crimination et d'exclusion fondées sur le genre, que ce soit à la maison, Les responsables dans la communauté ou au travail. De telles mesures permettent de réali- politiques doivent ser des progrès plus rapidement dans la lutte contre les inégalités les plus sélectionner les persistantes. Grâce à ces actions, on arrive à cibler des couches précises de stratégies et les la population, dont les moins favorisées, souvent affectées de façon parti- interventions qui culièrement aiguë. rapporteront le Puisque la nature et l'étendue de ces inégalités peuvent varier grandement maximum de bénéfices selon les différentes régions d'un pays, les interventions les plus importantes sociaux. doivent aussi s'adapter aux différents contextes. Afin de bien déterminer si l'État doit intervenir et quelles mesures concrètes peuvent être adoptées, on doit prendre en considération les réalités locales. Puisque cela représente tout de même un coût en ressources, les responsables politiques doivent sélection- ner les mesures à entériner et établir stratégiquement les interventions suscep- tibles de procurer les plus grands bénéfices possibles à la société. Cela implique qu'on s'attaque aux secteurs où le marché fait défaut et où les effets d'entraî- nement sont les plus redoutables. Il faut aussi viser les endroits où le secteur privé ne semble pas parvenir à se montrer compétitif. En plus de juger de la pertinence des interventions, on doit aussi détermi- ner la meilleure façon d'intervenir. Par exemple, l'État doit-il verser directe- ment les prestations de biens ou de services? Il faut également étudier les différentes modalités permettant d'atteindre les mêmes objectifs: les ques- tions de coûts, de publicité, de contrôle d'exécution, d'utilisation des fonds publics ou de ceux du secteur privé, etc. Ce rapport se concentre sur les quatre politiques actives suivantes: 23 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 24 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Promotion de l'égalité des sexes concernant l'accès aux ressources et la capacité de générer des revenus. En fournissant des opportunités égales en matière d'accès et de contrôle des ressources ­ éducation, res- sources financières, biens fonciers ­ et d'accès aux occasions d'emplois, on fait avancer la cause de l'égalité des sexes et on rend l'économie encore plus efficace. Voici quelques suggestions à la discrétion des responsables politiques : · En réduisant les coûts scolaires, en s'intéressant aux préoccupations des parents concernant la sécurité et la qualité de l'éducation, on est mieux en mesure de surmonter les obstacles à l'éducation des filles, et cela, même dans des sociétés ultra-stratifiées en matière de différences sexuelles. En investissant dans la scolarité des filles, les familles retirent des bénéfices Un accès plus équitable énormes. aux ressources de · On pourrait mettre sur pied des initiatives d'ordre financier qui tien- production et aux nent vraiment compte des contraintes subies par les victimes des opportunités d'emplois inégalités fondées sur le genre en utilisant, par exemple, des moyens ne peut que faire de pression par l'entourage au lieu d'exiger des gages en nantissement, évoluer la cause de en simplifiant les procédures bancaires, en offrant des services finan- l'égalité des sexes et ciers mobiles auprès des foyers, des marchés et des lieux de travail. On rendre l'économie plus améliorerait ainsi considérablement l'accès des femmes à l'épargne et efficace. au crédit. · Une réforme des biens fonciers offrant des droits conjoints de propriété ou permettant aux femmes de posséder davantage en propre ce genre de biens contribuerait grandement à augmenter la maîtrise des femmes sur les terres là où les lois coutumières sont prédominantes. Il faut tenir compte de l'interaction entre les coutumes et les lois dans les efforts qui visent l'accès des femmes à la possession de la terre. · Dans les pays où existent des marchés relativement développés et où les lois sont appliquées, la mise sur pied de programmes d'emplois peut contribuer à augmenter l'accès des femmes au secteur des emplois formels. Un tel déploiement, là où l'on constate une sérieuse discrimination au niveau de l'embauche et des promotions, peut contribuer à augmenter la productivité dans les entreprises ainsi que dans l'économie. Diminution du fardeau des femmes au sein du foyer. Dans presque toutes les sociétés, il est convenu que l'entretien et les soins du ménage reviennent aux femmes et aux filles. Dans les pays en voie de développement, ces tâches domestiques accaparent presque tout leur temps, de sorte que les filles ne peuvent poursuivre leurs études et les mères de familles voient leurs possibi- lités de travailler réduites. Des interventions judicieuses peuvent contribuer à réduire les soins du ménage. 24 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 25 RÉSUMÉ · Des interventions augmentant les possibilités de scolarité, les salaires et la participation au marché du travail ­ jointes à un accès adéquat à des services de planification familiale ­ appuieraient la femme dans sa volonté d'avoir ou non des enfants. La contraception et le nombre d'en- fants voulus étant des décisions personnelles qui peuvent diverger d'un conjoint à l'autre, les services offerts doivent cibler autant les hommes que les femmes. · En subventionnant adéquatement les services de garderie, on réduirait leurs coûts et les femmes seraient mieux en mesure de participer à l'éco- nomie, tandis que les jeunes filles pourraient poursuivre leurs études. Au Kenya, une réduction du prix des services de garderie a permis d'aug- menter considérablement la présence des mères sur le marché du travail et a également eu un impact positif sur la scolarisation des adolescentes (tableau 12). · Instaurer une législation qui protégerait le marché du travail comporte parfois autant de désavantages que de bénéfices pour les travailleuses. Par exemple, lorsque les entreprises doivent supporter entièrement le coût des congés de maternité, leurs politiques d'embauche peuvent devenir défavorables aux femmes. Par contre, si les femmes doivent assumer tous Tableau 12 Des services de garderie abordables signifient plus de femmes sur le marché du travail et de filles à l'école Augmentation de la participation des mères au marché du travail et de la scolarisation des enfants plus âgés (8 à 16 ans) grâce à une baisse de 10% du coût des services de garderie au Kenya 6 4 Pourcentage 2 0 Participation des Scolarisation des Scolarisation des mères au marché filles garçons du travail Source: Lokshin, Glinskaya et Garcia (2000). 25 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 26 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE les coûts, elles sont alors moins motivées à continuer à travailler. Des mesures qui répartiraient les coûts des congés de maternité entre les employeurs, les travailleurs et l'État pourraient aider financièrement les femmes et leurs familles. · Des investissements qui ciblent des infrastructures stratégiques comme le transport, les aqueducs et l'approvisionnement énergé- tique peuvent contribuer à alléger le fardeau domestique des femmes et des jeunes filles, particulièrement dans les régions rurales ou défavorisées. De telles réalisations libèrent les femmes en leur permettant de s'adonner à d'autres activités, comme de fréquenter l'école, de s'impliquer auprès de la communauté ou d'investir le marché du travail. Pour qu'une politique Offrir une sécurité sociale appropriée. Les crises économiques et les de sécurité sociale réformes politiques ont un impact différent sur les hommes et sur les soit vraiment efficace, femmes, et les risques encourus par chaque genre ne sont pas les mêmes. elle doit tenir compte Les femmes disposent de peu de ressources pour amortir ces secousses, des risques particuliers tandis que les hommes sont davantage sujets au stress lié à l'insécurité aux hommes et aux de leur emploi et à leur rôle de pourvoyeur. Pour ces raisons, il est femmes ainsi que de important qu'un plan de sécurité sociale tienne compte des différences entre les sexes dans l'évaluation des risques et de la vulnérabilité des per- leur degré différent de sonnes, car les hommes et les femmes d'une même famille font face à des vulnérabilité. risques différents. · Pour assurer la protection, un programme de sécurité sociale adé- quat doit tenir compte des facteurs reliés aux différences entre les sexes en ce qui a trait à la participation et aux bénéfices. Les femmes sont souvent exclues des programmes à cause de ces différences, car leur comportement au travail, leur accès à l'information ainsi que le type d'emploi qu'elles ont ne sont pas les mêmes que pour les hommes. · Des programmes sociaux pour la sécurité du troisième âge qui ne tiennent pas compte de ces différences en ce qui concerne l'emploi, les salaires et l'espérance de vie risquent de laisser les femmes ­ tout spécialement les veuves ­ vulnérables et démunies au moment de la vieillesse. Une étude réalisée récemment au Chili démontre d'ailleurs que les bénéfices que les femmes retirent de leur pension, comparés à ceux des hommes, dépendent énormément des clauses spécifiques des programmes sociaux de pension de vieillesse (tableau 13). Renforcer la participation et l'influence politique des femmes. Des changements institutionnels établissant l'égalité des sexes en matière de droits fondamentaux constituent la pierre angulaire d'une égalité au niveau de la participation et de l'influence politique. De la même façon, 26 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 27 RÉSUMÉ des politiques et des programmes favorisant l'égalité dans l'éducation et l'accès à l'information (incluant l'initiation au droit) sont de nature à consolider la représentation des femmes et, du même coup, leur capacité à faire leur entrée sur la scène politique. Mais comme dans le cas des mesures de développement économique, ces approches mettent du temps à produire des bénéfices observables. Une expérience réalisée récemment dans plus de 30 pays, dont l'Argentine, l'Équateur, l'Inde, les Philippines et l'Ouganda, suggère qu'une politique de « quotas en faveur des femmes » est envisageable si l'on prend l'initiative d'augmenter la représentation des femmes dans les assemblées locales et nationales dans un court laps de temps. La mesure ou la loi dite de « quotas en faveur des femmes » peut prendre différentes formes selon les pays, mais stipule en général qu'un nombre minimum de candidatures ou de sièges électoraux pour un parti politique doit être réservé aux femmes. Tableau 13 Le système de pension du Chili affecte la sécurité des hommes et des femmes du troisième âge Revenus mensuels de pension de retraite parmi les travailleurs ayant une éducation primaire incomplète (rapport femmes-hommes entre parenthèses) Hommes, pension personnelle Femmes, pension personnelle (0,89) et du survivant Femmes, pension personnelle (0,60) ou du survivant Femmes, pension personnelle (0,43) (retraitées à 65 ans) Femmes, pension personnelle (0,35) (ajustée selon le GPM) Femmes, pension personnelle (retraitées à 60 ans) (0,29) 0 20 40 60 80 100 120 En milliers de pesos Note: Ces estimations supposent que les hommes prennent leur retraite à 65 ans et les femmes à 60, âges réglementaires de retraite pour les hommes et les femmes. Par GPM, on entend la garantie de pension minimale fournie par l'État. Les chiffres sont calculés comme des annuités mensuelles versées aux allocataires urbains, en supposant un taux de rendement de 5% avec 2% de croissance salariale. Les hommes sont censés survivre 15 années après la retraite (à 65 ans) et prévoir une pension de survivant de 6 années à 60% de leur propre annuité. Si les femmes prennent leur retraite à 60 ans, elles devraient survivre 23 années, et si elles prennent leur retraite à 65 ans, elles sont censées survivre 19 années. Source: Adapté de Cox-Edwards (2000). 27 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 28 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Défis et voie de l'avenir L ES DONNÉES DE CE RAPPORT SONT DE NATURE À MOTIVER les gouvernements à agir en faveur de l'égalité des sexes. En effet, l'État, les différents groupes de la société civile ainsi que la com- munauté internationale ont tous un rôle décisif à jouer dans la lutte à la discrimination fondée sur le genre, afin que tous puissent en récolter des bénéfices considérables. Mais cette lutte implique de relever d'impor- tants défis. Une politique adaptée Afin d'affronter les défis actuels et futurs posés par l'objectif de l'égalité L'élément clé des sexes, une étude approfondie des liens existant entre le genre et le déve- du défi posé par loppement, et la façon dont ces liens se reflètent dans les décisions poli- l'égalité des sexes est tiques, est nécessaire. Ce rapport réunit des données détaillées sur ces liens, de comprendre les mais il reste encore beaucoup à découvrir et à comprendre. Il serait même liens qui existent entre nécessaire de recueillir encore plus d'informations afin d'en faire une ana- le genre et le lyse minutieuse. développement, afin que cela se reflète · Quels sont les impacts des programmes ou politiques sur chaque adéquatement dans les genre ? Dans quelle mesure les choix en matière de dépenses politiques. publiques contribuent-ils à promouvoir ou à freiner l'égalité des sexes et une économie prospère ? Les responsables politiques doivent faire face à plusieurs demandes pressantes avec des ressources publiques et des échéanciers fiscaux et administratifs serrés. Connaissant ces contraintes, toute recommandation doit être de nature à aider les gouvernements dans leurs choix d'interventions en rapport avec l'égalité des sexes, pour le plus grand bénéfice de la société. De plus, comme la nature des inégalités diffère selon les sociétés, une politique vraiment efficace doit s'appuyer sur une étude qui reflète les vraies préoccupations des gens à ce sujet, sur les plans local et national. · Il est aussi de plus en plus important d'évaluer dans quelle mesure les politiques et les programmes influencent nos indicateurs habi- tuels de développement, tels l'éducation, la santé et la main- d'oeuvre. On peut alors constater comment une intervention particulière améliore l'autonomie des femmes, leur leadership et leur influence, et cela tant dans les foyers que dans l'ensemble de la société. Il faut ensuite voir pourquoi telle intervention s'avère plus efficace qu'une autre. 28 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 29 RÉSUMÉ Faire face aux nouveaux problèmes Faire face à des situations nouvelles (et les prévoir), voilà un défi de taille pour les responsables politiques. En effet, certaines situations requièrent une attention accrue de la part des dirigeants et des décideurs politiques, telles que la mondialisation, la décentralisation des gouvernements, la pro- pagation du virus du sida ainsi que le vieillissement de la population. Voici quelques exemples : · Avec le déclin de la natalité et l'augmentation de l'espérance de vie, la population mondiale devient vieillissante. Entre autres conséquences, ce phénomène aura pour résultat un nombre grandissant de veuves sur la planète entière au cours du XXIe siècle. Quelles sont les implications de ce changement démographique concernant la sécurité sociale, la santé et autres domaines de la politique publique ? La compréhension des implications politiques de cette tendance démographique repré- sentera un important défi pour la recherche dans les prochaines années. · De façon similaire, la mondialisation et les nouvelles technologies de l'information sont en train de transformer complètement l'organisation de la production ainsi que la transmission des données partout au monde. Ces changements vont-ils favoriser un progrès vers l'égalité des sexes ou élargir davantage le gouffre en matière d'opportunités écono- miques? Une connaissance approfondie de ces opportunités et des risques qui leur sont associés représente un autre défi pour les chercheurs et les responsables politiques. Vers un partenariat élargi Dans leurs efforts de promotion de l'égalité des sexes, un troisième défi Un autre défi important de taille se présente aux responsables politiques : celui d'élargir leur parte- pour les responsables nariat avec des groupes sociaux, des organismes donateurs et autres orga- politiques est celui nismes de la communauté internationale. Tandis que les responsables d'élargir leur politiques jouent un rôle déterminant dans la lutte aux inégalités fondées partenariat à différents sur le genre, la collaboration de divers organismes sur les plans tant local groupes de la société, qu'international demeure indispensable. À l'échelle internationale, un à des organismes de organisme donateur peut apporter sa collaboration de différentes façons : soutien et autres en soutenant financièrement des études détaillées concernant les diffé- entités semblables de rences entre les sexes; en incorporant les résultats de ces analyses dans son la communauté dialogue avec les responsables politiques; enfin, en partageant les « bonnes internationale. pratiques » basées sur l'expérience internationale. À l'échelle locale, des groupes sociaux et des chercheurs locaux peuvent apporter des informa- tions de première importance basées sur l'ensemble des connaissances 29 Pages préliminaires 16/06/03 14:38 Page 30 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE locales, ce qui contribuera à enrichir le dialogue du gouvernement dans l'exposé de ses politiques. En encourageant une participation élargie ainsi qu'une transparence dans l'élaboration de politiques, on peut espérer retirer d'importants bénéfices, tant en faveur de l'égalité des sexes que du développement national. De plus, en invitant les femmes à ces délibérations publiques et à ces élaborations de politiques, on augmente du coup leur pouvoir et on accroît considérablement l'impact de ces politiques et de ces programmes. Le fait qu'une plus grande participation des femmes à la vie publique aille de pair avec une diminution de la corruption ne manque pas de soulever beaucoup d'intérêt. L'ensemble de ces considérations suggère qu'en élar- gissant l'échange des idées, en favorisant la transparence dans l'élabora- tion des politiques et en rendant possible une plus grande participation féminine dans le domaine public, on fortifie le gouvernement d'un pays et on renforce l'efficacité de ses politiques de développement. Peut-on renoncer à de tels bénéfices ? Note 1. L'indice des droits utilisé dans les tableaux 1, 8 et élaborés en suivant une même méthodologie dans les dif- 11 est une moyenne provenant de trois indices sur l'égalité férents pays où l'étendue des droits est évaluée (sur une des sexes en matière de droits. Ces renseignements ont été échelle de 1 à 4) par rapport à ceux des Nations Unies. recueillis dans plus de 100 pays par Humana (1992). Les Voir l'encadré 1.1, dans le premier chapitre, pour de plus indices des droits individuels sont concentrés sur l'égalité amples détails sur les indices les concernant. Voir l'annexe I des sexes en matière de droits politiques et légaux, de pour connaître les pays concernés dans les tableaux 1, 2, 3, droits sociaux et économiques, et de droits concernant le 4, 7, 9 et 11. Voir l'annexe II comme complément des mariage et les procédures de divorce. Ces indices ont été tableaux 3, 8, 9 et 11. 30 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 31 CHAPITRE I Les inégalités fondées sur le genre à l'aube du XXIe siècle L ES CONDITIONS DE VIE SE SONT GRANDEMENT AMÉLIORÉES depuis le début du XXe siècle. Même si l'analphabétisme, la faim, la maladie et la violence sévissent encore partout dans le monde, de nombreux progrès ont tout de même été réalisés: l'éducation s'est répandue, les progrès des sciences et de la médecine éliminent ou maîtrisent la maladie, et l'explosion des technologies de l'information contribue certainement à répandre les idées plus librement et à atténuer les oppressions. Un autre grand progrès a été celui de la libération des femmes, aussi bien dans la vie domestique que publique. C'est au XXe siècle que les femmes ont obtenu le droit de voter et d'occuper des postes de direction, même si ce ne fut parfois qu'en principe. Elles ont réussi à obtenir légalement une protec- tion spéciale comme travailleuses lorsqu'on a jugé ces lois bénéfiques. Leur accès aux services de santé et d'éducation s'est lui aussi amélioré. Sur les plans local et international, elles ont su s'organiser de façon efficace, de sorte que les droits des femmes se sont ajoutés à la liste des droits de l'homme. Elles ont aussi fait surgir d'importantes questions concernant la différenciation entre les sexes dans l'élaboration des politiques. Les récentes conférences internationales sur la femme ­ à Mexico en 1975, à Nairobi en 1985 et à Beijing en 1995 ­ laissent entrevoir ce qu'elles ont gagné en pouvoir. Au cours des trois dernières décennies, les questions féminines ­ et, plus récemment, celles qui concernent la différenciation homme-femme ­ ont gagné beaucoup d'importance auprès des différentes tribunes consacrées au développement. Il n'est plus seulement question du fardeau qui pèse sur les femmes des classes défavorisées dans les pays en voie de développement, mais aussi des programmes inachevés qui se penchent sur les relations entre les hommes et les femmes dans les pays plus développés. Un bon nombre de problèmes soulèvent de vives réactions et captivent l'intérêt du public, 31 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 32 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE comme la mutilation génitale des femmes et l'épidémie du sida en Afrique subsaharienne, l'exploitation sexuelle des femmes en Asie de l'Est, le trafic des femmes en Asie et en Europe de l'Est, les cas de décès pour «sauver l'honneur» ou pour mettre la main sur la dot en Asie du Sud, les décès dus à la pratique d'avortements non sécuritaires en Amérique latine et autres pays industrialisés. Beaucoup d'autres problèmes font moins les manchettes des journaux, mais ils affectent profondément un grand nombre de femmes partout dans le monde: · Nulle part dans le monde en voie de développement, les femmes ne jouissent des mêmes droits que les hommes. Dans de nombreux pays, les femmes n'ont pas encore le droit de posséder des terres, d'administrer une propriété, ni de diriger une entreprise. Dans plusieurs pays d'Afrique subsaharienne, par exemple, les femmes peuvent posséder des terres par l'intermédiaire de leur mari, mais elles perdent leurs titres de propriété si un divorce ou le décès de leur mari survient. Dans certains pays d'Asie du Sud et du Moyen-Orient, les femmes ne peuvent pas voyager sans le consentement de leur mari. · La discrimination fondée sur le genre a entraîné une hausse du taux de mortalité féminine dans certaines régions, privant le monde de 60 à 100 millions de femmes (Sen, 1989, 1992; Coale, 1991; Klasen, 1994). Ces chiffres laissent deviner les injustices dans la distribution d'aliments ou de soins de santé et les cas de violence et d'abus envers les femmes, sur- tout lorsqu'elles sont jeunes. En Chine, des avortements systématiques de foetus féminins et autres processus de sélection dans la planification des naissances ont occasionné une distorsion du taux de natalité des gar- çons par rapport à celui des filles, passant de 1,07 en 1980 à 1,14 en 1993. Au Punjab, en Inde, le taux de natalité pour les garçons atteint des sommets et se situe à 1,18. · Dans beaucoup de régions en voie de développement, les entreprises dirigées par des femmes sont moins bien financées que celles dirigées par des hommes, et cela, pour des raisons précises. En Afrique subsaharienne, par exemple, les fermières ont moins accès que les fermiers au matériel agricole, aux fertilisants et à l'information. À quelques exceptions près, les entreprises administrées par des femmes ­ fermes et autres ­ continuent de n'avoir qu'un accès limité au crédit et aux services financiers. · La scolarisation des femmes se rapproche maintenant de celles des hommes, mais un fossé énorme demeure en ce qui concerne la parité des salaires. En moyenne, les employées ne gagnent que les trois quarts de ce que gagnent les hommes, mais les différences femmes-hommes en matière d'éducation, d'expérience de travail ou d'exigences inhérentes aux emplois n'entrent que pour un cinquième dans l'explication de cet écart. De plus, 32 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 33 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E les femmes demeurent largement sous-représentées dans les domaines mieux rémunérés, comme les postes administratifs ou de direction. · Les femmes ne sont représentées de façon équitable à aucun niveau du gouvernement, ce qui limite leur influence au Parlement et dans l'éla- boration des politiques. Dans toutes les régions, sauf en Asie de l'Est, elles détiennent moins de 10% des sièges dans les chambres parlemen- taires. Dans les régions en voie de développement, les femmes ne détien- nent jamais plus de 8% des postes ministériels. Bien sûr, tous ces désavantages touchant les femmes sont beaucoup plus répandus que ceux touchant les hommes. Toutefois, tant les hommes que les femmes sont victimes des stéréotypes fondés sur le genre, ce qui a souvent un impact négatif sur leur bien-être. Par exemple, en Europe de l'Est, où l'on connaît une économie de transition, l'espérance de vie des femmes a devancé celle des hommes dans les années 1990. Cependant, cette augmentation n'est pas due à l'amélioration des conditions de vie des femmes, mais plutôt à l'augmentation du taux de mortalité chez les hommes. Cette augmentation est reliée à des facteurs biologiques et sociaux comme, entre autres, le degré élevé de stress lié au travail, la hausse constante du taux de chômage ainsi que la consommation de cigarettes et d'alcool. Ces phénomènes affectent non seulement la santé des hommes, mais aussi celle de leur famille et de la société entière. Même si on accorde maintenant une plus grande place aux questions relatives à la différence entre les sexes lors de conférences et de débats sur le développe- ment, la nécessité d'intégrer ce point de vue dans l'étude des politiques et des projets n'est pas encore largement admise, et les leçons à tirer pour le dévelop- pement n'ont pas encore été complètement intégrées par les responsables poli- tiques et les organismes donateurs. Ce rapport approfondit les liens existant entre la différenciation homme-femme, la politique publique et le développe- ment. Il le fait dans le but de démontrer l'importance de tenir compte de cette perspective particulière dans l'élaboration de politiques sur le développement. Notons que ceci est important pour les hommes et pour les femmes en tant qu'individus et membres de la société. À cette fin, ce rapport réunit des recherches basées sur l'expérience de plusieurs pays et a recours à différentes dis- ciplines telles le droit, les études économiques et les sciences sociales. Cette étude débute par un survol des inégalités fondées sur le genre dans les pays en voie de développement à l'aube du XXIe siècle. Elle étudie ensuite les conséquences probables pour les individus, les communautés et les socié- tés qui tolèrent les inégalités fondées sur le genre. Il ne fait pas de doute que le coût de ces inégalités est très élevé pour les individus et des preuves démontrant leur coût élevé pour les sociétés se multiplient : croissance réduite, capacité à se sortir de la pauvreté et capacité de gouverner affaiblies. 33 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 34 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Ces coûts importants que doivent supporter les personnes et le développe- ment fournissent d'excellentes raisons pour entreprendre des mesures éner- giques en vue de réduire les inégalités basées sur le genre et, ce faisant, de recueillir les bénéfices sociaux liés à l'égalité des sexes. Après avoir étudié comment ces inégalités nuisent au développement, on regarde ensuite de quelle façon les inégalités fondées sur le genre sont véhiculées, soit à travers les institutions, la famille et l'économie. On s'intéresse aussi aux politiques et aux programmes susceptibles de corri- ger ces inégalités. Enfin, on conclut ce rapport en proposant une straté- gie en trois volets afin de promouvoir l'égalité des sexes à l'intérieur du développement. Ce chapitre se concentre sur les inégalités fondées sur le genre dans les pays en voie de développement. Il apporte une définition de l'égalité des sexes et fait l'analyse des différents types d'inégalités dans les domaines des droits fondamentaux, de l'accès aux ressources ainsi que de la partici- pation et de l'influence sur le plan politique. Il s'attarde du même coup aux relations entre la pauvreté et les inégalités fondées sur le genre à l'in- térieur des pays. Un message clair ressort de ces analyses: même si des progrès considérables ont été réalisés, les femmes et les filles demeurent désavantagées par rapport aux hommes et aux garçons. Ces désavantages réduisent considérablement le bien-être des femmes et limitent leur participation au développement ainsi que les bénéfices qu'elles pourraient en tirer. Cet exposé met en lumière la diversité des inégalités fondées sur le genre d'une région à l'autre et au sein d'une même région. Il ne manque pas de faire remarquer la relation qui existe entre la pauvreté et les inégalités fondées sur le genre. D'ailleurs, ces inégalités ont tendance à être plus accentuées chez les pauvres que chez les classes favorisées de la société, particulièrement dans les domaines de l'édu- cation et de la santé. Définition de l'égalité des sexes L E MOT GENRE FAIT RÉFÉRENCE À DES MANIÈRES D'ÊTRE PARTICULIÈRES, à des comportements imposés par la société ainsi qu'à des attentes spécifiques associées à chaque sexe. Les hommes et les femmes sont différents sur le plan biologique. Les femmes peuvent donner naissance à des enfants et les nourrir au sein, ce que les hommes ne peuvent faire. Presque partout dans le monde, les hommes adultes sont physiquement plus forts que les femmes. En raison de leurs différences sur le plan biologique, les hommes et les femmes n'ont pas les mêmes préoccupations concernant leur santé et, par conséquent, ils requièrent parfois des soins médicaux différents. 34 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 35 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Chaque culture interprète à sa façon ces différences biologiques et élabore en conséquence un ensemble d'attentes sociales, lesquelles déterminent la conduite appropriée, les droits, les ressources à la disposition de chaque genre ainsi que le pouvoir propre à chacun. De même que la race, l'ethnie et la classe sociale, le genre est un concept social qui établit, dans une large mesure, les chances d'un individu dans la vie, en déterminant sa participation dans la société et l'économie. Certaines sociétés ne sont pas divisées sur le plan racial ni ethnique, mais toutes connaissent à divers degrés une certaine asymétrie des sexes, constituée de différences et d'inégalités. Les rôles et les comportements propres à chaque genre peuvent varier considérablement d'une société à l'autre, mais des simi- litudes étonnantes existent: par exemple, dans presque toutes les sociétés, la responsabilité et la garde des nourrissons et des jeunes enfants incombent aux femmes, tandis que le service militaire et la défense nationale reviennent aux hommes. Les rôles et les comportements propres à chaque genre évoluent au rythme des changements biologiques, technologiques, économiques et autres contraintes sociales. Des experts en sciences sociales soutiennent que les rôles dévolus à chaque genre sont souvent hérités de stratégies de survie où cette division des tâches s'était avérée pratique et efficace dans le passé. Suite aux progrès techniques et économiques récents de la société, ces asymétries fon- dées sur le genre s'avèrent inefficaces et limitatives, car les normes sociales qui les régissent évoluent moins rapidement que les facteurs qui les ont créées. En s'appuyant sur de nombreuses informations, ce rapport soutient que, lorsque les rôles propres à chaque genre sont devenus trop rigides et enta- chés d'inégalité, ils s'avèrent inefficaces, en plus d'être inéquitables, et entraînent des coûts considérables pour les sociétés et pour le développe- ment. Il démontre aussi que les normes sociales régissant les comporte- ments des deux sexes peuvent prendre beaucoup de temps à évoluer, mais qu'elles sont loin d'être immuables. En effet, elles peuvent changer très rapidement en réaction à un ensemble de conditions socio-économiques précises. Il faut aussi expliquer clairement ce qu'on entend par égalité. Ce mot est utilisé de plusieurs façons, par exemple dans des expressions comme: éga- lité devant la loi, égalité d'opportunités, égalité dans les résultats (Coleman, 1987). Dans ce rapport, lorsque nous parlons d'égalité des sexes, nous entendons: égalité devant la loi, égalité d'opportunités (impliquant l'égalité des salaires ainsi que de l'accès au capital humain et autres res- sources de production), et enfin, égalité en influence1. L'égalité des sexes ne comprend pas l'égalité des résultats pour deux raisons. Premièrement, les 35 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 36 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE cultures et les sociétés empruntent des voies différentes dans leur poursuite de l'égalité des sexes. Deuxièmement, cette égalité implique que les hommes et les femmes sont libres d'opter pour des rôles différents (ou semblables) et libres d'avoir des aspirations différentes (ou semblables) selon leurs priorités et leurs objectifs2. D'autres raisons nous incitent à ne pas interpréter l'égalité des sexes comme une égalité des résultats à atteindre. Par exemple, des recherches médicales ont révélé que les femmes jouissent d'un avantage biologique sur les hommes concernant l'espérance de vie. Or, les normes sociales, les comportements, les rôles et les traitements particuliers réservés à chaque genre peuvent réduire considérablement cet avantage propre aux femmes. Ainsi, dans un contexte où, visant des résultats égaux, l'on s'efforcerait d'atteindre une longévité égale pour les hommes et les femmes, cela signi- fierait un désavantage pour les femmes et non pas une égalité des sexes. De la même façon, les risques d'épidémie et les besoins en santé sont différents pour chaque genre. Par conséquent, une équivalence numérique pour les hommes et les femmes concernant des indicateurs particuliers de santé ne signifie pas nécessairement une égalité des sexes. Voilà pourquoi ce rapport se penche plutôt sur des indicateurs communé- ment liés à l'égalité des sexes. Par exemple, il est reconnu que des inégalités fondées sur le genre en matière d'éducation, d'accès aux ressources, de poli- tique d'emploi ou de salaires affectent les relations de pouvoir entre les hommes et les femmes et, par conséquent, leur capacité d'influencer les déci- sions au sein de leur famille. Ces inégalités causent aussi un déséquilibre concernant l'accès des hommes et des femmes à l'économie et autres oppor- tunités. Les inégalités quant à la représentation politique, sur les plans tant local que national, révèlent jusqu'à quel point les hommes et les femmes exercent ou non de l'influence dans l'élaboration des politiques ainsi que dans leur formulation. Les écrits portant sur la question du genre et du développement réfèrent parfois au statut absolu des femmes («Le taux d'inscription scolaire des filles a-t-il augmenté?»), et d'autres fois à leur statut relatif («L'égalité des sexes à l'école s'est-elle améliorée au niveau de l'inscription?»). Ce rapport s'inté- resse aux deux statuts. Il est important de tenir compte du statut absolu car des améliorations générales pour les deux sexes s'avèrent fondamentales afin d'assurer que le développement leur apporte un bien-être accru. Par exemple, il est nettement plus souhaitable qu'une amélioration dans l'égalité en édu- cation provienne d'une augmentation générale du taux de scolarisation à la fois des garçons et des filles, et non pas d'un abandon de l'école de la part des garçons. 36 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 37 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Mais s'intéresser seulement au statut absolu de chaque genre ne suffit pas. Qu'il s'agisse de droits ou de maîtrise des ressources, le statut social s'avère un facteur déterminant du pouvoir des hommes et des femmes. Ce pouvoir leur permet ensuite de participer au développement et d'en tirer profit. Nous verrons au chapitre II que le problème du statut de la femme, tant absolu que relatif, affecte le développement au point d'intéresser les responsables politiques. L'inégalité des droits, des ressources et de l'influence dans les différentes régions M ALGRÉ DES PROGRÈS RÉCENTS, LES INÉGALITÉS FONDÉES sur le genre continuent à exister dans plusieurs dimensions de la vie, infiltrant de plus en plus les foyers, les institutions sociales ainsi que l'économie. Nous nous attardons ici aux manifestations les plus frappantes de l'exclusion et de la discrimination fondées sur le genre: les disparités en matière de droits fondamentaux, d'accès et de maîtrise des ressources, d'emploi, de salaire et d'influence politique. L'analyse porte en grande partie sur des don- nées provenant de tous les pays et sur l'étude des plus récents courants d'inéga- lités fondées sur le genre dans la plupart des pays en voie de développement. Les droits et les inégalités Les inégalités entre les hommes et les femmes sont souvent l'histoire de disproportions ou d'asymétries entre les droits et les privilèges respectifs. Cette absence d'harmonie au niveau des droits est très répandue: dans les statuts légaux, dans les lois coutumières, dans les pratiques des communau- tés ainsi que dans les familles. Ces asymétries affectent plusieurs droits: celui de se marier, de divorcer, de planifier sa famille, d'hériter, d'administrer une propriété, d'offrir ses services à des entreprises familiales, d'entreprendre des activités rémunérées à l'extérieur du foyer, de voyager de façon autonome, etc. À cause de ces disparités, les femmes font des choix restreints dans plu- sieurs aspects de leur vie, ce qui limite souvent leurs opportunités écono- miques et sociales. Au Botswana, au Chili, au Lesotho, en Namibie et au Swaziland, les femmes sont sous la tutelle de leur mari de façon permanente et ne possèdent pas le droit d'administrer une propriété (PNUD, 1995). Dans certains pays africains, les femmes mariées n'ont pas le droit de posséder des terres, mais peuvent en obtenir légalement l'usufruit grâce au mariage (Gray et Kevane, 1996). Dans certains pays d'Afrique subsaharienne, les hommes ont le droit de réclamer le salaire de leur femme, mais les femmes ne jouissent pas de ce droit envers leur 37 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 38 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE mari (Dey Abbas, 1997). En Bolivie, au Guatemala et en Syrie, les hommes peuvent empêcher leur femme d'avoir un emploi à l'extérieur du foyer. En Égypte et en Jordanie, les femmes ne peuvent pas voyager sans l'autorisation de leur mari. Dans certains pays arabes, les femmes ont besoin du consente- ment de leur mari pour demander un passeport, tandis que le contraire n'est pas vrai, bien entendu (PNUD, 1995). En se basant sur des documents des Nations Unies portant sur les droits de l'homme, Humana (1986, 1992) a recueilli les données des droits poli- tiques, ethniques et des droits fondés sur le genre pour plus de 100 pays en 1985 et en 1990 (encadré 1.1). Ces données sont classifiées sous des indices de droits de l'homme, lesquels sont accompagnés d'une échelle d'éva- luation de 1 (violation systématique des droits) à 4 (irrespect des droits et libertés)3. Parmi les 40 indices, plusieurs portent sur l'égalité des droits entre les sexes ­ incluant l'égalité sur les plans politique, légal, social et écono- mique ­ et sur l'égalité en matière de procédures de mariage et de divorce4. Des données comparatives entre les pays le démontrent clairement: les femmes ne jouissent de droits égaux à ceux des hommes dans aucun des domaines mentionnés ci-dessus, et cela est vrai pour toutes les régions en voie de développement (tableau 1.1)5. Mais il y a des différences notoires au niveau du statut relatif des droits des femmes dans ces régions. Si l'on établit une moyenne, les femmes d'Europe et d'Asie centrale jouissent d'une plus grande égalité de droits (quoique très relative), tandis que les femmes d'Asie du Sud, d'Afrique subsaharienne, du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord connaissent des conditions beaucoup moins enviables. Évaluation des droits politiques et légaux. En ce qui concerne les droits politiques et légaux, toutes les régions en voie de développement, sans excep- tion, obtiennent une note de 2 (violation fréquente des droits) et de 3 (brèches occasionnelles dans le respect des droits) selon l'échelle établie par Humana. Ainsi, même là où l'égalité des sexes est reconnue sur les plans légal et politique dans les lois et les constitutions d'un pays, les femmes n'en jouis- sent pas pleinement en pratique. Entre 1985 et 1990, l'égalité en matière de droits légaux et politiques a connu une légère amélioration dans la plupart des régions, sauf en Europe et en Asie centrale, où elle a décliné, et en Asie du Sud, où les choses semblent demeurer stationnaires6. Droits sociaux et économiques. Sauf en Europe ainsi que dans les régions d'Asie centrale, d'Asie de l'Est et du Pacifique, les droits sociaux et écono- miques des femmes s'avèrent inférieurs à ceux des hommes. La situation est un peu plus équitable en ce qui concerne les droits politiques et légaux. La ten- dance se remarque davantage en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne. De plus, on enregistre une légère amélioration de ces droits entre 1985 et 1990. 38 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 39 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Encadré 1.1 Évaluation de l'égalité des sexes en indicateurs du questionnaire. La note 0 correspond à matière de droits une violation constante et systématique des droits, des libertés et des garanties dont il est question dans l'indi- LE GUIDE MONDIAL DES DROITS DE L'HOMME (HUMANA cateur évalué. La note 3 signifie que ces droits, libertés 1986, 1992) présente des données sur l'application des et garanties ne sont pas toujours respectés. droits de l'homme dans environ 100 pays ayant plus d'un Ce rapport se penche sur trois des indicateurs sus- million d'habitants. Bien qu'on ne puisse pas vraiment qua- ceptibles de mesurer ­ ou mieux, d'évaluer ­ l'égalité lifier quantitativement la teneur ou la consistance des droits des sexes en matière de droits : de l'homme, l'édition de 1986 du guide a servi de base à un · égalité politique et légale pour les femmes (ques- indice des libertés humaines et à une classification des pays tion 21), selon l'application des droits de l'homme, parue dans le · égalité sociale et économique pour les femmes Rapport 1991 sur le développement du Programme des (question 22), Nations Unies pour le développement (PNUD). · égalité des sexes dans les procédures de mariage et Les informations concernant les droits figurant dans de divorce (question 37). le guide sont obtenues à partir d'un questionnaire de Dans ce rapport, nous utilisons une échelle d'évalua- 40 questions (ou indicateurs) tirées de trois instruments tion de 1 à 4, qui correspond à l'échelle de 0 à 3 utili- juridiques des Nations Unies : la Déclaration univer- sée par Humana. selle des droits de l'homme, la Convention internatio- D'autres sources apportent un complément d'infor- nale des droits économiques, sociaux et culturels et la mation sur les droits de l'homme. Parmi elles figure Convention internationale sur les droits civils et poli- l'évaluation des pays par la Maison de la liberté et tiques. L'évaluation d'un pays, basée sur ces 40 indica- l'Indicateur des droits économiques et sociaux des teurs, se réalise en deux volets. femmes (WESHR) du programme d'études global de Le premier consiste à puiser des informations au sujet l'université Purdue. Chaque année, la Maison de la des droits de l'homme auprès des Nations Unies et liberté réunit les résultats d'évaluation concernant à la autres institutions internationales, d'organismes gouver- fois les droits politiques et les libertés civiles pour bon nementaux et non gouvernementaux (tels Amnistie nombre de pays, mais elle ne fournit pas d'information internationale, Human Rights Watch), d'institutions de sur l'égalité des sexes. L'Indicateur WESHR, au recherche, de journaux, de bulletins ainsi que d'observa- contraire, s'attarde presque uniquement aux droits des teurs et chercheurs de différents pays. Le deuxième volet femmes. Afin d'établir des comparaisons entre le plus consiste en l'attribution d'une note, sur une échelle de 0 grand nombre de pays possible, ce rapport utilise le à 3, en fonction des données apportées par chacun des Guide mondial des droits de l'homme. Droits en matière de procédures de mariage et de divorce. C'est en matière de procédures de mariage et de divorce que les inégalités varient le plus d'une région à l'autre. Une fois de plus, les femmes d'Europe et d'Asie centrale sont celles qui connaissent le degré d'égalité le plus élevé ­ quoique relatif ­ tandis que celles d'Asie du Sud, d'Afrique subsaharienne, du Moyen- Orient et d'Afrique du Nord connaissent une situation moins enviable. En ce qui concerne l'égalité dans les procédures de mariage pour les femmes, une certaine amélioration a été enregistrée en Asie du Sud, en Afrique sub- saharienne, en Amérique latine, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord entre 1985 et 1990. Mais pour les femmes d'Europe et d'Asie centrale, on a plutôt accusé une légère détérioration à ce sujet. 39 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 40 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 1.1 Les droits des femmes ne sont pas égaux à ceux des hommes Droits politiques et légaux, 1985 et 1990 4 sexes 3 des d'égalité 2 Indice 1 Asie de l'Est Europe et Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique OCDE et région du Asie centrale latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles Nord 1985 1990 Droits sociaux et économiques, 1985 et 1990 4 sexes 3 des d'égalité 2 Indice 1 Asie de l'Est Europe et Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique OCDE et région du Asie centrale latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles Nord 1985 1990 (suite du tableau en page suivante) 40 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 41 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Tableau 1.1 (suite) Droits en matière de mariage et de divorce, 1985 et 1990 4 sexes 3 des d'égalité 2 Indice 1 Asie de l'Est Europe et Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique OCDE et région du Asie centrale latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles Nord 1985 1990 Note: Voir l'encadré 1.1 pour les indices d'égalité en matière de droits et l'annexe I pour connaître les pays concernés et une remarque d'ordre général. Source : Humana (1992); Banque mondiale (1999c). Des données définitives concernant les droits n'ont pas été compilées depuis 1990, mais grâce à des informations mises à notre disposition, en particulier par la quatrième Conférence mondiale des femmes tenue à Beijing en 1995, nous supposons que les droits des femmes se sont amé- liorés. À l'occasion de cette conférence, l'amélioration des droits des femmes s'est imposée comme l'objectif premier à poursuivre dans la lutte internationale pour l'égalité des sexes. Depuis la conférence de Beijing, des progrès ont été observés concernant les droits légaux des femmes, sur les plans tant national qu'international (ONU, 2000). Par exemple, 16 États supplémentaires ont, depuis, ratifié la convention des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW), ce qui porte le nombre des pays signataires à 1657. Quelques pays ont même intégré la clause de l'égalité des sexes dans leur constitu- tion. D'autres ont apporté des amendements à leur code criminel de façon à sévir contre la violence conjugale. Quelques pays ont révisé leur code du travail afin d'établir le principe d'un traitement égal ­ et d'opportunités égales ­ pour les femmes et pour les hommes en matière de travail et d'emploi. Selon l'Union interparle- 41 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 42 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE mentaire8, il reste maintenant deux pays qui ne reconnaissent pas aux femmes le droit de voter ou de se présenter à des élections. De plus, dans toutes les régions, des pays ont adopté des politiques en faveur de l'égalité dans les postes de direction en incluant des quotas dans les corps gouver- nementaux, au Parlement et à l'intérieur des partis politiques. Comme on le verra au chapitre III, les changements législatifs ne garantissent pas nécessairement leur application dans la pratique, mais ils constituent tout de même les fondations qui permettront un jour la réalisation concrète de cette égalité des sexes en matière de droits. En résumé, tandis qu'une tendance générale vers une plus grande éga- lité des sexes se dessine dans toutes les régions depuis 1985, les femmes continuent à être désavantagées par rapport aux hommes au sujet de leurs droits fondamentaux ainsi que de leur statut, en théorie et en pratique. Ces disparités en matière de droits restreignent les choix des femmes dans plusieurs dimensions de leur vie et réduisent parfois considérablement leur participation au développement et leur qualité de vie. Les ressources et les inégalités Comme dans le cas de leurs droits, c'est de façon systématique que les femmes et les filles se voient plus limitées que les hommes et les garçons dans l'accès à toute une gamme de ressources. Cette restriction les empêche de participer au développement et limite leurs opportunités dans la vie ainsi que les bénéfices qu'elles pourraient en tirer. Les femmes ont ainsi un accès limité aux ressources humaines, au capital social et financier, aux emplois et aux salaires. De telles disparités les empêchent de participer pleinement au déve- loppement et d'obtenir de meilleures conditions de vie pour leur famille. Elles se traduisent aussi par des risques accrus et une plus grande vulnérabi- lité dans les moments de crises personnelles et familiales, lors de la vieillesse et en temps de crise économique. L'éducation. L'éducation constitue un atout primordial car elle permet à une personne de saisir les occasions que le développement lui présente. Mais d'importantes disparités dans ce domaine persistent dans certaines régions (tableau 1.2). Des inégalités existent dans le taux d'inscription scolaire, et ce taux reflète la moyenne d'années de scolarité et la scolarisa- tion d'une population donnée. Le taux d'inscription des jeunes filles aux niveaux primaire et secon- daire ainsi que leur moyenne d'années de scolarité ont connu une courbe ascendante avec le temps. Dans certaines régions, les inscriptions au pri- maire ont connu une baisse après avoir atteint des niveaux élevés. En même temps, en Asie de l'Est et dans la région du Pacifique, en Amérique latine et dans les Antilles, en Europe et en Asie centrale, le 42 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 43 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Tableau 1.2 Malgré quelques améliorations, des inégalités fondées sur le genre perdurent dans certaines régions en ce qui a trait à l'éducation Inscription au niveau primaire (filles) Inscription générale au niveau primaire 120 1,1 100 0,9 80 filles-garçons Pourcentage 60 0,7 Rapport 40 20 0,5 1970 1980 1990 1995 1970 1980 1990 1995 Inscription au niveau secondaire (filles) Inscription générale au niveau secondaire 120 1,2 1,0 80 0,8 filles-garçons Pourcentage 40 Rapport 0,6 0 0,4 1970 1980 1990 1995 1970 1980 1990 1995 Asie de l'Est et région du Pacifique Asie du Sud Europe et Asie centrale Afrique subsaharienne Amérique latine et les Antilles OCDE Moyen-Orient et Afrique du Nord (suite du tableau en page suivante) 43 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 44 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 1.2 (suite) Scolarité des filles Nombre moyen d'années de scolarité 10 1,0 8 0,8 6 0,6 filles-garçons Années 4 Rapport 0,4 2 0 0,2 1970 1980 1990 1970 1980 1990 Asie de l'Est et région du Pacifique Asie du Sud Europe et Asie centrale Afrique subsaharienne Amérique latine et les Antilles OCDE Moyen-Orient et Afrique du Nord Note : Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et une remarque d'ordre général, et le lexique pour la définition des termes utilisés. Source : Barro et Lee (1994); Banque mondiale (1999d). taux d'inscription au niveau primaire pour les filles a atteint ou même surpassé 100%9. Le taux d'inscription des filles au primaire a aussi connu une augmentation en Afrique subsaharienne, mais à des degrés beaucoup moins élevés. Dans cette région, on a enregistré de fortes augmentions du taux d'inscription des filles au primaire entre 1970 et 1980, mais ces taux se sont depuis stabilisés à 54%. En Afrique subsaharienne, le taux d'ins- cription scolaire et la moyenne des années de scolarité pour les filles se maintiennent plus bas que dans toute autre région en voie de développe- ment. Le taux d'inscription des jeunes filles au niveau secondaire n'était que de 14% en 1995, et la moyenne d'années de scolarité atteignait à peine 2,2 ans en 1990. Que signifient ces données par rapport à celles qui correspondent aux garçons? Depuis 1970, on note une plus grande égalité entre les garçons et les filles concernant l'inscription scolaire et la moyenne d'années de scola- rité, cette dernière donnée s'étant améliorée plus rapidement chez les filles que chez les garçons. Mais les disparités entre les deux sexes ainsi que le temps nécessaire pour combler l'écart entre eux varie beaucoup d'une 44 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 45 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E région à l'autre. De même que pour les droits, c'est en Asie de l'Est, en Amérique latine, en Europe et en Asie centrale que le plus haut degré d'égalité concernant l'éducation a été enregistré. En Europe, en Asie cen- trale et en Amérique latine, le taux d'inscription des filles au niveau secon- daire dépasse maintenant celui des garçons. Dans l'ensemble, les femmes atteignent maintenant une moyenne d'années de scolarité équivalente à 90% à celle des garçons. L'Asie du Sud, l'Afrique subsaharienne, le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, qui enregistraient les plus bas niveaux d'égalité des sexes, ont connu une hausse considérable d'égalité en ce qui concerne les inscriptions au pri- maire et au secondaire de 1970 à 1995. Cependant, l'Asie du Sud continue d'accuser le degré d'égalité le plus bas concernant l'éducation. Dans cette région, la moyenne d'années de scolarité des femmes atteint à peine la moi- tié de celle des hommes, et leur taux de scolarisation équivaut à peine aux deux tiers de celui des garçons. De plus, l'Asie du Sud accuse les plus grandes inégalités fondées sur le genre en éducation comparativement à toutes les autres régions en voie de développement, où les niveaux absolus de scolari- sation des filles sont pourtant plus bas (Filmer, King et Pritchett, 1998). Entre 1980 et 1990, l'égalité des sexes en Afrique subsaharienne a connu une amélioration en ce qui concerne le taux d'inscription scolaire, bien que cette amélioration soit due à un taux d'abandon scolaire plus élevé chez les garçons plutôt qu'à une réelle augmentation du nombre d'inscriptions du côté des filles. De plus, entre 1970 et 1990, contrairement à l'Asie du Sud, au Moyen- Orient et à l'Afrique du Nord, l'Afrique subsaharienne ne s'est pas efforcée de combler l'écart entre les sexes quant à la moyenne des années de scolarité. Ainsi, même si une tendance vers l'égalité des sexes en matière d'éducation se dessine clairement depuis 1970, les gains sont inexistants ou tardent à se manifester dans les pays les plus pauvres. Combler l'écart entre les sexes au niveau de la scolarisation ­ et le faire rapidement ­ constitue encore un important défi de développement pour les responsables politiques, spéciale- ment en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne et dans quelques pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord. Ce défi revêt une importance capitale à l'ère de l'information électronique, où les modes de production tradition- nels se voient bouleversés par les nouvelles technologies. L'éducation consti- tue la pierre angulaire grâce à laquelle la culture et le développement de com- pétences sont possibles. Les activités économiques exigent désormais énormément de connaissances. Dans ce contexte, les personnes n'ayant pas accès à l'éducation seront pratiquement exclues des opportunités d'affaires et d'emplois. De plus, là où les fossés entre les sexes persistent en matière d'édu- cation, les femmes risquent de continuer à prendre du retard sur les hommes dans leur participation au développement. 45 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 46 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE La santé. Le bien-être d'une personne dépend en grande partie de sa bonne santé. Tout comme l'éducation, la santé est une ressource qui permet aux personnes de participer au développement et d'en récolter les fruits. Afin de mesurer l'incidence que peuvent avoir les différences fondées sur le genre sur des aspects de la santé, nous nous intéressons à deux aspects qui peuvent servir de points de comparaison entre de nom- breux pays : l'espérance de vie et le fardeau de la maladie. L'étude du premier aspect nous amènera à traiter des taux de mortalité chez les adultes et les enfants. L'analyse de chacun des deux aspects nous conduira à traiter, au-delà des aspects biologiques, des aspects sociolo- giques de ces problèmes. Cette partie de l'étude nous amènera aussi à réfléchir sur les problèmes particuliers de la violence conjugale et du sida. Bien que nous disposons de peu de données sur ces sujets, chacun s'avère particulièrement sensible à l'impact des différences entre les sexes sur la santé. L'espérance de vie et la mortalité. Dans les régions en voie de développe- ment, l'espérance de vie à la naissance a augmenté de façon saisissante au cours des dernières décennies, autant pour les hommes que pour les femmes. Un régime alimentaire plus sain, la consommation d'eau potable ainsi qu'une plus grande maîtrise des maladies contagieuses ont contribué à améliorer la santé des gens en général et à augmenter la longévité presque partout dans le monde. Depuis 1970, l'espérance de vie a aug- menté d'au moins quinze ans au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Asie du Sud. Ces améliorations se sont produites simultanément dans toutes les régions, sauf en Afrique subsaharienne, où les changements ont été plus lents. Les femmes vivent généralement plus longtemps que les hommes en raison des différences biologiques liées au genre. Des recherches médi- cales ont démontré que, dans toutes les sociétés, ce sont surtout les foetus mâles qui avortent dans le ventre de leur mère ou qui meurent à la nais- sance. Et, dans presque toutes les sociétés, les nourrissons mâles accusent un taux de mortalité plus élevé que les nourrissons de sexe féminin dans les six premiers mois de vie (Waldron, 1986). Ce scénario biologique dépendrait de la structure chromosomique particulière des garçons et du développement plus lent de leurs poumons dû aux effets de la testosté- rone. Plus tard dans la vie, les femmes jouissent d'un autre avantage bio- logique sur les hommes: au moins jusqu'à la ménopause, leurs hormones les protègent contre certaines maladies du coeur. Fortes de ces avantages biologiques, les femmes peuvent espérer vivre un peu plus longtemps que les hommes, à moins d'être victimes de privations et de discriminations. 46 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 47 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E En conséquence, on suppose que toute une série de facteurs sociaux jouent en défaveur des femmes là où les deux sexes ont la même espérance de vie, et là où celle des hommes est supérieure à celle des femmes. Des grossesses trop fréquentes et compliquées ainsi que des soins prénataux inadéquats sont des facteurs de nature à diminuer l'espérance de vie des femmes, sans comp- ter des inégalités qui favorisent les hommes en matière d'alimentation et de soins de santé. Par contre, des facteurs sociaux et environnementaux qui accentuent les rôles masculins peuvent entraîner un renforcement de l'avan- tage biologique des femmes concernant l'espérance de vie. Par exemple, des décès prématurés chez les hommes causés par des maladies de coeur ne s'ex- pliquent pas uniquement par leur plus grande vulnérabilité sur le plan bio- logique, mais sont souvent dus au stress exagéré lié au travail, au taux plus élevé de tabagisme ainsi qu'à une plus grande exposition à des éléments can- cérigènes sur le lieu de travail (OMS, 1998). En 1990, l'espérance de vie des femmes dépassait celle des hommes dans toutes les régions en voie de développement (tableau 1.3). De 1970 à 1997, c'est en Asie du Sud qu'on a enregistré les augmentations les plus spectacu- laires relatives à l'espérance de vie des femmes ­ d'autant plus étonnantes que cette région accusait auparavant énormément de retard dans ce domaine. Malgré ces améliorations, l'Asie du Sud enregistre le taux d'espérance de vie des femmes le plus bas par rapport à celui des hommes. D'autres régions ont connu de faibles augmentations ou des variations négligeables entre 1970 et 1997. Mais en Afrique subsaharienne, ce taux a connu une baisse: même si l'espérance de vie des femmes a connu une hausse, celle des hommes a aug- menté davantage. En Europe et en Asie centrale, le taux d'espérance de vie des femmes par rapport à celui des hommes a varié à raison de petites aug- mentations dues non pas à une réelle augmentation de l'espérance de vie des femmes, mais plutôt à une baisse de celle des hommes. À cause des avantages biologiques dont jouissent les femmes à leur nais- sance, il est normal que le taux de mortalité des hommes soit généralement plus élevé que celui des femmes. Pour cette raison, le pourcentage des nais- sances masculines (ou le taux de masculinité) constitue un premier indica- teur de discrimination fondée sur le genre dans un pays. Des études récentes ont tenté d'évaluer le nombre de femmes et de filles qui sont «manquantes» sur la planète à cause d'une mortalité féminine excessive en Asie (notamment en Chine, en Corée et en Inde) et, à moindre échelle, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. La planète compterait de 60 à 100 millions de femmes supplémentaires si ce n'était de la discrimination fondée sur le genre (Sen, 1989, 1992; Coale, 1991; Klasen, 1994). Ces chiffres ont été établis en comparant les taux de masculinité actuels avec ceux que l'on atteindrait sans cette discrimination. 47 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 48 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 1.3 Partout au monde, les femmes vivent maintenant plus longtemps que les hommes Espérance de vie des femmes Espérance de vie 85 1,15 75 1,10 65 1,05 Années femmes-hommes 55 Rapport 1,00 45 0,95 1970 1980 1990 1997 1970 1980 1990 1997 Asie de l'Est et région du Pacifique Asie du Sud Europe et Asie centrale Afrique subsaharienne Amérique latine et les Antilles OCDE Moyen-Orient et Afrique du Nord Note : Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et une remarque d'ordre général, et le lexique pour la définition des termes utilisés. Source : Banque mondiale (1999c). La plupart des inégalités se font sentir dès le jeune âge. En Inde, les diffé- rences dans l'alimentation des garçons et des filles expliquent pour une bonne part le degré plus élevé de mortalité infantile féminine: on ne nour- rit pas moins les filles, mais on leur donne une nourriture de moins bonne qualité (Das Gupta, 1987). L'accès limité aux soins de santé, en particulier pour les filles les plus jeunes de familles nombreuses et celles de milieux ruraux, est un autre facteur expliquant le grand nombre de femmes «man- quantes» (Quibiria, 1995; Das Gupta, 1987). On peut remédier à la discrimination contre les femmes non seulement au moyen de facteurs culturels, institutionnels ou économiques, mais surtout par des politiques publiques adéquates. Dans des pays en voie de développement tels que le Sri Lanka, le taux de masculinité a chuté considérablement au cours des trois dernières décennies grâce à l'amélioration des services publics en matière de santé, d'éducation et d'alimentation. Dans ce cas, les politiques ont contribué à réduire la discrimination envers les filles par leur propre famille (Bardhan et Klasen, 1998). Mais en Chine, le taux de masculinité connaît une courbe ascendante depuis 1960 ­ passant de 1,07 en 1980 à 1,14 en 1993 ­ à cause de la détérioration des services de santé et de la politique de l'enfant 48 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 49 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E unique (Li et Zhang, 1998). Cette mesure a incité les parents qui préféraient avoir un garçon à abandonner leur(s) fillette(s), à faire avorter les foetus fémi- nins et à négliger leurs adolescentes (Banister et Coale, 1994). Sur la planète entière, tout spécialement en Chine, le nombre de femmes «manquantes» va encore augmenter si ces tendances en mortalité féminine excessive continuent (Banque mondiale, 1993; Bardhan et Klasen, 1998). Le fardeau des maladies. De même que les différences concernant les taux de mortalité et l'espérance de vie, les causes de maladies et de décès peuvent aussi être influencées par le genre des personnes en question. Une étude réalisée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur l'ACVI, ou «les années de vie corrigées du facteur invalidité» pour un individu, établit une comparaison entre l'ACVI des hommes et des femmes et en recherche les causes (Murray et Lopez, 1996). Précisons que l'ACVI sert aussi bien à calculer les années per- dues en raison d'une mort prématurée que d'une incapacité physique ou men- tale10. Tandis que les dix principales causes de l'ACVI sont semblables pour les enfants de moins de cinq ans, des différences notables surgissent lorsqu'on compare les hommes et les femmes âgés de 15 à 44 ans (grille 1.1). L'usage de l'alcool, les accidents de la route et la violence expliquent 27% de l'ACVI des hommes dans le monde développé et 16% dans le monde en voie de dévelop- pement. Aucune de ces trois causes ne figure parmi les dix premières causes de l'ACVI des femmes dans les pays en voie de développement, alors que les acci- dents de la route et l'usage de l'alcool sont responsables de 8% de l'ACVI des femmes dans les pays développés. Les femmes perdent plus d'ACVI que les hommes à cause de maladies sexuellement transmissibles (plus spécifiquement la chlamydia), autant dans les pays développés que dans ceux qui sont en voie de développement. Les infections lors d'une grossesse ou d'un avortement figurent parmi les dix pre- mières causes de l'ACVI des femmes dans les pays en voie de développement, mais ce n'est pas le cas pour les femmes des pays développés, qui jouissent de soins de maternité plus adéquats et accessibles. En effet, on constate une énorme différence entre les pays développés et ceux en voie de développe- ment en ce qui concerne le taux de mortalité à la naissance. Alors que la moyenne du taux de mortalité est de 8 décès pour 100 000 naissances dans les pays occidentaux et de 49 en Europe de l'Est et en Asie centrale, ces moyennes atteignent des chiffres aussi élevés que 410 en Asie du Sud et 571 en Afrique subsaharienne (UNICEF, 1999a). Les différences quant au fardeau de la maladie pour les hommes et les femmes sont bien réelles et se traduisent par des différences au niveau de l'espérance de vie et de la qualité de vie. Mais jusqu'à récemment, on ne tenait pas compte de ces différences dans les graphiques mesurant l'espérance de vie. Comme il n'existe pas une méthode reconnue pour mesurer avec 49 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 50 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Grille 1.1 Les dix principales causes de l'ACVI pour les femmes et les hommes de 15 à 44 ans, 1990 FEMMES HOMMES Maladie ou déficience % du total Maladie ou déficience % du total Régions en voie de développement Régions en voie de développement Dépression 12,8 Dépression 7,0 Tuberculose 4,9 Accidents de la route 6,3 Anémie 4,0 Tuberculose 6,0 Automutilations 3,7 Violence 5,5 Accouchement difficile 3,4 Problèmes reliés à l'alcool 4,7 Chlamydia 3,0 Guerre 4,1 Trouble bipolaire 3,0 Trouble bipolaire 3,1 Infection lors d'une grossese 2,9 Automutilations 3,0 Guerre 2,8 Schizophrénie 2,8 Avortement 2,7 Anémie 2,7 Régions développées Régions développées Dépression 19,8 Problèmes reliés à l'alcool 12,7 Schizophrénie 5,9 Accidents de la route 11,3 Accidents de la route 4,6 Dépression 7,2 Trouble bipolaire 4,5 Automutilations 5,6 Trouble d'ordre obsessif ou compulsif 3,8 Schizophrénie 4,3 Problèmes reliés à l'alcool 3,2 Problèmes reliés à la drogue 3,8 Ostéoarthrite 3,2 Violence 3,2 Chlamydia 2,4 Maladies de coeur 3,1 Automutilations 2,3 Trouble bipolaire 3,1 Arthrite rhumatoïde 2,2 VIH 2,5 Note : L'ACVI est calculée en combinant les pertes estimées en raison d'une mort prématurée (calculées en fonction de la différence entre l'âge à laquelle une personne décède et son espérance de vie dans une population ayant un faible taux de mortalité), et l'atteinte à une vie saine résultant d'une déficience. Source : Murray et Lopez (1996). exactitude la santé d'une population, une nouvelle étude de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a mis au point une façon de calculer l'espérance de vie en tenant compte de la maladie et de l'incapacité (OMS, 2000)11. Cette méthode de calcul nous indique que les femmes ont tendance à perdre un plus grand nombre d'années de vie de qualité que les hommes en raison d'une invalidité. Ainsi, lorsqu'on tient compte des différences fondées sur le genre dans l'impact produit par une maladie ou une déficience, l'avantage des femmes concernant l'espérance de vie tend à s'amenuiser par rapport aux données qui existent à ce sujet. 50 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 51 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E La violence. Les sources conventionnelles d'information parviennent diffici- lement à donner une idée juste des risques particuliers aux femmes en ce qui concerne la santé. Par exemple, les femmes peuvent être victimes de mauvais traitements et de violence domestique uniquement à cause de leur genre. Les résultats de plus de 50 sondages réalisés un peu partout dans le monde indi- quent qu'entre 16 et 50% des femmes ont été victimes de violence physique à un moment ou l'autre de leur vie. De plus, ce ne sont pas des personnes étran- gères, mais bien les maris et les autres membres masculins de la famille qui sont responsables du plus grand nombre de gestes violents liés au genre (Heise, Elsberg et Gottemoeller, 1999). Ce genre d'agression de la part de partenaires intimes est conforme aux normes sociales, qui encouragent les hommes à exer- cer un certain contrôle sur la conduite de leur femme et qui tolèrent la violence comme un moyen pour eux de démontrer leur pouvoir et de résoudre les conflits. La violence conjugale est souvent accompagnée de pauvreté, de chô- mage ainsi que d'un contrôle patriarcal exercé sur les ressources financières du foyer et sur les décisions domestiques. La violence liée au genre affecte directement la santé physique et émo- tionnelle des femmes ainsi que leur bien-être, et comporte d'autres effets indirects. Par exemple, des femmes qui ont été victimes de violence physique et sexuelle font face à des risques plus grands de désordres gynécologiques, de grossesses non désirées, d'avortements non sécuritaires, de maladies sexuellement transmissibles et de toute une gamme de difficultés lors de l'ac- couchement, comme les fausses couches, les accouchements avant terme et les inflammations pelviennes (Heise, Ellsberg et Gottemoeller, 1999). Le sida. Même s'il ne figure pas dans la grille 1.1, le sida est devenu l'un des problèmes les plus critiques dans les pays en voie de développement. Le programme mis sur pied par les Nations Unies en vue de combattre le sida estimait, à la fin de 1999, que plus de 33 millions de personnes sur terre étaient infectées par le VIH et que, jusqu'alors, plus de 16 millions de vic- times étaient décédées (UNAIDS, 1999). Plus de 95% des adultes atteints par le VIH vivent dans des pays en voie de développement ou en transition. Les pays d'Afrique subsaharienne possèdent les taux les plus élevés d'infec- tion, tandis que ceux d'Asie et d'Europe de l'Est accusent les taux de crois- sance d'infection les plus élevés. Malgré les progrès médicaux réalisés récemment dans le traitement du sida, les personnes ayant le VIH dans les pays en voie de développement contractent presque toujours le sida entre 2 et 20 ans après avoir été infec- tées et meurent des maladies qui s'ensuivent en moins d'un an. En 1990, environ 9% des décès de personnes adultes par maladies infectieuses étaient dus au sida dans les pays en voie de développement. Si la tendance se main- tient, en 2020, le virus en question sera directement ou indirectement res- 51 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 52 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ponsable de plus de la moitié de ce type de décès (Banque mondiale, 1999a). Dans certains pays, l'espérance de vie a déjà été réduite de plus de 10 ans à cause du sida, annulant ainsi des gains substantiels obtenus depuis 1950. Dans de nombreux pays, l'épidémie du sida devrait s'étendre rapidement durant la prochaine décennie, soit jusqu'à ce qu'une femme sur quatre et un homme sur cinq soient infectés, ce qui est déjà le cas aujourd'hui dans cer- tains pays de l'Afrique subsaharienne. Le sida se transmet par des rapports sexuels non protégés, par le sang (transfusion de sang contaminé ou utilisa- tion de seringues infectées), ou de la mère à l'enfant lors de la naissance. Tandis que les épidémies au niveau national commencent souvent parmi les groupes qui consomment des drogues intraveineuses ou qui s'adonnent à la prostitution, elles se propagent aussi à travers les partenaires sexuels et des mères infectées à leurs enfants. Le taux d'infection est souvent plus élevé chez les femmes que chez les hommes pour trois raisons: en dehors des pays déve- loppés, les trois quarts des transmissions de maladies sexuelles sont hétéro- sexuelles; la majorité des personnes opérant dans le commerce du sexe sont des femmes; enfin, ce sont surtout les hommes qui infectent les femmes, et non le contraire. En Afrique subsaharienne, 55% des 22 millions d'adultes infectés sont des femmes. Et parmi les jeunes de 15 à 19 ans, quatre jeunes filles sur cinq sont infectées pour un seul garçon atteint (UNAIDS, 1999). Comme on le verra au chapitre II, les inégalités fondées sur le genre en matière de pouvoir et de contrôle des ressources contribuent à l'expansion du VIH dans le monde entier. Les différences entre les sexes dans les causes de maladies et de décès s'ex- pliquent par des facteurs biologiques, sociaux et culturels. Si l'on veut réelle- ment améliorer la santé des hommes et des femmes, il faut non seulement considérer les aspects biologiques lors du diagnostic et du traitement, mais aussi prendre conscience des facteurs sociaux, lesquels influencent considé- rablement les conditions de santé, tant pour les promouvoir que pour les réduire. La communauté scientifique et médicale ­ autant que les respon- sables politiques ­ ne font que commencer à prendre conscience de l'impor- tance de cette approche plus globale. Les biens de production: la terre, l'information, la technologie et les res- sources financières. Les inégalités fondées sur le genre en matière d'accès et de maîtrise des biens de production tels la terre, l'information, la technolo- gie et le capital financier empêchent les femmes de participer au développe- ment et d'en tirer profit. Nous ne disposons que de timides informations comparatives sur l'accès aux ressources de production, mais nous avons une excellente documentation qui indique que les femmes possèdent beaucoup moins de biens que les hommes et jouissent d'un accès plus limité au crédit, aux différents services et aux autres ressources intermédiaires. 52 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 53 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Selon des sondages effectués dans les foyers du Bangladesh, de l'Éthiopie, de l'Indonésie et de l'Afrique du Sud, les femmes possèdent beaucoup moins de biens que les hommes lors du mariage (Quisumbing et Maluccio, 1999). Au Bangladesh, en 1996, les biens qu'un homme apportait en se mariant valaient en moyenne 82000 takas, comparativement à seulement 6500 takas pour sa femme12. En Éthiopie, en 1997, le total des biens qu'un homme apportait lors de son mariage, incluant les terres et le cheptel, s'évaluait en moyenne à 4 200 birr, tandis que les biens de la femme ne s'élevaient qu'à 1000 birr. Cet énorme déséquilibre quant à la possession de biens se poursuit tout au long de la vie et affecte les femmes dans leur autonomie, dans leur pouvoir de décision au sein de la famille ainsi que dans leurs conditions économiques. Dans plusieurs pays en voie de développement, les titres de propriété sont plus souvent au nom de l'homme. Dans la plupart des pays d'Afrique subsaha- rienne, les femmes ne peuvent obtenir des titres sur des terres que par le mariage et ceux-ci sont valables seulement aussi longtemps que le mariage dure (Gray et Kevane, 1996). Les divorcées et les veuves perdent automatiquement le contrôle qu'elles avaient sur les terres ­ comme sur d'autres biens de production. Inutile d'ajouter que lorsqu'une femme possède un lopin de terre, ce dernier est tou- jours plus petit que celui des hommes (Kumar, 1994). Près du tiers des foyers, en Zambie, sont à la charge des femmes, mais elles semblent ne pas avoir droit aux fermes dont elles auraient besoin pour élever leur famille: ce n'est que le quart des exploitations administrées par des femmes qui comptent plus de deux hectares. Au Nigeria, les exploitations dirigées par des femmes ne représentent que 0,8 hectare, soit le tiers de celles qui sont administrées par des hommes, lesquelles comptent 2,4 hectares. De plus, elles sont établies sur des terres de qualité inférieure (Saito, Mekonnen et Spurling, 1994). Même lorsque les hommes et les femmes d'une même famille cultivent chacun leur lopin de terre, comme cela est fréquent en Afrique, dans la majo- rité des cas, les femmes n'exercent un contrôle que sur les parcelles les plus négligeables (Udry, 1996). On retrouve des situations semblables en Amérique latine et en Asie du Sud et de l'Est (Deer et Leon, 1997; Agarwal, 1994). Les fermes administrées par des femmes ­ et, de façon générale, les entre- prises dirigées par des femmes ­ sont moins bien capitalisées que celles qui sont gérées par des hommes. Au Kenya, une ferme dirigée par une femme possède moins de la moitié de l'équipement aratoire que celle dirigée par un homme (Saito, Mekonnen et Spurling, 1994). Un sondage démontre que 92% des femmes utilisent des méthodes de culture manuelles, tandis que 38% des hommes ont recours à de la machinerie et des boeufs. Au Malawi, les fermes appartenant à des femmes utilisent moitié moins de fertilisants que celles appartenant à des hommes (Due et Gladwin, 1991). Au Burkina Faso, on alloue une quantité plus importante de fertilisants par hectare aux lopins de 53 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 54 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE terre cultivés par des hommes qu'à ceux qui sont cultivés par des femmes (Udry, 1996). Au Viêt-Nam, parmi les propriétaires d'entreprises autres que les fermes, les femmes réalisent moins de bénéfices que les hommes, non pas en raison de leur scolarité moindre, ni de leur âge, ni de leur région d'origine, mais tout simplement parce qu'elles disposent de capitaux inférieurs, possè- dent moins de matériel, travaillent dans des industries à faibles revenus et reçoivent une formation réduite (Vijverberg, 1998). Les services de vulgarisation officiels offrent moins de soutien technique à une ferme lorsque c'est une femme qui la dirige (Quisumbing, 1994; Chi et al., 1998). Dans les années 1980, des données de pays subsahariens indi- quent que les agents de vulgarisation de l'État ont rendu visite aux entre- prises familiales dirigées par des hommes dans une proportion de 12 à 70%, tandis qu'ils visitaient celles dirigées par des femmes dans une proportion de 9 à 58% (Quisumbing, 1994). Les femmes ont un accès limité à ces ser- vices en raison de leur faible scolarité et parce que leurs fermes sont plus petites. De plus, ces agents sont majoritairement des hommes, et ils ont ten- dance à offrir leurs services à des fermes où des hommes sont présents (Staudt, 1978). Seulement 7% de ces agents sont des femmes en Afrique (Quisumbing, 1994). De façon similaire, au Viêt-Nam, une étude récente sur l'utilisation des pesticides à l'intention des cultivateurs de riz a révélé que, alors que 55% des fermiers consultent les services de vulgarisation, seule- ment 23% des fermières y ont recours (Chi et al., 1998). À quelques exceptions près ­ de récents projets de micro-financement, par exemple ­ les femmes continuent d'avoir un accès limité aux services finan- ciers, comparativement aux hommes. On estime qu'en Afrique, les femmes bénéficient de moins de 10% de tous les crédits alloués aux petits fermiers, et de seulement 1% des sommes allouées au secteur de l'agriculture (PNUD, 1995). Pourquoi? Parce que les femmes ne peuvent pas facilement posséder des terres et que les biens fonciers constituent la meilleure garantie pour obtenir un prêt. De plus, leur réseau de relations sociales et d'affaires ­ qui pourrait peut-être leur faciliter l'accès à des services financiers ­ est, dans la plupart des cas, plutôt restreint. Parce qu'elles ne disposent que d'un «réseau social» négligeable, les femmes entrepreneures au Kenya et au Zimbabwe ont moins d'accès aux organismes de crédit que les hommes entrepreneurs, même si elles ont les mêmes qualifications que ces derniers (Fafchamps, 2000). Et lorsqu'elles obtiennent un crédit, leur prêt est habituellement moins élevé que s'il s'agissait d'un homme (Saito, Mekonnen et Spurling, 1994; Vijverberg, 1998; Sanchez, 1998). Les emplois et les salaires. Historiquement, les hommes ont toujours parti- cipé davantage que les femmes au marché du travail, et cela est encore vrai aujourd'hui. Cependant, dans le monde en voie de développement, la partici- 54 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 55 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E pation des femmes au marché du travail varie considérablement d'une région à l'autre. En 1995, par exemple, les femmes représentaient 25% de la force ouvrière au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, tandis qu'elles comptaient pour 45% en Europe, en Asie centrale, en Asie de l'Est et dans la région du Pacifique (tableau 1.4). Les tendances au sein d'une même région varient aussi beaucoup. Entre 1970 et 1995, la participation des femmes au marché du tra- vail a légèrement augmenté au Moyen-Orient, en Afrique du Nord, en Asie de l'Est et dans la région du Pacifique, tandis qu'elle a connu une hausse consi- dérable en Amérique latine et dans les Antilles. En Afrique subsaharienne, leur participation est demeurée stationnaire alors qu'en Asie du Sud, en Europe et en Asie centrale, elle a connu une légère baisse13. Dans le monde ouvrier, les hommes et les femmes accomplissent des tâches distinctes et oeuvrent dans des secteurs différents. Par exemple, les femmes constituent la majorité de la main-d'oeuvre dans le secteur de la confection de vêtements à travers le monde. On peut même dire qu'il existe une certaine ségrégation fondée sur le genre dans les emplois, autant dans les pays développés que dans ceux en voie de développement. On note une constante: les femmes demeurent sous-représentées dans les postes bien rémunérés du secteur formel, tandis qu'elles sont hyper-représentées dans ceux, mal rémunérés, du secteur informel. De plus, les emplois féminins offrent en général moins de sécurité que les emplois masculins; ils compor- tent souvent de la sous-traitance, des occupations temporaires; ils sont à temps partiel ou doivent parfois même être exécutés à la maison. Tableau 1.4 La contribution des femmes au marché du travail : des tendances qui varient en fonction des régions Le poids des femmes sur le marché du travail 50 Asie de l'Est et région du Pacifique 40 Europe et Asie centrale Amérique latine et les Antilles 30 Moyen-Orient et Afrique du Nord Asie du Sud Pourcentage Afrique subsaharienne 20 OCDE 10 1970 1980 1990 1995 Source : Banque mondiale (1999d). 55 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 56 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Une façon de mesurer la ségrégation en matière d'emploi consiste à diviser la proportion des ouvrières d'un poste donné par celle des ouvriers occupant le même poste. Si on obtient un taux supérieur à 1, cela indique une hyper- représentation des femmes, tandis qu'un taux inférieur à 1 signifie une sous- représentation. En appliquant ce calcul à des données provenant de pays déve- loppés ou en voie de développement, on fait ressortir quelques faits saillants (tableau 1.5). Par exemple, les femmes sont hyper-représentées dans les postes de service, les emplois techniques et professionnels, les emplois de bureau et de vente, et cela, autant dans les régions développées que dans celles qui sont en voie de développement. Les hommes, par contre, sont hyper-représentés dans les emplois de production ainsi que dans les postes de direction et d'ad- ministration bien rémunérés. Ce type de ségrégation aurait quelque peu diminué au cours des dernières décennies. Par exemple, une étude récente réalisée par Tzannatos (1999) se penche sur une façon d'évaluer les différences marquées concernant les emplois. Il s'agit de l'indice Duncan, qui analyse les changements survenus de 1950 à 1960 et de 1980 à 199014. L'étude révèle une légère convergence dans les profils d'emplois d'hommes et de femmes dans divers secteurs de l'industrie, cette convergence s'effectuant plus rapidement pour les per- sonnes salariées que pour celles qui travaillent à leur compte ou à la maison. Il y aurait aussi certains éléments de convergence entre les profils des salariés Tableau 1.5 Les femmes et les hommes n'ont pas le même type d'emploi 4 3 2 femmes-hommes 1 Rapport 0 Professionnel Administration Commis Ventes Services Production et technique et management Pays développés Pays en voie de développement Note : Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et les années, et le lexique pour la définition des termes utilisés. Source : Basé sur des données tirées de Anker (1998). 56 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 57 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E des deux sexes, mais dans une moindre mesure pour les personnes travaillant à leur compte ou à la maison. Dans les pays en voie de développement, mal- gré les améliorations apportées à l'éducation des femmes et l'expérience que ces dernières ont acquise, la ségrégation concernant les emplois continue de poser un sérieux problème pour le marché du travail. Les femmes continuent à gagner moins que les hommes. De récentes études portant sur des expériences réalisées dans 71 pays indiquent que, dans les pays développés, les femmes gagnent en moyenne 77% de ce que gagnent les hommes, tandis que, dans les pays en voie de développement, ce taux s'élève en moyenne à 73% (grille 1.2)15. Ces moyennes, provenant de données récentes, masquent une grande variation entre les pays. Parmi les pays déve- loppés, par exemple, la proportion de ce que gagnent les femmes par rapport à ce que gagnent les hommes est de 43% au Japon (1993-1994) et de 87% au Danemark (1995). Dans les pays en voie de développement, cette même pro- portion varie de 43% au Nicaragua (1991) à 90% en Thaïlande (1989) et 101% au Chili (1996). Bien que la plupart des études ne puissent évaluer les salaires proportionnels à chaque genre pour des groupes exactement com- parables et sur un laps de temps suffisant, des éléments provenant de plusieurs pays d'Asie, d'Amérique latine, d'Afrique subsaharienne et des pays occiden- taux laissent entendre que la rémunération des femmes connaît une certaine augmentation par rapport à celle des hommes (annexe III). Mais cette comparaison entre les bénéfices propres à chaque genre, si elle n'est pas constamment mise à jour, porte à confusion pour trois raisons. D'abord, les données servant à établir ces proportions ne tiennent pas tou- jours compte des exigences inhérentes aux emplois, par exemple en ce qui concerne le degré de scolarité, l'expérience ou la formation. Dans la mesure où des hommes et des femmes auraient atteint des niveaux d'éducation ou d'expérience différents, ces taux proportionnels seraient appliqués à des per- Grille 1.2 Salaires relatifs des femmes et des hommes Rapport femme-homme pour le revenu Écart entre les sexes % de l'écart inexplicable Régions developpées (n = 42) 0,77 0,23 80,4 Régions en voie de développement (n = 19) 0,73 0,27 82,2 Note: L'écart en ce qui concerne le salaire est proportionnel à la différence entre le salaire moyen d'une femme et celui d'un homme (1 moins le rapport femme-homme). La portion inexplicable de cet écart correspond à la portion qui ne peut être attribuée à des caractéristiques per- sonnelles telles que la scolarité ou l'expérience ni par le profil du travail. Voir l'annexe III pour connaître les années couvertes par l'étude. Source : Voir l'annexe III pour les détails. 57 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 58 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE sonnes n'ayant pas les mêmes qualifications et seraient ainsi un comparatif inadéquat. Deuxièmement, les données sur les rémunérations respectives correspondraient à des fluctuations de salaire pour le même emploi. Or, comme on l'a vu, les hommes et les femmes ont tendance à se consacrer à des occupations différentes. Troisièmement, les grilles de rémunération ne tiennent pas toujours compte du nombre précis d'heures de travail, puisque de plus en plus d'hommes et de femmes travaillent à temps plein. Or, dans le cas où des femmes travailleraient moins d'heures dans le mois, un taux proportionnel correspondant à un paiement mensuel fausserait la réalité. Des études réalisées à la fois dans les pays développés et dans les pays en voie de développement se sont penchées sur les rémunérations proportion- nelles des hommes et des femmes, en tenant compte des qualifications du personnel au niveau de la formation et de l'expérience. Elles ont fait une ana- lyse minutieuse des différences entre les salaires des hommes et des femmes en mettant de côté l'écart entre les sexes, de façon à isoler le facteur de la dis- crimination. En Corée, les femmes gagnent 51% du salaire des hommes, et la moitié de cet écart est attribué aux différences sur le plan des qualifications (Horton, 1996). Au Brésil, les femmes gagnent 70% du salaire des hommes, mais seulement 10% de l'écart relève des différences concernant les qualifi- cations de la main-d'oeuvre (Psacharopoulos et Tzannatos, 1992). Au Danemark, en France, en Allemagne ainsi qu'au Royaume-Uni, l'évaluation des qualifications explique entre 20 à 30% de l'écart entre les salaires, et au Portugal et en Espagne, on y attribue un pourcentage encore moins élevé (Rice, 1999). De façon générale, dans les pays en voie de développement, les exigences quant à la qualification professionnelle expliquent environ le tiers de la différence entre les salaires des hommes et des femmes. Cela laisse entendre que, pour une famille, les investissements dans la scolarisation des garçons et des filles ont beaucoup d'importance et contribuent à leur succès sur le marché du travail, mais plusieurs autres facteurs peuvent aussi être déterminants. Parmi les études réalisées dans les pays en voie de développement, celles qui évaluent les qualifications rattachées aux emplois se font rares à cause d'un manque de données sur le sujet. Certaines mentionnent que ces dif- férences de qualification selon le genre peuvent, dans une certaine mesure, affecter les salaires respectifs. Mais l'impact diffère selon les régions. Chez les pays développés, on tient compte des exigences liées aux emplois, ce qui contribue à réduire considérablement une portion de l'écart entre les sexes, et confirme du même coup que les hommes sont généralement mieux rémunérés (Rice, 1999; Zabalza et Tzannatos, 1985). Certaines tendances reliées à l'emploi expliqueraient le tiers de cet écart dans cer- tains pays (Tzannatos, 1998). Mais la ségrégation fondée sur le genre ne 58 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 59 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E serait responsable que d'une infime partie de l'écart salarial dans les pays en voie de développement. En Amérique latine, les différences entre les hommes et les femmes n'expliquent pratiquement pas les écarts de reve- nus entre les sexes16. En résumé, les différences liées à la qualification professionnelle et aux exigences inhérentes aux emplois n'expliquent que 20% des différences de revenus selon le genre, et ce, autant dans les pays développés que dans les pays en voie de développement (grille 1.2). Les autres différences dépen- dent de facteurs difficilement mesurables, tels que les différences d'habi- leté entre les travailleurs et travailleuses et les différents traitements sur le marché du travail. L'influence Les femmes constatent qu'elles exercent un contrôle limité sur les ressources et les biens de production, et que leur capacité de générer des revenus ­ aussi bien en travaillant à salaire qu'à leur compte ­ est affaiblie, ce qui fait que leur influence réelle se limite à la sphère domestique, où elles peuvent participer aux décisions concernant les investissements et l'attribution des ressources. Munies de droits inégaux et d'un statut économique amoindri par rapport aux droits et au statut des hommes, les femmes ne se sentent pas de taille à participer acti- vement à la scène politique comme agents actifs, capables d'influencer les déci- sions dans leur communauté ou sur le plan national. Au chapitre IV, nous étu- dierons comment la maîtrise du revenu, des biens et autres ressources ont un impact sur l'influence que les femmes peuvent exercer, sur leur autonomie et sur leur pouvoir au sein de la famille. Dans cette section, nous traitons des inégalités entre les hommes et les femmes concernant leur influence respective dans la société, en nous intéressant en particulier à leur participation ainsi qu'à leur représentation en politique. C'est au XXe siècle que les femmes ont obtenu le droit de vote dans presque tous les pays. L'écart entre les sexes est en voie de disparition, spécialement dans les pays où la majeure partie des gens exerce son droit de vote. Malgré cela, d'importantes inégalités subsistent lorsqu'il s'agit de participer à des activités considérées comme audacieuses, comme prendre part à des manifestations ou à des boycottages. Encore aujourd'hui, on se méfie des femmes qui discutent de politique, particulièrement dans certains milieux plus avancés en âge ou moins scolarisés (Inglehart, 1997). De plus, il existe de très grandes inégalités fondées sur le genre sur les plans de la participation et de la représentation politique, et cela, à tous les niveaux du gouvernement, des conseils locaux aux assemblées nationales. Les femmes demeurent encore largement sous-représentées dans les différents postes élus (tableau 1.6). Dans toutes les régions (sauf en Asie de l'Est, dans la région du 59 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 60 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 1.6 Les femmes sont sous-représentées au Parlement Portion des sièges qui appartiennent aux femmes 30 Asie de l'Est et Pacifique Europe et Asie Centrale 20 Amérique latine et les Antilles Moyen-Orient et Afrique du Nord Asie du Sud Pourcentage 10 Afrique subsaharienne OCDE 0 1975 1985 1990 1995 Note : Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés. Source : WISTAT (1998); Banque mondiale (1999c). Pacifique, en Europe et en Asie centrale), le nombre de sièges occupés par des femmes au Parlement ne dépassait pas 10% entre 1975 et 1995. En Asie de l'Est, la proportion de femmes au Parlement atteignait un peu moins de 20%. L'Europe et l'Asie centrale ont quant à eux connu des changements draconiens; leurs niveaux de représentation féminine ­ les plus élevés par rapport au reste du monde ­ ont chuté rapidement à la fin des années 1980, passant de 25 à 7%, ce qui coïncidait avec le début des politiques de transi- tion17.D'autres importantes inégalités fondées sur le genre perdurent dans les assemblées locales et régionales. Les femmes demeurent aussi sous-représentées dans les conseils de direc- tion des gouvernements. En 1998, la présence des femmes au sein des cabi- nets ministériels n'atteignait jamais plus de 8% dans toutes les régions en voie de développement (PNUD, 2000). Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, les femmes n'occupent que 2% de ces postes, tandis qu'en Asie de l'Est et dans le Pacifique, elles en occupent 4%, et en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne, à peine 6%. En Amérique latine, en Europe de l'Est et en Asie centrale, les femmes possèdent entre 7 et 8% des postes ministé- riels. La représentation féminine aux postes sous-ministériels a tendance à devenir généralement un peu plus prononcée, elle est cependant plus basse en Asie du Sud18. Les femmes présentes dans les cabinets ministériels occupent plus vraisem- blablement des postes ayant trait à la condition féminine ou aux affaires 60 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 61 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E sociales plutôt que ceux touchant aux finances, à l'économie ou à la planifica- tion et qui déterminent les orientations politiques et les budgets. Sur 466 femmes occupant un poste ministériel au début de l'année 2000, 95 ­ c'est-à-dire 20% ­ étaient à la tête des affaires sociales et féminines, alors que 22 ­ 5% ­ étaient ministres des Finances ou de l'Économie et du déve- loppement (IPU, 2000). Les formes d'inégalités fondées sur le genre dans les régions et les pays étudiés L ORSQU'ON FAIT RESSORTIR LES DIFFÉRENCES ENTRE LES régions et les pays, on court le risque de ne pas remarquer leur diver- sité. Il est important de reconnaître cette diversité si nous voulons approfondir toutes les dimensions du développement liées aux différences fondées sur le genre. Cette prise de conscience favorise également l'élabora- tion de politiques mieux informées. Nous nous intéressons ici à l'Afrique subsaharienne et à l'Asie du Sud. En Afrique subsaharienne, il existe d'énormes différences entre le taux d'inscription des filles de six à quatorze ans et celui des garçons du même âge, ainsi qu'entre les étudiants et étudiantes âgés de quinze à dix-neuf ans ayant complété leurs études secondaires. Ces différences sont cependant beaucoup plus accentuées en Afrique centrale et en Afrique de l'Ouest que dans les autres parties de la région. Même si cette tendance est très marquée dans cette sous-région, il y a heureusement des exceptions. Le Ghana est à l'honneur, et il atteint presque la parité concernant la scolarisation des gar- çons et des filles ainsi qu'au niveau du nombre d'étudiants ayant complété leurs études secondaires. Cette situation a aussi cours en Afrique de l'Est et en Afrique du Sud. La plupart des pays de ces deux régions jouissent d'un degré élevé d'égalité concernant l'éducation, bien qu'il y ait toujours des exceptions: les Comores et le Mozambique accusent un écart considérable entre les sexes, proches sur ce point des pays d'Afrique de l'Ouest. Les variations concernant les inégalités sont également considérables en Asie du Sud. Un certain nombre d'études sur la diversité dans les régions ­ portant en particulier sur la dichotomie nord-sud inhérente au système des castes en Inde ­ ont permis de découvrir différentes formes d'autonomie et de statut chez les femmes d'une même caste (Dyson et Moore, 1983; Basu, 1992; Malhotra, Vanneman et Kishor, 1995). Peut-être les inégalités fondées sur le genre en matière de santé et d'éducation sont-elles plus accentuées entre les différents États de l'Inde et les provinces du Pakistan qu'entre les autres pays du monde en raison d'énormes différences entre les castes. Par exemple: 61 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 62 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE · Une caste vivant dans les États du nord-ouest de l'Inde (et répandue jusque dans certaines provinces du Pakistan) connaît le degré le plus élevé du monde d'inégalités fondées sur le genre en ce qui concerne le taux de mortalité infantile. Cette inégalité est plus prononcée dans les États du Haryana, du Punjab, de l'Uttar Pradesh et dans les provinces pakistanaises du Balochistan et du Punjab que dans toute l'Égypte. Pourtant, de tous les pays (exception faite de l'Asie du Sud), l'Égypte est celui qui accuse le degré le plus élevé d'inégalité entre les sexes concernant la mortalité infan- tile (tableau 1.7; Filmer, King et Pritchett, 1998). Par contre, les États indiens du Tamil Nadu et du Kerala accusent une inégalité concernant le taux de mortalité infantile beaucoup moins élevée que la moyenne établie pour les pays, à l'exception de l'Asie du Sud. · En ce qui a trait au taux d'inscription scolaire, les variations concernant les inégalités fondées sur le genre entre l'Inde et le Pakistan sont presque aussi prononcées qu'avec d'autres pays. Bien que l'Asie du Sud connaisse les plus grandes inégalités fondées sur le genre en matière d'inscription scolaire, le Sri Lanka a comblé les écarts dans ce domaine. De plus, certains États indiens (le Kerala, par exemple) ne connaissent pas d'écarts entre les sexes. Dans d'autres États, comme le Rajasthan, le nombre de filles inscrites à l'école atteint à peine 50% du nombre de garçons inscrits. Au Pakistan, cet écart est au moins deux fois plus prononcé que dans le Balochistan et le Punjab. Différences fondées sur le genre et pauvreté D ANS QUELLE MESURE LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE et la pauvreté sont-elles reliées? Ces inégalités sont-elles plus pro- noncées chez les classes moins favorisées ou chez celles qui sont mieux nanties? Des inégalités en matière de droits, de ressources et de partici- pation se traduisent-elles par des différences fondées sur le genre chez les pauvres? Existe-t-il des groupes de femmes (ou d'hommes) davantage enclins à devenir pauvres? Les inégalités ont tendance à être plus prononcées chez les classes moins favorisées Les inégalités fondées sur le genre existent autant chez les riches que chez les pauvres, mais elles sont souvent plus accentuées chez les moins favorisés, surtout en ce qui concerne les investissements dans la famille, l'éducation et la santé. Une étude récente dirigée par Filmer (1999) analyse des différences relatives à la scolarisation des jeunes de six à quatorze ans. Filmer utilise des informations provenant de sondages sur la démographie et la santé réalisés dans les années 1990 et couvrant 41 pays d'Asie centrale, du Sud et du Sud- 62 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 63 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Tableau 1.7 L'écart entre les sexes est important en Asie du Sud ­ plus que dans tous les pays Rapports de mortalité infantile femmes-hommes Plus grand ou égal à 0,886 0,887 à 1,062 1,063 à 1,448 Plus grand ou égal à 1,449 Données non disponibles PAKISTAN NÉPAL BANGLADESH INDE Golfe du Bengal Mer d'Oman SRI LANKA Note : Cette carte a été dessinée par le Département des cartes de la Banque mondiale. Les frontières géographiques, couleurs, appellations et autres informations qui s'y trouvent ne doivent aucunement être interprétées comme étant un jugement de la part de la Banque mondiale sur le statut légal d'un territoire ni une acceptation formelle desdites frontières. Source : Filmer, King et Pritchett (1998). 63 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 64 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Est, d'Afrique subsaharienne, d'Amérique latine, des Antilles, du Moyen- Orient et d'Afrique du Nord19. Elle suggère une classification des familles selon les biens matériels qu'elles possèdent à partir d'une liste d'avoirs qui détermine leur niveau de vie. Vingt pour cent des familles les mieux nanties selon cette liste forment la classe riche, tandis que 40% des familles s'avérant les plus démunies, toujours selon cette liste, constituent la classe pauvre. Une fois ces classes déterminées, Filmer compare les inégalités entre les riches et les pauvres concernant la scolarisation. L'étude révèle que les inégalités fondées sur le genre concernant le taux d'inscription à l'école ont tendance à être beaucoup plus accentuées chez les classes défavorisées que chez les mieux nantis (tableau 1.8). Parmi 21 des 41 pays, ce type d'inégalité est plus prononcé chez les pauvres que chez les riches pour les jeunes de six à quatorze ans. Au tableau 1.8, la ligne diagonale indique que les inégalités fondées sur le genre sont les mêmes chez 20% des familles les plus riches et 40% des familles les plus pauvres du même pays. Lorsqu'un pays figure au-dessus de cette ligne, cela signifie que, dans ce pays, ces inégalités sont plus grandes chez les pauvres que chez les riches. Tableau 1.8 Les disparités entre les sexes tendent à être plus prononcées chez les pauvres 3,0 2,5 2,0 hommes-femmes pauvres 1,5 les chez scolarisation 1,0 de 0,5 Rapport 0,0 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 Rapport de scolarisation hommes-femmes chez les riches Note : Le rapport de scolarisation a trait à la proportion des enfants âgés de six à quatorze ans inscrits à l'école, indépendamment du niveau. Les ménages pauvres sont définis comme ceux qui sont situés dans les derniers 40% d'une distribution de la «richesse»; les ménages riches sont situés dans les premiers 20%. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés. Source : Filmer (1999). 64 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 65 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Filmer (1999) identifie deux sous-groupes de pays où les différences concernant la scolarisation sont plus prononcées chez les pauvres que chez les riches. Dans le premier sous-groupe, l'inégalité est plutôt faible ou modé- rée chez les riches (un taux de moins de 1,5 des garçons par rapport aux filles) et modérée chez les pauvres (un taux oscillant entre 1,1 et 1,5). Dans le second, l'inégalité est basse ou modérée chez les riches (un taux de moins de 1,5) mais élevée chez les pauvres (un taux supérieur à 1,5). Le second groupe comprend le Bénin, le Burkina Faso, l'Afrique centrale, la Côte d'Ivoire, l'Inde, le Mali, le Maroc, le Niger, le Pakistan et le Sénégal; nombre de ces pays ont une moyenne très élevée d'inégalités fondées sur le genre en matière d'éducation. Dans aucun des pays couverts par l'étude, les inégalités concernant la sco- larisation ne se sont avérées plus élevées chez les riches que chez les pauvres. Une étude semblable a été effectuée au profit de 29 économies en voie de développement ou de transition. Pour cette étude, des données de sondages qui s'appuyaient sur la consommation plutôt que sur le revenu ont été utili- sées pour évaluer le degré de bien-être matériel des gens. Parmi ces sondages figuraient l'étude des niveaux de vie et les dimensions sociales de l'ajustement. On a découvert que des formes très semblables d'inégalités fondées sur le genre au sujet de l'éducation existaient entre les riches et les pauvres dans des pays qui n'avaient pas encore atteint l'universalité au niveau du primaire20. On peut observer des faits semblables entre les riches et les pauvres concernant la mortalité des enfants de moins de cinq ans. Une analyse de données, qui a utilisé une mesure de classification semblable à celle de Filmer (basée sur les avoirs matériels et provenant de sondages sur la démo- graphie et la santé) a été réalisée dans 32 pays en voie de développement. Cette étude a révélé que, dans les deux tiers de ces pays, la mortalité infan- tile est plus accentuée là où les femmes sont désavantagées économique- ment. Et en ce qui concerne la scolarisation, le favoritisme envers les gar- çons est plus fort chez les pauvres que chez les riches21. La relation entre la pauvreté et les inégalités fondées sur le genre peut varier grandement selon les pays. Des revenus plus élevés n'impliquent pas néces- sairement une plus grande égalité dans toutes les dimensions de la vie. Dans certains contextes, des formes particulières d'inégalités sont liées à la famille. Dans certaines sociétés comportant des règles rigides concernant le genre, plus le statut socio-économique d'une famille est élevé, plus celle-ci met l'ac- cent sur la pudeur et la réclusion des filles (Chen, 1995). Malgré cela, les notions de pauvreté et d'inégalités fondées sur le genre sont parfois forte- ment liées, spécialement dans l'éducation et dans la santé, ce qui peut avoir un impact dramatique sur les chances des garçons et des filles de participer au développement et d'atteindre un niveau de vie acceptable. 65 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 66 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Les femmes sont-elles plus pauvres que les hommes ? Nous sommes peu renseignés quant au nombre d'hommes et de femmes vivant dans la pauvreté, que les calculs soient basés sur les revenus ou sur la consommation. Une étude reconnue laisse entendre que 70% des personnes pauvres sur la planète seraient des femmes. Mais une étude récente réalisée par Marcoux (1998) soutient qu'il n'y a pas de base démographique permettant de soutenir ce calcul. L'estimation de 70% implique une proportion de 2,3 femmes pour chaque homme ­ ou un déséquilibre démographique aberrant voulant qu'il y ait 900 millions de femmes et de filles pour 400 millions d'hommes et de gar- çons sur la Terre. Les chiffres sur la population dont nous disposons ne permet- tent pas de corroborer de telles affirmations. Pourquoi est-il si difficile d'évaluer le nombre d'hommes et de femmes vivant dans la pauvreté? C'est qu'il n'existe pas de mesure adéquate permet- tant d'évaluer avec exactitude le bien-être relatif des hommes et des femmes. L'indice de pauvreté (ou de bien-être) le plus communément utilisé demeure celui de la consommation. Mais la plupart des sondages effectués dans les foyers recueillent des informations sur l'ensemble de la famille, pas sur les individus. Ils nous renseignent sur le foyer comme étant un des facteurs de base de l'économie (point étudié en détail au chapitre IV), tout en souli- gnant combien il est compliqué de mesurer la consommation de chaque individu. Par exemple, plusieurs articles à la disposition de toute la famille, tels les meubles, les télévisions et les voitures, sont des objets de consomma- tion commune. Il s'avère alors très difficile, pour ne pas dire impossible, de déterminer qui sont leurs utilisateurs spécifiques. Pour toutes ces raisons, il est hasardeux, voire problématique, d'établir des comparaisons au sujet de la consommation respective de l'homme et de la femme dans un foyer22. Le manque de données concernant la consommation des individus nous incite à comparer plutôt les situations de pauvreté entre les foyers dirigés par une femme et ceux dirigés par un homme. L'intérêt d'une telle comparaison est qu'elle touche un problème de base de la société et qu'elle nourrit les sta- tistiques. L'augmentation considérable du nombre de femmes monoparen- tales est d'ailleurs une préoccupation majeure pour plusieurs pays (Baden et Milward, 1995; Bruce, Lloyd et Leonard, 1995). En effet, les foyers mono- parentaux sont plus vulnérables que les autres sur le plan économique. Ils n'ont qu'un accès limité aux ressources car ils disposent de moins de per- sonnes en âge de rapporter un revenu (Haddad et al., 1996). Des études comparatives sur la pauvreté au sein des familles monoparentales, réalisées dans plusieurs pays en voie de développement ont donné des résultats ambivalents23. En passant en revue 61 études sur la responsabilité familiale et la pauvreté, on a découvert que 38 familles monoparentales ayant une femme à leur tête figuraient parmi les pauvres, quoique à des degrés divers (Buvinic et 66 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 67 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Gupta, 1997). Dans quinze cas seulement, certains sous-groupes de foyers monoparentaux figuraient parmi les pauvres, à des degrés divers également, tandis que dans huit cas, la pauvreté n'était pas spécialement en cause. Une étude parallèle s'est penchée sur onze séries d'informations provenant de dix pays en voie de développement et utilisant diverses mesures et métho- dologies afin d'évaluer le phénomène de la pauvreté (Quisumbing, Haddad et Pena, 2000). Contrairement à celle de Buvinic et Gupta (1997), cette étude, qui comparait des situations monoparentales entre les familles dirigées par des femmes et celles dirigées par des hommes, a trouvé des différences substantielles et significatives du point de vue des statistiques dans deux cas seulement. D'autres études récentes, incluant 58 évaluations sur des cas de pauvreté entreprises par la Banque mondiale au cours des années 1990, concluent que les situations des familles monoparentales varient selon les pays et les méthodologies utilisées (Haddad et al., 1996; UN ECLAC, 1998; Ye, 1998; Lampietti et Stalker, 2000). Il n'est pas facile de tirer des conclusions définitives. Les familles monoparen- tales, qu'elles soient dirigées par une femme ou un homme, sont particulière- ment hétérogènes: le parent peut être jeune ou vieux, éduqué ou non, il peut être célibataire, veuf ou en ménage avec une autre personne qui a peut-être elle aussi des enfants. Bien que les familles monoparentales dont la mère est veuve ou divorcée aient plus de chances d'être classées parmi les pauvres, quoique à des degrés divers, d'autres types de familles dirigées par des femmes ne sont pas considérées comme étant pauvres. Par exemple, une jeune femme célibataire ayant un bon emploi rémunérateur, ou une autre dont le mari envoie réguliè- rement une pension suffisante, n'ont peut-être pas à affronter des problèmes de pauvreté trop aigus. De plus, les études nous renseignent peu sur le phénomène de la pauvreté chez les hommes et les femmes, et elles s'intéressent à peine aux questions du bien-être relatif des filles dans les familles dirigées par des hommes et de celui des garçons dans les familles dirigées par des femmes. Seul un petit nombre d'études abordent le problème de l'alimentation de chaque individu afin d'évaluer le bien-être familial. Avec cette approche, on évite de préciser pour chaque individu ce qui est consommé globalement par une famille. Les études mentionnées précédemment ont relevé des inégalités fondées sur le genre concernant l'alimentation en Asie du Sud et dans d'autres régions, à des degrés moins prononcés (Appleton et Collier, 1995; Alderman, 2000). Même en Asie du Sud, les données ne sont pas constantes ­ en partie parce que les inégalités peuvent varier selon les saisons et, d'autre part, parce que les inégalités fondées sur le genre se manifestent souvent de façon subtile. Au sud de l'Inde, par exemple, on pratique la discrimination dans la distribution des vivres, mais seulement en temps de disette, pas en période d'abondance (Behrman, 1988). Au Bangladesh, les hommes sont 67 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 68 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE avantagés au point de vue de l'alimentation (ils peuvent manger davantage et mieux), mais seulement lorsqu'on exige d'eux des efforts supplémentaires au travail (Chen, Huq et D'Souza, 1981; Pitt, Rosenzweig et Hassan, 1990)24. D'autres rapports provenant du Bangladesh précisent que les inéga- lités les plus criantes ne consistent pas tellement en la consommation de ces calories, mais plutôt dans la distribution de nourriture riche en valeur nutri- tive (Bouis, 1998). En résumé, même si l'on sait depuis longtemps que les inégalités fondées sur le genre concernant les droits, les ressources et l'influence empêchent les personnes de participer pleinement au développement et d'en tirer profit, il est encore difficile de prouver (avec les données portant sur la consomma- tion) que ces inégalités se traduisent par la pauvreté. Ceci nous incite à recueillir de nouveaux types de renseignements afin de développer des méthodes, basées sur l'expérience, qui soient encore plus aptes à cerner toutes les dimensions de la pauvreté. En même temps, toutes ces études nous font comprendre l'importance de nous intéresser à tous les éléments pouvant constituer le bien-être des personnes, afin d'arriver à mieux saisir toutes les implications que comportent les inégalités fondées sur le genre (encadré 1.2). Encadré 1.2 Le temps des femmes vaudrait-il moins chaque jour. Pendant que certaines études comparent que celui des hommes ? l'emploi du temps de chacun des sexes de différents niveaux économiques, les faits réels laissent entendre DANS LE MONDE ENTIER, LES FEMMES SE CHARGENT que les inégalités fondées sur le genre quant à l'usage du du soin des enfants ainsi que des tâches ménagères. À temps sont plus prononcées chez les pauvres que chez peu près partout, les femmes doivent trouver du temps les riches (Ilahi, 2000). pour les travaux domestiques et pour un emploi à l'ex- Cela soulève certaines questions : des horaires aussi térieur de la maison afin d'avoir suffisamment de reve- surchargés ne sont-ils pas de nature à affecter le bien- nus ou d'élever davantage la consommation au foyer; être des femmes ? Dans la mesure où la répartition des et, souvent, ces occupations n'apparaissent pas dans les tâches est basée sur le genre, les femmes se consacrent statistiques conventionnelles sur le travail. On constate à leurs tâches ménagères aux dépens d'autres activités que les femmes, lorsqu'on tient compte de toutes leurs qui pourraient être génératrices de revenus. Du même occupations, travaillent généralement plus longtemps coup, elles voient leur pouvoir de négociation et de que les hommes (Bevan, Collier et Gunning, 1989; prise de décisions limité à la maison. Cette situation Juster et Stafford, 1991; Brown et Haddad, 1995; n'entraîne-t-elle pas aussi des conséquences sur leur PNUD, 1995; Ilahi, 2000). bien-être ? (Voir le chapitre IV) De plus, ces inégali- Les différences fondées sur le genre en ce qui tés concernant les horaires de travail impliquent autre concerne le temps consacré au travail varient beaucoup chose : même dans les cas où il n'y aurait pas de désé- d'un pays à l'autre dans les pays en voie de développe- quilibre concernant les biens de consommation dans ment. En général, les femmes travaillent chaque jour un foyer, la femme devrait quand même travailler un pendant au moins une heure de plus que les hommes. plus grand nombre d'heures que l'homme pour se Dans les régions rurales du Kenya, les femmes tra- procurer les mêmes biens matériels (Lipton et vaillent presque trois heures de plus que les hommes Ravallion, 1995). 68 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 69 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E Des groupes plus fragiles : les veuves et les femmes âgées vivant seules Les veuves, ainsi que les femmes d'un certain âge ayant une famille à leur charge ou vivant seules, sont beaucoup plus susceptibles d'être pauvres. Des études consacrées aux revenus et à la consommation en arrivent à cette conclu- sion, tant pour les pays développés que pour ceux en voie de développement. Dans les pays occidentaux, par exemple, les personnes âgées vivant seules sont parmi celles qui ont le moins de revenus, et la majorité de ces personnes sont des femmes (Banque mondiale, 1994b). Au Venezuela, chez les personnes âgées, les deux tiers des personnes qui ont les revenus les plus bas sont des femmes. En Australie, au Chili et aux États-Unis, les femmes âgées qui sont pauvres et qui ont recours à l'aide sociale sont beaucoup plus nombreuses que les hommes (Banque mondiale, 1994b; Cox-Edwards, 1999). Les données sur la consommation confirment les mêmes faits. En Inde, les veuves qui ont une famille à leur charge ne peuvent pas se permettre autant de dépenses que les autres familles, et celles qui ont des enfants non mariés, par exemple, vivent dans des conditions de pauvreté plus sévères que la moyenne (Drèze, 1990). En Inde, la relation entre le veuvage et la pauvreté est particulièrement évidente si l'on tient compte des économies effectuées au niveau de la consommation familiale, car leurs familles sont généralement de taille plus petites (Drèze et Srinivasan, 1998). En Europe de l'Est, les femmes âgées, surtout les retraitées vivant seules, sont plus susceptibles de devenir pauvres. En Russie, les femmes retraitées vivant seules courent plus de risques de vivre dans l'indigence que les hommes retraités. En Hongrie, de tous les groupes, celui des femmes céliba- taires à la retraite est celui qui connaît les pires conditions de pauvreté. En Pologne, les femmes âgées de 70 ans et plus font partie des classes les plus pauvres (Lampietti et Stalker, 2000). Pourquoi les veuves et les femmes retraitées sont-elles susceptibles de vivre dans la pauvreté? Tout comme les jeunes femmes en âge de travailler, elles jouissent d'un accès limité à l'éducation et aux autres biens de production, de droits de propriété affaiblis et de services d'épargne réduits, comparative- ment aux hommes. De plus, dans le monde, environ 79% des hommes âgés de 60 ans et plus sont mariés, tandis que seulement 43% des femmes du même âge le sont. Cela signifie que les femmes sont désavantagées sur le plan économique car elles bénéficient moins souvent du soutien économique qu'apporte le mariage. Et elles sont moins susceptibles que les hommes d'ac- céder au marché du travail ou de recevoir une pension. Dans certaines socié- tés, les veuves font face à des contraintes d'ordre culturel qui les empêchent de s'assurer un niveau de vie acceptable pour leurs vieux jours. Par exemple, presque partout en Inde, les veuves doivent se plier à des coutumes restric- tives touchant le remariage, l'emploi, le lieu de résidence, l'héritage ainsi que 69 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 70 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE le droit de propriété; autant de contraintes qui les empêchent de bien pour- voir à leurs propres besoins. Exception faite de l'aide apportée par leurs fils, les veuves reçoivent très peu de soutien de l'extérieur (Chen, 1998). Dans plusieurs régions, les veuves constituent un important sous-groupe. Au milieu des années 1990, plus de la moitié des femmes de plus de 65 ans en Asie et en Afrique étaient veuves, alors que seulement 10 à 20% des hommes du même âge étaient veufs (Banque mondiale, 1994b). Mais la vulnérabilité de ces femmes face à la pauvreté devrait croître davantage au XXIe siècle à cause du vieillissement de la population. Puisque la mortalité et la fertilité connaissent toutes deux une baisse importante, et cela, sur toute la planète, la portion de la population la plus âgée ­ tant dans le monde développé que dans celui en voie de développement ­ devrait croître en pro- portion (Banque mondiale, 1999b). Le nombre de gens âgés de 60 ans et plus est appelé à tripler dans la prochaine moitié du siècle, passant de 593 millions à 1 970 millions dans les régions développées, de 364 à 1 594 millions dans les régions en voie de développement et de 31 à 181 mil- lions dans les régions les moins développées. Cela fera augmenter la portion de personnes âgées dans la population, portion qui passera de 10 à 22% (Behrman, Duryea et Székely, 1999). De tels bouleversements démographiques entraînent des répercussions majeures sur les relations entre les sexes. Comme l'espérance de vie des femmes augmente plus rapidement que celle des hommes grâce au développement (tableau 1.3), des centaines de millions de femmes seront veuves demain. En même temps, on prévoit que le rapport du soutien financier possible (on entend par là le nombre de personnes de 15 à 64 ans par rapport à celles plus âgées) connaîtra inévitablement une courbe décroissante, passant de neuf à quatre entre 1999 et 2050, de cinq à deux dans les régions développées, de douze à quatre dans celles qui sont moins développées, et de dix-huit à huit dans les régions les moins développées. Étant donnée la vulnérabilité des veuves face à la pauvreté, ces prévisions devraient influencer les politiques des gouvernements en matière de sécurité sociale et autres questions connexes. Par exemple, en ce qui concerne la santé des femmes, on peut prévoir des déplacements de centres d'intérêt: insensiblement, on s'intéressera davantage aux maladies liées à la vieillesse (cancer, troubles cardio-vasculaires) qu'à la fertilité. Ce ne seront plus seulement les enfants qui demanderont des soins particuliers, mais aussi les parents âgés. Les services sociaux ne mettront plus uniquement l'accent sur les enfants, les soins de maternité et les écoles, mais aussi sur les problèmes de pro- tection et de pension des personnes âgées. __________ Ce chapitre a passé en revue les inégalités fondées sur le genre entre les peuples dans les régions en voie de développement, et entre les riches et les 70 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 71 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E pauvres. L'écart formé par les inégalités s'est quelque peu réduit au cours des dernières décennies. La situation des femmes s'est considérablement améliorée dans l'absolu, et aussi par rapport à celle des hommes. Les femmes prennent de plus en plus leur place dans la société comme agents de changements orien- tés vers le progrès. Cependant, d'importantes inégalités fondées sur le genre perdurent. Tandis que l'écart semble s'amenuiser de façon générale, ces inéga- lités ont marqué profondément, à des degrés divers et de façon irrégulière, toutes les régions et toutes les économies. Le monde fait face à d'anciens défis, et doit en relever de nouveaux. Dans les pays en voie de développement, les femmes et les filles sont systématiquement désavantagées en matière de droits, d'accès aux ressources et d'influence. En même temps, des changements récents (et des stéréotypes fondés sur le genre qui continuent à être véhiculés) ont entraîné une série de nouveaux risques qui menacent parfois les hommes. Qu'il s'agisse des gains croissants des femmes concernant l'éducation en Amérique latine ou de la baisse de l'espérance de vie des hommes en Europe de l'Est, ces changements nous invitent à considérer que les problèmes liés au genre intéressent autant les hommes que les femmes. Les rôles traditionnellement dévolus à chacun, ainsi que les inégalités qui per- durent, affectent les projets de vie et le bien-être de toutes les personnes, quel que soit leur genre. Bien que les responsables politiques aient tendance à aborder, dans une large mesure, les questions liées au genre comme des problèmes typiquement féminins, l'abondance d'informations nous indique aujourd'hui que les coûts et les conséquences qu'entraînent les inégalités fondées sur le genre ont pris beaucoup d'envergure, et que ces questions sont devenues incontournables dans une politique générale de développement. Par exemple, si on néglige d'investir dans l'éducation des adolescentes, elles auront moins accès à l'in- formation et seront mal renseignées sur les soins appropriés à fournir à leurs enfants. Cela pourrait se traduire plus tard par de graves défaillances sur le plan nutritionnel, et ce sont les enfants qui en subiraient les conséquences. C'est même toute une génération qui en subirait les conséquences, car elle serait affectée sur les plans de la santé, du bien-être et de la productivité. De plus, lorsque les femmes sont victimes de discrimination et que les normes sociales empêchent une grande portion de la population féminine de partici- per pleinement à la société, un immense gisement de talents, de compétences et d'énergies demeure inexploité. Encore une fois, cela entraîne des consé- quences fâcheuses pour tout un pays et le freine dans sa capacité de se déve- lopper économiquement, de réduire la pauvreté et de gouverner efficacement. Le chapitre II se penchera sur un éventail de faits et de considérations portant sur les coûts que devront supporter les personnes ­ hommes et femmes ­ et la société si l'on continue à tolérer les inégalités fondées sur le genre. 71 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 72 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Notes 1. En général, la communauté internationale définit tions qui leur offrent les mêmes droits, les mêmes opportunités l'égalité des sexes comme une égalité d'opportunités et une éga- et la même influence. lité devant la loi. Par exemple, à Nairobi, en 1985, lors de la conférence portant sur les stratégies à privilégier pour faire 3. Humana (1986, 1992) se sert d'une échelle de 0-3, avancer la cause des femmes, on a défini l'égalité comme «un au lieu de l'échelle de 1-4 utilisée dans ce rapport. but et un moyen par lequel les individus ont droit au même 4. La mesure des droits en matière d'égalité politique et traitement devant la loi et aux mêmes opportunités leur per- légale pour les femmes fait référence à l'article 2 de la mettant de profiter des droits et de développer leurs talents et Déclaration universelle des droits de l'homme. Cet article pré- habiletés, en tant qu'agents actifs du développement dans la cise que toute personne est habilitée à tous les droits et à toutes société, et d'en retirer des bénéfices» (ONU, 1985, para- les libertés mentionnés dans la Déclaration, sans distinction graphes 10 et 11). La Déclaration de Beijing s'est appuyée sur aucune de race, de couleur, de genre, de langue, de religion, cette définition dans le but d'accélérer la mise en pratique des d'opinion politique, de nationalité ou d'origine, de propriété, solutions de Nairobi et d'écarter les obstacles à la participation de naissance ou d'autres statuts. En appliquant la loi, on recon- active des femmes dans toutes les sphères de la vie publique et naît que, même si les femmes jouissent d'égalité politique et privée (ONU, 1995). Pour d'autres définitions de l'égalité, légale grâce à la constitution d'un pays donné, ceci n'empêche vous pouvez consulter celles de différents organismes de déve- pas nécessairement que des inégalités puissent se glisser dans la loppement: DAC (1998), DFID (1998), OMS (1998) et pratique. La mesure de ces droits en matière d'égalité sociale et ACDI (1999). économique pour les femmes fait référence à l'article 23 (2) de Outre le terme égalité des sexes, on rencontre parfois le terme la Déclaration. Cet article établit que toute personne, sans dis- équité des sexes utilisé dans des contextes portant sur le dévelop- crimination, a droit à une rémunération égale pour un travail pement. Bien qu'ils soient souvent employés l'un pour l'autre, égal. La mesure sur l'égalité des sexes en matière de procédures équité s'apparente plus à l'idée d'honnêteté qu'à celle d'égalité. de mariage et de divorce se réfère à l'article 16 (1) de la Même si les concepts d'honnêteté et de justice peuvent être Déclaration. Cet article établit que «les hommes et les femmes parties prenantes à un discours sur l'égalité des sexes, on doit sont habilités à des droits égaux lors du mariage, durant le tenir compte du fait que, selon l'interprétation culturelle de ce mariage et lors de sa dissolution». qui est «honnête», le terme pourrait être utilisé pour justifier 5. Les droits figurant dans l'indice pour les pays un comportement discriminatoire. Cependant, le terme égalité membres de l'Organisation de coopération et de développe- des sexes comporte aussi ses limites. Il pourrait être interprété ment économique (OCDE) ont été fournis afin d'établir des dans le sens où les hommes et les femmes devraient avoir les comparaisons (voir le tableau 1.1). De même que dans les mêmes objectifs et viser les mêmes résultats, alors que, même régions en voie de développement, les femmes des pays dans des conditions offrant les mêmes opportunités, les membres de l'OCDE ne connaissent pas une pleine égalité avec hommes et les femmes peuvent choisir d'atteindre des objectifs les hommes concernant leurs droits. Bien que les pays membres et des résultats différents. Puisque ces deux termes comportent de l'OCDE obtiennent des qualifications plus élevées que les chacun leur valeur et leurs limites, ce rapport, suivant la pra- pays en voie de développement pour cet indice, seulement deux tique courante de la communauté internationale de développe- pays, la Finlande et la Suède, obtiennent une note de 4 (respect ment, utilise égalité des sexes. inconditionnel de l'égalité des sexes en matière de droits) pour 2. Des faits recueillis auprès d'un grand nombre de pays l'égalité légale et politique. Aucun pays, dans le monde tant indiquent que les hommes et les femmes ont des valeurs industriel qu'en voie de développement, n'obtient la note 4 sociales distinctes et des sensibilités différentes. Par exemple, les pour l'égalité sociale et économique. hommes et les femmes peuvent avoir des points de vue diffé- 6. Entre 1985 et 1990, au Moyen-Orient, les données rents sur ce qui est acceptable ou inacceptable en matière de ont indiqué des baisses concernant les droits politiques et comportement social (grille 2.2). De façon semblable, les légaux ainsi que les droits sociaux et économiques, mais elles hommes et les femmes ont des sensibilités et des goûts diffé- n'étaient pas statistiquement significatives. rents qui se traduisent par des façons différentes de dépenser et d'investir (voir le chapitre IV). Par exemple, les femmes sont 7. Adoptée en 1979, la Convention pour l'élimination de plus portées que les hommes à investir pour les enfants. Les toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes hommes et les femmes peuvent très bien faire des choix et viser (CEDAW) est considérée comme le document officiel internatio- des résultats différents, même s'ils sont placés dans des condi- nal des droits des femmes. Il condamne toute distinction, exclu- 72 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 73 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE À L'AUBE DU XXI SIÈCLE E sion ou restriction fondée sur le genre qui affaiblirait ou annulerait cutés par les femmes se réalisent à domicile et ne font pas l'ob- les droits et libertés fondamentales des femmes (voir le jet de données pour le monde du travail. chapitre III). 14. L'indice Duncan sert à évaluer les différences concer- 8. Fondée en 1889, l'Union interparlementaire (IPU) nant les emplois. Il peut être utilisé afin d'évaluer les inégalités est l'organisation mondiale des Parlements des États souve- en matière d'emploi entre deux groupes de travailleurs (Duncan rains. Elle compte 138 membres et cinq membres associés. Il et Duncan, 1955). L'indice établit une classification de 0 à 1. s'agit d'un lieu de dialogue et de diplomatie parlementaire où Le 0 indique que les travailleurs sont employés équitablement et se rencontrent des législateurs représentant les divers systèmes de façon équivalente dans les différentes catégories d'emplois. politiques et les principales tendances politiques dans le Le 1 signifie, au contraire, une absence d'équité dans l'emploi monde. L'Union interparlementaire a les mêmes objectifs que des travailleurs. Au cours des années 1950 à 1960 et 1980 les Nations Unies et travaille en étroite collaboration avec elles. à 1990, les différences entre les hommes et les femmes dans les secteurs de l'emploi ont diminué dans le monde entier, selon 9. Le taux général de scolarisation (celui des inscrip- l'évaluation de l'indice Duncan, passant de 0,3458 à 0,3058. tions totales pour un niveau d'éducation donné, sans tenir Les différences ont disparu plus rapidement dans la distribution compte de l'âge des élèves, et exprimé comme s'il s'agissait d'un par secteur des employés masculins et féminins, passant pourcentage officiel de la population d'âge scolaire correspon- de 0,3948 à 0,3097. L'indice Duncan indiquait 0,3860 pour les dant à un niveau précis d'éducation pour une année scolaire années 1950 à 1960, tandis qu'il était de 0,3804 pour les donnée) peut dépasser 100. Ceci s'explique par le fait que le années 1980 à 1990. Mais les salaires des travailleurs ont connu numérateur, contrairement au dénominateur, ne correspond une convergence quant au profil des postes occupés, alors que pas à un groupe de jeunes d'un âge précis. Les entrées récentes, l'indice Duncan baissait, passant de 0,4421 à 0,4030 durant ainsi que les répétitions d'un même cours, peuvent expliquer le cette période (Tzannatos, 1999). fait que les numérateurs comprennent parfois des inscriptions de jeunes dont l'âge ne correspond pas à la moyenne. 15. L'étude analyse des faits provenant de dix-neuf pays développés et de 42 autres en voie de développement ou dans 10. Pour de plus amples détails concernant la façon de une économie de transition. Pour une liste complète des études calculer l'ACVI, vous pouvez consulter Murray et Lopez effectuées et des données relatives au taux de rémunération des (1996). hommes et des femmes, voir l'annexe III. 11. La mesure appelée ACVI est un calcul des «années 16. La découverte des différences fondées sur le genre de vie corrigées du facteur invalidité». Il correspond à la pro- en ce qui concerne les heures de travail influence le taux de portion de la population survivant à chaque âge, calculée à par- rémunération des femmes par rapport à celui des hommes. tir des taux de naissances et de décès, et de la fréquence de Par exemple, Rice (1999) estime que, au Danemark et au chaque sorte d'incapacité, qui peut varier selon l'âge. Le Portugal, la différence entre ce que gagnent les hommes et les nombre de survivants correspondant à chaque âge est alors femmes n'est pas aussi marquée qu'elle le paraissait avant la ajusté vers la base par la somme de tous les effets dus à des inca- mise au jour des différences, tandis qu'en Allemagne, on pacités, de façon à obtenir un graphique représentant une espé- constate l'inverse. Cependant, au moins la moitié des pays rance de vie qui tient compte du facteur d'invalidité. Pour de présentant un rapport de rémunérations selon le genre ne plus amples détails, voir OMS (2000). rapportent pas de rémunération à l'heure, surtout dans les 12. Il s'agit de calculs effectués par le personnel de la pays en voie de développement. Pour des renseignements sur Banque mondiale. Ces calculs sont faits à partir des données les estimations des pays membres de l'Organisation de coopé- d'un sondage particulièrement signifiant réalisé dans les régions ration et de développement (OCDE), vous pouvez consulter rurales du Bangladesh au cours des années 1991 et 1992. (Pour Blau et Khan (1992). plus de renseignements sur les données du sondage, vous pou- vez consulter Khandker, 1998; Pitt et Khandker, 1998). 17. Il y a d'importantes lacunes au niveau de l'infor- mation pour la plupart des pays d'Europe de l'Est, de sorte 13. Les statistiques concernant les travailleurs et les tra- que nos renseignements proviennent des cinq pays suivants : vailleuses ont tendance à sous-estimer la participation des l'Albanie, la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne et la Roumanie. femmes dans les activités économiques, en particulier dans les La chute abrupte de la représentation des femmes au Parle- pays les moins développés. Quelques-unes des différences entre ment s'explique par l'abolition, en Europe de l'Est, du quota les sexes qui ont pu être évaluées ont fait surface dans le monde de 25 à 33 % relatif à cette représentation. Cette baisse est du travail. Il faut dire que la plus grande partie des travaux exé- survenue précisément au moment où les Parlements natio- 73 Chapitre 1 16/06/03 14:49 Page 74 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE naux ont commencé à jouer un rôle actif dans les gouverne- hommes chez les pauvres, mais ce n'est pas le cas chez les riches. ments de ces pays. Dans d'autres petits groupes de pays ­ au Bangladesh, au Brésil, au Burkina Faso, au Ghana et au Kenya ­, le taux de mortalité 18. En Asie du Sud, les femmes détiennent moins de des femmes dépasse celui des hommes chez les riches, mais pas 1% des postes ministériels (PNUD, 2000). En comparaison, chez les pauvres. Il faut noter toutefois que le taux de mortalité elles occupent 4% de ces postes au Moyen-Orient et en chez les riches n'est qu'un tout petit peu plus élevé que chez les Afrique du Nord, 6% en Asie de l'Est et dans le Pacifique, pauvres, de telle sorte que les niveaux absolus de mortalité chez environ 8% en Afrique subsaharienne, en Europe de l'Est et en les riches demeurent bas pour les deux sexes. Asie centrale, et 13% en Amérique latine et dans les Antilles. 22. On se fie de plus en plus à la consommation, plutôt 19. L'étude analyse des faits provenant de 57 sondages qu'aux revenus, pour évaluer la pauvreté, en particulier dans les sur la démographie et la santé réalisés au cours des années 1990. Dans certains cas, plusieurs sondages ont été pays en voie de développement. En effet, les revenus peuvent effectués pour un le compte d'un particulier (Filmer, 1999). varier d'une année à l'autre, tandis que la consommation demeure plus stable. Elle s'avère donc plus appropriée pour 20. Les études sur les mesures des niveaux de vie et sur les mesurer le bien-être à long terme. En outre, il est plus facile de dimensions sociales de l'ajustement sont des sondages portant sur commettre des erreurs dans l'évaluation des revenus que dans la consommation et les dépenses au sein des foyers. Ces enquêtes celle de la consommation. Cependant, pour évaluer avec jus- sont faites dans un certain nombre de pays en voie de développe- tesse le bien-être des individus dans une famille, il faut tenir ment où il existe une économie de transition, avec le soutien de la compte du fait que les revenus et la consommation comportent Banque mondiale. Les données, analysées par le personnel de la tous les deux leurs limites. En particulier dans les régions Banque mondiale, proviennent des pays suivants: Arménie, rurales des pays en voie de développement, un grand nombre Bulgarie, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Djibouti, Égypte, Équa- d'éléments des revenus d'une famille sont le produit de tous ses teur, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Jamaïque, membres, comme sur une ferme, par exemple. Au sein d'une Kazakhstan, Kenya, Madagascar, Mauritanie, Népal, Nicaragua, famille dont tous les membres travaillent dans la même entre- Niger, Ouganda, Pakistan, Panama, Pérou, Roumanie, Russie, prise, il n'est pas facile de préciser qui gagne et qui consomme, Sénégal, Afrique du Sud, Tanzanie et Viêt-Nam. Ces travaux ont et l'on peut difficilement déterminer le revenu de chacun. été effectués au cours des années 1990. 23. Des différences importantes relatives à la méthodo- 21. Les estimations à partir des données des sondages sur logie ne permettent pas d'établir des comparaisons fiables entre la démographie et la santé, au sujet de la mortalité infantile, différentes études. Pour un résumé portant sur des questions nous ont été gracieusement fournies par Jeffrey Hammer du méthodologiques et une analyse de la responsabilité, consultez Groupe de recherches sur le développement de la Banque mon- Rosenhouse (1989) et Lampietti et Stalker (2000). diale. Dans la plupart des pays où les données laissent entendre que les hommes sont plus avantagés chez les pauvres que chez 24. Une analyse d'un sondage, réalisé en 1991-1992 les riches, le taux de mortalité des femmes par rapport à celui dans les régions ruralles du Bangladesh, touche le problème des hommes est de moins de 1, autant chez les riches que chez d'une meilleure alimentation pour les hommes et souligne que les pauvres. Ceci indique un taux de mortalité plus bas chez les ce favoritisme cesse une fois passé l'effort physique supplémen- femmes que chez les hommes, bien que l'avantage en faveur des taire qui était exigé. Pour de plus amples détails, consultez femmes soit plus ténu chez les pauvres que chez les riches. Dans Khandker (1998) et Pitt et Khandker (1998). un petit nombre de pays ­ dont le Bénin, la République domi- nicaine, Madagascar, le Niger et le Pérou ­, le taux de morta- 25. Une étude démographique provenant de l'Inde laisse lité des femmes par rapport à celui des hommes est au-dessus entendre que le taux de mortalité des veuves de 45 ans et plus cor- de 1 chez les pauvres et de moins de 1 chez les riches. Cela respond à presque le double de celui des femmes mariées du signifie que le taux de mortalité des femmes dépasse celui des même âge (Mari Bhat, 1994, cité par Drèze et Srinivasen, 1998). 74 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 75 CHAPITRE II Les inégalités fondées sur le genre nuisent au développement L ES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE SAPENT LES FONDEMENTS du développement. Toute stratégie de développement efficace doit donc comprendre des mesures favorisant l'égalité entre les sexes. Les inégalités criantes en matière de droits, d'accès aux ressources et d'influence politique tou- chent directement les femmes, mais affectent la société entière, car elles empê- chent son plein développement. De plus, les inégalités fondées sur le genre entraînent des coûts élevés difficiles à assumer, particulièrement pour les pays à faibles revenus, sans compter qu'elles affectent davantage les personnes pauvres. Les coûts les plus élevés que doivent assumer les personnes sont sans doute les torts faits à la vie humaine et à leur qualité de vie. Il n'est pas toujours facile d'identifier et d'évaluer ces coûts avec précision, mais des données provenant de partout dans le monde démontrent que les sociétés où perdurent des inégalités fondées sur le genre, qui se traduisent par un accroissement de la pauvreté, de la malnutrition, de la maladie, des privations et d'autres fléaux semblables, doi- vent défrayer les coûts qui leur sont associés. Dans ce chapitre, nous tenterons d'évaluer les frais que ces inégalités impo- sent aux hommes, aux femmes et aux enfants des pays en voie de développe- ment. Nous démontrons d'abord leurs impacts négatifs sur le bien-être et la santé des gens. Par exemple, les inégalités fondées sur le genre touchant la sco- larisation et l'emploi en milieu urbain accélèrent l'expansion du sida en Afrique subsaharienne. L'analphabétisme et le manque d'autonomie des mères ont des répercussions directes sur leurs jeunes enfants. Bien qu'ils soient béné- fiques à certains égards, les rôles traditionnellement dévolus à chaque genre créent des attentes et exercent des pressions néfastes sur les hommes, les femmes et les enfants. Lors de crises, comme ce fut le cas pour les pays de l'Europe de l'Est ayant des économies de transition, le chômage a rapidement pris des proportions alarmantes, ce qui a provoqué une anxiété générale chez 75 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 76 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE la population masculine. Cette anxiété a entraîné une augmentation de l'al- coolisme, du suicide, de la violence conjugale et de l'éclatement des familles. Ces fâcheuses conséquences affectent à leur tour les femmes et les enfants. Encore aujourd'hui, un grand nombre (sinon la majorité) des coûts liés à la discrimination entre les sexes demeurent cachés tandis que les individus souf- frent en silence. Il y a trois raisons pour lesquelles l'évaluation de ces coûts est souvent négligée. D'abord, les renseignements personnels détaillés sont dispen- dieux et difficiles à obtenir. Ensuite, certains thèmes sont considérés comme trop délicats et les gouvernements répugnent à les aborder dans des sondages. Enfin, il arrive souvent que les responsables politiques choisissent d'ignorer les informations qui soulignent les disparités fondées sur le genre. En encourageant le développement, on cherche à améliorer la qualité de vie des personnes. Puisqu'elles affectent la qualité de vie des gens, les inégalités fondées sur le genre ont donc une incidence sur le développement. Elles com- portent un coût indirect en gênant la productivité, le rendement et le progrès économique. Parce qu'elle suscite des obstacles à la présence des femmes sur le marché du travail, et parce qu'elle interdit systématiquement aux hommes ou aux femmes l'accès à certaines ressources, à des services publics et à des activités de production, la discrimination fondée sur le genre nuit à l'écono- mie en l'empêchant de croître et de subvenir aux besoins des gens. Dans ce chapitre, nous voulons prouver la véracité de ces assertions en nous basant sur des faits de la vie courante. Par exemple, au Kenya, si les femmes avaient droit à la même instruction que les hommes et si on leur permettait de gérer la ferme familiale au même titre que leur mari, les exploitations verraient leur rendement actuel augmenter de 20 %. Nous nous intéressons aussi aux résul- tats d'études macro-économiques qui sont de plus en plus nombreuses à se pencher sur la relation entre l'égalité des sexes et la croissance économique. Enfin, les inégalités fondées sur le genre contribuent à affaiblir l'exercice de l'autorité dans un pays et, par conséquent, l'efficacité de ses politiques de développement. De récentes recherches sur la corruption suggèrent que pro- mouvoir l'égalité des sexes s'avère un excellent moyen d'assainir les gouver- nements et le monde des affaires. Les inégalités affectent le bien-être I L N'EST PAS SIMPLE D'ÉVALUER LE BIEN-ÊTRE DES GENS. SEN (1984) conclut que «le bonheur et la satisfaction des désirs sont deux ingrédients particulièrement importants du bien-être personnel » (p. 32). Cette définition indique que le bien-être comporte plus d'une dimension, qu'il englobe plusieurs aspects de la vie et qu'il est une notion très subjective. 76 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 77 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT On a traité, dans le chapitre I, de certains aspects du bien-être. On l'a mesuré au moyen d'indicateurs d'égalité des sexes : droits accessibles, espé- rance de vie, scolarisation et participation politique. Dans ce chapitre, nous présentons quelques thèmes choisis et nous montrons comment ils agissent sur les rôles traditionnellement dévolus à chaque genre et sur la discrimina- tion présente dans la société. Nous nous basons sur des faits affectant les hommes et les femmes d'aujourd'hui en pensant aux jeunes de demain. Les hommes sont pénalisés aussi Bien que les femmes, en particulier les plus pauvres, portent l'essentiel du fardeau des inégalités fondées sur le genre, les hommes ne peuvent éviter d'en subir les conséquences. Des droits inégaux en matière d'accès au crédit ou de possession de biens fonciers privent les femmes de ressources pour leur sub- sistance d'aujourd'hui et leur sécurité de demain tout en augmentant leur dépendance envers leur famille. Les écarts importants entre les hommes et les femmes concernant la scolarisation font en sorte que chacun communique, analyse ou obtient de l'information de manière différente. Au moment de prendre des décisions familiales, la répartition déséquilibrée des ressources et du pouvoir influence inévitablement l'autonomie et l'autorité respectives des hommes et des femmes. Les attitudes stéréotypées et la dépendance qui en résultent peuvent causer de regrettables conséquences, dont un sentiment généralisé d'anxiété et d'impuissance qui paralyse et opprime les gens. Ici, nous nous intéressons notamment au sida et à la violence conjugale. L'épidémie du sida. Les inégalités fondées sur le genre favorisent la propa- gation du sida (tableau 2.1). Dans une étude sur les principales villes de 72 pays en voie de développement, on a découvert deux indices sociaux d'iné- galité liés à l'augmentation du taux d'infection, tant chez les adultes à risque élevé que chez ceux à risque moins élevé, et cela, en tenant compte de six autres facteurs socio-économiques (Over, 1998). Parmi les adultes à risque élevé (les travailleurs du sexe et les patients traités pour des maladies sexuellement trans- missibles), lorsque les hommes sont considérablement plus nombreux que les femmes dans un milieu urbain donné et correspondent au groupe d'âge le plus actif sexuellement, cela constitue un indice signifiant d'un taux d'infection plus élevé. En effet, un rapport hommes-femmes aussi élevé que 1,2 entraîne une demande accrue pour des faveurs sexuelles monnayées per capita, ce qui contribue à répandre le VIH à l'intérieur comme à l'extérieur du petit bassin des travailleurs du sexe (composé surtout de femmes). Parmi les adultes à faible risque, telles les femmes enceintes, le taux d'infection est plus élevé dans les villes où l'on constate un écart important entre les sexes en matière de scolari- sation. Dans des analyses de régression communes, chacune de ces deux variables s'est avérée significative statistiquement. 77 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 78 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 2.1 Les inégalités fondées sur le genre favorisent la propagation du sida Prévalence du VIH dans la population adulte urbaine 35 35 20 20 logarithmes) logarithmes) (en 5 (en 5 Pourcentage 1 Pourcentage 1 0 0 0,7 0,9 1,1 1,3 1,5 0 10 20 30 Rapport hommes-femmes, 20 à 39 ans Écart entre les taux d'alphabétisation hommes- femmes (en pourcentage) Note : Les données englobent 72 pays (32 en Afrique subsaharienne, 20 en Amérique latine et aux Antilles, 15 en Asie, 4 au Moyen-Orient et 1 pays industrialisé). Chaque point représente les données pour un pays donné, et ne tient pas compte des variables sociétales qui sont incluses dans l'ana- lyse de régression (la religion, le PIB per capita, l'indice d'inégalité pour le revenu, la proportion de la population qui est née à l'étranger). Voir l'an- nexe I pour connaître les pays concernés. Source : Over (1998). Comme nous l'avons vu au chapitre I, l'épidémie du sida devrait se répandre rapidement dans les pays en voie de développement au cours des prochaines décennies, jusqu'à ce qu'une femme sur quatre et un homme sur cinq en soient atteints. Cette situation a déjà cours dans certains pays de l'Afrique subsaharienne. Dans les pays fortement atteints, ce sont les femmes qui auront le plus haut taux de mortalité. Elles devront porter le fardeau de la maladie et leur statut économique en souffrira. En effet, puisque ce sont surtout les femmes qui prodiguent les soins aux enfants et aux malades, l'épi- démie les empêchera d'avoir un revenu et les obligera à se consacrer aux soins des orphelins et des personnes infectées. Les gouvernements peuvent aider les femmes ­ et autres victimes du sida ­ en adoptant des politiques de prévention et de réduction de la maladie. La plupart des gouvernements préfèrent ne pas soulever les problèmes de sexua- lité et d'usage de drogues intraveineuses, mais quelques-uns, comme le Sénégal et la Thaïlande, encouragent les personnes susceptibles de contrac- ter et de transmettre le VIH à adopter des comportements plus sécuritaires. 78 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 79 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT Les bénéficiaires immédiats de ces mesures sont des groupes d'hommes, tels les soldats, les marins et les chauffeurs de poids lourds, ainsi que des groupes de femmes, telles les prostituées et les employées dans les hôtels et les res- taurants. Par exemple, une intervention réalisée par un groupe de recherche médicale à Calabre, au Nigeria, est à l'origine d'un syndicat regroupant les travailleurs du sexe. Ce syndicat insiste sur l'usage du préservatif et protège ses membres des abus des policiers et des grands propriétaires (Esu-Williams, 1995). Pour freiner l'épidémie qui commence à se répandre en dehors des groupes les plus à risque, les gouvernements doivent instituer des politiques qui améliorent le statut relatif des femmes, c'est-à-dire des politiques qui visent à combler l'écart entre les sexes concernant l'éducation et l'emploi, et qui créent de nouveaux emplois pour les femmes dans les grands centres urbains (Banque mondiale, 1999a). La violence et le genre. Il n'est pas facile de déterminer jusqu'à quel point la violence peut être liée au genre. D'un point de vue radical, pratiquement toute violence, à l'exception de celle causée par la guerre, pourrait être attribuée au genre1. La violence entre deux hommes peut être interprétée comme leur façon de résoudre les conflits. Celle entre un homme et une femme peut être vue comme l'expression d'un besoin chez l'homme de renforcer les rôles tradition- nels attribués au genre2. Ces rôles sont bien enracinés et sont exacerbés par des rapports de force déséquilibrés entre les hommes et les femmes, notamment au niveau de la force physique. Par exemple, selon une étude récente réalisée au Bangladesh, les hommes ont tendance à considérer le fait de battre leur femme comme leur droit, et même comme un moyen efficace de maîtriser la «nature indisciplinée» des femmes (Narayan et al., 2000). Dans certains pays d'Amérique latine et dans les Antilles, la violence conjugale chronique, l'infi- délité et les abandons dans le cas des unions libres sont caractéristiques du machismo. La culture machiste se manifeste aussi par des relations agressives et très intransigeantes entre les hommes (Sara-Lafosse, 1998). En temps de guerre, le viol et les autres violences faites aux femmes ont souvent tenu lieu d'armes servant à terroriser et à humilier l'ennemi (Turshen, 1998). Cela peut paraître invraisemblable, mais il est prouvé que les stéréotypes et les attentes liés au genre sont à l'origine de réactions et de comportements conduisant à la violence. Les attentes traditionnelles envers les hommes, selon lesquelles ils sont les principaux pourvoyeurs et chefs de famille, peuvent avoir causé beaucoup d'anxiété parmi la population masculine des économies de transition. En Russie, une étude épidémiologique associe l'accroissement mar- qué du taux de mortalité chez les hommes entre 1990 et 1997 au stress accru et aux dépressions nerveuses dus aux pertes d'emploi (Gavrilova et al., 1999). Les taux de maladies cardio-vasculaires, de suicides, de violence conjugale et d'alcoolisme sont beaucoup plus élevés chez les hommes que chez les femmes. 79 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 80 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Dans presque tous les pays d'Europe de l'Est, l'espérance de vie des hommes a connu une baisse beaucoup plus importante que celle des femmes depuis le commencement d'une économie de transition (UNICEF, 1999b). Dans le cadre d'une étude de la Banque mondiale intitulée La parole est aux pauvres ­ Écoutons-les, on a recueilli des témoignages auprès d'hommes et de femmes en Géorgie qui appuient et confirment ces statistiques. «Un vague sentiment de castration et d'échec assaille les hommes et leur fait éprouver toute une gamme de malaises physiques menant à une inquiétante flambée de mortalité, d'alcoolisme, de violence envers les femmes et les enfants, de divorce et d'abandon des foyers» (Narayan et al. 2000, p. 194). D'autres interviews réalisées en Lettonie et en Macédoine (ancienne Yougoslavie) présentent des situations analogues. Ce sont avant tout les familles qui souffrent. La violence peut favoriser un climat de léthargie, de dépression, d'abus de drogues et d'alcool et, surtout, elle peut causer une perte de l'estime de soi (Heise, Ellsberg et Gottemoeller, 1999). Il est difficile de calculer ces coûts avec exactitude, car plusieurs dimensions de la vie sont affectées, et il n'est pas facile d'établir une relation de cause à effet. Il s'avère aussi difficile d'évaluer correctement les consé- quences négatives sur les enfants qui deviennent orphelins, ou qui souffrent cruellement d'être séparés de leurs parents; ou encore, qui doivent être témoins de violence conjugale. C'est leur développement émotionnel, et même leur survie, qui sont mis en jeu. La violence entraîne d'autres conséquences négatives dont le coût est diffi- cile à évaluer: baisse de la productivité, absentéisme au travail, augmentation du nombre de sans-abri, demande accrue de services de soutien médical et communautaire, dépenses plus élevées en services judiciaires et de protection civile. Voici tout de même quelques estimations: la violence familiale équi- vaut à une réduction de la rémunération des femmes, correspondant à plus de 2% du PIB du Chili en 1996, et à une réduction de 1,6% au Nicaragua (Morrison et Orlando, 1999). La violence faite aux femmes coûte environ un milliard de dollars par année au Canada, soit 1% du PIB (Day, 1995). Mais une autre étude canadienne soutient que le coût réel est trois fois plus élevé, s'élevant à 3,2 milliards pour 1993 (Greaves, Hankivsky et Kingston- Riechers, 1995, cités par Buvinic, Morrison et Shifter, 1999), ce qui laisse deviner les difficultés associées au calcul de ces coûts. L'impact sur les générations futures Les inégalités fondées sur le genre qui se perpétuent affecteront également les générations futures. Dans le chapitre I, on traitait du profond déséqui- libre causé par le taux de masculinité élevé dans certains pays d'Asie de l'Est et du Sud, une des manifestations les plus claires de la discrimination fondée 80 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 81 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT sur le genre. Il en existe d'autres. La mère joue un rôle fondamental dans les premières années de vie de son enfant, et c'est pendant cette période que le germe de la discrimination est semé pour les générations futures. L'influence d'une mère sur son enfant commence avant la naissance, se prolonge au cours des années préscolaires et pendant l'enfance. Des conditions précaires de santé et une alimentation déficiente peuvent avoir des conséquences dévastatrices sur sa grossesse et sur sa capacité d'allaiter son enfant. L'influence de la mère est décisive pour le développement physique et intel- lectuel de l'enfant. Lorsqu'une mère est analphabète et manque d'autono- mie, elle perd confiance en elle, ce qui diminue sa capacité de prendre soin de son enfant et de l'éduquer. Un enfant qui connaît des lacunes sur le plan de son développement mental, émotionnel et intellectuel peut difficilement se rattraper (Currie, 1999; Deutsch, 1998). Et pour un enfant vivant dans une situation de pauvreté (accès limité aux soins de santé et aux services de garde), sa mère constitue son seul moyen de défense. Alimentation déficiente, mortalité infantile élevée. La majorité des parents prennent à coeur le bien-être de leurs enfants, mais ils ne se rendent pas toujours compte des conséquences de leurs actions ou omissions. Le degré d'éducation de la mère influence en grande partie la qualité de l'ali- mentation et des soins qu'un enfant reçoit. La scolarisation a aussi un impact sur la capacité de la mère à défendre son enfant contre les adversités de la vie, contre les variations dans les prix, par exemple, qui pourraient influer sur l'alimentation (Thomas et Strauss, 1992). Dans le monde en voie de déve- loppement, il existe une triste corrélation entre la scolarité moyenne des mères et la mortalité infantile. Les derniers sondages sur la démographie et la santé, réalisés dans plus de 40 pays en voie de développement, démontrent que le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans est plus bas dans les familles où les mères ont fréquenté l'école primaire que dans celles où les mères n'ont pas été scolarisées, et ce taux chute encore lorsque ces dernières ont fait des études secondaires. Parce qu'il existe une relation positive formelle entre le niveau d'éducation et les indicateurs économiques, la corrélation entre l'éducation de la mère et la mortalité infantile pourrait s'avérer inexacte ou, du moins, plus faible que les chiffres ne le suggèrent. Une analyse plus poussée des données de son- dages portant sur d'autres facteurs socio-économiques pourrait éclaircir davantage cette corrélation. Plusieurs analyses publiées dans les années 1980 ont conclu que plus les mères sont instruites, moins il y a de mortalité infan- tile, et cela, même si l'on tient compte d'autres facteurs socio-économiques comme le revenu familial (Jejeebhoy, 1995; Schultz, 1993). Selon une ana- lyse plus récente de données provenant de sondages effectués dans 22 pays, on met en doute cette conclusion, car l'insertion de la variable des pro- 81 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 82 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE grammes sociaux réduit considérablement le coefficient de scolarisation des mères (Desai, 1998). Malgré tout, on estime que ce facteur joue un rôle important dans la promotion de mesures favorables à la santé des enfants, comme la vaccination, par exemple. Des études réalisées dans des familles confirment cette découverte. Aux Philippines, dans des communautés dépourvues d'aqueducs, éloignées des services de santé et où les services sanitaires font défaut, la scolarisa- tion des femmes a une incidence sur la santé de leurs enfants (Barrera, 1990). Au Guatemala, les mères plus scolarisées sont plus susceptibles d'utiliser les services de garde pour leurs enfants et de s'assurer qu'ils reçoivent tous leurs vaccins (Pebley, Goldman et Rodriguez, 1996). Dans les centres urbains du Niger et du Nigeria, ce sont les femmes scolarisées qui veillent à la vaccination de leurs enfants (Gage, Sommerfelt et Piani, 1997). Cette relation entre la scolarité des mères et le taux de vaccination de leurs enfants se fait de plus en plus évidente partout dans le monde. Dans le tableau 2.2, les taux de vaccination des enfants sont en corrélation avec un seul facteur, soit la scolarisation des mères. L'accent n'est pas mis sur les années de scolarité, mais plutôt sur l'effet concret produit, soit la vac- cination des enfants. Dans toutes les régions, mais de façon plus spéci- fique en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne, où les revenus sont les Tableau 2.2 Le taux de vaccination des enfants augmente avec le niveau d'instruction de la mère Enfants de 12 à 23 mois qui ont été vaccinés, par rapport au niveau d'instruction de leur mère 100 80 60 40 Pourcentage 20 0 Asie de l'Est Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles Nord Pas d'instruction Instruction primaire Instruction secondaire et plus Note : Toutes les valeurs régionales sont des moyennes démographiques pondérées. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés. Source : Démographie et Santé; Banque mondiale (1999d). 82 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 83 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT plus bas, la proportion des enfants vaccinés est plus élevée pour les femmes qui ont fréquenté l'école secondaire que pour celles qui ont seu- lement fréquenté l'école primaire, et elle est beaucoup plus élevée que pour les femmes n'ayant aucune scolarité. L'écart entre les hommes et les femmes en matière d'éducation n'est pas le seul élément dont il faut tenir compte pour mesurer le bien-être des enfants. Il importe aussi que le pouvoir au sein du foyer soit également réparti entre le père et la mère. Au Brésil, on a constaté qu'un revenu additionnel admi- nistré par la mère signifie beaucoup plus de soins et de nourriture pour les enfants que s'il est administré par le père (Thomas, 1990, 1997). Des reve- nus familiaux plus élevés se traduisent par des améliorations au niveau de la courbe de croissance et des chances de survie des enfants, peu importe la per- sonne qui administre ces revenus. Mais les conséquences positives pour les enfants s'avèrent nettement plus substantielles si ces revenus sont adminis- trés par la mère. L'impact marginal du revenu des femmes est 20 fois plus grand que celui des hommes sur la survie des enfants, huit fois plus grand sur l'indice de masse corporelle et quatre fois plus grand sur la courbe de croissance. Lorsque ce sont les femmes qui administrent des revenus addi- tionnels, la part du budget familial allouée aux dépenses dans les domaines de l'éducation, de la santé et de l'alimentation est nettement majorée. En Côte d'Ivoire, quand la part du revenu familial attribuée à la femme aug- mente, la portion du budget familial allouée à la nourriture augmente consi- dérablement, tandis que les dépenses en cigarettes et en alcool diminuent. On a fait cette découverte en tenant compte de la moyenne des dépenses per capita, de la taille de la famille et de son importance sociale (Hoddinott et Haddad, 1995). Au Bangladesh, les emprunts effectués par des femmes auprès de la Grameen Bank et d'autres institutions financières ont plus d'impact sur le bien-être des enfants que ceux qui sont faits par des hommes. Les emprunts effectués par des femmes ont une incidence sur l'inscription des enfants à l'école et ont un impact stastistiquement significatif sur l'alimentation des gar- çons et des filles (Khandker, 1998; Pitt et Khandker, 1998). Ces renseignements ont été recueillis auprès des familles. Que révèlent les études effectuées à l'échelle de pays entiers? Le rapport de causalité ­ étudié plus loin dans ce chapitre ­ est plus difficile à établir au niveau d'un pays entier, le contrôle des données s'avérant plus compliqué. Cependant, d'après certaines études qui tiennent compte du revenu per capita et d'autres fac- teurs, mais qui touchent sommairement le rapport de causalité, on arrive tout de même à la conclusion qu'un taux de scolarisation plus élevé chez les femmes fait presque automatiquement baisser le taux de mortalité infantile. Par exemple, une étude sur la scolarisation des femmes fait ressortir qu'une augmentation de 10% dans l'inscription des femmes à l'école primaire cor- 83 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 84 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE respond à une diminution de la mortalité infantile équivalant à 4,1 décès sur 1 000 naissances, et cela, en tenant compte de facteurs comme le PIB per capita. La même augmentation d'inscriptions de femmes au niveau secon- daire se traduit par une diminution de 5,6 décès sur 1 000 naissances (Hill et King, 1995). En plus de leurs effets sur la scolarisation, les inégalités entre les hommes et les femmes concernant l'éducation entraînent d'autres conséquences. Selon l'étude mentionnée ci-dessus, les pays où les filles ont deux fois moins de chances que les garçons de fréquenter l'école perdent en moyenne 21,1 enfants pour 1 000 naissances par rapport aux pays qui n'ont pas d'écart fondé sur le genre (Hill et King, 1995). Une autre étude indépendante sou- tient que, si l'Afrique subsaharienne accusait le même taux de scolarisation femmes-hommes que l'Europe de l'Est ­ c'est-à-dire presque l'égalité ­, son taux de mortalité pour les enfants de moins de cinq ans diminuerait de plus de 25% par rapport à 1990 (167 par 1 000), et cela, en tenant compte du revenu, des niveaux de scolarisation et d'autres différences régionales (Klasen, 1999a). Dans une étude récente, menée dans 63 pays, on conclut que c'est surtout grâce aux gains des femmes en éducation que le problème de la malnutrition a diminué entre 1970 et 1995, ces gains étant responsables de 43% des amé- liorations (Smith et Haddad, 2000)3. Des changements dans le statut relatif des femmes, mesurés en termes d'espérance de vie féminine à la naissance comparée à celle des hommes, ont contribué à ces améliorations à hauteur de 12%4. Cet impact plutôt modeste du statut de la femme reflète le peu d'améliorations apportées à ce dernier, et non pas le peu d'importance de ce statut sur la diminution de la malnutrition. En Asie du Sud, où le statut de la femme s'est considérablement amélioré, les gains obtenus par les femmes sont à l'origine de 23% de la réduction de la malnutrition. Par contre, en Afrique subsaharienne, un déclin du statut relatif des femmes a contribué à affaiblir l'impact d'autres facteurs sur la malnutrition. Comme le mentionne une autre étude, l'autonomie est un facteur déter- minant du statut relatif des femmes (Boone, 1996). L'autonomie féminine se définit comme la capacité des femmes de diriger leur propre vie, de prendre des décisions et d'avoir de l'influence sur les projets qui les concernent. Cette étude révèle que, parmi les impacts du revenu per capita, une plus grande autonomie des femmes correspond également à un taux de mortalité infan- tile plus bas5. Une chute d'un seul point à l'indice de l'autonomie, passant de 4 (le degré d'autonomie le plus faible) à 3, permettrait d'espérer une diminution de 50% de la mortalité infantile dans les pays où le revenu per capita est de 500$ ou moins. 84 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 85 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT Ces résultats démontrent clairement le rôle primordial que jouent les mères dans les premières années de la vie de leurs enfants. Ils nous font prendre conscience du prix que nous devrons payer si nous maintenons les femmes dans l'analphabétisme et si nous les privons d'informations et de ressources. Fécondité et développement. L'impact de l'accroissement de la population sur le développement n'est pas le même partout. Dans les pays les plus pauvres déjà menacés par la famine, par des pénuries de logements et par la dégradation de l'environnement, une augmentation de la natalité peut aggra- ver les effets néfastes de la pauvreté sur les enfants. Par exemple, l'impact de l'alphabétisation des femmes sur les problèmes de malnutrition est égale- ment lié au taux de fécondité. Une plus grande instruction des femmes est associée à des problèmes de croissance chez les enfants lorsque aucun moyen de contraception n'est utilisé. Mais il en va tout autrement lorsque, grâce à leur instruction, les femmes peuvent contrôler leur fécondité (Klasen, 1999b). L'augmentation de la fécondité semble donc liée à des enfants sous- alimentés, rachitiques et retardés dans leur développement. Un grand nombre d'études expérimentales offrent «un soutien sans ambiguïté, quoique réservé, à la croyance largement répandue voulant que la réduction des naissances soit une conséquence d'une plus grande ins- truction des femmes et d'un accroissement de leur autonomie» (Jejeebhoy, 1995, p. 177)6. Les femmes plus instruites ont moins d'enfants que les femmes moins instruites pour plusieurs raisons. Elles se marient plus tard et ont donc moins d'années de fécondité. Elles connaissent les méthodes contraceptives, ont une plus grande confiance en elles-mêmes et se sentent capables de prendre leurs propres décisions en matière de natalité. Enfin, elles nourrissent de plus hautes aspirations pour leurs enfants et savent qu'il leur faut choisir entre la réalisation de ces rêves et avoir un plus grand nombre d'enfants. Des études comparatives entre les pays établissent la même relation entre l'instruction des femmes et la fécondité en tenant compte des différences de revenus per capita et de la moyenne d'instruction des hommes. À partir de données provenant de 100 pays en 1990, Klasen (1999b) a découvert qu'une seule année de scolarité de plus faisait chuter le taux de fécondité des femmes de 0,23 naissance. Sur une période plus longue, on obtient un résultat plus élevé: en ajoutant un an de scolarité pour les femmes et en maintenant le même niveau d'instruction pour les hommes, le degré de fécondité connaît une baisse de 0,32 naissance. En d'autres termes, si on augmentait de trois ans la scolarisation moyenne des femmes, chaque mère donnerait naissance à un enfant de moins7. 85 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 86 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Les droits spécifiques des femmes par rapport à ceux des hommes ont aussi leur importance. En utilisant des données de plusieurs pays portant sur les droits des femmes (puisées dans Humana, 1992), Gatti (1999) indique que, d'après leur degré d'instruction, plus les femmes jouissent d'un statut élevé au sein du couple, plus leur taux de fécondité est bas. Ce qu'il en coûte à la production et à la croissance économique D ANS LA SECTION PRÉCÉDENTE, NOUS AVONS ABORDÉ LE coût des inégalités fondées sur le genre pour le bien-être des gens, tant pour les hommes et les femmes d'aujourd'hui que pour les générations futures. Ces inégalités affectent la santé, les connaissances et la liberté des adultes comme celle des enfants. Elles altèrent aussi la vie des gens par le biais du développement économique. Des contraintes touchant le capital physique, l'accès à l'information ou à la possession de la terre sont autant d'embûches qui empêchent les hommes et les femmes de gagner leur vie. Et dans la mesure où la situation des mères affecte le développement intellectuel, la santé, l'alimentation et l'instruction de leurs enfants, on peut dire que ces inégalités affectent, à longue échéance, la croissance économique de tout un pays. Nous traitons, dans cette section, de l'impact des différences entre les sexes sur la scolarité des enfants, considérée ici comme un indicateur de ce que sera la main-d'oeuvre de demain. Nous parlons également des pertes de produc- tion comme étant le résultat des préjugés liés au marché du travail et d'une distribution inéquitable des biens entre les hommes et les femmes. Une scolarisation réduite entraîne des pertes d'opportunités Comme il existe une corrélation très forte entre l'instruction de la mère et le poids de naissance, la santé et l'alimentation de ses enfants, on peut affir- mer que la scolarisation de la mère est étroitement liée au succès futur des enfants. Pourquoi ? D'abord, l'instruction augmente la valeur du capital humain: des mères de famille mieux instruites deviennent de meilleures guides pour leurs enfants, elles prolongent l'école à la maison, pour ainsi dire, et elles sont pour eux des modèles à émuler. Ensuite, la réussite scolaire des mères constitue un indicateur de leurs capacités innées, lesquelles ont une influence positive sur celles de leurs enfants (Rosenzweig et Wolpin, 1994). Il va de soi qu'un niveau plus élevé d'instruction des mères favorise la réus- site de leurs enfants sur le plan intellectuel. Aux États-Unis, chaque année additionnelle de scolarité de la mère, avant la naissance de son enfant, ajoute 86 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 87 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT 1,6 point aux résultats de l'enfant en mathématiques et en lecture, et 2,1 points en vocabulaire. Lorsqu'une mère s'inscrit à l'école pendant les trois premières années de vie de son enfant, chaque année additionnelle d'études ajoute 1,7 point et 3,1 points à ces mêmes résultats (Rosenzweig et Wolpin, 1994). En Inde, les enfants dont les mères sont plus instruites étu- dient presque deux heures de plus par jour que les enfants de femmes moins instruites (Behrman et al., 1999). Ce gain entre les générations est une raison de plus pour améliorer la sco- larisation des femmes. Des niveaux d'instruction plus élevés permettent aux gens de s'ouvrir aux nouvelles technologies et d'acquérir les ressources néces- saires pour faire face aux nouveaux cycles ou crises économiques (Foster et Rosenzweig, 1995, 1996; Schultz, 1961). Une scolarisation réduite des femmes équivaut à renoncer à ce que les générations futures soient vraiment productives et mieux éduquées. Perte d'emploi L'analphabétisme et le niveau peu élevé d'instruction des femmes portent préjudice à la productivité et aux emplois, affectant à la fois les femmes et l'économie (Schultz, 1991, 1993; Psacharopoulos et Tzannatos, 1992). Le taux privé de rendement pour chaque année de scolarité supplémentaire est au moins aussi élevé chez les femmes que chez les hommes. En Bolivie, au Brésil, en Côte d'Ivoire, en Indonésie et en Thaïlande, les taux de rendement marginaux sont plus élevés pour les femmes que pour les hommes, mais sont sensiblement les mêmes en Colombie et au Pérou (Schultz, 1991). Cela implique que les femmes bénéficient plus que les hommes d'une année addi- tionnelle d'instruction ­ à cause, sans doute, de leur niveau inférieur de sco- larité ­, mais cela ne signifie pas qu'elles tirent plus d'avantages que les hommes d'un niveau égal d'instruction. Même dans les économies rurales, où le travail rémunéré est plus rare, quand on réduit les écarts entre les sexes en matière d'éducation ou d'autres ressources, la production augmente. Les fermières ne sont pas moins efficaces que les fermiers (Moock, 1976; Bindlish et Evenson, 1993; Saito, Mekonnen et Spurling, 1994; Udry, 1996)9. Lorsque le rendement d'une fermière est à la baisse, cela s'explique par son niveau moins élevé d'instruction et de res- sources. Au Kenya, si l'on ajustait les niveaux de ressources et d'éducation des femmes à ceux des hommes, le rendement de celles-ci pourrait augmen- ter de 22% (Quisumbig, 1996). Les torts causés, à court terme, par les inégalités fondées sur le genre en matière d'éducation sur la production ont aussi un effet négatif à plus long terme sur l'adoption de nouvelles techno- logies. En raison de leur niveau d'instruction inférieur, les fermières sont 87 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 88 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE moins susceptibles que les fermiers de se tourner vers de nouvelles technolo- gies agricoles permettant d'améliorer la production. Un degré d'instruction inférieur peut aussi limiter la capacité de se mettre à jour par rapport aux nouvelles technologies. Au Viêt-Nam, lors d'une for- mation sur les techniques de maîtrise des pesticides donné aux riziculteurs, les hommes, de façon générale, assimilaient mieux que les femmes les notions. Ce fait s'explique en grande partie par les différences fondées sur le genre concernant l'instruction (Chi et al., 1998). Une mauvaise distribution de la main-d'oeuvre Il existe malheureusement des préjugés et des tabous par rapport à l'em- bauche des femmes, et cela empêche les familles d'utiliser leurs ressources de façon efficace. Supposons qu'une nouvelle technologie ou un climat favo- rable ait permis une récolte extraordinaire et que de la main-d'oeuvre sup- plémentaire soit nécessaire sur les fermes. En raison d'un surcroît de travail, tant à la maison qu'à la ferme, il est possible qu'une famille désire embaucher des travailleurs supplémentaires pour oeuvrer soit à la ferme, soit à la maison, afin de permettre aux membres de la famille de travailler la terre (Gertler et Newman, 1991). Mais lorsque le marché du travail n'est pas favorable à l'em- bauche des femmes dans un milieu donné, les familles sont obligées d'em- baucher des hommes. À mesure qu'augmente l'embauche, le prix de la main- d'oeuvre grimpe et empêche les familles moins nanties d'avoir recours à des ouvriers supplémentaires pour effectuer des travaux sur leur ferme. Il se peut qu'une telle pénurie de main-d'oeuvre conduise éventuellement à l'adoption de technologies qui seront plus performantes. Mais, à court terme, ces pré- jugés contre l'embauche des femmes peuvent avoir des conséquences néga- tives sur la production. Des pertes de production peuvent aussi dépendre d'une mauvaise dis- tribution des ressources entre les hommes et les femmes au sein d'une même famille. Au Cameroun, en raison d'un déséquilibre entre les sexes concernant la maîtrise des revenus attribués aux différentes récoltes, des fermières vont préférer travailler sur leur petit lopin de sorgho, dont elles maîtrisent les revenus, plutôt qu'à la rizière, où elles ne maîtrisent rien (Jones, 1986). Pourtant, si ces femmes travaillaient à la rizière plutôt qu'au sorgho, les revenus de la famille augmenteraient d'au moins 6 %. Au Burkina Faso, les inégalités familiales concernant la distribution des fertilisants et de la main-d'oeuvre aux lopins de terre gérés par des hommes ou des femmes constituent des sources constantes de mésen- tentes et d'inefficacité, ce qui réduit leur productivité. La productivité augmenterait de 6 à 20 % si l'on redistribuait les ressources de façon plus équitable entre les hommes et les femmes (Udry et al., 1995; Udry, 88 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 89 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT 1996). Mais les coutumes liées au genre en matière de possession de la terre freinent ces améliorations. En ce qui concerne les secteurs rémunérés formels, on peut observer deux manifestations de discrimination entre les sexes sur le marché du tra- vail. D'abord, partout dans le monde, les salaires des femmes sont en moyenne plus bas que ceux des hommes. Ensuite, les hommes et les femmes connaissent une ségrégation professionnelle puisqu'ils sont divisés en deux groupes, selon les types d'emploi (voir le chapitre I). Voici quelques exemples de discriminations plus ou moins conscientes qui découlent de ces manifestations : · On est davantage enclin à investir pour des garçons que pour des filles. · Un déséquilibre au niveau de l'embauche et des salaires de la part des employeurs. · Le harcèlement sexuel au travail, qui crée une atmosphère pénible, voire dangereuse, et contribue à faire baisser le moral et le niveau de productivité. · L'éducation des enfants et l'entretien de la maison, qui relèvent surtout des femmes. · Des normes sociales ou religieuses, qui ne permettent pas aux femmes de travailler à l'extérieur du foyer et qui restreignent leurs choix d'emploi. · Des lois sur les conditions de travail, promulguées dans le but de proté- ger les femmes, mais qui les empêchent plutôt d'accéder à certains emplois. Cela signifie que ce sont les normes et les préjugés qui déterminent l'offre et la demande de la main-d'oeuvre dans une économie donnée plutôt que l'efficacité réelle des personnes. Et la mauvaise distribution du travail qui en résulte démontre que des femmes réellement compétentes sont laissées pour compte uniquement à cause de leur genre. Très peu d'études se sont penchées sur l'impact probable de la discrimi- nation au travail sur l'économie. Ceci est compréhensible, compte tenu de toutes les informations que ce travail exige et du nombre toujours gran- dissant d'hypothèses nécessaires à sa réalisation. Tzannatos (1999) nous brosse un tableau sommaire d'une telle estimation dans les pays d'Amérique latine et des Antilles (grille 2.1)11. Sa méthode d'analyse com- prend d'abord une estimation du PIB qui tient compte des différences qui existent au niveau des professions et des salaires pour les industries de chaque pays. Il reprend ensuite l'estimation du PIB en supposant que la discrimination professionnelle dans les industries est éliminée. La diffé- rence entre les deux estimations du PIB est censée correspondre aux amé- liorations potentielles ou maximales du bien-être en rapport avec l'égalité familiale et professionnelle. 89 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 90 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Grille 2.1 Les hommes perdraient (un peu) et les femmes gagneraient beaucoup avec l'équité salariale % des gens qui doivent Pourcentage du changement en : Pays et années de la changer d'occupation pour collecte des données Salaire (femmes) Salaire (hommes) Rendement (PIB) atteindre l'équité salariale Argentine (1987) 38 ­9 4 25 Bolivie (1989) 50 ­9 6 28 Brésil (1980) 96 ­8 9 23 Chili (1987) 41 ­6 3 18 Colombie (1988) 46 ­8 5 20 Costa Rica (1989) 35 ­6 3 18 Équateur (1966) 59 ­13 9 37 Guatemala (1989) 25 ­6 2 14 Jamaïque ( 1989) 61 ­8 8 28 Uruguay (1989) 30 ­8 3 16 Venezuela (1987) 24 ­6 2 12 Source : Tzannatos (1999). Tzannatos (1999) conclut que des augmentations substantielles des salaires féminins supposeraient une légère diminution des salaires mas- culins, en partie parce qu'on prévoit une hausse substantielle du PIB. Cet équilibre serait obtenu en redistribuant le travail entre les professions, c'est-à-dire en donnant aux femmes des postes jadis réservés aux hommes et vice versa. Les données provenant d'Amérique latine et des Antilles suggèrent que, si les hommes et les femmes avaient des salaires égaux, le PIB augmenterait de 6 %. Mais ce nivellement sur le plan des salaires suppose la redistribution d'environ 20 % de tous les travailleurs. L'auteur s'empresse d'indiquer qu'une redistribution d'une telle ampleur est, à court terme, difficile à réaliser et coûteuse sur le plan politique. L'égalité et la croissance économique : données de divers pays Et si l'inégalité fondée sur le genre était favorable à la croissance? Une étude en suggère la possibilité. Barro et Lee (1994) soutiennent que les pays dont les revenus de départ per capita sont assez bas ont des taux de croissance plus élevés («convergence conditionnelle») et que la corrélation partielle entre une scolarité de niveau secondaire chez les femmes et la croissance éco- nomique est sensiblement négative, alors que celle qui existe entre l'instruc- tion des hommes et la croissance est positive. Selon les auteurs, cela pourrait s'expliquer si l'on interprétait l'écart entre les sexes comme une mesure du retard économique : 90 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 91 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT Le résultat, qui est troublant et qui a tendance à se répéter, est que le niveau ini- tial d'études secondaires chez les femmes entre négativement dans les équations de croissance; le coefficient estimé est de ­0,0084 (écart-type = 0,0045). Il est pos- sible que l'écart considérable entre le niveau atteint au secondaire par les hommes et par les femmes soit une bonne mesure du retard; un taux de réussite plus bas des femmes signifie donc plus de retard et, apparemment, un potentiel de crois- sance plus grand à cause du mécanisme de convergence (p.18). Ce résultat contredit les données micro-économiques probantes sur la relation entre la productivité et les inégalités fondées sur le genre exami- nées plus tôt. Il contredit aussi un corpus croissant d'analyses provenant de divers pays soutenant les données micro-économiques. En effet, cer- taines études économétriques récentes démontrent que le rapport entre la croissance et l'égalité des sexes est sensible à certaines particularités de la courbe de croissance (encadré 2.1). Mais, en plus de la nature de ce rapport, il y a aussi la question de la causalité. Deux études révèlent un rapport négatif statistiquement significatif et appréciable entre les inégalités fondées sur le genre sur le plan de l'éduca- tion et la croissance. Esteve-Volart (2000) étudie le lien entre la croissance du PIB per capita et les inégalités sur le plan des études de niveau primaire pour une année donnée en utilisant les données pour environ 90 pays, et en vérifiant des facteurs tels que l'éducation de niveau secondaire et les variables nominales régionales. Elle démontre qu'un accroissement de 1 % du taux d'inscription au primaire chez les femmes par rapport aux hommes augmente le taux de croissance de plus de 0,012 %. Knowles, Owen et Lorgelly (2002) étudient la relation à long terme entre la croissance du PIB par travailleur et les données en moyenne tem- porelle du niveau d'éducation des hommes et des femmes en utilisant les données d'environ 70 pays. Ils concluent que le rapport de l'élasticité du PIB par travailleur en relation avec les données sur l'éducation des femmes se situe entre 0,2 et 0,45, alors qu'il se situe entre ­0,3 et 0,1 avec les données sur l'éducation chez les hommes. Ces études ne nous aident pas à déterminer la causalité entre les inégalités fon- dées sur le genre et la croissance. Des études récentes s'attaquant spécifiquement à la causalité suggèrent que les inégalités fondées sur le genre concernant l'édu- cation nuisent à la croissance économique (encadré 2.1). Que serait-il arrivé si l'Afrique subsaharienne, l'Asie du Sud, le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord avaient eu le même taux initial d'années de scolarité chez les hommes et les femmes que l'Asie de l'Est en 1960, et avaient travaillé à réduire l'écart entre les sexes sur le plan de la scolarisation au même taux que l'Asie de l'Est en 1992? Selon une étude, la moyenne du taux de croissance per capita dans ces régions aurait été de 0,5 à 0,9% plus élevée par an, ce qui représente une bonne aug- mentation pour l'Afrique subsaharienne, dont le taux de croissance actuel est de 91 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 92 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE 0,7 % par année. Le taux de croissance aurait été de 1,7% plus élevé en Asie du Sud et de 2,2% plus élevé au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (tableau 2.3; Klasen, 1999a). En fait, de 1960 à 1992, la croissance annuelle du revenu moyen per capita au Botswana dépassait 5,5%, alors qu'au Ghana, elle était de moins de 0,3% (Klasen, 1999a). Par la vérification des différences dans les niveaux de revenus initiaux, les taux d'investissement, l'ouverture sur l'économie mondiale et la croissance de la population générale et de la population active à cette période ­ aussi bien que dans les niveaux initiaux et la croissance du niveau d'instruction des hommes ­, l'analyse révèle qu'au moins 1,3 à 1,6% de la différence de 5,3% entre les deux pays dans la croissance annuelle peut être attribuable à des différences dans les inégalités fondées sur le genre sur le plan de l'éducation. De plus, pour les pays à revenus moyens et élevés et ayant des niveaux d'éduca- tion relativement élevés, une augmentation de 1% du nombre de femmes ayant une éducation de niveau secondaire, et ce, en conservant une éducation secon- daire constante chez les hommes, correspond à une augmentation de 0,3% des revenus per capita (Dollar et Gatti, 1999). Ces résultats impliquent que le fait de ne pas fournir aux filles le même niveau d'éducation qu'aux garçons nuit à la croissance économique. Tableau 2.3 Réduire l'écart entre les sexes en matière de scolarisation favoriserait la croissance économique Croissance annuelle moyenne du PIB per capita, 1960-1992 4 3 logarithmes) (en 2 1 Pourcentage 0 Afrique subsaharienne Asie du Sud Moyen-Orient et Afrique du Nord Réelle Projetée Note : « Projetée » représente la croissance moyenne du PIB prévue pour une région si son écart entre les sexes en éducation était comme celui de l'Asie de l'Est en 1960 et avait diminué aussi rapidement que celui-ci entre 1960 et 1992. Source : Les données sont tirées de Klasen (1999a). 92 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 93 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT Encadré 2.1 Influence de l'égalité des sexes sur la leurs effets respectifs sur la croissance. L'omission de croissance économique la variable de l'éducation des hommes modifie le coefficient sur l'éducation des femmes, le faisant pas- LE DÉBAT CONCERNANT LES RÉPERCUSSIONS DE ser de négatif et significatif à positif et sans impor- l'égalité des sexes sur la croissance est centré autour tance (Lorgelly et Owen, 1999). de deux questions clés. La relation entre l'égalité des sexes et le développement est-elle positive ? L'égalité Knowles, Lorgelly et Owen (2000) utilisent un des sexes affecte-t-elle la croissance, ou est-ce l'in- modèle différent pour établir leurs données. Ils font verse, ou encore les deux; ou bien est-ce que certains la moyenne des données sur la période d'estimation facteurs communs déterminent les deux phénomènes totale, s'échelonnant de 1960 à 1990, pour les simultanément ? variables explicatives en vue d'établir un rapport à Pour répondre à la première question, des études long terme. Ils concluent que l'effet de l'éducation récentes ont voulu concilier les résultats démontrant des femmes sur la production par travailleur est posi- qu'il existe une relation positive entre l'égalité et la tive. Mais s'ils réévaluent leur modèle avec des valeurs croissance économique avec ceux de Barro et Lee en capital humain pour une année donnée, comme (1994), qui démontrent le contraire. On a examiné Barro et Lee l'ont fait, ils reproduisent les résultats les pays afin de voir s'il n'y aurait pas des exceptions contradictoires de ceux-ci d'un rapport marqué et qui influenceraient les résultats de Barro et Lee. négatif du côté de l'éducation des femmes et d'un Stokey suggère que les curieux résultats de leur étude rapport positif du côté de l'éducation des hommes. pourraient être attribués à certaines régions de l'Asie La deuxième question concerne la qualité de la de l'Est (Chine, Hong Kong, Corée du Sud, relation entre l'égalité des sexes et la croissance éco- Singapour et Taiwan) qui ont connu une croissance nomique. Si la relation est positive à cause d'une rela- très rapide, mais où le niveau d'instruction des tion à double sens ou à cause d'un facteur sous-jacent femmes demeure peu élevé. Lorgelly et Owen (1999) commun déterminant les deux phénomènes simulta- utilisent des techniques statistiques pour identifier les nément, alors les données de régression sur la crois- pays « aberrants ». Si l'on ne tient pas compte de ces sance économique seraient biaisées. C'est particuliè- pays dans la courbe de croissance, on affaiblit la cor- rement vrai lorsque différentes variables se rapportent rélation partielle entre l'éducation des femmes et la à la même période. Des études récentes ont tenté de croissance, mais elle demeure tout de même négative. démêler la cause et l'effet dans la relation entre l'éga- Dollar et Gatti (1999) découvrent qu'en omettant dans lité des sexes et la croissance économique, mais elles leur modèle les variables nominales régionales, ils arri- ont rencontré des problèmes de mesure et de déduc- vent à reproduire les estimations de Barro et Lee. Cela tion statistique. est dû au fait que les économies latino-américaines ont La méthode de calcul la plus commune est celle qui connu une croissance plus lente que ne le laissaient utilise les variables instrumentales. Cette méthode est prévoir les autres variables de l'équation de crois- basée sur l'identification des variables exogènes affec- sance, et ce, pendant que la région avait un haut taux tant l'égalité des sexes, mais non la croissance de d'études de niveau secondaire chez les femmes. Alors, manière directe, et l'utilisation des mesures d'égalité si les variables nominales régionales sont exclues de la des sexes, mesures anticipées à partir de ces variables, courbe de croissance, la faible croissance latino-amé- comme des facteurs déterminants de croissance. ricaine devient attribuable à la variable de l'éducation Dollar et Gatti (1999) utilisent des données relatives des femmes, ce qui entraîne un coefficient négatif sur à la religion et aux libertés civiles comme variables leur éducation. affectant le revenu uniquement par le biais de leur Qui plus est, en raison de la corrélation élevée effet sur l'égalité des sexes sur le plan de l'éducation. entre les niveaux d'éducation des hommes et des Klasen (1999a) utilise les dépenses en éducation femmes dans le modèle de Barro et Lee, il y a peu de comme portion du PIB et les niveaux de fécondité variations indépendantes permettant de dissocier initiaux, puis il évalue les changements parmi ces 93 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 94 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE variables comme moyen de déterminer les change- supérieure aux autres calculs qui tiennent compte de ments dans le rapport femmes-hommes pour les données fixes ou aléatoires pour les pays. Les variables années de scolarité, à la condition que ces instru- de réussite académique utilisées pour les inhibitions ments soient soumis à des tests visant à limiter la de la croissance sont le total respectif des années de suridentification. Les deux études concluent que scolarité de chaque genre en 1960 et le changement l'égalité des sexes a des répercussions importantes sur de ce total entre 1960 et 1992. Puisque les investisse- la croissance. ments en éducation nécessaires au changement de ces D'autres techniques appuient habituellement ce variables de réussite doivent avoir été faits à peu près résultat. Dollar et Gatti (1999) utilisent des données entre 1930 et 1975, il est invraisemblable que ces chronologiques sur l'égalité des sexes et les niveaux de investissements aient été encouragés par une crois- revenu dans plus de 100 pays, au cours des trois der- nières décennies, pour s'attaquer à quelques-uns des sance des revenus après 1960. Klasen conclut qu'il est problèmes d'endogénéité. Ils montrent qu'une plus très probable que l'association positive du taux de grande égalité des sexes sur le plan des études secon- scolarisation des femmes et des hommes et de la daires est associée à un revenu plus élevé. Klasen croissance des revenus indique que c'est le taux de (1999a) fait des estimés en utilisant les variables scolarisation des femmes élevé par rapport à celui des nominales régionales et décennales, après que des hommes qui a contribué à une croissance plus impor- tests aient confirmé que la validité de ce calcul est tante des revenus, et non l'inverse. Les inégalités fondées sur le genre dans d'autres domaines que l'éducation sont associées à des taux de croissance plutôt bas. Le fait que les femmes jouis- sent de plus grandes possibilités d'emploi peut accroître la production nationale, du moins pour ce qui est de la part calculée dans les comptes du revenu natio- nal. Un emploi à l'extérieur du foyer entraînera la substitution d'un travail féminin invisible à domicile par un travail féminin enregistré dans l'économie officielle, lui-même intégré dans les comptes de revenus nationaux standard. Ceci mettra en relief le travail des femmes et augmentera la production mesu- rable, même si la véritable production (enregistrée et non enregistrée) est inchangée. Dans la mesure où cette substitution implique une augmentation de la productivité, la production et la croissance économique réelles augmenteront. Nous disposons d'éléments macro-économiques probants limités pour démontrer que les inégalités fondées sur le genre sur le plan de l'emploi com- promettent la croissance économique. Par la vérification de facteurs tels que le revenu initial, la croissance de la population, les inégalités sur le plan de l'éducation et l'ouverture à l'économie mondiale, Klasen (1999a) découvre que la portion féminine de la population active dans le secteur structuré est en corrélation positive, statistiquement et économiquement, avec la crois- sance économique. Ce résultat doit toutefois être interprété avec prudence : il est possible que ce soit la croissance qui amène les femmes sur le marché du travail, et non l'inverse. 94 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 95 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT Les gouvernements aussi sont désavantagés L A QUALITÉ DU GOUVERNEMENT D'UN PAYS ET DE SA VIE publique est un signe de son niveau de développement, tout comme elle est elle-même un facteur de développement. La première pré- misse est évidente pour la majorité des gens et n'a pas besoin d'être expli- quée. La seconde, quoique moins évidente, s'est vue renforcée par différentes études menées récemment dans plusieurs pays. Un pays dont le régime poli- tique doit faire face à des évaluations et qui se montre capable de faire res- pecter les lois a plus de stabilité et présente de meilleurs projets de dévelop- pement qu'un pays dictatorial. On signale, dans certaines études, l'existence d'une relation particulièrement pernicieuse entre la corruption et la crois- sance économique et on souligne que la fréquence de la corruption contri- bue à affaiblir les politiques de développement (Knack et Keefer, 1995; Mauro, 1995; Olson, Sarna et Swamy, 2000). La réduction de la corruption et l'assainissement du gouvernement représentent des défis pour les gouver- nements et les organismes de développement. Quelques autres études explorent comment une participation plus grande des femmes à la vie politique, notamment dans les prises de décisions concer- nant les affaires publiques, pourrait avoir un effet bénéfique. Les femmes sou- lèvent-elles des intérêts particuliers et enrichissent-elles le dialogue politique avec de nouvelles visions? Exercent-elles l'autorité différemment? La corruption Des études récentes suggèrent que l'égalité des sexes a un impact sur la corruption. Mais cette relation existe-t-elle réellement ou est-elle seule- ment apparente ? Deux hypothèses s'offrent à ce sujet. Premièrement, quand des sociétés sont égalitaires et axées sur la participation, elles sont davantage portées à laisser de côté la discrimination et à mettre sur pied des évaluations et des bilans qui rendent la corruption moins profitable. On peut alors parler d'une corrélation négative entre l'égalité des sexes et la corruption. Deuxièmement, il peut y avoir des différences intrinsèques dans les comportements des hommes et des femmes qui font en sorte qu'un nombre plus grand de femmes aux postes clés assainirait le gouver- nement. L'idée reçue que les hommes et les femmes réagissent de façons différentes aux diverses situations sociales et économiques ne se vérifie pas toujours avec certitude. Une partie de ces réactions spécifiques dépend, entre autres, des différences entre les sexes en matière de scolarisation et d'expérience de travail ainsi que de l'accès à l'information et aux techno- logies. Si l'on tient compte de cette explication, les différences de com- portements entre l'homme et la femme ont-elles encore une valeur statis- 95 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 96 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE tique ? Tandis que chacune de ces deux hypothèses mérite une réflexion approfondie, des études déjà réalisées nous permettent de faire d'intéres- santes découvertes. Des études sur le comportement social nous indiquent que les hommes et les femmes adoptent des conduites bien différentes par rapport à la corruption et que, de façon générale, les femmes sont plus altruistes et ont davantage le sentiment d'appartenir à une communauté. Certains essais expérimentaux ont indiqué que les femmes sont plus portées que les hommes à faire preuve de générosité et d'altruisme, mais ces conclusions ont été démenties dans d'autres essais12. On démontre, dans une autre analyse dont les données sont tirées des sondages World Values, recueillies dans 18 pays en 1981 et dans 43 pays en 1991, que les femmes sont moins enclines que les hommes à adopter et à accepter des comportements malhonnêtes ou illégaux (Swamy et al., 2001). Lorsqu'elles doivent évaluer une série de comportements, la proportion des femmes qui considèrent qu'ils sont inacceptables est nettement plus grande que pour les hommes, cette différence allant de 4 à 9% (grille 2.2). Arrive-t-on aux mêmes résultats si on considère certaines particularités propres aux hommes et aux femmes? Si l'on tient compte des différentes situations d'emplois et d'autres caractéristiques telles que l'âge, l'instruction et le statut social, les hommes sont plus portés que les femmes, dans une pro- portion de 3,3%, à accepter des pots-de-vin dans l'exercice de leurs fonc- Grille 2.2 Des comportements sociaux inacceptables % de gens qui considèrent que ce comportement est inacceptable Comportement Hommes Femmes Profiter d'avantages gouvernementaux auxquels on n'a pas droit 63,7 67,9 Éviter de payer pour son passage dans un transport en commun 60,3 64,9 Tricher sur sa déclaration fiscale, si l'occasion se présente 54,4 61,5 Acheter un objet que l'on sait volé 72,9 79,5 Prendre et conduire une voiture appartenant à quelqu'un d'autre 83,1 87,2 Garder de l'argent trouvé 43,9 51,6 Mentir pour notre bénéfice 45,1 50,9 Accepter un pot-de-vin dans l'exercice de nos fonctions 72,4 77,3 Se battre avec la police 52,0 57,1 Ne pas divulguer les dommages qu'on a causés à une voiture stationnée 61,8 67,6 Jeter des détritus dans un endroit public 69,1 74,4 Conduire en état d'ébriété 74,2 83,4 Note : Les données proviennent de 18 pays en 1981 et de 43 pays en 1991. La taille des échantillons varie de 52,107 à 83,532. La marge d'erreur est de 0,0001. Source : Adapté de Swamy et al. (2001). 96 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 97 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT Tableau 2.4 Plus d'égalité dans les droits, moins de corruption 10 8 6 corruption de 4 Indice 2 0 4,0 4,5 5,0 5,5 6,0 6,5 7,0 Indice des Droits économiques et sociaux des femmes Note : L'indice de corruption utilise les données du Guide international du risque dans les pays (ICRG) et le transforme : indice de corruption = 10 ­ (Indice ICRG ­ 1) X 2. La variable des droits des femmes est l'indice des Droits économiques et sociaux des femmes (WESHR) élaboré par le Programme des études globales de l'Université de Purdue. Le chiffre contrôle le PIB per capita de chaque pays. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés. Source : Banque mondiale; voir aussi Kaufmann (1998). tions (Swamy et al., 2001). Cette pratique varie cependant selon les pays. Dans sept des 43 pays étudiés, en 1991, les hommes y étaient enclins, mais dans une moindre proportion. Mais dans les 36 autres pays, en 1991, et dans chacun des 18 pays, en 1981, les résultats des enquêtes confirmaient que les femmes étaient moins susceptibles que les hommes d'accepter des pots-de- vin, quoique ces résultats ne soient statistiquement pas très significatifs dans environ le tiers des pays. Donc, même s'il n'y a pas toujours des différences statistiquement intéressantes dans tous les pays, les attitudes propres à chaque genre vis-à-vis de la corruption semblent être les mêmes dans le monde entier. Des sondages réalisés dans des entreprises démontrent que les femmes d'af- faires sont moins enclines que les hommes à verser des pots-de-vin aux fonc- tionnaires; soit elles éprouvent une plus grande aversion pour le risque, soit elles suivent un code d'éthique plus élevé. En Géorgie, les entreprises appar- tenant à des hommes ou qui sont dirigées par eux ont de 10 à 14% plus de probabilités (selon la méthode de calcul économétrique utilisée) de verser des sommes non officielles à des fonctionnaires que celles qui appartiennent à des femmes ou qui sont dirigées par elles (Swamy et al., 2001)13. Cette 97 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 98 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE conclusion se vérifie quelles que soient les particularités de l'entreprise (sec- teur d'opération et importance) et peu importent les caractéristiques du pro- priétaire ou du gérant (niveau d'instruction). Si l'on ne tient pas compte de ces facteurs, les entreprises dirigées par des hommes sont deux fois plus sujettes à verser des pots-de-vin. Ces révélations, basées sur des données de sondages privées et indivi- duelles, font écho aux études menées récemment dans plusieurs pays. Kaufmann (1998), se basant sur un échantillon de plus de 80 pays, établit un lien négatif entre un indice de corruption et un indice des droits sociaux et économiques des femmes14. Mais puisque ce résultat ne tient pas compte d'autres facteurs susceptibles de le modifier, comme le revenu, le rapport de causalité, s'il y en a un, n'a pu être établi. Lorsque Kaufmann tient compte du revenu per capita, le lien négatif entre la corruption et les droits des femmes s'amenuise considérablement tout en demeurant significatif, et il fait ressortir que les droits des femmes sont liés à un degré inférieur de corrup- tion, peu importe le revenu (tableau 2.4)15.Dans la mesure où moins de cor- ruption se traduit par des investissements d'envergure et, donc, un taux de croissance élevé, l'égalité des sexes favorise le développement économique. Comme l'égalité dans le domaine des droits est un objectif extrêmement important, une plus grande participation des femmes devient de plus en plus souhaitable. Les gouvernements sont moins corrompus lorsque les femmes occupent une place plus importante en politique et sur le marché du travail (Dollar, Fisman et Gatti, 1999; Swamy et al., 2001). Par exemple, la cor- ruption diminue lorsque les femmes occupent un plus grand nombre de sièges au Parlement, et cela, en tenant compte du revenu national et d'autres facteurs susceptibles d'avoir une incidence sur la corruption, tels que l'éten- due des libertés civiles, la moyenne d'années de scolarité, l'ouverture au commerce et les divisions ethniques. (Ces données proviennent de deux répertoires: du International Country Risk Guide's Corruption Index et du Transparency International's Corruption Perceptions Index.) Si la proportion des femmes dans les chambres du Parlement, qui se situe à 10,9 % en moyenne, pouvait augmenter d'un seul écart-type, on verrait la corruption diminuer d'au moins 10% (Swamy et al., 2001). Quoique purement spécu- latives, ces conclusions peuvent encourager l'élection d'un plus grand nombre de femmes en politique ainsi que leur embauche sur le marché du travail, car elles peuvent contribuer à la formation d'un bon gouvernement et à l'assainissement du monde des affaires. L'exclusion empêche l'éclosion d'idées nouvelles Dans le chapitre I, on mentionnait que, tant dans le monde en voie de déve- loppement que dans le monde industriel, les femmes demeurent peu représen- 98 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 99 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT tées au Parlement et dans les postes ministériels. Quelles seraient les consé- quences, pour le développement, de politiques systématiques d'exclusion des femmes du gouvernement ou des comités de direction? Bien que les études tou- chant le sujet concluent qu'une telle exclusion serait onéreuse pour la société, les données empiriques demeurent suggestives et ne sont guère concluantes. Nous présentons, dans cette section, des résultats d'études indiquant que les femmes apportent de nouveaux points de vue lors des prises de décisions, augmentent la crédibilité d'un gouvernement et enrichissent le monde politique en appor- tant des compétences, un style et une vision qui leur sont propres. Selon un récent sondage effectué par l'Union interparlementaire (IPU, 2000) auprès de 187 femmes occupant des postes politiques dans 65 pays, environ neuf personnes sur dix sont d'avis que les femmes envisagent la poli- tique et la société différemment de leurs collègues masculins. Elles se sentent solidaires des autres femmes et investies du devoir de représenter leurs inté- rêts. Elles sont également portées à s'engager dans la défense des droits d'autres personnes et ajoutent ces dossiers à leur agenda. Quelques exemples: les lois sur la violence faite aux femmes et les initiatives concernant les lois électorales au Salvador, la loi sur la redistribution des terres dans le but de réduire la pauvreté des femmes en Éthiopie, la législation sur le travail, la protection sociale et les droits des enfants en Russie. Les données du sondage suggèrent qu'une présence accrue des femmes a largement contribué à faire évoluer les approches traditionnellement mascu- lines du bien-être, de la protection légale et de la transparence au gouverne- ment et dans les affaires. Plusieurs personnes interrogées pensent que, si le partenariat des hommes et des femmes avait plus d'envergure dans le monde politique et dans la société, les politiques seraient davantage en accord avec les besoins réels de la société. La majorité des personnes interrogées déclarent que leur motivation à faire de la politique est née d'un désir d'apporter un changement dans la société, particulièrement en matière de justice sociale. Parmi ces personnes, 80% sont d'avis que la participation des femmes ramène une certaine confiance dans la politique. Elles croient aussi que les femmes préconisent une approche conciliatoire et peuvent s'avérer de bonnes médiatrices en cas de litige (IPU, 2000). Ces données présentent des points de vue de femmes occupant des postes politiques. Mais les hommes et les femmes en politique mettent-ils vraiment l'accent sur des priorités distinctes? Ont-ils des impacts différents sur les politiques? Ces questions demeurent sans réponses, surtout dans les pays en voie de développement. Même aux États-Unis et dans les pays d'Europe de l'Ouest, les femmes oeuvrant dans la législation ne croient pas être plus effi- caces que les hommes, même si elles semblent avoir plus de facilité que les hommes à participer à des réunions et à des conférences et à travailler de plus 99 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 100 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE longues heures (Davis, 1997)16. Parce qu'elles proviennent de l'extérieur des réseaux traditionnels de législateurs, les femmes doivent travailler plus d'heures afin de compenser leurs lacunes au niveau de leurs connaissances sociales et politiques. Il est possible que les femmes fonctionnaires soient confinées à certains secteurs de la politique, comme celui des affaires fémi- nines et du développement social. Parce que les classes sociales et les ethnies, aussi bien que le genre, divisent les sociétés, les femmes au service du public et les leaders politiques ne seront pas nécessairement les alliées inconditionnelles des autres femmes, et cela est vrai aussi pour les hommes. Compte tenu de ces facteurs, s'il est vrai que les hommes et les femmes apportent chacun un point de vue enrichissant lors des prises de décisions, une politique d'exclusion des femmes à tous les niveaux du gouvernement limiterait l'efficacité de l'État et celle de ses politiques. De façon plus générale, une discrimination systématique et une exclusion d'une grande partie de la population des services essentiels, des droits poli- tiques et d'opportunités économiques peuvent surtout inspirer de la méfiance et du ressentiment, ce qui altérerait le climat social et mettrait en péril les projets de développement. Dans quelques études récentes, on sou- tient que le climat de confiance ­ c'est-à-dire la volonté, dans une société, de coopérer et de collaborer avec différents groupes à l'obtention de buts com- muns ­ est essentiel pour assurer l'efficacité des institutions d'une société (Putnam, 1993; Fukuyama, 1995; Woolcock, 2000). Après avoir utilisé les données des sondages World Values (1990-1993) pour évaluer le degré de confiance, La Porta et al. (1997) ont émis une estimation de l'importance du facteur de la confiance sur l'efficacité d'un gouvernement et sur la participa- tion dans des organisations civiles. Ils ont découvert que, si on maintient un PIB per capita constant, l'augmentation d'un seul écart-type en matière de confiance augmente l'efficacité judiciaire de 0,7 écart-type, la qualité des ser- vices bureaucratiques de 0,3 écart-type, l'acquittement des taxes de 0,3 écart- type; et la corruption diminue de 0,3 écart-type17. Comment expliquer que les inégalités fondées sur le genre perdurent ? C OMME NOUS L'AVONS VU DANS CE CHAPITRE, LES FAITS DÉMONTRENT de quelle façon les sociétés qui tolèrent la discrimination fondée sur le genre sont pénalisées. Cela affecte le bien-être des gens, la croissance économique, l'exercice de l'autorité ainsi que la lutte contre la pauvreté. Ces coûts sont très répandus et significativement élevés. Particulièrement dans les pays à faibles revenus, comme ceux d'Asie du Sud et d'Afrique subsaharienne, une augmentation du niveau d'instruc- 100 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 101 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT tion des femmes et de leur autonomie allégerait considérablement quelques-unes des pires conséquences de la pauvreté, tels le sida, la mor- talité infantile et de sérieux problèmes de malnutrition. Encore aujour- d'hui, de trop nombreux préjugés et des pratiques discriminatoires main- tiennent les femmes éloignées des ressources, des marchés et de la politique, laissant ainsi en friche une partie importante des talents, des compétences et des énergies d'un pays. Ces faits soulèvent certaines questions. Si les inégalités fondées sur le genre affectent sérieusement le bien-être des gens et les projets de développement d'un pays, comment expliquer qu'elles perdurent dans un si grand nombre de sociétés? Comment se fait-il qu'elles s'avèrent plus difficiles à éliminer dans certains domaines que dans d'autres? Par exemple, des améliorations ont été réalisées assez rapidement dans les domaines de la santé et de la sco- larisation, mais tardent beaucoup, ou sont tout simplement inexistantes, dans la participation politique et l'égalité des droits fonciers. Quels sont donc les facteurs qui nuisent à l'évolution des relations et l'élimination des inégalités fondées sur le genre? Dans cette section, nous présentons un schéma permettant de mieux com- prendre comment les inégalités se perpétuent. Ce dernier tient compte de trois facteurs principaux susceptibles d'influer sur l'égalité des sexes. Ce sont: · les institutions, incluant les normes sociales, les lois et les marchés; · les familles et les coutumes domestiques; · l'économie. Ces facteurs offrent différentes pistes d'action en vue de la promotion de l'égalité dans le développement. Les trois prochains chapitres porteront sur chacun de ces facteurs, ainsi que sur les incidences qu'ils ont sur les inégalités. Les normes sociales et culturelles sont sous-jacentes aux inégalités fondées sur le genre que nous avons décrites au chapitre I. Elles déterminent les rôles respectifs des hommes et des femmes et leurs relations entre eux. Supportées par les systèmes légal et normatif, ces coutumes façonnent les comporte- ments admis pour chacun des sexes dans la société et dans l'économie. Elles sont partie prenante d'un ensemble d'institutions incluant les coutumes, les droits, les lois et les normes relatives aux différents marchés. Ces institutions influencent les ressources respectives auxquelles chaque genre aura accès, les activités dans lesquelles il convient ou non de s'engager ainsi que les moda- lités d'après lesquelles on peut participer à l'économie et à la société, selon le genre. Ce sont les coutumes qui, par leur force incitative, renforcent ou découragent les préjugés. Certaines de ces institutions, comme les normes sociales, peuvent mettre beaucoup de temps à évoluer, mais elles sont loin d'être immuables. Les politiques publiques peuvent quant à elles se modifier 101 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 102 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE afin de tantôt promouvoir, tantôt gêner l'égalité des sexes (voir le chapitre III). Tout comme les institutions sociales, les usages domestiques déterminent dès l'enfance les rôles et les comportements des sexes, qui sont transmis d'une génération à l'autre. C'est au sein de la famille que se prennent les décisions fondamentales, comme avoir ou non des enfants, choisir entre s'adonner au travail ou aux loisirs, les investissements à privilégier, etc. C'est aussi en famille qu'on assigne les tâches et les ressources respectives aux garçons et aux filles, qu'on détermine le degré d'autonomie consenti à chacun et à chacune et les attentes différentes envers l'un et l'autre. Tout cela contribue à créer, renforcer ou tempérer des inégalités fondées sur le genre. Toutefois, les familles ne prennent pas ce genre de décisions de façon isolée. Elles fonctionnent dans un contexte communautaire et reflè- tent des usages encouragés par tout un appareil institutionnel et un envi- ronnement politique (voir le chapitre IV). L'économie détermine les opportunités qui permettront aux gens d'aug- menter leur niveau de vie. Lorsqu'on augmente les revenus familiaux, on ouvre la voie à un accroissement du développement humain, sur les plans de la santé et de l'éducation, par exemple, et ce développement peut favoriser autant les femmes que les hommes. Des revenus plus élevés signifient moins de restrictions dans les ressources au sein du foyer, de sorte que les parents ne sont plus obligés de choisir entre investir en faveur des garçons ou des filles. Ajoutons que les facteurs responsables de l'augmentation des revenus ont aussi tendance à faire grimper les coûts liés à la discrimination dans une économie de production. Dans quelle mesure les inégalités fondées sur le genre peuvent-elles être réduites grâce au mouvement économique? Cela dépend quelles activités rémunérées sont disponibles, comment elles sont organisées, quelles habile- tés sont rémunérées, et si les hommes et les femmes sont également habilités à y participer. Un grand nombre de facteurs sont à considérer. La répartition sexuelle des tâches domestiques, les normes sociales, les préjugés et les res- sources inégales empêchent autant les hommes que les femmes de profiter équitablement des opportunités économiques ou de faire face de façon égale aux risques et aux crises économiques. Ces facteurs expliquent en partie pourquoi les hommes et les femmes travaillent souvent dans des secteurs dis- tincts de l'économie. Ainsi, ils ne sont pas affectés de façon égale par les fluc- tuations des prix, ou par les mouvements de croissance ou de décroissance des différents secteurs. Le refus de reconnaître ces contraintes fondées sur le genre dans l'élaboration des politiques peut compromettre l'efficacité de ces dernières, qu'on les considère du point de vue de l'équité ou de l'efficacité (voir le chapitre V). 102 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 103 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT Mais les améliorations apportées aux institutions et la croissance écono- mique n'arrivent pas à éliminer ces inégalités. Ces transformations prennent du temps. Et des politiques de développement apparemment ouvertes à toutes les personnes peuvent produire des résultats qui sont déterminés par le genre. Cela dépend en partie de l'influence combinée des institutions sociales et des usages domestiques: ce sont ces facteurs qui déterminent les rôles et les comportements de chaque genre. Le rôle du gouvernement dans la promotion de l'égalité des sexes L A PROMOTION DE L'ÉQUITÉ EST COMMUNÉMENT VUE COMME une des premières responsabilités de l'État. La majorité des consti- tutions des pays assurent des libertés et des droits fondamentaux égaux à tous les citoyens, et la plupart promettent explicitement de défendre l'égalité, sans considération d'âge, de race ou de genre. Presque tous les gou- vernements ont ratifié la Déclaration universelle des droits de l'homme, et la plupart ont aussi ratifié des conventions internationales protégeant les femmes et les enfants, comme, entre autres, la Convention pour l'élimina- tion de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW), qui est considérée comme la charte internationale des droits des femmes. Mais, comme on l'a souligné au chapitre III, ces promesses et ces ententes ne comportent aucune garantie lorsque l'application de la loi est faible, lors- qu'il n'existe aucune réglementation pour assurer l'application des droits institutionnels et des traités internationaux ou lorsqu'on se contente sim- plement de bonnes intentions. La promotion de l'équité devrait être, pour l'État, une raison suffisante de s'attaquer aux inégalités, mais d'autres motifs peuvent aussi l'inciter à réagir. D'abord, une plus grande égalité apporte un surcroît de stabilité et de cohé- sion à la société. Ces bénéfices contribuent à améliorer les travaux d'une société, ainsi que son économie. On pourrait, de plus, mentionner des motifs d'efficacité. Enfin, l'État ne manque pas d'informations pour réaliser une intervention éclairée en faveur de l'égalité. Les motifs économiques d'une intervention de l'État Les retombées positives possibles sont une autre raison pour l'État d'agir en faveur de l'égalité des sexes. Les femmes, victimes évidentes de la discri- mination, et la société dans son ensemble bénéficieraient de cette égalité. Particulièrement pour les personnes à faibles revenus ­ comme c'est le cas dans une grande partie d'Asie du Sud, en Afrique subsaharienne et dans cer- 103 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 104 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE taines parties d'Asie de l'Est ­, une amélioration de la scolarisation et de l'ac- cès aux ressources, jointe à une autonomie accrue pour les femmes, se traduit par un soulagement des pires manifestations de la pauvreté, telles la morta- lité infantile et la malnutrition. De plus, l'égalité des sexes est de plus en plus considérée comme un facteur déterminant dans l'amélioration des condi- tions de vie et l'assainissement du gouvernement. Par conséquent, le gouvernement agit de plein droit lorsqu'il réduit les retombées négatives des inégalités fondées sur le genre. Des individus ou des groupes, laissés à eux-mêmes, peuvent céder à leurs préjugés ­ et à leurs peurs ­ aux dépens d'autres personnes. Mais si des individus et des groupes sont ciblés par ces retombées négatives, ils seront plus désireux d'en finir avec les inégalités. Par exemple, un père qui aime sa fille sera plus conscient du pro- blème que posent les violences faites aux femmes et davantage intéressé à résoudre ces problèmes. Ces retombées négatives existent-elles lorsque ce sont des femmes qui exercent une discrimination contre d'autres femmes ou jeunes filles? Oui, car le dommage physique qu'une femme subit ne repré- sente qu'une partie du mal que son geste a causé. Ces retombées, ajoutées aux coûts déjà élevés affectant le bien-être des personnes, incitent fortement à intervenir publiquement. En effet, les coûts et les bénéfices qu'entraîne la poursuite de l'égalité des sexes dépas- sent largement les capacités des individus. Même pour des groupes de per- sonnes, il s'avère très difficile, voire impossible, de modifier les normes sociales bien enracinées, les coutumes et les institutions légales qui engen- drent les inégalités. Les difficultés entourant l'accès à l'information constituent une source de discrimination sur le marché du travail. Elles sont répandues et difficiles à sur- monter. Par exemple, une meilleure information sur la productivité des tra- vailleurs entraînerait de nombreuses retombées positives, mais une informa- tion exacte et de qualité s'avère trop onéreuse pour un employeur. Ce dernier se base donc sur des indicateurs généraux, tel le genre, même si cette pratique est biaisée et quelque peu déloyale. Le gouvernement pourrait alors accorder des subsides pour améliorer l'accès à l'information pour les employeurs, ce qui contribuerait à promouvoir l'égalité des sexes. L'État peut intervenir de plusieurs autres façons. Il peut prélever des impôts et subventionner, persuader et légiférer, interdire et punir, en plus d'offrir des services. Il peut prélever des taxes afin de financer des campagnes de sensibilisation ou subventionner des organismes qui luttent contre les inégalités fondées sur le genre. Il peut, par exemple, subventionner les écoles afin de faciliter l'accès à des cours de formation pour les femmes. Il peut car- rément interdire des pratiques préjudiciables, par exemple en exigeant des entreprises que les critères d'embauche soient basés sur les compétences et 104 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 105 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT non sur le genre, et en prévoyant des sanctions et des peines pour ceux qui ne respectent pas ces consignes. Quel que soit le mode d'intervention retenu, le fait même d'intervenir est, pour l'État, une manière d'exprimer un jugement sur l'équité, de dire jusqu'à quel point il est disposé à sévir contre les uns afin d'en protéger d'autres. Il y a certainement des avantages à améliorer l'égalité des sexes, comme les faits l'ont démontré au cours de ce chapitre, mais il serait naïf de croire que tout le monde sort gagnant d'une éradication de la discrimination. Par exemple, repenser les services publics de santé de façon à les rendre plus accessibles aux femmes des régions rurales est probablement un changement profitable pour tous. Mais renforcer les lois contre le harcèlement sexuel au travail ne l'est peut-être pas, car il incomberait au gouvernement de déterminer la part des frais à débourser pour chacune des parties lors d'une intervention visant à minimiser l'impact des violences liées au sexe. Il n'est pas toujours facile pour l'État de trancher dans le domaine de l'éthique, de déterminer ce qui est juste et ce qui ne l'est pas, ainsi que de décider dans quelle mesure intervenir. Un terrain où il est particulièrement délicat d'intervenir est celui de la famille, où les inégalités sont dues aux dif- férences biologiques, aux rôles traditionnellement dévolus à chacun des sexes ainsi qu'au pouvoir décisionnel inégal reconnu à l'homme et à la femme. Le gouvernement devrait-il intervenir dans les problèmes concernant la famille? Afin d'assurer l'égalité entre l'homme et la femme, devrait-il avoir son mot à dire dans les décisions familiales concernant les investissements, la consom- mation, la natalité et le travail? Quoique ce soit très délicat pour lui de tran- cher explicitement en faveur du bien-être d'une personne ou d'une autre, ou d'un groupe ou d'un autre, le refus de se prononcer peut aussi être interprété comme une approbation tacite envers des comportements discriminatoires. Pour déterminer avec quelle force intervenir, il faut jauger chaque situation individuellement. Même lorsque les torts causés par la discrimination sont clairement iden- tifiables, il se peut que l'État ne soit pas l'intervenant le plus approprié. On se demande alors s'il doit intervenir, et comment. Souvent, lorsqu'un gou- vernement néglige de corriger des situations propices aux inégalités fondées sur le genre, c'est parce qu'il a négligé d'établir au préalable des mesures légales renforçant les droits fondamentaux des hommes, ou de mettre en pra- tique des politiques visant à protéger les groupes les plus vulnérables. L'État ne peut pas tout prévoir, il n'est pas un «protecteur social» purement altruiste, et les politiques et les interventions publiques impliquent des coûts budgétaires (Krueger, 1990). De plus, dans de nombreux pays en voie de développement, le gouvernement possède des ressources fiscales et adminis- tratives plutôt réduites pour relever ses nombreux défis. 105 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 106 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Un défi important pour les gouvernements consiste à déterminer leurs interventions de façon stratégique, en s'intéressant spécialement aux res- ponsabilités qui ne sont pas du ressort du secteur privé, ou que ce dernier a du mal à assumer. Les gouvernements doivent faire preuve de beaucoup de prudence lorsqu'ils interviennent dans des situations où les effets d'en- traînement ou les retombées possibles sont particulièrement importants. Contrairement à des actions non planifiées, une telle sélection au niveau des interventions et du ciblage contribue à économiser les ressources humaines et économiques, et facilite l'évaluation des coûts des politiques sociales (Bardhan, 1990). C'est cette discipline dans l'action qui permet aux gouvernements d'aborder les questions relatives au genre de façon constructive et avec plus de compétence. La plupart du temps, le rôle premier de l'État consiste à «niveler le terrain» pour les hommes et les femmes. Cela signifie assurer aux deux sexes les mêmes droits fondamentaux; purger les lois, les services gouvernementaux et les structures du marché des éléments discriminatoires qui pourraient encore les entacher; et surtout, les mettre en pratique. Nous savons cependant que les réformes institutionnelles et le développement économique mettent du temps à porter fruit. Il faut pouvoir compter sur des mesures politiques éner- giques afin de faire accepter le changement et de corriger les inégalités fon- dées sur le genre les plus persistantes. Les responsables politiques disposent de toute une série de leviers politiques ­ ciblés et non ciblés ­ leur permet- tant d'influencer l'accès aux ressources ainsi que le pouvoir décisionnel des hommes et des femmes au sein de leur famille. En tant qu'organisateur et pourvoyeur de programmes sociaux, l'État doit tenir compte des liens économiques et des relations de pouvoir au sein de la famille afin de mieux comprendre comment ses programmes peuvent atteindre les hommes et les femmes de façons différentes. Contrairement à ce qui semble souhaitable à première vue, les programmes sociaux et les poli- tiques publiques ne rejoignent pas chacun des sexes de façon égale, et plu- sieurs soupçonnent que cela soit intentionnel. Même des politiques élaborées spécifiquement à l'intention d'un des sexes peuvent avoir un impact tout à fait inattendu si l'on n'a pas bien saisi au préalable les mécanismes de répar- tition du pouvoir et des ressources entre les hommes et les femmes. Pensons aux modifications apportées aux lois sur la famille afin d'en faire bénéficier les femmes et les enfants. Ou à celles apportées à la législation concernant le marché du travail et qui avait pour but de protéger les femmes. Ou aux pro- grammes agricoles favorisant la production sur les fermes dirigées par des femmes. Dans chacun des cas, lorsqu'on néglige de prendre en considération les relations entre les sexes, on peut aboutir à des résultats inattendus et indé- sirables, comme on le verra au cours des chapitres suivants. Ignorer les diffé- 106 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 107 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT rences entre les sexes affecte fâcheusement non seulement l'équité, mais aussi l'efficacité et la durabilité des politiques publiques et des services sociaux. La société civile et la communauté internationale Qu'arrive-t-il si l'État, enfermé dans des intérêts en faveur d'un statu quo en ce qui concerne le genre, ne veut pas ­ ou ne peut pas ­ exercer d'in- fluence en faveur de l'égalité des sexes? Même si une action à caractère public semble s'imposer, les responsables politiques les mieux intentionnés peuvent trouver très éprouvante l'application de politiques impopulaires. Les organi- sations gouvernementales elles-mêmes ont tendance à adopter les opinions les plus répandues concernant les rôles et les relations entre les sexes. Dans plusieurs cas, la société civile locale et la communauté internationale peuvent constituer un important facteur de changement. Il est déjà arrivé que des groupes publics aient contribué à des changements sociaux et économiques importants de diverses manières: en suscitant des débats publics, en faisant pression sur l'État, en octroyant du pouvoir aux petites communautés et en soumettant des plaidoyers éclairés. Toute société civile est composée de groupes hétérogènes recherchant cha- cun leurs propres intérêts. Certains de ces groupes cherchent à promouvoir l'égalité des sexes, tandis que d'autres retirent des bénéfices d'une situation de discrimination et d'exclusion. Sur les plans tant national qu'international, certains groupes en faveur de l'égalité n'ont pas ménagé leurs efforts et leur temps afin d'élaborer un soutien politique face aux résistances, et ont ainsi contribué à ce que des gouvernements s'empressent d'intervenir sérieuse- ment. En voici quelques exemples: · Des conventions internationales portant sur les questions d'égalité des sexes ­ tenues à Beijing et à Copenhague en 1995, ainsi qu'à New York en 2000 ­ ont encouragé plusieurs pays à évaluer la situation de l'égalité des sexes dans leur milieu et à intervenir politiquement. Elles ont été des ins- truments qui ont fait avancer la cause de l'égalité à tous les niveaux. · Des actions civiles ont exercé une influence sur des réformes institu- tionnelles. Par exemple, de récentes réformes agraires en Amérique latine ont consolidé les droits fonciers des femmes. Différents groupes civils en Afrique du Sud et en Ouganda ont fait pression pour que les constitu- tions de ces pays comportent des garanties de droits égaux pour les hommes et les femmes. · Dans l'État indien du Kerala, des associations locales de femmes s'assu- rent de la mise en pratique des programmes de lutte contre la pauvreté établis par les autorités locales (Goetz, 1999). · Des organisations non gouvernementales se sont engagées à mettre les femmes à l'abri de la violence (là où les institutions publiques ont 107 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 108 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE échoué) et leur offrent des services de protection de la maternité et un secours financier à leur mesure. Ces organisations ont aussi contribué à élever le niveau d'instruction des femmes, forcé une application plus rigoureuse des droits, réglé des conflits internes et apporté du soutien aux femmes victimes de violence (pour des exemples, voir Matin et al., 2000). Dans ce chapitre, nous avons rapporté toute une série de faits démontrant en quoi l'égalité des sexes concerne le développement. Des considérations sur l'équité devraient amplement suffire à inciter l'État à intervenir, car les coûts des inégalités fondées sur le genre vont au-delà de ces considérations. On peut y ajouter des raisons d'efficacité qui justifieraient fortement des inter- ventions à caractère public. Les trois prochains chapitres porteront sur les impacts des institutions, des coutumes domestiques et des politiques écono- miques sur les inégalités fondées sur le genre. Enfin, dans le dernier chapitre, nous analyserons les différentes opportunités d'intervention de l'État et de la société civile. Notes 1. Pour connaître les détails des débats les plus récents 4. L'étude de Smith et Haddad (2000) mesure ce statut à ce sujet, consultez Fukuyama (1998), Ehrenreich (1999) et à partir de l'espérance de vie des femmes comparée à celle des Ferguson (1999). hommes. La plupart des mesures de ce genre peuvent varier selon des méthodes arbitraires, d'après Deaton (1997). En fait, 2. Cependant, les hommes ne sont pas les seuls à faire il n'existe pas de mesure communément admise pour évaluer le preuve de violence. L'histoire a démontré que les femmes sont statut relatif des femmes. Smith et Haddad (2000) évaluent son capables de poser des gestes de violence, envers tant des femmes statut en se basant sur son espérance de vie à la naissance, car que des hommes, et de les tolérer chez d'autres. Par exemple, en « la longévité de la vie humaine donne un indice de sa consis- Afrique du Sud, bon nombre de femmes ont soutenu l'apar- tance ou de sa valeur qualitative et du nombre d'accomplisse- theid, convaincues que ces divisons raciales étaient nécessaires ments réalisés au cours de celle-ci. On l'associe tout simple- au maintien de l'ordre public (Goldblatt et Meintjes, 1998). ment à une qualité de vie plutôt réussie. Des inégalités favorisant les hommes sur ce point sont l'indice d'une discri- 3. Dans cette étude, des enfants de moins de cinq ans mination envers les femmes aux divers âges de la vie et d'une sont considérés comme mal nourris si leur poids est de plus de inégalité bien enracinée depuis longtemps. » (Smith et Haddad, deux degrés sous la norme établie pour leur âge. Cette norme 2000, p. 21, en référence : Sen, 1998, et Mohiuddin, 1996) est établie par le National Center for Health Statistics et par l'Organisation mondiale de la santé. Ces chiffres reflètent l'en- 5. En utilisant les données de Humana sur les droits, semble de tous les éléments déterminant un changement dans Boone (1996) découvre que, sur une échelle de 1 à 4 (1 repré- le poids. Ces estimations s'obtiennent par les coefficients des sentant le maximum d'autonomie et 4 le minimum), la différentes variables de chaque élément déterminant et par les moyenne mondiale se situerait à environ 2. L'auteur fait réfé- rence au degré d'autonomie des femmes comme à un indice changements constatés dans ces variables entre 1970 et 1995. d'oppression établi sur le genre. Les facteurs déterminants sont la santé et l'environnement (l'accès à de l'eau potable), l'instruction des femmes (leur ins- 6. Cette conclusion est conditionnée, car l'impact n'est cription au secondaire), leur statut (leur espérance de vie par pas continu. Bien que le degré d'instruction des femmes rapport à celle des hommes) et les ressources alimentaires (la réduise leur fécondité, il y aurait un seuil d'instruction (situé consommation énergétique quotidienne per capita). entre le primaire et le secondaire) au-delà duquel on observerait 108 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 109 LES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT une réduction marquée de la natalité, mais au-dessous duquel importantes, moins les hommes se montrent généreux. D'autre l'instruction des femmes aurait peu à voir avec la natalité, ou part, Bolton et Katok (1995) ont mené des expériences sem- aurait même un effet positif sur elle. Ce seuil a tendance à être blables avec plusieurs personnes, sans trouver de différences plus élevé dans les pays les moins développés. notables entre les hommes et les femmes. En général, ce genre d'évaluation des différences de comportements et de la peur du 7. Ces découvertes révèlent l'impact sur la natalité non risque dépend beaucoup du contexte social, de la suite des seulement du degré d'instruction des femmes, mais aussi de expériences menées et du degré de danger que les risques com- l'écart entre les sexes en matière d'éducation. Hill et King portent (Eckel et Grossman, 1996; Anderson, Rogers et (1995) et Klasen (1999) découvrent que plus cet écart est Rodriguez, 1998). faible, moins le taux de natalité est élevé. 13. Swamy et al. (2001) évaluent cette relation en utili- 8. Dans un certain nombre d'études, on conclut que sant les dernières cases. Leur calcul laisse entendre que la pré- l'instruction des mères de famille influence davantage celle de sence d'un administrateur masculin augmente les possibilités leurs filles que celle de leurs garçons. En Malaisie, les degrés de pots-de-vin de 10 %. Il est intéressant de noter qu'ils ne d'instruction du père et de la mère influencent ceux de leurs trouvent aucune différence entre les sexes concernant les mon- enfants. Celui de la mère a plus d'influence sur celui des filles, tants versés dans les cas où des pots-de-vin sont versés. Les tandis que celui du père influence plutôt celui des garçons auteurs font remarquer que cette conclusion vaut aussi pour (Lillard et Willis, 1994). On a cependant décelé des cas où d'autres cas concrets en Géorgie, où le prix des pots-de-vin n'est c'est l'instruction de la mère qui influence celle des garçons, ce même pas un secret, de sorte que la personne intéressée qui devrait faire l'objet d'une étude plus approfondie (voir le conserve la discrétion de payer ou non. chapitre IV). 14. Comparez l'indice de la corruption et celui des droits 9. Pour une présentation de faits récents concernant les des femmes dans Kaufmann (1998). différences entre les sexes dans la sphère de la production agri- cole, consultez Quisumbing (1996). 15. Kaufmann (1998) utilise un indice des droits des 10. La plupart des exemples concrets indiquant les diffé- femmes différent de celui qui est produit par Humana (1986, rences entre les hommes et les femmes dans la production agri- 1992) et que nous utilisons dans ce rapport. Cependant, les cole proviennent d'Afrique subsaharienne. Là-bas, les hommes résultats apparaissant au tableau 2.2 sont qualitativement sem- et les femmes ont coutume de cultiver chacun leur lopin de blables, même lorsqu'on utilise l'indice Humana. terre, ce qui facilite ce genre de comparaison. 16. Des études, celle de Staudt, entre autres, font remar- 11. Zabalza et Tzannatos (1985) estiment que l'Acte bri- quer qu'une situation similaire existe dans certains pays en voie tannique de la rémunération égale, voté en 1970, a entraîné de développement (1997). une hausse des salaires de 15 % dans tous les secteurs. 17. La Porta et al. (1997) évaluent le degré de confiance 12. Par exemple, Eckel et Grossman (1998) se servent par le pourcentage de personnes répondant affirmativement d'un jeu un peu spécial nommé « anonymous dictator ». On lorsqu'on leur pose la question suivante : « En général, diriez- demande à chaque sujet participant à l'étude de partager 10 $ vous que l'on peut faire confiance à la plupart des gens, ou esti- avec un associé inconnu tout en ne prenant aucun risque. Les mez-vous que l'on n'est jamais trop prudent dans nos rela- femmes choisissent de céder en moyenne 1,60 $ au partenaire tions ? » Les pays affichant le degré de confiance le plus élevé inconnu, tandis que les hommes ne consentent à céder que la sont les pays scandinaves, où les deux tiers des personnes inter- moitié de cette somme. Andreoni et Vesterlund ont établi des rogées croient que l'on peut faire confiance aux étrangers. C'est comparaisons entre les comportements des deux sexes en se ser- en Amérique latine que l'on rencontre le degré de confiance le vant de jeux semblables et ont découvert que les femmes sont, moins élevé. Les différentes manières d'évaluer l'efficacité des dans l'ensemble, plus généreuses que les hommes, et qu'elles gouvernements proviennent de différentes sources et sont défi- sont plus enclines à partager leurs jetons même si la valeur des nies dans la grille 1 de cette étude (La Porta et al., 1997, pièces varie. Par contre, plus les jetons représentent des sommes p. 335). 109 Chapitre 2 16/06/03 14:50 Page 110 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 111 CHAPITRE III Les normes sociales, les lois et les institutions économiques L E DÉVELOPPEMENT ÉVOLUE DANS UN CADRE INSTITUTIONNEL qui est délimité par des coutumes, des normes sociales et qui implique un système de conduites ainsi que certaines structures comme les lois, les réglementations et les institutions économiques. Ces structures sont liées à plusieurs des inégalités fondées sur le genre men- tionnées au chapitre I. Pourquoi les garçons sont-ils plus scolarisés que les filles dans la plupart des pays? Pourquoi les titres de propriété sont-ils réservés aux hommes et demeurent-ils interdits aux femmes dans certains pays? Pourquoi les femmes et les jeunes filles sont-elles tenues de porter le voile dans certains pays? Comment expliquer que parfois les femmes et les filles sont mutilées ou tuées sous prétexte de « sauver leur honneur»? Pourquoi ce sont habituellement les hommes, et non les femmes, qui vont servir leur pays sous les drapeaux? Comment expliquer que les femmes vivent plus longtemps que les hommes? Et ainsi de suite. Dans ce chapitre, nous étudions les composantes propres à chaque genre qui sont inscrites dans les différents contextes sociaux, légaux et écono- miques. On s'interroge sur l'incidence de ces institutions sur les relations entre les sexes et sur les réalisations de chacun. On se demande aussi en quoi elles peuvent ouvrir la porte à une action politique. Les institutions influencent les opportunités et les contraintes qui déterminent les choix et les actions des gens. Elles donnent le ton aux jeux de pouvoir qui existent au sein de la famille, dans la société et dans le monde économique. Dès leur jeune âge, les enfants apprennent à vivre en accord avec les attentes de la société et, tout au long de leur vie, les structures institutionnelles ren- forcent les comportements qu'on attend d'eux comme hommes et femmes. Les institutions sont donc au coeur des problèmes et des solutions concer- nant les inégalités fondées sur le genre. 111 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 112 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Pour atteindre l'égalité, les stratégies de développement doivent s'efforcer de transformer les cadres légaux, les marchés et les diverses organisations en institutions qui sont effectivement fondées sur des principes d'égalité sur le plan des droits, des opportunités économiques et de l'influence politique. Afin d'y parvenir, il faut d'abord assurer des droits fondamentaux à tous, notamment en ce qui a trait aux droits politiques, civils et fonciers. Au début du XXe siècle, les pays nordiques ont accordé aux femmes un droit de vote égal à celui des hommes. En Chine, en 1950, les nouvelles lois octroyaient des droits égaux aux femmes et aux hommes concernant le mariage, le divorce et la natalité. En Colombie et au Costa Rica, au cours des années 1980, des réformes agraires ont visé à corriger spécialement des situa- tions d'inégalités concernant l'héritage de la terre, et ont considérablement amélioré les droits des femmes au niveau de la possession de biens fonciers. En Égypte, au début des années 2000, une coalition entre les hauts diri- geants du gouvernement et différents groupes de la société a considérable- ment amélioré les droits civils des femmes. Afin que le cadre institutionnel d'un pays continue à évoluer, il importe d'améliorer les institutions économiques, de sorte que la productivité, plutôt que le genre, la race ou l'âge, devienne le premier critère d'embauche et de rémunération sur le marché du travail. Il faut aussi que l'information soit accessible à tous et non pas réservée à certaines élites. Ce sont les structures des marchés qui déterminent en grande partie les salaires relatifs des hommes et des femmes, le rendement des biens de production ainsi que les prix des marchandises et des services. On peut même affirmer que les conditions de vie des femmes et de leur famille dépendent grandement de l'existence de certains marchés. Lorsque des infrastructures bien organisées existent pour l'approvisionnement en eau et en carburant et pour les garderies, cela réduit le fardeau domestique et permet aux femmes et aux filles de travailler à l'ex- térieur de la maison. Le taux de rendement des femmes augmente lorsque les marchés sont ouverts, ce qui incite fortement les familles à investir dans l'ins- truction de leurs filles. Cependant, même des lois proposant des droits fondamentaux égaux, jointes à des marchés plus ouverts et plus compétitifs, ne suffisent pas tou- jours à éliminer les inégalités les plus persistantes lorsqu'elles sont profondé- ment enracinées dans les institutions d'un pays. Des lois et des mesures bien ciblées, lorsqu'elles sont appliquées avec à-propos et de façon judicieuse, peu- vent réussir à contrer des inégalités sur les terrains des opportunités écono- miques et de l'influence politique. De fait, les politiques ont le pouvoir de modifier les institutions, et peu- vent ainsi appuyer solidement le principe de l'égalité des sexes. Mais elles doivent affronter plusieurs défis et courir des risques sérieux. Il arrive sou- 112 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 113 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES vent que les normes sociales d'un pays, ses coutumes, son cadre légal, ses marchés ainsi que sa hiérarchie soient intimement liés et se soutiennent. Il devient alors compliqué de modifier un de ces éléments sans affecter les autres. De plus, de fortes résistances peuvent apparaître, non seulement de la part de ceux qui pourraient être perdants, mais également de la part de ceux qui pourraient tirer un bénéfice des changements institutionnels, car ils peu- vent craindre les incertitudes apportées par ces changements. Cependant, les institutions sociales sont loin d'être immuables. Elles sont le fruit d'actions antérieures appuyées par les gouvernements et les sociétés civiles. Elles s'ex- pliquent aussi par les divers bouleversements politiques et sociaux du passé, par les événements économiques majeurs, même par les cataclysmes naturels, sans oublier les facteurs de changements actuels comme les médias de masse et le mouvement migratoire. La différence entre les sexes, les normes et les coutumes L ES NORMES SOCIALES ET LES COUTUMES SERAIENT EN GRANDE partie responsables des inégalités fondées sur le genre mentionnées au chapitre I. En effet, elles déterminent les rôles respectifs des hommes et des femmes au sein de la famille et de la communauté. Elles influencent aussi les priorités des individus, les jeux de pouvoir entre les sexes et les types d'occupations qui conviennent à chaque genre. Des hommes peuvent être ridiculisés s'ils accomplissent un travail réservé aux femmes, tandis que les femmes se font reprocher leur manque de féminité si elles se consacrent à des occupations dites masculines. Les normes sociales guident les comporte- ments des gens en tant qu'époux, parents, citoyens et travailleurs, ce qui fait qu'en déroger déclenche tout un système formel et informel de réprobations et de sanctions (Narayan et al., 2000). L'ensemble des normes et des coutumes varie selon les régions et les pays, ce qui entraîne des conséquences pour l'autonomie et pour les différents sta- tuts des hommes et des femmes (encadré 3.1). Dans la partie nord de l'Asie du Sud, les systèmes établis selon les liens du sang ont tendance à être forte- ment hiérarchisés selon le genre (Dyson et Moore, 1983). La tradition d'iso- ler les femmes, le purdah, est prédominante; elle les limite dans leur liberté de mouvement et dans leur autonomie (Mason, Smith et Morgan, 1998). Fidèle à cette tradition, la jeune mariée doit suivre son mari jusqu'à son vil- lage, parfois éloigné, ce qui l'oblige à couper les ponts avec son village natal. Cette pratique cause l'isolement de plusieurs jeunes femmes (elle les coupe de leur famille) et serait responsable d'une hausse du taux de mortalité fémi- nine (Kishor, 1993)1. 113 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 114 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Encadré 3.1 Les normes portant sur le genre varient réponses sont positives aux deux questions, avec un coef- selon les régions, mais les hommes et ficient de corrélation impressionnant: 0,85 pour la pre- les femmes sont plus souvent d'accord mière question et 0,99 pour la seconde. Plus les hommes qu'en désaccord et les femmes ont la conviction que la femme a besoin LES SONDAGES WORLD VALUES, RÉALISÉS ENTRE 1990 d'un enfant pour se sentir épanouie, plus ils et elles pen- et 1993, et dans lesquels on interrogeait des hommes et sent aussi que les hommes ont davantage le droit d'être des femmes de 40 pays, portaient sur la distribution du embauchés lorsque les emplois se font rares (avec un travail au sein du foyer (Inglehart, Basañez et Moreno, coefficient de 0,60 pour les deux sexes). 1998). Une plus grande proportion d'hommes que de On peut distinguer trois groupes de réponses : un femmes soutenait que « les hommes ont davantage droit petit nombre de pays où seulement une poignée à un emploi lorsque l'ouvrage est rare ». Une plus grande d'hommes et de femmes s'entendaient sur les deux pro- proportion de femmes que d'hommes estimait par positions; un groupe moyen dans lequel 40 à 60 % des ailleurs qu' « afin de se sentir épanouie, une femme doit personnes interrogées étaient d'accord avec les deux avoir des enfants » (voir le tableau). Les résultats obtenus propositions; et un troisième groupe dans lequel tant par les hommes et les femmes sont semblables. Leurs les hommes que les femmes étaient beaucoup plus d'ac- Les rôles selon le genre, vus par les hommes et les femmes (Pourcentage qui est d'accord avec l'énoncé) Biélorussie Biélorussie Hongrie Hongrie Lettonie Lettonie Russie Russie Bulgarie Bulgarie Estonie Estonie Lituanie Lituanie Inde Inde Nigeria Nigeria Tchécoslovaquie Tchécoslovaquie Danemark Danemark Roumanie Roumanie Corée du Sud Corée du Sud «Les hommes ont Pologne Pologne davantage droit à France France Japon Japon un emploi lorsque Turquie Turquie l'ouvrage est rare.» Afrique du Sud Afrique du Sud Allemagne de l'Est Allemagne de l'Est F Italie Italie Portugal Portugal H Chili Chili Argentine Argentine Slovénie Slovénie Brésil Brésil Mexique Mexique Autriche Autriche Belgique Belgique Espagne Espagne Chine Chine Allemagne de l'Ouest « Afin de se sentir Allemagne de l'Ouest Islande Islande épanouie, une Norvège Norvège femme doit avoir Irlande Irlande Canada Canada des enfants. » Suède Suède Royaume-Uni Royaume-Uni F Finlande Finlande États-Unis États-Unis H Pays-Bas Pays-Bas 0 20 40 60 80 100 Source : Basé sur des données tirées de Inglehart, Basañez et Moreno (1998). 114 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 115 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES cord avec la deuxième proposition qu'avec la première. droit d'être embauchés, sauf en Lituanie. Dans les pays Les pays scandinaves, les Pays-Bas et l'Amérique du de l'ancienne Union soviétique, l'embauche des femmes Nord, incluant le Mexique, appartiennent générale- a été encouragée par des mesures accordant aux femmes ment au premier groupe. Ceci correspond à l'image très des droits égaux à ceux des hommes pour leur scolarité et répandue des pays scandinaves, perçus comme les leur formation. On continue cependant à exiger qu'elles champions de l'égalité des sexes, et laisse entendre que assument le fardeau des responsabilités familiales, tout en les hommes et les femmes partagent des points de vue leur facilitant l'accès à des services de garde d'enfants similaires sur les rôles propres à chaque genre. Il y a (Lapidus, 1993). cependant une exception : le Danemark, où les repré- Un sondage semblable réalisé au Japon, en Corée et sentants des deux sexes s'entendent fortement sur le fait aux États-Unis au début des années 1990 demandait que les femmes ont besoin d'un enfant pour se sentir aux répondants si « il était préférable pour tous que les épanouies, mais qui ne sont pas d'accord avec le fait que hommes aillent gagner le pain hors du foyer et que les les hommes ont davantage le droit d'être embauchés, ce femmes entretiennent le foyer » (Inoue, 1998). En qui veut dire que les femmes exigent à la fois des Corée, 82 % des hommes se déclarent d'accord avec la enfants et des emplois. proposition, contre 63 % des hommes au Japon et 36 % Les réponses provenant de l'Europe et de l'Asie cen- aux États-Unis. Chez les femmes, les pourcentages trale, où un très grand pourcentage d'hommes et de étaient moins élevés mais tout de même passablement femmes estime qu'une femme doit avoir un enfant pour démarqués selon les pays : 71 % en Corée, 54 % au se sentir épanouie, sont tout aussi significatives. Mais Japon et 36 % aux États-Unis étaient d'accord avec la moins de la moitié des hommes et des femmes se disent proposition. Les hommes et les femmes partagent donc d'accord sur le fait que les hommes auraient davantage le la même opinion sur ce point aux États-Unis. Ces pratiques expliquent aussi pourquoi les familles ont souvent des réti- cences à envoyer les filles à l'école aussi longtemps que les garçons. En effet, les filles se marient très jeunes, avant l'âge de quinze ans, et parfois même de dix ans, puis elles délaissent leur famille à la suite du mariage. D'ailleurs, on ne s'at- tend pas à ce qu'elles travaillent à l'extérieur (Jejeebhoy, 1995; Alderman et King, 1998)2. La scolarité des jeunes filles peut même être envisagée de façon négative car elle comporte certains aspects «menaçants»: elle favorise les rap- prochements entre les garçons et les filles, elle fait rêver les jeunes filles en leur mettant dans la tête des aspirations contraires aux coutumes établies, puis, enfin, leur enlève le goût d'effectuer les tâches domestiques. À l'inverse, les groupes familiaux d'Asie du Sud-Est et d'Amérique latine sont généralement plus égalitaires. Les femmes y sont rarement mises de côté, les inégalités sur les plans de la scolarisation et des opportunités éco- nomiques ne sont pas très accentuées et les politiques systématiques qui favo- risent les garçons se rencontrent rarement (Jejeebhoy, 1995). En Asie du Sud-Est, les femmes jouent souvent un rôle économique important en tra- vaillant à l'extérieur du foyer, en administrant les finances familiales et en assurant un soutien à leurs parents âgés. Ce statut nettement plus élevé entraîne une plus grande mobilité et des investissements familiaux plus éle- 115 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 116 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE vés en faveur des femmes. Les normes sociales et les coutumes renferment cependant des structures qui débouchent sur la ségrégation professionnelle, sur des taux élevés de violence conjugale et sur d'énormes différences entre les salaires des hommes et ceux des femmes, différences qui ne dépendent pas des qualifications exigées, mais simplement du genre de la personne. Autre exemple de ces phénomènes: la culture dite du machismo, en Amérique latine et ailleurs, pratique pour ainsi dire le culte de la virilité, et considère la force physique et la violence comme des moyens efficaces pour résoudre les conflits, même lorsqu'un homme utilise cette force contre une femme (Sara Lafosse, 1998). Les rôles et les inégalités propres à chaque genre varient beaucoup d'une région à une autre et même au sein de chaque région. Cela s'explique par les différences entre les diverses castes, classes sociales, ethnies et religions ainsi que par l'interaction entre ces nombreuses entités. Dans les pays où les structures ethniques et religieuses sont homogènes, les rôles et les com- portements de chaque genre sont communément admis par tous, tandis que dans les petits pays où abondent les groupes ethniques, on peut obser- ver de multiples systèmes concernant le genre. Au Burkina Faso, par exemple, il existe différentes normes sociales qui varient selon les groupes ethniques, et ces normes influencent différemment tant la possession de biens fonciers que le droit au travail des femmes. Les Mossi, le groupe eth- nique le plus important du pays, et les Bwa vivent souvent à proximité l'un de l'autre, mais les normes concernant l'obligation pour les femmes de tra- vailler sur les terres de leur mari ne sont pas aussi contraignantes chez les Bwa que chez les Mossi. Par contre, dans chacun de ces groupes ethniques, c'est par le mariage que les femmes acquièrent certains droits sur les terres. Parce que les mariages sont en général plus stables chez les Mossi et que les titres de propriété sont, en conséquence, plus sécuritaires, la production agricole est considérablement plus élevée sur les terres gérées par des femmes Mossi que par des femmes Bwa, même si on tient compte d'autres facteurs (Vishwanath et al., 1996). Tout comme l'ethnie, la religion est un facteur ayant une incidence sur les relations entre les sexes. Cependant, les résultats de recherches effectuées sur ce sujet dans plusieurs pays demeurent ambivalents3. Cela n'est pas étonnant. La pratique de la religion s'inscrit dans un contexte social plus large. Par exemple, une étude comparée des populations musulmanes dans différents pays d'Asie nous fait découvrir que les femmes musulmanes expérimentent toute une gamme de degrés d'autonomie différents, selon le contexte (Mason, Smith et Morgan, 1998). Dans l'ensemble, les femmes d'Asie du Sud jouissent d'une moins grande autonomie que celles de l'Asie du Sud-Est, peu importe la religion. Dans chacune des régions, les femmes musulmanes 116 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 117 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES jouissent d'une liberté de mouvement réduite par rapport aux femmes non musulmanes. Cependant, elles ne participent pas tellement moins que les autres femmes aux décisions concernant les questions économiques et la natalité au sein de la famille. Cela laisse entendre qu'en plus de l'apparte- nance religieuse, il faut tenir compte d'autres facteurs qui peuvent influen- cer l'autonomie des femmes. Fondées sur des relations ancestrales bien enracinées et sur des systèmes religieux, les normes sociales et les coutumes relatives au genre sont difficiles à changer et tardent à se modifier, mais elles évoluent tout de même. Au cours des années passées, le concept d'égalité des sexes et celui des rôles propres à chaque genre ont évolué en réponse à des changements environ- nementaux, à des crises économiques et à des mouvements innovateurs, au rythme des transformations politiques et sociales. Des actions énergiques de la part de l'État et de groupes de la société civile, dans le cadre de réformes apportées aux lois et aux institutions économiques, ont apporté de profonds changements. Avec ou sans le soutien de la société civile, les gouvernements se sont servis des lois afin de catalyser les changements apportés aux normes et aux coutumes. Les sections suivantes portent sur les initiatives visant à ouvrir la voie à d'autres interventions politiques. Les lois et les droits L E SYSTÈME LÉGAL D'UN PAYS COMPREND GÉNÉRALEMENT DES lois, des coutumes et des traditions ayant force de loi, des lois reli- gieuses ainsi que des conventions internationales que le pays s'est engagé à ratifier. Les lois se retrouvent dans tous les volets du système légal. Ici, le terme inclut même les jugements émis devant la cour. Les coutumes et traditions ayant force de loi sont des dispositions parallèles aux lois, mais dont la légitimité provient des us et coutumes plutôt que d'une décision des auto- rités. Lorsque plusieurs religions et ethnies se côtoient dans un pays, ce genre de loi est fragmenté. Les différentes parties du cadre légal sont le reflet des normes et des cou- tumes relatives aux relations entre les sexes et à leurs rôles respectifs. Par exemple, dans plusieurs pays, les taxes sont imposées au chef de famille et les terres sont enregistrées à son nom. Et parce que l'homme est le présumé chef de famille dans plusieurs sociétés, il arrive souvent qu'on ne tienne même pas compte d'une requête par rapport à un revenu ou un titre de propriété effec- tuée par une femme. Mais le système légal ne doit pas se contenter unique- ment de codifier les normes et les coutumes. Il doit également indiquer com- ment une société devrait fonctionner en tenant compte du principe d'égalité. Il devient alors un instrument de réforme sociale. 117 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 118 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Les droits de l'homme, de jure et de facto Les constitutions de tous les pays du monde proclament les droits fonda- mentaux de l'homme. Au moins en principe, plusieurs de ces constitutions énoncent explicitement qu'il ne doit pas y avoir de discrimination entre les hommes et les femmes par rapport à ces droits. Mais les constitutions d'un pays ne s'appliquent pas automatiquement dans la pratique. Par exemple, plusieurs constitutions affirment clairement que les hommes et les femmes jouissent du même droit de voter et d'être élus aux différentes fonctions publiques. Mais, en réalité, les inégalités fondées sur le genre concernant l'al- phabétisation et l'accès à l'information limitent considérablement la partici- pation des femmes aux forums politiques. Plusieurs pays formulent même des lois sur l'instruction obligatoire, reconnue comme étant un droit fonda- mental, mais l'organisation concrète du système scolaire est de nature à en décourager l'accès aux filles. Si l'on ne tient pas compte des particularités propres à chaque genre dans l'application des mesures légales, on risque de rendre inopérants les beaux principes constitutionnels. La réalisation des engagements de l'État en faveur de l'égalité rencontre des obstacles inévitables. Comme on le verra dans la prochaine section, il arrive souvent que d'autres lois ou d'autres coutumes ayant force de loi soient tou- jours en vigueur et aillent à l'encontre de ces engagements, ce qui empêche l'octroi de droits égaux aux femmes et aux hommes. En outre, la mise en application des lois peut souvent être retardée ou limitée, soit parce que ces dernières contredisent d'autres traditions ou lois religieuses, soit parce qu'il n'y a pas d'organismes administratifs aptes à les faire appliquer. Le droit international peut exercer une influence importante sur les lois d'un pays, spécialement en matière de droits de l'homme. Celui-ci intègre en effet l'égalité des sexes dans le contexte plus global des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du moins en ce qui concerne les droits écono- miques et politiques, l'accès aux services de santé et d'éducation ainsi que les décisions au sujet de la natalité. Un grand nombre d'États reconnaissent (du moins, en principe) les normes exprimées dans les instruments juridiques des Nations Unies, comme la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée en 1948. Ils reconnaissent aussi d'autres lois et conventions interna- tionales ayant trait au problème de la discrimination fondée sur le genre. La Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW), votée en 1979, est considérée comme la charte internationale des droits des femmes. Elle interdit notamment toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le genre qui empêcherait ou annulerait les libertés et droits fondamentaux des femmes. Cette convention établit que les femmes jouissent de droits égaux à ceux des hommes concer- nant la participation politique (Articles 7 et 8); l'accès à l'éducation 118 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 119 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES (Article 10), au marché du travail (Article 11), aux soins de santé (Article 12) et aux services de crédit (Article 13). Elle reconnaît également aux femmes le droit de contracter un mariage et de prendre des décisions en matière de natalité et de divorce (Article 16). Lorsqu'un État ratifie cette convention, il doit présenter, au bout d'un an, un rapport qui rend compte des efforts déployés afin d'atteindre les objectifs de celle-ci; il doit ensuite produire ce rapport tous les quatre ans. La Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes, votée en 1993, énonce quant à elle que «les États devraient condamner la violence à l'égard des femmes et ne pas invoquer de considérations de coutume, de tra- dition ou de religion pour se soustraire à l'obligation de l'éliminer» (Article 4). Le Sommet mondial pour le développement social, tenu à Copenhague en 1995, a endossé des engagements semblables concernant les droits des femmes. De plus, la Déclaration et le plan d'action de la Quatrième confé- rence mondiale sur les femmes de Beijing, en 1995, ont confirmé les engage- ments des précédentes déclarations internationales, rappelant qu'il faut « garantir la pleine réalisation des droits fondamentaux des femmes et des filles, en tant que partie inaliénable, intégrante et indivisible de tous les droits de la personne humaine et de toutes les libertés fondamentales » (Article 9; ONU, 1997). Au début de l'an 2000, 165 pays membres des Nations Unies (tous sauf l'Afghanistan et la république islamique d'Iran) avaient ratifié ces conven- tions. Encore une fois, leur application est une tout autre affaire. Les pays signataires ont l'obligation d'ajuster leurs lois, leurs politiques et leurs pra- tiques aux traités signés, mais ce processus a échoué pour de nombreux pays (ONU, 1997). De plus, certains pays ont ratifié ces traités avec des réserves, de façon à diluer les exigences des conventions4. La création de droits égaux L'égalité des sexes constitue un élément important du développement. En effet, les droits légaux, sociaux et économiques forment un contexte permet- tant aux hommes et aux femmes de participer de façon productive à la société, d'accéder à une bonne qualité de vie et de profiter des opportunités économiques qui découlent du développement. Une plus grande égalité en matière de droits se traduit presque systématiquement par une plus grande égalité des sexes en termes d'éducation, d'espérance de vie et de participation politique, peu importe le revenu (tableau 3.1). Reprenant les faits chronologiques recueillis auprès de 85 pays, le tableau 3.1 expose la corrélation entre un indice permettant d'évaluer le degré d'égalité entre les sexes pour les droits (Humana, 1992) et quatre indicateurs d'inégalités fondées sur le genre. Comme nous l'avons expliqué au chapitre I, 119 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 120 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 3.1 Lorsque les droits sont égaux, l'écart entre les sexes est plus petit Inscription au niveau primaire, 1995 Inscription au niveau secondaire, 1995 1,00 1,00 0,95 0,95 0,90 0,90 femmes-hommes femmes-hommes Rapport 0,85 Rapport 0,85 0,80 0,80 Faible égalité en Forte égalité en Faible égalité en Forte égalité en matière de droits matière de droits matière de droits matière de droits Espérance de vie, 1997 Représentation parlementaire, 1995 1,08 0,8 1,04 0,6 1,00 0,4 femmes-hommes femmes-hommes Rapport 0,96 Rapport 0,2 0,92 0,0 Faible égalité en Forte égalité en Faible égalité en Forte égalité en matière de droits matière de droits matière de droits matière de droits Note : L'égalité des droits correspond à une valeur calculée en faisant la moyenne de trois indices d'égalité en matière de droits (égalité de droits poli- tiques et légaux, égalité de droits sociaux et économiques et égalité de droits pour le mariage ou le divorce). Humana (1992) a dépouillé ces indices pour plus de 100 pays. Un résultat moyen de 2,33 ou moins représente une faible égalité en matière de droits, et un score moyen de 2,67 ou plus indique une forte égalité. Voir l'encadré 1.1 pour une définition de l'indice d'égalité des droits; voir l'annexe I pour une remarque d'ordre général et pour connaître les pays concernés; voir l'annexe II pour les résultats de régression et le lexique pour la définition du terme rapport femmes- hommes. Source : Humana (1992); WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d). 120 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 121 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES cet indice provient de la moyenne obtenue pour les trois domaines suivants: égalité politique et légale, égalité sociale et économique, et égalité en matière de mariage et de divorce. L'analyse, qui tient compte du PIB per capita (en logarithmes, exprimé au second degré afin de montrer la relation non linéaire) révèle une relation positive entre l'égalité des sexes en matière de droits et les différences fondées sur le genre au niveau de la scolarité, de l'espérance de vie et de la participation politique5. Les pays pour lesquels les données étaient disponibles sont répartis entre ceux où l'égalité des sexes est faible et ceux où elle est élevée, selon la valeur moyenne de l'indice des droits. La valeur « projetée » pour chaque groupe de pays est calculée à partir d'un coefficient estimé pour les droits, en tenant compte des revenus et d'une population moyenne. Les différences entre les rapports femmes-hommes varient selon les différents indicateurs. Par exemple, en ce qui concerne le taux d'inscription au niveau primaire, on note une différence de 5 % entre les rapports femmes-hommes pour les pays où l'égalité est élevée et les pays où l'égalité est faible. La différence est beaucoup plus accentuée (7 %) en ce qui concerne le taux des sièges détenus au Parlement6. Afin d'améliorer l'égalité des droits et d'établir une base institutionnelle favo- risant une protection plus équitable et des opportunités économiques égales tant pour les hommes que pour les femmes, des changements statutaires signi- ficatifs doivent être amorcés, spécialement dans les domaines suivants: la légis- lation familiale, la protection contre la violence conjugale, les droits fonciers et l'influence, ou le droit de parole, en politique. Dans la dernière partie de cette section, nous traitons ainsi des systèmes légaux relatifs aux domaines men- tionnés ci-dessus ainsi que des opportunités liées aux réformes légales. Nous mettons ensuite en lumière certains points qui s'avèrent pertinents en ce qui a trait à l'adoption de politiques publiques. La législation familiale. La législation familiale régit l'autonomie des hommes et des femmes et les affaires concernant la famille, comme le mariage, le divorce, la natalité, la garde des enfants, la propriété des biens conjugaux et les questions d'héritage. Il s'agit d'un domaine où les droits sont évidemment inégaux (voir le chapitre I) et où l'impact des normes et des coutumes se fait davantage sentir. Les inégalités en matière de législation familiale s'avèrent particulièrement litigieuses car elles touchent des domaines sensibles: la relation entre mari et femme, le nombre d'enfants dans la famille, les droits des parents sur leurs enfants. Parallèlement aux lois civiles, les coutumes ayant force de loi et les tradi- tions religieuses prescrivent aussi des droits familiaux qui peuvent s'avérer compatibles ou non avec le système. Une réforme des lois doit donc tenir compte de l'incidence possible de ces structures judiciaires parallèles. 121 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 122 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Par exemple, en Ouganda, la loi de 1964 décrétait que les époux ont les mêmes droits concernant le divorce, mais négligeait d'éclaircir la question de la propriété conjugale. Sur ce point précis, c'est une coutume ayant force de loi qui prévalait, voulant que la femme possède des titres de propriété par l'entremise de son mari seulement et que, en cas de veuvage, elle ne puisse obtenir des titres de propriété que par l'entremise des membres masculins de sa famille (Gopal et Salim, 1998). Au Zimbabwe, si un mariage est enregis- tré sous la Loi des mariages, il est présumé monogame et ni l'homme ni la femme ne peuvent contracter un deuxième mariage. Mais s'il est enregistré sous la Loi des mariages coutumiers, il peut être polygame; le mari peut donc contracter d'autres mariages, mais la femme ne le peut pas (Hellum, 1998). Comme d'autres pays, les traditions en Ouganda et au Zimbabwe sont à l'opposé de l'objectif de l'égalité des sexes, ce qui constitue un défi important pour ces pays. La Loi sur le mariage de 1950, en Chine, est un exemple de changement rapide apporté aux normes familiales traditionnelles (Honig, 1985; Hooper, 1984). Grâce à cette loi, l'État visait à éliminer les mariages arrangés, la poly- gamie, l'achat des mariées et les mariages d'enfants. On concédait aux femmes l'autorisation de choisir leur partenaire, de demander le divorce, d'hériter de propriétés et de partager la garde de leurs enfants7. On les incitait à investir en grand nombre le marché du travail. On a mis sur pied des cuisines collectives et des garderies dans le but de libérer les femmes des tâches domestiques. Cette réforme a certainement joué un rôle majeur dans la conquête de l'égalité des sexes en Chine, mais elle a coûté très cher. Elle a soulevé de violentes opposi- tions chez les paysans et les femmes âgées, et l'on dit que cette loi aurait été la cause de quelques dizaines de milliers de suicides et de meurtres de femmes en l'espace de quelques années8. En Égypte, la Loi sur les nouveaux contrats de mariage, promulguée en 2000, accorde aux femmes le droit au divorce, privilège traditionnellement réservé aux hommes. Avant l'application de cette loi, les hommes jouissaient du droit unilatéral et inconditionnel de divorcer de leur femme, tandis que ces dernières devaient affronter d'innombrables difficultés pour obtenir un divorce et une pension alimentaire (Zulficar, 1999). Cette nouvelle loi a fini par voir le jour à la suite d'une lutte d'une durée de dix ans entre des membres délégués du gouvernement, des défenseurs des droits de l'homme et des spécialistes de la doctrine musulmane, lesquels ont fini par donner leur approbation au pro- jet de loi, n'y voyant plus de contradiction avec les enseignements musulmans. L'État devrait-il intervenir dans des affaires considérées comme personnelles et du ressort de la vie privée? Des changements à la législation familiale ont des répercussions directes sur le bien-être des personnes. Prenons pour exemple les réformes légales au Canada. Avant 1970, les femmes avaient un 122 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 123 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES pouvoir limité concernant la réclamation de biens et de droits fonciers lorsque leur mariage était dissous. Des changements apportés à la législation concer- nant le divorce dans les provinces de l'Ontario et de la Colombie-Britannique ont modifié la situation, améliorant les conditions de divorce pour la femme. Une étude portant sur les taux annuels de suicide par catégorie d'âge, entre 1960 et 1994, et tenant compte des taux de chômage, a constaté qu'une chute du taux de suicide chez les aînées et les femmes mariées coïncidait avec ces réformes de la législation concernant le divorce. Cette baisse du taux de suicide se démarquait uniquement chez les femmes mariées et les aînées habi- tant ces deux provinces où la loi avait été modifiée. L'étude concluait donc que cette chute était la conséquence directe de la réforme des droits fonciers à l'intérieur du mariage (Hoddinott et Adam, 1998). La violence liée au genre. Dans certains pays, les lois contre la violence faite aux femmes comportent des éléments qui portent préjudice aux victimes et, du même coup, rendent ces lois inopérantes. Des lois, dont l'objectif est de contrer la violence faite aux femmes, définissent la violence de façon trop stricte et exi- gent des preuves tellement compliquées à fournir qu'il est extrêmement pénible de les appliquer (Heise, Pitanguy et Germain, 1994; A.Goldstein, 1999). Dans certains pays d'Amérique latine, les délits d'ordre sexuel sont considérés comme des crimes uniquement s'ils sont perpétrés sur des femmes ou des filles dites honnêtes ou respectables. Au Chili et au Guatemala, les lois stipulent qu'un vio- leur est exonéré de tout blâme s'il épouse sa victime, car le mariage est perçu comme un moyen de restaurer son honneur (Heise, Pitanguy et Germain, 1994). En Jordanie et au Pakistan, un homme qui mutile ou qui tue sa femme afin de sauver son honneur reçoit une sentence plus bénigne, s'il est puni, que d'autres criminels trouvés coupables d'offenses similaires contre d'autres per- sonnes. Ces exemples prouvent qu'il est nécessaire d'épurer les lois en éliminant les éléments discriminatoires qui portent préjudice aux victimes. Aux États-Unis, les cas de violence ont considérablement diminué depuis que les auteurs de méfaits sont davantage pénalisés. On constate alors qu'une réforme légale renforçant les droits des femmes victimes de violence améliore vraiment la situation (Heise, Elsberg et Gottemoeller, 1999). En fait, les pays développés comptent sur l'appui du système judiciaire pour remédier à ces problèmes. Et grâce à la pression exercée par divers groupes féministes, les pays en voie de développement les imitent. Même si les législations diffèrent d'un endroit à un autre, la plupart comportent des ordres de détention provisoire ainsi que des peines plus lourdes pour les récidivistes. Les mesures de détention provisoire permettent aux juges d'éloigner temporairement un homme violent de son foyer afin de lui permettre d'aller chercher de l'aide psychologique, tout en le soumettant à une pension alimentaire. La violation de ces mesures peut entraîner l'arrestation, et même l'emprisonnement. 123 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 124 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE L'application de la loi constitue un obstacle de taille pour les personnes qui désirent se soustraire à la violence. Les difficultés inhérentes aux procédures ainsi que les attitudes traditionnelles des personnes chargées d'appliquer la loi contribuent malheureusement à affaiblir les lois visant à contrer la vio- lence faite aux femmes (Gopal et Salim, 1998; A. Goldstein, 1999). Les juges, les procureurs et les officiers de police sont souvent de genre mascu- lin, et peuvent partager le point de vue de l'offenseur. En plus de créer un système de protection légale adéquat, il est urgent de rééduquer, sinon de remplacer, dans certains cas, les personnes chargées de faire appliquer la loi (A. Goldstein, 1999). Les responsables des programmes de formation judi- ciaire ne doivent pas se contenter d'appliquer abstraitement les droits de l'homme. Ils doivent d'abord tenir compte de la législation familiale exis- tante, qui peut souvent faire partie du problème de la violence faite aux femmes. Enfin, si nous voulons des lois vraiment efficaces, il ne faut pas oublier d'éduquer les femmes: il faut les renseigner sur leurs droits et leur indiquer comment elles peuvent les faire respecter (Heise, Elsberg et Gottemoeller, 1999). Les droits fonciers. La terre est un bien précieux pour tous, mais les hommes et les femmes ne jouissent pas de droits fonciers égaux. En Amérique latine, des mesures de réforme agraire, comme l'enregistrement des titres de propriété, ont un énorme impact sur l'accès des femmes à la pro- priété. À la suite de la réforme agraire au Costa Rica, les femmes détenaient 45% des titres de propriété entre 1990 et 1992, alors qu'elles comptaient pour 12% des titulaires avant la réforme. En Colombie, grâce à une loi qui établit des droits fonciers conjoints, les titres appartenant à des couples ont atteint jusqu'à 60% de l'ensemble en 1996, comparativement à 18% en 1995. Les titres appartenant exclusivement à des hommes ont connu un déclin, passant de 63 à 24% au cours de la même période (Deere et Leon, 1999). Mais ce ne sont pas tous les pays d'Amérique latine qui, à l'occasion de réformes récentes, ont connu une amélioration au niveau de l'égalité des sexes en ce qui concerne les droits fonciers9. En Bolivie et en Équateur, par exemple, les droits fonciers des femmes n'ont pas été abordés lors des pour- parlers au sujet des réformes agraires, et il n'y a pas eu de proposition visant à rendre les titres de propriété conjoints ou accordant des droits spéciaux aux femmes. Il faut tirer une importante leçon de l'expérience des pays d'Amérique latine. Un projet de réforme statutaire peut être contrecarré si l'on néglige de tenir compte de l'incidence des normes sociales et des cou- tumes sur ce projet. Des programmes de réforme agraire avaient par le passé désigné les chefs de foyer comme bénéficiaires directs, mais la coutume vou- lait que les hommes soient les chefs de foyers. Ces projets de réforme étaient 124 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 125 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES donc insuffisants, puisque les femmes se retrouvaient encore une fois exclues (Deere et Leon, 1997). Mais en émettant des titres de propriété conjoints, et d'autres titres au nom des femmes dans les cas d'unions consensuelles, on a réussi avec succès à renforcer les droits fonciers des femmes dans certaines parties de la région. L'exemple du Laos démontre clairement que les femmes sont exposées à perdre leurs droits fonciers, à moins qu'on apporte une solution aux ques- tions de genre en ce qui concerne les titres de propriété. La loi de 1996 pour la protection de la forêt, et celle de 1997, portant sur les terres, comportent tous les détails légaux qui régissent la propriété de la terre et son usufruit. Chacune de ces lois s'applique théoriquement de façon égale à chaque genre, en ce sens que les femmes ne sont pas explicitement exclues des processus de distribution ou d'émission de titres de propriété, mais elle n'y sont pas incluses non plus. Mais dans la pratique, les formulaires officiels utilisés lors de la distribution des titres ou autres enregistrements se font au nom du chef de famille, lequel est ordinairement le mari, s'il est vivant. Ainsi, la coutume permet aux Laotiennes d'hériter des biens fonciers de leurs parents, mais comme le droit coutumier est renversé par la nouvelle législation qui com- prend des procédures qui excluent les femmes, les hommes voient leur contrôle de la terre considérablement majoré, mais aux dépens des femmes (Viravong, 1999). Lorsque le droit coutumier prévaut dans l'attribution de la propriété, le déploiement d'efforts d'ordre légal afin d'améliorer les droits fonciers des femmes peut contribuer, au contraire, à empirer la situation. En Afrique sub- saharienne, la situation sociale des femmes contribue à aggraver les conflits entre les lois et les coutumes concernant les titres de propriété (Dey Abbas, 1997; Kevane et Gray, 1996). L'usufruit de la terre pour les femmes est géné- ralement bien appuyé par des coutumes, mais des règlements allant à l'en- contre des droits fonciers ont pour effet qu'on leur refuse les titres de pro- priété. Même lorsque des normes locales appuient fortement le droit à l'usufruit de la terre pour les femmes, ce n'est que par l'entremise des hommes que celles-ci acquièrent ce droit. Il s'agit donc d'un droit précaire pour la femme, intimement lié à son statut marital (encadré 3.2). Au Kenya, les femmes n'ont pas nécessairement profité de la reconnais- sance de leurs droits fonciers. Une veuve peut diriger une ferme, mais elle n'en est pas la propriétaire, car celle-ci demeure enregistrée au nom de son mari. La création de lois sur les héritages a également mis en péril les droits des veuves à l'usufruit de la terre. En effet, un fils qui hérite d'une terre peut très bien la vendre sans le consentement de sa mère, ce qui prive la veuve de son moyen de subsistance (Davison, 1998). 125 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 126 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Encadré 3.2 Les droits fonciers des femmes en · En Afrique de l'Est, sous le régime de la propriété Afrique familiale, le mari divise les terres et le cheptel entre ses femmes. Les droits fonciers de la femme ne relè- LES SYSTÈMES SOCIAUX DE L'AFRIQUE SUBSAHARIENNE vent pas du bon vouloir de son mari, mais de l'exis- sont plus hétérogènes que presque partout au tence de fils et du bon vouloir de ces fils. Si une monde. Dans la poursuite de leurs droits fonciers et veuve meurt sans avoir de fils, c'est la parenté de son comme membres de groupes sociaux, les femmes mari qui hérite de sa propriété. africaines gagnent parfois du terrain, ou en perdent, au gré des révisions dans les lois et des changements · Le système des titres de propriété est encore plus dans les coutumes ayant force de loi. complexe en Afrique du Sud. Même si de solides Les femmes qui héritent grâce aux préceptes de la droits sont accordés aux femmes dans certaines loi islamique jouissent de solides droits fonciers. régions, ce sont en général les hommes qui contrô- C'est le cas dans la partie est du Soudan, pour les lent la terre. Les femmes mariées peuvent obtenir paysans Swahili et sur les côtes de la Tanzanie. Dans des biens fonciers par l'intermédiaire de leur mari certaines parties de l'Afrique de l'Ouest et de et les conserver aussi longtemps que dure le l'Afrique centrale, des législations nationales recon- mariage. Mais elles sont susceptibles de perdre ces naissent fortement ce droit aux femmes. Par biens lorsqu'elles deviennent veuves, sauf en de exemple, parmi les Lemba, au Zaïre, les femmes rares exceptions, comme au Zimbabwe, où les lois habitent leur village natal après leur mariage, et ce favorisent les femmes. sont elles qui autorisent leur mari à travailler sur · Dans certaines parties isolées d'Afrique, c'est la leurs terres. lignée maternelle qui prévaut en matière d'héri- Mais dans la plupart des pays d'Afrique, les tage. Mais même dans ces conditions, ce sont les femmes ne jouissent pas des mêmes droits fonciers hommes qui possèdent et contrôlent la terre. que les hommes, et elles obtiennent ces droits prin- Ainsi, le droit des femmes de posséder une terre cipalement par le biais du mariage. n'est pas nécessairement plus assuré là où la lignée · En Afrique de l'Ouest sahélienne, les femmes maternelle prévaut. Une veuve peut perdre ses ont l'usufruit des terres contrôlées par la lignée droits de propriété très facilement aux mains de la de leur mari, mais elles perdent ce droit si elles famille de son mari. Chez les Akans du Ghana, divorcent, deviennent veuves ou changent de une veuve est exposée à perdre ses biens fonciers domicile. Sans la permission du chef de lignée, aux mains des frères ou du fils de la soeur de son les terrains ne peuvent changer de propriétaire. mari. Source : Kevane et Gray (1996); Lastarria-Cornheil (1997). Les programmes de réforme agraire au Kenya doivent composer avec un système légal comportant de multiples différences culturelles et traditions religieuses. Les coutumes ayant force de loi, la loi islamique, la loi hindoue et les autres lois font valoir leurs propres recommandations et restrictions au sujet des droits fonciers des femmes. Selon certaines coutumes ayant force légale, seuls les fils peuvent hériter, tandis que les veuves et les filles non mariées ont le droit d'être entretenues. Les filles non mariées n'ont aucun droits sur la propriété de leur défunt père. La loi islamique concède aux veuves avec enfants le huitième de la propriété de leur mari, tandis que les veuves sans enfants en reçoivent le quart. Les filles ont, de leur côté, droit à la moitié du montant de la somme héritée par leurs frères. La loi hindoue ne 126 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 127 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES reconnaît aux veuves que le droit d'être entretenues. Enfin, la loi accorde à la veuve le droit de continuer à vivre dans la maison familiale ainsi que de profiter des biens du mari si celui-ci l'a nommée bénéficiaire d'une police d'assurance couvrant ses biens (Martin et Hashi, 1992). Il existe des situations où les lois et les coutumes ayant force de loi se ren- forcent mutuellement. Parmi les familles Akan, dans la partie ouest du Ghana, le mouvement d'individualisation concernant les titres de pro- priété a contribué à renforcer l'accès des femmes à ces titres (Quisumbing et al., 1999). Cela est survenu à la suite d'une pratique voulant que les hommes offrent un lopin de terre à leur femme si celle-ci s'engage à y plan- ter des arbres de cacao. Avec l'application de la loi sur les successions (Interstate Succession Law), ce lopin peut devenir la propriété légale des femmes, ce que le droit coutumier leur niait auparavant. Chez les familles dirigées par une femme, les terres reçues en cadeau représentent 50% de toutes les terres acquises, ce qui signifie que cette réforme statutaire influence considérablement le nombre de biens fonciers qui appartiennent légalement aux femmes. En Afrique du Sud, où la coutume invite à «un accès universel à la terre et aux autres biens de subsistance, de telle sorte que les familles possédant des terres en abondance en transfèrent à d'autres, plus nécessiteuses» (Jacobs, 1998, p. 81), le gouvernement a choisi une façon originale de gérer le pro- blème complexe de la propriété rurale et des inégalités fondées sur le genre. Reconnaissant qu'il est possible que le marché officiel des titres et les cou- tumes peuvent nuire aux femmes qui veulent accéder aux titres de propriété, le gouvernement a passé en 1996 une loi (Communal Property Association Act) permettant aux individus de faire l'acquisition de terres, moyennant une inscription comme membre d'une association de propriété communautaire. Il est trop tôt pour évaluer si cette mesure favorise l'accès des femmes à la propriété, mais elle vaut la peine d'être suivie de près. Participation et influence. Le droit d'initier un débat public et celui de voter ou de se présenter à une élection sont des droits que plusieurs consi- dèrent comme allant de soi. Presque tous les pays, aujourd'hui, ont accordé le droit de vote aux deux sexes. Mais les choses n'ont pas toujours été ainsi, même en principe. Même dans les pays les plus développés, le droit de vote pour les femmes n'existe que depuis moins d'un siècle (sauf pour la Nouvelle-Zélande, où il existe depuis 1893, et pour l'Australie, en 1901). Cela laisse deviner les nombreuses lacunes ou limites concernant d'autres droits des femmes. Dans plusieurs pays en voie de développement, le droit de vote a été accordé également aux hommes et aux femmes au moment de leur indépen- dance. Mais dans deux pays, le Koweït et les Émirats arabes unis, ce droit est 127 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 128 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE encore réservé uniquement aux hommes. Dans certains pays, des intérêts coloniaux ainsi que des préjugés raciaux et ethniques ont empêché les hommes et les femmes de groupes minoritaires ou indigènes de voter, bien après que les femmes du groupe majoritaire eurent obtenu ce droit. Ce fut, entre autres, le cas en Australie, au Canada et en Afrique du Sud. Et dans cer- tains pays, des exigences en matière d'éducation ou de propriété ont empê- ché les femmes de se présenter aux urnes. Au Portugal, le droit de vote a été accordé aux femmes en 1931, mais uniquement à celles qui avaient complété leur cycle secondaire, tandis qu'on exigeait simplement des hommes qu'ils sachent lire et écrire. On ne devait révoquer cette clause que 20 ans plus tard. Beaucoup d'autres pays ont imposé cette exigence pour que leurs habitants puissent exercer leur droit de vote, notamment la Bolivie, la Syrie et le Zimbabwe, tandis que les Bahamas et le Kenya exigeaient des titres de pro- priété (WISTAT, 1998; Sokoloff et Engerman, 2000)10. La plupart des pays ont accordé aux femmes le droit d'être élues à des postes publics. Mais ce droit a parfois été concédé bien après qu'on leur eut accordé le droit de vote, et souvent avec des restrictions. Par exemple, la Grèce a autorisé les femmes à voter en 1930, à briguer un poste au niveau municipal en 1949 et au niveau national en 1952 (WISTAT, 1998). Au chapitre I, nous avons montré comment les femmes occupent en moyenne 10% des sièges au Parlement dans les régions en voie de dévelop- pement (sauf en Asie de l'Est). Il faut ajouter que certains pays ont fait des efforts louables, en réformant les lois, afin d'augmenter la représentation féminine au Parlement. En Inde, deux amendements constitutionnels effec- tués en 1992 exigeaient qu'au moins le tiers des sièges d'un panchayat (conseil local) et d'un conseil municipal soient réservés aux femmes. Deux ans après l'application de ces mesures, plus de 350 000 femmes occupaient un poste politique (Sen, 2000). Et un nombre grandissant de femmes vont voter. L'Ouganda a aussi pris des mesures pour augmenter l'engagement des femmes sur la scène politique, entre autres en leur réservant des postes administratifs, et même des postes législatifs. On compte maintenant beau- coup plus de femmes au gouvernement. Depuis 1989, les femmes occupent 18% des sièges de l'Assemblée nationale, un taux plus élevé que dans cer- tains pays industrialisés (Ahikire, 1994; Goetz, 1998). Aux Philippines, au début des années 1990, on avait dressé des listes spéciales («party list sys- tem») dans le but d'augmenter le nombre de femmes à la Chambre des représentants (NCRFW, 1999). Cette initiative a visiblement influencé l'instauration de mesures politiques relatives à la natalité et à la violence faite aux femmes. Il reste à voir si le mouvement de représentation féminine se poursuivra. 128 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 129 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES Les institutions économiques C OMME LE SYSTÈME LÉGAL, LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES d'un pays influencent les activités que les hommes et les femmes peuvent entreprendre, les ressources auxquelles ils ont accès ainsi que leur manière de participer à l'économie. Les institutions économiques sont rattachées à des marchés et sont fortement hiérarchisées. Elles compor- tent des règles qui régissent nos transactions et influencent nos décisions concernant la consommation, l'épargne, les investissements, l'emploi et la natalité. À l'instar des systèmes légaux, elles sont aussi le reflet de normes sociales et de coutumes qui peuvent contenir des aspects discriminatoires pour les femmes. Par exemple: · Des politiques d'emploi apparemment neutres, comme celle de n'em- baucher que des travailleurs à temps plein selon un horaire précis, nui- sent aux mères qui ont besoin d'un horaire flexible. De telles politiques contribuent à perpétuer une nette division du travail. · Des réseaux d'information au sujet des emplois disponibles s'adressent parfois à des groupes réduits. Cela privilégie les personnes déjà associées à ces groupes, mais les autres personnes intéressées, le plus souvent des femmes, sont défavorisées. · Les marchés d'assurance santé en voie d'expansion ne s'adressent pas aux femmes, ou le font seulement par l'intermédiaire de leurs maris. L'absence d'un régime d'assurance formel pour protéger le troisième âge et l'existence de droits fonciers inégaux obligent les femmes à compter sur les membres masculins de leur famille pour assurer leurs vieux jours. · Des marchés de crédit qui exigent du client qu'il soit propriétaire d'un terrain ou d'une maison afin de garantir un prêt ne sont pas du tout au service des femmes, à qui on reconnaît difficilement le droit d'être pro- priétaires. On exige aussi que le mari ou un autre membre masculin de la famille soit cosignataire afin d'accorder un prêt à une femme, ce qui complique davantage le démarrage ou le maintien d'une entreprise (Fafchamps, 2000). Mais la stratification et la hiérarchisation des marchés sont encore plus explicites et plus délibérées que dans ces exemples. Pour le marché foncier, les lois sur le droit de propriété vont jusqu'à déterminer qui peut devenir propriétaire et qui est autorisé à vendre ou à acheter la propriété. Sur le marché du travail, si un employeur vit dans la crainte que ses employées quittent leur emploi pour se marier ou avoir des enfants, ou qu'elles invo- quent des responsabilités familiales pour interrompre leur travail, il sera porté à refuser d'embaucher des femmes. Résultat: malgré leur instruction 129 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 130 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE et leur expérience, les femmes sont contraintes d'accepter des emplois peu rémunérés ou des occupations exigeant des qualifications moindres, tan- dis que les hommes sont libres de choisir leur emploi parmi tout un éven- tail de postes11. Les préjugés et l'accès réduit aux réseaux d'information expliquent, dans une certaine mesure, pourquoi les femmes sont extraordinairement sous- représentées dans les postes de direction et d'administration à travers le monde. La culture propre au monde bureaucratique, qu'on rencontre dans les entreprises et les gouvernements, consiste en des pratiques particulières concernant l'embauche, les promotions, les étapes précises à franchir vers les postes de direction et des réseaux d'information particuliers. Des attitudes discriminatoires à l'intérieur des entreprises érigent des « murs de verre», consistant en d'invisibles barrières à la promotion des femmes et qui visent à tenir ces dernières éloignées des postes de direction (encadré 3.3). Cette cul- ture spécifique au monde bureaucratique est représentative des normes et des coutumes de la société dans son ensemble. Mais les entreprises et les organi- sations, spécialement celles qui ont de l'envergure et qui sont implantées depuis longtemps, peuvent aussi avoir développé leurs propres standards qui régissent le comportement et le rendement des travailleurs. La théorie économique néoclassique considère la discrimination comme un phénomène appelé à se corriger de lui-même, puisqu'il porte en lui les armes de sa propre mort. En effet, à mesure que les marchés se développent et prennent de l'importance, les pressions de la compétition deviennent plus intenses. Il deviendrait alors plus coûteux et plus difficile pour les individus et les entreprises d'exercer de la discrimination (Becker, 1971). Avec le temps, les employeurs pratiquant la discrimination seraient évincés et cette dernière disparaîtrait du même coup. Par contre, les marchés bien protégés et excessivement réglementés ont plus de chance d'engendrer des comporte- ments discriminatoires, tout comme certains individus jouissant d'un plus grand pouvoir sont davantage en mesure d'imposer leurs préférences sur le marché et d'influencer les politiques à leur avantage. Certains faits appuient cette théorie, qui demeure toutefois simpliste et incomplète. Car il existe des industries qui sont peu compétitives, tant dans les pays développés que dans ceux en voie de développement, mais qui exercent tout de même un monopole. Dans de nombreux pays, une grande proportion des emplois qualifiés se retrouvent au gouvernement et dans des entreprises jouissant d'un monopole d'État (Birdsall et Sabot, 1991). Aussi longtemps que les employeurs munis de ressources existeront, les écarts salariaux pourront affronter la compétition. De plus, lorsque l'économie est en baisse et que les emplois se font plus rares, il devient moins coûteux de pratiquer la discrimi- 130 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 131 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES Encadré 3.3 Le « mur de verre », le sexisme projets, soit pour leur confier des postes non straté- giques au lieu de leur offrir un emploi permettant de LA CULTURE BUREAUCRATIQUE DES ENTREPRISES l'avancement et comportant des étapes promotion- et des gouvernements reflète ­ et perpétue ­ les normes nelles. Elles n'ont alors aucune chance d'obtenir un et les coutumes qui prévalent dans l'ensemble de la poste supérieur. De plus, les « murs de verre » étreignent société. À l'intérieur de ces organisations, on prend soin celles qui ne peuvent pas naviguer dans les secteurs vrai- d'ériger un « mur de verre », c'est-à-dire un tissu d'obs- ment stratégiques, comme le développement de la pro- tacles invisibles qui nuisent à la promotion des femmes duction et la finance, et elles demeurent confinées à la et maintiennent ces dernières éloignées des postes de gestion du personnel, à la recherche et aux relations de direction. travail (OIT, 1997). Le sexisme infiltre les organisations de plusieurs Une troisième façon pour le sexisme de pénétrer les façons. Il s'insinue perfidement dans les politiques organisations est par le biais de la culture informelle d'embauche. Cela se reflète concrètement lors de l'em- de l'entreprise, c'est-à-dire dans les relations bauche du personnel, de l'assignation d'un poste et de concrètes entre les gens au sein de l'entreprise, dans l'attribution des salaires. Le sexisme pénètre aussi l'en- les réseaux sociaux et dans les canaux d'information. treprise par le biais des politiques et des pratiques de Les femmes qui réussissent quand même à percer les promotion. En réalité, ces deux voies convergent murs de verre se butent aux traditions et aux préjugés puisque les personnes nouvellement embauchées for- qui les maintiennent loin du « club des bons vieux ment la réserve, ou « pipeline », des postes les plus camarades », des dirigeants et des prises de décisions. convoités. Enfin, les femmes peuvent être victimes d'insinua- Les carrières féminines ne conduisent pas aux postes tions ou de harcèlement sexuel de la part de leurs col- les plus élevés. On les embauche soit pour terminer des lègues masculins. nation, et les employeurs se permettent d'embaucher qui ils veulent sans avoir à offrir des salaires très élevés (Mueser, 1987). Une autre théorie pouvant expliquer la présence de la discrimination dans l'économie est relative à la complexité de l'information. Tandis que des employeurs se basent sur des préjugés pour pratiquer la discrimination, d'autres agissent ainsi par manque d'information élémentaire: n'étant pas renseignés sur la productivité d'un travailleur, ils en sont réduits, lorsqu'ils embauchent, à se baser sur des critères comme le genre, l'âge, la race et la sco- larité. Au niveau d'une entreprise, cela signifie que, dans la mesure où l'on dispose d'une information exacte et que l'on tient compte de l'ancienneté, les promotions et les salaires devraient s'ajuster aux critères de rémunération de l'entreprise. Cela implique que, dans le monde économique en général, la discrimination devrait diminuer dans la mesure où les marchés de l'infor- mation se développent. Il s'agit simplement de rendre cette dernière moins onéreuse pour l'employeur. Mais ces théories sous-estiment l'influence des normes sociales et des cou- tumes sur les comportements des individus et des groupes de personnes. Afin d'assurer la productivité et la rentabilité d'une entreprise, il est important de 131 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 132 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE bien vérifier quelle personne donne un bon rendement, avec qui et dans quelles circonstances (Williamson, 1975). En outre, les réseaux sociaux sont plus importants que les simples relations d'affaires car ils peuvent créer des liens durables, même entre des employeurs apparemment en compétition (Granovetter, 1985). Ces liens ne font pas que réduire le coût des compor- tements discriminatoires, ils les soutiennent. Mais la discrimination n'est pas seule en cause en ce qui a trait aux écarts en matière d'emploi et de salaire. Ces différences s'expliquent aussi par les normes et les traditions qui encouragent les familles à confiner les femmes au foyer. De plus, ces familles sentent qu'elles agissent en conformité avec la conception traditionnelle du rôle de la femme lorsqu'elles investissent moins dans la scolarisation et la formation des filles. Cela a pour conséquence de réduire la mobilité des femmes et des filles et de les tenir éloignées du monde des affaires. Dans le prochain chapitre, nous approfondirons les questions liées au groupe familial. Réglementation du marché du travail Les pays ont recours à diverses mesures d'ordre légal pour faire face aux problèmes liés au genre sur le marché du travail. Certains États ont même pris l'initiative de réglementer les politiques d'emploi et de licenciement des entreprises, les compensations des travailleurs et les relations de travail en général. Certains États ont établi des régimes de protection, et d'autres ont revu leur système de pension. Dans cette section, nous nous penchons sur les changements survenus dans la direction et la réglementation du marché du travail et nous verrons comment les interventions du secteur formel ont été bénéfiques pour chacun des sexes. Équité salariale. Plusieurs pays ont voté une législation qui assure un trai- tement égal des hommes et des femmes au travail. Le principe d'une rému- nération égale pour un travail égal vise à «niveler le terrain» pour les hommes et les femmes, c'est-à-dire qu'ils et elles soient évalués de la même façon. Cela signifie que l'employeur doit rémunérer ses employés (ou employées) réalisant le même travail avec la même efficacité de manière équi- table, sans tenir compte de leur genre. Cette politique a été accueillie avec succès dans des pays comme l'Australie, le Canada, la Grèce et la Nouvelle-Zélande, où des ententes col- lectives stipulaient déjà que les femmes devaient gagner au moins tel pour- centage du salaire masculin pour une même tâche, et où des mécanismes de fixation de salaires étaient déjà en place (Tzannatos, 1999). La situation du Royaume-Uni demeure ambiguë, car il est difficile de distinguer l'effet de l'augmentation du nombre de femmes sur le marché de l'effet produit par la loi sur l'équité salariale (Makepeace et al., 1999). L'Union européenne a, 132 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 133 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES quant à elle, endossé au nom de ses membres «des mesures afin d'assurer l'application du principe d'opportunités égales et de traitements égaux pour les hommes et les femmes en matière d'emploi, incluant le principe d'une rémunération égale pour un travail égal ou d'égale valeur» (cité dans Heide, 1999, p. 383). Cette législation a entraîné la révision de la loi dans chacun des États membres, et l'analyse de cas concrets représentant des défis pour les lois nationales ont contribué à clarifier et à améliorer l'efficacité de ces ins- truments internationaux. La législation sur l'équité salariale a fait moins de vagues aux États-Unis, où les normes salariales sont davantage décentralisées. Elle a aussi eu moins d'impact dans les pays où règne la ségrégation entre les sexes en ce qui concerne l'emploi et où le principe du travail équivalent n'est pas admis. Dans ces cas, on impute tout de suite les différences de salaires fondées sur le genre à la ségrégation au niveau de l'emploi: les femmes sont moins payées parce qu'il en est ainsi convenu et non en raison d'une rémunéra- tion moindre pour un travail égal, bien que ceci n'explique qu'une partie de l'écart salarial, ainsi que nous l'avons vu au chapitre I. Dans les pays en voie de développement, très peu de données ont été publiées au sujet de ces lois sur l'équité salariale. Plus récemment, le concept traditionnel de l'équité salariale a été remplacé par des politiques de valeurs comparables. Ces politiques se distinguent de celles du salaire égal pour un travail égal parce que les comparaisons de salaire ne se font pas seulement entre des emplois au titre semblable, mais aussi entre des emplois au contenu semblable. Les emplois que l'on compare sont distincts, dans le sens où l'un peut être largement dominé par des hommes, et un autre, par des femmes. La comparaison porte sur les exigences de l'em- ploi et non sur la performance, et comporte ordinairement des mesures pour des exigences concrètes comme la compétence, la responsabilité et le niveau d'effort (England, 1999). Aux États-Unis, des études sur l'impact des poli- tiques de valeurs comparables indiquent qu'elles ont amélioré de 6 à 10% le salaire relatif des femmes dans deux États (Sorensen, 1990, cité par la Banque mondiale, 1994c). Des critiques de ces politiques soutiennent que si l'on demandait aux employeurs d'augmenter les salaires des postes dominés par les femmes, cela entraînerait une diminution de l'embauche. Cet aspect mérite d'être étudié davantage, spécialement dans les quelques pays en voie de développement qui ont adopté des politiques semblables sans avoir encore évalué leur impact. Les pays en voie de développement peuvent-ils faire respecter la politique de l'équité salariale et espérer en tirer des bénéfices? L'expérience de pays plus riches confirme que la mise en oeuvre et le respect de ces mesures ne consti- tuent pas une mince affaire pour l'administration. Au Canada, aux Pays-Bas 133 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 134 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE et au Royaume-Uni, on a dû mettre sur pied des services spéciaux afin d'as- surer l'application de cette politique. De plus, la mise en oeuvre de ces mesures se limite au secteur formel, de sorte que leur pertinence dépend de l'amplitude de ce dernier dans un pays donné. Il faut aussi considérer qu'il est possible que la loi sur l'équité salariale ait pour effet de destituer des femmes de leur emploi, à moins qu'une autre législation portant sur des opportunités égales assure aux femmes de nou- velles opportunités. Mais il faut admettre que les effets de ces deux types d'intervention demeurent aléatoires. En Corée, la loi sur l'égalité des sexes dans les politiques d'emploi, votée en 1987, a créé pour les femmes de nou- velles opportunités en leur facilitant l'accès à des postes professionnels ou techniques mieux rémunérés (Rodgers, 1999). Cette loi force les entreprises à offrir des opportunités égales aux femmes sur les plans du recrutement, de l'embauche, de la formation et des promotions. Mais même si ces opportu- nités offrent indéniablement des avantages aux femmes, cela ne signifie pas qu'elles favorisent leur ascension vers des postes d'administration et de direc- tion. Elles n'ont pas non plus le pouvoir de faire augmenter leur salaire par rapport à celui des hommes en ce qui concerne la scolarité et l'expérience, malgré des politiques d'équité salariale. Mesures de protection et de discrimination positive. Certains pays ont opposé à la discrimination fondée sur le genre dans le marché du travail des mesures spéciales de protection et de discrimination positive. Certains gou- vernements se sont munis d'une législation du travail respectant les congés de maternité et protégeant les femmes qui sont affectées à des tâches trop épuisantes ou dangereuses. Ces lois comportent des bénéfices, mais aussi des coûts que les femmes doivent assumer. Si l'embauche de femmes signifie une hausse de coûts pour l'employeur, ce dernier est tenté d'embaucher moins de femmes ou de diminuer leurs salaires. La manière traditionnelle d'envisager ces problèmes a souvent consisté à pro- téger les femmes en restreignant les horaires déraisonnables ou en limitant leur accès à certains types de travail. Des lois ont exclu les femmes de certains sec- teurs considérés comme dangereux, tels ceux de la construction et des mines. Des mesures de restriction des heures de travail ont été populaires en Europe et aux États-Unis durant leur période d'industrialisation (Goldin, 1988; Nataraj, Rodgers et Zveglich, 1998). La plupart des pays asiatiques ont limité le nombre d'heures supplémentaires, appliquant ces mesures tant aux hommes qu'aux femmes. Les mesures les plus strictes ont été appliquées en Asie du Sud, où il est simplement interdit aux femmes de faire des heures supplémentaires. À Taiwan (Chine), des restrictions au niveau de l'emploi et des heures de travail des femmes ont donné lieu à une diminution du taux de croissance de leurs salaires (Zveglich et Rodgers, 1999). Sans la loi spécifique de pro- 134 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 135 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES tection, les salaires des hommes auraient augmenté de 12%, tandis que ceux des femmes n'auraient augmenté que de 5%. Avec cette loi, les salaires des hommes ont presque atteint l'augmentation prévue, tandis que ceux des femmes n'ont fait qu'un léger bond de 0,6%. Cette mesure protectrice a donc creusé davantage l'écart salarial entre les sexes. Certaines mesures de protection répondent à des intérêts manifestés par différents groupes. Comme ce fut le cas pour les droits de l'homme, la com- munauté internationale, collaborant avec des intérêts nationaux, a fait la pro- motion de mesures spéciales de protection sur le marché du travail12. Mais des changements sont survenus récemment, provenant d'une tout autre source que les mesures de protection, sous l'influence d'organisations fémi- nines (Banque mondiale, 1994c). L'efficacité des mesures de protection pour les femmes dépend de plu- sieurs facteurs. Avant tout, il faut considérer qui devra défrayer le coût de ces mesures. Sur le marché du travail, leurs effets plus ou moins négatifs sur l'emploi sont déterminés en fonction de la personne qui défraie les coûts. Une mesure n'aura pas le même impact si l'employeur, l'État ou les femmes elles-mêmes doivent assumer les coûts. Si les salaires sont ajustés à la baisse de façon à compenser les dépenses de l'employeur pour ces mesures, alors il n'y aura pas d'effet négatif sur l'embauche des femmes. Mais si les mesures de protection visent à promouvoir l'égalité des sexes en partageant les coûts liés à la maternité et en diminuant la part qu'as- sument les femmes, les ajustements de salaires vont alors à l'encontre du but poursuivi. Parlons maintenant des politiques de discrimination positive. Un grand nombre de personnes sont d'avis que des mesures d'opportunités égales ne suffisent pas à corriger les torts passés et actuels causés par la discrimination, et qu'il ne faut pas craindre d'utiliser des politiques de discrimination posi- tive afin de remédier à la situation. Élaborées dans le but de réduire les inéga- lités dont souffrent des groupes spécifiques, ces politiques instituent des quo- tas favorisant ces groupes ainsi que des mesures pour que ces quotas soient atteints. Il est nécessaire d'approfondir l'étude de ces politiques, tant dans les pays développés que dans les pays en voie de développement, mais il s'avère difficile, pour plusieurs raisons, de mesurer leur impact. Premièrement, ces mesures semblent s'appliquer à tous les travailleurs et offrent peu de points de comparaison entre les groupes. De plus, l'application peut s'avérer diffi- cile en pratique (Leonard, 1996). Aux États-Unis, certaines estimations de la politique contre la discrimination, connues sous le nom de Title VII, tirent des conclusions différentes. Certains attribuent à cette politique la diminu- tion de l'écart salarial survenue entre 1980 et 1990 (Smith et Welch, 1984; Fields et Wolff, 1997), mais d'autres l'attribuent à une augmentation de la 135 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 136 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE permanence des femmes au travail durant cette décennie (Smith et Ward, 1989; Leonard, 1996). Les politiques de discrimination positive sont controversées surtout parce qu'on craint devoir sacrifier la qualité et l'efficacité en procédant à un traite- ment préférentiel dans l'embauche d'employés, dans l'admission scolaire ou dans les postes de formation (Holzer et Neumark, 1999). Ces politiques entraînent des conflits même parmi les groupes favorisés par ces mesures: si l'on décroche un emploi par favoritisme, cela signifie peut-être qu'on n'a pas les qualifications, ce qui provoque du ressentiment chez les «moins favorisés». Mais les programmes de discrimination positive en matière d'emploi ne font pas qu'imposer des quotas à l'embauche, cette mesure constituant la plus grande source de ressentiment. Ils exercent également une influence sur toutes les tâches de l'employeur: par exemple, ils suscitent des efforts plus adaptés au recrutement, des programmes de soutien plus adéquats, des amé- liorations dans les procédures de sélection et dans les standards de l'em- bauche, de la rémunération et de la promotion13. Aux États-Unis, des don- nées de divers sondages, réalisés dans les entreprises de quatre grandes villes, ont confirmé que ces programmes avaient contribué à transformer les pra- tiques d'embauche et de formation des employés. Bien que ces programmes aient fait l'objet de controverses politiques, ils ont indéniablement fait augmenter l'embauche des femmes et des membres de groupes minoritaires (consultez, par exemple, Leonard, 1985, 1996; Rodgers et Spriggs, 1996; Holzer et Neumark, 1998, 1999). En outre, en dépit des problèmes soulevés par cette discrimination à rebours et des coûts de production de ces programmes, on n'a pas réussi à démontrer que les per- sonnes embauchées grâce à la discrimination positive étaient moins compé- tentes que d'autres travailleurs. Au contraire, les coûts de cette mesure pour les employeurs aux États-Unis semblent être reliés à la formation initiale des employés, ce qui est encore mieux que s'ils devaient soutenir les coûts asso- ciés à des employés moins productifs. En fait, de tels programmes s'avèrent effectivement rentables, autant pour les entreprises que pour l'économie (Holzer et Neumark, 1998, 1999). Une faiblesse importante de la discrimination positive réside dans son impact limité pour les sociétés où la plupart des emplois relèvent du domaine de l'agriculture et du secteur informel, ou là où la supervision du gouverne- ment et l'application des mesures s'avèrent un peu faibles. Ceci implique, par conséquent, que son champ d'action est appelé à croître avec l'urbanisation et la formalisation du marché du travail. Soutien à la famille. Les femmes s'investissent beaucoup plus que les hommes dans des soins et des activités hors marché qui grugent leurs loisirs, leur santé, leur autonomie et les empêchent d'avoir un emploi rémunéré. 136 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 137 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES Reconnaissant cette situation, certains États ont voté des lois favorisant la productivité des femmes, même si elles se sont parfois avérées inefficaces ou qu'elles ont produit des effets inverses. Nous allons nous pencher sur deux de ces législations: celle des congés de maternité et celle des services de garderie. Les congés de maternité. La plupart des pays en voie de développement ont une législation sur les congés de maternité. Les bénéfices comprennent un salaire partiel payé, une protection contre le licenciement durant le congé, et un congé post-natal obligatoire d'une durée déterminée. En Afrique, presque tous les pays assurent ces avantages aux salariées du secteur formel, leurs com- pensations allant, en principe, de 50 à 100%. La durée de ces congés varie d'un pays à l'autre ­ allant de 30 jours en Tunisie à quinze semaines au Congo ­, avec une moyenne de douze à quatorze semaines. En Amérique latine et dans les Antilles, la durée des congés de maternité varie de huit semaines aux Bahamas à dix-huit semaines au Chili, à Cuba et au Venezuela. En Asie, les congés de maternité ont tendance à s'étendre sur douze semaines, souvent rémunérés en totalité et à la charge entière de l'employeur (Rodgers, 1999)14. En plus des bénéfices indéniables pour la santé des mères et des nourrissons, ces congés libèrent temporairement les femmes de leur emploi et de la préoc- cupation de se trouver un nouveau travail après leur congé. Le fait de conser- ver leur emploi à la suite d'une naissance signifie une augmentation de leur ancienneté et de leur expérience, ce qui a une incidence sur leurs augmenta- tions de salaire (Rodgers, 1999). Mais les congés de maternité entraînent aussi des désavantages pour les femmes, particulièrement lorsque les employeurs défraient la plus grande partie des coûts. En effet, les employeurs qui doivent assumer les coûts des congés de maternité offriront des salaires moins élevés aux femmes qu'ils engagent (ce sont alors les femmes qui assument indirecte- ment les frais), ou éviteront d'embaucher des femmes en âge de procréer. Quels résultats ont donné ces politiques? Au Japon et aux États-Unis, les femmes qui bénéficient d'un congé sont plus susceptibles de retourner sur le marché du travail à la suite d'une grossesse que celles qui n'en bénéficient pas (Gruber, 1994; Waldfogel, Higuchi et Abe, 1998). Cependant, aux États- Unis, ces femmes ont vu leur salaire quelque peu diminué, de sorte qu'il n'est pas facile d'évaluer les bénéfices avec exactitude15. Dans les pays d'Europe de l'Ouest, où les congés de maternité sont les plus généreux, les bénéfices dépendent de la durée du congé. Entre 1969 et 1993, des congés parentaux courts (trois mois) payés ont fait grimper le taux d'emploi de 3 à 4%, tout en ayant un effet minime sur les salaires. Des congés parentaux de longue durée (neuf mois) ont entraîné une augmentation du taux d'emploi de 4%, mais les salaires horaires ont baissé de 3% (Ruhm, 1998). À Taiwan, en Chine, les bénéfices concédés aux mères ont contribué à l'expansion de l'em- 137 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 138 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ploi pour les femmes, mais ont eu un effet négatif ­ bien que non significa- tif statistiquement ­ sur les salaires (Zveglich et Rodgers, 1999). Par contre, au Costa Rica, une législation qui prolongeait les congés de maternité a eu pour effet de diminuer considérablement les salaires sans affecter le taux d'emploi (Gindling et Crummet, 1997). Le cas du Costa Rica illustre bien comment le financement d'une mesure influence son efficacité. Les services de sécurité sociale du gouvernement couvrent la moitié des frais des congés de maternité au Costa Rica, libérant ainsi les employeurs et les femmes d'une partie importante de ces coûts. Cela explique pourquoi le taux d'emploi n'a pas été touché, mais pas la diminu- tion de salaire. Une autre option consisterait à partager les coûts avec une assurance santé qui couvrirait au moins une partie des coûts liés au congé de maternité. La prime d'assurance des hommes et des femmes ­ la plupart des couples mariés sont intéressés par un plan familial ­ augmenterait sûrement, mais allégerait les coûts encourus uniquement par les femmes. Services de garderie. Certains pays en voie de développement auraient besoin que les entreprises ­ ou l'État ­ offrent un soutien aux services de garde d'enfants. Des coûts de garde allégés permettent aux mères de travailler à l'extérieur. Comme pour les congés de maternité, les services de garde réduisent les interruptions de travail et permettent aux femmes de continuer à accumuler de l'expérience, d'accéder à des promotions et d'avoir des aug- mentations de salaire. Selon les pays, la façon de pourvoir à ce besoin prend différentes formes: congés de paternité payés, services de garde entièrement subventionnés par les fonds publics, transferts de revenus aux familles, spé- cialement aux mères, afin de couvrir les coûts des garderies, et des subven- tions salariales accordées aux mères qui demeurent au travail. Selon diffé- rentes situations, chacune de ces solutions est basée sur un calcul des bénéfices et des coûts. Comment les pays les plus riches soutiennent-ils leurs services de garderie? Les sommes allouées aux services de garde des enfants dont les parents tra- vaillent varient grandement. La Grèce, l'Irlande, l'Italie, les Pays-Bas, l'Espagne et le Royaume-Uni ont adopté un système basé sur la famille, comportant un niveau peu élevé de prestations pour la garde des enfants. L'Autriche et l'Allemagne accusent une lacune dans ces services pour les enfants de moins de trois ans. Par contre, la Belgique, le Danemark, la Finlande, la France et la Suède ont développé d'excellents systèmes de gar- derie (Plantenga, 1999). Comme on le verra au chapitre suivant, une lacune dans ce genre de ser- vice peut constituer un obstacle majeur à la participation des femmes au marché du travail. En Russie, des projections économiques sur l'effet que produiraient des garderies entièrement subventionnées ont démontré que, si 138 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 139 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES les familles n'avaient pas à débourser pour ce service, la participation des femmes sur le marché du travail augmenterait de 12%, et leurs heures de travail, de 3% (Lokshin, 2000). D'autre part, si le gouvernement accordait aux mères qui travaillent des subsides équivalant aux frais de garde d'un enfant, cela ferait seulement augmenter le taux des femmes sur le marché de 6% et leurs heures de travail de moins de 1%. Des subventions aux gar- deries permettent aux mères de gagner 0,5 rouble pour chaque rouble dépensé par l'État, tandis que les subsides donnés à la mère augmentent son salaire de 0,24 rouble. Soutien aux personnes âgées. Les systèmes de soutien aux personnes âgées ne sont pas liés à la discrimination sur le marché du travail, mais c'est l'ab- sence de marché qui fait surgir le problème de la sécurité sociale. Dans la plu- part des pays en voie de développement, la communauté informelle et les arrangements familiaux constituent la base de la sécurité sociale. La majorité des personnes âgées s'accommodent d'arrangements familiaux de longue durée avec leurs enfants, cette pratique étant plus commune chez les femmes que chez les hommes (Wong et Parker, 1999; Cox-Edwards, 2000). Les per- sonnes âgées des deux sexes vivant seules, sans leurs enfants, dépendent habi- tuellement du soutien financier de leurs proches. Ce constat se vérifie lors- qu'on observe les cycles de transferts monétaires au sein d'un groupe familial. Dans les pays en voie de développement et dans le monde industrialisé, le soutien financier privé vise généralement les femmes. En Colombie, par exemple, le fait d'être une femme augmente les probabilités de recevoir une allocation de 33% (Cox et Jimenez, 1998). Il semble que la modernisation, l'urbanisation et la migration se soient unies pour affaiblir les systèmes traditionnels et informels de soutien aux per- sonnes âgées. Des programmes de sécurité formels obligatoires pourraient l'affaiblir davantage tout en laissant démunies les personnes non couvertes par l'entremise de leur emploi16. Les solutions offertes, l'épargne et l'investis- sement individuels en vue d'assurer les vieux jours, par exemple, peuvent aider à combler les écarts laissés par l'effritement du soutien familial, mais demeurent des solutions à la merci des fluctuations des marchés. Les indivi- dus, lorsqu'ils sont jeunes, sont captivés par l'immédiat et ne sont pas portés à épargner pour leurs vieux jours. Il se peut aussi qu'ils ne soient pas suffi- samment informés au sujet des marchés de capitaux et d'investissements. Ces arguments incitent à entreprendre des actions publiques dans le but de réfor- mer les systèmes de sécurité sociale. Mais ces actions doivent tenir compte des situations différentes des hommes et des femmes ainsi que des méca- nismes informels fondés sur les familles. Reconnaissant que la mise sur pied d'un système universel de sécurité pour le troisième âge contribuerait à réduire la pauvreté et à améliorer le bien-être, 139 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 140 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE la plupart des pays ont établi des réseaux de sécurité formels pour les per- sonnes âgées. Mais seulement 15% des six milliards de personnes sur terre ont accès à un système formel de revenus pour leur retraite (Banque mon- diale, 1994b). Les services de sécurité sociale, dans les pays en voie de déve- loppement, ont tendance à être concentrés dans le secteur public et dans des grandes entreprises du secteur privé. Le droit de toucher une pension est lié au genre, au statut civil, au degré d'éducation, à l'âge, à la profession, au revenu, à l'emploi formel et à la composition du groupe familial ­ et les femmes sont moins susceptibles que les hommes de participer à des plans de pension (Bertranou, 1998). Certaines raisons expliquent cette situation: le degré moins élevé de scolarité des femmes, leur moins grande participation à la force ouvrière, leur affecta- tion à des emplois plus précaires; la plus grande probabilité qu'elles oeuvrent dans le secteur informel ou pour de petits employeurs qui ne peuvent offrir une protection sociale. Même lorsque des femmes sont inscrites à un système de sécurité sociale, elles y contribuent pendant un moins grand nombre d'an- nées. Les travailleurs à faible revenu, dont plusieurs sont des femmes, préfèrent souvent un salaire net plus élevé à des bénéfices futurs. Tous les régimes offerts par les employeurs proposent ainsi des bénéfices annuels moins élevés pour les femmes. Puisque les régimes privés ignorent souvent les personnes d'expé- rience limitée ou trop mobiles, ils ne sont alors pas favorables aux femmes. Ces dernières années, bon nombre de pays ont effectué une réforme de leurs régimes de pensions. On veut s'éloigner des régimes traditionnels fon- dés sur la répartition, et où le financement des primes est obtenu au fur et à mesure qu'elles viennent à échéance. En effet, il s'avère maintenant impos- sible de soutenir ces plans, devenus trop coûteux, en raison de la population vieillissante et du taux de dépendance associée au vieil âge (Banque mon- diale, 1994b). Il arrive souvent, maintenant, que les réformes remplacent ces anciens systèmes par de nouveaux, qui comportent plusieurs volets. Un pre- mier volet de contribution entièrement financé permet aux retraités de récu- pérer leurs contributions, en plus des intérêts. Puis un deuxième volet, celui de la redistribution publique, établit une garantie de pension minimale ou un montant fixe à tous les travailleurs éligibles. Selon certains aspects des anciens et des nouveaux systèmes, ces réformes peuvent faire augmenter les inégalités de revenu entre les hommes et les femmes âgés. De plus, elles altèrent considérablement la performance de cer- tains groupes de femmes. De quelle façon? Les anciens systèmes offraient souvent de généreux montants à des hommes et à des femmes n'ayant contri- bué au système que sur une courte période et provenant de familles à moyen revenu. Or, les nouveaux systèmes limitent les bénéfices aux contributions dans le régime et les redistribuent aux personnes à faible revenu dans le 140 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 141 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES régime de redistribution publique. Ces nouveaux systèmes pénalisent donc les jeunes retraités, tandis que les anciens systèmes leur octroyaient des divi- dendes, et les femmes prennent souvent leur retraite lorsqu'elles sont encore jeunes17. Une projection détaillée sur la situation au Chili, le premier pays à appli- quer le système à double régime, indique que, dans le nouveau système, les pensions des femmes sont appelées à décroître et le feront en rapport avec celles des hommes, car les femmes sont actives durant un moins grand nombre d'années que les hommes, elles gagnent des salaires moins élevés et, par conséquent, elles contribuent moins au système. Mais cette chute ne sera pas la même pour toutes les femmes. Celles qui décrochent un emploi dès la sortie du primaire ou du secondaire et qui participent pleinement au marché du travail jusqu'à 65 ans, âge de la retraite des hommes, ne s'en rendront presque pas compte. Les femmes qui ont un faible revenu ­ les principales récipiendaires de la garantie de pension minimale ­ vont connaître une hausse. Les veuves seront également gagnantes car elles auront droit à la rente de leur mari en plus de leur propre pension. Les femmes qui ne travaillent pas recevront la protection de l'assistance sociale si elles y sont admissibles, selon l'examen de leurs ressources. Mais celles qui ne seront pas éligibles ­ qu'elles aient travaillé durant quelques années ou pas du tout ­ seront per- dantes sous le nouveau système (Cox-Edwards, 2000). Ainsi, le régime de redistribution publique revêt une importance particu- lière si on l'envisage du point de vue de l'égalité des sexes, car il est un méca- nisme de réduction de la pauvreté et de redistribution des biens. Au Mexique, le gouvernement offre une garantie de pension minimale et ajoute une allocation spéciale ­ un taux fixe du salaire minimum ­ à la pension de chaque bénéficiaire. Ces mesures protègent le bien-être des groupes à faible revenu et peu scolarisés. Par exemple, une femme ayant moins de cinq ans de scolarité et vivant en zone semi-urbaine peut espérer recevoir une rente équivalant à 80% du salaire minimum si elle est bénéficiaire du régime de redistribution et de l'allocation spéciale. Sans ces protections, elle ne rece- vrait que 30% du salaire minimum. Les femmes profitent beaucoup plus que les hommes de ces filets de protection. Par exemple, 61% de la rente provenant du régime de distribution publique sont alloués à des femmes, tandis que seulement 32% vont à des hommes (Wong et Parker, 1999). Enfin, dans des systèmes requérant un plus grand nombre d'années sur le marché du travail, peu de femmes retirent des bénéfices. Au Chili et au Mexique, on exige seulement 20 années de contribution au système pour être admissible à la garantie de pension minimale, tandis qu'en Argentine, on exige 30 ans pour avoir droit au montant fixe uniforme alloué par le volet de redistribution publique. Dans certains pays industrialisés, le volet public de 141 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 142 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE redistribution est basé sur la résidence et l'âge plutôt que sur l'emploi, et est financé à même les revenus de l'État. Les Pays-Bas offrent un montant uni- forme substantiel, le Royaume-Uni donne un montant bien moins généreux tandis que l'Australie alloue un montant qui exclut de la redistribution seu- lement un tiers parmi les plus riches. Ces arrangements réduisent les inéga- lités fondées sur le genre sur le plan des pensions, mais ils représentent des coûts importants, ce qui explique pourquoi on ne les retrouve pas beaucoup dans les pays en voie de développement. Un plus grand nombre de régimes sociaux visant des groupes, comme ceux du Chili et du Mexique, améliorent vraiment la situation des femmes à faible revenu. Mais il demeure que la majorité des femmes qui ont travaillé durant un petit nombre d'années à faible salaire récoltent de maigres pensions. Réglementation du secteur informel. En général, les lois du marché du travail et une bonne réglementation améliorent l'égalité des sexes en ce qui concerne l'emploi, les conditions de travail et les systèmes de compensation. Mais dans les pays en voie de développement, où la législation formelle n'at- teint pas un très grand nombre de travailleurs, l'impact de ces lois est limité. Beaucoup oeuvrent dans le secteur dit informel, au service d'entreprises fami- liales ou de petites entreprises qui ne sont pas enregistrées. Le secteur infor- mel a moins d'envergure dans les pays plus développés tandis qu'il est nette- ment plus considérable dans les pays moins développés, ce qui aggrave le problème de l'inefficacité des lois du travail. Par exemple, au Burkina Faso, les trois quarts des travailleurs oeuvrent dans le secteur informel, tandis qu'en Argentine, le quart seulement travaille dans ce secteur (Banque mondiale, 1995). Il est généralement admis que les femmes travaillent surtout dans le sec- teur informel, mais des données ­ si les données de divers pays disponibles sont crédibles, cela reste à vérifier ­ contredisent cette affirmation. Selon la définition « officielle », le secteur informel comprend une gamme d'emplois, allant de l'emploi saisonnier, à petite échelle, n'employant qu'une personne à la maison, à de petites entreprises comprenant cinq à dix employés à temps plein. Si l'on s'en tient à cette définition, les femmes occupent une part dis- proportionnée du secteur informel dans seulement la moitié des pays appa- raissant au tableau 3.2. On tire cette conclusion en comparant la portion de femmes dans le secteur informel avec celle qu'elles occupent dans l'ensemble de la force ouvrière. Selon ces données, les femmes occupent 40% de la force ouvrière dans le secteur informel au Mali et un peu plus de 40% de cette force au Brésil; en réalité, elles ne sont pas concentrées dans le secteur infor- mel au Mali, mais elles le sont au Brésil. Ceci rejoint les conclusions de Charmes (1998), qui soutient que les femmes ne sont pas systématiquement surreprésentées dans le secteur infor- 142 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 143 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES Tableau 3.2 La présence des femmes dans le secteur informel varie d'un pays à un autre La part des femmes dans le secteur informel est... Costa Rica, 1984 Égypte, 1986 Panama, 1982 Corée du Sud, 1989 moins grande que leur Kenya, 1982 participation totale au marché du travail Mali, 1990 Burundi, 1990 Tanzanie, 1995 Viêt-Nam, 1991 Îles Fidji, 1986 Mexique, 1992 Venezuela, 1992 semblable à leur participation totale au Uruguay, 1985 marché du travail Congo, rép. du, 1984 Gambie, 1983 Thaïlande, 1990 Pérou, 1985 Honduras, 1990 Brésil, 1990 Malaisie, 1986 Philippines, 1988 plus grande que leur Colombie, 1992 participation totale au Indonésie, 1985 marché du travail Zimbabwe, 1986 Zambie, 1986 Jamaïque, 1988 Botwana, 1984-1985 Ghana, 1970 0 20 40 60 80 Pourcentage La participation des femmes au La part des femmes dans le secteur marché du travail informel Note : Le secteur informel comprend des petites entreprises, parfois familiales, qui produisent ou distribuent des biens sans toutefois respecter les normes et législations en place. Ces entreprises ne sont généralement pas reconnues et ne se plient pas nécessairement aux lois du travail et autres dispositions de la loi. Source : Sethuraman (1998); Banque mondiale (1999d). 143 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 144 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE mel. Il est extrêmement difficile d'obtenir des données exactes sur l'ampleur réelle du secteur informel, les chiffres rapportés étant clairement en dessous de la réalité, particulièrement en ce qui concerne les femmes qui sont employées dans des petites entreprises familiales et celles pour qui le secteur informel représente un travail second. Dans la plupart des pays, la législation sur le travail ne s'applique tout sim- plement pas aux travailleurs du secteur informel, et lorsque c'est le cas, son application est plutôt timide et sporadique. Ce n'est que dans quelques pays que les lois du travail offrent des droits étendus aux travailleurs du secteur informel. La Constitution fédérale du Brésil de 1988 élargissait sa portée aux travailleurs domestiques et aux agriculteurs en leur offrant les clauses d'un salaire minimum, des indemnités de départ équivalant à 8 %, un congé de santé payé d'une semaine, des vacances annuelles payées, un congé de mater- nité payé de 120 jours, un congé de paternité payé, des bénéfices de sécurité sociale ainsi qu'un avis d'un mois en cas de licenciement (Banque mondiale, 1994c). La violation de ces lois entraîne les mêmes pénalités que dans le sec- teur formel. Le Honduras a aussi émis des mesures en faveur des travailleurs domestiques, des travailleurs à la pièce et des travailleurs à la maison, mais de moindre envergure qu'au Brésil. D'autres lois et règlements touchent les petits travailleurs autonomes, avec des nuances plus ou moins avouées selon le genre. Il s'agit des lois régissant le démarrage en affaires, l'accès au crédit et la distribution des taxes. Les ins- titutions de crédit exigeant des gages traditionnels en nantissement ne sont pas portées à prêter aux femmes, puisque ces dernières ne possèdent habi- tuellement pas de biens fonciers à mettre en gage. De plus, les restrictions concernant la valeur minimale des prêts et le type d'entreprise constituent autant d'embûches pour les femmes qui désirent obtenir un prêt (Honig, 1998). Les procédures compliquées entourant le démarrage d'une entreprise, les capitaux et les contacts politiques requis constituent des difficultés qui empêchent les femmes d'enregistrer leur entreprise. Dans certains pays, les déductions de taxes, les exemptions et autres privilèges semblables s'adressent exclusivement aux maris, ce qui dissuade les femmes de créer une entreprise (Stotsky, 1997). Aux Pays-Bas, jusqu'à 1984, un homme marié avait droit à plus de crédits d'impôts qu'une femme mariée. En Jordanie, lorsqu'un homme et son épouse remplissent leur déclaration fiscale séparément, seul le mari a droit à certaines déductions. Au Zimbabwe, un homme marié a droit à un crédit spécial s'il est le seul salarié de sa famille, mais une femme dans la même situation n'a pas droit à ce privilège. Une réglementation dans le secteur informel est-elle la solution pour réduire les inégalités fondées sur le genre dans ce domaine? Dans les pays en voie de développement, le secteur informel représentait environ la 144 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 145 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES moitié de la force ouvrière en 1998, allant de 54% dans les pays d'Afrique subsaharienne à 49% en Amérique latine et dans les économies de transition d'Europe et d'Asie centrale, et 46% en Asie (Schneider, 2000). Mais ces chiffres peuvent fluctuer, selon les restrictions imposées au secteur formel. Les études réalisées dans plusieurs pays ont démontré que le secteur informel prend de l'expansion à mesure que les taxes et la réglementation du secteur formel augmentent. En ce sens, l'imposition arbitraire et inefficace de taxes et de règlements jouent même un rôle plus important que les lois et la réglementation (Johnson, Kaufmann et Zoido-Lobaton, 1998). À l'intérieur du secteur informel, l'accumulation des restrictions de la part du gouvernement peut provoquer la multipli- cation des entreprises clandestines, rendant ainsi encore plus ardue l'éra- dication des inégalités fondées sur le genre. La réglementation n'est donc pas le moyen le plus approprié pour améliorer l'égalité des sexes. S'attaquer à l'économie clandestine est un défi de taille, et si la régle- mentation n'est pas effectuée de manière efficace et renforcée, elle n'aura pas beaucoup d'impact. Les changements institutionnels : quelle est la recette ? Q UELS SONT LES OBSTACLES À L'ÉGALITÉ DES SEXES QUI s'opposent aux changements institutionnels? Cette question est importante dans la mesure où la réponse nous oriente vers des choix de politiques et d'actions mieux éclairés. Bien sûr, les réformes légales dont il a été question dans ce chapitre ont suscité des changements sub- stantiels du tissu social, qui se sont traduits par un engagement à poursuivre l'égalité des sexes, par l'établissement de mesures encourageantes et par l'im- position de pénalités rendant la discrimination plus coûteuse. Bien sûr, des lois bien ciblées et une réglementation adéquate ont amélioré la condition de tous les travailleurs, hommes et femmes, sur le marché du travail, bien que ces mesures aient constamment besoin d'être ajustées aux changements dus au contexte économique et idéologique. Cependant, les chemins de ces politiques sont parsemés de pièges. Il n'appartient pas seulement à l'État et aux bureau- crates de porter le fardeau des réformes, lequel devrait être partagé entre plu- sieurs groupes de la société. Promesses et pièges de la législation Si les lois ont besoin d'être réformées, il y a trois aspects du procédé légal qu'il ne faut pas oublier. D'abord, dans plusieurs pays en voie de dévelop- pement, les droits des individus ne découlent pas seulement du système 145 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 146 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE légal officiel, mais aussi des autres systèmes coexistants, basés sur les cou- tumes et la religion. Ces dernières peuvent autant renforcer les lois offi- cielles que les contredire, ce qui entraîne des ambiguïtés légales, des ten- sions sociales et le non-respect des lois (Gopal et Salim, 1998). Plusieurs pays ont entrepris des réformes statutaires visant l'égalité des sexes, et les procédures de changements sont en cours. Mais raccommoder des statuts et des coutumes contradictoires représente un défi de taille. L'exemple récent du Kenya illustre bien que les lois coutumières peuvent avoir leur propre dynamique, et aller à l'encontre des meilleures intentions de réformes statutaires. Bien que l'établissement d'un cadre unifié de lois comporte des avantages, il demeure très risqué de formuler des règles qui ignoreraient les normes et les coutumes des différentes couches de la société. Il est peu probable qu'un tel ensemble de règles réussisse à tenir compte de la diversité des normes de toute une population. Dans de tels cas, il est possible que les lois coutumières s'avèrent le système le plus efficace pour les groupes n'ayant qu'un pouvoir restreint. Ces réflexions nous suggèrent qu'une réforme statutaire n'est peut- être pas le meilleur ni l'unique moyen d'assurer l'égalité des sexes dans la législation d'un pays. Ensuite, une loi ne fait pas nécessairement consensus dans une société. En effet, il est possible qu'une loi soit imposée par une minorité puissante, mais qu'elle aille à l'encontre de la volonté d'une majorité qui ne l'a pas approu- vée. Une loi peut aussi s'avérer efficace dans des relations ou des transactions formelles, et ne pas convenir du tout à bon nombre de secteurs de la popu- lation. La question qui se pose alors est: la réforme statutaire améliore-t-elle les conditions de vie de la majorité ou ne fait-elle que codifier les positions d'une minorité? Autant une réforme peut susciter des changements sociaux majeurs en faveur de la majorité, autant ce même procédé peut être utilisé pour légitimer des inégalités. Finalement, les lois coutumières ont leur propre dynamique et peuvent s'adapter à différents contextes. Comme on l'a observé dans des systèmes de propriété basés sur les coutumes, une pression démographique, telle la crois- sance de la population, ou des changements économiques peuvent provo- quer des adaptations (Migot-Adholla et al., 1991). Par exemple, au Burkina Faso, l'augmentation récente de la valeur des terres a eu un impact sur l'ac- cès des femmes à des terres autres que celles appartenant à la famille. Les pro- priétaires, craignant de louer leur terre non labourée à des hommes, de peur que ces derniers réclament davantage de droits sur elle après l'avoir travaillée, ont préféré louer à des femmes, allant ainsi à l'encontre de toutes les tradi- tions (Kevane et Gray, 1999). 146 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 147 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES Même si un pays réussit à voter des lois en faveur de l'égalité des sexes, le succès n'est pas garanti pour autant. À moins d'être claires, adéquates et exprimées sans ambiguïté, les lois demeurent inefficaces. Il faut en plus s'as- surer que des institutions en faveur de ces lois et un personnel compétent veillent à leur exécution pour que l'égalité de principe se traduise par une égalité dans les faits. Sans des mécanismes explicites d'application, la loi ne produit pas d'effets. Dans un contexte institutionnel plutôt flou où l'on ne fait pas respecter les lois, l'application de droits concernant l'égalité des sexes peut être diluée parmi d'autres problèmes, plus urgents, d'autorité et de par- ticipation. Par exemple, à Taiwan, en Chine, la loi sur les normes du travail qui rédui- sait les heures de travail de la femme et leur accordait des congés de mater- nité n'a eu qu'un impact léger sur l'horaire de travail ou l'embauche des femmes jusqu'à ce que le gouvernement, trois ans plus tard, crée enfin des comités pour la faire respecter (Zveglich et Rodgers, 1999). De façon simi- laire, au Costa Rica, des modifications à la législation en vue de prolonger les congés de maternité n'ont eu qu'un léger effet positif sur l'emploi jusqu'à ce que le gouvernement renforce la loi en imposant des pénalités plus strictes aux entreprises qui ne s'y pliaient pas (Gindling et Crummet, 1997). Des failles dans l'application des lois portant sur l'égalité des sexes peu- vent être le signe d'une attitude discriminatoire de la part des institutions ou du personnel chargés de la faire respecter. Les personnes responsables de l'interprétation de la loi peuvent se révéler réticentes ou incapables de la faire respecter. Par exemple, il n'est pas impossible que, dans le cas d'un viol, un juge ayant une mentalité conservatrice évalue cet acte violent selon des idées stéréotypées traditionnelles et qu'il soit porté à blâmer la victime plu- tôt que l'agresseur. En outre, il se peut même qu'une réforme statutaire agisse plus ou moins de la même façon. En effet, le cadre institutionnel déterminant les préférences sociales et régissant les comportements ne dépend pas uniquement des lois, lesquelles peuvent être modifiées, mais surtout des normes sociales et des coutumes ayant force de loi, qui ne sont pas facilement modifiables. Ainsi, il est impératif pour l'État de viser l'égalité des sexes sur le plan des droits et de mettre sur pied des politiques qui puissent réglementer les domaines où il y a des inégalités. Des manquements des gouvernements à ces devoirs pourraient s'avérer désastreux. De sérieuses inégalités fondées sur le genre peuvent perdurer, non en raison d'un contexte institutionnel défavorable, mais à cause de lacunes de la part des autorités et d'un gou- vernement insuffisamment engagé envers les droits fondamentaux. Pour plus de 100 pays, un degré élevé d'inégalités fondées sur le genre corres- pond également à des droits politiques et ethniques limités (Boone, 1996). 147 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 148 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Autrement dit, l'engagement d'un gouvernement envers le respect des droits fondamentaux est hautement relié à son engagement dans d'autres domaines18. Et lorsque son engagement est faible, le secteur privé et la société civile sont appelés à jouer un rôle prépondérant dans l'évolution des institutions marquées par le genre, par leur participation dans le monde politique et sur les marchés. Au-delà des politiques d'État On peut maintenant affirmer que les politiques publiques constituent le premier facteur de changement pour les institutions aux prises avec un désé- quilibre en matière de genre. Avec leurs politiques légales et réglementaires, les gouvernements disposent de toute une gamme d'instruments porteurs de transformations sociales. Mais l'État a également besoin du soutien de l'en- semble de la société pour que son action soit durable. Il agit avec beaucoup plus d'efficacité lorsque des groupes civils, en particulier des regroupements de femmes, dialoguent ouvertement avec lui. Il arrive souvent que des gou- vernements agissent à la suite de pressions exercées par de tels groupes. Il arrive également que, par le biais de traités et de conventions, la commu- nauté internationale amène les gouvernements à reconnaître des situations d'inégalité et les incite à y remédier (encadré 3.4). En outre, de profonds changements institutionnels peuvent se produire au niveau des inégalités fondées sur le genre. Ils peuvent être occasionnés par des transformations sociales et économiques qui ne les visaient pas spé- cialement. Des événements politiques de grande envergure, comme les révolutions communistes en Chine et en Russie et la fin de l'apartheid en Afrique, ont profondément affecté les relations et le sort des hommes et des femmes. La croissance rapide des pays « dragons » en Asie et le retour à une économie de marché en Europe de l'Est ont bouleversé le travail et les investissements, ce qui a influencé fortement les relations hommes- femmes. Prenons le cas de l'Amérique au temps de la colonisation. À cette époque, les femmes étaient considérées comme la propriété des hommes, soit de leur père, soit de leur mari (Geddes et Lueck, 1999). Elles ne pouvaient alors pas être propriétaires, ni signer de contrat sans leur mari. Elles devaient même céder leurs biens à leur mari. Elles n'avaient pas la garde légale de leurs enfants, ne pouvaient ni voter ni occuper un poste politique et étaient exclues des organismes sociaux ou professionnels. Ces restrictions, qui exis- taient couramment en 1776 et dépassaient en sévérité celles qu'on peut ren- contrer aujourd'hui dans des pays en voie de développement, n'existent plus et ne sont plus concevables aujourd'hui aux États-Unis. Que s'est-il passé? La croissance de la richesse per capita, la prolifération des mouvements fémi- 148 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 149 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES nistes, l'amélioration de la scolarisation; tous ces facteurs ont contribué à augmenter les droits des femmes (Geddes et Lueck, 1999). Au chapitre sui- vant, nous étudierons plus en détail ces facteurs de réduction des inégalités fondées sur le genre. __________ Encadré 3.4 Coup de pouce international en faveur de envers les femmes mariées. Ces dispositions détermi- l'égalité des sexes naient un âge minimum requis pour contracter un mariage plus bas pour la femme que pour l'homme; elles DEUX EXEMPLES D'INITIATIVES CIVILES ­ L'UNE AU conféraient une plus grande responsabilité des soins des Botswana et l'autre au Guatemala ­ illustrent com- enfants et de l'entretien du foyer à la femme qu'à ment l'utilisation du soutien international peut pro- l'homme; elles reconnaissaient les hommes comme les mouvoir l'égalité des sexes dans des circonstances seuls représentants légaux du lien conjugal; et elles concé- particulières. daient aux hommes un droit de veto sur les décisions de La loi nationale du Botswana. La loi de la citoyenneté leur épouse concernant le travail à l'extérieur du foyer. du Botswana, votée en 1984, déclare qu'« un individu En 1992, María Eugenia Morales Acuña de Sierra, est citoyen du Botswana par naissance et descendance si, avocate déléguée aux affaires des droits de l'homme, a) au moment de sa naissance, son père était citoyen du intenta une poursuite auprès de la Cour constitution- Botswana; ou, b) dans le cas où ledit individu est né en nelle du Guatemala, alléguant que neuf clauses du dehors des liens du mariage, si sa mère était citoyenne code civil du Guatemala violaient l'égalité entre les du Botswana... » Des groupes pour les droits des hommes et les femmes garantie par la constitution. femmes ont longtemps protesté, alléguant que cette loi était anticonstitutionnelle et allait à l'encontre de l'éga- En 1994, la Cour déclarait qu'aucune des neuf dispo- lité garantie pour tous les citoyens. En 1992, une femme sitions n'était discriminatoire. Madame Morales, nommée Unity Dow intenta une poursuite devant la appuyée par le Center for Justice and International Cour suprême, défiant la constitutionnalité de cette loi. Law ­ une organisation non gouvernementale ­ a alors La Cour suprême trancha en faveur de madame Dow, présenté sa demande à la Commission interaméricaine concluant que cette loi violait effectivement la constitu- pour les droits de l'homme, une filiale de tion. Dans un premier temps, le gouvernement a préféré l'Organisation des États américains. ignorer la sentence de la Cour et a refusé d'apporter des Réagissant à cette pétition, en 1996, le conseil exécutif amendements à la loi. Comme moyen de pression afin du gouvernement du Guatemala faisait parvenir au de faire respecter la décision de la Cour suprême, des Congrès une proposition législative afin de modifier le groupes féministes ont alors menacé de transporter cette code civil «en accord avec la constitution du Guatemala, affaire à la Quatrième conférence mondiale sur les la Convention pour l'élimination de toutes les formes de femmes qui allait se tenir à Beijing, en 1995. Peu avant discrimination à l'égard des femmes, et de la Convention la Conférence, le gouvernement votait l'acte d'amende- américaine». Donc, tandis que le Guatemala ne semblait ment à la citoyenneté. Cet acte respectait la décision de pas réceptif à l'idée d'amender son code civil, en la Cour, allant même plus loin en soumettant le mars 1998, la Commission interaméricaine pour les droits Botswana à la législature internationale. de l'homme décrétait que le code violait la Convention Le code civil du Guatemala. Avant 1999, le code civil américaine. Le Congrès devait par la suite procéder à du Guatemala comportait des clauses discriminatoires l'amendement de huit des neuf clauses en litige. Source : A. Goldstein (1999). 149 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 150 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE D'un côté, les institutions sociales, légales et économiques perpétuent les inégalités fondées sur le genre, mais d'un autre côté, elles travaillent aussi à les réduire. La réforme des institutions, axée sur la promotion de l'égalité des sexes, constitue la base d'un développement durable. À court terme, les insti- tutions sociales sont fermées au changement et mettent du temps à évoluer. Cependant, on assiste parfois à des transformations dramatiques, lesquelles n'ont pas lieu sans résistance et sans des coûts élevés. L'État a sûrement un rôle important à jouer, en élaborant des lois et des normes adéquates. Mais l'effi- cacité d'une réforme statutaire dépend avant tout de la capacité de l'État de la faire appliquer et du soutien de groupes sociaux. Les marchés peuvent égale- ment réduire la discrimination entre les sexes. Lorsqu'ils fonctionnent ouver- tement, ils facilitent l'échange d'informations et mettent sur pied un ensemble d'incitatifs permettant de faire des choix basés sur la productivité plutôt que sur le genre, l'ethnie ou l'âge. Une réforme des institutions peut avoir un impact profond sur les individus et les familles, en influençant leur efficacité et leurs stratégies de développement. Notes 1. Selon les règles du mariage en exil, la famille du mari études a permis de découvrir que le christianisme aurait eu un peut compter sur la complète soumission de la jeune mariée. effet négatif, mais statistiquement insignifiant, sur l'indice Lorsqu'une fille se marie et va vivre au village de son époux, «elle d'oppression des femmes (Boone, 1996). Une quatrième étude pénètre dans un endroit où elle ne connaît personne, et la cou- a relevé que l'islam a un impact négatif sur des mesures d'éga- tume veut qu'elle courbe la tête et se taise. Lorsqu'elle se rend lité des sexes, mais que ce n'est que son effet sur l'égalité dans chez son mari, sa renaissance spirituelle est parfois soulignée par le mariage qui est statistiquement significatif. L'hindouisme est l'imposition d'un nouveau nom... Dans la hiérarchie au sein de relié au plus bas taux de scolarité des femmes par rapport aux sa nouvelle famille, elle occupe le dernier rang, tout à fait au bas hommes, mais son effet sur d'autres mesures d'inégalité entre de l'échelle, et il est normal qu'on lui confie les travaux les plus les sexes n'est pas statistiquement significatif (Dollar et Gatti, difficiles» (Das Gupta, 1996, p. 217). 1999). Dans cette étude, les variables de différentes religions sont vérifiées statistiquement afin de discerner des indicateurs 2. À Uttar Pradesh, les jeunes mariées finissent par d'inégalité entre les sexes. Elle a conclu que, aussi longtemps obtenir plus d'autonomie et de pouvoir de décision que que les effets d'une religion ne sont pas clairs, cela constitue un d'autres femmes qui se marient à un âge avancé. Une explica- signe clair d'inégalité. tion possible est que le temps écoulé entre le mariage et la coha- bitation permet à la jeune mariée d'approfondir la relation avec 4. Par exemple, la réserve du Bangladesh face à la son époux et les parents de celui-ci (Desai, Rao et Joshi, 2000). Convention pour l'élimination de toutes les formes de discri- mination à l'égard des femmes (CEDAW) n'est pas liée à cer- 3. Une étude réalisée dans plusieurs pays et comportant tains articles qui entrent en conflit avec la loi du Sharia, laquelle plusieurs variables a découvert une relation négative significa- est fondée sur le Qur'an et le Sunna. tive entre la proportion de population musulmane d'un pays et ses taux d'inscriptions scolaires, compte tenu d'autres facteurs, 5. Ces résultats sont basés sur les dernières cases indi- et les effets étaient plus accentués chez les filles (Schultz, 1987). quant des reculs dans l'égalité des sexes, celles correspondant au De façon similaire, deux autres études ont découvert une rela- revenu (en logarithme) et sur la moyenne des droits reliés au tion positive entre le fait qu'un pays soit surtout musulman et genre. Les coefficients des droits et des revenus sont positifs et les indices d'inégalités fondées sur le genre (Boone, 1996; significatifs pour tous les indicateurs. En raison de la limitation Forsythe, Korzeniewicz et Durrant, 2000). Une de ces deux des données, il n'est pas possible de déterminer scientifique- 150 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 151 LES NORMES SOCIALES, LES LOIS ET LES INSTITUTIONS ÉCONOMIQUES ment s'il y a effectivement une relation de cause à effet. Voir des années 1970, et l'OIT a formellement recommandé aux l'annexe II. nations de mettre à jour leur législation concernant la protec- tion des travailleurs. 6. On a examiné les parties constituantes des instru- ments de mesure des droits. Dans tous les cas, les trois 13. Le projet de discrimination positive a été moins domaines de droits réunis demeurent statistiquement significa- controversé face au recrutement que face à l'embauche. tifs par rapport au développement, compte tenu du PIB pour un pays. Mais dans les trois indices des droits, l'égalité concer- 14. Comparativement aux pays membres de nant le mariage et le divorce a un impact apparemment plus l'Organisation pour la coopération et le développement écono- considérable sur l'éducation, la santé et la participation poli- mique (OCDE), ces bénéfices sont plutôt modestes. En tique que sur les problèmes économiques. Europe, les congés de maternité s'étalent sur 14 semaines en Allemagne, en Espagne, en Suède et au Royaume-Uni et sur 7. Les militantes rattachées à la Fédération étaient res- 22 semaines en Italie. Les compensations économiques durant ponsables de l'application de ces politiques dans les villages et le congé varient entre 75% du salaire en Suède et 100% en les familles (Honig, 1985; Hooper, 1984). France, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Espagne. Les États- Unis sont moins généreux dans ce domaine: la législation sur 8. Certains historiens affirment que l'État a réussi à les congés de maladie autorise les employés et employées à éliminer la polygamie, a réduit le nombre de mariages pré- douze semaines de congé non payées pour cause de grossesse ou arrangés et a fait progresser l'autonomie des jeunes femmes au autres soins de santé (Rodgers, 1999). foyer (Davin, 1976, cité par Das Gupta et al., 2000). D'autres soutiennent que l'État a renoncé à sa politique parce qu'on 15. Aux États-Unis, par exemple, l'ensemble des avait cessé d'appliquer la loi en raison des protestations. Les dépenses consenties par plusieurs États au profit des congés de militantes, de leur côté, n'auraient pas fait l'objet de critiques maternité, au cours des années 1970, s'est traduit par une chute aussi sévères malgré leur échec. des salaires et une hausse dans les horaires de travail pour les femmes âgées de 20 à 40 ans (Gruber, 1994). Une partie sub- 9. Pour de plus amples détails concernant l'impact des stantielle des coûts des congés de maternité a été imposée aux réformes agraires sur deux générations en Amérique latine, salaires des femmes, mais sans grand effet sur la totalité des consultez Deere et Leon (1997, 1999). revenus du travail. Au Japon comme aux États-Unis, compte 10. En Amérique latine, le droit de vote était communé- tenu de la période prénatale, les femmes qui avaient droit à un ment réservé aux hommes adultes jusqu'au XXe siècle. Après congé retournaient davantage à leurs emplois que celles qui n'y avoir été réservé aux personnes possédant des terres et aux avaient pas droit. En outre, près de la moitié des femmes cou- riches au XIXe siècle, le droit de vote est ensuite devenu l'apa- vertes par cette loi retournaient au travail (Waldfogel, Higuchi nage des personnes instruites (Sokoloff et Engerman, 2000). et Abe, 1998). Par contre, au Royaume-Uni, si l'on tient compte de la période prénatale, les femmes qui profitent de ces 11. Au chapitre I, on démontrait que les femmes de par- avantages ne retournent pas plus au travail que celles qui n'en tout au monde gagnent, en moyenne, moins que les hommes, profitent pas. mais que l'écart entre les sexes varie beaucoup selon les pays. Cet écart s'est rétréci au cours des trois dernières décennies, 16. Une étude laisse entendre que la stabilité de revenu parfois de façon irrégulière. Il s'est considérablement réduit est reliée de façon négative aux transferts privés (Cox et dans des pays comme l'Australie, la Corée, la Suède, le Jimenez, 1998). Selon des sondages péruviens (Peruvian Living Royaume-Uni et les États-Unis, mais seulement de façon Standards Surveys), les transferts privés auraient augmenté modérée au Japon et en Thaïlande, et un tout petit peu à de 20% si les personnes âgées n'avaient pas eu droit à la sécu- Taiwan, en Chine (Blau, 1998; Horton, 1996; Zveglish, rité sociale. L'effet d'engorgement est plus élevé aux Rodgers et Rodgers, 1997). Philippines, où il y a davantage de transferts privés. Une aug- mentation d'un dollar des pensions publiques se traduirait par 12. Les législations pour la protection des ouvriers ont une baisse de 37 cents dans les transferts privés, laissant un évolué en Europe et aux États-Unis à partir des années 1800, et bénéfice de 63 cents. Dès lors, la sécurité sociale rend les per- en Asie et en Amérique latine à partir des années 1950. sonnes âgées plus aisées, mais pas autant que le laisse supposer Certains changements concernant la protection dans les pays la somme des dépenses. industrialisés ont été apportés en réponse à des conventions appuyées par l'Organisation internationale du travail. D'autres 17. Par exemple, l'ancien système économique de l'Union modifications ont été apportées dans les années 1960 et à la fin soviétique assurait à tous des salaires et des pensions uniformes. 151 Chapitre 3 16/06/03 16:10 Page 152 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Les femmes étaient nombreuses à travailler et recevaient des cré- ment 21% pour les hommes, en ce qui concerne la moyenne des dits de pension pour les années durant lesquelles elles avaient salaires (Castel et Fox, 1999). porté des enfants. Par contre, depuis l'entrée en vigueur du nou- veau système économique, les inégalités ont augmenté relative- 18. Par exemple, le rapport entre l'étendue des restrictions ment aux salaires, aux années d'activité et, par conséquent, aux des droits des femmes et les restrictions des droits politiques dans pensions. Lorsque le système à plusieurs volets a remplacé le sys- les pays est de 0,56. Le rapport entre les formes de violence de tème de pensions devenu intenable au Kazakhstan, les pensions l'oppression politique et l'oppression des minorités ethniques est ont connu une chute de 44% pour les femmes, mais de seule- plus élevé, se situant à 0,62 (Boone, 1996). 152 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 153 CHAPITRE IV Pouvoir, motivations et ressources au sein du ménage L ES MÉNAGES CONDITIONNENT LES RELATIONS ENTRE LES sexes et les transmettent d'une génération à l'autre. Ils déterminent également les opportunités pour chacun de ses membres, selon leur genre. C'est au sein de la famille que se prennent plusieurs décisions impor- tantes concernant la natalité et l'éducation, les loisirs et le travail, la consom- mation et les investissements. Les décisions familiales au sujet de la distribu- tion des ressources et des investissements pour les enfants peuvent renforcer ou atténuer les inégalités fondées sur le genre. Les données recueillies suggè- rent qu'elles produisent effectivement ces deux effets1. Au moment de prendre ces décisions, la famille n'agit pas de façon isolée mais sous l'influence du contexte institutionnel. Les décisions concernant la répartition du travail et des tâches et les investissements qui privilégient cer- tains enfants plutôt que d'autres dépendent de plusieurs facteurs, comme les normes sociales et culturelles, les opportunités économiques, les aspirations des individus et leur capacité à influencer le système. Les facteurs qui modi- fient les institutions ont nécessairement un impact sur les contraintes et les opportunités touchant les ménages et influencent leurs décisions. Même lorsque ces modifications ne concernent pas spécifiquement le genre, elles atteignent différemment les hommes, les femmes, les garçons et les filles. Comme nous l'avons mentionné au chapitre III, le taux de mortalité des jeunes filles (par rapport à celui des garçons), en Inde, est plus élevé lorsque la mariée doit s'exiler de son village natal et suivre son mari et lorsque ses parents doivent payer une dot substantielle (Kishor, 1993). Mais ce taux excessif de mortalité diminue lorsque les femmes travaillent et gagnent un salaire relativement élevé (Rosenzweig et Schultz, 1982; Kishor, 1993; Murthi, Guio et Drèze, 1996). De plus, le taux de survie des femmes est plus élevé dans les régions où les progrès techniques en agriculture ont augmenté 153 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 154 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE le rendement du travail des femmes (Foster et Rosenzweig, 1999). Ni les changements technologiques ni les politiques qui améliorent le rendement du travail des femmes ont pour but initial d'enrayer les inégalités fondées sur le genre, mais on remarque qu'ils ont tout de même une incidence sur le bien-être et les opportunités économiques des hommes et des femmes. On peut voir l'impact des conséquences spécifiques à chaque genre dans plusieurs dimensions de la vie, tels les différents choix d'occupations ou de loisirs, les investissements en faveur des enfants et l'accès aux ressources de production. Dans ce chapitre, nous étudierons comment les opportunités économiques, les investissements publics et la répartition du pouvoir au sein de la famille peuvent influencer la distribution des ressources et les investis- sements selon le genre. Nous proposerons des politiques qui promeuvent une plus grande égalité des sexes quant à la maîtrise des ressources. Deux messages principaux émergent des données analysées. D'abord, cer- tains membres de la famille sont privilégiés dans la distribution des res- sources et il existe un déséquilibre dans la répartition du pouvoir de négo- ciation au sein des ménages. Ce constat va à l'encontre des idées traditionnelles des économistes et des responsables politiques, selon les- quelles les membres d'un même ménage partagent leurs ressources et les dis- tribuent selon un ordre de priorités commun. Cela signifie que ce n'est pas uniquement la quantité des ressources qui importe pour un ménage, mais la manière dont les ressources sont réparties entre ses membres. Lorsque des politiques affectent la distribution des ressources entre les membres d'une famille, elles modifient les jeux de pouvoir, ce qui a des répercussions sur le bien-être de cette famille et sur l'égalité des sexes. Des programmes de micro-financement réalisés au Bangladesh ont démontré qu'en facilitant aux femmes l'accès au crédit, on leur confère un certain pouvoir. Les emprunts féminins se traduisent généralement par une augmentation de revenu et une plus grande maîtrise des ressources familiales. Cela signifie qu'elles jouissent d'une plus grande autonomie et d'un plus grand pouvoir décisionnel dans leur foyer. Cela se traduit également par une demande accrue de soins de santé appropriés pour les femmes (Pitt et Khandker, 1998; Khandker, 1998; Kabeer, 1998; Nanda, 1999; Zaman, 1999). On indique, dans plusieurs analyses, que lorsque les femmes dispo- sent de plus de ressources, une plus large part des biens familiaux est allouée aux enfants. Ce genre d'effet peut parfois être important. Au Brésil, lorsque les mères ont un revenu additionnel, le taux de survie et l'alimentation des enfants s'améliorent davantage que si ce revenu était confié aux pères. Concernant la survie des enfants, l'impact marginal du revenu de la mère est vingt fois plus important que celui du père. S'agissant de l'alimentation, l'impact est de quatre à huit fois plus important (Thomas, 1990, 1997). Ces 154 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 155 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE chiffres constituent de puissants arguments incitant à augmenter la maîtrise des femmes sur les ressources. Ensuite, les responsables politiques disposent de plusieurs moyens pour réduire les inégalités entre les hommes et les femmes concernant l'accès aux ressources dans la famille. Ils peuvent, entre autres, établir une politique de prix, élaborer des prestations de services en les adaptant aux besoins spécifiques de chaque genre, et investir dans des projets d'infra- structures ciblés. · Établir une politique de prix. Les investissements familiaux en éducation, en santé et en alimentation sont plus sensibles pour les femmes que pour les hommes à la hausse des tarifs. Parmi les ménages à faible revenu du Pakistan, une diminution des honoraires des médecins permettrait à 58% plus de femmes que d'hommes d'accéder aux services de santé (Alderman et Gertler, 1997). Des subventions, ciblées ou non, accordées aux services essentiels auraient ainsi assurément un impact positif sur les femmes en matière de santé et d'éducation, et contribueraient à réduire les inégalités fondées sur le genre. Des subventions aux garderies per- mettraient aux femmes d'accéder au marché du travail, d'élever leurs revenus et ceux du foyer. Cette mesure permettrait aussi à un plus grand nombre d'adolescentes de fréquenter l'école. · Élaborer des prestations de services. La mise en place de services (qu'il s'agisse du système scolaire, des soins de santé, de programmes d'aide agricole ou de services financiers) qui tiennent compte des situations et des besoins propres à chaque genre peut favoriser un accès aux ressources de production plus équitable pour tous. Au Bangladesh et ailleurs, des femmes obtiennent des prêts de groupe, ce qui facilite leur accès au cré- dit puisqu'elles n'ont pas à offrir des biens immobiliers ou autres (ce dont elles disposent rarement) en nantissement. Cette mesure a aug- menté de façon considérable leurs possibilités de crédit. · Investir dans les infrastructures. Investir dans les infrastructures est béné- fique pour chaque genre. Mais certains de ces investissements favorisent les femmes et les jeunes filles d'une façon particulière en leur épargnant un temps précieux, et en leur permettant d'accéder aux ressources et de participer à l'économie. Dans certaines régions rurales pauvres, le fait d'investir dans les infrastructures d'approvisionnement en eau et en énergie a permis de réduire considérablement le temps qui y était consa- cré. Ces initiatives ont permis à un plus grand nombre de jeunes filles de s'inscrire à l'école, et aux femmes de gagner un salaire et de participer aux activités communautaires. Parce qu'elles réduisent les inégalités fondées sur le genre concernant la maîtrise des ressources, ces mesures fortifient le pouvoir de négociation et de 155 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 156 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE prise de décisions des femmes dans la famille et les rendent plus productives dans la société. Dans les deux sections suivantes, nous verrons comment, par la répartition des ressources et des investissements, les ménages transmettent les rôles propres à chaque genre d'une génération à l'autre. Nous poursuivrons l'étude des liens existant entre la maîtrise et la distribution des ressources, le pouvoir de négociation et les investissements dans la famille. Nous nous pencherons sur les mesures politiques à prendre afin de promouvoir une plus grande éga- lité des sexes quant à la maîtrise des ressources. Nous conclurons en résu- mant les principales mesures politiques suggérées. Qu'est-ce qu'un ménage ? B IEN QUE LA PLUPART DES GENS GRANDISSENT ET VIVENT AU sein d'un ménage, sa définition ne s'avère pas aussi simple qu'elle peut le paraître à première vue. Un ménage est fondamentalement centré sur la procréation et l'éducation des enfants, sur la production de reve- nus pour subvenir aux besoins essentiels, et sur les besoins de la prochaine génération afin qu'elle soit productive. Pour atteindre ces objectifs, les membres d'un ménage ­ agissant seuls ou collectivement ­ doivent décider de la répartition des ressources, souvent minces, entre divers postes, tels la consommation, la production et les investissements. Mais le caractère spéci- fique d'un ménage dépend souvent du contexte dans lequel il évolue. Ce contexte est lui-même influencé par des éléments économiques et par des normes sociales et culturelles. Il faut ajouter que la constitution des ménages évolue et s'ajuste aux variations démographiques et économiques, et aux changements des normes. Dans les pays en voie de développement, des enquêtes économiques défi- nissent le ménage comme «un groupe de personnes qui vivent ensemble, mettent leurs ressources en commun et prennent ensemble au moins un repas par jour» (ONU, 1989, cité dans Glewwe, 2000, p. 135). Cependant, aucun de ces éléments n'est entièrement valable dans la réalité. Par exemple, si la plupart des ménages partagent la même maison, certains ne le font pas (Hammel et Laslett, 1974; McDonald, 1992). Les membres d'une même famille peuvent très bien se servir d'un même domicile pour des occupations précises et pas pour d'autres. En certains endroits d'Afrique, les membres d'un ménage vivant sous le même toit peuvent avoir des aires de cuisine et de repos distinctes, et les époux peuvent avoir des résidences séparées. Dans certains ménages polygames (particulièrement en Afrique de l'Ouest), les épouses vivent dans des résidences séparées et peuvent ne pas être au courant de l'existence de leurs rivales2. Dans les pays en voie de développement, 156 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 157 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE comme la migration est de plus en plus courante, les membres d'une même famille sont davantage liés par les transferts de fonds de l'étranger que grâce à une proximité physique. On pense généralement que les membres d'un ménage mettent en com- mun leurs ressources en vue de la consommation et de la production, mais ce n'est pas toujours le cas. Au Burkina Faso et au Ghana, les époux ne réunissent pas leurs ressources et ne font pas de budget commun pour les dépenses (Kevane, 2000; BRIDGE, 1994). Apparemment, les budgets sépa- rés sont la norme en Afrique de l'Ouest, et chacun des époux se charge de ses propres responsabilités en ce qui concerne la production et les dépenses. En plusieurs endroits d'Afrique subsaharienne, l'épouse est responsable des vivres, tandis que le mari est responsable des entrées en argent. Chez les Ashanti, au Ghana, on attend des hommes qu'ils pourvoient aux coûts des denrées et de l'éducation des enfants, tandis que les femmes se chargent des autres dépenses liées aux enfants, comme celles des vêtements, par exemple (Abu, 1983). Les ressources provenant du travail, dans un ménage, ne sont pas toujours mises en commun. Dans certaines parties d'Afrique subsaharienne, les hommes réclament des droits sur le travail de leur femme, travail qui est exé- cuté sur la terre familiale ou sur le lopin de terre personnel de cette dernière (Dey Abbas, 1997). Ces réclamations peuvent avoir préséance sur le droit des femmes de cultiver leur propre lopin de terre ou d'avoir des revenus sup- plémentaires. Les femmes ne font généralement pas de telles réclamations au sujet du travail de leur mari. Ces asymétries concernant les droits et le pouvoir décisionnel à l'intérieur de la famille peuvent être renforcées par la structure du ménage. Au Bangladesh, comme dans d'autres parties d'Asie du Sud, les jeunes mariées qui quittent le domicile de leurs parents pour s'exiler dans le village de leur mari ­ comme le veut le système patriarcal local ­ doivent s'adapter à leur nouvelle famille, où elles sont assujetties à leur belle-mère et aux autres femmes de la famille (Adnan, 1993). Cette situation ne les autorise guère à intervenir en ce qui concerne la distribution des ressources ou des investisse- ments, même si leur point de vue diffère de celui des autres membres de la famille. Les ménages perpétuent les rôles de chaque genre P EU IMPORTE OÙ ILS SE TROUVENT ET COMMENT ILS SONT organisés, ce sont les ménages qui transmettent les rôles propres à chaque genre de génération en génération. La famille est le premier lieu où se développent les relations sociales et où se transmettent les connais- 157 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 158 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE sances, le savoir-faire et les attentes sociales liés à chaque genre. C'est au sein de la famille que les enfants acquièrent leur identité; une identité qui déter- mine ce qui est socialement acceptable pour les hommes, pour les femmes et qui transparaît dans leurs relations. Les enfants intègrent leur rôle social au moyen de leçons explicites, de corrections lorsque leur comportement n'est pas approprié, et en observant et en imitant leurs parents et les autres hommes et femmes de la parenté qui leur servent de modèles (Whiting et Edwards, 1988). La façon de distribuer les ressources est une autre façon pour les ménages de déterminer les rôles de chaque genre. Dans les pires scénarios, les écarts entre les sexes en ce qui concerne la distribution de la nourriture et les soins de santé se traduisent par la malnutrition chez les filles, ce qui limite leur capacité d'apprendre et de participer de façon productive à la société. Plus généralement, les décisions familiales concernant l'investissement dans l'éducation des garçons et des filles ­ ou le fait que les garçons se consacrent aux travaux de la ferme et les filles aux soins du ménage ­ contribuent à ren- forcer et à perpétuer les idées reçues au sujet des rôles propres à chaque genre. Ces différences entre les garçons et les filles s'intensifient à mesure qu'ils grandissent. Presque partout dans le monde, les différences d'investissement entre les garçons et les filles se manifestent lors du passage du niveau primaire au niveau secondaire. Lorsque les filles atteignent l'adolescence, on s'attend habituellement à ce qu'elles consacrent plus de temps aux activités domes- tiques, comme la cuisine, le ménage, le transport de l'eau et du carburant et les soins aux enfants. Par contre, on attend des garçons qu'ils s'adonnent aux tra- vaux de la ferme ou à d'autres occupations rémunératrices. Lorsque les jeunes enfants sont malades, on demande souvent aux filles, et non aux garçons, de s'en occuper, et cela, souvent aux dépens de leurs études (Pitt et Rosenzweig, 1990; Ilahi, 1999a). Pendant ce temps, les garçons investissent le marché du travail, se préparant à leur rôle de pourvoyeur principal de leur ménage. Cette division des tâches selon le genre signifie que, au moment où les gar- çons et les filles deviennent des adultes et fondent peu à peu de nouvelles familles, les femmes travaillent généralement plus que les hommes, acquiè- rent moins d'expérience professionnelle et ont des revenus moins élevés. Dans presque tous les pays ­ développés et en voie de développement ­, la division bien nette du travail selon le genre est frappante: les hommes oeuvrent davantage sur le marché du travail et les femmes, davantage à la maison (tableau 4.1; PNUD, 1995)3. En outre, les femmes doivent souvent faire plus d'une activité à la fois: prendre soin des enfants tout en vaquant aux divers travaux du ménage et aux autres activités de la maison ou de la ferme (Floro, 1995). 158 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 159 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE Tableau 4.1 Les hommes travaillent à l'extérieur tandis que les femmes travaillent au foyer Hommes Femmes Kenya, rural 500 676 Kenya, urbain 572 590 Népal, rural 547 641 Népal, urbain 554 579 Bangladesh 496 545 Indonésie 366 398 Guatemala 579 678 Philippines 452 546 Venezuela 416 440 Colombie 356 399 Israël 377 375 Royaume-Uni 411 413 Italie 367 470 Finlande 410 430 France 388 429 Allemagne 441 440 Pays-Bas 345 377 Australie 443 443 Autriche 393 438 Canada 430 429 Danemark 458 449 Activités hors marché Norvège 412 445 Activités de marché États-Unis 428 453 800 600 400 200 0 200 400 600 800 Minutes par jour Note : Les données concernant l'utilisation du temps sont pour des activités productives, peu importe qu'elles soient de marché ou hors marché. Voir l'annexe I pour connaître les années et le lexique pour les définitions des termes utilisés. Source : PNUD (1995). Même lorsqu'elles sont actives sur le marché du travail, les femmes conti- nuent d'effectuer la plus grande partie des tâches domestiques. Par exemple, dans l'ancienne Union soviétique, les femmes jouissaient d'un degré relati- vement élevé d'égalité avec les hommes sur le plan professionnel, mais elles demeuraient responsables de la plus grande partie des soins des enfants et du ménage (Lapidus, 1993). 159 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 160 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Cette division des tâches et des horaires entraîne d'importantes consé- quences. Par exemple, comme il est peu probable que leurs filles rejoignent le marché du travail et rapportent un salaire, les parents peuvent hésiter à inves- tir dans leur instruction. Cela est vrai peu importe si les jeunes femmes sont adoptées par la famille de leur mari à la suite de leur mariage, une coutume qui tend à réduire davantage la part des investissements féminins en éducation. Les femmes qui sont moins scolarisées et qui travaillent moins ont inévitablement des revenus moins élevés, et cela limite leur influence sur la distribution des ressources et les investissements du ménage. Dans les pays en voie de développement, la plus grande partie du travail des femmes est exécutée à la maison et n'est pas rémunérée. Ce travail est alors considéré comme invisible, et les responsables politiques n'en tiennent pas compte4. Mais si l'on ne reconnaît pas la distribution du travail basée sur les rôles de chaque genre, on s'expose à ce que des politiques n'atteignent pas leurs objectifs et obtiennent des résultats décevants. Par exemple, on comprendra que des politiques visant une participation accrue des femmes sur le marché du travail ne puissent pas atteindre leurs objectifs si ces dernières n'ont aucune possibilité de réduire leurs activités domestiques. Ou il se peut que l'on retire les jeunes filles de l'école afin qu'elles s'occupent des tâches ménagères pour permettre à leurs mères de travailler (Grootaert et Patrinos, 1999; Ilahi, 1999b; Lokshin, Glinskaya et Garcia, 2000). En comprenant de quelles façons les ménages distribuent les ressources, nous nous donnons une base pour établir des politiques efficaces ne comportant pas de fâcheuses surprises. Maîtrise et répartition des ressources, exercice du pouvoir au sein des ménages S UIVANT LA TRADITION, LES ÉCONOMISTES ET LES ANALYSTES politiques conçoivent un ménage comme une entité. Dans le ménage dit « traditionnel », les membres mettent en commun leurs revenus, et les ressources sont réparties en vue de la consommation, de la production et des investissements, comme si tout le monde avait les mêmes priorités. Cette façon de voir a influencé les politiques et les programmes dans le passé. Par exemple, selon cette conception traditionnelle du ménage, c'est la somme des revenus ­ et non sa répartition ­ qui détermine la façon d'allouer les res- sources. Les salaires et les coûts revêtent aussi beaucoup d'importance. Mais toute une série de facteurs touchant le pouvoir des individus au sein d'un ménage ­ comme leur maîtrise sur les ressources, les lois et les normes qui déterminent les décisions à prendre à l'extérieur du foyer ­ ne sont pas pris en considération lors de la répartition des ressources et d'investissements dans la famille5. 160 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 161 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE Ce modèle de ménage traditionnel implique que les familles ne distribuent pas nécessairement les ressources de façon égale entre les sexes. Les inégalités fondées sur le genre sont plutôt censées refléter les coûts et le rendement des différents investissements effectués en faveur des hommes ou des femmes. Cette situation a cours dans un contexte de priorités communes ou dans un contexte où une personne impose ses volontés et ses préférences aux autres membres de la famille. Le modèle traditionnel ne passe pas non plus sous silence le rôle des revenus, des prix et des salaires dans la réduction des inégali- tés. Ce modèle est bien connu et offre toute une série d'outils aux responsables politiques pour promouvoir l'égalité des sexes. Par exemple, lorsque les revenus d'une famille augmentent, les inégalités fon- dées sur le genre tendent à s'amenuiser en ce qui concerne l'éducation, la santé et l'alimentation (voir le chapitre V). Lorsque les revenus d'une famille sont bas, il arrive souvent que les coupes dans les dépenses liées à l'école, aux soins de santé et à l'alimentation se fassent aux dépens des filles. Mais lorsque les revenus sont plus élevés, les familles augmentent leurs dépenses dans ces domaines et les filles en profitent davantage. En effet, l'éducation et la santé des filles s'avèrent plus sensibles à la fluctuation des prix que celles des garçons. Une politique de prix peut contribuer à améliorer l'état de santé et la scolari- sation absolue et relative des filles. Mais la répartition des ressources reste inégale dans les ménages du modèle traditionnel. Elle illustre les préférences envers certains membres de la famille, selon leur genre. Elle témoigne aussi des écarts entre les hommes et les femmes au sujet de la maîtrise des ressources, comme les revenus, les avoirs et l'éduca- tion. La répartition des ressources reflète les facteurs extérieurs affectant les posi- tions économiques critiques des hommes et des femmes, et a un impact sur leur capacité à quitter le ménage si les conditions de vie se détériorent. C'est la répar- tition des ressources elle-même ­ et pas seulement leur quantité ­ qui importe dans les investissements d'un ménage. Cette répartition nous renseigne sur le pouvoir de négociation relatif des membres du ménage (encadré 4.1). L'importance de maîtriser les ressources Des données empiriques démontrant de quelle façon la maîtrise des res- sources et le pouvoir de négociation influencent la répartition des ressources et les investissements dans un ménage existent maintenant pour un grand nombre de pays et d'activités comme la consommation, le travail, la pro- duction, les risques pris en commun et les investissements en faveur du déve- loppement humain. Des expériences ont porté sur le modèle du ménage tra- ditionnel, examinant attentivement les divers impacts des revenus provenant du travail et d'autres sources, des avoirs et des rentes publiques lorsqu'ils sont entre les mains des hommes ou des femmes. On s'est intéressé aux divers 161 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 162 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Encadré 4.1 Les jeux de pouvoir au sein du ménage surtout leur mise en application. Par exemple, si les pensions alimentaires étaient vraiment payées, le IL S'AVÈRE DIFFICILE, VOIRE IMPOSSIBLE, divorce deviendrait plus coûteux pour les hommes d'évaluer directement le pouvoir de négociation et cela donnerait davantage de pouvoir aux femmes d'une personne au sein d'un ménage. Cependant, dans le mariage. des articles portant sur la répartition des ressources Les ressources économiques et sociales de dernier dans les foyers ont attiré l'attention sur certains fac- teurs ayant une influence sur ce pouvoir et sur la recours influencent le pouvoir d'un individu au sein façon dont les familles utilisent leurs ressources. d'un ménage. Cela comprend jusqu'à quel point les Dans des études micro-économiques récentes, on normes sociales permettent ou interdisent certaines s'est intéressé au contrôle des ressources écono- activités à l'un ou l'autre genre. Cela tient aussi miques, tels les avoirs, les rentes, les paiements de compte de la nature des opportunités économiques, transferts et les prestations sociales ­ tous des élé- du degré de richesse des parents et du statut social. Le ments extérieurs au travail lui-même ­ comme des réseau social d'un individu, c'est-à-dire ses relations à facteurs déterminant le pouvoir au sein d'un titre de membre d'organisations ou avec ses parents ménage1. ou autres, peut aussi influencer son pouvoir décision- Une personne qui possède en propre ou qui nel au sein du ménage. Cela se vérifie au Bangladesh, contrôle des actifs peut avoir un pouvoir sur la où l'appartenance, pour des femmes, à des groupes de répartition des ressources dans la famille. En solidarité et à des organisations non gouvernemen- Indonésie, les biens qu'un homme ou une femme tales (ONG) a permis de briser des normes tradition- apportent en mariage constituent un bon indicateur nelles concernant le genre et d'augmenter leur pou- de leur pouvoir de négociation puisque dans la voir lors de prises de décisions économiques (Kabeer, majeure partie du pays, les époux peuvent récupérer, 1998). en cas de divorce, ce qu'ils ont apporté lors de leur Les caractéristiques d'un individu ­ sa scolarisa- mariage (Thomas, Contreras et Frankenberg, 1997; tion, ses habiletés, ses connaissances, son accès à Quisumbing et Maluccio, 1999). Mais dans plu- l'information ­ favorisent son pouvoir de négocia- sieurs pays en voie de développement, les enfants, tion dans son ménage. Il y a également des cas où les personnes âgées et les femmes ne peuvent pas l'aspect physique d'un individu en impose. quitter facilement le groupe familial, même dans les Certaines personnes ont recours à la force physique cas d'abus, pour deux raisons : ils dépendent finan- ou à la menace de violence afin d'influencer la cièrement d'une autre personne (le pourvoyeur répartition des ressources ou de soutirer des res- principal), et les normes sociales n'encouragent pas sources à leur conjoint ou à leur famille, comme on leur émancipation. l'a vu en Inde, où l'on observe des cas de violence Le contexte institutionnel est également un fac- relative aux dots des filles (Rao, 1998; Bloch et Rao, teur de pouvoir déterminant. On entend, par ce 2000). L'attitude de la communauté vis-à-vis de la contexte, les droits que confère le mariage, les violence conjugale et la manière dont le système droits fonciers, et les droits liés à la division du judiciaire punit les agresseurs ou les ignore ont sûre- patrimoine lors d'un divorce. Ce n'est pas tant ment une incidence importante sur le recours à la l'existence de lois et de droits qui importe, mais violence lors de la répartition des ressources. 1. Par exemple, Doss (1996); Thomas, Contreras et Frankenberg (1997); Quisumbing (1994) et Quisumbing et Maluccio (1999) ana- lysent le rôle des avoirs. Schultz (1990) et Thomas (1990) s'intéressent aux revenus autres que les salaires. Lundberg, Pollak et Wales (1997) et Rubaclava et Thomas (1997) se sont penchés sur les paiements de transferts et les rentes de bien-être. 162 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 163 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE niveaux d'instruction des hommes et des femmes ainsi qu'à d'autres pro- blèmes, comme ceux de la consommation et des dépenses dans la famille, de la santé des jeunes enfants, de l'alimentation et de l'éducation. Selon le modèle traditionnel, le fait que la maîtrise des revenus et des avoirs revienne à des hommes ou à des femmes ne devrait pas, en théorie, affecter la répar- tition des ressources. Mais dans la pratique, des études qui utilisent d'autres données, d'autres méthodologies et qui définissent le pouvoir de négociation différemment démontrent que la personne qui maîtrise les revenus et les avoirs influence la répartition des ressources du ménage (encadré 4.2; annexe IV). Différents types de consommation dans un ménage. Grâce à des études réalisées dans des pays aussi différents que l'Afrique du Sud, le Bangladesh, le Brésil, le Canada, la Chine, la Côte d'Ivoire, l'Éthiopie, la France, l'Indonésie, le Royaume-Uni et Taiwan (Chine), on a découvert que les façons de gérer les ressources spécifiques des hommes et des femmes se tra- duisent par des types de consommation et de dépenses différents dans un ménage. Ces effets particuliers varient d'un pays à l'autre, mais il y a des constantes: lorsqu'une augmentation des ressources est gérée par une femme, une plus grande part de celles-ci est consacrée au bien-être de la famille, en particulier aux enfants, même en tenant compte du revenu per capita et des caractéristiques démographiques de la famille. Un plus grand pouvoir des femmes sur les ressources se traduit par des dépenses qui renforcent leur sta- tut dans la famille et leur bien-être. Quel est l'apport concret des femmes au budget familial? En Côte d'Ivoire, lorsque la femme rapporte plus de revenus, la part du budget consacrée à l'ali- mentation augmente, tandis que celle qui est allouée aux cigarettes et à l'al- cool diminue; tout cela en tenant compte des dépenses moyennes per capita, de la taille du ménage et des caractéristiques démographiques (Hoddinott et Haddad, 1995). Au Brésil, on fait exactement les mêmes constatations. Lorsque des revenus supplémentaires sont administrés par des femmes, cela signifie qu'une plus large part du budget est allouée à l'éducation, à la santé et à l'alimentation (Thomas, 1997). Les mêmes facteurs qui influencent le revenu peuvent également affecter les choix de dépenses d'un ménage. C'est pourquoi les études effectuées au Brésil et en Côte d'Ivoire tiennent compte de l'aspect économétrique et ten- tent de cerner l'endogénéité possible du revenu en utilisant la méthode des moindres carrés à deux reprises (voir encadré 4.2). Dans l'étude brésilienne, on analyse les revenus obtenus grâce au travail et ceux qui proviennent d'autres sources. Bien qu'ils ne soient pas complètement immunisés contre l'aspect endogène, les revenus provenant d'autres sources que le travail sont moins vulnérables à des facteurs comme la répartition des tâches. Au Brésil, 163 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 164 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Encadré 4.2 Les expériences empiriques du modèle distribution du travail équitable dans un ménage. traditionnel Théoriquement, une modification du salaire du mari devrait produire le même impact sur le travail de la UN CERTAIN NOMBRE D'ÉTUDES EMPIRIQUES ONT femme qu'une modification du salaire de la femme été réalisées sur des ménages de modèle traditionnel. sur le travail du mari (Lundberg, 1988). En d'autres Ces études tenaient compte de l'hypothèse à la base du modèle traditionnel, comme quoi les ménages mettent termes, afin que le modèle soit efficace, l'impact mar- en commun leurs revenus et répartissent les ressources ginal du salaire devrait être le même pour un homme selon des priorités communes. Les résultats des expé- ou pour une femme. Mais bon nombre d'études révè- riences nous invitent à remettre en question la validité lent que cette symétrie n'existe pas dans les faits du modèle traditionnel dans un grand nombre de (Ashenfelter et Heckman, 1974; Ashworth et Ulph, domaines comme la consommation, la production, les 1981; Killingsworth, 1983; Kooreman et Kapteyn, prises de risques et les investissements humains dans un 1986; Alderman et Sahn, 1993; Fortin et Lacroix, ménage. 1997. Consultez l'annexe IV). Examen de la mise en commun des revenus. On a pro- Examen de la productivité. Une autre hypothèse au cédé, pour plusieurs études, à partir de données de son- sujet du modèle familial traditionnel est que la répar- dages dans l'analyse de l'hypothèse concernant la mise tition des ressources est faite selon les conditions d'ef- en commun des ressources1. Selon l'hypothèse de la ficacité « Pareto ». C'est donc dire qu'aucune redistri- mise en commun des revenus, l'impact marginal de res- bution ne peut se faire sans laisser au moins un des sources supplémentaires n'aurait aucune incidence sur membres plus mal en point qu'avant la distribution. la personne qui maîtrise les ressources. Afin de vérifier En effet, l'efficacité Pareto signifie que les ménages cette hypothèse, on examine, dans l'étude, si la maîtrise répartissent leurs ressources de façon à tirer le plus de exercée par l'homme ou par la femme sur les revenus, profits possible de leurs activités productrices. On a les avoirs, l'éducation, les crédits et les transferts du utilisé, pour quelques-unes de ces études, des données gouvernement ont des effets sur la consommation de la provenant de familles fermières en Afrique subsaha- famille ou sur le bien-être des enfants. Contrairement à rienne. Les faits ont démontré que la distribution de ce que l'on pensait, on a découvert que la personne la productivité dans un ménage ne s'avère pas néces- maîtrisant les ressources exerce une influence sur sa sairement efficace. Au Cameroun, par exemple, le tra- répartition. vail est mal réparti entre les lopins de terre travaillés Dans ces analyses, on soulève un problème majeur de par les hommes et par les femmes d'une même famille méthode à cause du caractère endogène des revenus. Si (Jones, 1983, 1986). Au Burkina Faso, si l'on com- les facteurs touchant les revenus courants affectent les pare la répartition du travail avec les conditions d'ef- intérêts, l'estimation concernant les revenus peut être ficacité Pareto, les ménages attribuent trop peu de faussée (Behrman, 1997; Hoddinott, Alderman et ressources humaines et autres aux terres cultivées par Haddad, 1997). On s'est efforcé de recueillir de les femmes (Udry, 1996; Udry et al., 1995). Dans meilleures données concernant la qualité exogène du chacun des cas, les conditions d'efficacité Pareto pouvoir dans un ménage, par exemple : les biens appor- n'ont pas été respectées. La production et les revenus tés en mariage par opposition aux revenus et aux avoirs familiaux pourraient augmenter de façon significative courants. On s'est aussi efforcé de saisir le caractère si l'on redistribuait les facteurs de productivité au endogène des revenus en tenant compte des calculs éco- sein des ménages. nométriques. Des défis de nature méthodologique Examen des risques communs. Dans de récentes demeurent, mais toutes les méthodes utilisées ainsi que études réalisées au Ghana et en Éthiopie, dans les- les diverses mesures de contrôle contredisent la théorie quelles on a élaboré des théories sur la consommation de la mise en commun des revenus. moyenne et sur la prise de risques communs, on véri- Examen de la répartition des tâches dans un ménage. fie si les époux prennent des risques en commun lors Le modèle traditionnel n'appuie pas non plus une de situations de crises économiques (M. Goldstein, 164 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 165 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE 1999; Dercon et Krishnan, 2000). S'ils les prennent femmes s'associent à d'autres femmes pour prendre en commun, la consommation des hommes et des des risques, tandis que le champ de risques des femmes devrait connaître les mêmes variations lors hommes est plus large et moins précis. Donc, dans d'une crise. Or, au Ghana, les consommations res- ces deux pays (le Ghana et l'Éthiopie), la prise de pectives des hommes et des femmes ne suivent pas les risques communs est inefficace. Elle va à l'encontre mêmes courbes de variation, ce qui suggère que ceux- du modèle traditionnel et de la théorie de Pareto sur ci ne prennent pas les mêmes risques. En fait, les l'efficacité. 1. Voir l'annexe IV pour plus d'études pertinentes à ce sujet. c'est grâce à la façon de mesurer les revenus qu'on a pu établir que les façons respectives des hommes et des femmes de gérer les revenus signifient des dépenses différentes dans la famille. Dans une étude réalisée en Afrique du Sud, au Bangladesh, en Éthiopie et en Indonésie, on analyse l'impact des avoirs apportés par les hommes et les femmes lors du mariage et celui de leur degré d'instruction sur la répartition des ressources et des investissements d'un ménage (Quisumbing et Maluccio, 1999). Des méthodes comparables sont utilisées dans plusieurs pays. Les données ont été recueillies spécialement pour l'étude de la distribution des ressources et des investissements dans la famille, et pour faire face à l'aspect endogène des revenus provenant du travail et d'autres sources. Les biens que les hommes et les femmes apportent lors du mariage et leur niveau d'ins- truction sont exogènes aux décisions prises après le mariage6. Comme au Brésil et en Côte d'Ivoire, la conception traditionnelle du ménage est rejetée. Tandis que la maîtrise des avoirs et le degré d'instruc- tion respectif des sexes produit des impacts différents selon les pays, on observe des constantes. Lorsque les femmes ont plus de pouvoir et de res- sources entre leurs mains, les générations suivantes en profitent davantage (par exemple, en éducation, en santé et en alimentation), que si ces res- sources étaient administrées par les hommes. Ces assertions ont été confirmées au Royaume-Uni à l'occasion de la modification d'une politique. À la fin des années 1970, les revenus d'un programme d'allocations familiales a été transféré des pères aux mères. À la suite de cette mesure, on a tout de suite constaté des changements importants dans les dépenses familiales en faveur des femmes et des enfants. Les dépenses en vêtements pour les femmes et les enfants ont connu une hausse, tandis que les dépenses en vêtements pour les hommes et en tabac ont chuté (Lundberg, Pollak et Wales, 1997; Ward-Batts, 1997)7. 165 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 166 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Accroissement du pouvoir des femmes et mieux-être des enfants. Le pou- voir respectif des hommes et des femmes sur les revenus, les biens matériels et l'instruction n'influencent pas uniquement la consommation d'un ménage. Au Brésil, lorsque des revenus supplémentaires provenant du travail et d'autres sources sont gérés par des femmes, ils améliorent davantage le bien-être et l'alimentation des enfants que s'ils étaient gérés par des hommes (Thomas, 1990, 1997). Abstraction faite de qui administre les revenus, une augmentation générale des revenus signifie toujours une amélioration du taux de survie et de l'alimentation (selon la courbe de croissance et l'indice de masse corporelle des enfants). Mais, à peu d'exceptions près, ce genre d'amélioration est presque toujours plus considérable si c'est la mère qui administre les revenus. Une expérience réalisée au Bangladesh apporte d'autres preuves appuyant cette découverte8. Deux études semblables ont comparé des emprunts faits par des hommes et par des femmes auprès de trois institutions: la Grameen Bank, le Comité pour l'avancement rural du Bangladesh (BRAC) et le pro- gramme du gouvernement nommé RD-12 (voir la grille 4.1). Les chiffres se réfèrent aux emprunts respectifs des hommes et des femmes pour les dépenses courantes per capita, la scolarisation des enfants et l'alimentation (Khandker, 1998; Pitt et Khandker, 1998). Les effets de ces emprunts varient considérablement selon que la personne qui emprunte est un homme ou une femme, et l'impact marginal est souvent plus grand pour les femmes. On note, auprès des trois institutions, que l'impact des emprunts faits par les femmes concernant les dépenses du ménage per capita est au moins deux fois plus important que les emprunts faits par les hommes (grille 4.1). Une augmentation de 10 % dans les emprunts réalisés par des femmes se traduit par des augmentations des dépenses per capita pouvant atteindre jusqu'à 40 %, ce qui est très significatif statistiquement9. Une même augmentation de 10 % dans l'emprunt masculin ne donnerait que 20 % d'augmentation de dépenses per capita. L'emprunt féminin s'avère également plus efficace que l'emprunt masculin pour « lisser » (maintenir) la consommation à long terme (Khanker, 1998; Menon, 1999). Comme pour d'autres formes de pouvoir sur les ressources, les emprunts faits par des femmes procurent davantage de bien-être aux enfants que ceux qui sont faits par des hommes. Par exemple, sauf pour les emprunts faits auprès du BRAC, les emprunts effectués par des femmes entraînent davantage d'inscrip- tions scolaires que ceux qui sont faits par des hommes. Contrairement à l'em- prunt masculin, l'emprunt féminin se traduit en bien-être et en alimentation pour les enfants de façon statistiquement très significative. L'emprunt masculin l'emporte clairement sur l'emprunt féminin sur la valeur nette familiale. Cela indique que, sauf exception, les femmes sont 166 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 167 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE Grille 4.1 Impact des emprunts effectués par des hommes et des femmes sur les dépenses d'un ménage (Changement exprimé en pourcentage, pour une hausse de 10 % des emprunts) Grameen Bank BRAC RD-12 Emprunts Emprunts Emprunts Emprunts Emprunts Emprunts Dépenses d'un ménage (hommes) (femmes) (hommes) (femmes) (hommes) (femmes) Dépenses per capita 0,18 0,43 0,19 0,39 0,23 0,40 Valeur nette 0,15 0,14 0,20 0,09 0,22 0,02 Inscription scolaire des garçons 0,07 0,61 ­0,08 ­0,03 0,29 0,79 Inscription scolaire des filles 0,30 0,47 0,24 0,12 0,07 0,23 Grandeur des garçons pour leur âgea ­2,98 14,19 ­2,98 14,19 ­2,98 14,19 Grandeur des filles pour leur âgea ­4,92 11,63 ­4,92 11,63 ­4,92 11,63 Utilisation de moyens contraceptifs 4,25 ­0,91 0,40 ­0,74 0,84 ­1,16 Fertilité récente ­0,74 ­0,35 0,54 0,79 ­0,74 0,50 Note : Les chiffres en gras sont basés sur des coefficients estimés statistiquement significatifs pour une hausse de 10 % ou plus. a. Les changements exprimés en pourcentage pour la taille des garçons et des filles représentent une moyenne des impacts constatés chez les trois programmes de micro-financement cités (Grameen Bank, BRAC et RD-12). Source : Khandker (1998). davantage portées à investir en capital humain (en faveur de leurs enfants), tandis que les hommes sont plus enclins à investir en capital matériel. Les emprunts respectifs des hommes et des femmes produisent des effets très différents sur la reproduction, ce qui suggère qu'ils n'ont pas les mêmes priori- tés au sujet de la natalité et de la contraception. Par exemple, l'emprunt fémi- nin fait décroître l'usage de moyens contraceptifs et, sauf pour les emprunts à la Grameen Bank, fait augmenter la natalité. L'emprunt masculin, de son côté, fait augmenter l'usage de moyens contraceptifs et, sauf pour les emprunts au BRAC, fait diminuer la natalité. Cette découverte peut paraître contraire à ce qu'on aurait cru, puisque des opportunités comme celles de poursuivre des études, de gagner un salaire et d'accéder au marché du travail tendent plutôt à faire diminuer la natalité10. Mais, au Bangladesh, où les femmes ont un faible revenu, l'idée d'enfants supplémentaires est bien perçue dans la mesure où ils pourront éventuellement contribuer eux-mêmes aux activités rémunérées, sou- vent effectuées à partir de la maison11. 167 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 168 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Lorsqu'on permet aux femmes d'accéder au crédit en toute liberté, celles- ci voient leur pouvoir accru dans bien d'autres aspects de la vie. Par exemple, les emprunts consentis aux femmes leur ont permis de contrôler d'autres biens que les terres (Pitt et Khandker, 1998; Khandker, 1998). Les femmes inscrites à ces programmes de crédit ont dit être davantage impliquées au niveau des prises de décisions familiales (Kabeer, 1998) et ont senti que leur participation aux activités économiques était davantage acceptée par leur mari (Agarwal, 1997). Une étude portant sur le programme de micro- financement de la BRAC conclut que le crédit accordé aux femmes met en valeur leur capacité de négocier des biens sans l'avis de leur mari (Zaman, 1999). Les femmes ayant contracté un emprunt de plus de 10 000 takas ont 46% plus de chances de négocier les produits de leur basse-cour sans l'avis de leur mari que celles qui n'ont pas emprunté. Ces mêmes femmes ont deux fois plus de chances de réaliser la vente de leurs bijoux et 35% plus de chances de maîtriser leur épargne. Enfin, les femmes inscrites à des pro- grammes de crédit utilisent plus que d'autres femmes les soins de santé et autres services (Nanda, 1999)12. Inefficacité dans la production et risques liés au genre Les ménages ne mettent pas nécessairement leurs ressources en commun en vue de la productivité. Il en résulte un manque d'efficacité entraînant d'importantes conséquences sur les revenus et le bien-être des ménages. Au Burkina Faso, on utilise trop peu de fertilisants et de main-d'oeuvre sur les terres cultivées par les femmes, tandis qu'on en alloue une trop grande quan- tité aux terres cultivées par les hommes du même ménage (Udry, 1996; Udry et al., 1995). Comme on l'a vu au chapitre II, ces pratiques inefficaces affec- tent considérablement les revenus et la productivité des ménages. Leur pro- duction totale augmenterait d'au moins 20% si l'on rationalisait l'épandage de fertilisants et l'utilisation des ressources humaines entre les terres cultivées par les hommes et celles qui sont cultivées par les femmes. Au Cameroun, on constate une très mauvaise répartition du travail sur les terres cultivées par les hommes et les femmes d'un même ménage (Jones, 1983, 1986). Par exemple, les femmes consacrent une partie substantielle de leurs efforts à la production du sorgho (dont elles maîtrisent le revenu) au détriment de la production pourtant plus rentable du riz (dont les revenus sont maîtrisés par leurs maris). Comme dans l'exemple du Burkina Faso, le revenu familial augmenterait si l'on rationalisait la distribution du travail en faisant en sorte que les femmes se consacrent à la culture du riz plutôt qu'à celle du sor- gho. Mais au Cameroun, les femmes préfèrent cultiver les terres dont elles gèrent les revenus, même si leurs maris leur versent un salaire pour la produc- tion du riz. De plus, il semble que des jeux de pouvoir influencent cette rému- 168 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 169 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE nération. En effet, les épouses plus âgées des ménages polygames ainsi que les femmes dont le mari n'a pas fini de payer ses dettes de mariage reçoivent une compensation plus élevée que les autres femmes (Jones, 1983). Dans la partie sud du Ghana, les ménages n'agissent pas nécessairement d'un commun accord lorsqu'il s'agit de prendre des risques ou de faire face à des crises, comme des problèmes de santé ou des imprévus au niveau de la production agricole (M. Goldstein, 1999). Les femmes préfèrent prendre leurs risques avec d'autres femmes du village, tandis que les hommes pren- nent des risques avec des groupes plus larges et moins définis, constitués d'autres membres du clan, à l'intérieur et à l'extérieur du village. En plus de mettre l'accent sur la manière d'affronter les risques de chaque genre, au moins dans certains contextes, ces découvertes nous font voir l'importance de réseaux sociaux pouvant offrir une assurance au moins informelle. Dans le cas des femmes du sud du Ghana, ce sont des amies, et non des membres de la famille, qui se portent garantes lors de secousses économiques concer- nant la consommation ou la production. Par conséquent, au moment de décider des mesures visant à limiter ces secousses, les gouvernements doivent tenir compte du fait que les situations d'urgence diffèrent, selon le genre qui est affecté, y compris au sein d'un même ménage. L'importance de pratiquer des interventions ciblées et de comprendre le contexte L'étude des facteurs déterminant la répartition des ressources et des inves- tissements nous montre l'importance de bien cibler les interventions afin de promouvoir l'égalité des sexes et un développement durable. Des interven- tions visant à augmenter l'accès des femmes aux ressources de production et aux biens matériels ne peuvent qu'améliorer leur autonomie et leur statut dans leur ménage. De telles interventions contribuent également à améliorer le bien-être des enfants et des familles, encore plus que si elles visaient l'accès aux ressources du ménage en général. Des interventions ciblées ne sont pas utiles uniquement pour les paiements des redevances ou les programmes de promotion des individus aux ressources de production. Puisque, au moins dans certains contextes, les hommes et les femmes d'un ménage n'envisagent pas les risques de la même manière, les interventions en vue de limiter les risques seraient sans doute plus efficaces si elles tenaient compte, avant tout, du genre des personnes plutôt que des risques spécifiques des ménages. Les questions étudiées ici sont inspirées de données empiriques tirées d'études diverses couvrant différents pays et régions. Comprendre le rôle précis que jouent les relations entre les sexes dans un contexte donné ­ et celui des insti- tutions sociales dans la répartition des ressources dans un ménage ­ s'avère indispensable pour établir des politiques qui favorisent vraiment l'égalité. 169 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 170 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Par exemple, le rapport positif entre une plus grande maîtrise des res- sources des mères et des investissements plus importants en faveur des enfants est assez évident, car il est basé sur des données provenant de plu- sieurs pays. Mais la relation entre la maîtrise des ressources par les pères ou les mères et l'investissement en faveur des filles plutôt que des garçons est beaucoup plus complexe et correspond à un contexte particulier. Au Brésil, au Ghana et aux États-Unis, les ressources gérées par les mères produisent plus d'effets sur les filles, tandis que les ressources gérées par les pères affec- tent davantage les garçons (Thomas, 1994). Les faits provenant d'autres pays sont toutefois ambivalents. En Côte d'Ivoire, la part des femmes du revenu familial a davantage un impact positif significatif sur la courbe de croissance des garçons que sur celle des filles (Haddad et Hoddinott, 1994). En Afrique du Sud, le degré d'instruction du père a un impact positif et significatif sur la scolarité des adolescentes, tandis que le degré d'instruction de la mère a un impact sur la scolarité des garçons (Quisumbing et Maluccio, 1999)13. Comment expliquer que des mères soient portées à favoriser l'éducation de leurs fils au détriment de celle de leurs filles? Les normes sociales et les cou- tumes peuvent amener des parents à faire ce genre de choix. Au Bangladesh, le statut social d'une femme est lié au fait d'avoir des fils (Adnan, 1993). Des considérations économiques peuvent nous faire envisager différemment les garçons et les filles. Dans les pays où les femmes vivent plus longtemps que les hommes et où les garçons sont considérés comme des bâtons de vieillesse, on peut interpréter le fait qu'une femme favorise un garçon comme un inves- tissement en vue de ses vieux jours (Quisumbing et Maluccio, 1999). Dans certains contextes fortement hiérarchisés en matière de genre et où les femmes sont particulièrement en proie aux risques, il est normal qu'elles comptent sur leurs fils non seulement pour assurer leurs vieux jours, mais tout simplement pour se protéger des risques et pour légitimer leur statut précaire auprès de leur belle-famille (Das Gupta, 1987). Les mécanismes sous-jacents aux liens qui existent entre la maîtrise des revenus par les parents et les investissements en faveur des enfants peuvent donc être complexes. Et dans les pays où les moeurs favorisent les garçons, il se peut que l'État doive inciter les parents à investir également en faveur de leurs filles. Une compréhension approfondie des rôles de chaque genre peut permettre d'éviter de fâcheuses conséquences sur le plan des interventions gouvernemen- tales. Par exemple, récemment, en Gambie, un projet de loi visait à améliorer la production du riz ­ traditionnellement cultivé par les femmes ­ et augmen- ter la part de revenus des femmes. Bien que la production de riz ait effective- ment augmenté grâce à ce projet, sa commercialisation a fait en sorte que la maîtrise des revenus des récoltes est passée des femmes aux hommes. Ce chan- 170 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 171 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE gement a eu pour résultat que les hommes avaient davantage d'ascendance sur le travail de leurs femmes, puisque ces dernières devaient participer aux récoltes désormais contrôlées par les hommes, ce qui a entraîné une baisse de la part du revenu des femmes (von Braun et Webb, 1989; Dey-Abbas, 1997). Si l'on avait pris le temps de comprendre les écarts entre les droits, les obligations et les pouvoirs respectifs des hommes et des femmes, les responsables politiques auraient été en mesure d'élaborer un programme pouvant atteindre les deux objectifs (Alderman et al., 1995). Un examen minutieux des rôles de chaque genre dans un milieu donné s'avère souvent indispensable à l'élaboration de programmes visant à atteindre une plus grande équité des sexes. Des politiques et des investissements qui favorisent la promotion de l'égalité E N AUGMENTANT LE POUVOIR DES FEMMES SUR LES RESSOURCES, on améliore leur statut ainsi que le bien-être des enfants et de la famille. Mais quels sont les leviers politiques appropriés à cette fin? Les responsables politiques disposent de divers instruments leur permettant d'influencer la répartition des ressources dans un ménage, de façon à pro- mouvoir une plus grande égalité concernant la distribution des tâches, les investissements en faveur des enfants et la maîtrise des ressources de produc- tion. Dans cette section, nous nous penchons sur trois de ces instruments: une politique de prix facilitant l'accès aux services, la mise sur pied de moyens facilitant l'accès aux services, et l'investissement dans des infrastruc- tures permettant d'épargner du temps. Une politique de prix qui facilite l'accès aux services Une politique de prix et tout autre mécanisme favorisant l'accès aux ser- vices sont des facteurs qui contribuent à la promotion de l'égalité des sexes en ce qui concerne le développement humain et une plus grande participa- tion des femmes sur le marché du travail. Le développement humain. Les dépenses des ménages en matière d'ins- truction, d'alimentation et de santé des filles dépendent beaucoup de la fluc- tuation des prix. De façon générale, les investissements en faveur des femmes et des filles en dépendent davantage que ceux qui sont consentis aux hommes et aux garçons (grille 4.2). Au Pakistan, l'élasticité des prix a 58% plus d'incidence sur l'utilisation des services d'un médecin par les femmes à faible revenu que pour les hommes d'un même groupe. Pour les ménages à revenu élevé, l'élasticité des prix a 14% plus d'incidence (Alderman et Gertler, 1997). Dans le sud de l'Inde, l'élasticité des prix pour les denrées ali- 171 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 172 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE mentaires a beaucoup plus d'incidence sur les femmes que sur les hommes (Behrman et Deolalikar, 1990). Dans une étude, basée sur des données pro- venant d'environ 90 pays et couvrant trois décennies, on démontre que l'élasticité des frais de scolarité, tant au primaire qu'au secondaire, ont de 12 à 21% plus d'incidence sur les filles que sur les garçons (Schultz, 1987). Grille 4.2 Impact des prix sur l'éducation, la santé et la nutrition, par genre Étude Pays Principaux constats Santé et alimentation Alderman et Gertler Pakistan La valeur absolue de l'élasticité des prix pour l'utilisation des soins (1997) de santé, tablée selon une population moyenne, varie de 58 % plus élevée pour les femmes que pour les hommes parmi les gens à faible revenu à 14 % plus élevée chez la population à revenu élevé. Behrman et Inde La valeur absolue de l'élasticité des prix pour l'alimentation est Deolalikar (1990) généralement plus élevée pour les femmes, si l'on se fie à des calculs basés sur la demande des aliments. Sur 28 coefficients dont on a estimé le prix, 7 sont sensiblement plus élevés pour les femmes que pour les hommes et 2 sont moins élevés. Pour les filles, 8 coefficients sont plus élevés en termes absolus que pour les garçons. Éducation Sipahimalani (1999) Inde La probabilité pour une fille d'être inscrite à l'école diminue de 1 à 2% si la distance qui la sépare de l'école primaire augmente. Pour les garçons, l'impact n'est pas significatif statistiquement. Lavy (1996) Ghana Le coefficient pour la distance jusqu'à l'école primaire et secondaire démontre une participation plus élevée chez les filles (­0,111 et ­0,020) que chez les garçons (0,009 et ­0,017), et ce, même si le coefficient de la distance jusqu'à l'école secondaire est le même. Gertler et Glewwe Pérou L'élasticité de la demande en matière d'éducation est toujours plus (1992) élevée pour les filles que les garçons en ce qui concerne le temps consacré au voyagement. Elle varie entre 5 et 20 % et dépend du revenu familial moyen et de l'emplacement de l'école. de Tray (1988) Malaisie L'inscription des filles est moins élevée que celle des garçons pour les communautés qui n'ont pas d'école secondaire. La probabilité qu'une fille soit inscrite à l'école baisse de 0,171 (0,134 pour les garçons). King et Lillard Philippines Le taux d'inscription des garçons à l'école secondaire grimperait de (1987) seulement 1 % tandis que l'impact sur les filles serait de 3 % si la distance jusqu'à l'école secondaire diminuait. Schultz (1987) Divers pays L'élasticité des prix pour le taux d'inscription des filles est de ­0,76 à l'école primaire, ­1,07 au niveau secondaire et de ­0,86 pour le nombre probable d'années de scolarité (­0,63, ­0,91 et ­0,77 chez les garçons). Note : L'élasticité des prix est estimée en fonction de la demande. Il s'agit d'un changement, exprimé en pourcentage, dans la demande pour un bien ou un service, en réponse à une fluctuation de son prix. 172 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 173 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE Les investissements en faveur des filles sont davantage sensibles à l'élasticité des prix, en partie à cause des préjugés des parents, qui pensent que les filles offrent un moins bon «rendement» que les garçons pour leur investissement. Cependant, les études empiriques les plus récentes ne peuvent appuyer les faits concernant le rendement privé de la scolarisation. En fait, les conclusions de ces études sont plutôt favorables aux filles (King et Hill, 1993; Shultz, 1998)14. Mais même lorsque le rendement privé de la scolarisation ne diffère pas d'un genre à l'autre, la demande pour l'instruction des filles continue d'être influen- cée par les parents, qui perçoivent le rendement concret comme peu probable. Dans des sociétés où l'on n'attend pas des femmes qu'elles soient économi- quement indépendantes et où elles sont, par conséquent, limitées dans leur capacité d'administrer des revenus ou des biens, on peut comprendre que les parents ne soient pas très enthousiastes à l'idée d'investir en elles (Alderman et King, 1998). Comme nous l'avons vu plus tôt, les parents qui comptent sur le soutien de leurs fils en vue d'assurer leurs vieux jours considèrent que les inves- tissements en faveur des filles offrent un moins bon rendement. Le fait que les parents ne tiennent pas compte, dans leurs calculs, du bénéfice social que rap- porterait l'éducation de leurs filles dénote une lacune importante des marchés, ce qui requiert une intervention du gouvernement. Les coûts d'investissement pour les garçons et les filles peuvent aussi varier. Même si les frais de scolarité sont identiques, les coûts en uniformes et en trans- port peuvent différer selon le genre. Par exemple, il est possible que les parents aient des frais supplémentaires de transport s'ils ne veulent pas que leurs ado- lescentes parcourent ­ seules ­ de longues distances pour se rendre à l'école. Le coût des vêtements ou des uniformes peut s'avérer plus élevé pour les parents qui exigent une tenue vestimentaire plus stricte de la part de leurs filles. Au Maroc et en Tanzanie, les frais de scolarité sont beaucoup plus élevés pour les filles que pour les garçons (Khandker, Lavy et Filmer, 1994; Mason et Khandker, 1996). En Tanzanie, les frais de scolarité d'une fille s'élèvent à 14% de plus que ceux d'un garçon. Les filles ne disposent pas d'autant de temps que les garçons pour l'école, par- ticulièrement dans les régions pauvres et dans les régions rurales, où elles tra- vaillent plus longtemps qu'eux, si l'on tient compte des activités de marché et hors marché dans une journée (Hill et King, 1995; Mason et Khandker, 1996). C'est le cas, notamment, lorsqu'il y a des normes rigides qui dictent la réparti- tion des tâches ménagères et lorsque les marchés substituts sont insuffisamment développés. Comme il n'existe pas de calcul capable de mesurer spécifiquement l'impact des coûts associés au temps sur la scolarisation, quelques études ont uti- lisé l'impact de la distance entre l'école et la maison comme moyen d'obtenir de l'information sur le rapport indirect des coûts associés au temps sur l'éducation. Résultat: la distance pour se rendre à l'école semble exercer un effet dissuasif 173 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 174 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE plus important sur les filles que sur les garçons. Au Ghana, en Inde, en Malaisie, au Pakistan, au Pérou et aux Philippines, les filles sont plus sensibles que les gar- çons au facteur de la distance entre l'école et la maison. Des programmes récents qui subventionnaient directement ou indirectement l'éducation ont montré sans l'ombre d'un doute comment les coûts affectent la scolarisation des filles ­ et le monde en général. Un projet de bourses d'études favorisant l'accès à l'école secondaire pour les jeunes filles au Bangladesh, un projet de scolarisation en faveur des jeunes filles, au Pakistan tant rural que urbain, et un autre projet national de bons d'études en Colombie, tous ces pro- jets ont démontré que des interventions visant à réduire les coûts en éducation favorisent une augmentation des inscriptions des filles à l'école et fait diminuer leur taux d'abandon par rapport à celui des garçons (encadré 4.3). Ainsi, une politique de prix et des programmes permettant l'accès aux diffé- rents services ne peuvent qu'augmenter les investissements absolus et relatifs en faveur des femmes et des filles. Puisque l'élasticité des prix en matière de scola- risation et de santé affecte davantage les filles que les garçons, même des pro- grammes non ciblés réduisant les coûts vont contribuer à combler l'écart entre les sexes. Mais il est clair que des approches ciblées vont obtenir plus d'effets à moindres coûts15. Si l'élasticité des prix est plus élevée pour les femmes que pour les hommes, la fluctuation des prix aura des effets plus pernicieux chez les femmes que chez les hommes. Par exemple, lorsque des pays imposent des tarifs en éducation et en soins de santé, les femmes et les jeunes filles sont plus vul- nérables que les hommes et les garçons à l'augmentation des prix. Les soins aux enfants. Les femmes travaillent généralement plus que les hommes au cours d'une journée et, dans presque tous les pays, leur part des tâches domestiques est disproportionnée. Ces activités maintiennent les femmes éloignées du marché du travail et empêchent les jeunes filles de fréquenter l'école. Lorsque les femmes ne peuvent pas gagner un revenu indépendant, leur pouvoir décisionnel au sein du ménage en souffre. Lorsque les jeunes filles ne peuvent pas fréquenter l'école, elles ne développent pas leurs talents, ce qui se fait au détri- ment de leur propre bien-être et de celui de leurs futurs enfants. Des services de garde accessibles et à prix modique peuvent améliorer la situation et permettre aux filles de fréquenter l'école et aux femmes d'investir le marché du travail. Dans les pays développés autant que dans ceux en voie de développement, une mère ayant de jeunes enfants a considérablement moins de chances de travailler16. Aux États-Unis, on constate que les soins réclamés par un enfant additionnel se traduisent par une réduction de 10 à 30% de la main-d'oeuvre féminine17. Au Mexique, l'arrivée d'un nouveau-né cause une diminution de 12% de la pré- sence des mères sur le marché du travail, et l'ajout d'un enfant âgé de un à cinq ans, une diminution de 9% (Cunningham, 2000). Dans les villes du Brésil, un enfant de moins de deux ans réduit la main-d'oeuvre féminine de 9 à 38%, selon 174 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 175 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE Encadré 4.3 Expériences concrètes de subventions tion scolaire des filles influence celle des garçons concernant la scolarisation des filles (Kim, Alderman et Orazem, 1999). Avant de mettre sur pied ces projets, les gens se demandaient si le EN ÉVALUANT DE RÉCENTES INITIATIVES DE petit nombre d'inscriptions de filles à l'école était dû subventions accordées à des écoles, on a constaté à des barrières culturelles faisant en sorte que les que ce type d'intervention est de nature à faire aug- menter le taux d'inscription des filles à l'école et à parents retiraient leurs filles des écoles, ou à l'ab- combler l'écart entre les sexes concernant l'éduca- sence d'institutions appropriées. En faisant l'évalua- tion. Un programme d'aide financière, mis sur pied tion de ces initiatives, on démontre que lorsqu'on au Bangladesh en 1982, subventionne les dépenses subventionne des projets bien pensés qui tiennent scolaires des jeunes filles fréquentant l'école secon- compte de facteurs culturels et qu'on en facilite l'ac- daire. Dans la première évaluation, on a découvert cès, on favorise nettement l'inscription scolaire des que, au cours des cinq premières années de la mise filles. en application de ce programme, le taux d'inscrip- En Colombie, on a lancé, en 1992, un vaste pro- tion des jeunes filles était passé de 27 à 44 % dans la gramme national de bons d'études qui vise à ce que région-pilote, soit plus du double de la moyenne les élèves du niveau primaire poursuivent leurs nationale (Bellew et King, 1993). À la suite de l'éli- études secondaires. Le programme finançait des mination des frais de scolarité des filles dans tout le écoles privées, tout en visant à désengorger les écoles pays, en 1992, et de l'expansion du programme publiques. Au lieu de déterminer des écoles privées d'aide aux régions rurales, l'inscription nationale à subventionner, le gouvernement a permis aux étu- des jeunes filles a grimpé jusqu'à 48 %. Un plus diants et aux parents de choisir parmi les écoles pri- grand nombre de jeunes filles se sont présentées aux vées qui acceptaient de participer au programme examens et se sont ensuite inscrites aux institutions (King, Orazem et Wohlgemuth, 1999). Les étu- collégiales (Banque mondiale, 1997). Les inscrip- diants étaient admis au programme de bons d'études tions des garçons ont aussi connu une hausse, mais à certaines conditions : qu'ils aient d'abord fré- pas aussi accentuée que celles des filles. quenté une école primaire du secteur public, qu'ils Deux récentes initiatives au Baluchistan (Pakistan) aient été acceptés dans une école secondaire du sec- illustrent bien les impacts potentiels des coûts et de teur privé participante au programme et qu'ils aient l'accessibilité. Un programme de bourses scolaires, l'âge et le statut socio-économique requis. Des bons mis sur pied à Quetta (la capitale), aide des organi- d'études ont été décernés au moyen d'une loterie sations non gouvernementales (ONG) à ériger des dans les villes où le nombre de demandes d'inscrip- écoles dans des quartiers urbains défavorisés, avec tion dépassait celui des bons prévus, les candidats des primes visant l'inscription des filles : les garçons étant indifféremment des garçons ou des filles. Ce ne sont admis que si leur nombre est inférieur à la système de bons a contribué à augmenter les ins- moitié des inscriptions. En région, un autre pro- criptions des étudiants à faible revenu au niveau gramme d'aide contribue à la création de petites secondaire. En moyenne, les étudiants favorisés par écoles primaires locales pour les filles. Le programme ces bons ont un dixième d'année de scolarité de encourage les parents à établir ces écoles et subven- plus, ce qui constitue un effet statistiquement signi- tionne le recrutement de professeurs féminins issus ficatif pour les filles plus que pour les garçons de la communauté locale. Les inscriptions des filles (Angrist et al., 2000). Ajoutons que le fait d'être ont grimpé de 33 % à Quetta et de 22 % en région. bénéficiaire d'un bon d'étude réduisait la probabi- Il est intéressant de constater que ces deux initiatives lité, pour un étudiant, de devoir travailler pour ont également eu pour effet d'accroître le nombre gagner un salaire. Ce dernier effet favorise davan- d'inscriptions masculines, suggérant que la promo- tage les garçons que les filles. 175 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 176 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE la mesure économétrique appliquée. Un enfant supplémentaire âgé de deux à quatre ans la réduit de 3 à 5% (Connelly et al., 1999). La main-d'oeuvre mas- culine, en revanche, ne diminue pas en raison de la présence des enfants. Au contraire, les enfants semblent avoir un impact positif sur l'emploi masculin18. Dans des études sur la distribution de la main-d'oeuvre, on révèle également que, dans un ménage où il y a une personne «substitut» pour les soins des enfants ­ telle une soeur ou une fille ­ les probabilités que la mère travaille à l'ex- térieur du foyer augmentent considérablement (Wong et Levine, 1992; Connelly, DeGraff et Levison, 1996; Lokshin, 2000). Mais lorsque les mères ont de meilleurs salaires et que leur force de travail est recherchée, il arrive souvent que ce soient les jeunes filles qui demeurent à la maison et négligent leurs études. Lorsque des services de garderie abordables sont disponibles, les mères ont plus de chances d'investir le marché du travail. Dans les quartiers pauvres de Rio de Janeiro, au Brésil, c'est avant tout grâce aux services publics de garderie que les mères peuvent travailler à l'extérieur du foyer, à temps partiel ou à plein temps (Deutsch, 1998). Dans plusieurs pays (au Canada, au Kenya, en Roumanie, dans la fédération de Russie et aux États-Unis), lorsqu'on a réduit le prix des services de garderie, la demande pour ces services a augmenté et cette mesure a permis aux mères de familles de travailler (tableau 4.2)19. En Russie, les subventions aux services de garde donnent de meilleurs résultats que les sub- Tableau 4.2 Des services de garderie peu coûteux ont un impact sur la participation des mères au marché du travail Augmentation de la participation des mères au marché du travail grâce à une baisse de 10 % des frais de garde 5 4 3 Pourcentage 2 1 0 Canada Kenya Roumanie Russie États-Unis (a) États-Unis (b) Note : L'élasticité des emplois en rapport avec les frais de garde pour les États-Unis (b) se rapporte aux femmes mariées. Connelly et Kimmel remar- quent une hausse significative de la participation au marché du travail pour les mères monoparentales. Source : Cleveland, Gunderson et Hyatt (1996) pour le Canada; Lokshin, Glinskaya et Garcia (2000) pour le Kenya; Fong et Lokshin (2000) pour la Roumanie; Lokshin (2000) pour la Russie; Blau et Robins (1988) pour les États-Unis (a); Connelly et Kimmel (2000) pour les États-Unis (b). 176 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 177 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE sides et attirent plus de mères sur le marché du travail tout en augmentant leur revenu. Des services de garde à prix réduits peuvent aussi favoriser l'assiduité des filles à l'école. Au Kenya, tant rural qu'urbain, une réduction de 10% du prix des ser- vices de garderie se traduit par une hausse de 5,1% dans les inscriptions scolaires des jeunes filles de 8 à 16 ans, ce qui constitue un effet significatif d'un point de vue statistique et économique. Cette mesure ne produit aucun écho particulier du côté des garçons (Lokshin, Glinskaya et Garcia, 2000). Mise sur pied de moyens facilitant l'accès aux services Les services gouvernementaux et les divers organismes d'aide ne tiennent pas compte des nuances entre les sexes lorsqu'ils offrent des services, qu'il s'agisse d'écoles, d'institutions financières ou de programmes d'aide à l'agri- culture. Le fait d'avoir négligé cet aspect a eu pour conséquence de limiter l'accès des femmes à toute une gamme de ressources de production. En même temps, des institutions axées sur les différences fondées sur le genre ont forte- ment encouragé les femmes à utiliser ces services, ce qui a amélioré l'égalité concernant la maîtrise des ressources. Dans cette section, nous nous intéres- sons à l'accessibilité des services dans trois secteurs particuliers: l'éducation, les services financiers et les programmes d'agriculture. L'éducation. La conception de systèmes scolaires appropriés ne peut qu'aug- menter la scolarisation des filles. Au Baluchistan (Pakistan), le recrutement de professeurs féminins locaux a permis de briser certaines barrières culturelles et aux filles de fréquenter l'école primaire (Kim, Alderman et Orazem, 1998). L'embauche de professeurs féminins a également joué un rôle déterminant dans l'inscription scolaire des filles au Bangladesh (Khandker, 1996). Dans certains cas, les parents préfèrent inscrire leurs adolescentes dans des écoles non mixtes. Dans les écoles mixtes du Bangladesh, il était essentiel, pour que les parents y inscrivent leurs filles, d'installer des toilettes pour chaque genre. Un projet récent a mis en lumière l'importance de faire participer la com- munauté à l'élaboration de services appropriés qui tiennent compte de fac- teurs culturels. Au Baluchistan (Pakistan), par exemple, les parents se sont engagés dans le recrutement des professeurs et dans d'autres responsabilités relatives au projet de l'école, ce qui a favorisé l'inscription féminine (Kim, Alderman et Orazem, 1998). Il semble que les parents soient plus exigeants pour l'éducation de leurs filles que pour celle de leurs garçons en ce qui concerne la qualité de l'enseignement, le programme d'études et le comportement des professeurs. Dans la province frontalière du nord-ouest du Pakistan, les filles promues à la classe supérieure à la suite de leur réussite scolaire ont de 70 à 90% plus de chances de pour- suivre leurs études que celles qui reprennent leur cours ou qui sont promues 177 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 178 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE sans avoir étudié. Il semble que la promotion basée sur le mérite ne revête pas autant d'importance pour les garçons. Ceux qui sont promus à la suite d'une réussite scolaire n'ont que 50% plus de chances de poursuivre leurs études que ceux qui doublent ou qui sont promus pour d'autres raisons (King, Orazem et Wohlgemuth, 1999). Dans une étude réalisée à partir d'un sondage effectué au Bangladesh et au Kenya, on voit que la compétence des enseignants semble avoir plus d'impact sur la scolarisation des filles que sur celle des garçons (Khandker, 1996; Lloyd, Mensch et Clark, 1998). Dans une étude récente réalisée au Kenya, on a établi que fréquenter un éta- blissement d'enseignement de niveau primaire peut s'avérer une expérience ardue tant pour les filles que pour les garçons, mais que les filles sont plus sen- sibles à des attitudes négatives ou discriminatoires (Mensch et Lloyd, 1998). Les filles, plus que les garçons, ont besoin d'un milieu favorable aux études. Si un contexte ne favorise pas l'apprentissage, il est fort probable qu'un grand nombre de filles abandonneront l'école. Par exemple, si elles sentent que les professeurs estiment les mathématiques importantes pour elles, et si elles sentent que gar- çons et filles reçoivent le même traitement en classe, ce climat favorable les inci- tera à demeurer à l'école (Lloyd, Mensch et Clark, 1998). Toujours au Kenya, les filles ne donnent pas leur plein rendement en classe lorsqu'elles sentent que les professeurs les croient moins capables que les garçons, en tenant compte d'autres facteurs. Les garçons ne sont pas aussi sensibles à l'opinion que les pro- fesseurs peuvent avoir d'eux (Appleton, 1995). L'attitude des parents envers la scolarisation de leurs enfants produit des effets semblables. Dans les familles où les parents estiment que l'instruction est plus importante pour les garçons que pour les filles, les fils obtiennent de meilleures notes aux examens, en tenant compte d'autres facteurs (Appleton, 1995). Dans les ménages où les parents croient que leurs filles sont moins capables que les garçons, les filles obtiennent de piètres résultats aux examens. Changer l'attitude des parents, des professeurs et des directeurs requiert des efforts à long terme. Afin de ne pas perpétuer les stéréotypes fondés sur le genre à l'école, il faut enca- drer le personnel enseignant et revoir le programme d'études. Les services financiers. À cause des conditions exigées par les banques tradi- tionnelles et les bureaux de prêt, il est beaucoup plus difficile pour les femmes que pour les hommes d'épargner et d'emprunter (Buvinic et Berger, 1990; Holt et Ribe, 1991). Par exemple, des institutions financières exigent souvent des garanties sous forme de biens immobiliers ou autres valeurs en nantissement d'un prêt, mais peu de femmes ont ce type de ressources. Une surabondance de documents et de formulaires compliqués à remplir peut nuire aux femmes peu instruites. L'imposition de montants minimums d'emprunt ­ et la priorisation d'emprunts selon le type d'entreprise, qui privilégie habituellement le secteur manufacturier dans lequel peu de femmes oeuvrent ­ limite l'accès des femmes 178 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 179 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE au crédit et à d'autres services financiers. Dans le cas où l'institution financière est éloignée de la maison, la mobilité réduite de la femme constitue un facteur de plus l'empêchant d'avoir un compte en banque. Les institutions financières peuvent faciliter aux femmes l'accès à l'épargne et à l'emprunt. Elles n'ont qu'à mettre sur pied des règlements et des opérations qui offrent des solutions aux contraintes des femmes. Par exemple, elles pour- raient remplacer les formes traditionnelles de garantie, simplifier les procédures bancaires, réduire les longues distances à parcourir pour épargner et négocier des prêts. Prenons l'exemple des unités mobiles susu au Ghana, qui offrent un ser- vice bancaire à domicile, recueillant les épargnes des gens sur leur lieu de travail et à leur domicile (Muntemba, 1999). En se rendant ainsi vers les clients, ces unités bancaires mobiles ont permis à un grand nombre de femmes du Ghana d'avoir un compte en banque et de contracter des emprunts pour leur entreprise (encadré 4.4). En ce qui concerne les services de crédit, la Grameen Bank et le Comité pour l'avancement rural du Bangladesh (BRAC) ont mis sur pied une initiative par- ticulièrement intéressante, fondée sur le prêt à des groupes de personnes plutôt qu'à des individus. Cette formule vise à remplacer les politiques traditionnelles qui exigent des biens immobiliers ou d'autres valeurs en nantissement. Le prêt est consenti au groupe et, pour le remboursement de la dette, on compte sur la pression que le groupe va exercer sur l'individu, si nécessaire. Cette méthode innovatrice a l'avantage de permettre de prêter à des personnes qui ne possèdent pas de valeurs utilisées couramment comme garanties. Dans la pratique, elle a permis à des femmes de contracter des emprunts. Entre 1985 et 1994, le nombre de femmes ayant contracté un emprunt auprès de la Grameen Bank a augmenté rapidement, passant d'environ 100 000 à plus de 1,7 million (Khandker, Khalily et Khan, 1995). En 1996, environ 1,5 million de femmes avaient contracté un emprunt auprès du BRAC (Chen, 2000). Les femmes constituent maintenant la grande majorité des bénéficiaires de ces programmes. De plus, ce sont des programmes financiers de ce genre qui offrent des services financiers à des millions de femmes au Bangladesh. En plus de remplacer les garanties traditionnelles par des politiques de pres- sion exercée par le groupe, ces programmes de micro-financement offrent une formation à leurs clients afin qu'ils deviennent de meilleurs chefs d'entreprise. Cette formation ne touche pas uniquement l'administration des petites entre- prises, mais aussi l'amélioration de la qualité de vie des intéressés. Par exemple, on renseigne les membres de la Grameen Bank sur l'importance de l'instruction et de l'exercice physique (Khandker, Khalily et Khan, 1995). Ces programmes encouragent également les membres à avoir un compte en banque et à épargner une partie de leurs nouveaux revenus. Pour plusieurs per- sonnes issues de milieux défavorisés, ils constituent une aide précieuse dans l'ac- 179 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 180 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE quisition de biens financiers et un «bas de laine» en cas de crise financière. Certains programmes incluent même des primes d'assurance. Programmes d'aide à l'agriculture. Les fermières n'ont, en général, qu'un accès limité aux ressources dont elles ont besoin pour leur production agricole. Leur accès à l'information, à la formation et aux nouvelles technologies relatives à l'agriculture est également limité. Au Kenya, au Malawi, au Nigeria, en Tanzanie et en Zambie, les agents de promotion agricole visitent les fermes administrées par des hommes et négligent celles qui sont dirigées par des femmes (Quisumbing, 1994). Au Viêt-Nam, les femmes qui sont à la tête de rizières n'ont pas autant de chances que les hommes de suivre des cours sur Encadré 4.4 Les unités mobiles susu en Afrique de caires avec le secteur formel des finances, les susu ne peu- l'Ouest vent pas consentir à tous les prêts qu'ils désireraient. Comment expliquer leur popularité? ON LES NOMME SUSU OU OLU AU GHANA, ESUSU OU AJO · Les susu fonctionnent comme des services de gestion au Nigeria, et tontiniers ou banques tontines dans les pays financière. Les déposants utilisent communément les francophones. Ce sont des unités bancaires mobiles du fonds accumulés comme un capital de travail servant secteur informel qui se déplacent chez les clients afin de à réapprovisionner les valeurs, ce qui leur permet de recueillir les épargnes à travers le Ghana et une bonne par- maintenir l'entreprise à flots et de l'agrandir. tie de l'Afrique de l'Ouest. Elles diffèrent quelque peu des · En s'engageant à déposer régulièrement au susu, les banques communautaires et autres organismes de groupes, gens oeuvrant dans de petites entreprises ­ surtout telle la Grameen Bank. L'unité susu se déplace aux ateliers, les femmes ­ mettent leurs épargnes à l'abri des aux usines, aux marchés ainsi qu'aux foyers afin de membres de leur famille et de leurs amis, qui les sol- recueillir un montant déterminé, et cela, sur une base quo- liciteraient pour toutes sortes de motifs. tidienne ou à intervalles réguliers. Il s'agit le plus souvent · Dans les lieux où le système bancaire commercial ne d'entreprises individuelles offrant des services financiers, répond pas aux besoins des petits déposants parfois sans que l'entreprise n'ait de capital propre. illettrés, c'est avec plaisir que ceux-ci confient leurs On y place de petits montants d'argent, allant de 0,25$ sous quotidiens à un service d'épargne à leur portée, à 2,50$ en 1994. Au Ghana, la moyenne des montants qui les sert même à domicile. épargnés quotidiennement par client était de 0,73$ (Steel De quelles façons les banques mobiles susu facilitent- elles aux femmes l'accès aux services financiers ? et Aryeetey, 1994). À la fin de chaque mois, les épargnes · Elles n'exigent pas un dépôt minimum; les femmes sont récupérées par les déposants, les percepteurs gardant peuvent ainsi y déposer de petits montants. le montant d'un jour d'épargne, ou 3,3% des épargnes du · Comme elles ne jouissent pas d'une grande mobi- mois, comme commission. Les susu peuvent consentir des lité, les femmes n'ont pas à parcourir de longues avances de fonds à des clients importants et réguliers, et distances avec ce système. concéder occasionnellement des prêts à des non-clients · Ce système ne comporte pas de procédures com- (Aryeetey et al., 1994; 1997). Ils examinent les emprun- pliquées qui exigeraient un niveau élevé de teurs potentiels à l'occasion des dépôts. Une récente crois- connaissances et d'instruction. sance des activités économiques au Ghana a permis à ces · Le système susu ne comporte pas toute une série de services bancaires mobiles d'augmenter leurs prêts au cours règlements qui empêchent souvent les femmes de ces dernières années, puisque leur fonds de dépôt s'est d'accéder aux services financiers. Par exemple, il ne considérablement accru. Mais à cause de relations pré- comporte pas l'exigence d'un cosignataire. 180 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 181 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE l'usage de pesticides, et n'ont pas autant le droit de consulter les techniciens des programmes officiels (Chi et al., 1998). Les femmes sont désavantagées quant à l'usage des pesticides, même en tenant compte d'autres facteurs comme l'âge, le degré d'instruction et autres qualifications. Les agents gouvernementaux des programmes d'aide ­ majoritairement masculins ­ ont toujours accordé plus d'intérêt aux fermiers car ils sont cen- sés être les chefs de famille et on s'attend à ce qu'ils partagent l'information avec leurs femmes. À ce propos, ils avaient tort. Il est courant de voir des femmes diriger des fermes dans plusieurs pays. Cette situation existe depuis longtemps en Afrique subsaharienne et elle est en train de se répandre dans d'autres pays, où les hommes délaissent les fermes pour d'autres emplois. Et comme c'est le cas pour d'autres ressources, ce genre d'information n'est pas toujours partagé entre les membres d'une même famille. Exceptionnellement, à Trinidad, 40 % des fermières affirment avoir reçu des conseils agricoles de leur mari. Mais presque partout ailleurs, au Burkina Faso, en Inde, au Malawi, au Nigeria, en Syrie et en Thaïlande, c'est auprès d'amies et de voi- sines que les femmes recueillent l'information concernant les technologies modernes de production (Saito et Spurling, 1992; Das, 1995). Au Burkina Faso, seulement 1 % des femmes interrogées lors d'un sondage ont dit avoir été informées des technologies de production par leur mari. Les femmes pourraient profiter davantage des services d'aide à l'agriculture si ceux-ci tenaient compte des inégalités fondées sur le genre concernant les choix de cultures et l'accès aux ressources, ainsi que les restrictions d'ordre cul- turel limitant l'interaction entre les hommes et les femmes. Comme dans le cas d'autres services, on tirerait sans doute de grands bénéfices si l'on prenait en considération les écarts entre les sexes dans la mise sur pied des programmes ­ par exemple, en traitant les fermières comme un groupe méritant des poli- tiques et des lignes d'actions appropriées, en recrutant des agents féminins pour les programmes d'aide à l'agriculture, spécialement dans les endroits où l'interaction entre les hommes et les femmes est restreinte, et en informant les agents des deux sexes des façons de gérer les contraintes auxquelles doivent faire face les fermières et les fermiers (Saito et Spurling, 1992; Das, 1995). Dans des régions comme l'Afrique subsaharienne, où les hommes et les femmes travaillent à des cultures diverses, il conviendrait de réaliser des recherches agronomiques sur les cultures auxquelles se consacrent les femmes. Investissements dans les infrastructures Des investissements pertinents dans des infrastructures ayant pour effet d'épargner le temps des femmes et des filles pourraient faire avancer la cause de l'égalité des sexes concernant l'accès aux ressources et la participation à l'économie. Des investissements pour réduire la distance de la maison à 181 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 182 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE l'école favorisent le taux d'inscription des filles en valeurs absolues et en rap- port avec les taux masculins. On peut faciliter aux femmes et aux filles l'ac- cès aux soins de santé et réduire le temps qu'elles passent à s'occuper des malades (Gutierrez, 1998). Ces changements peuvent signifier moins d'in- terruptions au travail pour les femmes et plus d'études pour les filles. Il s'avère également important d'investir dans les aqueducs et autres infra- structures d'approvisionnement énergétique. Dans les zones rurales des pays en voie de développement, où les aqueducs sont parfois déficients, voire inexistants, les jeunes filles perdent un temps énorme à se rendre aux points d'eau20. Qu'arriverait-il en Afrique subsaharienne si toutes les familles habi- taient à moins de 400 mètres ­ ou à moins de six minutes à pied ­ d'une source d'eau potable (un objectif poursuivi par le gouvernement de la Tanzanie) ? On a calculé, dans une étude récente réalisée dans cinq zones rurales au Burkina Faso, en Ouganda et en Zambie, qu'on épargnerait de 125 à 664 heures par famille par année dans des villages où cet objectif n'a pas été atteint (tableau 4.3). Dans les villages où l'on a obtenu les plus mauvais résultats (où les familles étaient les plus éloignées des points d'eau et des com- bustibles), on pourrait épargner jusqu'à 942 heures par famille par année. Si Tableau 4.3 Les investissements en infrastructures d'approvisionnement en eau et en énergie peuvent réduire considérablement le temps consacré aux activités domestiques Moyenne des heures potentielles épargnées par foyer, par an 800 600 400 Heures 200 0 Lusaka rural, Kaya, Mbale, Kasama, Dedougou, Zambie Burkina Faso Ouganda Zambie Burkina Faso Eau potable dans un rayon de 400 mètres Bois de chauffage à 30 minutes de marche Note : Kasama et Dedougou sont déjà dans la cible de 400 mètres. Dans certaines parties de l'Afrique subsaharienne, les femmes représentent les deux tiers ou plus du temps que le ménage consacre à la collecte de l'eau et du combustible, tandis que les enfants, principalement les filles, en repré- sentent 5 à 28 %. Source : Barwell (1996). 182 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 183 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE l'on ne dépassait pas 30 minutes de marche pour se procurer le bois de chauf- fage, on pourrait épargner de 119 à 610 heures par famille par année pour la récolte de combustibles. Dans les villages où l'on a obtenu les plus piètres résultats, on pourrait épargner jusqu'à 984 heures par famille par année, ce qui équivaut à la moitié d'une année de travail pour une personne travaillant huit heures par jour, cinq jours par semaine (Barwell, 1996). Dans la plupart des pays, l'approvisionnement en eau et en bois de chauf- fage est la responsabilité des femmes et des filles. Au Ghana, en Tanzanie et en Zambie, les femmes doivent consacrer à ces activités au moins les deux tiers de leur temps prévu pour les tâches domestiques. Les enfants, surtout les fillettes, y consacrent de 5 à 28% de leur temps (Malmberg Calvo, 1994). Dans des campagnes du Népal et du Pakistan, où le bois de chauffage est rare, les femmes consacrent plus de temps à sa cueillette et moins de temps à gagner un salaire (Kumar et Hotchkiss, 1988; Cooke, 1998; Ilahi et Jafarey, 1999). Cela se vérifie également pour l'eau dans les régions rurales du Pakistan, où les femmes travaillent plus d'heures que les hommes et disposent, par conséquent, de moins de loisirs que ces derniers (Ilahi et Grimard, 2000). Sans une infra- structure adéquate pour répondre aux besoins en eau, en énergie et en trans- port, ces activités grugent le temps des filles consacré aux études et le temps de travail et de loisirs des femmes. Des investissements dans ces infrastructures réduiraient également le temps que les femmes consacrent à l'entretien de la maison, ce qui leur per- mettrait d'avoir un emploi. Quand une femme gagne plus d'argent, elle a plus de pouvoir au sein du ménage. De meilleures infrastructures en eau potable et en énergie profitent à tous les membres de la famille, mais de façon particulière aux filles. Par exemple, dans les campagnes du Maroc, le fait d'avoir maintenant des puits ou de l'eau courante permet aux garçons et aux filles de fréquenter l'école. Mais ce sont les filles qui en profitent davan- tage, puisqu'elles se consacraient auparavant à la collecte de l'eau au détri- ment de leurs études (Khandker, Lavy et Filmer, 1994). __________ Dans ce chapitre, nous avons démontré que la répartition des ressources, au sein d'un ménage, se fait selon des priorités contradictoires et une inégalité de pouvoir entre ses membres. Lorsque les femmes ont davantage accès aux res- sources, leur pouvoir est accru, ce qui se traduit par une augmentation des dépenses et des investissements en faveur des enfants. Les données confirment l'importance de tenir compte des différences fondées sur le genre lors des inter- ventions. Elle met aussi en lumière certains leviers politiques pouvant réduire les inégalités concernant la maîtrise des ressources: une politique de prix, une organisation de services qui tient compte des différences fondées sur le genre ainsi que des investissements dans des infrastructures précises. 183 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 184 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE L'action concertée du contexte institutionnel et des décisions familiales détermine les rôles sociaux de chaque genre ainsi que leurs relations entre eux. Elle détermine jusqu'où s'étendent les droits, les ressources et l'influence de chaque genre dans la société. Cependant, ni le contexte institutionnel ni le processus de prise de décisions au sein du ménage ne sont immuables. À mesure que les pays se développent ­ ou que les crises économiques se règlent ­, les institutions sociales se modifient, tout comme les contraintes avec lesquelles les individus et les familles doivent composer. Ces change- ments exercent une influence sur les investissements et les opportunités éco- nomiques, mais touchent les hommes et les femmes de façons différentes. Dans le prochain chapitre, nous étudierons comment la croissance des reve- nus et le développement économique touchent à différentes dimensions du problème de l'inégalité fondée sur le genre. Nous examinerons également comment certaines stratégies de développement agissent sur la cause de l'éga- lité des sexes. Notes 1. Des taux de mortalité féminine supérieurs à la de développement, et Lapidus (1993) pour des exemples de moyenne en Chine, en Corée et en Inde (et, à un degré l'ancienne Union soviétique. moindre, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord), joints à un degré de malnutrition plutôt élevé chez les femmes en Asie du 4. Parce qu'elle ne rencontre pas les normes officielles Sud (voir le chapitre I), révèlent clairement que les hommes de l'économie, on est enclin à sous-évaluer la contribution éco- profitent d'une mauvaise répartition des ressources dans ces nomique des femmes (Elson, 1992; Folbre, 1998). Par régions. Mais des études ont prouvé que la répartition qui se exemple, une partie infime du travail des femmes, si on le com- fait dans les familles peut s'effectuer avec plus d'équité, en pare avec le travail des hommes, figure dans les chiffres du tenant compte du genre. Par exemple, Behrman (1988) revenu national. Mais selon ces chiffres, l'asymétrie entre les découvre que, dans la partie sud de l'Inde, on octroie un sup- sexes paraît énorme. Dans les pays industriels, l'État prend en plément de ressources aux femmes et aux jeunes filles en considération et valorise environ les deux tiers du temps total période d'abondance. Pitt, Rosenzweig et Hassan (1990) rap- de travail des hommes, tandis qu'il ne tient compte que du tiers portent qu'on a procédé à des transferts de redevances com- du temps de travail des femmes (PNUD, 1995). Dans les pays pensatoires en faveur des mères de famille au Bangladesh. en voie de développement, l'écart entre les hommes et les Enfin, aux Philippines, on a constaté à plusieurs reprises que femmes est encore plus prononcé. L'État considère les trois des familles, soucieuses de diviser équitablement leurs biens quarts du travail des hommes, tandis qu'il ne tient compte que entre les enfants des deux sexes, accordent leurs terres en héri- du tiers de celui des femmes. tage à leurs fils et investissent fortement dans l'instruction de 5. Vous pouvez consulter, par exemple, Samuelson leurs filles (Estudillo, Quisumbing et Otsuka, 1999). (1956), Becker (1974, 1981), et Singh, Squire et Strauss 2. Bien que la polygamie soit beaucoup moins courante (1986). Pour une critique de cette vision néoclassique qui tient en Gambie, en Guinée, au Niger et au Sénégal depuis les deux compte des différences entre les sexes, consultez Folbre (1986). dernières décennies, une famille sur cinq demeure polygame, 6. C'est effectivement le cas même si les biens et l'édu- selon un sondage réalisé dans ces pays au début des années 1990 (Banque mondiale, à partir de données d'un son- cation étaient considérés comme endogènes en raison de dage réalisé dans quinze pays d'Afrique subsaharienne). clauses particulières du mariage. Pour de plus grands dévelop- pements sur la question des biens apportés en mariage dans le 3. Consultez également Brown et Haddad (1995) et contexte d'une étude sur les relations de pouvoir dans le foyer, Ilahi (1999b) pour plus d'exemples provenant de pays en voie consultez Quisumbing et Maluccio (1999). 184 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 185 POUVOIR, MOTIVATIONS ET RESSOURCES AU SEIN DU MÉNAGE 7. Avant avril 1977, la taxe en faveur des enfants certitude si ce genre de violence a augmenté ou non. Dans d'autres (Universal Child Benefit) a d'abord consisté en un montant études, au contraire, il semble qu'il y ait moins de violence lorsque déduit, à la source, du salaire du père de famille. Il existait alors les femmes participent à des programmes de crédit (Hashemi, deux programmes distincts : celui du Family Allowance, consis- Schuler et Riley, 1996; Schuler et al., 1996; Kabeer, 1998). tant en un paiement imposable fait à la mère, et le Child Tax Allowance, payable à la famille. Ce dernier programme signi- 13. En Afrique du Sud, le fait que les mères possèdent fiait en pratique une augmentation de la rémunération du père des biens et soient instruites produit des effets différents sur les de famille, s'élevant à 500 livres sterling par année pour une populations africaines et hindoues. Les femmes hindoues famille de deux enfants, c'est-à-dire environ 8 % de ce que apportent généralement une plus grande quantité de biens lors l'homme gagnait. Entre 1977 et 1979, le gouvernement a éli- de leur mariage, et elles exercent une influence positive sur miné ces programmes et a institué un programme unique, le l'éducation de leurs filles (Quisumbing et Maluccio, 1999). Universal Child Benefit, consistant en un paiement hebdoma- 14. Cette évaluation d'un retour des garçons et des filles daire fait à la mère. Ce paiement étant octroyé directement aux à l'école a été établie à partir de plusieurs études réalisées dans mères comme uniques récipiendaires, on a vite constaté que des pays développés et en voie de développement. Dans ces toute la famille profitait de cette aide (Lundberg, Pollak et études, on utilise des méthodes économétriques pour l'évalua- Wales, 1997; Ward-Batts, 1997). tion (Schultz, 1998). 8. Il est souvent difficile d'évaluer en chiffres les effets 15. Pour une analyse des effets probables que produirait produits par un programme de micro-financement. Il est rare que un budget gouvernemental en utilisant des politiques de prix des chercheurs trouvent des données correspondant à des faits ciblées et non ciblées, consultez le chapitre VI et l'annexe V. dont les effets ne peuvent être confondus avec ceux d'un pro- gramme ne laissant rien au hasard. Malgré tout, on utilise, dans 16. Cette découverte continue d'avoir du poids, même à de récentes études portant sur des programmes de micro-finance- la suite de l'application de méthodes économétriques afin d'ap- ment, au Bangladesh, des données d'un sondage « quasi expéri- porter des corrections à des variantes endogènes. Pour une mental », ce qui permet aux auteurs de corriger ces problèmes revue des questions économétriques liées aux effets des jeunes (Khandker, 1998; Pitt et Khandker, 1998; Menon, 1999). enfants sur les conditions de travail de leur mère, consultez Connelly et al. (1999). 9. Pour chacun de ces trois programmes, l'effet de l'em- prunt féminin sur les dépenses familiales per capita est signifi- 17. Ces spéculations proviennent de Rosenzweig et catif s'il dépasse 1%. Wolpin (1980), Bronars et Grogger (1994), Angrist et Evans (1998) et Jacobsen, Pearce et Rosenbloom (1999), qui ont réa- 10. Consultez, par exemple, Fairlamb et Nieuwoudt lisé leurs expériences à partir de cas de jumeaux afin de faire (1991), Gertler et Molyneaux (1994), Singh (1994), Diamond, face à de possibles problèmes de facteurs endogènes. Newby et Varle (1999), Mencarini (1999), et Handa (2000). Pour un résumé de ces différents points de vue, voir la Banque 18. Dans une étude portant sur la répartition du temps mondiale (1999b). dans les milieux ruraux en Inde, Skoufias (1993) découvre que la présence de jeunes enfants au foyer réduit le temps des 11. Schuler et Hashemi (1994) et Schuler, Hashemi et femmes sur le marché du travail d'au moins 10 %, ce qui est Riley (1997) ont découvert une relation entre l'emprunt fémi- statistiquement significatif. Par contre, l'effet des jeunes enfants nin et un plus grand usage de moyens contraceptifs. Mais Pitt sur le temps des hommes n'est pas significatif. et al. (1999), dans une analyse, font remarquer qu'on ne tient pas compte, dans ces études, de plusieurs formes de distorsions 19. À ce sujet, vous pouvez consulter Blau et Robins ou d'irrégularités hétérogènes. De plus, on ne vérifie pas l'in- (1988), Connelly et Kimmel (2000), Cleveland, Morley et fluence que l'emprunt masculin peut avoir sur l'achat de Hyatt (1996), Lokshin (2000), Fong et Lokshin (2000), et moyens de contraception. Lokshin, Glinskaya et Garcia (2000). Dans l'étude de Lokshin, Glinskaya et Garcia portant sur le Kenya rural et urbain, l'in- 12. La question se pose, de savoir si l'emprunt féminin troduction dans le monde ouvrier est définie comme un mou- serait à l'origine d'un surcroît de violence faite aux femmes au vement vers un emploi salarié. Bangladesh (Goetz et Sen Gupta, 1996). La violence peut éclater lorsqu'un homme veut maîtriser les sources de crédit de son 20. Dans plus de 50 % des 68 pays pour lesquels on dis- épouse, ou lorsqu'il refuse de rembourser après avoir utilisé les pose de données, plus de la moitié des populations rurales n'ont sommes empruntées par sa femme. On ne peut pas vérifier avec pas accès à une eau potable certifiée (Banque mondiale, 2000). 185 Chapitre 4 16/06/03 14:54 Page 186 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 187 CHAPITRE V Le développement économique favorise-t-il l'égalité des sexes ? L ES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE NUISENT AU DÉVELOPPEMENT économique de plusieurs façons, et cela affecte les conditions de vie des gens. Cependant, la relation entre l'égalité des sexes et le déve- loppement économique va dans les deux sens, c'est-à-dire que la croissance des revenus et le développement économique peuvent favoriser l'égalité, ou lui nuire. C'est de cette relation complexe dont il sera question dans ce chapitre. Comme le démontrent des données provenant de différents pays, bien que le développement économique n'ait pas éliminé la pauvreté, le nombre de personnes pauvres diminue avec l'augmentation des revenus moyens (Banque mondiale, 2000b): Aujourd'hui, près du cinquième de la population mondiale dispose de moins de 1$ par jour pour vivre. L'ampleur de cet état de privation varie d'un pays à l'autre. On ne peut s'en étonner: plus le pays est riche, plus le taux de consommation moyen est élevé chez les gens faisant partie du cinquième le plus pauvre de la population, et plus petite est la portion de sa population ayant moins de 1$ par jour pour vivre. Dans l'en- semble, chaque point de pourcentage de croissance supplémentaire sur le plan de la consommation moyenne des ménages réduit cette portion d'environ 2%... Cette relation met en évidence l'importance de la crois- sance économique pour augmenter les revenus des pauvres et pour sor- tir les gens de la pauvreté (p. 46 et 47). Toutefois, ces résultats n'impliquent pas que la croissance économique fait progresser l'égalité des sexes. Dans la mesure où le développement écono- mique améliore la qualité de vie des pauvres ­ par l'augmentation des reve- nus et des possibilités d'emplois ou par l'amélioration de l'accès aux services publics comme les écoles, le transport et les établissements de santé ­, les 187 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 188 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE possibilités d'égalité et d'amélioration du bien-être des filles et des femmes sont aussi plus grandes. Les changements économiques affectent les hommes et les femmes de façons différentes. On a démontré, dans le premier chapitre, qu'ils ne jouissent pas des mêmes droits et ressources. Ils ne peuvent donc pas tirer un profit égal des opportunités économiques. Comme ils ont des tâches différentes dans des sec- teurs économiques différents, les fluctuations de prix des biens et services et les changements technologiques ne les affectent pas de la même manière. Une économie dynamique peut améliorer l'égalité des sexes grâce à plu- sieurs mécanismes que nous passons en revue dans ce chapitre: · Le développement économique augmente les possibilités d'emploi et améliore la productivité des travailleurs, ce qui entraîne le développe- ment de nouveaux marchés. Ces améliorations peuvent éliminer quelques inefficacités économiques, rendre les conditions de chômage moins intéressantes et faire comprendre aux ménages et aux individus qu'une plus grande participation économique est avantageuse autant pour les hommes que pour les femmes. · La croissance s'accompagne d'investissements plus importants dans les infrastructures comme celles de l'eau potable, des routes, des transports et des combustibles. Ces investissements, ainsi que le développement de nouveaux marchés du travail, peuvent alléger les tâches des femmes et leur fournir plus de possibilités de loisirs et de travail, ce qui contribuera à réduire les divisions rigides du travail fondées sur le genre. La diminu- tion des tâches ménagères représente des bénéfices potentiels pour la santé des femmes, le revenu des familles et la scolarisation des filles. · L'augmentation des revenus familiaux assouplit les restrictions budgé- taires, ce qui favorise les investissements dans le capital humain. Plus les revenus d'un ménage augmentent, plus les inégalités en santé, en ali- mentation et en éducation diminuent. Les ménages qui devaient se ser- rer la ceinture sont alors plus susceptibles d'investir dans ces domaines, ce qui contribue à réduire l'écart entre les sexes. · Lorsque le développement économique permet d'augmenter l'accès aux services publics comme les établissements de santé, les écoles et les routes, et qu'il permet d'en améliorer la qualité, il en coûte moins cher aux ménages d'investir dans le capital humain. Comme les femmes sont plus sensibles à l'élasticité des prix, elles bénéficient davantage des améliorations. Ce chapitre passe en revue des études qui se penchent sur les ménages et les pays, déterminant en quoi le développement économique affecte l'égalité des sexes. Il se penche aussi sur l'expérience de développement de différentes régions du monde, c'est-à-dire qu'il étudie dans quelle mesure les stratégies de développement ont eu des répercussions différentes sur les hommes et les 188 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 189 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? femmes. Une abondante documentation suggère que l'égalité des sexes, qui a été mesurée de différentes manières, s'accroît avec le développement éco- nomique. Cependant, les résultats indiquent que certaines inégalités fondées sur le genre persistent malgré le développement économique. Dans les pays de l'Asie de l'Est qui ont connu une croissance rapide au cours des trois dernières décennies (exception faite de la crise économique de 1990), les inégalités fondées sur le genre, sur les plans de l'éducation et des salaires, diminuent à mesure que les possibilités d'emploi augmentent. Toutefois, les écarts au niveau de la représentation politique demeurent plus importants qu'on pourrait s'y attendre, compte tenu du revenu moyen per capita de la région. En Europe de l'Est et dans l'ancienne Union soviétique, l'effondrement de la productivité qui a suivi la restructuration des secteurs de production et la réduction du secteur public met en évidence les risques pouvant accompagner les réformes économiques importantes et les réper- cussions différentes qu'elles auront sur les femmes et les hommes. Dans ces régions, les inégalités fondées sur le genre refont surface à la suite de la baisse des revenus, des pertes d'emplois et de la diminution du soutien gouverne- mental aux services de santé et de garde d'enfants. Démantèlement de la répartition rigide du travail selon le genre L A TECHNOLOGIE, L'EXISTENCE DES MARCHÉS ET LES NORMES RIGIDES concernant la répartition du travail selon le genre déterminent le type d'occupation et les loisirs dans la société. Ce sont les femmes qui sont responsables des tâches domestiques dans la plupart des sociétés: cuisine, appro- visionnement en eau et en combustible, soin des enfants, des malades et des per- sonnes âgées. Les femmes travaillent, en moyenne, beaucoup plus que les hommes, surtout lorsqu'elles ont un emploi à l'extérieur du foyer. En revanche, on s'attend à ce que l'homme soit le principal pourvoyeur et protecteur de sa famille. D'ailleurs, l'estime de soi et le statut des hommes sont intimement liés à leur capacité de répondre à ces attentes. Plus les rôles qu'une société attribue à chacun des sexes sont normatifs, plus la répartition du travail est rigide. Le développement économique multiplie les opportunités qui incitent à modifier ces rôles bien ancrés en permettant, par exemple, aux femmes de participer à l'économie de marché de façon permanente (pas seulement durant les récessions), et en invitant les hommes à participer aux soins. La croissance économique peut contribuer à réduire le fardeau domestique des femmes et à leur donner plus d'heures de loisir et la possibilité de travailler. Elle peut aussi permettre aux hommes de moins travailler et les inciter à s'in- vestir davantage dans des activités hors marché. 189 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 190 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Travail domestique allégé Comme en témoignent les études, à mesure que les revenus ou les avoirs des ménages augmentent, le nombre d'heures de travail des femmes diminue, en tenant compte d'autres facteurs constants (cette baisse tend à dépasser la diminution correspondant aux heures de travail des hommes). Au Pérou, le total des heures de travail des femmes est le plus élevé dans les 20% des ménages les plus pauvres, alors que le total des heures de travail des hommes demeure stable, peu importent leurs revenus. Donc, les inégalités fondées sur le genre sur les plans du travail et des loisirs sont moins importantes dans les familles dont les revenus sont relativement élevés (Ilahi, 2000). Au Bangladesh et en Inde, une plus grande richesse ­ mesurée en calculant diffé- rentes formes de revenus non salariaux ­ correspond à une diminution des heures de travail et à une augmentation des heures de loisirs pour les femmes (Khandker, 1988; Skoufias, 1993). Cependant, cette tendance n'apparaît pas dans toutes les études. Au Pakistan, un accroissement du revenu non salarial n'a pas eu de répercussions appréciables sur le travail et les loisirs des femmes (Ilahi et Grimard, 2000; Ilahi et Jafarey, 1999). Dans les régions montagneuses du Népal, les hommes et les femmes ayant des revenus élevés consacrent plus d'heures à travailler à la ferme, et le total des heures de travail des hommes augmente plus que celui des femmes (Kumar et Hotchkiss, 1988). Il y a aussi les données de divers pays. Il existe deux mesures de l'égalité concernant l'utilisation du temps (la moyenne du nombre d'heures tra- vaillées dans l'ensemble et la moyenne du nombre d'heures consacrées à des activités hors marché), qui ont un lien positif avec le PIB per capita (tableau 5.1). Un diagramme de dispersion, représentant 23 pays dont les calculs d'heures de travail sont comparables, révèle cette tendance : dans presque tous les pays, les femmes travaillent plus longtemps que les hommes. Cependant, cette inégalité fondée sur le genre est au plus bas dans les pays dont les revenus sont les plus élevés, et où les gens travaillent moins. L'écart entre les hommes et les femmes diffère, en termes de temps de travail, entre les pays où le PIB per capita dépasse 5 000 $ (dollars de 1995, ajustés pour la parité de pouvoir d'achat) et les pays où il est au- dessous de ce chiffre. La différence est d'environ 100 minutes par jour. L'une des causes importantes de l'inégalité des heures de travail est le temps consacré à des activités hors marché. Cette inégalité est moindre dans les pays à revenus élevés. Toutefois, l'effet implicite du développement écono- mique est moins important que celui du total des heures de travail. Cela montre que les divisions traditionnelles du travail persistent même lors- qu'on dispose de plus de possibilités d'emploi et qu'on démontre une plus grande souplesse1. 190 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 191 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Tableau 5.1 Les femmes travaillent davantage, surtout dans des activités hors marché Charge totale de travail 700 600 jour par 500 Minutes 400 300 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 PIB per capita (en logarithmes) Travail hors marché 500 400 jour 300 par 200 Minutes 100 0 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 PIB per capita (en logarithmes) Hommes Femmes Note : Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et le lexique pour les définitions des termes utilisés. Source : PNUD (1995); Banque mondiale (1999d). 191 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 192 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Les femmes peuvent réduire leur travail domestique grâce à l'essor que donne la croissance économique au développement et à l'amélioration des infrastructures. Les améliorations des infrastructures, indispensables à une économie viable, touchent directement l'efficacité de la production domes- tique en réduisant le temps consacré aux tâches domestiques et en libérant du temps pour les autres activités. Il existe d'énormes possibilités d'amélio- rations de ce genre dans les pays les plus pauvres. La capacité des pays à revenus élevés de générer de l'énergie électrique (en kilowatts par million de personnes) est environ cinq fois plus grande que celle des pays à revenus moyens; et celle de ces derniers est environ sept fois plus grande que celle des pays à faibles revenus (Banque mondiale, 1994d). L'accès à l'eau potable est un droit acquis pour presque tout le monde dans les pays à revenus éle- vés, alors qu'environ un cinquième des gens des pays à revenus moyens et un tiers des gens des pays à faibles revenus ne l'ont pas (ONU, 2000). Ces chiffres font entrevoir l'énorme potentiel d'améliorations du développe- ment économique. Lorsqu'elle est disponible, la main-d'oeuvre rémunérée peut se substituer à la main-d'oeuvre familiale sur la ferme ou pour les soins, et ainsi diminuer le fardeau des tâches ménagères. Des établissements de soins à prix modiques (pour les jeunes enfants, les malades et les personnes âgées) peuvent aug- menter les chances des femmes de travailler, ou permettre aux filles de pour- suivre leurs études, comme on l'a vu au chapitre IV. Un marché pour la main-d'oeuvre agricole permet aux ménages de faire face à la saison de travail intense sans retirer de l'école les filles aînées ou imposer un surcroît de tra- vail aux femmes. Par contre, lorsqu'il n'existe pas de marchés du travail ou qu'ils ne fonctionnent pas bien, il n'est pas possible de remplacer les membres de la famille par des salariés. Il en résulte, pour les familles, une exploitation inefficace des ressources. Augmentation des possibilités d'emploi pour les femmes Le développement économique entraîne des changements spectaculaires dans les structures de l'emploi et dans la productivité des travailleurs. Il augmente les possibilités de travail urbain, ce qui amène plus de gens à délaisser l'agriculture et à s'installer en ville. Lorsqu'un changement éco- nomique donne naissance à un nouveau secteur et élimine la prédomi- nance d'un autre, il en résulte des gagnants et des perdants, surtout à court terme, lorsque les nouveaux emplois entrent en compétition avec les anciens et que les travailleurs les mieux outillés se dirigent vers les secteurs en expansion. Dans les secteurs économiques en perte de vitesse, les travailleurs ­ hommes ou femmes ­ sont lésés à un degré plus ou moins grand, dans la 192 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 193 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? mesure où ils peuvent faire face aux mouvements du marché avec rapidité, acquérir de nouvelles compétences et trouver un nouvel emploi. Les change- ments dans le marché du travail affectent les hommes et les femmes de façons différentes, car leurs compétences professionnelles, leur accès à l'in- formation, leur expérience, leurs relations et leurs capitaux sont loin d'être égaux. Ils n'ont pas les mêmes possibilités d'emploi. Souvent, les hommes émigrent pour bénéficier de salaires plus élevés offerts dans un secteur de pointe, et les femmes acceptent les emplois moins bien rémunérés dans les secteurs traditionnels. Des révolutions agricoles de partout au monde ont eu ces impacts sur le marché du travail, et ont entraîné des transformations sociales et économiques profondes (Boserup, 1970). Les hommes migrent vers les villes et abandonnent la gestion des fermes aux femmes. Ou encore, lorsque des cultures agricoles à petite échelle, traditionnellement du domaine des femmes, deviennent prospères, les hommes s'en emparent (Kevane, 2000). Cependant, les femmes peuvent aussi retirer des profits. Voici deux exemples : · Au Bangladesh, avec la montée de l'industrie du vêtement d'exportation et l'accroissement des possibilités d'emplois pour les femmes, les familles ont vaincu le préjugé social lié au travail des femmes à l'extérieur du foyer et leur donnent la permission de travailler aux usines de vêtements. Cette croissance de l'industrie du prêt-à-porter a déjà créé 1,3 million d'emplois dans le secteur structuré, dont environ 90% des emplois sont occupés par des femmes (Bhattacharya et Rahman, 1998). L'augmentation du taux d'emploi chez les femmes a permis de transformer les attentes de la société face à leur participation économique et d'améliorer leur prestige social, leur maîtrise du budget et leur pouvoir décisionnel dans la famille (Kabeer, 2000; Paul-Majumdar et Begum, 2000). · Dans le sud de l'Inde, les femmes acceptent des emplois traditionnel- lement occupés par des hommes dans l'industrie de la taille de pierres précieuses (Kapadia, 1999). Les femmes mariées de la caste de Soliya Vellalar de Tamil Nadu secondaient traditionnellement leurs maris dans les ateliers de taille de pierres précieuses et travaillaient à titre d'apprenties. La baisse du coût d'importation de la machinerie et un affranchissement économique accru ont permis l'expansion rapide de l'industrie des pierres synthétiques, tout comme celle de l'économie dans son ensemble. Entre 1992 et 1997, bien des hommes ont délaissé la taille de pierres précieuses pour un travail mieux rémunéré, occa- sionnel et non agricole à l'extérieur de leur village. Les femmes ne pou- vaient pas profiter autant de ces nouvelles possibilités d'emploi parce que les préjugés sociaux et culturels leur refusaient une telle mobilité. 193 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 194 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE On a plutôt formé les femmes pour qu'elles opèrent les machines semi- automatiques dans l'industrie de la taille de pierres précieuses et, gra- duellement, elles ont remplacé les ouvriers compétents. Les emplois acceptés par les femmes étaient moins bien rémunérés que les nou- veaux emplois occupés par les hommes, mais ils étaient tout de même plus payants que les autres emplois accessibles aux femmes. Aujourd'hui, deux autres tendances importantes du marché du travail affectent le travail des femmes. D'abord, un sous-ensemble du secteur non structuré ­ celui du travail industriel à domicile ­ est en train de trans- former la structure de l'emploi, même dans les pays passablement indus- trialisés, ce qui aura une incidence considérable sur la participation des femmes. Les révolutions industrielles datant de plus d'un siècle ont imposé une organisation du travail axée sur les besoins de l'usine, créant ainsi une séparation entre le lieu de travail des femmes et celui des hommes. Toutefois, un retour vers le travail à domicile s'est effectué parce qu'il constitue une stratégie pour abaisser les coûts, et qu'il est un moyen peu dispendieux et souple pour les entreprises du secteur organisé de faire face à une demande variable (Anderson et Dimon, 1999; Prügl, 1999). Pour les mères de famille, ces emplois peuvent être intéressants puisque l'organisation spatiale est susceptible de leur permettre de combiner un emploi et leurs tâches traditionnelles. Par contre, ce bénéfice pourrait nuire aux salaires (et aux avantages), puisque ces entreprises peuvent opé- rer au noir et, souvent, offrir un salaire inférieur au salaire minimum imposé par la loi. La deuxième tendance est l'accroissement des industries exigeant de grosses qualifications, et en particulier l'usage de plus en plus répandu de l'ordinateur par les travailleurs. Au début des années 1990, aux États-Unis seulement, près de la moitié des travailleurs utilisaient un ordinateur au tra- vail. Maintenant, les femmes sont plus susceptibles que les hommes d'en utiliser un (encadré 5.1; Weinberg, 2000). Dans les pays en voie de déve- loppement, l'usage de l'ordinateur a aussi considérablement augmenté au cours de la dernière décennie. Entre 1988 et 1998, le nombre d'ordinateurs, par 1000 personnes, est passé de moins de deux à environ neuf en Chine, quinze aux Philippines et trente au Brésil. En même temps, le nombre d'or- dinateurs utilisés à l'échelle nationale dans ces pays a augmenté de 22 à 36% par an (Banque mondiale, 1999d). La technologie de pointe crée de nouvelles possibilités pour les économies de tous les pays, mais il y a un danger: les personnes n'ayant pas les moyens ou les compétences pour accé- der à cette technologie peuvent être désavantagées. Les inégalités fondées sur le genre seront aggravées par le fossé entre pauvres et riches, et entre cita- dins et campagnards. 194 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 195 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Encadré 5.1 L'ordinateur et l'emploi chez les femmes d'ordinateurs. Alors qu'aux États-Unis 50 % des utilisa- teurs d'Internet sont des femmes, leur proportion est LES DEUX DERNIÈRES DÉCENNIES ONT CONNU UNE de 35 à 37 % au Brésil et en Chine, et de seulement 6 % augmentation sans précédent de l'utilisation de l'ordi- au Moyen-Orient (Nua Internet Surveys, 2000). Et nateur au travail. Aux États-Unis, la proportion des tra- même si la proportion des utilisateurs féminins des vailleuses utilisant l'ordinateur est passé du quart technologies de l'information augmente, les femmes ne en 1984 à plus du tiers en 1989, puis à la moitié sont pas nécessairement en train d'atteindre l'égalité en 1993 (Weinberg, 2000). En tenant compte de carac- avec les hommes pour leur participation au marché du téristiques individuelles comme l'éducation, l'expé- travail. Au Brésil, beaucoup de femmes reçoivent des rience, la race et le genre, les travailleurs qui utilisent un formations en informatique, mais elles suivent princi- ordinateur gagnent de 10 à 15 % de plus que ceux qui palement des cours de traitement de texte et visent des n'en utilisent pas (Krueger, 1993). En fait, entre 1984 emplois de soutien et de secrétariat, alors qu'elles pour- et 1989, 40 % de l'augmentation du rendement pour raient suivre des cours de programmation, ce qui leur l'éducation a été attribuable à l'ordinateur. permettrait d'obtenir des emplois mieux rémunérés Aux États-Unis, plus de femmes que d'hommes uti- (Taggart et O'Gara, 2000). En Inde et en Malaisie, lisent l'ordinateur au travail. Par exemple, en 1993, les même si les technologies de l'information ont permis femmes étaient 33 % plus susceptibles que les hommes aux femmes de travailler, une grande partie des nou- d'utiliser un ordinateur (Weinberg, 2000). Si l'on exa- velles travailleuses occupent des emplois administratifs mine séparément les sources de croissance d'emploi et peu spécialisés (Meng, 1993). À mesure qu'un plus chez les femmes en utilisant les régressions de l'indus- grand nombre de gens utiliseront les technologies de trie, on peut attribuer à l'utilisation accrue de l'ordina- l'information, les différences dans l'utilisation même de teur plus de 50 % de la croissance dans l'emploi des la technologie, plutôt que celles des taux d'utilisation, femmes entre 1984 et 1993. seront susceptibles de déterminer si ce sont les femmes Dans les pays en voie de développement, les femmes ou les hommes qui bénéficieront de la révolution tech- constituent encore une faible partie des utilisateurs nologique. Baisse de la participation des hommes au marché du travail Au cours des dernières décennies, à mesure que l'intégration des femmes à la population active a augmenté, la participation des hommes vieillissants a diminué. Dans diverses régions du monde, le taux de participation des hommes âgés de 55 à 64 ans et de 65 ans et plus est à la baisse depuis 1960, ce qui rapproche ce taux de celui des femmes (tableau 5.2). Cette baisse a été plus accentuée en Europe et en Amérique du Nord que dans les autres régions du monde pour les hommes âgés de 55 à 64 ans, mais toutes les régions connaissent une baisse pour les hommes de 65 ans et plus. Dans les années 1960, environ un tiers des hommes, dans plusieurs pays d'Europe, travaillaient après l'âge de 65 ans, mais l'âge moyen de leur retraite est main- tenant bien au-dessous de 60 ans. Pour la Belgique, la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne, le taux de participation des hommes âgés de 55 à 64 ans est passé de plus de 60% au début des années 1960 à seulement 15 à 40% dans les années 1990 (Gruber et Wise, 1998). Aux États-Unis, le taux de par- ticipation des hommes de plus de 60 ans diminue continuellement 195 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 196 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 5.2 Les courbes de participation au marché du travail des hommes et femmes plus âgés convergent Taux de participation au marché du travail Taux de participation au marché du travail des hommes de 55-64 ans des femmes de 55-64 ans 100 100 80 80 60 60 Pourcentage 40 Pourcentage 40 20 20 0 0 1960 1970 1980 1990 2000 1960 1970 1980 1990 2000 Taux de participation au marché du travail Taux de participation au marché du travail des hommes de 65 ans et plus des femmes de 65 ans et plus 80 80 60 60 40 40 Pourcentage Pourcentage 20 20 0 0 1960 1970 1980 1990 2000 1960 1970 1980 1990 Afrique Amérique du Nord Asie Europe Amérique latine et les Antilles Note : Les taux de participation expriment le pourcentage d'individus qui sont actifs sur le marché économique par rapport à la population totale d'individus du groupe d'âge et de genre concernés. Les données de 2000 sont basées sur des estimés de l'Organisation internationale du travail. Source : OIT (2000). 196 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 197 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? depuis 1930, accusant une baisse plus importante depuis 1950 (Wise, 1997). La portion de la population active chez les hommes âgés de 55 ans et plus est passée de 61,4% en 1940 à 52,7% en 1970, puis à 39,4% en 1990. En général, le taux de participation active de ces deux groupes d'âges est bien plus élevé en Afrique, en Asie et en Amérique latine qu'en Europe et en Amérique du Nord. C'est le cas même si l'âge légal de la retraite tend à être plus bas dans les pays pauvres ­ 57 ans en Afrique subsaharienne ­ que dans les pays riches ­ 64 ans dans les pays de l'OCDE (Banque mondiale, 1994b). Le taux de participation des hommes de 55 à 64 ans diminue, même dans les régions en développement, et il diminue encore plus rapidement chez les hommes de 65 ans et plus. Par contre, il a augmenté chez les femmes de 55 à 64 ans et est resté stable chez celles qui sont âgées de 65 ans et plus, sauf en Afrique. La situation des hommes les plus âgés peut s'expliquer de plusieurs façons, mais penchons-nous sur celles qui sont en rapport avec le développement économique. Premièrement, la hausse des revenus et la demande plus grande de temps libre ­ la possibilité de jouir des gains accumulés au long de la vie ­ incitent les travailleurs à prendre leur retraite plus tôt. Ce qui est peut-être plus important encore, c'est que certaines incitations financières à une retraite précoce sous la forme de services publics de sécurité sociale ou de régimes de retraite professionnelle sont devenues plus accessibles au cours des dernières décennies (Blöndal et Scarpetta, 1997; Wise, 1997). En fait, les régimes de retraite font que, pour les hommes, il ne vaut pas la peine de tra- vailler au-delà d'un certain âge parce qu'ils doivent continuer de contribuer à leur fonds de retraite même s'ils s'en privent. Une étude portant sur quinze pays de l'OCDE évalue qu'une hausse de 10% de cette pénalité fis- cale sur le travail des personnes de 55 à 64 ans fait baisser le taux de partici- pation des hommes d'environ 2% (Blöndal et Scarpetta, 1997)2. Ce plus grand accès aux programmes de sécurité de la vieillesse (l'un des bienfaits du développement économique) a changé le comportement des hommes âgés face au marché du travail, ce qui peut avoir des conséquences sur leur régime de retraite, leur santé et leur rôle social. Cette tendance sou- lève certaines questions relatives à l'égalité des sexes: puisque les tendances de participation au marché du travail chez les hommes et les femmes convergent, les tendances des activités hors marché convergent-elles aussi pour les hommes et les femmes, de sorte que les responsabilités des soins soient réparties de façon égale? Dans la mesure où la baisse de participation est volontaire et prévisible, est-ce qu'une diminution du travail rémunéré des hommes augmentera leur espérance de vie? Dans quelle mesure les femmes bénéficieront-elles de cette tendance négative de la participation active des hommes? Le fait que les hommes commencent à épargner plus 197 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 198 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE jeunes et qu'ils vivent maintenant plus longtemps a-t-il des retombées sur leurs épouses? Il faut noter que les femmes ne bénéficient pas de pro- grammes de sécurité de vieillesse au même titre que les hommes, car elles accumulent en moyenne moins d'années de travail, et n'ont souvent pas accès à ces programmes. La recherche sur le sujet s'est intensifiée dans les pays industrialisés, où la baisse du taux de participation des hommes âgés est la plus marquée. L'un des points marquants au coeur de la recherche est l'efficacité du modèle des programmes de retraite. Comme on l'a vu au chapitre III, le modèle des pro- grammes de retraite peut avoir des conséquences différentes pour les hommes et pour les femmes. Nous traiterons de cette question plus en pro- fondeur dans le prochain chapitre. Renforcer la volonté d'investir de façon égale dans le capital humain L es décisions familiales concernant le travail, la consommation et les investissements sont prises en partie en fonction des prix et d'autres indicateurs du marché, lesquels déterminent les coûts et bénéfices de ces décisions. Les changements dans ces indicateurs incitent les ménages à établir une nouvelle répartition des ressources entre les activités et entre les personnes. Des données de différents pays indiquent que les investissements féminins s'avèrent plus sensibles aux fluctuations des prix que ceux qui sont faits en faveur des hommes. Par conséquent, des politiques abaissant les prix ou augmentant les rendements de ces investissements sont susceptibles de profiter davantage aux femmes et de mettre fin aux disparités fondées sur le genre sur le plan du capital humain. Faible coût des investissements Au chapitre IV, dans la section sur l'allocation des ressources dans les ménages, on a précisé que les décisions familiales dépendent souvent des changements dans les prix. Ces fluctuations résultent de divers facteurs et, parmi ceux-ci, les forces du marché et les politiques publiques ne sont pas les moindres. Lorsque, grâce à une économie assez vigoureuse, il devient plus abordable pour l'État de fournir des établissements de santé et des écoles (parce que, par exemple, les revenus d'impôt sont plus élevés), les coûts asso- ciés aux soins de santé et à l'enseignement sont susceptibles de diminuer pour les ménages à faibles revenus. Il n'est pas nécessaire que cette expansion des services provienne du secteur public. Une économie vigoureuse favorise l'augmentation de services fournis par le secteur privé, surtout si une 198 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 199 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? demande croissante en capital humain se fait sentir. De plus, une économie vigoureuse permettra à certains ménages pauvres d'avoir accès à ces services même si les prix ne baissent pas, bien qu'une baisse des prix permette à un plus grand nombre de ménages d'y accéder. De quelle façon ce phénomène affecte-t-il l'égalité entre les hommes et les femmes? Même si l'expansion de la distribution des services ne vise pas parti- culièrement les filles et les femmes, ces dernières peuvent en bénéficier plus que les hommes. La baisse du coût réel des investissements peut s'avérer plus importante pour elles que pour les hommes. La construction d'un plus grand nombre d'écoles, dans le dessein de réduire la distance moyenne à parcourir pour s'y rendre, est susceptible d'augmenter l'inscription des garçons et des filles, mais elle peut être particulièrement avantageuse pour les filles qui ne fré- quentaient pas l'école en raison de son éloignement du domicile. La distance à parcourir pour se rendre à l'école, comme on le précise au chapitre IV, repré- sente un obstacle de taille pour les filles ­ surtout dans les milieux où les parents craignent pour leur sécurité et leur réputation. Autre exemple: les mères et les filles aînées sont celles qui prodiguent les soins aux jeunes enfants. L'amélioration de l'accès aux services de santé et aux garderies à prix réduits en milieu rural diminue le temps que consacrent les mères et les filles aux soins, ce qui augmente leur bien-être. Cela permet également aux filles aînées de consacrer plus de temps à leurs études (Lokshin, Glinskaya et Garcia, 2000). Meilleures possibilités de rendement des investissements Les investissements féminins sont influencés par l'idée reçue que ces inves- tissements offrent un moins bon rendement que les investissements mascu- lins. Les facteurs qui permettent d'augmenter le rendement de ces investis- sements et d'améliorer la perception de ces rendements incitent alors les gens à investir de façon égalitaire. Ces fausses perceptions proviennent d'une mauvaise information, phéno- mène extrêmement répandu dans les régions où l'économie est peu déve- loppée. Par exemple, les différences entre les sexes sur le plan des salaires ne reflètent pas de manière précise les différences liées aux effets du niveau d'instruction sur la productivité respective des hommes et des femmes (par- ticulièrement lorsqu'il y a des préjugés sur le marché du travail). Cela ne favorise pas l'optimisation des investissements dans le capital humain. En Indonésie, une étude de Behrman et Deolalikar (1995), portant sur l'inci- dence du niveau d'instruction sur les salaires et prenant en considération les décisions des ménages quant à la scolarisation, arrive à la conclusion que, même lorsque les femmes ont un salaire inférieur, elles reçoivent des aug- mentations salariales supérieures à celles des hommes pour chaque année supplémentaire de scolarité de niveau primaire. Au niveau du secondaire, 199 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 200 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE l'incidence du niveau de scolarité sur les salaires est plus élevée de 50% chez les femmes que chez les hommes. Bien que certaines études ne confirment pas ces faits (par exemple, Kingdon, 1998), un certain nombre d'études portant sur d'autres pays corroborent les résultats des recherches effectuées en Indonésie (Schultz, 1993, 1998). Des lacunes au niveau de l'information ­ tant pour l'information sur le fonctionnement du marché et sur la rémunération offerte pour certaines compétences que pour la productivité des travailleurs et leur participation au marché du travail ­ sont plus susceptibles de se manifester pour les femmes que pour les hommes à cause de différents facteurs. L'un d'eux est que le tra- vail féminin s'effectue principalement à l'extérieur du marché. Bien que les femmes puissent compter sur certains réseaux d'information, d'autres leur sont inaccessibles. Par exemple, le fait que les possibilités d'emplois soient limitées pour les femmes restreint leur capacité d'avoir un certain rende- ment, ce qui a un impact sur la volonté d'investir dans la scolarisation des filles (Alderman et King, 1998). La création de marchés et l'augmentation des possibilités d'emploi pour les femmes améliorent la qualité de l'information concernant le rendement du capital féminin. Quelques études dans les pays industrialisés évaluent les réper- cussions des indications du marché concernant le rendement du capital humain sur les décisions relatives à la scolarisation. Ces études, examinées au chapitre IV, révèlent que ces décisions ne dépendent pas seulement du coût des études, mais aussi des indications du marché concernant le rendement, bien que les études ne spécifient pas si ces indications ont des répercussions différentes sur les hommes et sur les femmes (voir, par exemple, Altonji, 1991). Finalement, les marchés contribuent grandement à la cause de l'égalité des sexes. Une croissance soutenue de la demande en main-d'oeuvre peut amé- liorer l'égalité des sexes sur le plan des investissements dans le capital humain de façon permanente car, en augmentant le rendement du capital féminin, ils peuvent aider à démanteler les divisions rigides du travail. Augmentation des revenus des ménages Le développement économique peut, en augmentant l'accessibilité des services, en haussant les taux prévus de rendement du capital humain et en augmentant les ressources des ménages, améliorer l'égalité des sexes sur le plan des investissements, tant pour l'offre que pour la demande. Rappelons-nous les données du chapitre I révélant que les inégalités fon- dées sur le genre sont plus accentuées dans les ménages pauvres que dans les autres. Les marchés financiers sous-développés font obstacle aux emprunts basés sur les revenus futurs, ce qui limite les opportunités éco- nomiques des plus pauvres. Pour cette raison, l'augmentation des revenus 200 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 201 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? des ménages peut favoriser des investissements plus importants dans le capital humain, particulièrement chez les pauvres. De plus, lorsque les revenus des pauvres augmentent grâce au développement économique, les possibilités de progrès sur le plan de l'égalité hommes-femmes sont consi- dérables. De telles augmentations des revenus auront des répercussions dif- férentes sur les filles et les garçons car, lorsque le budget est serré, les familles ont tendance à investir davantage pour les garçons que pour les filles, et lorsque les revenus augmentent, elles investissent plus pour les filles (Alderman et Gertler, 1997)3. L'ampleur de l'incidence des revenus varie selon les situations, mais elle est souvent importante sur le plan économique (grille 5.1). Dans l'État du Rajasthan, en Inde, une hausse de 1% du revenu des ménages per capita augmente de 1% la probabilité d'inscription des garçons à l'école intermé- diaire, et celle des filles, de 4% (Basu, 1997)4. En Malaisie, une augmenta- tion de 1% dans les revenus des ménages augmente les probabilités de fré- quenter l'école d'environ 18 à 20% pour les filles, et de 5 à 6% pour les garçons (de Tray, 1988). On retrouve les mêmes tendances pour les dépenses des ménages en ali- mentation et en soins de santé. Au Ghana, la discrimination fondée sur le genre entre frères et soeurs sur le plan de l'alimentation est surtout manifeste dans les ménages à faibles revenus (Garg et Morduch, 1996, 1998). Dans ces ménages, une augmentation marginale des dépenses familiales per capita réduit la probabilité de souffrir d'insuffisance de poids de 50% de plus pour les filles que pour les garçons. Au Pakistan, pour un revenu fami- lial moyen, une augmentation de 1% des revenus per capita augmente la demande en soins de santé de 15 à 20% chez les filles, et de 8 à 11% chez les garçons (Alderman et Gertler, 1997). La hausse des revenus des ménages a un effet positif plus prononcé chez les filles que chez les garçons ­ elle améliore donc l'égalité des sexes sur les plans de l'éducation, de la santé et de l'alimentation ­, mais l'envers de la médaille est que les crises économiques sont ainsi susceptibles d'avoir plus d'effets dévastateurs sur les femmes que sur les hommes. La sécheresse au Zimbabwe au milieu des années 1990 a entraîné la réduction de l'indice de masse cor- porelle (une façon de mesurer l'alimentation) des femmes de 3%, mais n'a pas affecté celui des hommes (Hoddinott et Kinsey, 2000). Dans l'Inde rurale, il n'y a pas de différences significatives entre les garçons et les filles quant aux dépenses pour l'alimentation lorsque la nourriture est abondante, mais les garçons sont mieux nourris que les filles durant la saison maigre (Behrman, 1988). Ces résultats indiquent que le soutien de programmes et des filets de sécurité peuvent être décisifs pour les femmes et les filles durant les récessions. 201 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 202 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Grille 5.1 Impact des prix sur l'éducation, la santé et la nutrition, par genre Étude Pays Principaux constats Santé et alimentation Rose (1999) Inde Les pluies torrentielles, qui ont un impact sur le revenu, augmentent davantage les probabilités de survie pour les filles durant les deux pre- mières années de vie que pour les garçons. Hoddinott et Kinsey Zimbabwe L'indice de masse corporelle moyen des femmes a diminué de 3% durant (2000) la sécheresse; celui des hommes n'a pratiquement pas bougé. Alderman et Gertler Pakistan L'élasticité du revenu de la demande en soins de santé est, en valeur abso- (1997) lue, de 36 à 48% plus élevée pour les femmes que pour les hommes. On constate des variations par catégorie de revenu et par type de fournisseur. Garg et Morduch (1996) Ghana L'incidence des dépenses per capita des ménages sur l'insuffisance de poids est 50% plus élevée chez les filles que chez les garçons; leur incidence sur la probabilité de souffrir d'arrêt de croissance ou d'atrophie est semblable. Behrman (1988) Inde Durant la saison maigre, les parents privilégient les dépenses relatives à la santé des garçons (presque 5% de plus) plutôt qu'à celle des filles. Éducation Ilahi (1999a) Pérou Les coefficients (en logarithmes) de richesse per capita pour le niveau de scolarité par groupe d'âge sont de 1,97 pour les filles et de 1,02 pour les garçons. Pour la probabilité de poursuivre des études à plein temps, ils sont respectivement de 1,01 et de ­0,08. Ils sont statistiquement négli- geables pour les garçons. Sipahimalani (1999) Inde Un accroissement de 1% des revenus augmente la possibilité d'inscrip- tion à l'école de 9 à 13% pour les filles, et de 7% pour les garçons. Behrman et Knowles Viêt-Nam L'élasticité du revenu pour les garçons par rapport aux filles est 6% plus (1999) faible concernant les années scolaires achevées avec succès; 22% plus faible pour les notes d'examens et 40% plus forte pour l'âge auquel ils ont commencé l'école. Tansel (1998) Turquie Le coefficient des dépenses par adulte par rapport à la réussite scolaire est plus élevé pour les filles que pour les garçons au primaire (1,10 et 0,36), au secondaire (1,00 et 0,86) et aux études supérieures (1,13 et 0,69). Mason et Khandker Tanzanie Le coefficient des dépenses per capita par rapport à l'inscription des filles (1996) au secondaire est de 10% plus élevé que pour celle des garçons. Basu (1997) Inde Le coefficient (en logarithmes) des revenus des ménages par rapport à l'inscription est de 1,05 plus élevé pour les filles que pour les garçons. L'écart est de 3,92 pour la moitié la plus pauvre des ménages, mais de 0,89 (donc négligeable) pour la moitié la plus riche. de Tray (1998) Malaisie Une augmentation de 1% des revenus augmente la probabilité d'inscrip- tion des garçons de 0,05 à 0,06, et celle des filles, de 0,18 à 0,20. Schultz (1985) Divers pays L'élasticité des revenus par rapport à l'inscription est de 0,43 pour les filles et de 0,24 pour les garçons au primaire, de 0,65 et de 0,30 au secondaire; de 0,50 et de 0,28 pour le total prévisible d'années de scolarité. Note : L'élasticité de la demande par rapport au revenu est dérivée des estimations des fonctions de la demande. Elle correspond au change- ment de pourcentage dans la demande de produits ou de services répondant à un changement de pourcentage dans le calcul du revenu. 202 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 203 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Réduire la discrimination grâce aux marchés concurrentiels L ES MARCHÉS CONCURRENTIELS NE SONT PEUT-ÊTRE PAS LA meilleure façon d'éliminer la discrimination fondée sur le genre. C'est pourquoi les gouvernements doivent jouer un rôle prépon- dérant dans la réglementation des marchés et dans l'apport des infra- structures économiques essentielles. Mais comme les frontières tradition- nelles disparaissent grâce au transport aérien, aux nouvelles technologies de l'information et au commerce régional, le développement durable n'est pas uniquement tributaire des conditions nationales, mais aussi des conditions mondiales. Les forces qui améliorent l'accès aux connaissances élémentaires en science, en médecine et en ingénierie et qui facilitent les échanges culturels amènent avec eux l'expansion ou l'ouverture de mar- chés. Cela augmente la possibilité de gains économiques, mais aussi la possibilité de risques. En quoi la concurrence, intensifiée par des marchés libres et ouverts, affecte-t-elle les inégalités fondées sur le genre? Un certain nombre d'études empiriques se penchent sur la relation entre la concurrence et l'ouverture des marchés avec l'écart salarial entre les hommes et les femmes. Dans l'une de ces études, on analyse l'effet d'une concurrence accrue dans le secteur manu- facturier entre 1960 et 1980 aux États-Unis. On révèle que les améliorations au niveau de l'instruction des femmes et de leur expérience de travail ne peu- vent expliquer la nette diminution de l'écart salarial entre les hommes et les femmes (Black et Brainerd, 1999). Une hausse de 10% dans les activités d'importation d'un secteur entraîne une baisse de 6,6% dans l'écart salarial entre les hommes et les femmes. Dans une autre étude, on conclut que la dérégulation du secteur bancaire aux États-Unis, réforme qui a facilité l'in- tégration d'entreprises dans le secteur industriel, est associée à une augmen- tation significative du salaire relatif des femmes (Black et Strahan, 1999). De plus, la proportion de femmes occupant des postes de direction a augmenté, en moyenne, de 10%. Une troisième étude révèle que les entreprises ayant une position faible sur le marché ont tendance à rémunérer presque égale- ment les femmes et les hommes, alors que les firmes jouissant d'une position avantageuse sur le marché tendent à faire de la discrimination (Hellerstein, Neumark et Troske, 1997). Quelques analyses similaires sur les pays en voie de développement viennent renforcer ce point : · Dans une étude qui porte sur l'expérience vécue par le Mexique au cours de la libéralisation récente du commerce, on arrive à des résultats peu compatibles avec ceux des États-Unis. Entre 1987 et 1993, la portion de changements non attribuables à l'instruction ou à l'expérience des 203 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 204 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE femmes dans l'écart salarial est inférieure dans les industries concurren- tielles et baisse plus rapidement dans les industries les moins concurren- tielles qui ont dû faire face à une plus grande concurrence avec la libé- ralisation (Artecona et Cunningham, 2000b). · Deux études sur la Chine (l'une sur la Chine rurale et l'autre sur la Chine urbaine) concluent que des pratiques d'embauches concurren- tielles réduisent l'ampleur de la discrimination salariale relative au genre (Meng, 1993; Maurer-Fazio et Hughes, 1999). Si l'on compare l'écart salarial entre les sexes chez les employés engagés grâce à des mécanismes administratifs et chez ceux qui ont trouvé leur travail au moyen d'une recherche d'emploi traditionnelle, les études démontrent que la propor- tion de l'écart attribuable à la discrimination est plus élevée chez les tra- vailleurs qui ont obtenu un emploi par les mécanismes administratifs que chez les autres. Les études tiennent compte de l'instruction et de l'expérience6. · Une analyse de données industrielles tirées de seize pays à revenus moyens et élevés confirme les résultats nationaux : les écarts de salaires entre les sexes favorisant les hommes diminuent lorsque les marchés intérieurs sont ouverts à des échanges internationaux plus nombreux et plus libres (Behrman et King, 2000)7. Dans les pays à revenus moyens et élevés, l'ouverture des marchés des produits essentiels réduit l'écart des salaires. Bien que les résultats de ces études soient intéressants, nous sommes encore peu renseignés sur l'amplitude ou sur la portée économique des effets dans les autres pays en voie de développement. Puisque, dans les forums publics, on manifeste de plus en plus d'inquiétude quant aux effets de la mondialisation, il est nécessaire de mener un plus grand nombre d'études afin d'évaluer quantitativement les répercussions des changements sur le plan de la concurrence dans ces autres pays. La croissance économique et l'égalité des sexes L ES DONNÉES MICRO-ÉCONOMIQUES CONCERNANT L'EFFET DU revenu des ménages sur l'investissement en capital humain suggèrent qu'un lien semblable existe entre la croissance économique et l'éga- lité des sexes sur le plan national. Quelques études macro-économiques ont tenté de prouver qu'il y a un lien causal entre la croissance économique et l'égalité hommes-femmes. On examine ici les résultats de ces études, qui ont attiré l'attention des milieux intéressés par la question du développement. Considérons d'abord les tendances transnationales représentées sur des dia- grammes de régressions vectorielles simples. 204 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 205 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Tableau 5.3 L'égalité des sexes est plus grande dans les pays à revenu élevé Inscription au niveau primaire, 1995 Inscription au niveau primaire, 1995 150 1,25 125 1,00 100 femmes-hommes Pourcentage 75 0,75 Rapport 50 25 0,50 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 PIB per capita (en logarithmes) PIB per capita (en logarithmes) Inscription au niveau secondaire, 1995 Inscription au niveau secondaire, 1995 160 1,50 1,25 120 1,00 80 femmes-hommes Pourcentage 0,75 40 Rapport 0,50 0 0,25 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 PIB per capita (en logarithmes) PIB per capita (en logarithmes) Hommes Femmes (suite du tableau en page suivante) 205 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 206 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 5.3 (suite) Espérance de vie, 1997 Espérance de vie, 1997 100 1,20 1,15 75 1,10 Années femmes-hommes 1,05 50 Rapport 1,00 25 0,95 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 PIB per capita (en logarithmes) PIB per capita (en logarithmes) Hommes Femmes Note: Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents. Source : Banque mondiale (1999d). Les diagrammes de dispersion basés sur les données transnationales indiquent que les pays dont le revenu per capita est élevé ont un taux d'inscription scolaire plus élevé et une meilleure espérance de vie, tant chez les hommes que chez les femmes, que les pays dont les revenus per capita sont faibles (tableau 5,3)8. Les diagrammes montrent aussi des courbes de régression ajustées reflétant les liens statistiquement significa- tifs des mesures de l'instruction et de l'espérance de vie avec le PIB per capita (en logarithmes), compte tenu de l'égalité des droits dans chaque pays (voir le chapitre III). Le nivellement de la courbe relative à la scola- rité de niveau primaire est en relation avec les pays à revenus moyens connaissant déjà un taux d'inscription universel. Cette tendance n'est pas encore visible pour le niveau secondaire. Les femmes sont-elles plus avantagées que les hommes dans les pays dont les revenus sont élevés ? Les diagrammes montrant les rapports femmes-hommes pour des pays dont les niveaux de revenus diffèrent nous indiquent que oui. L'égalité des sexes (du moins en ce qui concerne les trois indicateurs présentés) est plus accentuée dans les pays où les revenus sont élevés que dans ceux où ils sont faibles. Le rapport femmes-hommes 206 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 207 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? pour l'instruction est d'environ 1 pour les pays dont le PIB per capita est de 5 000 $ et plus (dollars de 1995, ajustés pour la parité des pouvoirs d'achat). Le rapport d'espérance de vie, qui augmente aussi mais selon une courbe moins accentuée, est plus élevé que 1, pour des raisons expo- sées au chapitre I. L'association positive de l'égalité hommes-femmes et des revenus est mani- feste dans la participation des femmes à la vie politique. La représentation féminine au Parlement, minime dans la plupart des pays, est plus forte dans quelques pays (mais pas tous) dont les revenus sont élevés. Sauf quelques exceptions, le rapport du nombre de femmes au Parlement se situe entre 0 et 0,2, mais dans les pays dont le revenu per capita est de 15 000$ et plus (dollars de 1995, ajustés pour la parité des pouvoirs d'achat), il atteint 0,65. Même dans les pays à revenus élevés, ce rapport baisse à moins de 0,2 dans la plupart des pays (tableau 5.4). Les tableaux 5.3 et 5.4 indiquent une relation positive entre le revenu et l'égalité des sexes sur plusieurs plans, mais les relations ne sont pas néces- sairement causales. Les lignes de régression dans le tableau 5.3 sont calcu- lées à partir de données transnationales pour une durée de 20 à 25 ans, ajus- tées pour une année et un indice d'égalité des sexes sur le plan des droits. Les valeurs des données de l'année la plus récente sont représentées sous Tableau 5.4 Il y a peu de femmes au Parlement, même dans les pays à revenu élevé 0,8 0,6 0,4 femmes-hommes Rapport 0,2 0,0 5,5 6,5 7,5 8,5 9,5 10,5 PIB per capita (en logarithmes) Note: Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents. Source : WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d). 207 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 208 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE forme de points. Puisque les coefficients de régression se basent sur des don- nées recueillies sur plusieurs années, la courbe de régression représente la moyenne de progression pour un pays à mesure que les revenus augmen- tent, et l'intersection de la ligne indique les effets par année. Cependant, l'une des caractéristiques principales du modèle est que la causalité ne peut être déterminée sans une série de données sur l'égalité des sexes en termes de droits échelonnée sur une plus longue période. Ces résultats servent sim- plement de base de comparaison avec des résultats d'études similaires éta- blissant la causalité. À moins que le rapport causal entre la croissance économique et l'égalité hommes-femmes ne soit prouvé, nous ne pouvons pas conclure que les pays à faibles revenus atteindront le même niveau d'égalité que celui des pays à revenus élevés. Les pays à faibles revenus diffèrent des pays à revenus élevés sous bien des aspects importants, qui s'ajoutent à celui du revenu moyen. Quelques-uns des pays à revenus élevés peuvent avoir connu une égalité des sexes plus marquée que celle des pays à faibles revenus parce que leurs tradi- tions étaient au départ plus égalitaires. Inversement, quelques-uns des pays à faibles revenus peuvent ne pas développer une tradition égalitaire comme les pays à revenus élevés. Un moyen d'établir la causalité est de séparer l'effet de la croissance économique (mesurée par l'augmentation des revenus) sur l'égalité hommes-femmes des effets de toutes les autres variables, mesurées ou non. L'encadré 2.1 expose les questions méthodologiques associées à l'éta- blissement de la causalité. Des analyses récentes de divers pays ont examiné l'effet du revenu sur plu- sieurs indicateurs en utilisant un ensemble différent et plus riche de variables, et ont obtenu des conclusions différentes9. Toutefois, la plupart de ces études ne traitent pas à fond des statistiques relatives à l'établissement d'un lien cau- sal, en particulier sur des variables non observées ou non mesurées qui peu- vent établir un lien entre le revenu et l'égalité hommes-femmes. Dollar et Gatti (1999) utilisent deux variables ­ le marché noir et l'indice des droits ­ qui sont susceptibles, comme variables instrumentales, d'affecter la crois- sance, mais pas directement l'égalité des sexes. En analysant les données de 127 pays sur quatre périodes, ils vérifient si la croissance du revenu entraîne une égalité plus marquée entre les hommes et les femmes sur les plans de l'ins- cription au niveau secondaire, de l'espérance de vie et de la représentation politique féminine10. Ils obtiennent des preuves assez solides pour conclure que l'augmentation des revenus entraîne une plus grande égalité. De plus, ils concluent que la relation est non linéaire. Par exemple, la pro- portion de femmes au Parlement affiche une légère augmentation dans les pays à faible revenu per capita, mais augmente rapidement une fois que les pays atteignent des revenus moyens et élevés. Ils concluent aussi à une relation 208 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 209 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? convexe entre le revenu et l'égalité des sexes sur le plan des études au niveau secondaire11. Cela indique que pour bien des pays à faibles revenus, les effets bénéfiques de la croissance économique peuvent mettre beaucoup de temps à se manifester, du moins sur certains aspects des inégalités fondées sur le genre. Boserup (1970) avait déjà indiqué, il y a trois décennies, que la relation pouvait être non linéaire. Il soutenait que le développement devait atteindre un certain seuil avant que l'écart entre les hommes et les femmes ne soit comblé grâce à une croissance économique accrue. Dans son livre Woman's Role in Economic Development, Boserup souligne qu'au stade initial du déve- loppement, l'intensification de l'urbanisation et de l'industrialisation ren- force les disparités fondées sur le genre à la maison et en milieu de travail. Les structures sexistes traditionnelles commencent à se démanteler lorsque l'expansion des marchés s'intensifie. Un marché du travail compétitif exerce une pression sur les employeurs, ce qui favorise l'intégration des femmes. Finalement, les ménages profitent de plus grandes possibilités d'emploi et de consommation en encourageant les femmes à travailler. Des preuves tirées de différents types de données et d'analyses empiriques appuient la conclusion que le développement économique fournit un envi- ronnement favorisant l'égalité, bien que ses effets ne soient pas immédiats ni gratuits, du moins à court terme. Les données tiennent compte des effets moyens (même si elles tiennent compte d'autres facteurs qui peuvent aussi avoir un effet sur l'égalité des sexes), c'est-à-dire que le développement éco- nomique peut ne pas profiter à toutes les femmes et à tous les hommes. Pour venir en aide aux personnes qui ne tirent pas de bénéfices du développement économique ou qui en sont lésés, il faut d'abord déterminer qui est suscep- tible de se trouver dans ce groupe. Les sections suivantes présentent une autre série de données sur les liens entre le développement économique et l'égalité hommes-femmes, passant en revue les stratégies économiques que les régions en voie de développement ont adoptées au cours des dernières décennies. Le développement engendre-t-il l'égalité des sexes ? Points de vue régionaux I L N'Y A PAS UNE SEULE VOIE VERS LE DÉVELOPPEMENT, MAIS LA stratégie de développement utilisée par un pays affectera les inégalités fondées sur le genre, même si elle ne poursuit pas explicitement ce but. Même de petits changements peuvent faire la différence par leur incidence sur le lieu de travail, le genre d'outils et de machinerie utilisés, la valeur accordée à l'expérience et à la scolarité et le rendement masculin et féminin. Ils affectent aussi le temps consacré à une tâche, leur façon de travailler en 209 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 210 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE équipe ainsi que leurs rapports à la maison et au travail. En Asie du Sud-Est, l'introduction de variétés de riz à rendement élevé a apporté des modifica- tions aux outils de travail (en Indonésie, on est passé du petit couteau à main à la faucille) et à différentes ententes de travail, avec les changements qui en découlent dans les tâches des équipes d'hommes et de femmes affectées à la récolte (Collier et al., 1974; Kikuchi et Hayami, 1983). Les révolutions industrielles en Europe et en Amérique du Nord montrent aussi en quoi de nouveaux modes de production transforment les relations entre les sexes (Boserup, 1970; Landes, 1980; Goldin, 1990). L'industrialisation en Europe et aux États-Unis a créé, pour un grand nombre de femmes (d'enfants) et d'hommes délaissant l'agriculture, de nou- veaux emplois dans les usines. Même si les conditions de travail étaient sou- vent oppressives, l'expansion du marché du travail industriel a entraîné l'ur- banisation, l'accès à de nouveaux produits et services et, plus tard, à des niveaux de scolarité plus élevés. L'expansion subséquente du secteur des ser- vices, dans lequel l'instruction pouvait désormais remplacer l'expérience de travail, a augmenté les possibilités des femmes sur le plan économique. L'amélioration de l'accès à l'instruction a eu pour effet de permettre aux enfants de fréquenter l'école durant le jour, ce qui a permis à un plus grand nombre de mères de travailler. Aujourd'hui, non seulement plus de femmes mariées investissent le marché du travail, mais elles travaillent plus de semaines par année, plus d'heures par semaine, et demeurent actives plus longtemps, que la famille ait ou non de jeunes enfants (Lombard, 1999). Les pays nordiques ont combiné avec succès l'entreprise privée et le marché concurrentiel en établissant des politiques visant une distribution égalitaire des revenus ainsi qu'un consensus à propos de la vie politique et économique. Une caractéristique de cette stratégie de développement qui favorise l'égalité des sexes est le soutien important accordé aux familles, qui réduit les coûts associés aux soins et aux activités hors marché non rémunérées des femmes (enca- dré 5.2). Aujourd'hui, dans bon nombre de pays en voie de développement, la croissance des secteurs manufacturiers et des services augmente la demande en travail féminin et, lentement mais sûrement, modifie du même coup les rôles des sexes et leurs relations. Cependant, les change- ments économiques comportent des risques. Certains pensent que la période d'ajustement structurel, particulièrement dans les pays d'Afrique subsaharienne, a été trop dure puisque les programmes sociaux se sont quasi écroulés et ont de la difficulté à s'en remettre. La transition en Europe de l'Est s'est effectuée trop rapidement, laissant peu de temps aux entreprises et aux ménages de s'adapter et composer avec les changements draconiens dans le fonctionnement de l'État et de l'économie. Ces mêmes 210 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 211 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Encadré 5.2 Un modèle nordique de discrimination sous le système de taxation conjointe. LES PAYS NORDIQUES SONT SOUVENT CONSIDÉRÉS COMME · La Loi sur l'Égalité des chances (1992) a renforcé des pionniers en matière d'égalité des sexes. Le l'égalité des droits au travail. Cette loi condamne Danemark, la Finlande, l'Islande, la Norvège et la la discrimination salariale directe ou indirecte et Suède accordaient, entre 1850 et 1880, des droits d'héri- oblige les employeurs à s'attaquer au harcèlement tage égaux, et donnaient aux femmes, entre 1905 et 1920, sexuel, à mener une étude sur les écarts de salaires le droit de voter et d'être élues (Osterberg et Hedman, selon le genre et à faciliter la conciliation du travail 1997). Les pays nordiques reconnaissent tous l'égalité en et de la famille. ce qui concerne les droits et les devoirs ainsi que les pos- · L'expansion des services de garde publics a réduit, sibilités d'obtenir un emploi bien rémunéré, d'entretenir pour les Suédoises, les coûts personnels de participa- la maison et de participer aux activités politiques et tion à la vie active (Gustafsson et Stafford, 1992). sociales. Ces engagements agissent sur des indicateurs Depuis 1948, le gouvernement donne des alloca- quantitatifs de l'égalité des sexes, notamment sur tions mensuelles non imposables aux familles qui l'Indicateur sexospécifique du développement humain des ont des enfants de moins de seize ans. Dès le milieu Nations Unies et l'Indicateur de la participation des des années 1990, 57% des enfants d'âge préscolaire femmes, plaçant ces cinq pays parmi les quinze premiers bénéficiaient de services de garde publics, de mater- sur 174 (PNUD, 2000). nelles ou de gardiennes employées par l'administra- Malgré des différences nationales, les tendances en éga- tion locale. Les garderies publiques répondent aux lité hommes-femmes sont semblables pour ces pays, mais besoins des parents au travail, même ceux qui tra- elles diffèrent des autres pays industrialisés car ces pays vaillent le soir. Depuis 1975, les familles ne paient en nordiques accordent au gouvernement un rôle plus moyenne que 10% du coût des services de garde, et important concernant les familles. Bien que l'État inter- le secteur public paie le reste du montant (Rosen, vienne peu ou pas dans la production de biens matériels 1995). et qu'il encourage la libéralisation des marchés de biens de · L'État encourage les hommes à assumer une part des consommation et de production, l'institution des familles responsabilités de la famille et des enfants. est «régie» grâce à la substitution à grande échelle des ser- Entre 1994 et 1996, les organismes gouvernemen- vices publics par des services privés, ce qui a aidé à inté- taux offraient une formation aux nouveaux (et grer les femmes à la population active. futurs) pères afin d'accroître leur compréhension du Par exemple, la croissance de l'emploi en Suède depuis rôle de père, de les aider à concilier leur vie profes- les années 1960 peut être attribuée à une augmentation sionnelle et familiale et de les encourager à prendre du nombre de femmes dans la population active (Rosen, plus de congés parentaux pour s'occuper de leurs 1995). La proportion de femmes au sein de la population enfants malades. active est passée de 29% en 1960 à 48% en 1998 · Approximativement une personne sur cinq est âgée (Banque mondiale, 1999d). Comment est-ce arrivé? et reçoit une pension (Institut Suédois, 1999). Les · Les garçons et les filles jouissent des mêmes possi- soins aux personnes âgées relèvent du secteur public bilités de formation scolaire avec une scolarité pri- depuis longtemps ­ la loi sur l'assistance sociale maire obligatoire de neuf ans les préparant à un de 1956 a réglementé ces soins en libérant les enfants enseignement supérieur. Résultat : alphabétisation de l'obligation de s'occuper de leurs parents, ce qui a de tous les adultes. déchargé les femmes de cette responsabilité. Depuis · La Suède a déplacé, au milieu des années 1960, son les années 1970, l'aide aux soins donnés à la maison système d'imposition des familles vers les individus, et en établissement s'est développée rapidement, sans déductions pour les dépendants. Cela a encou- avec des subventions spéciales du gouvernement ragé l'augmentation des petits salariés ­ habituelle- central visant à faciliter l'accès aux services d'aide à ment des femmes ­ qui avaient souvent été victimes domicile. 211 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 212 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE changements, ainsi que d'importants changements semblables dans d'autres régions, ont fait naître un ensemble de préoccupations nouvelles à propos des femmes, des hommes et des familles. Par exemple, un plus grand nombre de familles dont les deux parents travaillent doivent concilier les exigences de l'éducation des enfants avec celles du travail. Les femmes qui travaillent font face à des risques accrus de violence, de harcèlement sexuel, de stress et de problèmes de santé liés à l'emploi. Évidemment, les relations traditionnelles entre les sexes à la maison et en société sont mises à l'épreuve par les transformations sociales d'envergure accompagnant le développement économique. Cette section passe en revue les données de trois systèmes économiques importants : la croissance rapide en Asie de l'Est dans les années 1970 et 1980, les ajustements structurels en Afrique et en Amérique latine dans les années 1980, et la transition économique en Europe de l'Est et en Asie de l'Est depuis les années 1980. Ces systèmes sont associés à des approches visant à restructurer et à stimuler l'économie par des poli- tiques spécifiques. Les cas illustrent à quel point les changements écono- miques peuvent affecter l'égalité des sexes de façons différentes. Il est dif- ficile d'évaluer le succès d'un système par rapport à un autre quant aux progrès réalisés sur le plan de l'égalité, mais certaines données de divers pays et des résultats concrets fournissent des enseignements essentiels (encadré 5.3). Croissance et crise en Asie de l'Est Il y a presque une décennie, les pays en voie de développement cher- chaient à imiter la spectaculaire trajectoire économique de l'Asie de l'Est. De 1965 à 1990, les 23 pays de l'Asie de l'Est ont connu une croissance plus rapide que tous les autres. La majeure partie de cette croissance est attribuable au Japon, aux quatre « dragons » ­ Hong Kong, la Corée, Singapour et Taiwan (Chine) ­ ainsi qu'aux économies nouvellement industrialisantes de l'Indonésie, de la Malaisie et de la Thaïlande (Banque mondiale, 1993). Entre 1960 et la période de crise embryon- naire de la fin des années 1990, ces économies ont connu une expansion plus de deux fois plus rapide que celles des autres régions de l'Asie de l'Est, presque trois fois plus rapide que celles de l'Amérique latine et de l'Asie du Sud, et cinq fois plus rapide que celles de l'Afrique subsaha- rienne. De plus, d'autres facteurs liés au développement (pas seulement l'augmentation des revenus) ont connu des améliorations considérables. L'espérance de vie et la scolarisation ont augmenté plus rapidement que dans toute autre région, comme on le montre au chapitre I12. 212 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 213 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Encadré 5.3 Évaluation de l'incidence des politiques affecté différemment les femmes et les hommes ­ pour le meilleur ou pour le pire ­ sont limitées. DÉTERMINER À QUEL POINT LES POLITIQUES DE Les répercussions d'une politique de développement développement affectent les femmes et les hommes, sur le bien-être sont susceptibles d'être multidimen- particulièrement en ce qui concerne l'égalité des sexes, sionnelles. Les évaluations qui ne se rapportent qu'à n'est pas une tâche facile. Il est important de prendre connaissance de la situation de départ et de la distin- certains aspects précis de ces répercussions ne nous guer de celle qui découle de l'instauration de politiques donnent qu'une image partielle; il est facile de tirer des particulières. Par exemple, les effets indésirables d'une conclusions trompeuses. Examinons deux études sur la crise économique entraînant des réformes ne doivent république de l'Équateur qui tirent des conclusions pas être pris pour les répercussions de cette réforme. opposées sur les répercussions globales d'ajustements Pour évaluer l'efficacité de la stratégie de développe- structurels. L'une de ces études, portant sur un quartier ment, on doit déterminer comment l'État aurait évolué à faible revenu de la ville de Guayaquil, en Équateur, sans l'instauration de ces politiques, puis comparer arrive à la conclusion que la réduction des dépenses du cette situation hypothétique avec la nouvelle situation gouvernement pour les services publics a obligé les depuis l'instauration de la politique. Or, cette situation mères à augmenter le temps consacré aux travaux hypothétique est extrêmement difficile à déterminer de domestiques et aux soins, aux dépens de leurs loisirs façon empirique, et la plupart des évaluations ne sont, (Moser, 1989). Les filles ont aussi été contraintes de au mieux, que de grossières suppositions sur le fait réorganiser leur horaire, diminuant ainsi le temps qu'une politique précise a favorisé une meilleure situa- consacré à leurs études. L'ajustement a donc nui aux tion que celle qui se serait présentée autrement. De femmes et aux filles. L'autre étude, portant sur l'indus- plus, lorsqu'une réforme politique est assez récente, il se trie des fleurs coupées de l'Équateur rural, attribue peut qu'on ne puisse observer ses répercussions, surtout l'augmentation de la demande de travail féminin à une si tous les éléments de cette politique n'ont pas encore expansion provoquée par un ajustement, ce qui a occa- été mis en oeuvre. sionné une hausse des revenus des femmes par rapport Il est important de mettre l'accent sur les impacts qu'a à ceux des hommes et augmenté les temps libres des la stratégie de développement sur les hommes et les femmes (Newman, 2000). Les hommes travaillant dans femmes. Se concentrer sur la façon dont certaines stra- le domaine des fleurs coupées ont augmenté le temps tégies de développement particulières affectent le niveau consacré à l'entretien de la maison et aux soins compa- de bien-être des hommes ou des femmes ne révèle en rativement aux hommes travaillant dans d'autres rien leurs effets sur l'égalité des sexes. Les données sur la domaines. L'étude arrive à la conclusion que les femmes façon dont un ensemble de politiques particulières ont ont bénéficié de l'ajustement. Comment les pays de l'Asie de l'Est sont-ils arrivés à de tels résultats ? Ils ont laissé leurs marchés se développer librement au sein d'un environ- nement de politiques macro-économiques adéquates. Les gouvernements sont intervenus, mais avec prudence, pragmatisme et souplesse. L'une des caractéristiques marquantes de ces économies était leur performance extraordinaire au niveau des exportations. En tant que groupe, ils ont aug- menté leur part du marché d'exportation mondiale de 8 % en 1965 à 13 % en 1980 et jusqu'à 18 % en 1990, les produits manufacturés repré- sentant la plus grande part de cette croissance. La croissance économique rapide de cette région a été accompagnée d'une baisse des écarts de reve- 213 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 214 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE nus et d'un taux de pauvreté plus bas que ceux des autres pays en voie de développement (Banque mondiale, 1993; Deininger et Squire, 1996). Alors que six personnes sur dix vivaient dans une pauvreté absolue en 1975 (sur la base d'un seuil de pauvreté de 1 $ par jour en 1975), seu- lement deux personnes sur dix étaient aussi pauvres en 1995. De plus, le rythme de réduction de la pauvreté s'est accéléré dans les années 1980 et 1990, soit un rythme plus rapide que dans toute autre région en voie de développement (Ahuja et al., 1997). Rétrécissement des écarts entre les hommes et les femmes sur les plans de la scolarisation et de l'emploi. Il reste à savoir si les inégalités fondées sur le genre ont diminué pendant que la croissance économique s'accélérait. Est-ce que de saines politiques macro-économiques et l'ajustement des prix ont aidé à réaliser l'égalité? Certaines caractéristiques de l'expérience asiatique ont sans aucun doute eu d'importantes répercussions sur les inégalités liées au genre. D'abord, les inégalités sur le plan de la scolarisation ont été éliminées dans cette région, même si ce succès est surtout venu d'une poussée générale en faveur de l'éducation universelle plutôt que de politiques visant spécifiquement les filles. L'éducation élémentaire obligatoire ­ une politique s'étendant sur plusieurs décennies et une politique des dépenses publiques visant à allouer environ la moitié des dépenses en éducation au primaire ­ n'a pas été profitable seulement en ce qui a trait à l'éducation primaire; elle a aussi permis des gains considérables en termes de niveaux d'éducation supérieurs. La volonté des familles de compléter les ressources publiques pour permettre aux enfants de poursuivre leurs études était, elle aussi, remarquable. Grille 5.2 Proportion des femmes sur le marché du travail en Asie de l'Est (Pourcentage du total) Pays 1970 1980 1995 Hong Kong, Chine 35 34 37 Indonésie 30 35 40 Japon 39 38 41 Corée 32 39 40 Malaisie 31 34 37 Philippines 33 35 37 Singapour 26 35 39 Thaïlande 48 47 46 Source : Banque mondiale (1999d). 214 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 215 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Ensuite, une augmentation soutenue de la demande en main-d'oeuvre durant la période de croissance rapide a amené un grand nombre de femmes à se joindre à la population active. Des industries d'exportation clés comme celles du textile et de l'électronique reposaient sur le travail des femmes non qualifiées mais sensiblement instruites. En 1970, les femmes constituaient 39% de la population active au Japon et de 26 à 31% de celle de Singapour, de l'Indonésie et de la Malaisie (grille 5.2). Dès 1995, la pro- portion de femmes sur le marché du travail a augmenté dans ces pays. Elle est passée à 41% au Japon et de 37 à 40% dans les trois autres pays. En Corée, la proportion de femmes recevant un salaire régulier est passée de 65% en 1965 à 81% en 1992, et dans les exploitations minières et manufacturières, le rap- port femmes-hommes est passé de 0,37 à 0,68 (Fuess et Lee, 1994). L'augmentation de la participation des femmes à la vie active est partiel- lement liée à la restructuration de la production et de l'emploi dans des domaines très différents des secteurs traditionnels. En Indonésie, en Corée, en Malaisie et en Thaïlande, la proportion de femmes travaillant dans le secteur de l'agriculture a diminué, mais elle a augmenté dans les secteurs de l'industrie et des services (grille 5.3). À Hong Kong, où l'agriculture était moins importante, la présence des femmes dans le secteur industriel est passée à celui des services. À Taiwan, en Chine, les entreprises reposant sur des employés peu qualifiés sont relocalisées, principalement en Chine continentale et en Asie du Sud-Est; ainsi, l'industrie nationale a davantage mis l'accent sur la qualification (Ranis, 1993). La demande en main-d'oeuvre féminine, qui connaissait alors une crois- sance rapide, a permis une augmentation des revenus des femmes, mais à un rythme plus lent que prévu à cause de leur niveau de scolarisation et d'expé- rience. Au Japon, les revenus moyens des femmes comparés à ceux des hommes sont passés de 48% en 1968 à 59% en 1988 (Horton, 1996). En Corée, entre 1984 et 1988, le rapport femmes-hommes pour les revenus est passé de 42% à 51%13. En fait, la proportion de l'écart attribuable à la scola- risation et à l'expérience a diminué au cours de la période, ce qui suggère que d'autres facteurs, dont la discrimination envers les femmes au point de vue salarial, contribuaient davantage aux différences de revenus selon le genre14. Les inégalités fondées sur le genre sont visibles non seulement dans les revenus mais aussi dans les conditions de travail du secteur manufacturier. Nouvellement arrivées sur le marché du travail, les femmes ont peu d'expé- rience dans le secteur structuré et connaissent mal leurs droits, de sorte qu'elles sont moins nombreuses à exiger un traitement équitable. Un chan- gement important en Asie de l'Est, bien que son exécution ait posé des pro- blèmes, a été l'adoption d'une réglementation protégeant les travailleuses d'après les critères internationaux. Par exemple, une enquête auprès des 215 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 216 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Grille 5.3 Répartition de la population active féminine par secteur en Asie de l'Est (pourcentage de femmes économiquement actives) Économie Année Agriculture Industrie Services Hong Kong, Chine 1970 4,7 61,2 34,2 1980 1,2 56,1 42,8 1990 0,7 33,0 66,3 1997 0,2 16,4 83,4 Indonésie 1970 65,3 10,0 24,8 1980 55,8 12,4 31,8 1990 56,4 12,5 31,1 1997 39,6 15,4 39,4 Japon 1980 13,0 27,9 57,0 1990 8,3 26,8 62,2 1997 5,8 23,3 67,0 Corée 1980 37,5 23,1 35,9 1990 20,0 29,5 48,7 Malaisie 1970 66,4 9,9 23,7 1980 49,3 17,7 33,0 1990 25,6 22,7 51,8 1997 14,2 29,8 56,0 Thaïlande 1990 62,8 11,9 22,0 1997 50,8 16,6 31,2 Note : Les rangées ne totalisent peut-être pas 100 % en raison de l'omission du secteur minier. Source : Banque mondiale (1999d) femmes travaillant dans des usines indonésiennes non syndiquées a révélé un grand nombre de cas de femmes licenciées en raison d'un mariage, d'une grossesse ou d'un accouchement (Agrawal, 1996). Seulement 47% des femmes qui ont demandé un congé de maternité l'ont obtenu, et seule- ment 12% de celles qui l'ont obtenu ont reçu une rémunération. Les tra- vailleuses sont souvent mal informées ou mal préparées pour revendiquer leurs droits ­ rémunération équitable des heures supplémentaires, congés payés, compensations ­ auprès de leurs employeurs (Banque mondiale, 1995; Pangestu et Hendytio, 1997). Changements dans le bien-être. En Asie de l'Est, les deux décennies de croissance rapide, de restructuration, d'urbanisation accrue et de taux de par- ticipation à la vie active plus élevé ont transformé la vie des hommes et des femmes au-delà du monde du travail. L'espérance de vie a augmenté dans la région: entre 1970 et 1997, les femmes ont gagné dix ans, et les hommes, neuf. Grâce à une scolarisation plus poussée (donc des mariages plus tardifs) et d'une accessibilité et d'une utilisation répandue des moyens contraceptifs, 216 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 217 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? les taux de fécondité ont baissé. Au Japon, le taux de fécondité, qui était déjà de 2,1 en 1970, n'a pas affiché une baisse très importante. Mais, durant cette période, il est passé de 4,3 à 1,7 en Corée; de 5,4 à 2,8 en Indonésie; et de 5,4 à 1,7 en Thaïlande. Grâce à une scolarité plus élevée et à une plus grande participation à la vie active, la période de transition entre l'école et la vie parentale s'est allongée, permettant à un plus grand nombre de jeunes femmes de gagner de l'argent et de jouir d'une certaine autonomie. À Hong Kong, les emplois avant le mariage sont considérés par les jeunes femmes comme un répit par rapport à leurs tâches ménagères et à leurs futures responsabilités familiales (Salaff, 1981). Une étude sur les travailleuses du secteur de l'exportation des usines de textile, de vêtements et de chaussures de l'Indonésie a révélé qu'elles ont gagné une plus grande indépendance associée à une augmentation de reve- nus, et qu'elles ont pris conscience des possibilités de contester les normes et les injustices fondées sur le genre (Agarwal, 1997). Mais ce n'est pas le cas partout. Selon les contrats traditionnels et intergé- nérationnels de Taiwan, en Chine, les nouvelles possibilités d'emploi n'ont pas nécessairement donné aux jeunes femmes une plus grande autonomie. Bien des parents resserraient leur emprise sur leurs filles et attendaient un retour sur investissement sous forme de rente (Greenhalgh, 1985). Au foyer, la division traditionnelle des tâches demeure très prononcée. Selon une étude de 1990 portant sur la Corée, les femmes mariées dédiaient plus de cinq heures par jour aux tâches ménagères et aux soins des enfants, alors que les hommes y consacraient en moyenne 37 minutes. Une étude de 1986 au Japon a révélé que les travailleuses mariées consacraient en moyenne deux heures et 26 minutes par jour aux tâches ménagères, comparativement à sept minutes pour les hommes (Westley et Mason, 1998). Les effets de la crise économique de 1990. La croissance impressionnante de la région a été interrompue vers la fin des années 1990. La crise moné- taire et financière qui s'est d'abord manifestée en Thaïlande en 1997 s'est répandue rapidement dans toute la région, entraînant des banqueroutes, des dévaluations, des ajustements douloureux dans le marché du travail et les ménages. Là où l'on avait connu l'abondance s'installaient une pauvreté accrue et une méfiance à l'égard de ce qu'il est convenu d'appeler le miracle économique de la région (Banque mondiale, 1998b). La crise a annulé quelques gains réalisés durant la période de croissance soutenue. Bien qu'il soit trop tôt pour prédire les répercussions de la crise à long terme, il est clair qu'elles diffèrent selon le genre, mais pas toujours au désavantage de l'un ou de l'autre. Les premières répercussions se sont fait sentir dans l'emploi. Par exemple: 217 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 218 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE · En Thaïlande, l'emploi masculin a été frappé plus durement que l'em- ploi féminin parce que c'est le secteur de la construction, dominé par les hommes, qui a connu le plus de coupures au niveau de la main-d'oeuvre. Pour les salaires, les effets ont été les mêmes pour les deux sexes, quoique la situation ait été un peu plus difficile pour les hommes; de 1995 à 1998, les augmentations ont été les mêmes pour les hommes et pour les femmes (de 18% et de 18,2%), tout comme les baisses en 1998 et en 1999: 8,9% et 7,9%. Les divisions du travail selon le genre, qui avaient nui aux femmes durant le boom de la construction précédant la crise, les ont protégées durant le repli du même secteur (Behrman et Tinakorn, 1999). Cependant, le taux de chômage global était plus élevé pour les femmes que pour les hommes, autant avant qu'après la crise, malgré la hausse du chômage chez les hommes. · En Indonésie, la baisse des salaires réels semble avoir contraint les jeunes hommes et les jeunes femmes appartenant à la main-d'oeuvre hors mar- ché à entrer dans la catégorie des travailleurs rémunérés en même temps que les hommes plus âgés en sortaient. Une fraction légèrement plus importante d'hommes et considérablement plus importante de femmes travaillaient en 1998, par rapport à 1997 (Frankenberg, Thomas et Beegle, 1999). Selon une autre étude, la proportion de femmes tra- vaillant plus de 45 heures par semaine est passée de 20% en 1994 à 24,9% en 1998, alors qu'elle a baissé pour les hommes (Horton et Mazumdar, 1999). À la même époque, la diminution de la moyenne d'heures de travail par semaine était supérieure chez les femmes, parti- culièrement dans le secteur structuré (Beegle et al., 1999). La perte de salaires réels a été plus importante dans les régions urbaines que dans les régions rurales, et a davantage touché les femmes. · En Corée, la crise a diminué les possibilités d'emploi pour les hommes et pour les femmes dans les emplois réguliers, mais elle a majoré de 16% les possibilités d'emploi pour les femmes dans les occupations journa- lières à la fin de 1998 (Moon, Lee et Yoo, 1999). Bien que l'important ne soit pas de savoir si ce sont les hommes ou les femmes qui ont le plus souffert du chômage, l'information officielle indique que le taux de chômage des femmes a diminué en 1997 et en 1998, principalement parce que le taux de chômage des hommes a monté en flèche. Quant aux dépenses et au bien-être des ménages, les répercussions de la crise semblent être distinctes chez les femmes et chez les hommes, et ne vont pas toujours dans le même sens. En Indonésie, le pourcentage de jeunes ins- crits à l'école a baissé davantage chez les filles que chez les garçons âgés de 7 à 12 ans, et davantage chez les garçons que chez les filles de 13 à 19 ans (Frankenberg, Thomas et Beegle, 1999). En Thaïlande, l'ensemble des taux 218 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 219 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? d'inscription et de décrochage n'a pas été aussi sévèrement affecté par la crise, mais on notait une différence entre les garçons et les filles par rapport au niveau de scolarisation. L'inscription chez les filles a baissé au préscolaire mais a sensiblement augmenté pour les degrés avancés du secondaire, alors que chez les garçons, l'inscription aux degrés avancés du secondaire a diminué (Pyne, 1999). D'autre part, les études concernant les répercussions de la crise sur la santé et l'alimentation révèlent des disparités fondées sur le genre (Pyne, 1999). En Indonésie, l'indice moyen de masse corporelle a baissé, particulièrement chez les femmes des ménages les plus pauvres. L'accès à des services de maternité de bonne qualité a aussi diminué, et un plus grand nombre de femmes ont eu recours aux services moins coûteux des sages-femmes et des accoucheuses tra- ditionnelles. En Thaïlande, l'anémie a augmenté chez les femmes enceintes. Bien que les économies de l'Asie de l'Est ne se soient pas tout à fait remises de la crise économique, des signes de stabilité financière et de confiance dans le secteur des entreprises sont réapparus (Banque mondiale, 1998b, 2000a). Les effets à long terme de la crise sur la vie des gens ne sont pas encore connus. Si les ménages et les collectivités composent avec ces difficultés en retirant plus de filles que de garçons des écoles ou en redistribuant la nour- riture différemment selon les sexes, la crise pourrait, à long terme, avoir des répercussions considérables sur l'égalité hommes-femmes. C'est un sujet qui mérite d'être étudié davantage. Ajustement structurel L'ajustement structurel se rapporte habituellement à un ensemble de réformes de politiques économiques, ayant débuté à la fin des années 1970 et au début des années 1980, et entreprises par certains pays pour contrer le recul économique ou pour répondre aux secousses économiques extérieures. De tels programmes visent, à court terme, à stabiliser l'économie et, à long terme, à lui assurer une croissance soutenue (Jayarajah, Branson et Sen, 1996). Les mesures de stabilisation visent principalement à ajuster la demande nationale globale avec la production nationale et le financement extérieur. Dans la majorité des cas, cela signifie la réduction du déficit finan- cier par le retrait des subventions, l'introduction de frais d'utilisation des ser- vices publics et la réduction du secteur public. Cela signifie aussi la dévalua- tion de la monnaie afin de rétablir l'équilibre intérieur et extérieur. Les réformes structurelles canalisent généralement les efforts en vue de stimuler une croissance économique durable ­ déréglementation des marchés com- merciaux et de produits nationaux, privatisation des entreprises gouverne- mentales et suppression des limites imposées à l'épargne et à l'investissement par la réglementation. 219 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 220 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE L'un des débats les plus virulents portant sur la question du genre et du développement cherche principalement à déterminer si les ajustements structurels ont nui ou profité aux femmes et aux filles, particulièrement en Amérique latine et en Afrique subsaharienne. Une bonne partie des experts soutiennent que les femmes portent tout le poids des coûts liés aux programmes d'ajustements structurels et qu'elles ne récoltent pas beaucoup de bénéfices de l'amélioration des performances économiques à long terme (voir, par exemple, Beneria, 1995; Summerfield et Aslanbeigui, 1998). Cependant, d'autres données suggèrent que ces réformes à grande échelle ont amélioré les conditions de vie des femmes comme celles des hommes. En quoi les ajustements nuisent-ils à l'égalité des sexes? Certains font valoir les conséquences négatives de la réduction des dépenses publiques, des fluctuations de prix des produits essentiels, des secousses dans le marché du travail, et l'incapacité des femmes de tirer un quelconque avantage de la réforme. Les mesures de stabilisation à court terme comportent la réduction des dépenses publiques ­ restriction de l'accès aux services publics ou aug- mentation du prix de ces services au moyen de frais d'utilisation ­, ce qui a une forte incidence sur l'accès des femmes aux services et sur leurs activités de soins (Sen et Grown, 1987). Les investissements des ménages dans l'ins- truction, la santé et l'alimentation semblent plus sensibles aux changements des prix et des revenus provoqués par les politiques en ce qui concerne les filles. Les mesures des politiques macro-économiques qui font fluctuer les prix des produits essentiels peuvent affecter les hommes et les femmes de manières différentes. En Afrique subsaharienne, où le travail des femmes se concentre dans le secteur non commercial, comme la production de vivres, et où celui des hommes se concentre dans le secteur commercial, les réformes qui augmentent les prix des produits commerciaux par rapport à ceux des produits non commerciaux sont susceptibles d'augmenter les revenus des hommes (Collier, Edwards et Bardhan, 1994). Au Chili, lorsque l'économie était à la baisse après une grande libéralisation du com- merce, les entreprises ont d'abord licencié les femmes, bien qu'elles aient employé plus de femmes que d'hommes lorsque l'économie s'est rétablie (Fan, Melitz et Sever, 1996; Levinsohn, 1999). Les taux de réaffectation des emplois des femmes étaient deux fois plus élevés que ceux des hommes15. De façon semblable, la réduction du secteur public peut affecter davantage les femmes que les hommes puisque la majeure partie de la main-d'oeuvre du secteur public d'un grand nombre de pays est constituée de femmes (Appleton, Hoddinott et Krishnan, 1999). Les études portant sur les pro- 220 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 221 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? grammes de restriction du secteur public au Bénin, en Chine, en Équateur, au Ghana et au Viêt-Nam démontrent que les femmes sont souvent touchées de manière disproportionnée16. Ces incidences sur l'emploi affectent le revenu relatif des hommes et des femmes, et influencent leur pouvoir de négociation au sein du ménage et l'attribution interne des ressources de la famille en fonction du genre. Les inégalités fondées sur le genre concernant les droits économiques, ainsi qu'au niveau des répercussions de leurs responsabilités domestiques sur leurs ressources économiques, l'accès aux ressources de production et leur maîtrise empêchent les femmes de profiter pleinement des opportunités économiques à long terme occasionnées par les ajustements (Collier, 1988). Cela a fait naître des inquiétudes quant à la capacité des programmes d'ajustement d'atteindre leurs buts, particulièrement en Afrique, où les femmes jouent un rôle économique essentiel dans l'agriculture (Saito, Mekonnen et Spurling, 1994). Lorsque les femmes ne jouissent pas d'un pouvoir décisionnel suffi- sant sur les ressources, elles risquent de devenir les victimes et les spectatrices des ajustements plutôt que d'en être les bénéficiaires (Haddad et al., 1995). En quoi l'égalité des sexes bénéficie-t-elle des ajustements ? D'autres experts soutiennent que les ajustements peuvent favoriser l'égalité des sexes. Les ajustements peuvent encourager des modèles de croissance qui élèvent le statut économique relatif des femmes par la création de possibi- lités qui écornent les intérêts économiques établis, traditionnellement sexistes. Lorsque les ajustements entraînent une croissance de l'exportation manufacturière, ils résultent fréquemment en une croissance importante de l'emploi pour les personnes instruites, qui sont souvent des femmes seules, et mènent à des salaires dépassant les taux antérieurement en vigueur sur le marché (Agrawal, 1996; Paul-Majumdar et Begum, 2000; Haddad et al., 1995; Lin, 1985). Même dans les régions rurales hors du secteur des emplois rémunérés, les femmes peuvent avoir bénéficié, en réponse aux ajustements, d'une plus grande mobilité économique qu'on ne le pense généralement. Au Ghana, les femmes des régions rurales ­ mariées et chefs de famille ­ se sont orien- tées vers le secteur non agricole plus rapidement que les hommes (Newman et Canagarajah, 1999). Le mouvement dans le secteur d'emplois non agricoles a contribué à réduire les conséquences de la pauvreté chez les ménages dirigés par des femmes plus rapidement que chez ceux qui étaient dirigés par des hommes. Cela a donné aux femmes des revenus relative- ment plus élevés, qu'elles soient ou non chefs de famille. Au Ghana, la dif- férence entre les revenus masculins et féminins réels est passée de 19 % en 1987 à 8,6 % en 1991. 221 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 222 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE En Ouganda, le déplacement des emplois féminins vers le secteur non agricole n'a pas été aussi prononcé qu'au Ghana: un plus grand nombre de femmes ont conservé leur emploi agricole, conformément à leur rôle tradi- tionnel. Mais les femmes chefs de famille qui ont obtenu des emplois non agricoles entre 1992 et 1996 ont vu leurs revenus augmenter; et la pauvreté chez les ménages dirigés par des femmes a diminué plus rapidement que chez ceux qui étaient dirigés par des hommes (Newman et Canagarajah, 1999). Alors qu'on dispose de données étayant chacune des thèses, quand on fait le bilan, il semble que le statut absolu et le degré d'égalité des femmes se soient améliorés, et non pas détériorés, au cours de la période d'ajustement. En Afrique subsaharienne, dans les Antilles et en Amérique latine, l'égalité des sexes concernant les droits s'est améliorée ou est restée la même entre 1985 et 1990; la scolarisation des filles a augmenté par rapport à celle des garçons, et l'espérance de vie des femmes a continué d'augmenter (voir le tableau 5.3). L'exception la plus évidente de ces tendances est l'espérance de vie relative en Afrique subsaharienne. L'avantage relatif des femmes a baissé dans cette région entre 1980 et le début des années 1990, bien que cette baisse semble indiquer une tendance à plus long terme ayant com- mencé avant la période d'ajustement. Un certain nombre d'études, qui ont évalué sur une longue période le rap- port femmes-hommes des salaires, concluent que l'écart entre les femmes et les hommes sur le plan des salaires s'est resserré dans les pays d'Amérique latine et d'Afrique subsaharienne au cours de la période d'ajustement (voir l'annexe III). Bien que les études ne soient pas tout à fait comparables ­ parce qu'elles utilisent des bases de données différentes et peuvent faire réfé- rence à des secteurs d'économie différents ­, elles constituent les études les plus complètes des revenus relatifs des femmes et des hommes. Regard sur les pays ayant effectué des ajustements structurels (nova- teurs) et sur ceux qui n'en ont pas fait (conservateurs). Si l'on observe les pays novateurs et conservateurs de l'Afrique subsaharienne ­ suivant qu'ils ont contracté ou non un emprunt à la Banque mondiale afin de financer leur réforme ­, les tendances de l'égalité des sexes ont été majo- ritairement semblables pour l'ensemble. · Alors que le taux d'inscription au niveau primaire est statique depuis 1980, le taux d'inscription absolu des femmes et le rapport femmes-hommes sont demeurés plus élevés dans les pays novateurs que dans les pays conservateurs (tableau 5.5). · Au niveau secondaire, la croissance du taux d'inscription des femmes et des hommes a été semblable dans les deux catégories de pays, mais le taux initial d'inscription, particulièrement chez les garçons, était plus élevé dans les pays novateurs. Alors que l'égalité des sexes s'est améliorée 222 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 223 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Tableau 5.5 Les tendances touchant l'égalité des sexes sont semblables dans les pays novateurs et conservateurs de l'Afrique subsaharienne Inscription au niveau primaire Inscription au niveau primaire 80 1,0 0,8 60 0,6 40 femmes-hommes Pourcentage 0,4 20 Rapport 0,2 0 0,0 1970 1975 1980 1985 1990 1995 1970 1975 1980 1985 1990 1995 Inscription au niveau secondaire Inscription au niveau secondaire 25 1,0 20 0,8 15 0,6 femmes-hommes Pourcentage 10 0,4 Rapport 5 0,2 0 0,0 1970 1975 1980 1985 1990 1995 1970 1975 1980 1985 1990 1995 Pays novateurs ­ hommes Pays novateurs Pays novateurs ­ femmes Pays conservateurs Pays conservateurs ­ hommes Pays conservateurs ­ femmes (suite du tableau en page suivante) 223 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 224 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 5.5 (suite) Espérance de vie Espérance de vie 55 1,15 50 1,10 Années femmes-hommes 45 1,05 Rapport 40 1,00 1970 1980 1990 1997 1970 1980 1990 1997 Pays novateurs ­ hommes Pays novateurs Pays novateurs ­ femmes Pays conservateurs Pays conservateurs ­ hommes Pays conservateurs ­ femmes Note : Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et une remarque d'ordre général. Source : Banque mondiale (1999d) dans les deux catégories de pays, le taux d'inscription des femmes par rapport à celui des hommes a connu une croissance légèrement plus rapide dans les pays conservateurs17. · L'espérance de vie des femmes, en 1970, était plus élevée dans les pays conservateurs que dans les pays novateurs, mais elle affichait une conver- gence en 1997, alors que l'espérance de vie des hommes était la même dans les deux groupes de pays. Le rapport initial des sexes était donc plus élevé dans les pays conservateurs que dans les pays novateurs. L'espérance de vie a augmenté avec un léger avantage pour les hommes au cours de la période d'ajustement, et les pays novateurs ont rattrapé les pays conservateurs. Les données chronologiques étant plutôt rares pour l'Amérique latine, surtout dans les petits pays de l'Amérique centrale, on ne peut établir de comparaison qu'entre les tendances concernant l'espérance de vie. L'espérance de vie était, au départ, légèrement plus élevée dans les pays novateurs. Les femmes des pays novateurs ont vu leurs avantages, sur le plan de la longévité, augmenter légère- ment comparativement aux pays conservateurs. 224 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 225 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Dans l'analyse qui précède, nous distinguons les pays novateurs des pays conservateurs en nous basant sur le fait qu'ils aient ou non contracté un emprunt d'ajustement, mais cela ne nous renseigne pas sur les politiques adoptées ou sur leurs impacts sur la situation macro-économique du pays. Une étude révèle que les pays novateurs ont connu une croissance plus rapide de 2% dans les années 1980, comparativement aux pays où les politiques se sont détériorées et où la croissance du PIB per capita a baissé de plus de 2% (Banque mondiale, 1994a). Si les pays novateurs sont classés selon le fait que leurs politiques macro- économiques se sont réellement améliorées après avoir reçu un prêt d'ajuste- ment, un portrait passablement différent de l'ajustement apparaît18. C'est dans les pays qui ont grandement amélioré leur environnement macro- économique que l'espérance de vie des femmes a le plus augmenté (tableau 5.6). Ces pays constituent aussi le seul groupe d'Afrique subsaharienne chez qui on a observé le ralentissement de la baisse de l'espérance de vie des femmes par rap- port à celle des hommes. À l'inverse, les pays conservateurs et ceux qui n'ont pas beaucoup amélioré leur environnement macro-économique ont continué à enregistrer une baisse d'espérance de vie des femmes (et sa détérioration absolue depuis 1980). Des démonstrations économétriques, basées sur des données transnationales au sein des régions et entre elles, soutiennent les données des- criptives. Les programmes d'ajustements structurels et les politiques écono- miques qui s'y rattachent ne semblent pas avoir eu une incidence importante sur l'égalité des sexes ­ de façon positive ou négative ­, indépendamment de leur impact sur la croissance des revenus. Dans une analyse de la relation entre la croissance des revenus et l'égalité des sexes, Dollar et Gatti (1999) concluent que les variables des politiques macro-économiques, comme la politique de taux de change et la primauté du droit, n'ont pas d'incidence directe sur l'égalité. Les variables affectent indirectement les résultats des conditions liées au genre par leur contribution à la croissance. Forsythe, Korzeniewicz et Durrant (2000) concluent qu'il n'existe pas de répercussions sur les mesures du statut des femmes et de l'éga- lité des sexes qui soient indépendantes des ajustements structurels, compte tenu de la croissance des revenus et des institutions sociales qui affectent les conditions liées au genre. Ni l'existence, ni l'ampleur des prêts d'ajustement n'ont de répercussions indépendantes sur les inégalités fondées sur le genre en termes d'instruction ou d'espérance de vie, en tenant compte des condi- tions initiales et de la croissance subséquente des revenus19. Bien que les résultats concernant les répercussions des ajustements structu- rels sur l'égalité des sexes paraissent variés, une évaluation positive se dessine lorsqu'on distingue les pays novateurs des pays conservateurs. L'expérience des réformes démontre qu'on doit prendre en considération, dans l'élaboration des politiques, les risques propres à chaque genre aussi bien que les difficultés liées 225 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 226 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 5.6 Un meilleur environnement économique équivaut à une espérance de vie plus grande chez les femmes en Afrique subsaharienne Espérance de vie des femmes, selon l'état Espérance de vie, selon l'état des réformes des réformes 60 1,10 55 1,08 Années femmes-hommes 50 1,06 Rapport 45 1,04 1970 1980 1990 1997 1970 1980 1990 1997 Pays novateurs ­ grande amélioration Pays novateurs ­ détérioration Pays conservateurs Pays novateurs ­ petite amélioration Note : La classification des pays novateurs en voie d'ajustement est basée sur un système de points attribués pour des changements en matière de politiques fiscales, monétaires et de taux de change de 1981 à 1986 et de 1987 à 1991. Voir Banque mondiale (1994a) pour de plus amples détails. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et une remarque d'ordre général. Source : Banque mondiale (1999d) à la mobilité économique des femmes. L'analyse politique qui présente les dif- férences des hommes et des femmes sur le plan des répercussions des ajuste- ments à court et à long terme peut révéler des risques potentiels qui doivent aussi être pris en considération. Les principaux facteurs auxquels il faut porter attention sont les suivants: les normes relatives au genre selon les pays, le cadre législatif, les écarts dans l'accès aux ressources de production comme le crédit, et la répartition des ressources au sein des ménages. Transition vers une économie de marché À la fin des années 1980, une transformation politique et économique massive a commencé en Europe centrale et en Europe de l'Est, et elle s'est étendue à l'Union soviétique, à la Chine et au Viêt-Nam. Un changement social de cette envergure aura certainement des répercussions durables sur tous les aspects de la vie, y compris sur les rôles, les attentes sociales et les relations hommes-femmes. 226 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 227 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Transition mais croissance limitée en Europe de l'Est et en Asie centrale. Les huit pays qui constituaient autrefois la région communiste du continent européen ont formé 27 pays distincts à la suite de l'effondrement du gou- vernement communiste. Le rétablissement des économies de marché dans ces pays devrait entraîner des changements fondamentaux, dont l'abandon de la planification centralisée, du contrôle de la main-d'oeuvre et de la pro- duction au profit d'une production privatisée, de salaires fixes décentralisés, d'un marché du travail flexible et du libre-échange. Cependant, contraire- ment aux premières prévisions, les cinq premières années de transition en Europe de l'Est et dans l'ancienne Union soviétique ont amené une forte baisse du PIB et des baisses très marquées des salaires et de la demande en main-d'oeuvre (Allison et Ringold, 1996). Les pays de l'Europe de l'Est sont sortis de la crise de transition et leur économie recommence à croître. Par contre, le démantèlement de l'Union soviétique a laissé les nouveaux États indépendants dans de mauvaises conditions économiques. Les énormes bou- leversements politiques et économiques n'ont pas rapporté de gains immé- diats. Les rendements se rétablissent progressivement depuis le milieu des années 1990, mais le PIB de plusieurs pays est toujours plus bas qu'au début de la transition. Que les femmes aient gagné ou perdu comparativement aux hommes au cours de la restructuration politique et économique est sujet à controverse, et les données se contredisent à ce sujet. Les répercussions à court et à long terme ont été différentes. Par exemple, des analyses récentes des impacts de la crise de transition sur les pertes d'emploi et les salaires réels contredisent les premiers résultats. On n'arrive pas non plus à déterminer avec certitude si les femmes étaient vraiment plus favorisées sous le régime précédent. Autrement, comment expliquer la recrudescence des conflits liés au genre, comme des taux de violence plus élevés, dans des sociétés qui se targuent d'être égalitaires dans la plupart des indicateurs de bien-être20 ? Avant la transition, le mandat du pouvoir central d'orienter les ambitions et les énergies familiales du domaine privé vers le domaine public a aidé les femmes à obtenir un certain degré d'égalité avec les hommes. Les droits des femmes avaient une place élevée dans le programme social, favorisant ainsi leur liberté d'action. Les niveaux d'instruction étaient élevés et égaux. On s'attendait à ce que les femmes travaillent à plein temps, et l'État les appuyait en leur fournissant de longs congés de maternité et des services de garde sub- ventionnés. Dans l'ensemble, les femmes détenaient environ 40% des emplois en Europe de l'Est et en Union soviétique (tableau 5.4). Dès les années 1970, dans plusieurs pays, les femmes constituaient près de la moitié de la main-d'oeuvre. 227 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 228 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Grille 5.4 Proportion de femmes dans la population active en Europe de l'Est et en Asie centrale (Pourcentage du total) Pays 1970 1980 1995 Albanie 34 36 41 Bosnie-Herzégovine 31 25 35 Bulgarie 46 47 48 Asie centralea 33 39 37 Croatie 34 37 40 République tchèque 46 48 51 Hongrie 41 40 40 Macédoine, RFY 24 31 38 Pologne 47 46 45 Roumanie 46 44 41 Russie 47 50 47 Slovaquie 36 44 49 Slovénie 33 45 45 Union soviétique (sauf l'Asie centrale)b 45 48 46 République féd. de Yougoslavie (Serbie, Monténégro) 32 35 40 a. Les républiques de l'Asie centrale faisaient autrefois partie de l'Union soviétique, en 1970 et 1980. b. Se rapporte aux anciennes républiques de l'Union soviétique, sauf pour celles de l'Asie centrale. En 1970 et 1980, elles faisaient partie de l'Union soviétique. Source : Banque mondiale (1999d). Le rapport des pertes, entre les femmes et les hommes, en termes d'emplois et de revenus durant la transition varie selon les pays et dépend de la propor- tion de femmes et d'hommes employés dans les secteurs industriels les plus touchés par la restructuration, et de la répartition des occupations dans les emplois perdus. Les premières études sur l'Europe de l'Est arrivaient à la conclusion que les emplois administratifs, dominés par les femmes, avaient été plus touchés que les emplois de chaîne de fabrication, habituellement occupés par les hommes (Boeri et Keese, 1992). Mais les dernières études révèlent que ce sont l'industrie lourde, l'agriculture et le secteur minier, pierres angulaires de l'économie soviétique, qui ont perdu le plus de main-d'oeuvre. La transition s'étant soldée par une contraction du secteur des industries lourdes dans la Fédération de Russie, les hommes ont été licenciés en plus grand nombre que les femmes, bien que les salaires des femmes aient baissé plus que ceux des hommes (Brainerd, 1998). En Estonie et en Slovénie, les changements dans la structure de la demande en produits et services a aussi privilégié les femmes, 228 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 229 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? car la secousse a beaucoup affecté les secteurs à prédominance masculine (comme l'industrie manufacturière, l'agriculture, le transport et la construc- tion), alors que les secteurs à prédominance féminine ont baissé très légère- ment ou pris de l'expansion (Orazem et Vodopivec, 1999). Les contrecoups sociaux et économiques de la transition ­ ainsi que l'in- stabilité et la vulnérabilité qu'elle a fait naître ­ a aussi affecté la santé et la longévité des femmes et des hommes. L'espérance de vie dans les économies en transition a baissé, entre 1990 et 1997, d'environ un an. Des taux plus élevés de maladies cardio-vasculaires, de stress émotionnel, de suicide, de vio- lence conjugale et de consommation d'alcool ont été enregistrés (Gavrilova et al., 1999). En Russie, un taux de mortalité ajusté selon l'âge a augmenté d'environ un tiers entre 1990 et 1994: une augmentation qui va bien au-delà de celle des pays industrialisés en temps de paix (Notzon et al., 1996). Cette augmentation a été sensiblement plus marquée chez les hommes (36%) que chez les femmes (23%), ce qui a réduit l'espérance de vie des premiers de sept ans, et celle des secondes, de trois ans. Plus des trois quarts de cette baisse sont attribuables aux décès des personnes de 25 à 64 ans. Les répercussions des inégalités fondées sur le genre se sont aussi fait sentir au foyer. Une réduction draconienne des services de garde d'enfants a affecté non seulement les emplois des femmes, mais aussi leur charge de travail. Dans presque toutes les républiques de l'ancienne Union sovié- tique, les services de garde préscolaires diminuent depuis le début des années 1990. Le nombre de maternelles et leur fréquentation a augmenté entre 1980 et 1989, mais après 1990, l'accès à ce service était de 40 à 80 % des taux de 1980, selon le pays (tableau 5.7). En Russie, l'aug- mentation des frais de garde d'enfants a eu un impact plus marqué que les modifications de salaires sur les heures de travail des femmes (Lokshin, 2000). Les répercussions à long terme des changements dans la prestation de services de garde d'enfants sur les femmes, sur leurs enfants et sur les rôles associés au genre doivent être étudiées. La proportion de femmes au Parlement est un autre aspect de la transi- tion. On a montré au chapitre I que l'Europe et l'Asie centrale avaient, en 1995, les plus fortes proportions de femmes au Parlement (25 %), mais cette représentation est passée à 7 % en 1990. Les femmes pourront-elles rétablir cette participation et, si oui, de quelle façon ? Voilà des questions qui méritent notre attention. Transition et croissance en Asie de l'Est. La transition vers une économie de marché a emprunté une voie différente en Chine et au Viêt-Nam. L'économie chinoise a connu des taux de croissance impressionnants, de l'ordre de 8 à 9% par an, pour une période dépassant de beaucoup la décennie, grâce à la trans- formation des méthodes d'embauche, des habitudes de consommation et du 229 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 230 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 5.7 Le nombre de maternelles a diminué dans l'ancienne Union soviétique Indice des maternelles disponibles (1980 = 100) 140 Biélorussie 100 Arménie Kazakhstan Géorgie 60 Kirghizistan 20 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 Indice des maternelles disponibles (1980 = 100) 140 Turkménistan Ouzbékistan 100 Russie Tadjikistan Turkménistan 60 Ukraine 20 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 Source : Comité d'État du CIS (1999) mode de vie des personnes. L'expansion économique soutenue a créé de nou- velles possibilités d'emplois non agricoles pour les jeunes, principalement dans les domaines de l'électronique, du textile et du vêtement. Plus de la moitié des exportations de la Chine sont des produits de technologie rudimentaire. La plus forte demande de main-d'oeuvre a été provoquée par la baisse d'emploi dans le secteur agricole, par l'augmentation de la migration urbaine et par le nombre d'habitants des régions rurales qui travaillent dans les usines de la ville. 230 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 231 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Les femmes et les hommes ont-ils récolté les mêmes bénéfices de cette transi- tion de la Chine vers l'économie de marché? Les résultats sont partagés. Certaines femmes ont peut-être perdu quelques acquis: les femmes des villes semblent avoir été licenciées de façon disproportionnée dans le secteur public. L'écart salarial entre les hommes et les femmes s'est accru au fur et à mesure que les emplois passaient du secteur public au secteur privé (Maurer-Fazio et Hughes, 1999). Et, au début de la réforme, les femmes continuaient à oeuvrer dans le domaine de l'agriculture tandis que les hommes accédaient à des nouveaux postes ailleurs que sur des fermes (Parish, Zhe et Li, 1995). La croissance récente dans le secteur rural a permis l'accession d'un grand nombre de femmes à des emplois non agricoles en milieu rural (Hare, 1999; Rozelle et al., 2000). Les salaires absolus des femmes sont maintenant plus élevés dans le secteur privé que dans le secteur public. L'écart salarial entre les hommes et les femmes, au moins dans le secteur de l'économie rurale, n'a pas augmenté (Rozelle et al., 2000). La rente versée aux parents a élevé le statut des filles au sein des familles et leur a donné un plus grand sentiment de liberté (Hare, 1999)21. Comme la Chine, le Viêt-Nam a connu une transformation économique remarquable dans le milieu des années 1980. Dès 1995, le PIB connaissait une croissance d'environ 10% par année, les exportations avaient décuplé, et l'on notait des indications de niveaux de vie plus élevés dans la plus grande partie du pays (Dollar, Glewwe et Litvack, 1998). On constatait un déplacement du sec- teur agricole vers celui de l'industrie et des services, mais l'attribution sectorielle des emplois a connu peu de changements et pas de répercussions appréciables sur l'égalité. Le Viêt-Nam est toujours un pays d'économie agricole comptant, en 1990, 73% de femmes économiquement actives et 70% d'hommes employés dans le secteur agricole. L'orientation de la Chine et du Viêt-Nam vers des économies de marché s'est accompagnée de changements importants dans le mode de vie des gens, au-delà du travail. L'écart entre les hommes et les femmes sur le plan de l'éducation s'est rétréci davantage au cours de cette période. En Chine, le taux brut d'inscriptions au primaire, tant pour les garçons que pour les filles, a atteint 120% en 1996 et, entre 1980 et 1996, le taux d'inscription des filles au secondaire a augmenté plus rapidement (de 37 à 66%) que celui des garçons (de 54 à 73%). Au Viêt-Nam, en 1985, les taux bruts d'inscription étaient déjà pratiquement égaux pour les filles et pour les garçons ­ au moins 100% au primaire et plus de 40% au secon- daire ­, mais l'égalité a progressé durant la transition. Dans une étude qualitative sur deux communes du Viêt-Nam, les personnes interrogées représentant environ 80 familles qualifient de spectaculaires les amé- liorations dans leur vie après l'application de programmes de réformes écono- miques, comme celui de Doi Moi, dans les infrastructures essentielles (eau, ins- tallations sanitaires), la possession de biens durables, l'habitation, la mobilité, 231 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 232 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE l'alimentation et l'accès à l'information grâce à la télévision (Long et al., 2000). Les femmes, tout comme les hommes, ont parlé explicitement des changements dans les rôles associés au genre, les hommes étant d'accord avec les femmes sur le fait que les relations au sein des ménages étaient devenues plus égales. Malgré ce changement, une étude auprès de groupes cibles révèle que l'autorité de l'homme au foyer est toujours dominante (Banque mondiale, 1999c). Tandis que les femmes sont toujours responsables des activités de soins et d'entretien de la maison, les hommes sont responsables des affaires sociales de la famille. Malgré le fait que les économies en transition soient en partie responsables d'une égalité des sexes plus centralisée et que certains indicateurs d'égalité soient parmi les plus élevés du monde, les politiques axées sur les marchés et les différences dans leurs performances économiques ont engendré certaines problématiques liées au genre. Devant l'effondrement de la production, la pénurie d'emplois et des coupures sévères dans les services de garde publics, les inégalités fondées sur le genre sont en progression en Europe de l'Est et dans l'ancienne Union soviétique. À l'inverse, devant la croissance écono- mique rapide de la Chine et du Viêt-Nam, les femmes et les hommes doi- vent s'adapter à de nouveaux rôles économiques et aux nouveaux conflits relatifs au genre qu'ils entraînent, mais ils ont la chance de pouvoir s'adapter en ayant déjà de meilleures conditions de vie. Le meilleur et le pire : leçons tirées d'une expérience régionale La croissance économique et la politique ont une incidence sur le niveau de vie et sur le bien-être de chacun. Les stratégies de développement affectent habituel- lement les hommes et les femmes de façons différentes. Les réformes de poli- tiques macro-économiques et le développement économique influencent et ont des impacts sur les relations entre les sexes, qu'elles portent ou non sur des ques- tions relatives au genre. Lorsque ces réformes apportent des changements aux res- sources et aux restrictions financières, ils modifient l'accès aux programmes publics sur lesquels les pauvres comptent. Ces réformes affectent aussi les reve- nus des cultivateurs qui vendent leurs produits, ceux des travailleurs qui vendent leur savoir-faire, et les prix de la nourriture et des services essentiels. Puisque les femmes et les hommes ont des rôles et des pouvoirs différents à la maison, en milieu de travail, sur le plan politique et dans l'économie en général, ils sont affectés de manières différentes par ces changements à grande échelle. Les répercussions du développement économique sur l'égalité des sexes ne sont souvent ni immédiates ni suffisantes. Les impacts dépendent des droits des femmes et des hommes, de leur accès aux ressources de production (comme les biens fonciers et le crédit), de la maîtrise qu'ils exercent sur elles et de leur influence politique. En Asie de l'Est, on note des améliorations: forte croissance, inégalités minimes concernant le bien-être des femmes. Les 232 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 233 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? inégalités fondées sur le genre ont diminué sous plusieurs aspects, mais de façon inégale et imparfaite. En Amérique latine, où le capital humain est élevé et pratiquement égal pour les hommes et les femmes, l'égalité peut avoir souffert temporairement durant les réformes structurelles qui ont tou- ché différemment les femmes et les hommes, relativement aux mises à pied et aux salaires. Cependant, comme les taux d'inflation ont baissé et que les taux de croissance sont devenus positifs, on enregistre des améliorations. L'un des défis importants à relever est de trouver une façon d'améliorer les conditions de vie des habitants des régions rurales et pauvres. Dans les républiques de l'ancienne Union soviétique, où les taux de capi- tal humain sont élevés et égaux pour les hommes et les femmes, mais où les économies sont temporairement en recul, les réformes structurelles ont favo- risé l'apparition de gagnants et de perdants. Certaines personnes ont bénéfi- cié des nouvelles possibilités du marché, mais d'autres ont vu leur situation se détériorer. Une part importante du coût des changements a été attribuée aux coupures en main-d'oeuvre des secteurs dont l'activité est réduite, bien que ni les femmes ni les hommes n'aient le monopole des pertes. En Afrique subsaharienne, les réformes macro-économiques visant à régler les problèmes structuraux ont peut-être été trop dures pour ceux qui disposaient de peu de ressources (capital humain ou ressources matérielles), déstabilisant les vies en profondeur tant à la maison qu'au travail, en partie parce que l'infra- structure et les institutions sociales et politiques n'ont pas réagi aux réformes aussi promptement que l'ont fait les déséquilibres macro-économiques (Collier et Gunning, 1999). Les femmes, ayant moins de ressources productives et les maîtrisant moins, ont été particulièrement vulnérables dans les pays où les poli- tiques macro-économiques ne se sont pas améliorées durant l'ajustement. Ces observations indiquent que les politiques qui favorisent la croissance et la prospérité économiques, qui améliorent les infrastructures sociales et matérielles, qui génèrent de nouveaux emplois et qui élèvent les taux sala- riaux fournissent un environnement qui favorise un niveau de vie plus élevé et une plus grande égalité. Mais, souvent, ces politiques ne suffisent pas. Les politiques sociales qui luttent contre la discrimination fondée sur le genre sur le marché du travail, ou qui soutiennent les soins aux enfants, peuvent faire ce que le développement économique et les grandes réformes institution- nelles ne peuvent accomplir seules. Les politiques de protection sociale qui reconnaissent les différences fondées sur le genre dans le travail domestique et commercial ont aussi un rôle important à jouer dans la protection des femmes (et des hommes) contre les secousses ou les replis économiques pro- longés (encadré 5.4). Un autre défi important pour les décideurs est de réduire les effets indésirables des changements rapides et à grande échelle pour que tout le monde puisse bénéficier des changements. 233 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 234 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Encadré 5.4 Amortissement des effets de la réforme naient beaucoup de femmes à louer des chars à boeufs. sur les personnes vulnérables Mais, comme les hommes possédaient 80% des chars à boeufs, ils ne bénéficiaient pas de la participation des LES CHANGEMENTS ÉCONOMIQUES SONT SUSCEPTIBLES femmes au programme seulement de manière directe mais d'ébranler les mécanismes traditionnels de protection des aussi par la location de leurs chars à boeufs. Dans bien des pauvres, des chômeurs et des personnes âgées; et cela peut cas, les femmes ont remis leurs paiements en espèces aux se produire si rapidement que les nouvelles institutions hommes de la famille. Une analyse de la distribution des sociales n'ont pas le temps de se développer. Des subven- bénéfices de participation montre que seulement 16% des tions visant à neutraliser les effets de la réduction des ser- femmes gardaient leur salaire pour leurs dépenses person- vices et des mesures de sécurité (comme les programmes nelles, par rapport à 42% des hommes. d'emploi et de conservation des compétences acquises) Les programmes ne visant pas les femmes réussissaient pour les travailleurs licenciés auraient atténué les effets des beaucoup moins bien à susciter leur participation. Le politiques d'ajustement. Or, peu de pays novateurs ont agi Fonds social d'urgence de Bolivie, établi en 1986, est l'une assez tôt. Ces politiques devraient être adaptées aux risques des premières tentatives de la Banque mondiale de s'atta- spécifiques au genre, aux différences entre les sexes quant à quer au problème du coût des ajustements grâce à un pro- la gestion des ressources ainsi qu'aux types d'activités que les gramme compensatoire. Le fonds finançait de petits pro- sociétés jugent appropriées pour chaque genre. Lorsque les jets d'investissement en main-d'oeuvre qui auraient pour politiques de protection sociale sont aveugles aux pro- effet d'augmenter l'emploi chez les pauvres tout en four- blèmes liés au genre, elles n'arrivent pas à atteindre les nissant à la population des services qui favoriseraient le femmes. Des analyses portant sur quelques programmes de développement. Une étude menée en 1988 montre protection récents mettent ce fait en évidence. que 99% des participants étaient des hommes (Newman, Un programme de travail rémunéré instauré en Zambie Jorgensen et Pradhan, 1991). en 1995 en remplacement de l'aide alimentaire visait la Durant les six premiers mois du programme de tra- participation des femmes. Le programme organisait diffé- vail obligatoire de Trabajar 2, qui a débuté en Argentine rentes activités pour les hommes et pour les femmes et leur en 1997, seulement 15 % des participants étaient des octroyait le même salaire, basé sur les objectifs d'emploi femmes (Jalan et Ravallion, 1999). Par contre, les gains (Devereux, 1998). Les résultats préliminaires d'un sondage de salaire nets recueillis, pour celles qui ont participé, mené en 1997 montrent que les femmes désireuses de par- étaient presque identiques à ceux des hommes, ce qui ticiper dégageaient du temps en déléguant le travail suggère que la faible participation des femmes est peut- domestique à leurs filles. Les contraintes domestiques et la être une question de choix plutôt que de partialité lors lourde charge de travail exigée par le programme ame- du recrutement. Le développement économique peut faire progresser l'égalité des sexes de dif- férentes manières: par la création ou l'expansion des marchés; en facilitant les nouveaux investissements; en améliorant les possibilités d'augmentation des revenus et en redéfinissant le rôle de l'État dans l'économie. S'il bénéficie d'un soutien politique et institutionnel, le développement économique pourra aider le démantèlement des divisions traditionnelles du travail fondées sur le genre au foyer et sur le marché du travail, stimuler un investissement égalitaire dans le capital humain et réduire la discrimination sur le marché du travail. Toutefois, ces effets doivent être renforcés par des politiques sociales actives qui favorisent l'égalité des sexes dans différents secteurs de la société et qui protègent les per- sonnes vulnérables. Le contenu de ces politiques fait l'objet du chapitre suivant. 234 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 235 LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE FAVORISE-T-IL L'ÉGALITÉ DES SEXES ? Notes 1. Ces résultats sont en accord avec ceux d'une étude 9. Easterly (1999) constate une relation positive considé- antérieure de Juster et Stafford (1991) sur l'utilisation du temps rable, en tenant compte des effets fixes, entre la croissance des chez les hommes et les femmes dans un plus petit nombre de pays revenus et l'égalité des sexes par rapport aux taux d'inscription au d'économie industrielle et préindustrielle. secondaire utilisant un bassin de population commun et un modèle en série chronologique. Cependant, pour l'éducation pri- 2. Contrôle des reculs pour les taux de chômage, les taux maire, une hausse de 10% du revenu per capita est associée à un d'activité des marchés pour la population, l'âge normal de l'ad- rapport d'inscription plus bas de 1,1% pour les femmes. En uti- missibilité à la pension, la corrélation propre des variances rési- lisant les données transnationales des années 1975 à 1995 dans les duelles et l'hétérocédasticité. pays semi-industrialisés, Seguino constate que l'inégalité salariale 3. Les revenus supplémentaires de la famille peuvent fondée sur le genre est directement liée à la croissance écono- entraîner une demande accrue en capital humain, mais, comme mique. Filmer, King et Pritchett (1998) estiment ­ en utilisant un on l'a vu au chapitre III, c'est un ensemble de facteurs sociaux et modèle transnational en série chronologique tenant compte des institutionnels qui déterminent l'effet sur les inégalités fondées sur effets fixes ­ que bien que le revenu soit associé aux degrés de le genre. Il n'y a pas de processus automatique par lequel l'aug- santé et d'instruction des filles dans les sous-régions de l'Asie du mentation des ressources des familles les réduit. Sud, son incidence sur les inégalités fondées sur le genre est négli- geable ou inexistante. Forsythe, Korzeniewicz et Durrant (2000) 4. Les taux moyens d'inscription à l'école intermédiaire démontrent que, selon l'Indicateur sexospécifique du développement par âge sont de 81% pour les garçons et de 31% pour les filles. humain élaboré par les Nations Unies (1994), des revenus élevés 5. En utilisant le recensement des manufacturiers sont associés à des taux élevés d'égalité entre les hommes et les de 1997 aux États-Unis, Black et Brainerd (1999) définissent la femmes. part d'importation comme le rapport de la valeur des importa- 10. Pour la question de la causalité entre le revenu et l'éga- tions totales de l'industrie comparativement à la valeur des livrai- lité des sexes, Dollar et Gatti (1999) utilisent les techniques d'es- sons intérieures. timation des doubles moindres carrés et des effets fixes. 6. Les chercheurs chinois entretiennent un débat perma- 11. La «forme» de cette relation semble être sensible à la nent sur les changements dans le statut relatif des femmes sur le mesure précise d'inégalité qui est utilisée. Dollar et Gatti utilisent marché du travail depuis le début de la réforme économique. le niveau absolu de réussite des femmes en gardant celui des Certains chercheurs soutiennent que l'engagement du gouverne- hommes constant. Mais l'accent mis sur la différence proportion- ment dans le marché du travail implique une possibilité accrue de réapparition des valeurs traditionnelles qui encouragent la discri- nelle entre les niveaux de réussite des hommes et des femmes per- mination fondée sur le genre. D'autres chercheurs pensent que met de dégager une relation plus linéaire ­ ou même une relation l'accroissement de marchés du travail compétitifs devrait amélio- concave, comme dans le tableau 5.3 ­ selon les spécifications éco- rer le statut économique des femmes par la «pénalisation des nométriques. entreprises discriminantes et la gratification des entreprises non 12. Par exemple, en Indonésie, la mortalité infantile a discriminantes» (Maurer-Fazio et Hughes, 1999). Alors qu'il y a baissé d'au moins 30% entre 1982 et 1987 et entre 1992 et 1997, un accord général sur le fait que l'accroissement des marchés com- selon l'information des Enquêtes démographiques et sanitaires pétitifs parvient à limiter l'ampleur de la discrimination relative au Demographic and Health Surveys (Beegle et al., 1999). En genre, on essaie toujours de savoir, grâce aux résultats empiriques, Malaisie, la proportion de la population active qui n'avait pas fré- laquelle des deux forces ­ valeurs traditionnelles ou compétition quenté l'école a baissé des deux tiers et la proportion de ceux qui accrue ­ a le plus de répercussions sur l'ensemble des résultats avaient un diplôme d'études secondaires et collégiales a triplé pour le marché du travail. Voir plus bas pour plus de précisions. entre les années 1960 et le début des années 1980 (Mazumdar, 7. Le manque d'informations pour cette étude est consi- 1994). dérable, ce qui a empêché l'inclusion des pays à faibles revenus. 13. Un plus grand ensemble de rapports sur le secteur 8. Toutes les relations transnationales examinées dans ce manufacturier de la Corée fourni par Seguino (1997), utilisant les chapitre sont ajustées pour tenir compte des droits des hommes et données de l'Organisation internationale du travail, révèle ce qui des femmes. Les coefficients sont obtenus à partir des estimations suit: en 1975, les rapports étaient de 47%; en 1980, de 45%; décrites à l'annexe II. en 1985, de 47% et en 1990, de 51%. 235 Chapitre 5 16/06/03 14:58 Page 236 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE 14. À Taiwan, en Chine, en dépit des améliorations de l'ex- portion du PIB) pour la politique financière; selon le changement périence de travail et du niveau d'instruction des femmes, la moyen dans le seigneuriage et l'inflation pour la politique moné- moyenne des revenus des femmes par rapport à ceux des hommes taire; selon le changement du taux de change réel constaté pour le demeure de 65% entre 1978 et 1992 (Zveglich, Rodgers et taux de change fixe des pays pour la politique du taux de change; Rodgers, 1997). Sous-jacents à cette situation, on trouve des sché- et selon une simple moyenne du changement dans le taux de mas différents pour les femmes assez instruites et celles qui le sont change réel constaté et le changement dans la prime du taux du peu: les femmes ayant une éducation intermédiaire ou moins ont marché parallèle pour les pays à taux de change flottants. subi des pertes de revenu considérables, et les femmes les plus ins- truites ont joui de gains modestes. L'écart des salaires s'explique en 19. Pour enregistrer les effets de l'ajustement structurel sur grande partie par les différences dans les caractéristiques mesurées, l'égalité des sexes, Forsythe, Korzeniewicz et Durrant (2000) éla- mais durant une partie décroissante de la période, étant donné borent un indice constitué de quatre indicateurs se rapportant que les femmes ont subi d'importantes pertes à cause de facteurs à 1975-1990: le nombre de refinancements de la dette bilatérale, non mesurés liés au genre. le nombre de refinancements de la dette multilatérale sur la même période, le nombre de fois que le pays a bénéficié du mécanisme 15. Une information similaire du Chili et de la Colombie élargi de crédit (FMI) et le total des emprunts au FMI sous forme indique que l'élasticité de la demande des entreprises en main- de pourcentage de sa quote-part pour la période. Dans un exer- d'oeuvre féminine de type col bleu est plus grande que chez les cice similaire, le personnel de la Banque mondiale a examiné les hommes lors de périodes récentes de libéralisation des marchés répercussions de l'ajustement structurel sur l'égalité des sexes sur (Fajnzylber, 2000). les plans de l'instruction et de l'espérance de vie en utilisant des 16. Voir Rama et MacIsaac (1999) sur l'Équateur, mesures de prêts d'ajustement de la Banque dans des pays spéci- McDerman et al. (1996) sur le Ghana, et Rodgers (1999) sur le fiques. Voir aussi Bradshaw et Wahl (1991). Viêt-Nam. Bien que les données sur les restrictions gouverne- 20. Alors que les indicateurs d'égalité des sexes donnent mentales asymétriques selon le genre ne soient pas unanimes, elles une bonne note à la période communiste pour la réduction assez indiquent que l'emploi féminin a été affecté de manière dispro- rapide des inégalités en termes d'éducation, de santé et d'emploi, portionnée dans la plupart des cas. on questionne ces résultats dans au moins une étude récente 17. En Afrique, même avant l'époque d'ajustement, l'éga- (UNICEF, 1999b). On y soutient que le régime antérieur n'a pas lité des sexes quant à l'éducation secondaire progressait plus len- réglé les questions d'égalité des sexes, spécialement en ce qui tement dans les pays novateurs que dans les pays conservateurs. concerne le statut des femmes au foyer. L'étude révèle qu'il existait une forte ségrégation des emplois fondée sur le genre et un mur 18. En Afrique subsaharienne, entre 1981 et 1986, et de silence sur la violence faite aux femmes, et qu'il y avait peu de entre 1987 et 1991, la mise en oeuvre des politiques d'ajustement soutien public pour la vie familiale hors du contexte de l'emploi. était soit incomplète, soit incohérente, soit absente (Banque mon- La levée du contrôle d'État centralisé a révélé des inégalités fon- diale, 1994a). L'Ajustement en Afrique de la Banque mondiale dées sur le genre. (1994) classait les pays africains en quatre catégories entre 1981 et 1986, et entre 1987 et 1991: conservateurs; novateurs dont 21. Les données sur les changements dans la discrimina- l'environnement de politique macro-économique s'est détérioré; tion salariale, telles que mesurées par la portion d'écart salarial qui novateurs dont l'environnement de politique macro-économique ne peut s'expliquer par l'instruction ou l'expérience de travail, s'est un peu amélioré; et novateurs dont l'environnement de poli- sont contradictoires. Certaines données montrent que les écarts tique macro-économique s'est grandement amélioré. Ces catégo- salariaux inexpliqués les plus importants se trouvent dans le sec- ries sont basées sur un indice, dans les politiques macro-écono- teur privé (Maurer-Fazio et Hughes, 1999), ce qui suggère que les miques, qui mesure les changements financiers, monétaires et écarts salariaux liés au genre sont susceptibles de s'agrandir à politiques de taux de change entre 1981 et 1986, et entre 1987 mesure que le secteur privé de l'emploi gagne en importance. et 1991. Différentes cotes ont été attribuées: selon les change- Toutefois, d'autres données indiquent que la discrimination dans ments dans le déficit (à l'exclusion des subventions mais compre- l'écart salarial lié au genre décroît considérablement du secteur nant les ajustements pour les changements du revenu en tant que public au secteur privé (Liu, Meng et Zhang, 2000). 236 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 237 CHAPITRE VI Une stratégie en 3 volets pour promouvoir l'égalité des sexes L ES INÉGALITÉS FONDÉES SUR LE GENRE AFFECTENT LES PERSONNES et nuisent aux projets de développement des nations. Cette triste situa- tion nous incite, individuellement et publiquement, à promouvoir la cause de l'égalité des sexes. Les données ont démontré que l'État joue un rôle important dans l'amélioration du bien-être de chacun. S'il remplit sa mission, il obtiendra des bénéfices substantiels pour les femmes et les jeunes filles, et il élèvera leur statut relatif et absolu. Une action à caractère public s'avère néces- saire car il est très difficile (voire impossible), pour des individus, de modifier des institutions sociales et légales qui perpétuent les inégalités. Les défaillances du marché, notamment le manque d'information concernant la productivité féminine dans plusieurs secteurs ­ parce que les femmes consacrent une grande partie de leur temps à des activités hors marché, ou parce que les marchés sont absents ou sous-développés ­ sont également un obstacle. Dans ce rapport, nous proposons une stratégie en trois volets pour pro- mouvoir l'égalité des sexes : · Réformer les institutions pour établir des droits égaux et des opportuni- tés économiques égales pour les hommes et les femmes; · Encourager un développement économique incitant à une participation et à un partage des ressources plus équitables; · Prendre des mesures énergiques pour éliminer les inégalités persistantes concernant l'influence politique et la maîtrise des ressources. Au chapitre V, nous avons expliqué comment le développement écono- mique et la croissance des revenus favorisaient l'égalité des sexes. Mais les fruits du développement économique peuvent tarder à apparaître. Le déve- loppement à lui seul ne suffit pas à éliminer les disparités fondées sur le genre, et son efficacité n'est pas automatique. Pour ces raisons, les gouvernements et les organismes de développement doivent entreprendre une démarche plus 237 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 238 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE globale. L'État a la délicate responsabilité d'établir un contexte institutionnel où les droits et les opportunités économiques seront les mêmes pour chaque genre, et d'assurer à tous un accès égal aux ressources et aux services publics. Pour promouvoir l'égalité des sexes, on a privilégié deux démarches dis- tinctes: l'une orientée vers le développement, et l'autre, institutionnelle, basée sur les droits (PNUD, 1995; Cagatay, Elson et Grown, 1995). Dans les faits, l'approche institutionnelle et le développement constituent les deux éléments- clés d'une stratégie à long terme. Les sociétés qui prônent des droits fonda- mentaux égaux pour les hommes et les femmes et qui promeuvent le dévelop- pement économique réussissent davantage à réduire les disparités fondées sur le genre que celles qui ne s'intéressent qu'au développement ou aux droits. Il suffit de jeter un coup d'oeil sur les données de chaque pays pour être convaincu qu'il existe des liens indéniables entre les droits, la croissance des reve- nus et l'égalité des sexes. Une plus grande égalité en matière de droits et un PIB plutôt élevé per capita vont de pair, pour les filles, avec des taux d'inscription sco- laire (primaire et secondaire), d'espérance de vie et de représentation parlemen- taire plus élevés (tableau 6.1). Les différences sont flagrantes en ce qui concerne la représentation au Parlement et l'inscription scolaire au niveau secondaire. On peut interpréter le tableau 6.1 ainsi : lorsque le PIB per capita et l'éga- lité ne sont pas très élevés, on peut bonifier la condition féminine soit en améliorant l'égalité des sexes en matière de droits, soit en augmentant le revenu per capita. Dans les pays à faibles revenus où chaque genre jouit pra- tiquement des mêmes droits, des revenus plus élevés devraient, par la suite, entraîner une amélioration du statut des femmes. Dans les pays à revenus élevés où les sexes n'ont pas de droits égaux, on peut rehausser le statut des femmes seulement en améliorant leur situation générale1. Bien qu'il soit admis partout que le contexte institutionnel et le développe- ment économique sont les éléments-clés d'une stratégie de développement durable, leur mise en place ne garantit pas l'égalité des sexes. Les politiques visant des changements institutionnels et le développement économique doi- vent tenir compte des inégalités fondées sur le genre en matière de droits, d'ac- cès aux ressources et d'influence politique, et étudier de quelles façons elles empêchent les personnes de participer au développement et d'en tirer profit. Même une démarche comportant l'amélioration des droits et des institu- tions et un développement économique peut échouer ou livrer, à court terme, de piètres résultats. Comme pour le développement, les efforts déployés pour faire respecter les droits fondamentaux tardent à produire des résultats. Les réformes institutionnelles préparent le terrain pour l'égalité entre les hommes et les femmes, mais les pratiques sociales de longue date, les coutumes discri- minatoires profondément ancrées, les faiblesses dans l'application de la loi et l'opposition politique souvent systématique gênent cette réalisation. 238 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 239 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Tableau 6.1 L'égalité en matière de droits et de croissance économique encourage l'égalité des sexes dans bien des domaines Inscription au niveau primaire, 1995 Inscription au niveau secondaire, 1995 1,05 1,01 0,99 0,96 0,99 1,0 1,0 0,96 0,90 0,86 femmes-hommes femmes-hommes Rapport Rapport 0,0 0,0 Forte Revenu Forte Revenu Faible Faible égalité en Faible élevé égalité en Faible élevé égalité en égalité en droits revenu droits revenu droits droits Espérance de vie, 1997 Représentation parlementaire, 1995 1,08 1,07 1,07 1,06 1,0 1,0 femmes-hommes femmes-hommes 0,19 Rapport Rapport 0,11 0,07 0,06 0,0 0,0 Forte Revenu Forte Revenu Faible Faible égalité en Faible Faible élevé égalité en élevé égalité en égalité en droits revenu droits revenu droits droits Note : Les données sont basées sur des simulations dérivées de résultats de régression multiples (chaque indice sur le PIB per capita, la racine du PIB per capita et exprimés en logarithmes) et sont tirées de Humana (1986, 1992). Les pays sont classés selon une moyenne du degré d'égalité en droits (la moyenne de trois indices qui reflètent l'état relatif des droits des femmes et des hommes pour l'économie, le droit, la politique et le mariage ou le divorce) et selon leur PIB per capita (en dollars US de 1995, ajusté en fonction du pouvoir d'achat) et en prenant 4000$ comme marqueur entre un faible revenu ou un revenu élevé. Pour l'inscription aux niveaux primaire et secondaire, les résultats expriment le rapport du taux d'inscription féminin sur le taux d'ins- cription masculin. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents. Source : Humana (1992); WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d). 239 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 240 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Dans ce contexte, il s'avère urgent d'intervenir au moyen de politiques et de programmes afin de : · promouvoir un accès égal, pour chaque genre, aux ressources de pro- duction et aux emplois; · réduire le fardeau familial des femmes et les coûts qui y sont associés; · offrir une protection sociale à l'aide de programmes qui tiennent compte des risques encourus par chaque genre et du degré différent de vulnéra- bilité de chacun; · renforcer la participation des femmes et leur influence dans le monde politique. De telles mesures semblent assez efficaces pour atteindre les objectifs fixés. Les gouvernements disposent de plusieurs moyens pour promouvoir l'éga- lité des sexes. Ils peuvent utiliser une politique de prix, procéder à une réforme légale, offrir des services mieux appropriés et investir dans des infra- structures bien choisies. Dans le chapitre I, on a exposé une très grande diversité de disparités fondées sur le genre à travers le monde. Si on veut agir avec efficacité, on doit s'adapter aux besoins spécifiques de chaque endroit. Par exemple, l'éradication des inégalités fondées sur le genre concernant l'éducation élémentaire est prioritaire en Asie du Sud, en Afrique subsaha- rienne, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, mais ce n'est peut-être pas le cas dans tous les pays en voie de développement. Même si l'approche générale préconisée est relativement réalisable, son application ­ surtout dans le cas de mesures énergiques ­ peut varier selon les régions. Puisque les situations peuvent différer d'un pays à l'autre, il est essentiel de bien comprendre l'état des relations et les inégalités fondées sur le genre dans un milieu donné. Il sera parfois nécessaire d'élever le débat au plan national. Les ressources financières d'un pays sont limitées, il faut donc bien calculer les coûts et les avantages des programmes et des politiques qui favorisent la cause de l'égalité. Nous traiterons, dans ce chapitre, de chacun des trois volets de la stratégie proposée : les réformes institutionnelles, le développement et la croissance économique, et les mesures politiques à adopter. Selon les données dispo- nibles, nous exposerons comment certains éléments de la stratégie peuvent atteindre les hommes et les femmes de façons différentes. Puisque les gouver- nements sont souvent limités dans leur budget, en ressources tant humaines que financières, nous exposerons des principes de base qui permettent de faire un choix éclairé parmi les mesures à privilégier. Nous nous inspirerons des conclusions du chapitre II sur le rôle de l'État ainsi que sur des études recon- nues du domaine économique. Nous préciserons jusqu'à quel point les pro- positions de mesures sont bénéfiques pour le développement et la promotion de l'égalité des sexes. Bien qu'il soit difficile d'établir si les mesures adoptées 240 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 241 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES auront les bénéfices escomptés, nous mettons en lumière les données dispo- nibles à ce sujet, ainsi que les données soutenant l'efficacité des systèmes publics ou privés de services. Nous conclurons ce rapport en donnant un aperçu des défis à relever dans la lutte pour l'égalité et en faisant un survol des recherches à prioriser en matière de politiques publiques. Des réformes institutionnelles pour établir des droits égaux et des opportunités économiques égales O BTENIR DES DROITS ÉGAUX POUR LES DEUX SEXES EST UN objectif primordial pour le développement. Lorsque les droits sont les mêmes pour chaque genre, les hommes et les femmes jouissent de pouvoirs égaux, et les mêmes opportunités économiques leur sont offertes. Dans ce contexte, l'égalité s'étend à d'autres domaines : la santé, l'éducation et la participation politique. Il est important de promouvoir des droits égaux dans toutes les régions du monde, mais c'est prioritaire en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, où l'on constate beaucoup d'inégalités fondées sur le genre au sujet des droits fondamentaux (voir le chapitre I). Afin de démontrer comment une plus grande égalité des droits peut influer sur d'autres domaines, on a calculé les effets de celle-ci sur l'inscrip- tion scolaire aux niveaux primaire et secondaire, sur l'espérance de vie et sur la représentation parlementaire (tableau 6.2). Ces extrapolations sont basées sur les modèles d'évaluation évoqués dans les chapitres III et V. Ces évalua- tions tiennent compte d'un indice portant sur l'égalité ses sexes en matière de droits, du PIB per capita, et du PIB per capita au carré (avec les variables exprimées en logarithmes; voir l'annexe II pour les résultats de régression). Grâce aux différents indicateurs, on peut faire des prédictions pour chaque pays selon deux méthodes : · en comparant le niveau d'égalité des droits de ce pays avec celui du meilleur pays de la région (valeur projetée); · en comparant ce niveau d'égalité avec la moyenne des pays de l'Orga- nisation pour la coopération et le développement économique (OCDE). Les moyennes des populations des valeurs projetées ont été calculées pour chaque région. On a procédé à partir des dernières données disponibles, cor- respondant habituellement au milieu des années 1990. Il faut apporter une précision au sujet de l'interprétation des résultats : à cause du nombre res- treint de pays dans chaque région, et si l'on tient compte du fait qu'on n'a pas pu obtenir les données de tous les pays (par exemple, on les a obtenues pour seulement 2 à 5 pays en Asie du Sud), la marge d'erreur reste assez 241 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 242 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 6.2 Impact simulé d'une plus grande égalité des droits en matière d'éducation, d'espérance de vie et de représentation parlementaire, par région Inscription au niveau primaire, 1995 1,2 1,0 femmes-hommes 0,8 Rapport 0,6 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles a,b Nordb Inscription au niveau secondaire, 1995 1,2 1,0 femmes-hommes 0,8 Rapport 0,6 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles Nord Réel Projeté OCDE (suite du tableau en page suivante) 242 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 243 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Tableau 6.2 (suite) Espérance de vie, 1997 1,2 1,1 1,0 femmes-hommes 0,9 Rapport 0,8 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienneb Pacifique Antilles Nord a,b Représentation parlementaire, 1995 1,0 0,8 0,6 femmes-hommes 0,4 0,2 Rapport 0,0 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsahariennea,b Pacifique Antilles a,b Nord a,b Réel Projeté OCDE Note : Voir l'annexe 1 pour connaître les pays concernés et des remarques d'ordre général et l'annexe 2 pour les résultats de régression sous-jacents et les définitions des termes utilisés. Les différences dans les moyennes régionales sont statistiquement significatives lorsque les données réelles et projetées diffèrent de 10 % ou plus selon : a. les données réelles et projetées; b. les données réelles et celles de l'OCDE Source : Humana (1992); WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d) 243 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 244 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE grande, ce qui abaisse l'importance des différences statistiques entre chaque scénario. Malgré ces imperfections, les résultats nous indiquent que des amé- liorations des droits et des revenus feraient réellement progresser les pays vers l'égalité des sexes. Le tableau 6.2 illustre les différences significatives. Les effets calculés sont obtenus à partir d'indicateurs, de comparaisons faites avec le meilleur pays de la région (valeur projetée) et de la moyenne obtenue dans les pays membres de l'OCDE. Dans les endroits où la comparaison avec la moyenne des pays membres de l'OCDE s'avère trop optimiste, il serait plus convenable, dans l'immédiat, d'utiliser la comparaison avec le meilleur pays de la région. En Europe, en Asie centrale, en Amérique latine et dans les Antilles, la comparaison avec le meilleur pays de la région convient mieux. Selon les deux scénarios, soit les meilleurs pays de la région et la moyenne de l'OCDE, les taux d'inscription scolaire aux niveaux primaire et secondaire deviennent plus égaux, la représentation parlementaire féminine augmente, et l'avantage des femmes concernant l'espérance de vie est plus accentué. Mais les changements prévus sont plus considérables en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Si l'on ajustait les résultats avec ceux du meilleur pays de la région, le taux de repré- sentation féminine au Parlement doublerait au Moyen-Orient et en Afrique du Nord et augmenterait de 60 % dans les deux autres régions. Le taux d'ins- cription des filles au niveau secondaire, par rapport à celui des garçons, aug- menterait de 8 % au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, de 6 % en Afrique subsaharienne et de 5 % en Asie du Sud. Les changements relatifs à l'inscription au niveau primaire et à l'espérance de vie sont négligeables. Si l'on compare les résultats avec la moyenne des pays membres de l'OCDE, l'égalité tend à progresser pour les quatre indicateurs, et dans cer- tains cas, les gains sont importants. On doit faire une exception pour l'Europe, l'Asie centrale, l'Amérique latine et les Antilles, où l'égalité des droits demeure plus élevée comparativement au meilleur pays de la région. Dans l'ensemble, ces extrapolations nous permettent de supposer que, lorsque les hommes et les femmes jouiront des mêmes droits, on atteindra presque la parité dans les inscriptions des garçons et des filles aux niveaux primaire et secondaire. Ce n'est qu'en Asie du Sud que des écarts entre les hommes et les femmes subsisteraient. Instaurer des droits égaux et des mesures de protection La réforme des lois constitue une étape cruciale vers une plus grande éga- lité des droits et l'instauration d'un contexte institutionnel qui appuie cette égalité. Comme nous l'avons mentionné au chapitre III, il existe encore, dans les pays en voie de développement, plusieurs lois qui maintiennent des droits et des statuts inégaux pour les femmes, ce qui entraîne des consé- 244 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 245 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES quences désastreuses pour leur autonomie, leur sécurité, leurs opportunités économiques et leur bien-être. Une réforme légale doit toucher plusieurs domaines. Nous en retenons cinq. Loi sur la famille. Qu'elle soit appuyée par une législation, des coutumes ou des lois religieuses, la loi sur la famille établit le degré d'autonomie et les pouvoirs respectifs des hommes et des femmes. Elle gère, entre autres, les droits concernant le mariage, le divorce, la garde des enfants, la propriété conjugale et l'héritage. Des inégalités inhérentes à la loi sur la famille affec- tent directement le bien-être des femmes et, parce qu'elles affaiblissent leur pouvoir au sein du ménage, elles affectent indirectement le bien-être de toute la famille. Une réforme éliminant les disparités sur le plan des statuts légaux préparerait une égalité réelle. Protection contre la violence. Dans certains pays, les lois protégeant les femmes de la violence contiennent des clauses qui les rendent inefficaces ou qui portent préjudice aux victimes. Il arrive souvent que des lois conçues pour lutter contre la violence définissent celle-ci de façon trop restrictive et exigent des preuves exagérées. Le premier objectif d'une réforme légale, dans ce contexte, consisterait à cerner et à éliminer ces défauts. Il est essentiel que les agresseurs soient punis plus sévèrement. Cette mesure a donné de bons résultats dans certains pays industrialisés. Droits fonciers. Il est important, pour plusieurs raisons, de légiférer pour assurer des droits et des pouvoirs égaux à chaque genre concernant les biens fonciers. Des droits précaires contribuent à réduire la productivité des fermes dirigées par des femmes, comme c'est le cas en Afrique subsaharienne, et empêchent les femmes d'accéder au crédit, car les terres sont souvent exigées en nantissement d'un prêt. Une réforme des lois sur la propriété qui prône- rait la propriété conjointe, ou qui permettrait aux femmes de détenir des titres de façon indépendante, améliorerait sûrement leur situation. Il faut absolument tenir compte, dans les lieux où le droit et la coutume fonction- nent parallèlement, de l'interaction possible entre les deux systèmes pour assurer le succès d'une réforme. Législation du travail. Des lois empêchant les femmes d'accéder à certains types d'activité ou limitant leurs heures de travail restreignent leur accès au marché du travail, même si elles prétendent assurer leur protection. De telles restrictions devraient être bannies des lois. Une législation portant sur des politiques d'emploi et de rémunération et offrant des chances égales à tous constituerait une base sur laquelle édifier des droits égaux et un régime de protection égal pour tous sur le marché du travail. Une telle législation aurait probablement peu d'effets dans l'immédiat parce qu'un grand nombre de femmes oeuvrent dans le secteur informel et parce qu'il est possible que l'ap- plication de ces mesures soit timide au début. 245 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 246 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Les droits politiques. Lorsque les hommes et les femmes jouissent de droits politiques égaux, ils ont un droit de parole équivalent et en viennent à exer- cer une influence égale dans la société. Dans la plupart des pays, les femmes ont déjà le droit de voter et d'occuper un poste politique. Il devient alors urgent d'octroyer ces droits à tout le monde. De la même manière, tout ce qui restreint la capacité des femmes à exercer ces droits doit disparaître. En plus d'édicter des lois assurant des droits égaux et une protection égale pour chaque genre, il est essentiel de bien préparer le contexte institutionnel, car il ne suffit pas de statuer. Dans certains pays en voie de développement, l'enga- gement en faveur de ces réformes et la capacité de les faire appliquer restent faibles, ce qui peut miner les efforts fournis. Des efforts pour renforcer la capa- cité des agences administratives et judiciaires d'un pays à appliquer ces réformes demeurent donc essentiels. Le leadership politique fait souvent la différence. L'aspect légal ne constitue qu'une partie de l'ensemble du contexte institu- tionnel, lequel comprend également les normes sociales et culturelles, les ins- titutions économiques (comme les marchés) et les services institutionnels, qu'il s'agisse de services de santé, d'éducation ou de systèmes financiers. Des démarches politiques s'appuyant sur les lois et l'économie et qui incitent les gens à éliminer les inégalités ont plus de chances de réussir que d'autres démarches qui compteraient uniquement sur la force de la loi. Établir des mesures éliminant la discrimination Par leur nature et leur structure, les institutions économiques peuvent autant promouvoir qu'empêcher l'égalité des sexes, et cela, de différentes façons. La structure des marchés, par exemple, détermine en grande partie les salaires respectifs des hommes et des femmes, le rendement des biens de production et les prix des marchandises et des services. Cela influence les décisions et les comportements des gens concernant le travail, l'épargne, l'in- vestissement et la consommation. Les hommes et les femmes ne sont pas influencés de la même manière. Bien qu'ils ne soient pas liés à la question du genre, les marchés de production et d'information ont toujours une inci- dence sur eux. Pourquoi en est-il ainsi ? Le contexte social affecte les per- sonnes susceptibles d'être en relation avec ces marchés et la relation elle- même. Dans presque tous les pays, lorsqu'on exclut des personnes des marchés, on applique des mesures discriminatoires. Ces mesures discriminatoires sont plus faciles à appliquer lorsque les mar- chés sont réduits ou non développés. Comme on l'a vu au chapitre V, des entreprises appelées à évoluer dans des marchés où règne la compétition font moins de discrimination à l'embauche et au salaire que d'autres entreprises, plus considérables, évoluant dans des endroits où la compétition est plus faible. Des politiques et des investissements visant à décourager la discrimi- 246 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 247 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES nation et à réduire les inégalités contribuent à renforcer les mesures incitant à une plus grande égalité des sexes sur le marché du travail. Mettre sur pied des services offrant un accès égal aux ressources Des services comme les systèmes scolaires, les soins de santé, les institu- tions financières et les services d'aide agricole sont en mesure de promouvoir un meilleur accès aux ressources pour chaque genre, s'ils tiennent compte de leurs différences. Les services qui considèrent les besoins spécifiques des hommes et des femmes peuvent être vraiment efficaces, comme on le verra plus loin dans ce chapitre. Mais ces principes valent aussi pour d'autres ser- vices et interventions : · Des systèmes scolaires, qui ont su tenir compte d'aspects culturels importants comme la pudeur des jeunes filles, ou le désir des parents qu'elles soient éduquées par des professeurs féminins ou qu'elles fré- quentent des établissements unisexes, ont réussi à accroître la scolarisa- tion féminine, même dans des milieux particulièrement conservateurs. · Des centres de santé ayant un personnel féminin ont encouragé les femmes à recourir davantage à ces services. · Des programmes de prêts à des groupes misant sur la responsabilité ont permis à un grand nombre de femmes ­ qui ne possédaient pas de garan- ties traditionnelles comme des biens fonciers ­ d'obtenir des prêts. · Des programmes de recherche et de services de soutien agricole tenant compte des différences entre les sexes dans le choix des cultures, des dis- parités quant à l'accès aux ressources et des restrictions d'ordre culturel limitant les interactions hommes-femmes ont permis à beaucoup de femmes d'accéder à la formation et aux nouvelles technologies. Vers un développement économique qui incite à participer davantage et à partager les ressources L E DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE EST AVANTAGEUX POUR chaque genre car, en plus d'accroître la production, il crée de nou- veaux emplois et il permet d'augmenter les revenus et d'élever le niveau de vie. Dans la plupart des contextes, il contribue à réduire les inégalités fondées sur le genre. En augmentant la productivité du tra- vailleur, le développement économique favorise le rendement (privé) des femmes ­ c'est-à-dire que les familles sont davantage portées à investir dans l'éducation des filles et à autoriser le travail rémunéré des femmes. Les investissements dans les infrastructures comme les moyens de transport et l'approvisionnement en eau et en énergie qui accompagnent le développe- 247 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 248 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ment, de même que l'élargissement des marchés, contribuent à réduire le fardeau des femmes et à augmenter l'instruction des jeunes filles. Lorsque le développement économique permet d'augmenter les revenus et de réduire la pauvreté, il est normal que l'écart entre les hommes et les femmes concernant l'éducation, la santé et l'alimentation se rétrécisse. Lorsque des familles à faible revenu sont forcées de réduire les dépenses en éducation, en santé et en alimentation, ce sont surtout les femmes et les adolescentes qui en subissent les contrecoups. Mais lorsque les revenus sont à la hausse, on se remet à dépenser dans ces secteurs, et ce sont les femmes et les adolescentes qui en profitent. Jusqu'à quel point la croissance économique et le développement peu- vent-ils avoir un impact sur les inégalités fondées sur le genre ? Dans quelles régions cela peut-il se produire ? L'analyse de résultats projetés révèle trois tendances (tableau 6.3) : · En ce qui concerne l'instruction primaire et secondaire ainsi que l'es- pérance de vie, ce sont les régions les plus pauvres qui profiteraient davantage de la croissance des revenus, c'est-à-dire l'Asie du Sud et l'Afrique subsaharienne. L'effet serait minime en Asie de l'Est, dans la région du Pacifique, en Europe de l'Est, en Asie centrale, en Amérique latine, dans les Antilles, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Cela confirme le modèle d'évaluation sous-jacent (voir l'an- nexe II), voulant que les effets d'un accroissement des revenus se fas- sent davantage sentir là où les revenus per capita sont peu élevés, mais que cet effet est moindre lorsque le revenu national est à la hausse2. · L'impact des revenus élevés se fait davantage sentir dans le domaine de la scolarisation que dans celui de l'espérance de vie. Parmi les trois indicateurs, c'est au niveau de l'éducation secondaire que la croissance des revenus semble faire augmenter l'égalité des sexes. Si l'on observe le scénario projeté, le taux d'inscription des filles au secondaire, par rapport aux garçons, augmente de 11 % en Asie du Sud; et il aug- mente de plus de 16 % en Afrique subsaharienne. Si on les comparait avec la moyenne des pays membres de l'OCDE, on obtiendrait une augmentation de 26 % dans ces deux régions. · Pour qu'il y ait une amélioration notable de l'égalité des sexes concernant la représentation parlementaire, il faudrait que l'augmentation des reve- nus soit considérable. Dans les simulations, les chiffres de l'Asie du Sud et de l'Afrique subsaharienne suggèrent même qu'une augmentation des revenus pourrait signifier une perte de voix au Parlement. Cela indique que la représentation parlementaire féminine est relativement élevée dans certains États à faibles revenus, comme le Bangladesh, la Chine, le Nicaragua et l'Ouganda. Comme les simulations tiennent compte de 248 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 249 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Tableau 6.3 Impact simulé d'un revenu plus élevé sur l'éducation, l'espérance de vie et la représentation parlementaire, par région Inscription au niveau primaire, 1995 1,2 1,0 femmes-hommes 0,8 Rapport 0,6 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles Nord Inscription au niveau secondaire, 1995 1,2 1,0 femmes-hommes 0,8 Rapport 0,6 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles Nord Réel Projeté OCDE (suite du tableau en page suivante) 249 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 250 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 6.3 (suite) Espérance de vie, 1997 1,20 1,14 1,08 femmes-hommes 1,02 Rapport 0,96 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienneb Pacifique Antilles Nord Représentation parlementaire, 1995 1,0 0,8 0,6 femmes-hommes 0,4 0,2 Rapport 0,0 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienne Pacifique Antilles b Nord b Réel Projeté OCDE Note : Les tableaux résument les impacts simulés de différents scénarios de croissance économique sur le genre dans les pays en voie de développe- ment. Le scénario projeté est basé sur le revenu per capita et le scénario OCDE sur la moyenne des revenus de l'OCDE. Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et une remarque d'ordre général, l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents et le lexique pour la définition des termes utilisés. Les différences dans les moyennes régionales sont statistiquement significatives lorsque les données réelles ou projetées diffèrent de 10 % ou plus selon : a. les données réelles et projetées; b. les données réelles et celles de l'OCDE. Source : Humana (1992); WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d) 250 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 251 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES l'égalité des sexes en matière de droits, il est possible que cette découverte ne corresponde pas à une relation entre la croissance économique et les droits. Elle correspond peut-être à un facteur pour lequel on manque de données ­ comme la participation à la vie civile, par exemple3. Il est reconnu que la croissance des revenus et le développement économique contribuent à promouvoir l'égalité des sexes. Mais ce n'est pas la croissance elle- même qui a le pouvoir d'éliminer les inégalités, même lorsque les revenus sont plus élevés. Dans les régions défavorisées, on peut apprécier les bénéfices dus à une croissance économique seulement à long terme. Les simulations présentées ici semblent indiquer qu'une société qui promulgue des droits égaux pour les deux sexes et qui favorise le développement économique réussit davantage à réduire les inégalités qu'une société qui s'intéresserait uniquement aux droits ou au développement. Il faut se montrer prudent lorsqu'on compare les effets d'une augmenta- tion de l'égalité des sexes en matière de droits et ceux d'une hausse des reve- nus au niveau national. Les actions à entreprendre et le degré d'efforts à déployer ne sont pas les mêmes dans les deux cas. Lorsque, dans les simula- tions, on examine de plus près l'amélioration des droits et l'accroissement des revenus, on obtient des informations intéressantes sur les rôles que jouent les droits et les revenus dans les questions touchant le genre : · La croissance des revenus semble avoir joué un rôle plus déterminant que l'amélioration des droits pour des inscriptions scolaires mieux réparties entre les sexes aux niveaux primaire et secondaire en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne (tableau 6.4). Le même phénomène s'est produit concernant l'inscription au secondaire en Asie de l'Est et dans la région du Pacifique. Par contre, c'est l'amélioration des droits qui a joué le rôle le plus important dans la promotion de l'égalité des sexes en matière d'éducation en Europe de l'Est, en Asie centrale, en Amérique latine, dans les Antilles, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. L'amélioration des droits a été particulièrement importante au Moyen-Orient et en Afrique du Nord4. · En ce qui concerne l'espérance de vie, l'amélioration des droits aurait eu des effets plus importants que l'accroissement des revenus dans la plu- part des régions, et cela, de façon spéciale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Mais ce sont les effets de la croissance économique qui prédominent en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne. · Comme dans le cas de l'espérance de vie, l'amélioration des droits, dans la plupart des régions, favorise plus la représentation féminine parle- mentaire que la croissance économique. À cause du niveau peu élevé d'égalité des droits en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, les effets produits par l'améliora- tion des droits sont remarquables. 251 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 252 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 6.4 Impact simulé d'un revenu plus élevé et d'une plus grande égalité des sexes en matière de droits sur l'éducation, l'espérance de vie et la représentation parlementaire, par région Inscription au niveau primaire, 1995 1,2 Projeté OCDE 1,0 femmes-hommes 0,8 Rapport 0,6 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienneb Pacifique Antillesa,b Nordb Inscription au niveau secondaire, 1995 1,2 Projeté OCDE 1,0 femmes-hommes 0,8 Rapport 0,6 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sud Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienneb Pacifique Antilles Nordb Réel Augmentation des revenus Augmentation des droits (suite du tableau en page suivante) 252 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 253 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Tableau 6.4 (suite) Espérance de vie, 1997 1,20 Projeté OCDE 1,14 1,08 femmes-hommes 1,02 Rapport 0,96 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sudb Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienne a,b Pacifiqueb Antilles Nord a,b Représentation parlementaire, 1995 1,0 Projeté OCDE 0,8 0,6 femmes-hommes 0,4 0,2 Rapport 0,0 Asie de l'Est Europe et Asie Amérique Moyen-Orient Asie du Sudb Afrique et région du centrale latine et les et Afrique du subsaharienneb Pacifique a,b Antilles a,b Nord a,b Réel Augmentation des revenus Augmentation des droits Note : Voir l'annexe I pour connaître les pays concernés et des remarques d'ordre général, l'annexe II pour les résultats de régression sous-jacents et le lexique pour la définition des termes utilisés. Les différences dans les moyennes régionales sont statistiquement significatives lorsque les données réelles ou projetées diffèrent de 10 % ou plus selon : a. les données réelles et projetées; b. les données réelles et celles de l'OCDE. Source : Humana (1992); WISTAT (1998); Banque mondiale (1999d) 253 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 254 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Les effets combinés d'une plus grande égalité des droits et de revenus plus élevés ne garantissent pas l'élimination des disparités fondées sur le genre, du moins à court terme. En Asie du Sud, les améliorations apportées aux droits et les augmentations de revenus ne semblent pas suffisants pour obtenir l'égalité en éducation (voir le tableau 6.4). Tandis qu'on semble pouvoir espérer une augmentation de l'égalité dans la représentation parlementaire grâce aux améliorations apportées aux droits et à un accroissement des reve- nus, on ne prévoit pas de parité, même s'il survenait des changements sub- stantiels sur le plan des droits et des revenus. Ce sont des facteurs extérieurs aux réformes institutionnelles et légales et au développement économique ­ les normes sociales, les us et coutumes ­ qui continuent d'entraver les trans- formations sociales et économiques nécessaires à l'élimination des inégalités. Prendre des résolutions pour corriger les inégalités concernant la maîtrise des ressources et l'influence politique À cause des lourdeurs et des limites des réformes institutionnelles et du processus de développement, des mesures pour promouvoir l'égalité des sexes s'imposent. Il s'agit de déterminer des actions précises afin de corriger des formes concrètes de discrimination et d'exclusion familiale, sociale et profession- nelle. Comme c'est le cas pour certaines réformes institutionnelles mention- nées antérieurement, ces mesures concrètes ont pour but d'assurer à chaque genre un accès et un pouvoir égal sur les ressources de production, une par- ticipation entière au marché du travail et à la vie sociale et une protection adéquate contre les risques liés aux crises économiques et aux réformes. Cependant, ces mesures doivent aller plus loin que les réformes institution- nelles, dont le but est de préparer le terrain, et doivent s'attaquer directement à l'élimination d'inégalités persistantes. Ces politiques énergiques comportent deux avantages : elles contribuent fortement à faire avancer la cause de l'égalité des sexes et elles permettent de cibler des groupes (celui des moins favorisés, par exemple) dans lesquels les inégalités sont les plus prononcées. On peut imaginer plusieurs sortes de politiques énergiques, mais ici, nous nous intéressons à quatre types d'interventions susceptibles de réduire les disparités décrites dans ce rapport, qu'elles soient perpétuées par les institutions sociales, les ménages ou l'économie. Plus précisément, cette section porte sur les interventions suivantes : 254 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 255 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES · promouvoir un accès égal, pour les deux sexes, aux ressources de pro- duction et aux emplois; · réduire le fardeau familial des femmes; · offrir une protection sociale appropriée à chaque genre; · renforcer la participation des femmes et leur influence dans le monde politique. Ce sont les quatre champs privilégiés d'intervention. Pour que chaque genre puisse participer au développement, il est essentiel qu'il ait un plein accès aux ressources de production ­ notamment à l'éducation ­ et aux emplois. Cet accès équitable influence aussi les jeux de pouvoir entre les hommes et les femmes. Lorsqu'on réduit le fardeau familial des femmes, on leur permet de participer pleinement aux activités de la société et de tra- vailler. Une sécurité sociale appropriée protège chaque genre des risques asso- ciés aux crises personnelles, familiales ou économiques, ou dues à des chan- gements politiques. En plus des mesures qui favorisent l'autonomie des femmes (comme l'accès à l'éducation et aux ressources de production), on doit instaurer des mesures qui peuvent renforcer l'influence des femmes dans le monde politique en leur permettant d'agir comme agents de changement et d'influencer le développement. La grille 6.1 expose une liste étendue, quoique non exhaustive, d'actions politiques possibles dans ces quatre champs; elles proposent des interven- tions pouvant aider les responsables politiques à réduire les disparités fondées sur le genre. Mais, devant un tel éventail de possibilités, les responsables poli- tiques doivent s'interroger : lesquelles de ces mesures doit-on privilégier, si l'on tient compte des restrictions budgétaires et des ressources administra- tives ? La section suivante offre quelques principes directeurs, inspirés d'un vaste corpus touchant à l'économie publique. Bien choisir les actions La mise en place de mesures énergiques comporte des coûts. Il importe donc de procéder stratégiquement, de choisir les interventions qui rapporteront un maximum de bénéfices avec un minimum de coûts. Comme les interventions les plus appropriées ne sont pas nécessairement les mêmes dans chaque milieu, ces choix doivent tenir compte des différences et des disparités fondées sur le genre, ainsi que des embûches prévisibles dans un milieu donné. Par exemple, une mesure permettant aux filles d'accéder à l'instruction élé- mentaire peut rapporter des dividendes importants dans les pays où persis- tent des inégalités quant à l'éducation, comme en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Mais de telles mesures seraient peu productives dans des pays où l'on a déjà atteint la parité ­ ou presque ­ dans la scolarisation des garçons et des filles, comme en 255 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 256 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Grille 6.1 Actions visant à promouvoir l'égalité des sexes Domaine visé Politiques possibles Vers un accès égal aux ressources de production et aux emplois Éducation Adapter les établissements scolaires et les corps enseignants au nouveau contexte culturel, de façon à accueillir les filles dans les écoles. Offrir des subsides visant des bénéficiaires précis: · Allocations, traitements, bourses d'études, bons de scolarité (comme au Bangladesh). · Allocations par tête, subsides selon le nombre de filles inscrites (comme au Pakistan). Ressources financières Réformer les institutions financières pour permettre aux femmes d'accéder à (épargne et crédit) l'épargne et au crédit en remplaçant les garanties traditionnelles, en simplifiant les procédures et en réduisant les déplacements (comme au Bangladesh et au Ghana). Offrir le soutien du trésor public ou d'organismes d'aide aux organisations non gouvernementales promouvant l'accès des femmes à la finance d'intermédiation (comme au Bangladesh). Emploi et marché du travail Implanter des programmes de discrimination positive pour le recrutement d'em- ployées dans le secteur public et les entreprises avec contrats gouvernementaux (comme aux États-Unis). Réduction du fardeau familial des femmes Droits et services Augmenter le pouvoir des femmes en accroissant leur maîtrise des ressources et concernant la natalité des emplois, et reconnaître leur droit de décider en matière de natalité (comme ci-dessus). Assurer aux femmes l'accès aux services essentiels en matière de natalité, incluant la planification familiale. Mise sur pied de campagnes d'information, s'adressant tant aux hommes qu'aux femmes, concernant la natalité et la planification familiale. Services de garderie Offrir des subsides pour les services de garderie, ainsi que des bons et des alloca- tions pour le développement des jeunes enfants. Le marché du travail Instaurer des bénéfices concernant la maternité incluant un congé de maternité payé, la garantie de ne pas être licenciée durant le congé, et des congés périodiques pour recevoir des soins. Offrir des congés de paternité payés aux pères (comme en Norvège). Offrir un soutien financier de l'État pour les congés de maternité à l'aide des reve- nus des taxes et des régimes de sécurité sociale (comme au Costa Rica). Utiliser des régimes d'assurance et d'autres mécanismes afin de répartir les coûts des congés de maladie entre tous les travailleurs (comme aux États-Unis). Investissements dans les Investir dans les projets d'approvisionnement en eau et en énergie et dans les infrastructures moyens de transport, spécialement dans les régions rurales. Faciliter l'accès aux établissements de santé et à d'autres services. 256 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 257 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Grille 6.1 (suite) Domaine visé Politiques possibles Offrir une protection sociale appropriée à chaque genre Travaux publics et création Créer un plan d'emploi public et d'autres réseaux de sécurité qui tiennent compte des d'emploi particularités de chaque genre dans les différents types d'emploi. Protéger les Offrir un soutien économique à court terme ­ sous forme de bourses d'études ou d'autres investissements dans le allocations ­ afin de limiter les pertes en éducation et en santé pour les enfants, spéciale- développement humain ment pour les filles, lors des crises économiques (comme en Indonésie). Sécurité des personnes Créer ou adapter des systèmes de pension qui tiennent compte des différences entre les âgées sexes en ce qui concerne les antécédents dans l'emploi et l'espérance de vie. Ces pen- sions doivent comporter : · des conditions d'éligibilité admettant que les femmes passent moins de temps sur le marché du travail; · un régime de rentes avec suite pour les survivants; · un minimum garanti de pension ou un autre mécanisme de distribution; · une indexation adéquate des prix; · un âge défini pour la retraite. Offrir (après examen des ressources) une aide financière aux veuves et aux femmes âgées qui n'ont pas droit aux régimes de pension (comme au Chili). Autres régimes d'aide ou Offrir des programmes de retour au travail qui tiennent compte des différences entre les d'assurance sociale sexes concernant l'instruction, les habiletés et les antécédents sur le marché du travail. Former des juges et d'autres personnes chargées de faire respecter les femmes et de les pro- téger contre la violence. Former des femmes aux affaires légales. Mettre sur pied des campagnes d'information et des programmes de traitement pour les hommes coupables de violence conjugale (comme en Argentine, au Canada, au Mexique, en Suède et aux États-Unis). Mettre sur pied des campagnes de santé publiques pour contrer les risques spécifiques liés aux taux de mortalité croissants. Renforcer la participation des femmes et leur influence dans le monde politique Place aux femmes en Réserver des places aux femmes dans les partis politiques et les assemblées sur les plans local politique et national (comme en Argentine, en Équateur, en Inde, aux Philippines et en Ouganda). Initiative d'un « budget Réviser les effets produits par les allocations du gouvernement sur l'accès des femmes aux pour les affaires reliées au ressources et aux services publics (comme en Australie, à la Barbade, aux îles Fidji, au genre » Mozambique, en Afrique du Sud, au Sri Lanka et en Ouganda). Soutenir des partenariats, entre les gouvernements et la société civile, qui promeuvent la prise de conscience dans les dépenses publiques et renforcent l'influence des femmes lors des prises de décisions politiques (comme en Afrique du Sud et en Ouganda). Participation des femmes Augmenter la participation des femmes et consulter des organismes féminins lors de dans la création de pro- l'élaboration d'interventions du gouvernement (comme en Inde). grammes Apporter un soutien lors des vérifications locales des mises en application des programmes du gouvernement (comme les organisations non gouvernementales le réclament en Inde). 257 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 258 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Europe de l'Est, en Asie centrale, en Amérique latine et dans les Antilles. Dans ces endroits, ce sont plutôt des mesures visant l'égalité face aux emplois et la promotion des femmes dans la sphère politique qui rapporteraient les bénéfices sociaux les plus importants. Il est absolument essentiel de tenir compte des questions relatives au genre avant d'appliquer les mesures; cela est nécessaire pour bien identifier les poli- tiques prioritaires et pour anticiper l'effet des interventions sur chaque genre. Des consultations publiques auprès de personnes de chaque genre aideraient sûrement les responsables politiques à mieux choisir leurs interventions. Ils pourraient ainsi répondre aux vrais besoins des gens. Voici quelques principes pouvant les guider dans leurs analyses et dans leurs choix : · La situation est-elle liée au sous-développement des marchés et nécessite- t-elle une intervention du gouvernement ? Si oui, des mesures éner- giques pour promouvoir l'égalité s'avéreraient particulièrement efficaces là où les marchés privés ne réussissent pas à répondre à la demande en termes de biens et de services, par opposition à d'autres circonstances où le gouvernement fournit les biens et les services que le secteur privé donne ou pourrait donner. Lorsque des actions corrigent des insuffi- sances de marché (que ces dernières soient dues à un manque d'investis- sement dans l'éducation des filles ou à un manque d'accessibilité aux emplois formels), elles contribuent à accroître le bien-être de la société dans son ensemble et font progresser la cause de l'égalité des sexes (voir le chapitre II). · Comment évaluer si les marchés sont sous-développés ou déficients et jusqu'à quel point une intervention du gouvernement peut y remédier ? Les coûts sociaux et les bénéfices des actions doivent être analysés afin de déterminer quelles sont les mesures qui favorisent l'égalité des sexes et le développement le plus efficacement. Lorsqu'ils évaluent l'ensemble des bénéfices et des coûts des interventions, les responsables politiques devraient tenir compte de facteurs connexes pouvant rendre leurs inter- ventions encore plus efficaces. Par exemple, de longues heures consacrées au transport de l'eau et du combustible ainsi qu'à la garde des enfants nuisent à la scolarisation des jeunes filles. Des investissements dans des infrastructures ou dans des garderies réduiraient ces contraintes et ren- draient plus efficaces les mesures axées sur la scolarité5. Il conviendrait également d'analyser les coûts et les bénéfices d'actions alternatives afin de s'assurer que la mesure choisie soit la plus efficace. · Quand une intervention est jugée pertinente, quelle est la meilleure façon de l'amorcer ? Il importe d'abord de discerner l'efficacité des interventions. Faut-il pallier un manque d'information ? Appliquer 258 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 259 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES un règlement ? Fournir des biens, des services, des subsides ? Parfois, le simple fait de rendre l'information accessible permet de corriger une insuffisance des marchés. Dans d'autres cas, la réglementation peut s'avérer une approche plus rentable. Lorsqu'il s'agit de fournir des biens ou des services, il faut s'interroger sur la convenance d'un financement public ou privé. Par exemple, des services de micro- financement en faveur des femmes ont connu plus de succès, et à moindres frais, lorsqu'ils étaient dirigés par des organisations non gouvernementales plutôt que par l'État (Morduch, 1999a). Il est éga- lement important de comparer des mesures ciblées à d'autres, non ciblées, sur le plan de l'efficacité et des coûts. Bien que nous disposions de tout un ensemble de preuves démontrant comment certains facteurs affectent l'égalité des sexes, nous devons quand même examiner les effets que peuvent produire certaines politiques précises. De plus, il existe relativement peu d'études sur les coûts et les bénéfices d'in- terventions particulières. Ceci est dû au fait que les bénéfices liés à l'égalité sont difficilement quantifiables et que les données permettant d'étudier le genre sont limitées. Il est donc nécessaire de compiler davantage de données et de procéder à leur analyse, ce qui permettrait aux responsables politiques de bien choisir les actions les plus efficaces dans un contexte donné6. Dans la prochaine section, nous traiterons d'un certain nombre de poli- tiques dont la liste apparaît dans la grille 6.1. Bien que l'efficacité de ces mesures ne soit pas prouvée dans l'ensemble, il faut tout de même agir, car les coûts de l'inaction sont trop élevés. Il reste qu'une meilleure compréhension des effets de ces interventions dans des situations précises constitue un impor- tant défi pour les responsables politiques. Cela leur permettrait de travailler efficacement sur l'égalité des sexes avec des ressources et un budget limités. Promouvoir l'égalité des sexes concernant l'accès aux ressources et aux emplois rémunérés Lorsqu'on élimine les disparités fondées sur le genre concernant l'accès aux ressources de production ­ qu'il s'agisse d'éducation, de crédit ou de biens fonciers ­ et aux emplois, les relations deviennent plus équitables et plus effi- caces. C'est un élément-clé de l'égalité des sexes. Nous avons traité des biens fonciers dans la section portant sur les droits fondamentaux. Ici, nous allons plutôt nous intéresser à des démarches visant une plus grande égalité dans l'accès à l'éducation, aux services financiers et aux opportunités d'emploi dans le secteur formel. L'éducation. Dans des pays où l'on fréquente peu l'école, les mesures ciblées et non ciblées permettent d'augmenter le taux d'inscription et de réussite des filles et des garçons. Puisque la scolarisation des filles dépend 259 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 260 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE davantage de facteurs comme les coûts, la distance et la qualité de l'ensei- gnement, des améliorations sur ces plans conduisent à un plus grand nombre d'inscriptions féminines (voir le chapitre IV). Par exemple, en Indonésie, dans les années 1980, lors d'une vaste opération en faveur de l'enseignement primaire universel, on a construit plusieurs écoles locales, ce qui a considé- rablement augmenté le nombre d'inscriptions, et celles des filles se sont mul- tipliées plus rapidement que celles des garçons puisqu'elles étaient moins nombreuses au départ. En réaménageant les dépenses publiques de façon à privilégier la scolarisa- tion de niveau primaire plutôt que les hautes études ­ sans favoriser un genre en particulier ­, on obtient une plus grande égalité. Dans les communautés rurales plutôt pauvres, peu de filles poursuivent leurs études au-delà du pri- maire. Dans les pays nouvellement industrialisés de l'Asie de l'Est, c'est parce qu'on a eu la bonne idée de consacrer au moins la moitié du budget de l'édu- cation à l'instruction élémentaire que l'on a enregistré une inscription uni- verselle au primaire et un taux élevé de poursuite d'études supérieures, tant pour les filles que pour les garçons (Banque mondiale, 1993)7. C'est encore des interventions bien ciblées qui ont permis à un grand nombre de femmes d'accéder à l'éducation dans certains pays. Comme nous l'avons mentionné au chapitre IV, au Bangladesh, un programme national fournit des bourses d'étude aux jeunes filles au niveau secon- daire, tandis qu'un autre projet, au Baluchistan (Pakistan), octroie des subsides à des écoles privées selon le nombre de filles inscrites. Dans les deux cas, on a pu augmenter les inscriptions scolaires des adolescentes (Banque mondiale, 1997; Kim, Alderman et Orazem, 1998, 1999). Nous savons maintenant que la scolarisation des femmes entraîne plu- sieurs bénéfices sociaux (voir le chapitre II). Selon des données provenant d'Égypte, d'Inde et du Pakistan, il est reconnu que, dans les pays où le degré d'instruction des femmes est peu élevé, ce sont les investissements en faveur de l'instruction des femmes qui rapportent le plus de bénéfices sociaux (Summers, 1992; 1994). Dans plusieurs cas, ces investissements n'auraient qu'un impact modeste sur les budgets. Une étude simulée por- tant sur l'Asie du Sud, le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord prévoit, par exemple, qu'une politique facilitant l'accès universel à l'école primaire ne signifierait qu'une légère augmentation des budgets déjà alloués à l'édu- cation (encadré 6.1). Dans l'étude portant sur l'Afrique subsaharienne, on prévoit un impact plus considérable sur les budgets, et on donne des moyens d'épargner grâce à des interventions qui tiennent compte du genre. Accès aux services financiers. Les institutions financières pourraient mettre l'épargne et l'emprunt à la portée des femmes. Il leur suffirait de créer 260 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 261 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Encadré 6.1 Les coûts budgétaires d'une instruction rables, ce qui exigerait une augmentation d'un tiers des de base universelle en Asie du Sud, en dépenses publiques en éducation. Pourquoi en est-il Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient ainsi ? La part déboursée par les familles pour l'éduca- et en Afrique du Nord tion primaire est beaucoup plus considérable et, par LES GOUVERNEMENTS PEUVENT PROMOUVOIR LES conséquent, le nombre d'inscriptions est moins élevé inscriptions à l'école primaire et réduire l'écart entre les que dans d'autres régions. hommes et les femmes en réduisant les coûts de l'ins- L'étude suggère également que des démarches bien truction, c'est-à-dire en octroyant aux familles des sub- ciblées pourraient se traduire par des épargnes considé- sides pour les frais de scolarité et les dépenses qui les rables au niveau du budget. Par exemple, en Asie du Sud, accompagnent. Mais quels effets une telle mesure pro- au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, si l'on ciblait duirait-elle sur les budgets gouvernementaux ? Dans une réduction des coûts des inscriptions féminines dans une étude simulée, basée sur des estimés de l'élasticité un plan d'accès universel à l'école primaire, on réduirait des prix de la scolarité (Schultz, 1987) et qui tient l'augmentation totale des coûts de 3 à 2%, en moyenne. compte de la part assumée par les ménages sur la tota- En Afrique subsaharienne, l'application d'une mesure lité des dépenses publiques et privées en éducation pri- semblable pourrait entraîner une réduction de 20% des maire (Banque mondiale, 1993), on prévoit que, dans dépenses publiques en éducation. plusieurs cas, l'effet sur le budget serait modeste. Si l'on tenait compte de la pauvreté dans le ciblage En Asie du Sud, au Moyen-Orient et en Afrique du des politiques voulant réduire les coûts de l'éduca- Nord, l'inscription universelle à l'école primaire, tant tion pour les ménages, on pourrait davantage réduire pour les garçons que pour les filles, augmenterait en l'augmentation budgétaire. En Afrique subsaha- moyenne les budgets de 3 %. En Afrique subsaha- rienne, les augmentations prévues diminueraient rienne, les effets sur le budget seraient plus considé- de 15 %. Source : Estimation de l'équipe de la Banque mondiale. Pour de plus amples détails, consultez l'annexe V. des services qui tiennent compte des contraintes et des besoins différents des hommes et des femmes quant à l'épargne et au crédit. Ces services pour- raient, par exemple, permettre aux femmes d'offrir des formes de garanties moins traditionnelles (comme le capital social, qui leur est plus accessible), simplifier les procédures bancaires et rendre l'épargne et le crédit plus acces- sibles pour les femmes qui ont une mobilité réduite. Une des plus importantes innovations à la portée des femmes dans le monde financier a été la mise sur pied de programmes de prêts accordés à de petits groupes. Dans ces programmes, comme ceux de la Grameen Bank et du Comité pour le développement rural du Bangladesh (BRAC), la pression que peut exercer le groupe de soutien remplace les garanties traditionnelles basées sur la propriété de terres, de biens immobiliers ou d'autres valeurs semblables. Les groupes reçoivent une formation qui les aidera à diriger leur entreprise. Certains de ces programmes ­ ceux de la Grameen Bank, par exemple ­ peu- vent conseiller les membres dans la gestion de leurs épargnes et, en échange d'une contribution volontaire, leur offrir divers types d'assurances. 261 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 262 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Certains chercheurs ont récemment mis en question la durabilité des ser- vices de micro-financement. Dans une étude, on suggère que les établisse- ments de micro-financement qui ont passé l'épreuve de la durabilité réussis- sent à couvrir seulement 70 % de leurs coûts (Morduch, 1999b). Les programmes dont il est question s'avèrent pourtant très efficaces pour conso- lider, pour les femmes, l'accès aux ressources financières (Kabeer, 1998; Khandker, 1998; Zaman, 1999). Au Bangladesh, l'analyse récente de quelques programmes de micro-financement suggère qu'ils constituent éga- lement un moyen peu coûteux de faire augmenter la consommation chez les ménages moins favorisés (encadré 6.2). En fait, des subsides relativement peu élevés remis par la Grameen Bank, au Bangladesh, ont permis à un grand nombre de femmes d'accéder au crédit et à d'autres services financiers (Khandker, 1998)8. Les programmes de micro-financement qui favorisent l'accès des femmes au crédit ont attiré beaucoup d'attention dans les dernières années. Mais il faut aussi reconnaître le travail d'autres institutions qui encouragent l'épargne des femmes, qu'elles aient ou non mis sur pied des programmes de crédit. Comme pour les personnes défavorisées, la mise sur pied de programmes d'épargne sûrs, fiables et adaptés aux besoins des femmes constitue pour celles-ci un moyen efficace de faire fructifier leurs revenus et de les mettre à l'abri des risques spécifiques, liés au genre, qu'elles encourent. L'épargne revêt une importance particulière pour les femmes dans des pays comme le Ghana ou l'Éthiopie, où les hommes et les femmes ne prennent pas de risques en commun (M. Goldstein, 1999; Dercon et Krishnan, 2000). L'épargne est un élément additionnel de sécurité pour les femmes âgées ou veuves. Politiques concernant le marché du travail. Dans les pays où les marchés sont bien développés et où les lois sont appliquées, des programmes d'em- ploi utilisant la discrimination positive peuvent apporter une plus grande égalité entre les sexes dans le secteur formel (Leonard, 1985, 1990; Rodgers et Spriggs, 1996; Holzer et Neumark, 1998, 1999). Même si le mouvement de discrimination à rebours a fait l'objet de critiques, on n'a pas pu prouver que les personnes embauchées grâces à ces programmes sont moins produc- tives (Holzer et Neumark, 1998, 1999). En fait, dans les endroits qui connaissent de sérieux problèmes de discrimination dans l'emploi, la discri- mination positive rapporte des bénéfices aux entreprises et à l'économie. Les programmes d'emploi exerçant une discrimination positive demeurent controversés. Ils peuvent être perçus comme une menace et comme une « discrimination à rebours ». Ils sont également une source de conflits chez les personnes favorisées : si on décroche un emploi par favoritisme, peut-être que cela signifie qu'on manque de qualifications, ce qui peut provoquer inconfort et ressentiment au travail. 262 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 263 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Encadré 6.2 Bilan des coûts et bénéfices de certains Programme et le CARE; enfin, un plan de création programmes de micro-financement et de d'emplois dirigé par le gouvernement : le Programme lutte contre la pauvreté au Bangladesh de développement pour les groupes vulnérables. UNE ÉTUDE RÉCENTE PORTANT SUR LES PROGRAMMES L'étude démontre que le programme de prêts de la de micro-financement au Bangladesh indique que Grameen Bank est financièrement plus avantageux ceux-ci sont des investissements efficaces pour la lutte que les autres programmes visant à accroître la contre la pauvreté et pour permettre aux femmes d'ac- consommation chez la classe moins favorisée (voir la céder aux services financiers (Khandker, 1998). Cette grille dans l'encadré). Par exemple, les coûts d'un étude, menée à partir des données d'un sondage réalisé prêt à la Grameen Bank, joints à une augmentation dans les campagnes du Bangladesh, fait le bilan des (de un taka) de la consommation per capita dans un coûts et bénéfices de quelques programmes de lutte ménage ­ même si l'on tient compte de subsides ­, contre la pauvreté. Parmi ceux-ci, on compte deux pro- sont encore plus bas que les coûts d'améliorations grammes de micro-financement soutenus par des orga- semblables qui proviendraient du Programme de nisations non gouvernementales : la Grameen Bank et développement pour les groupes vulnérables et des le Comité pour le développement rural du Bangladesh deux programmes de vivres contre du travail dans le (BRAC); deux programmes de crédit, dirigés par deux Bangladesh rural. Les deux programmes d'organisa- banques d'État pour le développement de l'agriculture : tions non gouvernementales ­ celui de la Grameen la Banque Krishi du Bangladesh (BKB) et la Banque Bank et celui du BRAC ­ se révèlent plus efficaces Rajshashi Krishi Unnasyan (RAKUB); deux pro- par rapport à leurs coûts que ceux du BKB et du grammes de vivres contre du travail : le World Food RAKUB, qui sont soutenus par le gouvernement. Des programmes efficaces et peu coûteux pour promouvoir la consommation chez les démunis Coût économique Bénéfices Bénéfices Programme de crédit Unité par taka emprunté Hommes Femmes Hommes Femmes Grameen Bank Taka 0,172 0,189 0,116 0,91 1,48 Comité pour le développement rural du Bangladesh (BRAC) Taka 0,444 0,172 0,125 2,58 3,55 Banque Krishi du Bangladesh (BKB) Taka 0,146 0,030 4,87 Banque Rajshashi Krishi Unnayan (RAKUB) Taka 0,098 0,030 3,27 Dollars par tonne Autres programmes Unité de grain Programme de développement pour les groupes vulnérables $/tonne 252 164a, 153b 1,54a, 1,65b Du-travail-pour-du-pain (World Food Programme) $/tonne 258 151a, 128c 1,71a, 2,02c Du-travail-pour-du-pain (CARE) $/tonne 299 114 2,62 (suite de l'encadré en page suivante) 263 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 264 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Encadré 6.2 (suite) femmes devraient surpasser de 38 à 63 % les coûts des prêts faits aux hommes avant que le rapport coûts- Les bilans des coûts et bénéfices des programmes bénéfices ne penche en faveur des hommes. Mais de la Grameen Bank et du BRAC indiquent que les dans l'étude détaillée des données sur les coûts des bénéfices nets des prêts consentis à des femmes sont prêts de la Grameen Bank (disponibles chez nettement plus élevés que ceux qui sont consentis à Khandker, Khalily et Khan, 1995), il apparaît qu'une des hommes. Tandis que, dans la grille, les analyses si grande différence n'est pas plausible. Par exemple, coûts-bénéfices reposent sur l'idée que les coûts sont même si l'on considérait tous les coûts de la forma- sensiblement les mêmes pour les hommes et les tion comme des conséquences des prêts consentis aux femmes, les données concernant les bénéfices relatifs femmes, cela ne les ferait monter que d'un faible font apparaître que les coûts des prêts consentis aux pourcentage. Note : Le Programme de développement pour les groupes vulnérables consiste en un plan de création d'emplois dans lequel on utiliserait des denrées ­ surtout des céréales ­ comme monnaie d'échange pour promouvoir l'activité indépendante des classes moins favorisées n'ayant pas droit à un programme. Ces programmes permettent à des travailleurs saisonniers de classes défavorisées de travailler durant la saison morte. Les taux des coûts-bénéfices ne doivent pas être interprétés dans le contexte d'une analyse exhaustive. Les coûts en question sont les coûts sociaux ­ incluant les subsides ­ encourus pour chacun des services financiers offerts aux clients. Mais les bénéfices sont mesurés à partir des effets sur la consommation per capita au sein des ménages, ce qui n'équivaut pas nécessairement à l'ensemble des bénéfices sociaux. Afin d'in- terpréter correctement les taux des coûts-bénéfices, il faudrait ajouter aux coûts sociaux l'augmentation de la consommation per capita dans les ménages. Pour de plus amples détails concernant l'efficacité par rapport aux coûts, consultez l'annexe C dans Khandker (1998). a. Les données proviennent du World Food Programme. b. Les données proviennent de l'Institut international de recherches sur les politiques alimentaires (IFPRI). c. Les données proviennent d'une étude réalisée par l'Institut du Bangladesh des études de développement et l'Institut international de recherches sur les politiques alimentaires (IFPRI). Source : Adaptation d'un texte de Khandker (1998). Les programmes de discrimination positive en matière d'emploi ne font pas qu'imposer des quotas à l'embauche; ils compliquent plusieurs tâches de l'employeur. Celui-ci doit déployer plus d'efforts pour recruter les employés, gérer des programmes de soutien plus adéquats, améliorer les procédures de sélection ainsi que les standards de l'embauche, de la rémunération et de la promotion. Aux États-Unis, des sondages ont révélé que la plupart des gens, même ceux qui sont opposés aux quotas dans l'embauche, ne s'opposent pas aux politiques d'élargissement du recrutement et de sélection des employés (Holzer et Neumark, 1998). Réduire le fardeau familial des femmes Dans les pays en voie de développement, les femmes travaillent généralement plus que les hommes car leur part de responsabilités et de temps consacré aux soins du ménage est plus considérable. Elles ont moins d'opportunités de tra- vailler ou d'avoir des revenus de façon indépendante, ce qui diminue leur pou- voir de négociation au sein du ménage. Elles disposent également de moins de temps pour leurs loisirs, leur repos et leurs soins personnels. Pour les adoles- centes, ces tâches signifient qu'elles ne peuvent fréquenter l'école assidûment. 264 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 265 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Des mesures politiques et des investissements dans les infrastructures, dont le but est de réduire le fardeau familial des femmes et des adolescentes, libè- rent celles-ci afin qu'elles se consacrent à d'autres activités génératrices de revenus. Elles facilitent également l'instruction des jeunes filles, améliorent leur niveau de vie et leur bien-être, tout en faisant avancer la cause de l'éga- lité des sexes. Droits et services concernant la natalité. Dans certains pays en voie de développement, les femmes ne peuvent pas prendre de décisions quant au nombre d'enfants qu'elles auront et à l'usage de moyens de contraception. De plus, l'accès à des services de santé et de planification familiale adéquats demeure limité dans de nombreuses régions. Bien qu'il soit difficile de cal- culer avec précision l'offre et la demande dans ce domaine, on estime que le nombre de femmes désireuses d'espacer les naissances ou de les limiter, mais qui n'utilisent pas de contraceptifs, oscille entre 120 et 150 millions (FNUAP, 1997). Cet élément affecte le fardeau familial des femmes. Il existe deux façons de permettre aux femmes de s'exprimer dans ce domaine. D'abord, des interventions politiques visant à accroître la maîtrise des femmes sur les ressources et les revenus augmenteraient leur influence à la maison, et donc leur capacité de décider en matière de contraception. Des niveaux plus éle- vés d'autonomie, de scolarisation, de salaire et de participation au commerce se traduisent par un usage accru de contraceptifs et une réduction de la natalité (Fairlamb et Nieuwoudt, 1991; Gertler et Molyneaux, 1994; Singh, 1994; Diamond, Newby et Varle, 1999; Mencarini, 1999; et Handa, 2000). Mais le fait d'accroître le pouvoir des femmes et de leur permettre de choisir en matière de natalité n'implique pas nécessairement qu'elles choisissent d'avoir moins d'enfants. On a même vu un cas au Bangladesh où, en voyant leur pouvoir accru grâce à un programme de micro-financement, des femmes qui oeuvraient dans des entreprises de type familial ont préféré avoir plus d'enfants, car elles les percevaient comme de la main-d'oeuvre potentielle (Khandker, 1998). Ensuite, même si elles jouissent d'un pouvoir accru, il est possible que des femmes ne puissent pas opérer de choix en matière de natalité, faute d'avoir accès à des services de planification familiale. Il est alors important de s'as- surer que les soins de santé généraux comportent des services de planifica- tion familiale accessibles et adéquats. Puisque les hommes et les femmes peu- vent avoir des idées différentes au sujet du nombre d'enfants qu'ils veulent et l'usage de contraceptifs, il est essentiel que les campagnes de formation et d'information s'adressent aux deux sexes. Soins des enfants et services de garderie. Des services de garderie à prix rai- sonnables permettent aux mères d'accéder au marché du travail. En Russie, dans une étude portant sur les impacts simulés des subsides pour garderies sur la déci- sion des mères de travailler, on a démontré que cette formule était plus avanta- 265 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 266 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE geuse, financièrement, que d'autres mesures, comme celle d'accorder un salaire à la mère au foyer (Lokshin, 2000). Des garderies à bas prix permettent égale- ment aux filles de rester à l'école. Comme on l'a vu au chapitre IV, au Kenya, lorsqu'on a réduit le prix des services de garderie, on a obtenu une augmenta- tion considérable de la scolarisation des filles âgées de huit à seize ans, en tenant compte d'autres facteurs (Lokshin, Glinskaya et Garcia, 2000). En plus d'être une mesure efficace sur le plan économique, la réduction des coûts de garderie comporte des avantages en termes d'éducation. Par exemple, s'il est vrai qu'il vaut mieux qu'un enfant en bas âge soit éduqué par plusieurs per- sonnes plutôt que par sa famille seule, des subsides accordés à la période présco- laire peuvent avoir des retombées positives. La preuve en a été faite dans les pays en voie de développement: si l'on investit dans des programmes semblables lorsque les enfants sont en bas âge, ces derniers développent davantage leurs facultés d'apprentissage, une meilleure santé et la capacité de gagner un salaire plus tard (Young, 1996)9. Dans la mesure où les services de garderie impliquent davantage d'investissements familiaux dans la scolarité des filles, ils encouragent également les efforts de développement national et améliorent l'égalité des sexes. Si les gouvernements décidaient d'appuyer économiquement les garde- ries et d'autres programmes de développement pour la petite enfance, serait-il préférable qu'ils apportent une aide directe ou qu'ils procèdent indirectement, au moyen de bons ou de bourses ? Les exemples, à ce sujet, sont limités et ambigus. Dans une étude réalisée dans quatre États des États-Unis, on n'a pas constaté de différences appréciables entre les insti- tutions à but non lucratif et celles à but lucratif, sauf dans un État où la réglementation en matière de garderies était relâchée (Cost, Quality & Child Outcomes Study Team, 1995). Dans cet État, les soins aux enfants étaient de moindre qualité dans le secteur à but lucratif, ce qui peut lais- ser entendre que la réglementation peut s'avérer importante pour la qua- lité des soins aux États-Unis. Dans les favelas de Rio de Janeiro, les éducateurs du secteur privé sont ceux qui offrent les meilleurs services et les horaires les plus flexibles (Deutsch, 1998). Cette étude fait apparaître que les coûts des services gouvernemen- taux sont plutôt élevés. Donc, les subsides accordés pour des soins privés (sous forme de bons) s'avèrent plus avantageux, au moins pour les familles à faible revenu de Rio de Janeiro, et favorisent le travail des femmes plus que ne le ferait un soutien donné aux services publics10. Politiques concernant le marché du travail. Comme nous l'avons vu au cha- pitre III, des gouvernements de pays en voie de développement ont déjà éla- boré des politiques formelles pour concilier emploi et maternité. Ces politiques comportent une législation sur les congés de maternité, prévoyant un congé payé (avec une compensation équivalant à une fraction du salaire), l'assurance 266 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 267 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES de ne pas être licenciée, des congés périodiques pour recevoir des soins, et un congé après la naissance. Certains pays développés vont encore plus loin et éta- blissent des politiques encourageant les pères à prendre un congé de paternité rémunéré, comme c'est le cas au Japon et aux États-Unis. En effet, certains pays ont déployé beaucoup d'efforts pour inciter les pères à prendre soin de leurs enfants. En Norvège, par exemple, on offre aux pères des congés non transférables aux mères, de sorte qu'ils les perdent s'ils ne les prennent pas. Ces politiques concernant le marché du travail sont souvent à double tran- chant, entraînant à la fois des avantages et des coûts pour les femmes. Par exemple, lorsque ce sont les entreprises qui supportent tous les coûts, elles peuvent développer une politique d'embauche défavorable aux femmes. Lorsque ce sont les femmes qui défraient les coûts, elles ne sont pas motivées à continuer à travailler (voir le chapitre III). Cependant, la création de poli- tiques énergiques vraiment adéquates concernant le marché du travail contribue à réduire le fardeau des femmes et les encourage à travailler. Par exemple, la façon dont un programme est financé influence autant les bénéficiaires que les contribuables. Des politiques qui répartiraient les coûts des congés de maternité entre les employeurs, les travailleurs et l'État accroî- traient les bénéfices pour les femmes et leur famille. Dans certains pays, au Costa Rica, par exemple, c'est l'État qui se charge d'une partie des coûts de ces congés grâce aux revenus produits par les taxes et au système de sécurité sociale. Puisqu'elle partage une partie des coûts avec les entreprises et les femmes elles- mêmes, cette façon de procéder a l'avantage de limiter les effets négatifs sur les emplois et les salaires des femmes. Une alternative serait que les congés de maternité figurent parmi les soins couverts par une assurance englobant les soins de santé en général, l'incapacité physique et les compensations aux tra- vailleurs. Puisque les hommes et les femmes sont menacés par des risques dif- férents liés à leur santé, les coûts qu'impliquent la grossesse et l'éducation des enfants seraient partagés de façon plus équitable entre les travailleurs masculins et féminins, tout en minimisant les effets sur les emplois des femmes. Investissements dans les infrastructures. Il est normal que le développement économique entraîne une amélioration des infrastructures. Mais des investisse- ments bien ciblés dans ces infrastructures ­ ayant pour conséquence d'épargner le temps des femmes et des filles ­ font avancer la cause de l'égalité des sexes concernant l'accès aux ressources et les opportunités économiques. Ils sont bénéfiques pour tout le monde, sans distinction pour le genre, mais ne com- portent pas exactement les mêmes avantages pour les hommes et pour les femmes. Par exemple, des investissements réduisant la distance du domicile à l'école (et donc les coûts en éducation) permettent d'augmenter l'inscription scolaire des filles, à la fois en termes absolus et comparativement aux garçons. Autre exemple: dans des régions rurales moins favorisées, l'absence d'infra- 267 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 268 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE structures adéquates se traduisent, pour les femmes, par de longues heures consacrées à la recherche d'eau et de combustible. Dans de telles situations, des investissements ciblés peuvent signifier, pour les femmes et les filles, une réduc- tion appréciable du temps attribué aux tâches domestiques. Il n'est pas nécessaire de cibler ces investissements selon le genre. Mais la prise en compte des bénéfices pour les femmes dans les calculs coûts-bénéfices permettrait d'élever le rendement des investissements, plaçant peut-être ce type d'investissement en tête des priorités des gouvernements en matière d'infrastructure. Et, en tenant compte des différences entre les sexes dans la mise en place des infrastructures, cela influencera sans doute l'orientation et la nature des investissements publics. Vers une sécurité sociale davantage axée sur le genre Les hommes et les femmes doivent faire face à des risques différents lors des crises économiques et des réformes politiques. Les femmes disposent de peu de ressources leur permettant d'absorber les secousses. Les hommes, de leur côté, en leur qualité de pourvoyeurs, sont particulièrement vulnérables au stress qu'en- traînent des changements importants et l'insécurité de l'emploi. Il est important de tenir compte des risques inhérents à chaque genre et du degré de vulnérabi- lité de chacun, car les hommes et les femmes d'un même ménage n'encourent pas nécessairement les mêmes risques (encadré 6.3). Les filets de sécurité sociale. Dans le cas où les filets de sécurité sociale ou d'autres programmes ne tiendraient pas compte des différences spécifiques des sexes, cela pourrait avoir des impacts importants sur chaque genre. Par exemple, certains programmes de réinsertion dans le monde du travail qui ne tiennent pas compte des occupations privilégiées par chaque genre excluent indirecte- ment les femmes. Ce sont les programmes sociaux de protection qui tiennent compte des demandes de service et des risques différents liés à chaque genre qui offrent la meilleure protection aux hommes et aux femmes. On pourrait don- ner plusieurs exemples concrets: les programmes de bourses d'études ou de dis- penses de frais pour certains services comportant des traitements qui diffèrent selon le genre; les programmes de formation pour les personnes sans emploi qui considèrent les différences entre les sexes en ce qui concerne l'instruction, les compétences et les différents profils d'emploi. Protection des personnes âgées. Si l'on se fie aux tendances démogra- phiques actuelles, les femmes âgées feront l'objet d'une vulnérabilité crois- sante au cours du XXIe siècle. Les femmes vivent généralement plus long- temps que les hommes et, dans la plupart des régions, elles restent veuves plus longtemps. Les veuves et les femmes âgées vivant seules sont générale- ment plus pauvres que les hommes (voir le chapitre I)11. 268 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 269 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Encadré 6.3 Une sécurité sociale adéquate pour les on oublie trop facilement que ces problèmes affectent le hommes et les femmes bien-être de toute la famille. Dans le domaine de la prévention de la violence DANS L'ÉLABORATION D'UNE POLITIQUE DE SÉCURITÉ sociale vraiment appropriée pour chaque genre, plu- conjugale, on réclame des mesures politiques qui tou- sieurs raisons nous incitent à choisir des mesures qui chent les hommes et les femmes. Il est important de tiennent compte de la vulnérabilité et des risques parti- bien cerner les causes socio-économiques qui poussent culiers aux femmes. Comme nous l'avons déjà démon- les hommes à violenter les femmes, et de protéger et de tré dans ce rapport, les femmes ont moins de recours soutenir les victimes de cette violence. Certains pays, que les hommes en temps de crise économique. Lors comme l'Argentine, l'Australie, le Canada, le Mexique, d'une récession, les femmes sont les premières et sont la Suède et les États-Unis, ont déjà mis sur pied des pro- plus nombreuses que les hommes à perdre leur emploi, grammes de soins et de thérapies pour les agresseurs et cela, autant dans le secteur public que dans le secteur (Heise, Ellsberg et Gottemoeller, 1999). privé. Enfin, parce qu'elles vivent plus longtemps que Une attention spéciale doit être accordée au problème les hommes et qu'elles ont un accès restreint aux res- de l'inscription scolaire des garçons et des filles dans cer- sources, elles sont particulièrement vulnérables à la tains pays. Dans certaines parties d'Amérique latine et pauvreté lorsqu'elles vieillissent. dans les Antilles, le décrochage scolaire des garçons Dans l'élaboration de mesures de protection sociale, devient un problème. En Colombie, ce phénomène on a tendance à s'intéresser davantage aux problèmes révèle le scepticisme des jeunes dans le contexte d'une des hommes. Par exemple, on s'est intéressé à la baisse guerre civile: ils ne croient plus que l'éducation leur assu- de l'espérance de vie des hommes pendant les écono- rera un meilleur avenir. En Amérique latine et dans les mies de transition en Europe de l'Est. On tend à insis- Antilles, il y a plus de filles que de garçons aux études. ter davantage sur les risques (chômage, augmentation Dans ces pays, il est possible que la situation requière des de l'alcoolisme, etc.) qui menacent les hommes. Mais interventions ciblant davantage les garçons. Lorsque des mesures renforcent la maîtrise des femmes sur les ressources de production en général et sur les droits fonciers et l'épargne en particulier, celles- ci sont moins vulnérables dans leur vieillesse. Mais quand les mécanismes infor- mels deviennent désuets, il est important d'en développer d'autres ­ formels ­ afin d'assurer leur protection (voir le chapitre III). Plusieurs pays procèdent à des réformes de leurs programmes de sécurité sociale; ils offrent une meilleure protection aux femmes âgées en tenant compte des différences fondées sur le genre concernant les salaires, l'expérience de travail et la longévité. Comme les femmes tendent à rester moins longtemps que les hommes sur le marché du travail, des programmes de protection exigeant moins d'années de contribution leur offriraient une meilleure protection vieillesse. Les condi- tions de distribution pourraient être basées sur la résidence ou calculées selon les années d'emploi, mais jamais sur des mesures «tout ou rien» requérant d'avoir travaillé toute sa vie dans un marché formel. Dans de nombreux pays, l'âge de la retraite survient plus tôt pour les femmes que pour les hommes. Cela implique que les femmes cessent de travailler plus tôt que les hommes et recevront des pensions moins élevées, puisqu'elles auront contribué moins longtemps à un programme de protection. Elles sont aussi sus- 269 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 270 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ceptibles de vivre au-delà de la période prévue d'allocation. Si leur pension n'est pas indexée à l'inflation, il est probable que leur niveau de vie connaisse une baisse considérable, puisqu'elles vivent généralement plus longtemps que les hommes. Mais même si leur pension était indexée à l'inflation, le niveau de vie des femmes âgées connaîtrait une baisse comparativement à celui des jeunes tra- vailleurs, à moins que cette pension augmente en fonction des salaires. Puisque les femmes gagnent moins d'argent que les hommes, la garantie de pension minimale, les bénéfices aux survivants et les rentes conjointes peuvent assurer aux femmes un minimum d'avantages (encadré 6.4). Enfin, étant donné que de nombreuses femmes oeuvrent à l'extérieur du secteur formel ou ne travaillent pas, l'élaboration d'un système de protection vieillesse pour fournir plus d'aide aux groupes défavorisés peut aider les femmes âgées12. Encadré 6.4 Programme de protection pour les per- vailler dans les mêmes conditions que les cinq années pré- sonnes âgées au Chili cédentes, cela augmenterait leur rente mensuelle à 43% de celle des hommes. CERTAINS ÉLÉMENTS D'UN SYSTÈME FORMEL DE On exige des maris qu'ils se procurent une rente retraite ­ tels l'âge de la retraite, le fait de recevoir une rente conjointe au moment de la retraite ou qu'ils retirent leurs de survivant, les conditions d'admissibilité à la garantie de économies au cours de leur vieillesse et de celle de leur pension minimale (GPM) et à l'assistance sociale ­ produi- épouse. La rente doit être indexée à l'inflation afin de sent des effets importants sur les revenus des femmes et des conserver son réel pouvoir d'achat avec le temps. Ainsi, en hommes âgés. Le Chili a un système de pension à plusieurs cas de veuvage, l'épouse recevra une pension de survivante, volets, dont le principal consiste en une contribution défi- qui lui assurera une rente équivalant à 60% de ce qu'aurait nie. Les travailleurs contribuent à un fonds d'épargne et ils reçu le mari. Si la veuve recevait sa propre pension en plus reçoivent une pension à leur retraite. de la rente de survivante, ses bénéfices s'élèveraient à 89%. La femme moyenne n'ayant pas complété son cours pri- Les mêmes situations se reproduiraient pour des groupes maire et se retirant à 60 ans ­ l'âge de la retraite pour les sociaux plus aisés, sauf que les chiffres seraient plus élevés femmes ­ a normalement accumulé un fonds d'épargne de en raison des contributions supérieures au cours des années retraite équivalant à 36% de celui d'un homme, lequel se actives. Toujours à cause de ces contributions plus élevées, retire à 65 ans, l'âge de la retraite pour les hommes (Cox- la garantie de pension minimale n'affecterait pas les pen- Edwards, 2000). Cette différence s'explique par les inégali- sions des hommes et des femmes de cette classe. tés fondées sur le genre touchant les salaires et les années En plus de ce régime de retraite basé sur l'emploi, le d'expérience sur le marché du travail. Puisque les femmes Chili finance un régime d'aide sociale appelé PASIS. Ce vivent plus longtemps que les hommes et que l'on tient régime, après examen des ressources, est destiné aux per- compte des taux de mortalité des deux sexes, leur fonds leur sonnes handicapées de plus de dix-huit ans et aux femmes donne une rente équivalant à seulement 29% de celle des pauvres de plus de 65 ans qui ne sont pas couvertes par hommes (voir le tableau en page suivante). une pension à laquelle elles ont contribué (Cox-Edwards, Que peut-on faire pour réduire ou éliminer ces inéga- 1999). Les bénéficiaires du plan PASIS représentent de 12 lités? Le Chili a mis sur pied une garantie de pension à 13% de l'ensemble des personnes âgées qui reçoivent minimale principalement destinée aux femmes à faible une pension. Puisque les personnes les plus pauvres et les revenu, ce qui fait monter leur rente mensuelle de 29 plus vieilles parmi les personnes âgées sont généralement à 35% de celle des hommes. Si l'âge de leur retraite pas- des femmes, ce sont surtout elles qui profitent du plan sait à 65 ans et si, entre 60 et 65 ans, elles pouvaient tra- PASIS, surtout dans les zones rurales. 270 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 271 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Encadré 6.4 (suite) Le système de retraite affecte la sécurité des hommes et des femmes du troisième âge Revenus mensuels de pension de retraite parmi les travailleurs ayant une éducation primaire incomplète (rapport femmes-hommes entre parenthèses) Revenu mensuel avant la retraite Hommes, pension personnelle Femmes, pension personnelle et du survivant (0,89) Femmes, pension personnelle (0,60) ou du survivant Femmes, pension personnelle (retraitées à 65 ans) (0,43) Femmes, pension personnelle (0,35) (ajustée selon le GPM) Femmes, pension personnelle (0,29) (retraitées à 60 ans) 0 20 40 60 80 100 120 140 En milliers de pesos Hommes Femmes Note : On suppose, selon ces chiffres, que les hommes prennent leur retraite à 65 ans et les femmes à 60 ans, les âges statutaires. GPM signi- fie une garantie de pension minimale assurée par l'État. Les calculs se réfèrent aux rentes mensuelles des contribuables en milieu urbain, sup- posant un taux de 5 % pour un retour de 2 % d'augmentation de salaire. On estime que les hommes survivent en moyenne quinze ans à par- tir du moment auquel ils prennent leur retraite (65 ans). Ils reçoivent une pension pour les survivants durant six ans, à 60 % de leur propre retraite. Si les femmes prennent leur retraite à 60 ans, on suppose qu'elles survivent 23 ans, et si elles se retirent du marché du travail à 65 ans, leur présumée survie est de dix-neuf ans. Les revenus se référant à la préretraite correspondent à la moyenne des gains mensuels au cours des dix dernières années de contribution au régime, calculée avec la moyenne du temps de service actif. Parce que les femmes travaillent en géné- ral plus que les hommes, la situation réelle de l'écart entre les sexes est plus prononcée que celle qui est calculée en gains mensuels et en horaires. Sous la rubrique « femmes, leur pension personnelle et celle du survivant », on suppose qu'une veuve touche sa propre pension et des redevances comme survivante à son mari. Mais lorsqu'une femme a déjà touché les sommes correspondant à ses contributions avant de devenir veuve, elle ne reçoit que les redevances de survivante. Source : Adapté d'un texte de Cox-Edwards (2000). 271 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 272 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Renforcer la participation et l'influence des femmes dans le monde politique Des mesures visant à augmenter l'influence des femmes dans le monde poli- tique et dans les prises de décisions peuvent avoir des répercussions considé- rables sur l'égalité des sexes, car c'est reconnaître que les femmes peuvent agir en leur propre nom. Une plus grande influence des femmes en politique et dans la vie publique ne peut qu'améliorer l'efficacité de certains programmes, réduire la corruption et consolider l'exercice de l'autorité (voir le chapitre II). Politique de réservation de postes aux femmes. Puisque le développement économique et d'autres facteurs élevant le statut de la femme n'exercent une influence qu'à long terme, il est nécessaire de recourir à des mesures favori- sant la participation des femmes en politique et dans les prises de décisions à court et à moyen terme. On mentionnait, dans le chapitre III, une mesure consistant à réserver aux femmes des postes dans les partis politiques ainsi que dans les assemblées locales et nationales. Plus de 30 pays ont adopté des mesures similaires, les modalités de la « réservation » pouvant varier d'un pays à l'autre (UNIFEM, 1998). Dans certains pays, un nombre fixe de sièges au Parlement est réservé aux femmes. Le tiers des sièges de l'assemblée locale (panchayat raj) en Inde leur sont réservés (Sen, 2000). Dans d'autres pays, les partis politiques fixent une pro- portion minimale de candidates aux élections parmi leurs membres. En Argentine, le tiers des candidats doivent être des femmes (Jones, 1996). Comme dans d'autres cas de discrimination positive, cette politique de réservation est controversée, même dans des organisations féminines (Sen, 2000). Tandis que certains groupes féminins appuient cette politique, la tolé- rant comme une mesure de transition, d'autres se disent préoccupés par la situation gênante qu'entraîne l'élection à un poste réservé. D'autres critiques soutiennent que ces mesures peuvent limiter l'avancement des femmes. Ils prétendent qu'elles contribuent à créer un plafond psychologique, ce qui rend plus difficile pour les femmes d'atteindre leurs objectifs. Il faut tout de même reconnaître que cette mesure de réservation a contribué à faire aug- menter considérablement le nombre des femmes dans les corps électoraux au cours des dernières décennies. Partenariats dans l'élaboration de politiques et de programmes. Consolider la participation des femmes sur la scène publique va bien au-delà d'une repré- sentation formelle au Parlement. Des efforts remarquables ont été fournis pour accroître l'influence des femmes dans les décisions politiques et dans l'exercice de l'autorité. Des pays comme l'Afrique du Sud, l'Australie, la Barbade, le Canada, les îles Fidji, le Mozambique, l'Ouganda, le Sri Lanka, la Suède et la Tanzanie ont récemment mis sur pied le «budget de la femme» (ou «budget au service du genre»), qui étudie les effets que peuvent produire sur chaque genre les budgets gouvernementaux et veiller à ce qu'on porte une plus grande atten- 272 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 273 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES tion à l'égalité lors des répartitions budgétaires. Contrairement à ce que le nom peut suggérer, il n'est pas question d'établir des budgets séparés pour les hommes et pour les femmes. Il s'agit plutôt de faire mieux comprendre les pro- blèmes soulevés par chaque genre lors de l'élaboration des budgets et d'amélio- rer l'accès des femmes aux ressources et aux divers services du gouvernement. Dans certains cas, l'initiative est venue des gouvernements. Mais dans d'autres cas, elle a été le fruit d'un partenariat innovateur impliquant le gouvernement et des groupes de la société civile. En Afrique du Sud, par exemple, des organismes de recherche non gouvernementaux, des organi- sations non gouvernementales (ONG) féministes et le Comité conjoint pour les finances collaborent pour évaluer les effets produits sur chaque genre par la taxation gouvernementale et les politiques de dépenses. Ils délibèrent sur les priorités dans les dépenses, et informent le public de l'élaboration des budgets (encadré 6.5). Encadré 6.5 L'influence des femmes dans les prises en démocratie, une ONG. À l'instar de l'initiative sud- de décisions : des initiatives en Afrique du africaine, cette initiative budgétaire coordonne les Sud efforts de parlementaires et de chercheurs provenant L'INITIATIVE D'UN « BUDGET DE LA FEMME », EN d'ONG. L'Assemblée des femmes parlementaires, deve- Afrique du Sud, a vu le jour lors d'une fructueuse ren- nue une force politique puissante en Ouganda, s'est ren- contre d'organisations non gouvernementales (ONG) due célèbre par des modifications apportées à la législa- et de membres du nouveau gouvernement élu de tion avec, entre autres, la clause statuant qu'au moins le l'après-apartheid. Les parlementaires étaient membres tiers des membres des comités exécutifs devaient être des du Comité conjoint pour les finances et du Groupe de femmes. Cette initiative a permis de développer une politiques économiques, tandis que les représentants meilleure compréhension des effets de la grande écono- des ONG étaient engagés dans la recherche sur les bud- mie sur les hommes et les femmes, car on s'est attardé gets et la politique en général. aux effets que produisent les ajustements structuraux sur Cette initiative souligne les aspects se rapportant au les femmes des classes défavorisées. genre dans le budget du gouvernement ­ comme la taxa- Une coalition d'organisations non gouvernementales tion, les dépenses, le budget ­ et permet de vérifier que continue d'attaquer un autre budget, commencé les allocations sont réparties équitablement entre les en 1997. Pour une étude menée par le Tanzania Gender sexes. Les trois premières réunions ont porté sur le pro- Networking Programme, la coalition scrute les budgets cessus budgétaire du Parlement national. La quatrième de la Commission de planification nationale et du s'est penchée sur le gouvernement local et a fait connaître ministère des Finances, elle étudie de quelles façons ces les résultats des recherches au peuple sud-africain pour processus affectent les dépenses du gouvernement en engager les citoyens dans le débat politique. matière de services essentiels, et les répercussions qu'ont L'expérience sud-africaine a inspiré la création d'un ces dépenses sur l'accès des hommes et des femmes aux budget au service des sexes d'une durée de trois ans en services de santé et d'éducation. La coalition expose ses Ouganda en 1997, lequel serait conduit par l'Assemblée conclusions dans un langage à la portée de la majorité des femmes parlementaires et le Forum pour les femmes des habitants de la Tanzanie. Source : Blackden et Bhanu (1999); Budlender (1999); TGNP (1999). 273 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 274 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE En plus de promouvoir une plus grande influence des femmes lors des prises de décisions au gouvernement central, une meilleure représentation féminine fait partie d'un plan de décentralisation du pouvoir en Inde, aux Philippines et dans certaines villes du Brésil, de la Bolivie et de l'Uruguay. Au Kerala (Inde), des efforts remarquables sont déployés afin d'octroyer des droits accrus aux femmes des classes défavorisées en leur accordant une plus grande participation à la vie publique et de plus importants bénéfices sociaux (Goetz, 1998). La participation accrue des femmes aux politiques gouvernementales est bénéfique pour la cause de l'égalité et un développement efficace. On a démontré, dans des études, que des projets connaissent un développement plus efficace lorsque des groupes de la société civile y participent (Isham, Narayan et Pritchett, 1995). Cependant, la participation de la société civile dans un pro- jet n'assure pas nécessairement la participation des femmes: il arrive parfois que celles-ci ne puissent pas faire entendre leur voix, même dans des assem- blées composées d'hommes et de femmes (Narayan, 1995; Graham, 1996). Pour cette raison, il est important de pouvoir compter sur des mesures spéci- fiques assurant la participation des femmes, comme des groupes féminins. Dans cette section, nous avons exposé les mesures d'action dont disposent les responsables politiques afin de promouvoir l'égalité des sexes. Plusieurs de ces interventions peuvent rapporter de nombreux bénéfices sociaux, de sorte que leur efficacité et le but visé justifient leur réalisation. Puisque les inéga- lités fondées sur le genre ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre, variant en nature et en étendue, il est essentiel d'examiner chaque réalité locale avant de décider quand et comment intervenir. Et comme ces interventions et ces programmes représentent des coûts en ressources, les dirigeants doivent être sélectifs et stratégiques en optant pour des interventions qui rapportent le maximum de bénéfices, tant pour la cause de l'égalité que pour celle du déve- loppement. S'il est vrai que l'action gouvernementale représente un coût, l'attention portée à la différenciation des sexes dans l'élaboration de telle ou telle politique peut se traduire par des coûts relativement modestes pour un progrès considérable dans la cause de l'égalité des sexes. Défis et voie de l'avenir L ES DONNÉES PRÉSENTÉES DANS CE RAPPORT SONT DE NATURE À inciter les gouvernements à intervenir en faveur de l'égalité des sexes. L'État, les différents groupes de la société civile et la communauté inter- nationale ont un important rôle à jouer dans la lutte contre la discrimination fondée sur le genre, afin que tous puissent en retirer des avantages. Dans cette situation critique, les responsables politiques sont appelés à relever d'impor- tants défis. 274 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 275 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES Une politique sur mesure, basée sur l'étude de la situation des hommes et des femmes L'étude approfondie des liens existant entre l'égalité des sexes et le déve- loppement constitue un défi de taille. Dans ce rapport, nous réunissons des données détaillées sur ces liens, mais il reste beaucoup à découvrir et à com- prendre. Il est même nécessaire de recueillir un plus grand nombre d'infor- mations de qualité et de comprendre en quoi elles touchent le genre : · Quelles conséquences spécifiques des programmes macro-économiques et sectoriels peuvent-ils entraîner pour les sexes ? Dans quelle mesure les choix à faire dans les dépenses publiques contribuent-ils à promouvoir ou à freiner l'égalité et une économie efficace ? Les responsables poli- tiques doivent faire face à plusieurs demandes pressantes de ressources publiques avec des budgets fiscaux et administratifs limités. En raison de ces contraintes, toutes les informations et les études pertinentes peuvent aider les gouvernements dans leurs choix d'interventions favorisant l'égalité entre l'homme et la femme. Comme les inégalités fondées sur le genre ne sont pas les mêmes dans toutes les sociétés, une politique vrai- ment efficace doit s'appuyer sur une réflexion correspondant aux véri- tables préoccupations des hommes et des femmes à ce sujet. · Quel genre de politique donne plus de pouvoir aux femmes ? Il est de plus en plus urgent d'évaluer dans quelle mesure les politiques et les pro- grammes influencent nos indicateurs habituels de développement comme l'éducation, la santé et la main-d'oeuvre. On pourra alors consta- ter comment une intervention particulière améliore l'autonomie des femmes, leur leadership et leur influence, et cela, dans les familles et dans la société en général. Il faudra ensuite analyser pourquoi une inter- vention s'avère plus efficace qu'une autre. Faire face aux nouveaux problèmes Les responsables politiques doivent relever un défi de taille : faire face à des situations sujettes à de rapides changements, et même les prévoir. De fait, certaines situations nouvelles requièrent de la part des acteurs et des cher- cheurs une plus grande attention au genre : · Le vieillissement de la population mondiale. À cause du déclin de la nata- lité et de l'augmentation de l'espérance de vie, la population mondiale vieillit. Ce phénomène devrait entraîner un nombre croissant de veuves sur la planète au cours du XXIe siècle. Quelles sont les conséquences de ce changement démographique sur les plans de la protection sociale, de la santé et d'autres domaines de la politique publique ? 275 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 276 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE · L'expansion du sida. Malheureusement, il faut s'attendre à ce que l'épi- démie du sida continue à s'étendre dans les pays en voie de développe- ment au cours des prochaines décennies. Les disparités fondées sur le genre ne peuvent qu'alimenter cette situation critique dans laquelle les femmes subissent la majorité des conséquences. De quelles façons des politiques tenant compte des inégalités parviendront-elles à endiguer l'expansion du sida et à réduire ses coûts en vies humaines ? · Mondialisation et information. La mondialisation et les nouvelles tech- nologies de l'information transforment l'organisation de la production et la transmission des informations dans le monde. Ces changements favoriseront-ils un progrès axé sur l'égalité des sexes ou élargiront-ils le fossé en matière d'opportunités économiques ? Comment ces nouvelles forces peuvent-elles être intégrées au service de l'égalité ? · Décentralisation et autonomie locale. Parallèlement à la mondialisation, dans plusieurs pays surgit un mouvement de décentralisation de l'auto- rité gouvernementale et des prises de décisions. Ce mouvement influence la distribution des services publics et le rôle de l'État dans le secteur privé, souvent avec des implications concernant l'accès aux res- sources et aux opportunités économiques et l'influence des hommes et des femmes dans le monde politique. Le mouvement de décentralisation favorise-t-il ou freine-t-il l'égalité des sexes ? Vers un partenariat élargi Dans la lutte pour l'égalité des sexes, les responsables politiques doivent relever un troisième défi : étendre leur partenariat à des groupes de la société civile et à des organismes d'aide sur le plan international. Les responsables politiques conservent un important leadership, mais le combat contre les inégalités fondées sur le genre doit prendre de l'ampleur avec la collaboration de divers organismes locaux et internationaux. Sur le plan international, les organismes d'aide apportent leur collaboration de différentes manières : en soutenant financièrement des études basées sur des informations détaillées concernant les différences fondées sur le genre; en incorporant les résultats de ces analyses dans leur dialogue avec les responsables politiques et en par- tageant les « bonnes pratiques » basées sur l'expérience internationale. De façon similaire, sur le plan local, des groupes de la société civile et des cher- cheurs locaux peuvent fournir des informations de première importance (basées sur l'ensemble des connaissances locales), ce qui contribuera à élargir et à approfondir le dialogue politique. En encourageant une plus grande participation et une transparence dans l'élaboration des politiques, on peut espérer d'énormes bénéfices, tant en faveur de l'égalité des sexes que du développement national. De plus, si l'on 276 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 277 UNE STRATÉGIE EN 3 VOLETS POUR PROMOUVOIR L'ÉGALITÉ DES SEXES invite les femmes à s'exprimer publiquement et à élaborer des politiques, on augmente leur pouvoir et on accroît l'efficacité de ces politiques et de ces programmes. N'oublions pas qu'une participation accrue des femmes dans la vie publique va de pair avec une diminution de la corruption. Cela soulève beaucoup d'intérêt et nous invite à poursuivre la réflexion. L'ensemble de ces considérations suggère qu'en augmentant l'échange des idées, en favorisant plus de transparence dans l'élaboration des politiques et en rendant possible une plus grande participation féminine dans le domaine public, on fortifie le gouvernement d'un pays et on renforce l'efficacité de sa politique de déve- loppement. Peut-on refuser de tels bénéfices ? Notes 1. Si on compare les sommets du rapport « faible éga- En d'autres termes, dans les pays où l'égalité des droits (ou des lité-revenu élevé » avec celui qui porte sur « égalité élevée-faible revenus) est élevée, les revenus (ou les droits) n'ont qu'un effet revenu », on ne peut pas affirmer que l'un est toujours plus secondaire sur l'égalité des sexes concernant l'inscription sco- élevé que l'autre. Les différences dépendent des indicateurs. laire. Des situations améliorées d'égalité ont obtenu des effets Selon des études simulées, les effets produits par les droits et les positifs sur les inscriptions scolaires uniquement lorsque les revenus dépendent également des méthodes d'évaluation des revenus per capita étaient inférieurs à 16 000 $US en 1995. inégalités et des régions concernées. Pour la représentation des hommes et des femmes au Parlement, la situation est inversée. L'égalité des droits et des 2. Dans les études simulées, on semble suggérer que revenus s'avère négative et l'interaction devient positive. Cela dans ces régions, l'accroissement des revenus n'aurait que de veut dire que lorsque l'égalité des droits (ou des revenus) est très faibles effets sur les indicateurs d'égalité dans les domaines de faible, une augmentation des revenus (ou des droits) ne pro- l'éducation et de l'espérance de vie. Mais grâce à des faits obser- meut pas l'égalité des sexes concernant la représentation parle- vés ailleurs dans ce rapport (voir les chapitres I et V), on mentaire. Une égalité accrue des droits (ou des revenus) a pro- indique que dans ces mêmes régions, des augmentations de duit des effets positifs sur la représentation parlementaire revenus chez les moins favorisés contribuent à réduire le fossé uniquement lorsque les revenus per capita dépassaient 600 $ entre les sexes quant à l'éducation et à la santé. en 1995. Ces résultats signifient que l'égalité des droits et l'éga- 3. Cela signale également les limites d'une telle analyse. lité des revenus sont complémentaires et se renforcent l'une Si l'analyse des données à un moment précis nous permet l'autre. Pour ce qui est de l'espérance de vie, les chiffres ne sont d'identifier les schémas des pays selon leurs revenus, elle ne pas significatifs. nous permet pas d'identifier leurs variations. Il est possible 5. Les services offerts en planification familiale devien- qu'on obtienne d'importants bénéfices en comparant les don- nent vraiment efficaces lorsque les femmes les demandent, et nées de longue date sur les droits et en analysant les effets pro- cela contribue à augmenter leur pouvoir dans la famille. duits par ces droits et ces revenus dans un cadre de données. 6. Il existe des méthodes d'évaluation des coûts et des 4. L'équipe de la Banque mondiale avait également bénéfices des interventions, comme l'analyse des pourcentages prévu un autre scénario, impliquant comme variables le revenu de retour et de l'efficacité par rapport au coût (consultez, par per capita, la moyenne des droits de chaque genre ainsi que l'in- exemple, Squire, 1989; et d'autres études comprises dans van teraction des deux. Les résultats se sont avérés ambivalents. En de Walle et Nead, 1995). Il faut reconnaître que certains béné- ce qui concerne l'inscription scolaire, l'égalité des droits et des fices sociaux ne sont pas faciles à mesurer au moyen du pour- revenus a produit un effet positif significatif sur l'égalité entre centage de retour et du rapport efficacité-coût. Il peut s'avérer les hommes et les femmes, tandis que leur interaction s'est avé- difficile de mesurer correctement certains phénomènes sociaux, rée négative et significative. Cela indique que lorsque l'égalité telle une plus grande capacité des femmes à participer à la poli- des droits et des revenus est plutôt faible, l'augmentation des tique. Il est plus facile de mesurer les coûts des interventions. revenus peut améliorer l'égalité quant à l'inscription scolaire. Lorsqu'on manque d'information sur les bénéfices, la somme 277 Chapitre 6 16/06/03 15:02 Page 278 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE des coûts reliés aux interventions peut éclairer les responsables portant sur le développement de la petite enfance laissent politiques dans leurs choix de politiques et dans l'établissement entendre que les taux des bénéfices de ce genre iraient de 1,7 de leurs priorités (Pradhan, 1996). à 3,1 (van der Gaag et Tan, 1998; Todd, Behrman et Cheng, 2000). 7. On peut également établir un lien entre les inscrip- tions au primaire et les dépenses consenties au niveau du cours 10. Les divergences de coûts et de bénéfices au secteur secondaire. Une étude réalisée au Ghana démontre qu'une aug- privé comme au secteur public, selon les règlements particuliers mentation des dépenses consenties pour le cours secondaire se de chaque endroit, nous font comprendre l'importance d'étu- traduit par de plus nombreuses inscriptions au primaire et un dier le contexte politique particulier de chaque endroit. encouragement à poursuivre les études (Lavy, 1996). 11. En plus de vivre plus longtemps, la plupart des 8. En guise d'illustration : en 1994, la Grameen Bank femmes épousent des hommes plus âgés qu'elles et sont moins recevait 6,3 millions de dollars de la part du gouvernement et nombreuses à se remarier à la suite d'un divorce ou du décès de d'organismes d'aide (Khandker, Khalily et Khan, 1995). Ce leur mari. Une proportion plus grande de femmes que soutien économique a permis de consentir des prêts à environ d'hommes vivent seules. Les divorces, les séparations et les 1,9 million de personnes, dont 1,8 million de femmes. Au décès affectent davantage les femmes que les hommes, car elles cours de la même année, le gouvernement du Bangladesh et des sont plus dépendantes de leur mari que les hommes le sont de organismes d'aide ont fourni ensemble la somme de 80,6 mil- leurs épouses (James, 1999). Une étude réalisée aux États-Unis lions de dollars en céréales à des programmes de denrées contre a même démontré que des hommes tirent un bénéfice écono- du travail, programmes qui n'étaient pas rentables économi- quement (gouvernement du Bangladesh, 1999; encadré 6.2). mique d'un divorce (Duncan et Hoffman, 1985). Cinq ans Même si la Grameen Bank et ces programmes de denrées ali- après un divorce, les revenus d'une femme au foyer baissent mentaires n'ont pas exactement le même but, l'estimation du de 71 %, tandis que les revenus de l'ex-mari connaissent une rapport coûts-efficacité suggère qu'une modification dans la hausse de 14 %. distribution des mêmes ressources serait plus efficace, ce qui 12. Dans les pays en voie de développement, la création augmenterait la portion de la Grameen Bank et diminuerait d'un système de protection durable pour les personnes âgées celle du programme de denrées. qui n'est pas basé sur les contributions des travailleurs cause 9. L'exemple des Philippines nous montre qu'un inves- plusieurs problèmes (Banque mondiale, 1994). Néanmoins, tissement de 1 $ en alimentation au moment de la petite une telle initiative pourrait contribuer à faire disparaître la enfance rapporte ultérieurement, en succès scolaire, des divi- fâcheuse coutume, dans les pays en voie de développement, dendes estimés à 5 $ sur le marché (Glewwe, Jacoby et King, voulant que les parents dépendent économiquement de leurs 2001). En Bolivie, des estimations de deux études différentes enfants durant leurs vieux jours. 278 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 279 ANNEXE I Remarque et pays concernés dans les tableaux Remarque L ES CHIFFRES CONCERNANT LES POPULATIONS CORRESPONDENT À des moyennes. Un rapport de 1,0 correspond à une égalité parfaite entre les hommes et les femmes. Pour une définition des termes, il faut consul- ter le lexique. La table utilisée pour mesurer le degré d'égalité entre les genres en matière de droits se trouve dans l'encadré 1.1. Pays concernés Voici la liste des pays dont il est question dans les différents tableaux. Résumé Tableau 1 Asie de l'Est et région du Pacifique: Cambodge, Chine, Corée du Nord, Corée du Sud, Hong Kong, Indonésie, Malaisie, Myanmar, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Philippines, Singapour, Thaïlande et Viêt-Nam; Europe de l'Est et Asie centrale: Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie, Tchécoslovaquie, URSS (jusqu'à 1991) et Yougoslavie (jusqu'à 1991); Amérique latine et les Antilles: Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, Équateur, Guatemala, Honduras, Jamaïque, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, République domini- caine, Salvador, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; Moyen-Orient et Afrique du Nord: Algérie, Arabie saoudite, Égypte, Iran, Iraq (jusqu'en août 1991), Israël, Jordanie, Koweït, Libye, Maroc, Oman, Tunisie et Yémen; Asie du Sud: Afghanistan, Bangladesh, Inde, Népal, Pakistan et Sri Lanka; Afrique sub- saharienne: Afrique du Sud, Angola, Bénin, Botswana, Cameroun, Côte 279 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 280 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE d'Ivoire, Ghana, Kenya, Malawi, Mozambique, Nigeria, Ouganda, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Tanzanie, Togo, Zaïre, Zambie et Zimbabwe; OCDE: Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle- Zélande, Pays-Bas, Portugal, Suède, Suisse, Turquie et Royaume-Uni. Tableau 2 Bangladesh, Bénin, Bolivie, Brésil, Burkina Faso, Cameroun, Colombie, Comores, Côte d'Ivoire, Égypte, Ghana, Guatemala, Haïti, Inde, Indonésie, Kazakhstan, Kenya, Madagascar, Malawi, Mali, Maroc, Mozambique, Namibie, Népal, Nicaragua, Niger, Nigeria, Ouganda, Ouzbékistan, Pakistan, Pérou, Philippines, République centrafricaine, République dominicaine, Rwanda, Sénégal, Tanzanie, Tchad, Togo, Turquie, Zambie et Zimbabwe. Tableau 3 Inscription au niveau primaire pays à faible revenu: Afghanistan, Bénin, Burkina Faso, Burundi, Côte d'Ivoire, Éthiopie, Gambie, Guinée, Inde, Kenya, Lesotho, Madagascar, Mali, Mauritanie, Nicaragua, Niger, Ouganda, Sénégal, Soudan, Tanzanie et Togo; pays à revenu moyen: Albanie, Algérie, Arabie saoudite, Bahreïn, Botswana, Bulgarie, Chili, Corée du Sud, Costa Rica, Cuba, Égypte, Guyane, Hongrie, Iraq, Jamaïque, Malaisie, Maroc, île Maurice, Mexique, Oman, Papouasie- Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pologne, Roumanie, Salvador, Sri Lanka, Swaziland, Syrie, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Uruguay, Venezuela; pays à revenu élevé: Australie, Autriche, Canada, Chine, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hong Kong, Irlande, Italie, Japon, Koweït, Malte, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Qatar, Royaume-Uni et Suède. Inscription au niveau secondaire pays à faible revenu: Afghanistan, Bénin, Comores, Côte d'Ivoire, Éthiopie, Gambie, Guinée, Inde, Kenya, Lesotho, Mali, Mauritanie, Nicaragua, Niger, Ouganda, Sénégal, Soudan, Tanzanie, Togo et Zimbabwe; pays à revenu moyen: Albanie, Algérie, Arabie saoudite, Bahreïn, Botswana, Chili, Colombie, Corée, Costa Rica, Cuba, Égypte, Guyane, Hongrie, Iraq, Iran, Malaisie, île Maurice, Maroc, Mexique, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Pologne, Roumanie, Salvador, Sri Lanka, Syrie, Swaziland, Thaïlande, Tunisie et Venezuela; pays à revenu élevé: Australie, Autriche, Canada, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hong Kong, Irlande, Islande, Israël, Italie, Japon, Koweït, Malte, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Qatar, Royaume-Uni et Suède. Espérance de vie pays à faible revenu: Afghanistan, Angola, Arménie, Azerbaïdjan, Bangladesh, Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cambodge, Cameroun, Chine, Comores, Corée du Nord, Côte d'Ivoire, Érythrée, Éthiopie, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée- 280 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 281 ANNEXE I Bissau, Haïti, Honduras, Inde, Indonésie, Kenya, Laos, Lesotho, Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Mongolie, Mozambique, Myanmar, Népal, Nicaragua, Niger, Nigeria, Ouganda, Pakistan, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Congo, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Tadjikistan, Tanzanie, Tchad, Togo, Turkménistan, Viêt-Nam, Yémen, Zambie et Zimbabwe; pays à revenu moyen: Afrique du Sud, Albanie, Algérie, Arabie saoudite, Argentine, Bahreïn, Barbade, Biélorussie, Bolivie, Botswana, Brésil, Bulgarie, îles du Cap-Vert, Chili, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Cuba, Djibouti, Égypte, Équateur, Estonie, îles Fidji, Gabon, Guadeloupe, Guatemala, Guyane, Hongrie, Iran, Iraq, Jamaïque, Lettonie, Liban, Libye, Lituanie, Malaisie, îles Maldives, île Maurice, Maroc, Mexique, Namibie, Oman, Panama, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pérou, Philippines, Pologne, Porto Rico, République dominicaine, Roumanie, Salvador, Sri Lanka, Surinam, Swaziland, Syrie, Thaïlande, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Turquie, Ukraine, Uruguay, Venezuela et Yougoslavie (Serbie/Monténégro); pays à revenu élevé: Allemagne, Antilles néerlandaises, Australie, Autriche, Bahamas, Belgique, Brunei, Canada, Chypre, Danemark, Émirats arabes unis, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hong Kong, Irlande, Islande, Israël, Italie, Japon, Koweït, Luxembourg, Macao, Malte, Martinique, Nouvelle-Calédonie, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Qatar, Réunion, Royaume-Uni, Singapour, Slovénie, Suède et Suisse. Représentation parlementaire pays à faible revenu: Angola, Bangladesh, Bénin, Bhoutan, Chine, Corée du Nord, Côte d'Ivoire, Cameroun, îles Salomon, Inde, Kenya, Madagascar, Mongolie, Nicaragua, Pakistan, île Saint Thomas et île du Prince, Togo et Zambie; pays à revenu moyen: Albanie, Argentine, Barbade, Bolivie, Botswana, Brésil, Bulgarie, îles du Cap-Vert, Corée du Sud, Costa Rica, La Dominique, Égypte, Équateur, Hongrie, Iran, Iraq, Jamaïque, Kiribati, Malaisie, Mexique, Panama, Paraguay, Pérou, Pologne, Roumanie, Sri Lanka, Syrie, Thaïlande, Tonga, Tunisie, Uruguay, Vanuatu et Venezuela; pays à revenu élevé: Australie, Autriche, Belgique, Canada, Chypre, Danemark, Émirats arabes unis, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Islande, Israël, Japon, Luxembourg, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Singapour, Suède et Suisse. Tableau 4 Asie de l'Est et région du Pacifique: Indonésie, Philippines et Viêt-Nam; Amérique latine et les Antilles: Bolivie, Brésil, Colombie, Guatemala, Haïti, Nicaragua, Paraguay, Pérou, République dominicaine; Moyen-Orient et Afrique du Nord: Égypte, Jordanie, Maroc et Yémen; Asie du Sud: Bangladesh, Inde, Népal et Pakistan; Afrique subsaharienne: Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Comores, Côte d'Ivoire, Érythrée, Ghana, Guinée, Kenya, Madagascar, Malawi, Mali, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, Tanzanie, Tchad, Togo, République centrafricaine, Zambie et Zimbabwe. 281 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 282 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 5 Afrique du Sud, Algérie, Argentine, Bangladesh, Barbade, Bénin, Botswana, Brésil, Cameroun, Chili, Chine, Colombie, Congo, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Égypte, Équateur, Espagne, îles Fidji, Gabon, Gambie, Ghana, Guatemala, Guinée, Guinée-Bissau, Guyane, Haïti, Honduras, Inde, Indonésie, Jamaïque, Kenya, Laos, Lesotho, Madagascar, Népal, Nicaragua, Niger, Nigeria, Ouganda, Pakistan, Philippines, République dominicaine, Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Singapour, Soudan, Sri Lanka, Tanzanie, Tchad, Thaïlande, Togo, Trinité-et-Tobago, Uruguay, Venezuela, Viêt-Nam, Zambie et Zimbabwe. Tableau 7 Algérie, Allemagne, Angola, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Autriche, Bahreïn, Bangladesh, Belgique, Bolivie, Botswana, Burkina Faso, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Colombie, Congo, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Danemark, Égypte, Émirats arabes unis, Équateur, Espagne, États- Unis, Finlande, France, Gabon, Ghana, Grèce, Guatemala, Guinée, Guinée- Bissau, Haïti, Honduras, Hongrie, Inde, Indonésie, Iran, Iraq, Irlande, Israël, Italie, Japon, Jordanie, Kenya, Koweït, Libye, Malaisie, Mali, Maroc, Mexique, Myanmar, Niger, Nigeria, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Panama, Paraguay, Pays-Bas, Philippines, Pologne, Portugal, République dominicaine, République tchèque, Royaume-Uni, Russie, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Sri Lanka, Suède, Suisse, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie, Uruguay, Venezuela, Yémen, Yougoslavie, Zambie et Zimbabwe. Tableau 8 Inscription au niveau secondaire niveau peu élevé d'égalité: Afghanistan, Afrique du Sud, Algérie, Arabie saoudite, Bangladesh, Botswana, Côte d'Ivoire, Égypte, Inde, Indonésie, Iran, Kenya, Koweït, Malaisie, Maroc, Mozambique, Népal, Nigeria, Oman, Ouganda, Pakistan, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie, Turquie et Zimbabwe; niveau élevé d'égalité: Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Bénin, Bolivie, Bulgarie, Cambodge, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Cuba, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Ghana, Grèce, Hong Kong, Hongrie, Iraq, Irlande, Israël, Italie, Jamaïque, Japon, Malawi, Mexique, Myanmar, Nicaragua, Norvège, Nouvelle-Zélande, Panama, Paraguay, Pays-Bas, Philippines, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Singapour, Sri Lanka, Suède, Trinité-et-Tobago, Venezuela, Viêt- Nam et Yougoslavie (Serbie/Monténégro). Représentation parlementaire niveau peu élevé d'égalité: Afghanistan, Afrique du Sud, Angola, Bangladesh, Botswana, Côte d'Ivoire, Égypte, Honduras, Inde, Iran, Jordanie, Kenya, Malaisie, Népal, Ouganda, Pakistan, Pérou, Rwanda, Sénégal, Syrie, Tanzanie, 282 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 283 ANNEXE I Thaïlande, Togo, Tunisie, Zambie et Zimbabwe; niveau élevé d'égalité: Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bénin, Bolivie, Brésil, Bulgarie, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Corée du Nord, Corée du Sud, Costa Rica, Danemark, Équateur, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Iraq, Irlande, Israël, Jamaïque, Japon, Mexique, Nicaragua, Nouvelle- Zélande, Panama, Paraguay, Pays-Bas, Pologne, Roumanie, Royaume-Uni, Salvador, Singapour, Sri Lanka, Suède, Suisse, Uruguay et Venezuela. Tableau 9 Inscription au niveau secondaire Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Arabie saoudite, Australie, Autriche, Bénin, Botswana, Bulgarie, Cambodge, Canada, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Danemark, Égypte, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hong Kong, Hongrie, Inde, Iran, Irlande, Israël, Italie, Japon, Kenya, Koweït, Malaisie, Malawi, Maroc, Mexique, Mozambique, Nicaragua, Norvège, Nouvelle-Zélande, Oman, Ouganda, Papouasie-Nouvelle- Guinée, Paraguay, Pays-Bas, Pérou, Philippines, Pologne, Roumanie, Royaume- Uni, Salvador, Sénégal, Soudan, Sri Lanka, Suède, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Uruguay, Venezuela, Viêt-Nam et Zimbabwe. Tableau 11 Inscription au niveau secondaire niveau élevé d'égalité et revenu élevé: Allemagne, Australie, Autriche, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Uruguay et Venezuela; niveau élevé d'égalité et faible revenu: Bulgarie, Philippines, Pologne, Roumanie, Trinité-et-Tobago et Viêt-Nam; niveau peu élevé d'égalité et revenu élevé: Afrique du Sud, Arabie saoudite, Botswana, Corée du Sud, Hong Kong, Irlande, Israël, Japon, Koweït, Malaisie et Oman; niveau peu élevé d'égalité et revenu faible: Algérie, Bénin, Cambodge, Chine, Côte d'Ivoire, Égypte, Inde, Iran, Kenya, Malawi, Maroc, Mozambique, Nicaragua, Ouganda, Papouasie- Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pérou, Salvador, Sénégal, Soudan, Sri Lanka, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie et Zimbabwe. Représentation parlementaire niveau élevé d'égalité et revenu élevé: Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bulgarie, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Royaume-Uni, Singapour, Suède, Suisse, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; niveau élevé d'égalité et faible revenu: Jamaïque, Philippines, Roumanie et Viêt-Nam; niveau peu élevé d'égalité et revenu élevé: Afrique du Sud, Botswana, Brésil, Corée du Sud, Équa- teur, Iran, Irlande, Japon, Koweït, Malaisie, Panama, Thaïlande, Tunisie et Turquie; niveau peu élevé d'égalité et faible revenu: Algérie, Angola, Bangladesh, 283 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 284 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Bénin, Bolivie, Cambodge, Cameroun, Chine, Côte d'Ivoire, Égypte, Ghana, Guatemala, Honduras, Inde, Indonésie, Jordanie, Kenya, Malawi, Maroc, Mozambique, Népal, Nicaragua, Nigeria, Ouganda, Pakistan, Papouasie- Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pérou, République démocratique du Congo, République dominicaine, Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Sri Lanka, Syrie, Tanzanie, Togo, Zambie et Zimbabwe. Chapitre 1 Tableau 1.1 Asie de l'Est et région du Pacifique: Chine, Corée du Nord, Corée du Sud, Hong Kong, Indonésie, Malaisie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Philippines, Singapour, Thaïlande et Viêt-Nam; Europe de l'Est et Asie centrale: Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie, Turquie et Yougoslavie; Amérique latine et les Antilles: Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, Équateur, Jamaïque, Mexique, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Trinité-et-Tobago, Venezuela; Moyen-Orient et Afrique du Nord: Algérie, Arabie saoudite, Égypte, Iraq, Israël, Koweït, Libye, Maroc et Tunisie; Asie du Sud: Bangladesh, Inde, Pakistan et Sri Lanka; Afrique subsaharienne: Afrique du Sud, Bénin, Botswana, Cameroun, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, République démocratique du Congo, Sénégal, Sierra Leone, Tanzanie, Zambie et Zimbabwe; Pays membres de l'OCDE: Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède et Suisse. Tableau 1.2 Inscription au niveau primaire Asie de l'Est et région du Pacifique: Corée du Sud, Hong Kong, Indonésie, Laos, Malaisie, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Singapour; Europe de l'Est et Asie cen- trale: Albanie, Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie et Turquie; Amérique latine et les Antilles: Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, Guyane, Jamaïque, Mexique, Nicaragua, Paraguay, Salvador, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; Moyen-Orient et Afrique du Nord: Algérie, Arabie saoudite, Bahreïn, Égypte, Émirats arabes unis, Iraq, Jordanie, Koweït, Malte, Maroc, Oman, Qatar, Syrie et Tunisie; Asie du Sud: Afghanistan, Inde, Népal et Sri Lanka; Afrique subsaharienne: Bénin, Botswana, Burkina Faso, Burundi, Côte d'Ivoire, Éthiopie, Gambie, Guinée, Kenya, Lesotho, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, île Maurice, Niger, Ouganda, Congo, Sénégal, Soudan, Swaziland, Tanzanie et Togo; Pays membres de l'OCDE: Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède et Suisse. 284 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 285 ANNEXE I Inscription au niveau secondaire Asie de l'Est et région du Pacifique: Chine, Corée du Sud, Hong Kong, Indonésie, Laos, Malaisie, Mongolie, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Philippines; Europe de l'Est et Asie centrale: Albanie, Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie et Turquie; Amérique latine et les Antilles: Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, Guyane, Mexique, Nicaragua, Salvador et Venezuela; Afrique subsaharienne: Angola, Bénin, Botswana, Cameroun, îles du Cap-Vert, Côte d'Ivoire, Kenya, Madagascar, île Saint Thomas et île du Prince, Sénégal, Togo, Zambie et Zimbabwe; Pays membres de l'OCDE: Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Islande, Irlande, Japon, Luxembourg, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède et Suisse. Tableau 1.8 Bangladesh, Bénin, Bolivie, Brésil, Burkina Faso, Cameroun, Colombie, Comores, Côte d'Ivoire, Égypte, Ghana, Guatemala, Haïti, Inde, Indonésie, Kazakhstan, Kenya, Madagascar, Malawi, Mali, Maroc, Mozambique, Namibie, Népal, Nicaragua, Niger, Nigeria, Ouganda, Ouzbékistan, Pakistan, Pérou, Philippines, République centrafricaine, République dominicaine, Rwanda, Sénégal, Tanzanie, Tchad, Togo, Turquie, Zambie et Zimbabwe. Chapitre 2 Tableau 2.1 Afrique du Sud, Algérie, Argentine, Bangladesh, Barbade, Bénin, Botswana, Brésil, Cameroun, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Égypte, Équateur, Espagne, îles Fidji, Gabon, Gambie, Ghana, Guatemala, Guinée, Guinée-Bissau, Guyane, Haïti, Honduras, Inde, Indonésie, Jamaïque, Kenya, Laos, Lesotho, Madagascar, Népal, Nicaragua, Niger, Nigeria, Ouganda, Pakistan, Paraguay, Philippines, République centrafricaine, Congo, République dominicaine, Sénégal, Sierra Leone, Singapour, Soudan, Sri Lanka, Tanzanie, Tchad, Thaïlande, Togo, Trinité-et-Tobago, Uruguay, Venezuela, Viêt-Nam, Zambie et Zimbabwe. Tableau 2.2 Asie du Sud et région du Pacifique: Indonésie, Philippines, Viêt-Nam; Amérique latine et les Antilles: Bolivie, Brésil, Colombie, Guatemala, Haïti, Nicaragua, Paraguay, Pérou et République dominicaine; Moyen-Orient et Afrique du Nord: Égypte, Jordanie, Maroc et Yémen; Asie du Sud: Bangladesh, Inde, Népal et Pakistan; Afrique subsaharienne: Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Comores, Côte d'Ivoire, Érythrée, Ghana, Guinée, Kenya, Madagascar, Malawi, Mali, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, République centrafricaine, Tanzanie, Tchad, Togo, Zambie et Zimbabwe. 285 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 286 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Tableau 2.4 Algérie, Allemagne, Angola, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Autriche, Bahreïn, Bangladesh, Belgique, Bolivie, Botswana, Burkina Faso, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Colombie, Congo, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Danemark, Égypte, Émirats arabes unis, Équateur, Espagne, États- Unis, Finlande, France, Gabon, Ghana, Grèce, Guatemala, Guinée, Guinée- Bissau, Haïti, Honduras, Hongrie, Inde, Indonésie, Iran, Iraq, Irlande, Israël, Italie, Japon, Jordanie, Kenya, Koweït, Libye, Malaisie, Mali, Maroc, Mexique, Myanmar, Niger, Nigeria, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Panama, Paraguay, Pays-Bas, Philippines, Pologne, Portugal, République dominicaine, République tchèque, Royaume-Uni, Russie, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Sri Lanka, Suède, Suisse, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie, Uruguay, Venezuela, Yémen, Yougoslavie, Zambie et Zimbabwe. Chapitre 3 Tableau 3.1 Inscription au niveau primaire degré peu élevé d'égalité entre les genres: Afghanistan, Afrique du Sud, Algérie, Angola, Arabie saoudite, Bangladesh, Botswana, Côte d'Ivoire, Égypte, Inde, Indonésie, Iran, Kenya, Koweït, Libye, Malaisie, Maroc, Mozambique, Népal, Nigeria, Oman, Ouganda, Papouasie-Nouvelle-Guinée, République démocra- tique du Congo, Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie, Turquie et Zimbabwe; degré élevé d'égalité: Australie, Autriche, Belgique, Bénin, Bolivie, Bulgarie, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Corée du Sud, Costa Rica, Cuba, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Ghana, Grèce, Hong Kong, Hongrie, Iraq, Irlande, Israël, Italie, Jamaïque, Japon, Malawi, Mexique, Myanmar, Nicaragua, Norvège, Nouvelle-Zélande, Panama, Paraguay, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Singapour, Sri Lanka, Suède, Trinité-et-Tobago, Uruguay, Venezuela et Yougoslavie (Serbie/Monténégro). Inscription au niveau secondaire degré peu élevé d'égalité: Afghanistan, Afrique du Sud, Algérie, Arabie saoudite, Bangladesh, Botswana, Côte d'Ivoire, Égypte, Inde, Indonésie, Iran, Kenya, Koweït, Malaisie, Maroc, Mozambique, Népal, Nigeria, Oman, Ouganda, Pakistan, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie, Turquie et Zimbabwe; degré élevé d'égalité: Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Bénin, Bolivie Bulgarie, Cambodge, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Cuba, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Ghana, Grèce, Hong Kong, Hongrie, Iraq, Irlande, Israël, Italie, Jamaïque, Japon, Malawi, Mexique, Myanmar, Nicaragua, Norvège, Nouvelle-Zélande, Panama, Paraguay, 286 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 287 ANNEXE I Pays-Bas, Philippines, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Singapour, Sri Lanka, Suède, Trinité-et-Tobago, Venezuela, Viêt-Nam et Yougoslavie (Serbie/Monténégro). Espérance de vie degré peu élevé d'égalité: Afghanistan, Afrique du Sud, Algérie, Angola, Arabie saoudite, Bangladesh, Botswana, Côte d'Ivoire, Égypte, Honduras, Inde, Indonésie, Iran, Jordanie, Kenya, Koweït, Libye, Malaisie, Maroc, Mozambique, Népal, Nigeria, Oman, Ouganda, Pakistan, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Pérou, République démocratique du Congo, Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie, Turquie, Yémen, Zambie et Zimbabwe; degré élevé d'égalité: Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bénin, Bolivie, Brésil, Bulgarie, Cambodge, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Colombie, Corée du Nord, Corée du Sud, Costa Rica, Cuba, Danemark, Équateur, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Ghana, Grèce, Guatemala, Hong Kong, Hongrie, Iraq, Irlande, Israël, Italie, Jamaïque, Japon, Malawi, Mexique, Myanmar, Nicaragua, Norvège, Nouvelle-Zélande, Panama, Paraguay, Pays-Bas, Philippines, Pologne, Portugal, République dominicaine, Roumanie, Royaume-Uni, Singapour, Sri Lanka, Suède, Suisse, Trinité-et- Tobago, Uruguay, Venezuela, Viêt-Nam et Yougoslavie (Serbie/Monténégro). Représentation parlementaire degré peu élevé d'égalité: Afghanistan, Afrique du Sud, Angola, Bangladesh, Botswana, Côte d'Ivoire, Égypte, Honduras, Inde, Iran, Jordanie, Kenya, Malaisie, Népal, Ouganda, Pakistan, Pérou, Rwanda, Salvador, Sénégal, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie, Zambie et Zimbabwe; degré élevé d'égalité: Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bénin, Bolivie, Brésil, Bulgarie, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Corée du Nord, Corée du Sud, Costa Rica, Danemark, Équateur, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Iraq, Irlande, Israël, Jamaïque, Japon, Mexique, Nicaragua, Norvège, Nouvelle-Zélande, Panama, Paraguay, Pays-Bas, Pologne, Roumaine, Royaume- Uni, Singapour, Sri Lanka, Suède, Suisse, Uruguay et Venezuela. Chapitre 4 Tableau 4.1 Bangladesh (1990), Colombie (1983), Guatemala (1977), Indonésie (1992), Kenya rural (1988), Kenya urbain (1986), Népal rural (1978), Népal urbain (1978), Philippines (1975-1977), Venezuela (1983), Allemagne (1991-1992), Australie (1992), Autriche (1992), Canada (1992), Danemark (1987), États-Unis (1985), Finlande (1987-1988), France (1985-1986), Israël (1991-1992), Italie (1988-1989), Norvège (1990-1991), Pays-Bas (1987) et Royaume-Uni (1985). 287 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 288 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Chapitre 5 Tableau 5.1 Bangladesh (1990), Colombie (1983), Guatemala (1977), Indonésie (1992), Kenya rural (1988), Kenya urbain (1986), Népal rural (1978), Népal urbain (1978), Philippines (1975-1977), Venezuela (1983), Allemagne (1991-1992), Australie (1992), Autriche (1992), Canada (1992), Danemark (1987), États-Unis (1985), Finlande (1987-1988), France (1985-1986), Israël (1991-1992), Italie (1988-1989), Norvège (1990-1991), Pays-Bas (1987) et Royaume-Uni (1985). Tableau 5.3 Inscription au niveau primaire Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Arabie saoudite, Australie, Autriche, Bénin, Botswana, Bulgarie, Cambodge, Canada, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Danemark, Égypte, Équateur, Espagne, États- Unis, Finlande, France, Grèce, Guatemala, Hong Kong, Hongrie, Inde, Iran, Irlande, Italie, Jamaïque, Japon, Kenya, Koweït, Malaisie, Maroc, Mexique, Mozambique, Nicaragua, Norvège, Nouvelle-Zélande, Oman, Ouganda, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pays-Bas, Pérou, Pologne, Roumanie, Royaume-Uni, Salvador, Sénégal, Soudan, Sri Lanka, Suède, Syrie, Tanzanie, Togo, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Uruguay, Venezuela, Zambie et Zimbabwe. Inscription au niveau secondaire Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Arabie saoudite, Australie, Autriche, Bénin, Botswana, Bulgarie, Cambodge, Canada, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Danemark, Égypte, Équateur, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Guatemala, Hong Kong, Hongrie, Inde, Iran, Irlande, Italie, Jamaïque, Japon, Kenya, Koweït, Malaisie, Malawi, Maroc, Mexique, Mozambique, Nicaragua, Norvège, Nouvelle-Zélande, Oman, Ouganda, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pays-Bas, Pérou, Pologne, Roumanie, Royaume-Uni, Salvador, Sénégal, Soudan, Sri Lanka, Suède, Syrie, Tanzanie, Togo, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Uruguay, Venezuela, Viêt-Nam et Zimbabwe. Espérance de vie Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Angola, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Autriche, Bangladesh, Belgique, Bénin, Bolivie, Botswana, Brésil, Bulgarie, Cambodge, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Danemark, Égypte, Équateur, Espagne, États- Unis, Finlande, France, Ghana, Grèce, Guatemala, Honduras, Hong Kong, Hongrie, Inde, Indonésie, Irlande, Israël, Italie, Jamaïque, Japon, Jordanie, Kenya, Malaisie, Malawi, Maroc, Mexique, Mozambique, Népal, Nicaragua, Nigeria, Norvège, Ouganda, Pakistan, Panama, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pays-Bas, Pérou, Philippines, Pologne, Portugal, République démo- cratique du Congo, République dominicaine, Roumanie, Royaume-Uni, 288 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 289 ANNEXE I Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Singapour, Soudan, Sri Lanka, Suède, Suisse, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Turquie, Uruguay, Venezuela, Viêt-Nam, Zambie et Zimbabwe. Tableau 5.4 Selon les données de 1995. Liste des pays: Afrique du Sud, Algérie, Allemagne, Angola, Argentine, Australie, Autriche, Bangladesh, Belgique, Bénin, Bolivie, Botswana, Brésil, Bulgarie, Cambodge, Cameroun, Canada, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Danemark, Égypte, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Ghana, Grèce, Guatemala, Honduras, Hongrie, Inde, Indonésie, Iran, Irlande, Israël, Italie, Jamaïque, Japon, Jordanie, Kenya, Koweït, Malaisie, Malawi, Maroc, Mexique, Mozambique, Népal, Nicaragua, Nigeria, Norvège, Nouvelle- Zélande, Ouganda, Pakistan, Panama, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pérou, Philippines, Pologne, Portugal, République démocratique du Congo, République dominicaine, Roumanie, Royaume-Uni, Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Singapour, Soudan, Sri Lanka, Suède, Suisse, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Turquie, Uruguay, Venezuela, Viêt-Nam, Zambie et Zimbabwe. Tableau 5.5 sans réajustement: Afrique du Sud, Botswana, Lesotho et Swaziland; avec réajus- tement: Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Côte d'Ivoire, Gabon, Gambie, Ghana, Kenya, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Togo, Zambie et Zimbabwe. Tableau 5.6 réajustés, puis détériorés: Bénin, Cameroun, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, République centrafricaine, Rwanda, Sierra Leone, Togo et Zambie; réajustés, puis grandement améliorés dans les politiques d'économie à grande échelle: Burkina Faso, Gambie, Ghana, Nigeria et Zimbabwe; réajustés, puis légèrement améliorés dans les politiques d'économie à grande échelle: Burundi, Kenya, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Niger et Sénégal; sans réajustement: Afrique du Sud, Botswana, Lesotho et Swaziland. Chapitre 6 Tableau 6.1 Inscription au niveau primaire degré élevé d'égalité entre les genres et revenu élevé: Allemagne, Australie, Autriche, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, 289 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 290 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Royaume-Uni, Suède, Uruguay et Venezuela; degré élevé d'égalité et faible revenu: Bulgarie, Jamaïque, Pologne, Roumanie et Trinité-et-Tobago; faible degré d'égalité et revenu élevé: Afrique du Sud, Arabie saoudite, Botswana, Corée du Sud, Hong Kong, Irlande, Japon, Koweït, Malaisie et Oman; faible degré d'égalité et faible revenu: Algérie, Bénin, Cambodge, Chine, Côte d'Ivoire, Égypte, Équateur, Guatemala, Inde, Iran, Kenya, Maroc, Mozambique, Nicaragua, Papouasie- Nouvelle-Guinée, Ouganda, Paraguay, Pérou, Salvador, Sénégal, Soudan, Sri Lanka, Syrie, Tanzanie, Togo, Tunisie, Zambie et Zimbabwe. Inscription au niveau secondaire degré élevé d'égalité entre les sexes et revenu élevé: Allemagne, Australie, Autriche, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Uruguay et Venezuela; degré élevé d'égalité et faible revenu: Bulgarie, Philippines, Pologne, Roumanie, Trinité-et-Tobago et Viêt-Nam; faible degré d'égalité et revenu élevé: Afrique du Sud, Arabie saoudite, Botswana, Corée du Sud, Hong Kong, Irlande, Japon, Koweït, Malaisie et Oman; faible degré d'éga- lité et faible revenu: Algérie, Bénin, Cambodge, Chine, Côte d'Ivoire, Égypte, Inde, Iran, Kenya, Malawi, Maroc, Mozambique, Nicaragua, Papouasie-Nouvelle- Guinée, Ouganda, Paraguay, Pérou, Salvador, Sénégal, Soudan, Sri Lanka, Syrie, Tanzanie, Thaïlande, Togo, Tunisie et Zimbabwe. Espérance de vie degré élevé d'égalité et revenu élevé: Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Danemark, Espagne, États- Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Mexique, Norvège, Nouvelle- Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Singapour, Suède, Suisse, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; degré élevé d'égalité et faible revenu: Bulgarie, Jamaïque, Philippines, Roumanie et Viêt-Nam; faible degré d'égalité et revenu élevé: Afrique du Sud, Arabie saoudite, Botswana, Corée du Sud, Hong Kong, Irlande, Israël, Japon, Malaisie, Panama, Thaïlande, Tunisie et Turquie; faible degré d'égalité et faible revenu: Algérie, Angola, Bangladesh, Bénin, Bolivie, Cambodge, Cameroun, Chine, Côte d'Ivoire, Égypte, Ghana, Guatemala, Honduras, Inde, Indonésie, Jordanie, Kenya, Malawi, Maroc, Mozambique, Népal, Nicaragua, Nigeria, Ouganda, Pakistan, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pérou, République démocratique du Congo, République dominicaine, Rwanda, Salvador, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Sri Lanka, Syrie, Tanzanie, Togo, Zambie et Zimbabwe. Représentation parlementaire degré élevé d'égalité et revenu élevé: Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bulgarie, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Royaume-Uni, Singapour, Suède, Suisse, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; degré élevé d'égalité et 290 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 291 ANNEXE I faible revenu: Jamaïque, Philippines, Roumanie et Viêt-Nam; faible degré d'éga- lité et revenu élevé: Afrique du Sud, Botswana, Brésil, Corée du Sud, Équateur, Iran, Irlande, Israël, Japon, Koweït, Malaisie, Panama, Thaïlande, Tunisie et Turquie; faible degré d'égalité et faible revenu: Algérie, Angola, Bangladesh, Bénin, Bolivie, Cambodge, Cameroun, Chine, Côte d'Ivoire, Égypte, Ghana, Guatemala, Honduras, Inde, Indonésie, Jordanie, Kenya, Malawi, Maroc, Mozambique, Népal, Nicaragua, Nigeria, Ouganda, Pakistan, Papouasie- Nouvelle-Guinée, Paraguay, Pérou, République démocratique du Congo, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Sri Lanka, Syrie, Tanzanie, Togo, Zambie et Zimbabwe. Tableau 6.2 Instruction primaire Asie de l'Est et région du Pacifique: Cambodge, Chine, Corée du Sud, Hong Kong, Malaisie et Papouasie-Nouvelle-Guinée; Europe de l'Est et Asie centrale: Bulgarie, Hongrie, Pologne et Roumanie; Amérique latine et les Antilles: Chili, Colombie, Costa Rica, Équateur, Guatemala, Jamaïque, Mexique, Nicaragua, Paraguay, Pérou, Salvador, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; Moyen- Orient et Afrique du Nord: Algérie, Arabie saoudite, Égypte, Iran, Koweït, Maroc, Oman, Syrie et Tunisie; Asie du Sud: Inde, Sri Lanka; Afrique subsaha- rienne: Afrique du Sud, Bénin, Botswana, Côte d'Ivoire, Kenya, Mozambique, Ouganda, Sénégal, Soudan, Tanzanie, Togo, Zambie et Zimbabwe; Pays membres de l'OCDE: Allemagne, Australie, Autriche, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède. Instruction secondaire Asie de l'Est et région du Pacifique: Cambodge, Chine, Corée du Sud, Hong Kong, Malaisie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Philippines, Thaïlande et Viêt- Nam; Europe de l'Est et Asie centrale: Bulgarie, Hongrie, Pologne et Roumanie; Amérique latine et les Antilles: Chili, Colombie, Costa Rica, Mexique, Nicaragua, Paraguay, Pérou, Salvador, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; Moyen- Orient et Afrique du Nord: Algérie, Arabie saoudite, Égypte, Iran, Israël, Koweït, Maroc, Oman, Syrie et Tunisie; Asie du Sud: Inde, Sri Lanka; Afrique subsaha- rienne: Afrique du Sud, Bénin, Botswana, Côte d'Ivoire, Kenya, Malawi, Mozambique, Ouganda, Sénégal, Soudan, Tanzanie, Togo et Zimbabwe; Pays membres de l'OCDE: Allemagne, Australie, Autriche, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède. Espérance de vie Asie de l'Est et région du Pacifique: Cambodge, Chine, Corée du Sud, Hong Kong, Indonésie, Malaisie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Philippines, Singapour, Thaïlande et Viêt-Nam; Europe de l'Est et Asie centrale: Bulgarie, Hongrie, 291 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 292 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Pologne et Roumanie; Amérique latine et les Antilles: Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Équateur, Guatemala, Honduras, Jamaïque, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Salvador, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; Moyen-Orient et Afrique du Nord: Algérie, Arabie saoudite, Égypte, Israël, Jordanie, Maroc, Syrie et Tunisie; Asie du Sud: Bangladesh, Inde, Népal, Pakistan et Sri Lanka; Afrique subsaha- rienne: Afrique du Sud, Angola, Bénin, Botswana, Cameroun, Côte d'Ivoire, Ghana, Kenya, Malawi, Mozambique, Nigeria, Ouganda, République démocra- tique du Congo, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Tanzanie, Togo, Zambie et Zimbabwe; Pays membres de l'OCDE: Allemagne, Australie, Autriche, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède et Suisse. Représentation parlementaire Asie de l'Est et région du Pacifique: Cambodge, Chine, Corée du Sud, Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande et Viêt-Nam; Europe de l'Est et Asie centrale: Bulgarie, Hongrie, Pologne et Roumanie; Amérique latine et les Antilles: Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Équateur, Guatemala, Honduras, Jamaïque, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Salvador, Trinité-et-Tobago, Uruguay et Venezuela; Moyen-Orient et Afrique du Nord: Algérie, Égypte, Iran, Israël, Jordanie, Maroc, Syrie et Tunisie; Asie du Sud: Bangladesh, Inde, Népal, Pakistan et Sri Lanka; Afrique subsaharienne: Afrique du Sud, Angola, Bénin, Botswana, Cameroun, République démocratique du Congo, Côte d'Ivoire, Ghana, Kenya, Malawi, Mozambique, Nigeria, Ouganda, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Tanzanie, Togo, Zambie et Zimbabwe; Pays membres de l'OCDE: Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède et Suisse. Tableau 6.3 Voir le tableau 6.2. Tableau 6.4 Voir le tableau 6.2. 292 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 293 ANNEXE II Modèle de régression et estimation des coefficients A FIN D'ANALYSER LES DONNÉES PROVENANT DE DIVERS PAYS dans les tableaux des chapitres III, V et VI, ainsi que dans les simu- lations du chapitre VI, on a eu recours à un modèle de régression incluant des variables. Le modèle est basé sur des données provenant de plu- sieurs pays et s'échelonnant de 1970 à l'année la plus récente pour laquelle des données étaient disponibles, généralement 1995. Dans les pays en voie de développement, les indicateurs communs de développement qui offrent des points de comparaison selon le genre sont plutôt restreints. Ils sont sou- vent puisés auprès du Groupe de gestion des données sur le développement de la Banque mondiale et du Women's Indicators and Statistics Database, qui ont chacun constitué une banque de données sur la santé et l'éducation et qui la tiennent à jour. Humana (1986, 1992) fournit également des infor- mations sur le degré de respect des droits dans chaque pays. Mais ces rensei- gnements ne sont disponibles que pour deux ans, ce qui limite les possibili- tés d'études échelonnées dans le temps. Afin de ne pas perdre l'information concernant les autres variables, on suppose que les données concernant les droits continuent à être valides par rapport aux autres indicateurs. Le modèle de régression correspond à la formule suivante: git = a + byit + Xy2 + dRit + qTt + eit git correspond au degré d'égalité entre les sexes ­ c'est-à-dire le rapport femmes-hommes concernant les inscriptions aux niveaux primaire et secon- daire, l'espérance de vie et la représentation parlementaire. yit correspond au PIB (logarithmes) per capita en dollars de 1995, ajus- tés en parité du pouvoir d'achat. Afin d'obtenir des résultats plus précis, nous introduisons une fonction quadratique pour cette variable. 293 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 294 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Rit correspond au degré de respect moyen des droits humains, selon l'échelle établie par Humana (1986, 1992). Ce degré est établi en faisant la moyenne de trois indicateurs d'égalité des sexes : les droits sociaux et écono- miques, les droits légaux et politiques ainsi que les droits en matière de mariage et de divorce. Ces droits sont évalués sur une échelle de 1 à 4 (4 représentant le degré de respect le plus élevé). Tt correspond à une année fictive. eit indique une erreur. i indique le pays i. t indique l'année t. Estimations de coefficients à partir de régressions sur les taux d'égalité entre les sexes Indicateur Inscriptions Inscriptions Espérance Représentation au primaire au secondaire de vie parlementaire Revenu per capita 0,4176 0,9787 0,0597 ­0,3163 (5,461) (7,296) (2,643) (­4,086) Revenu per capita ajusté ­0,0224 ­0,0528 ­0,0031 0,0191 (­5,013) (­6,535) (­2,387) (3,897) Moyenne des droits 0,0641 0,0934 0,0177 0,0970 relatifs au genre (5,262) (5,673) (6,730) (7,745) R2 0,51 0,57 0,38 0,28 Nombre d'observations 277 286 265 287 Années 1980, 1985 1980, 1985 1980, 1985 1975, 1985 1990, 1995 1990, 1995 1990, 1997 1990, 1995 Note: Les chiffres entre parenthèses sont basés sur des statistiques annuelles comportant des marges d'erreur. Autres mesures de l'égalité des sexes Ce rapport mesure l'égalité entre les sexes en matière d'éducation et de santé à partir des taux femmes-hommes. On aurait pu mesurer cette égalité d'après des différences absolues entre les réalisations des hommes et celles des femmes, mais cette comparaison entre les taux fait davantage ressortir les inégalités, surtout lorsque les indicateurs sont considérablement différents. Par exemple, si, dans un pays A, le taux d'inscription des garçons à l'école est de 20 % et celui des filles de 10 %, et que, dans un pays B, le taux d'inscrip- tion des garçons est de 100 % et celui des filles de 90 %, dans les deux cas, la différence absolue entre les taux est la même, soit 10 %. Mais dans le pays A, le taux d'inscription de filles n'est que la moitié de celui des garçons, tan- dis qu'il atteint 90 % de celui des garçons dans le pays B. 294 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 295 ANNEXE II Même si la représentation graphique de ce rapport utilise les taux femmes- hommes pour évaluer l'égalité entre les sexes, les résultats ne devraient pas différer beaucoup de ceux qui se basent sur les différences absolues entre les garçons et les filles. Ces résultats apparaissent dans le tableau ci-dessous. Dans tous les cas, les revenus per capita ainsi que leurs quadratiques sont conjointement significatifs à partir de 1%. Estimations de coefficients à partir de régressions sur les différences absolues d'égalité entre les sexes Indicateur Inscriptions Inscriptions Espérance de Représentation au primaire au secondaire vie parlementaire Revenu per capita 28,2619 12,2932 4,8793 ­4,238 (3,794) (1,982) (4,357) (­4,155) Revenu per capita ajusté ­1,4343 ­0,5476 ­0,2399 0,0253 (­3,284) (­1,446) (­3,592) (3,945) Moyenne des droits 4,7352 4,204 1,322 0,1411 relatifs au genre (4,899) (5,194) (8,359) (8,431) R2 0,44 0,35 0,62 0,30 Nombre d'observations 277 286 265 287 Années 1980, 1985 1980, 1985 1980, 1985 1975, 1985 1990, 1995 1990, 1995 1990, 1997 1990, 1995 Note: Les chiffres entre parenthèses sont basés sur des statistiques annuelles comportant des marges d'erreur. Description des principaux tableaux présentant des résultats de régression Résumé Le tableau 8 porte sur l'égalité des sexes et se base sur les calculs de régres- sion ci-dessus, selon des degrés de droits variables, s'ajustant au revenu. Les chiffres concernant les populations sont basés sur les données qui étaient dis- ponibles à la dernière année indiquée pour chacun des indicateurs. Le tableau 9 anticipe l'égalité des sexes et se base sur les calculs de régres- sion portant sur le taux d'inscription au cours secondaire s'ajustant aux droits. La ligne de régression est basée sur les données communes dans le temps. Les éléments dispersés correspondent aux renseignements de 1995 concernant le taux d'inscription au secondaire des garçons et des filles. Le tableau 11 anticipe l'égalité des sexes et se base sur les calculs de régres- sion portant sur le taux d'inscription au cours secondaire et sur la représen- tation parlementaire, et cela à divers degrés de revenus et de droits. Il établit les moyennes de population pour les quatre manières de classifier les revenus et les droits. 295 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 296 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Chapitre 3 Le tableau 3.1 porte sur l'égalité des sexes et se base sur les calculs de régression de la page précédente, appliqués à divers niveaux de droits, en tenant compte du revenu. Les chiffres concernant les populations sont basés sur les données qui étaient disponibles à la dernière année indiquée, pour chacun des indicateurs. Chapitre 5 Les tableaux 5.3 et 5.4 portent sur l'égalité des sexes et se basent sur les calculs de régression de la page précédente, appliqués à divers degrés de revenu, en tenant compte des droits. La ligne de régression est basée sur les données communes dans le temps. Les éléments dispersés correspondent aux données qui étaient disponibles à la dernière année indiquée, pour chacun des indicateurs. Chapitre 6 Le tableau 6.1 porte sur l'égalité des sexes et se base sur les calculs de régression de la page précédente, appliqués à divers degrés de revenus et de droits, et établit les moyennes de population pour les quatre manières de classifier chacun des indicateurs. Les tableaux 6.2, 6.3 et 6.4 sont basés sur les calculs de régression de la page précédente. Le tableau 6.2 anticipe l'indicateur selon les degrés de droits appropriés, en les ajustant en fonction du revenu. Le tableau 6.3 anticipe l'indicateur selon les degrés de revenus appropriés, en les ajustant en fonction des droits. Le tableau 6.4 ajoute à l'indicateur, tout d'abord l'augmentation anticipée à partir des niveaux de droits correspondant, en les ajustant en fonction du revenu. Elle ajoute ensuite l'augmentation à partir des revenus, ajustant les droits. Les moyennes de population appa- raissent également. 296 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 297 ANNEXE III Salaires relatifs des hommes et des femmes Groupe de développement Salaire % inexplicable Source Source du salaire économique et année relatif du salairea Pays industrialisés Allemagne, 1985-1993b 73 88 Blau et Kahn (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées Allemagne, 1995 70 83 Rice (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées Australie, 1985 85 68 Miller et Rummery (1991) Salaire horaire Australie, 1986, 1987, 74 87 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées 1990, 1991, 1994b Australie, 1989 87 64 Miller (1994) Salaire horaire Australie, 1990 85 61 Langford (1995) Salaire horaire Autriche, 1985-1987, 1989, 75 87 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées 1991-1992, 1994b Canada, 1970 60 74 Baker et al. (1995) Recensement, salaire annuel Canada, 1970 63 64 Gunderson (1998) Recensement, salaire annuel Canada, 1972 60 45 Gunderson (1975) Travailleurs civils Canada, 1980 64 73 Baker et al. (1995) Recensement, salaire annuel Canada, 1980 67 67 Gunderson (1998) Recensement, salaire annuel Canada, 1985 66 75 Baker et al. (1995) Recensement, salaire annuel Canada, 1986 64 79 Baker et al. (1995) Sondage sur la consommation, salaire annuel Canada, 1989 75 75 Kidd et Shannon (1996) Sondage national Canada, 1990 72 71 Gunderson (1998) Recensement, salaire annuel Canada, 1990 62 53 Gunderson (1998) Recensement, salaire hebdomadaire Canada, 1991 67 84 Baker et al. (1995) Recensement, salaire annuel Canada, 1992-1994b 75 85 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Danemark, 1980 80 68 Rosholm et Smith (1996) Secteur public, salaire horaire Danemark, 1980 72 75 Rosholm et Smith (1996) Secteur privé, salaire horaire Danemark, 1983 68 88 Gupta, Oaxaca et Smith Sondage national, salaire horaire (1998) Danemark, 1989 68 91 Gupta, Oaxaca et Smith Sondage national, salaire horaire (1998) Danemark, 1990 74 77 Rosholm et Smith (1996) Secteur privé, salaire horaire 297 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 298 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Groupe de développement Salaire % inexplicable Source Source du salaire économique et année relatif du salairea Danemark, 1990 83 81 Rosholm et Smith (1996) Secteur public, salaire horaire Danemark, 1990 74 77 Rosholm et Smith (1996) Secteur privé, salaire horaire Danemark, 1994 67 88 Gupta, Oaxaca et Smith Sondage national, salaire horaire (1998) Danemark, 1995 87 55 Rice (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées Espagne, 1995 82 83 Rice (1999) Secteur privé, cols blancs États-Unis, 1980 61 57 Neumark (1988) Sondage national, salaire horaire États-Unis, 1985-1994b 67 97 Blau et Kahn (1999) Salaire horaire États-Unis, 1987 70 44 Blau et Khan (1994) Sondage national, hres contrôlées États-Unis, 1987 69 73 Gyimah-Brempong, Salaire horaire Fichtenbaum et Willis (1992) France, 1995 82 61 Rice (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées Grèce, 1995 80 59 Rice (1999) Sondage national, hres contrôlées Irlande, 1988-1990, 1993- 80 96 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées 1994b Italie, 1986, 1988, 1990, 80 83 Blau et Kahn (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées 1992-1994b Italie, 1991 79 104 Bonjour et Pacelli (1998) Secteur privé, salaire quotidien Italie, 1995 84 94 Rice (1999) Salaire horaire Japon, 1968 51 53 Horton (1996) Salaire horaire Japon, 1978 57 55 Horton (1996) Salaire horaire Japon, 1988 59 44 Horton (1996) Sondage national, hres contrôlées Japon, 1993-1994b 43 93 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Nouvelle-Zélande, 1991- 83 104 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées 1994b Norvège, 1989-1994b 76 93 Blau et Kahn (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées Pays-Bas, 1988-1989b 76 62 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Portugal, 1995 84 73 Rice (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées Royaume-Uni, 1985-1994b 69 102 Blau et Kahn (1999) Salaire horaire Royaume-Uni, 1991 84 93 Makepeace et al. (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées Royaume-Uni, 1994 83 53 Davies, Peronaci et Joshi Sondage national, salaire horaire (1998) Royaume-Uni, 1995 76 64 Rice (1999) Sondage national, hres contrôlées Suède, 1974 76 71 Edin et Richardson (1999) Sondage national, salaire horaire Suède, 1974 67 61 Gustafsson (1981) Sondage national, salaire horaire Suède, 1981 83 64 Edin et Richardson (1999) Sondage national, salaire horaire Suède, 1991 83 64 Edin et Richardson (1999) Sondage national, hres contrôlées Suède, 1994 81 103 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Suisse, 1987 62 50 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Suisse, 1991 79 75 Bonjour et Pacelli (1998) Secteur privé, salaire horaire Pays en voie de développement Allemagne, de l'Est, 1990- 84 97 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées 1993b Argentine, 1985 65 62 Psacharopoulos et Salaire mensuel à Buenos Aires Tzannatos (1992) 298 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 299 ANNEXE III Groupe de développement Salaire % inexplicable Source Source du salaire économique et année relatif du salairea Argentine, 1989 89 * Artecona et Cunningham Salaire horaire (2000b) Argentine, 1995 98 * Artecona et Cunningham Salaire horaire (2000b) Bolivie, 1989 63 76 Psacharopoulos et Salaire hebdomadaire Tzannatos (1992) Brésil, 1970 30 113 Birdsall et Behrman (1991) Recensement, secteur formel, hres contrôlées Brésil, 1970 50 10 Birdsall et Fox (1991) Salaire mensuel des professeurs Brésil, 1981 50 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Brésil, 1989 70 89 Psacharopoulos et Salaire horaire Tzannatos (1992) Brésil, 1989 63 * Artecona et Cunningham Salaire horaire (2000b) Brésil, 1990 54 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Brésil, 1995 67 * Artecona et Cunningham Salaire horaire (2000b) Bulgarie 1992-1993b 84 121 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Chili, 1980 68 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Chili, 1987 71 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Chili, 1987 71 114 Psacharopoulos et Salaire hebdomadaire Tzannatos (1992) Chili, 1990 89 * Montenegro (1999) Salaire horaire Chili, 1996 101 * Montenegro (1999) Salaire horaire Chili, 1996 101 95 Montenegro (1999) Sondage national, salaire horaire Chine, 1985 80 16 Meng et Kidd (1997) Industrie rurale Chine, 1985 80 112 Meng et Miller (1995) Industrie rurale Chine, 1987 88 47 Meng (1992) Fonctionnaires de l'État Colombie, 1984 67 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Colombie, 1988 84 85 Psacharopoulos et Salaire hebdomadaire Tzannatos (1992) Colombie, 1990 70 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Corée du Sud, 1980 44 33 Berger, Groothuis et Sondage national, salaire horaire Jeon (1997) Corée du Sud, 1984 42 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Corée du Sud, 1984 42 49 Horton (1996) Ouvriers industriels Corée du Sud, 1988 51 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Corée du Sud, 1988 51 53 Horton (1996) Production industrielle Corée du Sud, 1991 54 29 Berger, Groothuis et Sondage national, salaire horaire Jeon (1997) Costa Rica, 1980 90 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Costa Rica, 1989 97 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Costa Rica, 1989 81 93 Psacharopoulos et Salaire mensuel Tzannatos (1992) Costa Rica, 1989 88 * Artecona et Salaire horaire Cunningham (2000b) 299 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 300 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Groupe de développement Salaire % inexplicable Source Source du salaire économique et année relatif du salairea Costa Rica, 1995 91 * Artecona et Salaire horaire Cunningham (2000b) Côte d'Ivoire, 1985 76 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Côte d'Ivoire, 1988 81 * Tzannaros 1999 Salaire horaire Équateur, 1987 66 43 Psacharopoulos et Salaire horaire Tzannatos (1992) Éthiopie, 1990 78 119 Appleton, Hoddinott et Travailleurs urbains Krishnan (1999) Guatemala, 1989 77 45 Psacharopoulos et Salaire mensuel Tzannatos (1992) Guinée, 1990 45 58 Glick et Shan (1997) Salaire horaire Honduras, 1986 65 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Honduras, 1989 81 147 Psacharopoulos et Salaire hebdomadaire Tzannatos (1992) Honduras, 1990 68 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Hongrie, 1988-1994b 75 95 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Hongrie, 1994 80 77 Rice (1999) Salaire mensuel, hres contrôlées Inde, 1987-1988 56 74 Horton (1996) Travailleurs urbains Inde, 1987-1988 51 66 Horton (1996) Travailleurs ruraux Indonésie, 1980 39 66 Horton (1996) Travailleurs urbains Indonésie, 1980 39 78 Horton (1996) Travailleurs ruraux Indonésie, 1986 56 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Indonésie, 1990 54 62 Horton (1996) Travailleurs urbains Indonésie, 1990 50 81 Horton (1996) Travailleurs ruraux Indonésie, 1992 60 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Indonésie, 1992 71 48 Manning (1998) Sondage national Israël, 1993-1994b 73 109 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Jamaïque, 1989 58 119 Psacharopoulos et Salaire hebdomadaire Tzannatos (1992) Jordanie, 1991 78 74 Psacharopoulos et Salaire annuel Tzannatos (1992) Kenya, 1986 63 60 Agesa (1999) Travailleurs urbains Malaisie, 1973 59 66 Chua (1984) Travailleurs civils Malaisie, 1973 57 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Malaisie, 1973 57 88 Horton (1996) Revenus annuels Malaisie, 1984 69 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Malaisie, 1984 69 93 Horton (1996) Revenus annuels Mexique, 1984 85 80 Psacharopoulos et Salaire hebdomadaire Tzannatos (1992) Nicaragua, 1978 43 67 Psacharopoulos et Salaire bimensuel Tzannatos (1992) Nicaragua, 1991 43 71 Behrman et Wolfe (1991) Sondage national, hres contrôlées Ouganda, 1992 72 74 Apppleton, Hoddinott et Travailleurs urbains Krishnan (1999) Panama, 1989 80 85 Psacharopoulos et Salaire mensuel Tzannatos (1992) 300 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 301 ANNEXE III Groupe de développement Salaire % inexplicable Source Source du salaire économique et année relatif du salairea Pérou, 1990 84 85 Psacharopoulos et Salaire horaire Tzannatos (1992) Philippines, 1978 71 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Philippines, 1978 75 137 Horton (1996) Travailleurs urbains, salaire horaire Philippines, 1988 80 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Philippines, 1988 76 127 Horton (1996) Travailleurs urbains, salaire horaire Pologne, 1991-1994b 75 118 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Roumanie, 1994 79 84 Paternostro et Sahn (1999) Salaire horaire Roumanie, 1994 79 84 Paternostro et Sahn (1999) Salaire horaire Russie, 1991-1994b 69 99 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Russie, 1994 72 118 Glinskaya et Mroz (1996) Salaire horaire Slovénie, 1991-1994b 87 104 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées Taiwan, 1982 64 56 Gannicott (1986) Sondage national Taiwan, 1989 62 84 Kao, Pollacheck et Sondage national, salaire mensuel Wunnava (1994) Tanzanie, 1971 75 17 Knight et Sabot (1991) Production industrielle, salaire mensuel Tanzanie, 1980 86 4 Psacharopoulos et Travailleurs urbains, production Tzannatos (1992) industrielle, salaire mensuel République tchèque, 73 97 Blau et Kahn (1999) Sondage national, hres contrôlées 1992, 1994b Thaïlande, 1980 74 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Thaïlande, 1980 84 70 Horton (1996) Employés Thaïlande, 1989 90 85 Horton (1996) Employés Thaïlande, 1990 80 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Uruguay, 1989 74 77 Psacharopoulos et Salaire mensuel Tzannatos (1992) Union soviétique, 1989 73 85 Katz (1997) Salaire horaire, ville de Taganrog Venezuela, 1981 87 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Venezuela, 1989 77 95 Psacharopoulos et Salaire hebdomadaire Tzannatos (1992) Venezuela, 1990 93 * Tzannatos (1999) Salaire horaire Zambie, 1993 74 65 Nielsen (1998) Sondage national Note: Toutes les études tiennent compte du degré d'instruction et de l'expérience, à moins d'être marquées d'un astérisque (*). Ces dernières ne sont basées que sur des comparaisons de salaire approximatives. La plupart des études tenant compte du degré d'instruction et de l'expérience uti- lisent le salaire d'un homme comme référence. La méthode utilisée pour la décomposition se retrouve dans Oaxaca (1973). a. Les chiffres au-dessus de 100 p. cent indiquent des situations où les femmes sont plus qualifiées que les hommes (en termes d'instruction). S'il n'y avait pas de discrimination, non seulement les femmes gagneraient davantage, mais leur salaire serait plus élevé que celui des hommes. b. Les moyennes non évaluées sont réparties sur les années. 301 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 302 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 303 ANNEXE IV Études expérimentales sur le modèle familial « traditionnel » Sujet, sources, pays Recherche Résultats Communauté de biens et consommation Quisumbing et Maluccio À partir de sondage, cette recherche étu- Dans les quatre pays concernés, on (1999) die la répartition des ressources au sein rejette le modèle traditionnel car on le Bangladesh, Éthiopie, de la famille. Les biens possédés au juge dépassé, mais à différents degrés. Indonésie, Afrique du moment du mariage servent d'indices du Les budgets gérés par les femmes se tra- Sud pouvoir d'achat, particulièrement en duisent par des dépenses positives et matière d'éducation. La courbe d'Engels significatives pour les enfants, comme est utilisée pour évaluer les dépenses l'éducation et l'habillement. Les pères et courantes: nourriture, éducation, santé, les mères n'ont pas les mêmes priorités à vêtements des enfants. Les données sont l'égard de leurs enfants. analysées à deux reprises afin de détecter une endogénéité possible. Phipps et Burton (1998) Utilisant la courbe d'Engels pour des Pour huit des quatorze items, l'impact Canada foyers où l'homme et la femme travaillent s'avérait différent pour chaque genre. Les tous deux à temps plein, on étudie la part femmes sont enclines à dépenser en nour- investie par chacun dans quatorze items riture, en vêtements et en soins pour les faisant partie des dépenses courantes. Les enfants, tandis que les hommes dépensent salaires de chacun indiquent leur pouvoir davantage en transport. Les hommes n'ont respectif sur les ressources. pas les mêmes priorités que leurs épouses quant aux dépenses. Lundberg, Pollak et Wales Cette recherche est basée sur l'applica- La recherche démontre que, dans les (1997) tion d'une mesure expérimentale, soit le familles, les dépenses en vêtements ont Royaume-Uni transfert d'une allocation familiale aux augmenté chez les femmes et les enfants femmes à la fin des années 1970. L'étude par rapport aux hommes. Les hommes se penche sur les effets de cette mesure et les femmes ne partagent pas les sur les dépenses familiales. mêmes priorités quant aux dépenses. 303 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 304 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Sujet, sources, pays Recherche Résultats Thomas (1997) Étude portant sur l'administration res- Dans les foyers administrés par les Brésil pective des hommes et des femmes du femmes, on dépense davantage en édu- budget familial et dans laquelle on com- cation, en santé, en loisirs et en alimen- pare l'impact du salaire sur les enfants. tation, spécialement celle des enfants. Thomas, Contreras et Cette étude porte sur les biens apportés L'étude compare les biens du père et de Frankenberg (1997) lors du mariage par le père et la mère, et la mère et les probabilités de contracter Indonésie sur leurs effets sur la santé des enfants, des maladies chez les garçons et les filles. tels les problèmes respiratoires, la fièvre Les résultats suggèrent que les fils dont et la diarrhée. les mères possédaient davantage de biens lors du mariage sont moins susceptibles que leurs soeurs de contracter des mala- dies respiratoires. Ward-Batts (1997) Appliquée à une variable extérieure, Dans onze domaines, les dépenses sont Royaume-Uni cette étude évalue dans quelle mesure les plus élevées, notamment pour les biens changements survenus au niveau de l'at- de consommation durable, la nourriture tribution des allocations au Royaume- (à la maison et au restaurant), les vête- Uni répondent aux nouveaux besoins ments et articles de toutes sortes. Elles des gens. Elle évalue également les sont cependant moindres en tabac. Les dépenses pour toute une série de pro- hommes et les femmes ne dépensent pas duits et de services. de la même manière. Thomas, Schoeni et Strauss Porte sur les effets respectifs de l'éduca- Le régime de communauté de biens est (1996) tion du père et de la mère sur celle des inefficace pour l'éducation des enfants, Brésil enfants et analyse également leur inci- car la part de la mère dans l'éducation dence sur la scolarité des garçons et des est plus importante que celle du père. filles. Basée sur des résultats de régres- Les mères ont plus d'influence sur leurs sion sous-jacents. filles, tandis que les pères en ont davan- tage sur leurs garçons. L'étude démontre que les pères et les mères agissent différemment envers leurs fils et leurs filles et que cela influence leur façon de dépenser. Hoddinott et Haddad (1995) Étude économétrique démontrant que Le régime de communauté de biens est Côte d'Ivoire les revenus des hommes et des femmes inefficace pour six des dix items de influencent la manière dont l'argent du dépenses courantes. La part apportée par ménage est dépensé. Dix items sont ana- les épouses a un effet positif significatif sur lysés en tenant compte de leurs revenus le budget de la nourriture, mais un effet respectifs, et les données sont revues afin négatif significatif sur celui des repas pris à de détecter une endogénéité possible. l'extérieur, des vêtements, de l'alcool et des cigarettes. Les hommes et les femmes n'ont pas les mêmes priorités quant aux dépenses du foyer. 304 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 305 ANNEXE IV Sujet, sources, pays Recherche Résultats Browning et al. (1994) Étudie comment les revenus respectifs et Rejette le régime de communauté de Canada l'âge influencent la répartition des biens et démontre que la part de la dépenses entre mari et femme. femme dans les dépenses du foyer aug- mente avec l'âge et à mesure que ses revenus augmentent. Haddad et Hoddinott (1994) Cette étude analyse l'impact des revenus Rejette le régime de communauté de Côte d'Ivoire attribués aux femmes dans des foyers biens pour la taille selon l'âge. Les gar- dirigés par des hommes sur le poids et la çons sont plus grands pour leur âge que taille des garçons et des filles à un âge les filles si la part du revenu de la femme donné. Elle s'intéresse au problème de augmente. La recherche démontre que l'endogénéité en utilisant des variables les parents n'ont pas les mêmes priorités techniques expérimentales. envers leurs fils et leurs filles. Thomas (1994) Étudie les effets que l'éducation des Dans les trois pays concernés, l'éduca- Brésil, Ghana, parents produit sur la croissance des tion maternelle a plus d'importance États-Unis enfants dans les trois pays. S'intéresse pour la croissance des filles, tandis que aux revenus du père et de la mère prove- l'éducation du père influence davantage nant de sources autres que le travail, et la croissance des garçons. Au Brésil, les analyse quels effets ils peuvent produire revenus de la femme ont un effet positif sur les enfants. L'étude se penche égale- sur la santé de leurs filles, mais non sur ment sur l'endogénéité dans le cas de celle de leurs garçons. Les pères et les certains pays. mères de famille n'accordent pas la même importance aux garçons et aux filles. Bourguignon et al. (1993) Étudie quelles relations peuvent être éta- Rejette le régime de communauté de France blies entre les salaires gagnés par chaque biens en se basant sur l'hypothèse que genre et neuf types de biens. On utilise les coefficients des salaires des hommes la courbe d'Engels pour évaluer la part et des femmes sont égaux. Les pères et des dépenses du foyer correspondant à les mères de famille ne partagent pas ces biens. les mêmes priorités face aux dépenses. Thomas (1990) Analyse les effets des revenus du père et Rejette le régime de communauté de Brésil de la mère, provenant de sources autres biens par rapport aux besoins en pro- que le travail, sur les indices de santé des téines et calories per capita, de la sur- enfants. (Ces revenus proviennent de vie des nouveau-nés et du poids santé pensions, de la sécurité sociale, de des enfants de moins de huit ans. La rentes, de revenus de différents biens et différence dans les effets produits par de dons.) On revient à deux reprises sur chaque genre est particulièrement les dernières données afin de détecter marquée en ce qui concerne la survie une endogénéité possible. des nouveau-nés. Les effets produits par les mères de famille dépassent alors de vingt fois ceux produits par les pères. 305 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 306 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Sujet, sources, pays Recherche Résultats L'offre de service ou de main- d'oeuvre Fortin et Lacroix (1997) Cette recherche évalue les possibilités Rejette les restrictions que le régime de Canada d'offre de services pour les familles où communauté de biens peut impliquer les deux conjoints travaillent, tant pour pour les offres de service. Par exemple, la les familles traditionnelles qu'élargies. présence d'enfants affecte négativement Elle étudie comment des variantes l'offre de service des femmes et positive- comme les revenus provenant de ment celle des hommes. L'élasticité sources autres que le travail et la pré- concernant les salaires ne se fait pas de sence d'enfants affectent chacun des façon symétrique pour chaque genre. époux. On ne mentionne pas de pro- blème d'endogénéité. Alderman et Sahn (1993) Inclut les loisirs parmi les items de la vie On expérimente la commutation du Sri Lanka courante dans un « régime de besoins temps libre entre les hommes et les presque idéal ». femmes. On observe qu'une grande importance est accordée aux loisirs, spé- cialement dans les zones rurales, ainsi qu'une complémentarité entre les loisirs des hommes et des femmes. L'élasticité des prix quant aux salaires des hommes et des femmes ne suit pas de modèle déterminé. Lundberg (1988) L'offre de services des hommes et des Pour les familles sans enfant d'âge pré- États-Unis femmes est régie par un système d'équa- scolaire, l'offre de service de l'homme et tion simultanée, dont on prévoit le fonc- de la femme ne font pas l'objet d'une tionnement à partir de statistiques. On prise de décision conjointe dans l'immé- tient compte des effets de l'embauche diat. Dans le cas de familles avec de pour chaque individu, ce qui permet de jeunes enfants, tant l'homme que la composer avec des problèmes d'horaires femme sont forcés de jongler avec les et de vie commune des conjoints. horaires et d'accepter des fluctuations dans les salaires. Ni le modèle de famille utilitaire, ni le traditionnel ad hoc ne sont concernés par ces résultats. Ashenfelter et Heckman Fait une estimation de l'offre de main- Une augmentation du salaire du mari se (1974) d'oeuvre. Se penche sur les restrictions traduit par une diminution de temps États-Unis théoriques du fonctionnement de cette libre pour l'épouse. Par contre, une aug- offre et, de façon particulière, sur les mentation du salaire de l'épouse procure effets croisés des salaires de l'homme et plus de temps libre à l'homme. de la femme sur le couple. 306 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 307 ANNEXE IV Sujet, sources, pays Recherche Résultats Investissement et production Menon (1999) En se penchant sur les habitudes de Ce sont les emprunts contractés par des Bangladesh consommation de différentes personnes femmes qui ont le plus d'effets béné- durant des périodes variées, cette fiques sur la consommation dans un recherche étudie les bénéfices à long terme foyer. des programmes de micro-financement. Khandker (1998) Étudie les effets des emprunts, selon Lorsque les emprunts sont effectués par Bangladesh qu'ils sont contractés par des hommes des femmes plutôt que par des hommes, ou par des femmes, sur différents le micro-financement s'avère plus effi- items, tels les dépenses per capita, cace, doublant presque la consommation l'inscription scolaire, le développement du foyer. De plus, les filles vont davan- des enfants, l'usage de contraceptifs. tage à l'école et les enfants sont mieux Tient compte de l'endogénéité dans les alimentés. programmes au moyen d'un sondage expérimental. Pitt et Khandker (1998) Cette étude porte sur la participation Pour la plupart des items observés, la Bangladesh respective des hommes et des femmes à participation à des programmes de des programmes de micro-financement, micro-financement joue un rôle déter- et s'intéresse aux effets différents pro- minant. De plus, les crédits accordés aux duits par chaque genre. On étudie égale- femmes ont un impact différent que ment l'incidence de cette participation ceux accordés aux hommes. sur l'offre de service pour chaque genre, sur la scolarité des garçons et des filles, sur les dépenses familiales per capita et sur les avoirs des femmes autres que fon- ciers. Des mesures correctionnelles sont prévues afin de contrer de possibles déviations hétérogènes aux niveaux tant individuel que familial ou local. On exa- mine minutieusement les questions d'endogénéité et d'autosélection. Udry (1996) Étudie la répartition des terres selon le Rejette la mise en commun des res- Burkina Faso genre. Se penche également sur l'inci- sources de production. Les terres diri- dence de chaque genre relative sur la gées par des femmes ne sont pas qualité du travail abattu et sur l'utilisa- autant travaillées que celles dirigées tion d'engrais par chacun d'eux. Utilise par des hommes, car elles ont recours les techniques de retour sur les données, à une main-d'oeuvre moindre et elles les effets Tobit ainsi que les effets ordi- utilisent moins de fertilisants par hec- naires non linéaires sur les dernières tare. Leurs terres produisent donc données. moins que celles des hommes en une même saison. 307 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 308 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Sujet, sources, pays Recherche Résultats Udry et al. (1995) Applique les normes d'efficacité Pareto à Rapporte des cas sérieux d'inefficacité Burkina Faso la répartition des ressources dans les dans la production agricole, indice d'un familles. Utilise des données détaillées système dans lequel les ressources ne sur une étendue de quatre ans. sont pas mises en commun ni en marché au sein d'une même famille. Jones (1983, 1986) Étudie le rôle de chaque genre dans les Rejette le régime de communauté de Cameroun prises de décisions au sujet de la produc- biens pour les gens mariés. Plutôt que de tion familiale, dans le cadre du projet travailler à la culture du riz en étant SEMRY. Ce dernier permet aux agricul- rémunérées par leur mari, les femmes teurs d'accéder à des canaux d'irrigation préfèrent se consacrer à la culture du pour la culture du riz. Utilise des retours sorgho qu'elles gèrent elles-mêmes. sur les dernières données. La mise en commun des risques Dercon et Krishnan (2000) Se basant sur des statistiques portant sur Les familles les plus pauvres sont inca- Éthiopie l'alimentation individuelle, cette étude pables d'améliorer leur situation alimen- se penche sur les facteurs qui détermi- taire. De plus, les familles moins favori- nent la répartition alimentaire dans une sées de la partie sud du pays ne peuvent famille. Elle s'intéresse particulièrement pas se permettre d'affronter des risques, à l'amélioration progressive de la et ce sont les femmes qui font les frais consommation familiale. des situations critiques. Goldstein (1999) S'appuyant sur de récentes découvertes Les familles n'affrontent pas les risques Ghana concernant l'amélioration de la consom- et les situations de crise comme s'ils for- mation et le partage des risques, cette maient une seule entité. Les femmes étude se penche sur les réponses des d'un même village se réunissent plutôt familles face aux situations de crises entre elles afin d'affronter des risques concernant la santé et l'agriculture, et communs. Les hommes affrontent un observe si les époux partagent les mêmes éventail de risques plus grand, mais risques. moins précis. 308 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 309 ANNEXE V Études prospectives en éducation L' ENCADRÉ 6.1 PRÉSENTE LES ESTIMATIONS DES COÛTS POUR les projets visant à promouvoir l'égalité des sexes à l'école primaire. Cette étude prospective porte sur les situations du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, de l'Asie du Sud et de l'Afrique subsaharienne ­ les régions où l'on retrouve les plus grandes inégalités en éducation ­ et suggère deux scé- narios possibles: · Une réduction des frais de l'école primaire pour les familles, de façon à atteindre l'accès universel à l'instruction ­ but soutenu par des bienfaiteurs depuis 1990. · Une réduction des frais de l'école primaire pour les familles, de façon à atteindre l'accès universel à l'instruction, mais en ne ciblant que 40% des foyers les plus pauvres. Dans chacun des scénarios, on présume, d'une part, que ces mesures ne se limitent pas à favoriser un seul genre, et que, d'autre part, les coupures de prix ciblent seulement les filles (comme pour le programme d'instruction secondaire au Bangladesh, voir le chapitre IV). L'étude prospective cible également la classe défavorisée, car c'est parmi les plus pauvres que l'écart entre les sexes est le plus accentué. En ciblant ainsi les filles et la classe la plus pauvre, les pays réduisent davantage leurs coûts budgé- taires. Afin de mener à bien l'étude prospective qui cible les enfants des 40% des foyers les plus pauvres, on a utilisé des données de sondages sur les taux d'inscription et sur les revenus (Filmer, 1999). On s'est basé sur l'élasticité des prix pour les inscriptions de garçons et de filles, selon des données déjà publiées (Schultz, 1987). Les données sur les coûts publics des différentes interventions sont appuyées par d'autres sources déjà publiées, concernant la part assumée par le secteur privé sur la totalité des dépenses en éducation dans les pays en voie de développement (Banque mondiale, 1996, 1997). Dans les cas d'interventions ciblées, les évaluations comportent des informations sur les coûts administratifs du ciblage (Grosh, 1994). Les grilles suivantes en donnent un aperçu. 309 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 310 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Données générales de l'étude prospective Dépenses Dépenses Taux Taux Taux général Taux général publiques en privées en d'inscription d'inscription d'inscription d'inscription instruction instruction des garçons des filles des garçons des filles primaire primaire Région pauvres (%) pauvres (%) (%) (%) (milliards de $)a (milliards de $)b Moyen-Orient et 66,2 44,0 91,4 79,8 25,7 1,1 Afrique du Nord Asie du Sud 61,0 39,4 106,8 84,0 15,9 0,8 Afrique 52,4 46,3 81,3 66,4 9,8 3,8 subsaharienne a. Ces calculs sont basés sur le PIB, soit la partie du PIB dépensée en éducation et la partie des dépenses publiques en éducation (Banque mondiale 1997, 1999d). b. Calculs basés sur la part du privé dépensée en éducation, selon la Banque mondiale (1997). Sources : Filmer (1999); Banque mondiale (1997, 1999d). Plan de participation universelle à l'instruction primaire Coupure des Coupure des Augmentation Augmentation Augmentation Augmentation prix nécessaire prix nécessaire des dépenses des dépenses des dépenses des dépenses pour atteindre pour atteindre publiques sans publiques avec publiques sans publiques avec l'accès universel l'accès universel mesure ciblée mesure ciblée mesure ciblée mesure ciblée Région des garçons (%)a des filles (%)a (millions de $)b (millions de $)c (%)d (%)d Moyen-Orient et Le taux d'inscription général dépasse déjà 100 % pour les classes plus nanties. Il suffit alors d'appliquer Afrique du Nord la politique de participation universelle s'adressant aux plus pauvres (décrite ci-contre), pour que tous les étudiants y accèdent. Il n'est pas nécessaire d'avoir deux politiques. Asie du Sud Afrique 29,7 44,3 1 394,3 851,4 33,3 20,4 subsaharienne a. Calculs tenant compte de l'élasticité des prix selon Schultz (1987). b. Calculée à partir de l'augmentation des dépenses publiques consenties pour compenser la baisse des dépenses dans le secteur privé; baisse due à la coupure des prix pour les garçons (deuxième colonne) et des filles (troisième colonne). c. Calculée à partir de l'augmentation des dépenses publiques consenties pour compenser la baisse des dépenses dans le secteur privé; baisse due à la coupure des prix pour les filles (troisième colonne). d. Calculée comme pourcentage des dépenses publiques initiales en éducation. 310 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 311 ANNEXE V Plan de participation universelle à l'instruction primaire qui cible les plus pauvres Coupure des Coupure des Augmentation Augmentation Augmentation Augmentation prix nécessaire prix nécessaire des dépenses des dépenses des dépenses des dépenses pour atteindre pour atteindre publiques sans publiques avec publiques sans publiques avec l'accès universel l'accès universel mesure ciblée mesure ciblée mesure ciblée mesure ciblée Région des garçons (%)a des filles (%)a (millions de $)b (millions de $)c (%)d (%)d Moyen-Orient et 53,6 73,7 306,0 180,7 3,3 2,0 Afrique du Nord Asie du Sud 61,9 79,7 218,3 125,3 3,3 1,9 Afrique 75,6 70,7 1 278,1 630,1 30,6 15,1 subsaharienne a. Calculs tenant compte de l'élasticité des prix selon Schultz (1987). b. Calculée à partir de l'augmentation des dépenses publiques consenties pour compenser la baisse des dépenses dans le secteur privé; baisse due à la coupure des prix pour les garçons (deuxième colonne) et des filles (troisième colonne), plus 9 % d'augmentation dû au ciblage des classes les plus pauvres. c. Calculée à partir de l'augmentation des dépenses publiques consenties pour compenser la baisse des dépenses dans le secteur privé; baisse due à la coupure des prix pour les filles (troisième colonne), plus 9 % d'augmentation dû au ciblage des classes les plus pauvres, plus un 2 % dû au ciblage des filles. d. Calculée comme pourcentage des dépenses publiques initiales en éducation. 311 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 312 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 313 Lexique des termes utilisés dans les tableaux Activités de marché La démarcation entre les activités de marché (qui sont rémunérées) et celles hors marché (qui ne sont pas rémunérées) correspond approximativement aux limites sur la production, telles que définies par le System of National Accounts (SNA, 1968) des Nations Unies. Les activités de marché com- prennent le travail réalisé à l'extérieur du foyer ainsi que la production de biens qui peuvent faire l'objet d'un marché (comme l'agriculture, par exemple). Activités hors marché Il s'agit d'activités productrices qui ne peuvent être intégrées à l'ensemble de la comptabilité d'un pays. Elles comprennent les études, les travaux communautaires ou le bénévolat, et l'entretien du foyer. Élasticité par rapport aux revenus C'est la capacité qu'un bien ou un service a de s'adapter à la fluctuation des revenus. L'élasticité est généralement exprimée par une variation en pour- centage dans la demande d'un bien ou d'un service, sensible à une varia- tion de 1 % des revenus, et elle est calculée selon les valeurs principales de ces variables. Élasticité des prix C'est la capacité qu'un bien a de s'adapter à son propre prix. Cette élasti- cité est généralement exprimée par une variation en pourcentage dans la demande d'un bien ou d'un service, sensible à une variation de 1 % dans le prix, et elle est calculée selon les valeurs principales de ces variables. Espérance de vie L'espérance de vie à la naissance correspond au nombre d'années qu'un 313 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 314 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE nouveau-né peut espérer vivre si les conditions de mortalité et de survie demeurent les mêmes tout au long de sa vie. Espérance de vie des femmes Il s'agit de l'espérance de vie des femmes à la naissance par rapport à celle des hommes à la naissance. Indice de corruption Basé sur l'International Country Risk Guide (ICRG), cet indice mesure le degré de corruption qui existe au sein d'un système politique. Le degré de corruption est évalué sur une échelle de 10 points, 0 indiquant le niveau le plus bas et 10 le degré le plus élevé. L'indice évalue la corruption existante et probable. Par exemple, les risques de corruption sont plus élevés dans les systèmes politiques où l'on observe du patronage en politique, du népo- tisme, du favoritisme en matière d'emplois, des liens trop étroits entre les affaires et la politique, et lorsque les partis politiques obtiennent du finan- cement de fonds secrets. Indice des droits économiques et sociaux des femmes (WESHR) Cet indice compare les droits des femmes à ceux des hommes, par rapport à sept indicateurs: · le droit au travail, évalué à partir des taux d'activités économiques; · le droit à un niveau de vie convenable, mesuré à partir du taux de mal- nutrition et de l'apport quotidien en calories; · le droit à la santé et au bien-être, évalué par les taux de mortalité et le rapport de masculinité; · le droit à l'instruction, mesuré par les degrés d'alphabétisation et par les taux d'inscription scolaire. Pour chacun des indicateurs, un taux de 1 signifie la parité entre les sexes. Un taux au-dessous de 1 indique une inégalité en faveur des hommes et au détriment des femmes, tandis qu'un taux plus élevé que 1 signifie une inégalité en faveur des femmes et au détriment des hommes. En addition- nant les taux des femmes par rapport à ceux des hommes pour les sept indicateurs, on obtient l'indice WESHR. Un résultat de 7 indique alors qu'on a atteint l'égalité des sexes en matière de droits économiques et sociaux. Indice Humana Dans le tableau 1.1, à partir d'informations puisées dans Humana (1986, 1992), les indices portent sur l'égalité entre l'homme et la femme en droits politiques et légaux, en droits sociaux et économiques ainsi qu'en droits concernant les procédures de mariage et de divorce. Dans d'autres tableaux, 314 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 315 LEXIQUE s'ajoute un indice supplémentaire, basé sur la moyenne de ces trois indices de droits. Sur une échelle de 1 à 4, 1 signifie un degré peu élevé d'égalité des sexes en matière de droits, tandis que 4 correspond à un degré élevé d'égalité. Moyenne d'années de scolarité Il s'agit de la moyenne des années passées à l'école, peu importe le niveau, pour les gens âgés de quinze ans et plus. Moyenne de temps épargné Il s'agit d'une estimation du temps, consacré à la recherche de l'eau et du combustible, épargné par les familles, par année, grâce à la réduction de la distance des points d'eau potable et des sources de combustible. Dans les tableaux 10 et 4.3, on fait référence à cinq lieux précis en Afrique où on s'est assuré que les points d'eau potable n'étaient pas à une distance supé- rieure à 400 mètres (6 minutes à pied), et les sources de combustible à plus de 30 minutes à pied pour chaque famille. Ces estimations proviennent de Barwell (1996). Parité du pouvoir d'achat Le facteur de conversion de la parité du pouvoir d'achat (Purchasing Power Parity ­ PPP) indique la quantité de devises d'un pays donné nécessaire pour l'achat d'une valeur égale à ce que l'étalon monétaire ­ en l'occurrence, le dollar américain ­ peut acheter dans le pays servant de référence (les États- Unis). Lorsqu'on utilise le facteur de conversion PPP plutôt que le taux d'échange de la monnaie, le PIB per capita d'un pays, calculé en monnaie nationale, peut alors être converti en dollars américains, en tenant compte des différences de prix que cela entraîne pour les biens et services domes- tiques. Or, puisque les prix sont généralement plus bas dans les pays en déve- loppement qu'aux États-Unis, le PIB per capita des pays en développement exprimé en dollars PPP a tendance à être plus élevé que lorsqu'il est exprimé en dollars américains. Dans les pays industrialisés, c'est l'inverse. Les facteurs de conversion PPP utilisés ici sont basés sur les prix les plus récents, selon les sondages du Programme international de comparaison, en collaboration avec la Banque mondiale et les commissions économiques régionales des Nations Unies. Ces sondages, réalisés de 1993 à 1996, couvraient 118 pays. Pays à faible revenu Dans le tableau 3, ce sont les pays dont le PIB per capita était de 765 $US ou moins, en 1995, selon la classification de la Banque mondiale de 1997. Dans les tableaux 5 et 6.1, ce sont ceux dont le PIB était de 4 000 $US ou moins, selon les prix de 1995. 315 Annexe 1 16/06/03 15:08 Page 316 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Pays à revenu moyen Dans le tableau 3, ce sont les pays dont le PIB per capita oscillait entre 766 $US et 9 385 $ US en 1995, selon la classification de la Banque mon- diale de 1997. Pays à revenu élevé Dans le tableau 3, ce sont les pays dont le PIB per capita était de 9 386 $US ou plus, en 1995, selon la classification de la Banque mondiale de 1997. Dans les tableaux 5 et 6.1, ce sont ceux dont le PIB excédait 4 000 $US, selon les prix de 1995. Représentation parlementaire Il s'agit du nombre de sièges occupés par des femmes aux assemblées natio- nales par rapport à ceux occupés par des hommes. Représentation professionnelle Il s'agit d'établir un rapport entre le nombre de femmes occupant une pro- fession divisé par le nombre de femmes oeuvrant dans un secteur autre que l'agriculture, et le nombre d'hommes occupant cette profession divisé par le nombre d'hommes oeuvrant dans un secteur autre que l'agriculture, selon Anker (1998). Si ce rapport est plus élevé que 1, les femmes sont sur- représentées dans cette profession; s'il est moins élevé que 1, les femmes y sont alors sous-représentées. Secteur informel Il s'agit du secteur de produits et services hors de portée des cadres réglementés, évoluant à l'intérieur du cadre familial ou dans des entreprises à petite échelle. Ces entreprises ne sont généralement pas reconnues légalement et peuvent ne pas être assujetties aux standards prescrits par le code légal. Habituellement, les employés du secteur informel ne sont pas admissibles à des bénéfices reliés à l'incapacité, à des indemnités de licenciement ou à de pensions, tandis que ceux du secteur formel jouissent souvent de ces bénéfices grâce à la loi. Taux général d'inscription Il s'agit du total des inscriptions scolaires pour un niveau donné (comme le primaire ou le secondaire), sans considération de l'âge des étudiants, exprimé en pourcentage et correspondant au nombre d'étudiants de ce niveau pour une année scolaire déterminée. Taux d'inscription des filles par rapport aux garçons Il s'agit du taux général d'inscription des filles comparé à celui des garçons. 316 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 317 Bibliographie Abu, Katherine. 1983. «The Separateness of Spouses: Ahikire, Josephine. 1994. «Women, Public Politics and Conjugal Resources in an Ashanti Town», dans C. 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Version 3, élaboré par le Département de statis- Industrial and Labor Relations Review, vol. 50, no 4, tiques des Nations Unies, New York. p. 594-609. 343 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 344 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 345 Index A 258, 269; titres de propriété, 107, 124; travail des femmes, 4, 55, 145, 197; violence faite aux femmes, 79, Afrique de l'Ouest, 18, 61, 156 116, 123 Afrique du Nord, 4, 11, 17, 38-39, 45, 47, 55, 60, 64, Années de vie corrigées du facteur invalidité (ACVI), 49- 91-92, 240, 244, 248, 251, 255, 260 50, 73 Afrique du Sud, 53, 61, 74, 108, 163, 165, 170, 185, Antilles, 42, 55, 64, 74, 89-90, 137, 222, 244, 248, 251, 272-273; droits égaux, 107, 128; titres de propriété, 258, 269; machismo, 79 126-127 Approvisionnement en eau et énergie, 189; infrastructures, Afrique subsaharienne, 17, 21-22, 37-39, 45, 64, 82, 92, 2, 183, 188, 231; temps épargné, 20-21, 112, 155, 100, 104, 157, 182, 184, 222-23, 233, 236, 241, 158, 182-183, 258, 268 244, 248, 255; agriculture, 32, 109, 164, 181; équité salariale, 57; espérance de vie, 46-47, 222, 225-226; Argentine, 141-142, 234; représentation parlementaire, 27, mortalité infantile, 49; représentation parlementaire, 272; violence faite aux femmes, 269 60, 74, 251; scolarisation, 4, 11, 44-45, 61, 84, 91, 240, 248, 251, 260-261; statut social des femmes, 84, Asie, 32, 47, 57, 70, 116, 145, 148, 151, 197; congés de 125; titres de propriété, 4, 32, 53, 126, 245; travail des maternité, 137; sida, 51 femmes, 55, 145, 197; VIH, 9, 32, 51-52, 75 Asie centrale, 38-39, 115, 227, 244, 248, 251; espérance de Aide sociale, 69, 270 vie, 47; mortalité infantile, 49; représentation parlemen- taire, 60, 74, 229; scolarisation, 42, 45, 62, 258; tra- Alimentation, 67, 68, 81, 83, 86, 154, 163, 165-166, 171, vail des femmes, 55, 145, 228 188, 219-220, 231, 278; inégalités en, 47-48, 74, 155, 161, 201, 248 Asie de l'Est, 21, 38, 80, 93, 104, 115, 189, 212-213, 219, 229, 232, 248, 251; exploitation sexuelle des Allemagne, 58, 73, 151, 195; soins des enfants, 138 femmes, 32; représentation parlementaire, 6, 33, 59-60, 74, 128; scolarisation, 11, 42, 45, 91, 260; travail des Amérique latine, 39, 64, 71, 89, 109, 115, 151, 212, 220, femmes, 4, 55, 214-216 222, 232, 244, 248, 251; agriculture, 53, 151; congés de maternité, 137; équité salariale, 57, 59, 90; espé- Asie du Sud, 17, 19, 38-39, 45, 61, 63, 67, 82, 84, 91-92, rance de vie, 222, 225; mortalité féminine, 32; repré- 100, 104, 113, 116, 184, 212, 235, 241, 244, 254- sentation parlementaire, 60, 74; scolarisation, 42, 45, 255; agriculture, 53; espérance de vie, 46-47; mortalité 345 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 346 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE féminine, 9, 32; mortalité infantile, 49, 62; représenta- Capital humain, 3, 19, 35, 86, 93, 167, 188, 198-201, tion parlementaire, 60, 74, 251; scolarisation, 4-5, 11, 204, 232-235 61, 240, 244, 248, 251, 260-261; statut social des femmes, 157; travail des femmes, 55, 134 Chili, 69, 236; congés de maternité, 137; salaires des femmes, 57; système de pension, 26-27, 141-142, 270; Asie du Sud-Est, 215; agriculture, 210; travail des femmes, titres de propriété, 37; travail des femmes, 220; violence 115 faite aux femmes, 80, 123 Australie, 69, 142, 269, 272; droit de vote des femmes, 127- Chine, 93, 148, 194-195, 212, 215, 217, 221, 226, 229- 128; équité salariale, 132, 151 232; congés de maternité, 137; droit de vote, 112; Autonomie des femmes, 28, 53, 59, 61, 75, 77, 81, 84-85, équité salariale, 18, 151; loi sur le mariage, 122; mor- 101, 104, 108, 113, 116-117, 136, 150-151, 154, talité féminine, 9, 47-49, 184; politique de l'enfant 169, 217, 227, 244, 255, 265, 275 unique, 32; représentation parlementaire, 7, 248; reve- nus gérés par des femmes, 163; salaires des femmes, 204, B 236; travail des femmes, 134, 147 Bangladesh, 9, 53, 67, 73-74, 150, 163, 165, 184, 190, Colombie, 87, 139, 174-175, 236, 269; titres de propriété, 193, 248; inégalités dans l'alimentation, 68, 74; pro- 112, 124 grammes de micro-finances, 185, 263, 265; programmes de prêts, 23, 83, 154-155, 166-167, 180, 185, 261, Comportements sexuels sécuritaires, 78 262; scolarisation, 18, 174-175, 177-178, 260; statut social des femmes, 157, 170; violence conjugale, 79 Conférences mondiales des femmes, 31, 41, 72, 119, 149 Banques mobiles, 18 Congés de maternité, 25-26, 134, 137, 144, 147, 151, 216, 227, 266-267 Barro, R.J., 90, 93 Consommation, 17, 19, 23, 65-66, 68, 74, 105, 129, 153, Bien-être, xi, 8-9, 13, 15, 23, 33-36, 46, 51, 65-68, 71, 156-157, 160-161, 163-164, 165-166, 169, 198, 74-77, 81, 83, 86, 89, 99-101, 104-105, 122, 139, 209, 230, 246, 262-263; biens de consommation, 211; 141, 154, 163-164, 166 indice de pauvreté, 66, 69, 74, 187 Biens, de production, 52-53, 59, 69, 112, 211, 246; famille, Convention pour l'élimination de toutes les formes de dis- 154, 190; mariage, 148, 162, 164-165, 184-185 crimination à l'égard des femmes (CEDAW), 41, 72, Bolivie, 38, 274, 278; droit de vote, 128; Fonds social d'ur- 118, 150 gence, 234; scolarisation, 87; titres de propriété, 124 Conventions internationales, 39, 103, 107, 117-119, 148, Botswana, 37, 92 151 Brésil, 142, 144; mortalité féminine, 74; revenus gérés par Corée, 115, 212, 235; équité salariale, 58, 134, 151, 215; des femmes, 83, 154, 163; salaire des femmes, 58; scola- mortalité féminine, 9, 47, 184; scolarisation, 93; taux risation, 87; travail des femmes, 142 de fécondité, 217; travail des femmes, 215, 218 Burkina Faso, 10, 20, 65, 74, 142, 157, 182; agriculture, Corruption, 13, 76, 95-97, 98, 100, 109, 272, 277; 53, 88, 146, 164, 168, 181; droit des femmes de tra- influence des femmes, 12, 30, 98 vailler, 116 Costa Rica: congés de maternité, 138, 147, 267; titres de C propriété, 112, 124 Cameroun, 10, 88, 164, 168 Côte d'Ivoire, 74; revenus gérés par des femmes, 83, 163, Canada, 122, 163, 176, 272; droit de vote, 128; équité 165, 170; revenus gérés par des hommes, 9; salariale, 132-133; violence faite aux femmes, 80, 269 scolarisation, 65, 87 346 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 347 INDEX Crédit, ix, 21, 23, 54, 119, 129, 236, 261, 263; accès au, Droits des femmes, 86, 98, 103, 109, 118, 127, 149, 152, 5, 24, 32, 52, 77, 144, 154-155, 168, 178, 245, 259, 227, 232, 246, 274; de voyager, 4, 32, 37-38; victimes 262; Voir aussi Emprunts de violence, 123 Croissance économique, 10, 12, 15, 22, 86, 92, 94, 100, Droits égaux, x, 1, 2, 4, 6, 12-13, 15-17, 22, 30, 32, 37- 219, 232, 240; et développement, 20, 22, 95, 187, 38, 59, 62, 72, 98, 107, 112, 115, 118-120, 121, 192, 232, 248; et égalité des sexes, 1, 76, 90-93, 103, 206-207, 237-239, 241-242, 244, 246, 251 189, 204, 208-209, 213-214, 235, 239, 251 Droits familiaux, 121, 157 D Droits fondamentaux, ix, 2, 5, 19, 22, 26, 34, 37, 73, Danemark, 115, 211; équité salariale, 58; salaires des 103, 105-106, 112, 119, 147, 238, 241, 259 femmes, 57, 73; soins des enfants, 138 Droits légaux, 1, 16, 38, 72, 119, 125 Développement, 10, 13, 15, 33-35, 85, 95, 102, 151, Droits politiques, 2, 38, 72, 100, 118, 148, 245 203, 209, 234, 237-238, 240, 247, 254, 267, 272; et inégalités fondées sur le genre, 3, 7, 14, 16, 21, 22, 28, Droits sociaux et économiques, 16, 72, 98, 119, 221 34, 36, 61, 70, 75-76, 93, 98, 101, 108, 119, 150, E 155, 169, 187, 209-211, 220, 232-233, 237-238, 241, 248, 251, 258, 274-275; participation au, 4, 5, Économie de marché, 148, 189, 226, 229, 231 37, 42, 45-46, 52, 65, 68, 255; politiques de, 8, 30, Économie de transition, 21, 33, 73-75, 79 33, 71, 95, 103, 150, 213, 232, 275, 277 Égypte, 74; droit de voyager, 38; droits civils des femmes, Développement économique, 2, 15, 18-20, 27, 61, 86, 112; mariage et divorce, 122; mortalité infantile, 62; 106, 184, 187-190, 192, 197, 200-201, 209, 212 scolarisation, 260 Discrimination, 67, 72, 77, 100, 105, 107, 130-132, 139, Émirats arabes unis: droit de vote, 127 145, 203, 246, 254; fondée sur le genre, 1, 9-10, 17- 18, 23-24, 28, 32, 37, 41, 47-48, 58, 71, 76, 80-81, Emplois, 58-59, 136, 192, 210, 228, 231, 258, 263; accès 89, 95, 100, 103-104, 108, 118, 134, 149-150, 201, aux, 24, 42, 45, 89, 129, 240, 255, 258-259; dévelop- 204, 211, 215, 233-236, 274; positive, 134-136, 151, pement économique et, 19, 188-189, 233, 247; droit des femmes de travailler, 114; inégalités fondées sur le 262, 264, 272 genre et, 55-57, 73, 130, 133, 236; participation au Division du travail, 35, 129, 158, 160, 188-190, 200, marché du travail, 54; recherche d', 2; Voir aussi Force 217-218, 234 ouvrière des femmes; Travail des femmes Droit de vote des femmes, 31, 42, 59, 112, 118, 127-128, Équateur, 74, 213, 221, 236; représentation parlementaire, 148, 151, 211, 245 27; titres de propriété, 124 Droits, 14, 97, 101; civils, 112; contrôle des naissances, 265; Équité salariale, 4, 6, 32, 58-59, 130, 135, 151, 203-204, des enfants, 99; équité salariale, 254; héritage, 211; 222, 231, 236 mariage et divorce, 4, 112, 121, 126, 245; titres de Espagne, 195; congés de maternité, 151; équité salariale, 58; propriété, 13, 24, 69, 77, 101, 107, 112, 116, 121- soins des enfants, 138 126, 129, 162; des travailleurs, 144, 157, 215, 245 Espérance de vie, 4, 9, 26, 29, 33, 36, 46-47, 49-50, 52, Droits de l'homme, 31, 118-119, 122, 124, 135, 149; 70-71, 73, 77, 79, 84, 108, 119, 121, 197, 206-208, Déclaration universelle des droits de l'Homme, 72, 103; 212, 216, 222, 224-226, 229, 236, 238, 241-242, Voir aussi Humana, C.; Guide mondial des droits de 244, 248-249, 251-252, 269, 275, 277; des femmes, l'homme 4, 33, 47, 70, 216, 222, 224-226 347 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 348 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE États-Unis, 17, 99, 148, 151, 194-195, 210, 235, 278; mortalité infantile, 48, 62; pauvreté, 69; représentation congés de maternité, 137, 151, 267; équité salariale, parlementaire, 27, 128, 272; scolarisation, 62, 65, 173, 133, 151, 203; pauvreté, 69; revenus gérés par des 260; taux de masculinité, 32; travail des femmes, 193, femmes, 170; scolarisation, 86; services de garde, 176; 195 soins des enfants, 174, 266; travail des femmes, 115, Indice, de corruption, 97-98, 109; de l'autonomie, 84; de 134-136, 264; violence faite aux femmes, 123, 269 consommation, 23; de pauvreté, 66; d'égalité, 77, 150, Europe de l'Est, 33, 73, 75, 148, 189, 210, 212, 226-228, 207, 241; des droits, 30, 72, 109, 151; droits de 232, 251; espérance de vie, 9, 71, 79, 269; mortalité l'homme, 38; Duncan, 56, 73; Humana, 109, 119, infantile, 49; pauvreté, 69; représentation 121; des libertés humaines, 39 parlementaire, 6, 60, 73-74; scolarisation, 84, 248, Influence des femmes, 3, 6, 12, 28, 36, 59, 240, 245, 258; sida, 51; trafic des femmes, 32 272-273, 274-276 F Influence politique, ix, 1-2, 22-23, 26, 34, 37, 75, 112, Faire face aux nouveaux problèmes, 29 121, 232, 237-238, 255, 272 Fécondité, 85, 86, 93, 108, 217 Infrastructures, 2, 182-183, 192, 203, 231, 233, 240; investissements dans les, 20-21, 26, 155, 171, 181- Femmes musulmanes: autonomie, 116-117; scolarité, 150 182, 188, 258, 265, 267 Finlande, 72, 211; soins des enfants, 138 Irlande: soins des enfants, 138 Force ouvrière des femmes, 140, 142, 145, 152, 176 Islande, 211 G Italie, 195; congés de maternité, 151; soins des enfants, 138 Garcia, M., 160, 177, 185, 199, 266 J Géorgie, 80; pots-de-vin, 12, 97, 109 Japon, 151, 212, 217; congés de maternité, 137, 267; reve- nus des femmes, 57, 215; taux de fécondité, 217; travail Ghana, 18, 61, 74, 92, 157, 164-165, 169-170, 173, 179, des femmes, 115, 215 183, 201, 221-222, 236, 262, 278; titres de propriété, 126-127 Jordanie, 123, 144; droit de voyager, 38 Grèce: droit de vote, 128; équité salariale, 132; soins des K enfants, 138 Kenya, 10, 74, 76, 87, 185; agriculture, 53, 180; pro- Guatemala, 149; services de garde, 82; violence faite aux grammes de prêts, 54; réforme des lois, 146; scolarisa- femmes, 123 tion, 18, 178; services de garde, 25, 176-177, 266; temps de travail, 68; titres de propriété, 125-126, 128 Guide mondial des droits de l'homme, 39 Klasen, S., 32, 47-49, 84-85, 92-93, 94, 109 H L Honduras: travailleurs domestiques, 144 Laos: titres de propriété, 125 Hongrie, 73; pauvreté, 69 Lee, J.W., 90, 93, 215 Humana, C., 30, 38-39, 72, 86, 108-109, 119 Lesotho, 37 I Lokshin, M.M., 139, 160, 176-177, 185, 199, 229, 266 Inde, 61, 67, 69, 87, 162, 171, 185, 190, 201, 274; agri- culture, 181; mortalité féminine, 47, 74, 153, 184; Lopez, A.D., 49, 73 348 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 349 INDEX M P Machismo, 79, 116; Voir aussi Violence Pakistan, 61, 74, 155, 171, 183, 190, 201; mortalité infan- tile, 62; scolarisation, 18, 65, 173-175, 177, 260; vio- Maladies transmissibles sexuellement, Voir VIH, Sida lence faite aux femmes, 123 Malaisie, 109, 201, 212, 235; scolarisation, 173; travail des Pays-Bas, 115, 134, 142, 144; congés de maternité, 151; femmes, 195, 215 soins des enfants, 138 Malnutrition, 9, 75, 104, 158, 184; éducation des femmes, Pérou, 74, 190; scolarisation, 87, 173 84, 85, 101 Personnes âgées, 69-70, 189, 192, 234; sécurité des, 139- Mexique, 17, 115, 141-142, 174, 203; système de pension, 140, 151, 268, 270, 278; soins aux, 211; soutien aux, 139, 162 141; violence faite aux femmes, 269 Philippines, 82, 151, 194, 278; représentation Mortalité, 70, 80, 229, 270; féminine, 9, 32, 47-49, 74, 78, parlementaire, 27, 128, 274; scolarisation, 173, 184 113, 153, 184; infantile, 6, 9, 46, 48-49, 62, 65, 74, 81, 83-84, 101, 104, 235; masculine, 10, 33, 47, 79 Pots-de-vin, 12, 96-97, 109 Moyen-Orient, 38-39, 64, 72, 92, 195, 241, 248, 251; Programmes d'aide à l'agriculture, 180-181 autonomie des femmes, 32; égalité des sexes, 45; espé- R rance de vie, 46; mortalité féminine, 47, 184; représen- tation parlementaire, 17, 60, 74, 244; scolarisation, 4, Représentation parlementaire, 6-7, 17, 19, 33, 42, 60, 73, 98-99, 128, 207, 238, 241-242, 244, 248-249, 252, 11, 91, 240, 260-261; travail des femmes, 55 272, 277 Mozambique, 272 Retraite, 69; âge de, 141, 197, 269-270; revenus de, 140; «mur de verre», 131 Voir aussi Système de pension Royaume-Uni, 134; congés de maternité, 151; équité sala- Murray, C.J.L., 49, 73 riale, 58, 132, 151; revenus gérés par des femmes, 163, Mutilations génitales des femmes, 32 165; soins des enfants, 138; système de pension, 142 N S Namibie, 37 Scolarisation, 4-5, 11, 18, 42, 44-45, 61-62, 65, 84, 87, 91, 93, 173-175, 177-178, 219, 231, 240, 244, 248, Nicaragua, 57, 74, 248; violence faite aux femmes, 80 251, 258, 260-261, 269 Nigeria, 79, 82, 179; agriculture, 53, 180-181 Sénégal, 74, 184; scolarisation, 65; VIH, 78 Norvège, 211, 267 Sida, 9, 29, 32, 46, 51-52, 75, 77-78, 276; Voir aussi VIH Singapour, 93, 212; travail des femmes, 215 Nouvelle-Zélande: droit de vote des femmes, 132 Soins des enfants, 9, 70-71, 78, 81, 83, 149, 158-159, O 174, 176, 217, 265-266 Ordinateurs, 194-195 Sri Lanka, 48, 272; scolarisation, 62 Ouganda, 20, 74, 107, 182, 272; mariage et divorce, 17, Suède, 72, 211, 272; congés de maternité, 151; équité sala- 121-122; représentation parlementaire, 7, 27, 128, riale, 151; soins des enfants, 138; violence faite aux 248, 273; travail des femmes, 222 femmes, 269 349 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 350 GENRE ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Swaziland, 37 Travailleurs autonomes, 144 Syrie, 38; agriculture, 181; droit de vote, 128 V Système de pension, 26-27, 141-142, 270 Vaccination des enfants, 10, 82 Système de sécurité sociale, 139 Vers un partenariat élargi, 29 T Veuves, 26, 29, 74, 268, 275; droit de travailler, 116, 126; Taiwan, 93, 134, 212, 215, 217; congés de maternité, 137, pauvreté, 67, 69-70; pension, 141, 270; titres de pro- 147; équité salariale, 151, 236; revenus gérés par des priété, 53, 125-126, 127 femmes, 163 Viêt-Nam, 18, 54, 74, 88, 221, 226, 229, 231-232, 236; Tanzanie, 74, 182-183, 272-273; agriculture, 180; scolari- sation, 173; titres de propriété, 126 agriculture, 54, 180; scolarisation, 231 Taux de masculinité, 47-48 VIH, 9, 11, 78; Voir aussi Sida Temps de travail, 183-184, 190 Violence, 77; conjugale, 76, 79-80, 116, 121, 123, 162, 229, 269; faite aux femmes, 2, 79-80, 99, 104-105, Thaïlande, 212, 217; agriculture, 181; équité salariale, 57, 151; scolarisation, 87, 219; taux de fécondité, 217; tra- 108, 116, 119, 124, 128, 185, 227, 236, 245 vail des femmes, 215, 218; VIH, 78 Z Titres de propriété, 5, 24, 32, 53-54, 77, 86, 89, 107, Zambie, 20, 53, 182-183; agriculture, 180; travail des 111, 116, 122, 124-126, 127-129 femmes, 234 Travail des femmes, 4, 18, 55, 79, 87, 115, 134-136, 140, 142, 145, 147, 151, 193-195, 197, 200, 214-218, Zimbabwe, 144, 201; droit de vote, 128; mariage et divorce, 220, 222, 227-229, 234, 264, 267 122, 126; programmes de prêts, 54 350 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 351 Bibliographie 10/06/03 11:56 Page 352 L a discrimination fondée sur le genre est un phénomène qui existe par- B A N Q U E M O N D I A L E tout au monde. Même si des progrès considérables ont été accomplis durant les dernières décennies, il n'en demeure pas moins que les 1818 H Street N.W. femmes ne jouissent pas des mêmes droits légaux, sociaux et écono- Washington, D.C. 20433 USA miques que les hommes, et cela, dans toutes les régions du monde en voie de développement. On accuse de très grandes inégalités entre les Téléphone: 202-477-1234 sexes concernant l'accès aux ressources et leur maîtrise, les opportuni- Télécopieur: 202-477-6391 tés économiques, le pouvoir et l'influence politique. Ce sont les femmes Internet: www.worldbank.org et les filles qui assument la plus grande part du fardeau et des coûts Courriel: feedback@worldbank.org liés aux inégalités, mais ces dernières affectent la société dans son ensemble et portent préjudice à tous les citoyens et citoyennes. Ce livre présente les résultats des recherches les plus reconnues et les plus récentes en sciences sociales afin d'évaluer judicieusement les torts et les préjudices que les inégalités fondées sur le genre infligent tant au bien-être des personnes qu'aux projets de développement des nations. Le rapport expose comment les institutions, autant formelles qu'informelles, déterminent les rôles dévolus à chaque genre et com- ment les décisions familiales et les coutumes reflètent ces rôles. Il approfondit la relation existant entre le développement économique et l'égalité des sexes ainsi que le rôle de la politique publique et celui de l'action civile dans la promotion de l'égalité. Ce rapport soutient que des politiques de développement qui ne tien- nent pas compte des caractéristiques propres à chaque genre et qui font fi des écarts entre les sexes n'ont qu'un impact limité. Dans le but de promouvoir à la fois l'égalité et un développement durable, ce rap- port propose une stratégie à long terme basée sur la réforme des insti- tutions afin d'établir des droits égaux et des opportunités égales pour chaque genre. D'autre part, la stratégie encourage un développement économique incitant à un accès plus équitable aux ressources, accom- pagné de mesures permettant de faire face aux inégalités les plus per- sistantes concernant l'accès aux ressources et l'influence politique. L'État, la société civile et la communauté internationale ont tous un rôle de première importance à jouer dans la lutte contre la discrimina- tion fondée sur le genre. Et ce combat ne peut que bénéficier à toute la société. Genre et développement économique : vers l'égalité des sexes dans les droits, les ressources et la participation est le dernier d'une série de rapports visant à transmettre à un vaste public les résultats des recherches entreprises par la Banque mondiale sur des problèmes liés au développement. Ces rapports ont pour objectif de faire le point sur cet impor- ISBN 2-89035-369-9 tant sujet et de contribuer au débat sur les politiques sus- ceptibles de favoriser le développement économique. Visitez le site de la Banque mondiale : www.worldbank.org/gender/prr