82538 ÉTUDE DE LA BANQUE MONDIALE Rapport sur la Croissance et l’Emploi en République gabonaise Créer les conditions d’une croissance inclusive Rick Emery Tsouck Ibounde, Patrick Hoang-Vu, Fallou Dieye Rapport sur sur la Croissance et l’Emploi en République gabonaise Créer les conditions d’une croissance inclusive Département Gestion économique Rapport N°82538-GA et Réduction de la pauvreté © 2013 International Bank for Reconstruction and Development / The World Bank 1818 H Street NW, Washington DC 20433 Téléphone: 202-473-1000; Web: www.worldbank.org Certains droits réservés 1 2 3 4 16 15 14 13 Cet ouvrage a été établi par les services de la Banque mondiale avec la contribution de collaborateurs extérieurs. La Banque mondiale n'est pas nécessairement propriétaire de la totalité de son contenu. Elle ne garantit donc pas que l'utilisation du contenu de l'ouvrage ne porte pas atteinte aux droits de tierces parties. 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Tous lesdits privilèges et immunités de la Banque mondiale sont expressément réservés. Droits et licences L’utilisation de cet ouvrage est soumise aux conditions de la licence Creative Commons Attribution 3.0 Unported license (CC BY 3.0) (http://creativecommons.org/licenses/by/3.0. Conformément aux termes de la licence Creative Commons Attribution (paternité), il est possible de copier, distribuer, transmettre et adapter le contenu de l'ouvrage, notamment à des fins commerciales, sous réserve du respect des conditions suivantes: Attribution (Paternité) - L’ouvrage doit être cité de la manière suivante: Banque mondiale. 2013. Rapport sur la Croissance et l’Emploi en République gabonaise, License: Creative Commons Attribution CC BY 3.0 Traductions — Si une traduction de cet ouvrage est produite, veuillez ajouter à la mention de la paternité de l'ouvrage, le déni de responsabilité suivant: Cette traduction n'a pas été réalisée par la Banque mondiale et ne doit pas être considérée comme une traduction officielle de cette dernière. La Banque ne saurait être tenue responsable du contenu de la traduction ni des erreurs qui peuvent y figurer. Pour tous renseignements sur les droits et licences s'adresser au Service des publications et de la diffusion des connaissances de la Banque mondiale: Publishing and Knowledge Division, The World Bank, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433, USA. Table des Matières Abréviations ix Remerciements xi Synthèse 13 1. Introduction 27 2. Contexte Economique 29 Performances économiques du Gabon depuis l’indépendance   29 La période de croissance stable et régulière : 1960-1972 30 Le boom pétrolier : 1973-1985 31 Décroissance et échec des tentatives d’ajustement structurel de l’économie : 1986-200 32 Réformes structurelles et stabilisation macroéconomique : 2003-2010  33 Perspectives de croissance 35 Les sources de la croissance gabonaise 37 Du côté de l’offre: une économie toujours fortement dépendante du pétrole 37 Un secteur secondaire embryonnaire mais en expansion 39 Un secteur tertiaire dominant 39 Du côté de la demande : la prépondérance de la demande intérieure 40 v Comptabilité de la croissance : une productivité globale des facteurs négative au cours des quarante dernières années 41 L’impact de la croissance sur l’emploi 42 La période de plein d’emploi : 1960-1985  42 Dégradation continue du marché de l’emploi : 1986-2010 43 La croissance sans emploi : 2003-2010 46 Conclusion du chapitre 46 3. Le marché du travail gabonais 47 Contexte démographique : une population jeune et urbaine 47 Caractéristiques principales du marché du travail gabonais 50 Un chômage très élevé et en augmentation  50 Une population active occupée majoritairement urbaine et informelle  57 Un coût du travail relativement élevé 61 L’Education et l’insertion professionnelle des jeunes et des femmes au Gabon 63 Education et insertion professionnelle  63 Rendement de l’éducation 65 Conclusion du chapitre  66 4. Contraintes et défis du marché du travail gabonais 67 Du côté de l’offre : l’inadéquation entre la structure du système éducatif et les opportunités d’emploi  67 Une faible efficacité interne du système d’enseignement général de base  70 Une faible couverture scolaire et un faible rendement externe de l’enseignement technique et professionnel  72 Des allocations budgétaires insuffisantes et inefficaces au secteur de l’éducation  73 La réforme en cours du système éducatif  75 Du côté de la demande : un climat d’investissement contraignant  78 Un dispositif d’appui au développement du secteur privé inefficace  79 Un coût élevé et une faible qualité de l’énergie 81 Une faible qualité des infrastructures et des services de transport et de logistique  83 Un accès difficile au crédit 85 Du côté du cadre légal et institutionnel :  87 Une législation du travail rigide 87 Un système de protection sociale structurellement déséquilibré 89 L’absence d’un système d’information fiable sur le marché de l’emploi  92 Une intermédiation limitée sur le marché du travail 94 Un impact limité des programmes de promotion de l’emploi 95 5. Conclusion : Créer les conditions d’une croissance inclusive 99 Annexe 1 : Liste des compétences nécessaires pour la réalisation des projets miniers du PSGE 103 Annexe 2 : Quelques concepts et indicateurs du marché du travail 105 vi Références bibliographiques 107 Tableaux Tableau 1 : Utilisation du PIB, 1980-2010 40 Tableau 2 : Evolution des effectifs du secteur privé formel: 1985-2010 44 Tableau 3 : Proportion de la population scolarisée par groupe d’âge, 2010 49 Tableau 4 : Structure de la population active, 2010 50 Tableau 5 : Taux de satisfaction des offres et demandes d’emploi par niveau de qualification, 2010 55 Tableau 6 : Répartition de l’emploi principal par secteur institutionnel et catégorie socioprofessionnelle, 2010 60 Tableau 7 : Variations des gains moyens par niveau d’instruction au Gabon 65 Tableau 8 : Bilan quantitatif éducation – formation 68 Tableau 9 : Dépenses publiques d’éducation, Gabon et pays comparateurs, 1989  74 Tableau 10 : Tarifs d’électricité pratiqués au Gabon et en Afrique, 2009 83 Tableau 11 : Financement de la CNSS, 2012 90 Graphiques Graphique 1 : Evolution du PIB du Gabon, 1960-2010  29 Graphique 2 : Evolution PIB réel par habitant, 1960-2010 30 Graphique 3 : Croissance du PIB pétrolier et non pétrolier, 1990-2010 33 Graphique 4 : Evolution du prix des matières premières, 1960-2009 34 Graphique 5 : Evolution du solde budgétaire global et du déficit primaire non pétrolier, 1990-2011 35 Graphique 6 : Perspectives de croissance de l’économie gabonaise, 2008-2017 36 Graphique 7 : Origines du PIB, 1980-2010 38 Graphique 8 : Contribution factorielle à la croissance du PIB, 1970-2010 41 Graphique 9 : Tendances de l’emploi, 1985-2010 43 Graphique 10 : Evolution de l’emploi formel, 1985-2010 45 Graphique 11 : Evolution des parts relatives des effectifs privés et publics dans l’emploi formel, 1985- 2010 45 Graphique 12 : Pyramide des âges de la population gabonaise, 2010 48 Graphique 13 : Structure de la population gabonaise par milieu de résidence et par sexe, 2010 48 Graphique 14 : Projections démographiques, 1960-2025 50 Graphique 15 : Evolution du taux de chômage (au sens du BIT) au Gabon, 1993-2010 51 Graphique 16 : Taux de chômage au Gabon et dans les pays comparateurs, 2010 51 Graphique 17 : Taux de chômage dans les principales villes d’Afrique de l’Ouest et centrale, 2010 52 Graphique 18 : Taux de chômage par province, 2010 52 Graphique 19 : Taux de chômage par tranche d’âge, 2010 53 Graphique 20 : Taux de chômage par niveau d’instruction, 2010  54 Graphique 21 : Taux de chômage par sexe et en fonction du niveau d’instruction, 2010 56 Graphique 22 : Distribution géographique de l’emploi au Gabon, 2010 57 Graphique 23 : Distribution de l’emploi informel par branches d’activités, 2010 Graphique 24 : Répartition de l’emploi par secteur institutionnel, 2010 58 58 vii Graphique 25 : Répartition de l’emploi global par branches d’activités  59 Graphique 26 : Coût du travail dans les pays de la CEMAC 62 Graphique 27 : Revenu mensuel moyen par secteur d’activité au Gabon, 2010 63 Graphique 28 : Structure de la demande de main-d’oeuvre qualifiée des projets d’OLAM Gabon, 2012-2016 69 Graphique 29 : Structure de l’offre d’éducation dans l’enregistrement supérieur, 2011 69 Graphique 30 : Taux de redoublement primaire au Gabon et dans le monde, 2008 70 Graphique 31 : Ratio nombre d’élèves par enseignant, par niveau d’enseignement, Gabon et pays à revenu intermédiaire, 2008 70 Graphique 32 : Disponibilité de matériel et équipement pédagogiques dans les salles de classes au primaire, 2008 71 Graphique 33 : Couverture scolaire dans l’enseignement technique et professionnel au Gabon et dans d’autres pays  72 Graphique 34 : Distribution des dépenses publiques d’éducation par niveaux d’études et par nature, 1988 75 Graphique 35 : Classement du Gabon dans le rapport Doing Business 2013 78 Graphique 36 : Principaux obstacles au développement du secteur privé, 2009 79 Graphique 37 : Pourcentage de routes bitumées, 2009  84 Graphique 38 : Taux d’intérêt débiteurs au Gabon, dans les pays de CEMAC, 2010 et d’autres pays à revenu intermédiaire 86 Encadrés Encadré 1 : L’enquête nationale sur l’emploi et le chômage (ENEC) 56 Encadré 2 : Déséquilibre entre les besoins du secteur productif et la structure du système éducatif gabonais: le cas des projets d’OLAM au Gabon 69 Encadré 3 : Un exemple de partenariat public privé en matière d’éducation : L’institut du Pétrole et du Gaz (IPG) 77 viii Abréviations ANGT  Agence Nationale des Grands Travaux APIEX  Agence de Promotion des Investissements et des Exportations APIP  Agence de Promotion des Investissements Privés BEAC  Banque des Etats de l’Afrique Centrale BIT  Bureau International du Travail BGD  Banque Gabonaise de Développement CEMAC  Communauté Economique et Monétaire d’Afrique Centrale CDD  Contrat à Durée Déterminée CDE  Centre de Développement des Entreprises CNSS  Caisse Nationale de Sécurité Sociale CPG  Confédération Patronale Gabonaise CPI  Conseil Présidentiel de l’Investissement CNAMGS  Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de Garantie Sociale EGEP 2005  Enquête gabonaise d’Evaluation de la Pauvreté 2005 ENEC 2010  Enquête nationale sur l’emploi et le chômage 2010 FCFA  Franc de la Communauté Financière Africaine FODEX  Fonds de Développement et d’Exploitation ix FIR  Fonds d’Insertion et de Réinsertion MEEDD  Ministère de l’Economie, de l’Emploi et du Développement Durable MENETPFP  Ministère de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle OHADA  Organisation pour l’Harmonisation en Afrique pour le Droit des Affaires ONE Office National de l’Emploi PIB  Produit Intérieur Brut RGPH 1993  Recensement Général de la Population et de l’Habitat RESEN  Rapport d’Etat du Système Educatif National x Remerciements Le présent rapport a été réalisé par une équipe conduite par M. Rick Emery Tsouck Ibounde (économiste principal, département réduction de la pauvreté et gestion économique 3) qui en est l’auteur principal. L’équipe comprenait également MM. Patrick Hoang-Vu (économiste, département du développement humain), Fallou Dieye (consultant, département développement du secteur privé). L’équipe s’est appuyée sur deux notes produites à la demande de la Banque mondiale, l’une par M. Djima Moussilou (ingénieur statisticien économiste, consultant) sur l’analyse des résultats de l’ENEC 2010 et M. Etienne NSIE (Professeur de droit privé, UOB)1 sur la législation sociale au Gabon. Mesdames Sidonie Jocktane (assistante exécutive au Bureau du Gabon), Sonia Vanecia Boga (assistante administrative au Bureau du Gabon) et Sylvie Munchep Ndze (assistante au Bureau du Cameroun) ont contribué à la mise en forme de ce rapport. Mesdames Ghislaine Delaine (statisticienne principale, Banque mondiale), Shobhana Sosale (spécialiste principale en éducation, Banque mondiale) et M. Mamadou Ndione (économiste principal, Banque mondiale) ont revu et fourni des commentaires sur la version préliminaire du rapport. L’équipe a bénéficié de l’appui et des conseils de M. Gregor Binkert (Directeur des opérations pour le Gabon), Mme Zouera Youssoufou (Représentante résidente de la Banque mondiale au Gabon), M. Olivier Godron (coordonnateur des programmes du pays), M. Mark Roland Thomas (Responsable du département réduction de la pauvreté xi et gestion macroéconomique 3), Mr. Raju Singh (économiste en chef, département réduction de la pauvreté et gestion macroéconomique 3), Mr. Erik Von Uexkull (économiste, département réduction de la pauvreté et gestion macroéconomique 3), M. Gilberto de Barros (coordonnateur sous-régional du départent finance et développement du secteur privé), M. Jean Charles Crochet (économiste principal des transports, département développement durable) et M. Stéphane Garnier (coordonnateur sous- régional du département développement durable). Ce rapport est le résultat d’une analyse documentaire, de l’exploitation des résultats de la première enquête nationale sur l’emploi et le chômage (ENEC 2010), menée en décembre 2010-janvier 2011, et des entretiens avec les principaux acteurs concernés par la question de l’emploi (Ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle, Direction Générale des ressources humaines du Ministère de l’Emploi, l’Office National de l’Emploi (ONE), la Confédération Patronale du Gabon (CPG), la confédération syndicale du Gabon (COSYGA) et la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). L’équipe tient à 1  Les deux notes sont : Education et Insertion des jeunes et des femmes sur le marché du travail au Gabon, juin 2012, Djima Moussilou, Ingénieur Statisticien Economiste et Législation du travail, système de protection sociale des travailleurs et politiques de promotion de l’emploi au Gabon, Pr. Etienne NSIE, Agrégé de droit privé, Juin 2012. remercier l’ensemble des personnels de ces différentes administrations et organismes publics et privés pour leur franche collaboration. Une première version du rapport a été discutée avec les autorités techniques gabonaises en novembre 2012, notamment des représentants du Ministère de l’Economie et de l’Emploi, du Ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle, de la CNSS de la CNAMGS et de l’ONE. La présente version prend en compte les observations pertinentes qui ont été formulées pendant cet atelier de restitution. Ledit atelier a par ailleurs recommandé l’évaluation des besoins en ressources humaines et compétences des secteurs prioritaires du Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE) et l’organisation d’un forum national regroupant les acteurs nationaux et internationaux concernés par la question de l’emploi pour un échange d’expériences et s’accorder sur un programme d’actions prioritaires clés susceptible de générer une croissance inclusive. 12 Synthèse 1. Le présent rapport a été élaboré dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie 2012-2016 d’intervention de la Banque mondiale au Gabon dont la compétitivité et l’emploi constituent le premier pilier. Son objectif est de mettre en exergue les principaux obstacles à la création d’emplois, en vue de formuler des recommandations qui vont alimenter le dialogue entre la Banque mondiale et les autorités gabonaises sur les actions à entreprendre afin de faire de la mise en œuvre du Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE) une alternative de croissance plus inclusive que les précédentes stratégies de développement. 2. Après une analyse de la perspective historique de croissance, de ses sources et de son impact sur l’emploi, le rapport présente les caractéristiques principales du marché du travail gabonais et les principaux défis auxquels il est confronté ; puis recommande des axes de réformes susceptibles de renforcer l’impact de la croissance économique sur l’emploi. Contexte économique et social : une croissance à long terme positive mais faible en création d’emplois 3. A l’instar de beaucoup de pays en développement, le Gabon fait face au 13 défi du chômage. Alors que le Gabon a enregistré une croissance économique globalement positive au cours des quarante dernières années, en moyenne 4,5% par an, le chômage touche une personne active sur cinq et est en progression. Il atteint 28% lorsque l’on tient compte des chômeurs découragés. Ce niveau de chômage observé est environ 10 fois plus élevé qu’au Cameroun et quatre fois supérieur à la moyenne des pays à revenu intermédiaire. 4. Le chômage au Gabon frappe principalement les jeunes et n’épargne pas les diplômés. Le taux de chômage atteint 35,7% chez les jeunes de 15 à 24 ans quel que soit le milieu de résidence (ville ou campagne) et 26% chez les actifs de 25 à 34 ans. Un taux de chômage aussi important (plus d’un jeune sur trois) est une source potentielle de troubles sociaux, et révèle l’urgence d’explorer les possibilités de mise en œuvre d’une croissance plus inclusive que par le passé. Par ailleurs, les actifs ayant un niveau secondaire 1er cycle général et technique, avec des taux de chômage respectifs de 24% et 27 pour cent, sont les plus touchés par le chômage. Parmi ceux ayant un niveau secondaire 2ème cycle, les diplômés des filières techniques (10% de chômage), en sont toutefois moins victimes que ceux ayant reçu une formation générale (20% de chômage). Une telle proportion de chômeurs diplômés, même en période de croissance positive, appelle à s’interroger sur l’efficacité du système éducatif national. 5. L’économie gabonaise se caractérise également par la vulnérabilité des femmes sur le marché du travail. D’abord, le chômage des femmes est d’environ deux fois celui des hommes, et c’est parmi elles que l’on observe le plus de chômeurs découragés. En conséquence, elles sont moins présentes sur le marché du travail avec un taux d’activité évalué à 34,5% soit plus de 15 points d’écart avec celui des hommes qui s’élève à 49,6%. Ensuite, plus de la moitié des femmes actives occupées déclarent un revenu mensuel inférieur à 50.000 francs CFA alors qu’un homme sur cinq seulement est dans cette situation. A l’autre extrême, elles ne sont que 12% à percevoir un revenu mensuel supérieur à 200.000 francs CFA contre plus de 28% des hommes. Cette vulnérabilité vis-à- vis du marché du travail est principalement la conséquence des écarts observés au niveau des enseignements secondaire et supérieur. Alors que le ratio fille/garçon est proche de 1 au niveau primaire, les écarts importants de niveau d’instruction en défaveur des femmes sont observés pour les niveaux secondaire second cycle et supérieur avec respectivement 21% contre 16% et 8% contre 6%. 23% des jeunes filles ayant arrêté l’école affirment que c’est à cause des grossesses et des mariages précoces (23%) et 42% répondent que c’est en raison de l’incapacité financière des parents. 6. Le niveau de l’emploi privé formel s’est extraordinairement réduit au cours des 25 dernières années. Après la période de plein emploi observée entre 1960 et 1985, portée par la politique budgétaire expansionniste de l’Etat, la dynamique du marché du travail s’est caractérisée entre 1986 et 2010 par une baisse continue de l’emploi privé formel. Entre 1986 et 1994, le secteur privé formel a enregistré une baisse de 30.000 emplois représentant 24% des effectifs de 1985. Il a ensuite légèrement augmenté entre 1995 et 2001, suite à 14 l’embellie observée après la dévaluation du franc CFA, avant de poursuivre sa baisse tendancielle (en moyenne de 3%) jusqu’en 2010 et atteindre 41.000 actifs contre 74 000 actifs en 19852. 7. La principale raison de cette forte contraction de l’emploi formel a été l’effort d’ajustement structurel entre 1986 et 2002, qui a en grande partie porté sur le programme d’investissements publics qui lui-même a affecté les branches d’activités qui en dépendent le plus (BTP, services, transport…). Entre 2003 et 2010, la contraction de l’emploi s’est poursuivie malgré une croissance tirée par le secteur hors pétrole en raison de l’accélération du programme de privatisation qui a poussé les repreneurs à réduire les effectifs à des niveaux compatibles avec les capacités réelles de production des entreprises. Les licenciements économiques liés au programme de privatisation des entreprises parapubliques ont entraîné une réduction d’environ 4.000 emplois  entre 2004 et 2007. La seule entreprise Gabon Télécom, privatisée en 2007, a enregistré 700 départs sur un effectif total de 1.050 salariés avant la privatisation. La crise financière de 2008- 2009 a également eu un impact dépressif sur l’emploi, principalement dans les secteurs forestiers et miniers. 8. L’emploi global (formel et informel) a cependant pu s’accroître en raison des recrutements massifs dans l’administration publique (sans programmation et sans rapport avec le niveau réel de ses besoins) dont les effectifs ont doublé 2  Ces chiffres proviennent des statistiques administratives (DGS et DGELF). Les statistiques de l’ENEC indiquent un nombre plus élevé de l’emploi privé formel (66.357) mais confirment un niveau plus bas que celui de 1985. entre 1985 et 2010. Le secteur informel a également joué un rôle d’amortisseur en servant de refuge à un nombre croissant d’individus en situation d’exclusion et de précarité à la recherche d’un emploi. Evalués à 98.000 en 1985, soit 44% des actifs occupés, sa part dans l’emploi total était estimée à 57% en 2010, soit 225.000 actifs. Les principales causes du faible impact de la croissance sur l’emploi 9. Plusieurs facteurs expliquent un taux de chômage aussi élevé et une baisse de l’emploi formel au Gabon, malgré une croissance positive à long terme. La structure de l’économie largement dépendante du secteur pétrolier, un secteur très peu intensif en main-d’œuvre et soumis aux aléas du marché international, mais aussi l’inadéquation entre l’offre d’éducation et les besoins en main-d’œuvre du secteur productif qui ne permet pas à un nombre élevé de ceux qui en sortent de saisir les opportunités d’emplois. Le climat d’investissement contraignant qui freine la diversification de l’économie, la législation sociale rigide et l’inefficacité du cadre institutionnel de promotion de l’emploi constituent également des obstacles majeurs à la création d’emploi au Gabon. La forte dépendance au secteur pétrolier 10. La structure de l’économie gabonaise, fortement dépendante de l’industrie pétrolière, très peu intensive en main-d’œuvre, explique en partie un taux aussi élevé de chômage. En effet, alors que l’activité pétrolière rapporte à elle seule plus de 40% de la valeur ajoutée nationale et plus de 60% des revenus de l’Etat, 15 ses effectifs représentent moins de 5% de l’emploi moderne. Par ailleurs, l’on n’observe que les effectifs de ce secteur ont baissé de 43% entre 1985 et 2000, à cause du recours aux procédés hautement capitalistiques de production et d’exploitation qui limite le recours à la main-d’œuvre. 11. En outre, les poussées inflationnistes résultant des booms successifs du secteur pétrolier ont largement contribué à augmenter le coût des facteurs de production, à dégrader la compétitivité du pays et à amplifier l’effet d’éviction des activités non-pétrolières à haute intensité de main-d’œuvre comme l’agriculture. 12. Finalement, le secteur pétrolier ayant très peu d’effet d’entraînement sur le reste de l’économie, c’est en grande partie à travers le budget de l’Etat que se transmet la rente pétrolière au reste de l’économie. Outre les recrutements dans le secteur public, c’est à travers le budget d’investissements, la réalisation d’ambitieux programmes de grands travaux que l’Etat a impulsé la création d’emplois. Or, ces programmes de travaux publics étant eux-mêmes dépendants du niveau des recettes pétrolières de l’Etat, ils ont été affectés par la volatilité des prix du pétrole. Par exemple, en 1986, à la suite de la chute brutale du prix du pétrole, le programme d’investissements publics a été divisé par trois. La conséquence immédiate sur l’emploi fut une forte contraction des effectifs des BTP, de 21.800 à 4.000, avec un effet induit sur les autres secteurs. L’inadéquation entre l’offre de formation du système éducatif et les opportunités d’emploi 13. Une analyse comparative de la structure des sortants du système éducatif et de celle des emplois offerts par l’économie nationale, réalisée par l’AFD, dans le cadre du diagnostic détaillé du système éducatif gabonais (RESEN), réalisé en 2012, a révélé que le marché du travail est marqué par les trois grands déséquilibres majeurs suivants : (i) une forte proportion d’actifs n’ayant pas les acquis minimum pour s’insérer dans le marché du travail ; (ii) une insuffisance de main-d’œuvre ayant des qualifications intermédiaires (ouvriers, techniciens, techniciens supérieurs) qui représentent plus du quart des opportunités d’emplois qualifiés et, (iii) un nombre de diplômés du supérieur au moins deux fois plus élevé que celui des emplois offerts correspondant à ce niveau d’instruction. 14. Par ailleurs, une évaluation récente des besoins en ressources humaines nécessaires à la réalisation des projets du groupe OLAM Gabon sur la période 2012-2016, révèle que 75% des besoins de l’entreprise en main-d’œuvre qualifiée (Niveau Bac +) concernent les métiers de l’industrie agronomique, de la maintenance industrielle et de la logistique alors que l’offre d’éducation dans le supérieur montre que 63% des étudiants au Gabon sont inscrits dans les filières littéraires, de sciences humaines et de sciences économiques. Manifestement, une grande partie de la demande d’Olam ne pourra pas être couverte localement. Anticipant ce déficit, la convention de partenariat qui lie le Groupe OLAM au L’Etat 16 gabonais prévoit la possibilité d’importer de la main-d’œuvre étrangère pendant 7 ans avec l’obligation de former des nationaux pendant la période d’exception. 15. L’inadéquation entre l’offre d’éducation et les besoins du secteur productif résultent de plusieurs facteurs parmi lesquels : 16. La faible qualité du système éducatif de base. Malgré un taux net de scolarisation de 92%, et une parité entre filles et garçons estimée à 0,98 dans l’enseignement primaire, le taux de redoublement est de 37% alors que la moyenne africaine est de 15%. Ce chiffre est le plus élevé de tous les pays du monde pour lesquels cette statistique est connue. Un taux de redoublement aussi élevé est révélateur d’une gestion inefficace des flux d’élèves qui se traduit par des effectifs pléthoriques qui entraînent des conditions matérielles d’encadrement difficiles. Le ratio enseignant/élève dans le primaire est de 45,6, soit deux fois plus que la moyenne des pays à revenu similaire. Les enseignants peuvent avoir jusqu’à 90 élèves par journée de classe. 17. Les conditions matérielles d’encadrement expliquent également une si faible qualité interne du système éducatif. Seulement 1% des classes de 2ème année et 5% de ceux de 5ème année du cycle primaire disposent de la totalité des équipements et matériels pédagogiques nécessaires. De même, seulement la moitié des élèves du primaire disposent d’un manuel scolaire pour travailler en classe. En n’ayant pas la possibilité d’acquérir les connaissances de base, une forte proportion de jeunes Gabonais ne peuvent pas acquérir des compétences professionnelles et sont ainsi exclus du marché du travail. 18. Une faible couverture scolaire et un rendement externe faible de l’enseignement technique et professionnel. Le ratio nombre d’élèves inscrits dans un établissement technique et professionnel pour 100.000 habitants, estimé à 377 est à peine au-dessus de la moyenne africaine (364,3) et plus de trois fois moins élevé qu’au Cameroun et en Tunisie et une fois et demi moins qu’à Maurice. En outre, l’offre de formation technique et professionnelle déjà insuffisante est globalement en inadéquation avec les besoins des entreprises, principalement pour les raisons suivantes : (i) l’inadéquation des formations existantes avec les qualifications demandées par les entreprises, (ii) le déficit d’apprentissage des pratiques professionnelles au profit de formations trop théoriques, (iii) des moyens matériels insuffisants dans les centres de formation (iv) des équipements non conformes avec les réalités du terrain, et (v) le déficit de compétence des formateurs. En conséquence, plus de 80 pourcent des diplômés de l’enseignement technique et professionnel ne sont pas recrutés dans les secteurs pour lesquels ils ont été formés, faute de profils adéquats ; et seulement un diplômé sur trois trouve un emploi. 19. Des allocations budgétaires insuffisantes et inefficaces en faveur du secteur de l’éducation. La part du budget allouée à l’éducation qui représente 13,4% des dépenses totales soit 2,7% du PIB en 2009, est en dessous de la moyenne des pays d’Afrique subsaharienne dont la part du budget de l’éducation est de 19% du budget soit près de 5% du PIB. En outre, une forte proportion des dépenses est allouée au supérieur et au secondaire aux dépens du pré-primaire et de l’enseignement professionnel d’une part et, d’autre part, les enveloppes 17 budgétaires pour les dépenses de biens et services et les salaires du personnel sont limitées. A l’intérieur de l’enveloppe allouée aux frais de personnel, on observe que les salaires des personnels non enseignants représentent presqu’autant que ceux des enseignants. Ce qui laisse penser que les personnels administratifs sont plus nombreux que les enseignants ou que les salaires des enseignants sont trop bas, donc peu incitatifs. Dans tous les cas, ce déséquilibre constitue une incitation négative pour la fonction enseignante. 20. Conscient des défis auxquels fait face le système éducatif, l’Etat a entamé une réforme du système éducatif et de recherche en 2010 qui a abouti à l’adoption d’une loi d’orientation générale de l’éducation, de la formation et de la recherche, sur la base des recommandations des « Etats Généraux de l’Education, de la Recherche et l’Adéquation Formation-Emploi » de mai 2010. Cette loi d’orientation prévoit un nouveau système éducatif qui comporte plusieurs innovations,  parmi lesquelles : (i) le développement de la formation continue et des passerelles à tous les niveaux entre l’enseignement général (du primaire au supérieur) et l’enseignement technique et la formation professionnelle, (ii) l’instauration de la promotion des partenariats public-privé (PPP) en matière d’enseignement, de formation et de recherche, (iii) la création d’un conseil national de l’éducation, de la formation et de la recherche, le CNEFOR, chargé de l’évaluation de la mise en œuvre des offres de formation et des projets d’infrastructures et d’équipements. Le grand enjeu aujourd’hui est de rendre opérationnelle cette loi d’orientation en interrogeant l’expérience internationale. 21. Sur le terrain, des mutations sont également observées. Quelques filières et programmes de formation sont définis en concertation avec les entreprises qui participent activement à la formation. C’est le cas du centre de spécialisation en soudure et en maintenance des instruments utilisés dans le domaine pétrolier qui a été créé avec le concours de la société Total Gabon. C’est également le cas du partenariat engagé entre le Ministère de l’Education nationale, l’ONE et la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog) en vue de former 500 jeunes en chimie, électricité et mécanique industrielle pour satisfaire la demande du complexe métallurgique de Moanda (C2M) en construction par la COMILOG et qui sera opérationnel en juin 2013. L’Etat devrait s’inspirer de ces exemples pour mettre en place un système de formation technique et professionnelle basé sur la demande du secteur productif. Un climat d’investissement contraignant 22. Bien qu’ayant entrepris d’importantes réformes structurelles ces dernières années, le Gabon est toujours perçu comme un pays où il est difficile de faire des affaires. Il est classé 170éme sur 183 pays dans le rapport Doing Business 2013 du Groupe de la Banque mondiale sur la facilité à faire des affaires, et fait donc partie des 23 économies du monde où le climat des affaires est le plus 18 difficile. Dans 6 domaines, le Gabon fait partie du dernier quart (protection des investisseurs, création d’entreprises, exécution des contrats, transfert de propriété, gestion de l’insolvabilité, paiement des taxes et impôts). Pour tous les autres, il se place dans la dernière moitié. L’enquête de la Banque mondiale sur le climat d’investissement réalisé en 2009 a permis de révéler que pour l’ensemble des entreprises, l’électricité (qualité et prix) est de loin le principal obstacle auquel elles sont confrontées, suivi par la faible qualité des infrastructures et des services de transport et la qualité de la main d’œuvre. Ces contraintes contribuent à augmenter les coûts de production des entreprises qui existent et à augmenter le coût d’opportunité de créer de nouvelles. Dans tous les cas, c’est une situation qui freine la création d’emploi. 23. D’autre part, alors que la promotion des PME pourrait constituer un puissant outil de diversification économique, le cadre institutionnel d’appui au développement du secteur privé et au développement de l’entreprenariat s’est jusqu’ici révélé inefficace. Le cadre institutionnel de promotion de la PME a enregistré des progrès significatifs à la suite de la réforme de la Chambre de Commerce dont la direction a été confié en 2010 au secteur privé; l’absorption du fonds d’expansion des PME (FODEX) et du Fonds de Garantie aux PME par la Banque Gabonaise de Développement (BGD) et la création du Centre de Développement des Entreprises (CDE) et de l’Agence de Promotion des Investissements et des Exportations (APIEX) après la dissolution de l’Agence de la Promotion des Investissements Privés (APIP). Cependant, la répartition des fonctions de promotion des investissements et d’appui à la PME n’est toujours pas claire entre ces différentes institutions et agences. Le CDE, la Chambre de commerce et l’APIEX ont tous légalement, la responsabilité de la promotion des investissements. De même, le CDE, l’agence de promotion des PME (Promo Gabon) et la Chambre de Commerce ont tous la responsabilité de l’assistance et du conseil aux PME. Une législation sociale rigide et coûteuse pour l’employeur 24. En voulant trop protéger le salarié, la législation du travail a fini par créer de nombreuses rigidités qui freinent la création d’emplois. Le code du travail gabonais est basé sur le principe de l’application de la norme la plus favorable au salarié. Selon ce principe, en cas de conflit entre plusieurs normes du droit du travail, il convient d’appliquer la norme la plus favorable au travailleur. Ce principe conduit dans la pratique à des jugements très souvent en défaveur de l’employeur. Ce qui a tendance à freiner l’embauche. D’autre part, la procédure de rupture du contrat de travail en cas de difficultés économiques est très longue et coûteuse pour l’entreprise. Les indemnités de licenciement peuvent atteindre 52 mois de salaires. 25. La révision du code du travail de novembre 2010 a rendu encore plus rigide le droit du travail en supprimant la possibilité de renouveler plus d’une fois le contrat à durée déterminée (CDD). Par ailleurs, la législation sur l’embauche de la main d’œuvre étrangère datant de 1968, qui prévoit que les effectifs étrangers d’une entreprise ne peuvent dépasser 10% est complètement anachronique au regard de la situation du marché du travail caractérisé par un déficit de main 19 d’œuvre qualifié. 26. Le Gabon a mis en place un système de protection sociale généreux pour le travailleur mais coûteux pour les entreprises. Sur 22,5% de cotisations prélevées sur les salaires, les employeurs supportent 20,1% et les salariés seulement 2,5. Par ailleurs, le Fonds de garantie sociale de la caisse d’assurance maladie est alimenté par un prélèvement de 10% sur le chiffre d’affaires hors taxes des compagnies de téléphonie mobile opérant au Gabon et de 1,5% sur toutes les transactions internationales conclues à partir du Gabon. Un cadre institutionnel de promotion de l’emploi inefficace 27. Le pays souffre de l’absence d’un système d’information fiable sur le marché du travail. Les statistiques sur l’emploi et le chômage ne sont pas produites régulièrement et le secteur informel qui représente la moitié des emplois est très mal connu. Ensuite, l’intermédiation publique sur le marché du travail est limitée. Seulement 2% des chercheurs d’emplois recourent à l’Office national de l’emploi. Par ailleurs, la population cible du fonds d’insertion et de réinsertion (FIR) est réduite, par la loi, aux licenciés économiques et jeunes diplômés, et son action est limitée à cause de la faiblesse de son budget annuel. Enfin, l’Etat a mis en place, un certain nombre de programmes spécifiques de promotion de l’emploi dits « programmes de seconde chance ». Mais leur impact est réduit, principalement en raison de ressources insuffisantes. Quelques recommandations pour mettre en place les conditions d’une croissance inclusive 28. La nature des contraintes analysées ci-dessus rappelle le caractère transversal de la lutte contre le chômage et montre la nécessité d’adopter une approche multidimensionnelle pour y faire face. A cette fin, les axes de réforme suivants sont recommandés : L’adaptation progressive du système éducatif aux besoins de l’économie  29. A court terme, le principal défi de l’Etat est de transférer dans la pratique courante de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, les expériences de formation, qui partent de la demande réelle du marché de l’emploi (i.e. les besoins actuels et futurs des entreprises), pour concevoir puis élaborer les programmes et former les formateurs et les apprenants. Pour ce faire, il est nécessaire de lancer dans les plus brefs délais, l’évaluation des besoins en qualifications professionnelles des principaux secteurs prioritaires du Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE) et d’organiser en concertation avec le secteur privé un système de formations qualifiantes de courte durée et 20 modulables sur la base des expériences internationales et celles en cours au Gabon qui ont été citées plus haut. 30. Le défi à long terme est de rendre opérationnelles, de façon pragmatique, les dispositions de la loi 21/2011 portant orientation générale de l’éducation, de la formation et de la recherche. Cela passe par (i) une meilleure programmation pour améliorer la gestion des flux scolaires et réduire les taux de redoublement et d’abandon scolaire, (ii) l’amélioration des conditions matérielles d’enseignement, et le (iii) renforcement de la capacité et de la motivation du personnel. Ces réformes pourront difficilement se faire sans une augmentation des budgets alloués à l’éducation et sans une amélioration de l’efficacité des allocations à l’intérieur de ce secteur Améliorer le climat d’investissement  31. En matière de climat d’investissement, deux axes de réforme paraissent urgents : (i) renforcer le dialogue entre le secteur privé et l’Etat et clarifier la distribution des rôles, et renforcer la capacité opérationnelle des organismes en charge de la promotion de la PME et de entrepreneuriat. Le renforcement du dialogue entre le secteur privé et l’Etat pourrait se faire en mettant en place un Conseil présidentiel de l’investissement (CPI), chargé définir et de suivre les grandes réformes visant à faciliter les affaires. Le CPI serait un organe consultatif composé des représentants du secteur privé et de l’Administration et des travailleurs, choisis pour leur compétence, leur expérience et leur intégrité et qui se réuniraient une ou deux fois l’an sous la présidence du Chef de l’Etat entouré des Ministres concernés pour définir et évaluer les réformes. Une équipe restreinte d’experts de haut niveau animerait le processus de mise en œuvre et d’évaluation des dites réformes. 32. En raison de la nécessité de développer la PME gabonaise, le deuxième axe prioritaire est la clarification des rôles et le renforcement des capacités opérationnelles des organismes d’appui au développement du secteur privé. Une option serait la suivante : (i) focaliser l’action du centre de développement de l’entreprise (CDE) sur le guichet unique des formalités administratives de création d’entreprise, (ii) regrouper les fonctions d’information sur les opportunités d’affaires, les études et services d’appui conseil aux PME et la promotion des investissements au sein de la Chambre de commerce et (iii) spécialiser l’agence de promotion des Investissements et des exportations (APIEX) dans la promotion des exportations et la recherche des investisseurs internationaux. A terme, une fois que ces trois entités auront acquis une expérience avérée dans leurs responsabilités respectives, elles pourraient être regroupées au sein d’une même institution. Assouplir la législation du travail et réformer le système de sécurité sociale 33. La législation du travail pourrait être plus flexible en assouplissant les conditions du licenciement économique et en rétablissant les dispositions du contrat de travail à durée déterminée (CDD) du code du travail de 1994 pour faciliter la création d’emploi tout en protégeant le travailleur. Par ailleurs, la faiblesse démographique du Gabon et le déficit de main d’œuvre qualifiée recommande une législation sur 21 le travail des immigrés plus flexible. Plutôt que des dispositions générales, la définition du quota des travailleurs étrangers devraient être discuté secteur par secteur, pour tenir compte de la situation de chacun d’entre eux. Cela peut se faire à travers la réécriture des conventions collectives qui n’ont pas été mises à jour depuis 1986. Renforcer et rationaliser le cadre institutionnel de promotion de l’emploi 34. Le renforcement du cadre institutionnel nécessite au préalable l’élaboration d’une politique de l’emploi qui fixe les objectifs généraux du Gouvernement et définit le cadre institutionnel adéquat pour les atteindre. Les axes de réformes développés dans ce rapport pourraient contribuer à l’élaboration de cette politique. Ensuite il est indispensable de mettre en place un système d’information fiable sur le marché de l’emploi. Un audit opérationnel et stratégique des programmes spéciaux de promotion de l’emploi (voir chapitre 3) en vue de leur octroyer des ressources suffisantes permettrait de les rendre plus efficaces. A l’issue de l’audit, un contrat de performance pourrait être signé entre le Gouvernement et les organismes en charge de ces programmes. 35. Les principales recommandations du rapport sont résumées dans la matrice ci- après. 22 MATRICE DES PRINCIPALES RECOMMENDATIONS I. Adapter le système éducatif aux besoins de l’économie Problèmes Recommandations Administration responsable Echéance Adopter un plan d’action à moyen terme détaillé et séquencé de l’opérationnalisation Ministère de l’Education nationale, de la loi 21/2011 portant orientation générale de l’éducation, de la formation et de la de l’Enseignement technique et la Court terme Faible qualité et recherche Formation professionnelle, chargé de la inefficacité du Culture et des Arts (MENESTFP) système éducatif Faire une revue des dépenses et une enquête de suivi des dépenses publiques de base d’éducation MENETPFP Court terme Lancer un audit opérationnel du Ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement Technique et la formation professionnelle, chargé de la Culture et des Arts Faire une évaluation des besoins en compétences professionnelles des principaux secteurs prioritaires du Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE) Inadaptation Étendre l’expérience de formations qualifiantes de l’Institut du Pétrole et du Gaz, et MENETPFP Moyen terme du système du Partenariat entre l’ONE, le Ministère de l’Education nationale et Comilog aux autres d’enseignement secteurs prioritaires du PSGE (tourisme, BTP, agrobusiness…) technique et Mettre en place un système de formation en alternance sur la base des expériences MENETPF/Ministère de l’Economie, de professionnel de projets d’appui à la formation et l’insertion professionnelle financés par l’Union l’Emploi et du Développement durable Moyen terme aux besoins du européenne (AFIP) et de l’Institut Gabonais d’Appui au Développement (IGAD) (MEED) secteur productif Inclure le secteur privé dans toutes les instances d’élaboration de la politique MENETPF/ d’éducation et de formation, en particulier au sein du conseil national de l’éducation, de Moyen terme la formation et de la recherche (CNEFOR) MEED Sécuriser le financement de la formation professionnelle en créant et organisant un Inadaptation fonds national de la formation et du perfectionnement professionnel (FNFPP)  doté du système d’une personnalité juridique propre et de l’indépendance financière et alimenté par la d’enseignement taxe de formation professionnelle, les financements des bailleurs de fonds et les autres MENETPF/ technique et contributions de l’Etat, y compris les fonds actuellement alloués au Fonds d’insertion Court terme professionnel professionnel (FIR) MEED aux besoins du Organiser, à travers un texte d’application simple et transparent, le partenariat public secteur productif privé en matière d’éducation et de formation prévu par les articles 111 et suivants de la loi d’orientation (loi n°21/2011) II. Améliorer le climat d’investissement Mettre en place un plan d’action de mise en œuvre des mesures recommandées par Faible la SFI dans le cadre de l’accord de services signé avec l’Etat (création d’entreprises, Présidence/Primature Court terme attractivité de logistique commerciale, propriété foncière et permis de construire) l’investissement Finaliser le plan de financement du Schéma Directeur des Infrastructures 2012-2016 en ANGT  Court terme vue d’accélérer sa réalisation Clarifier le rôle des institutions chargées du développement du secteur privé en : Mettant en place un conseil présidentiel de l’investissement (CPI), chargé du dialogue de haut niveau entre le secteur public et le secteur privé sur les réformes visant à faciliter les affaires Inefficacité du cadre Focalisant l’action du Centre de Développement des Entreprises (CDE) sur le guichet Ministère en charge du développement du institutionnel unique des formalités administratives de création d’entreprise Moyen terme secteur privé/ MEED d’appui au Regroupant les fonctions d’information sur les opportunités d’affaires, les études et secteur privé services d’appui et conseil aux PME et la promotion des investissements au sein de la Chambre de commerce et renforcer ses capacités Recentrant le rôle de la Banque gabonaise de développement (BGD) sur le financement de la PME 23 24 Mettre en œuvre la réforme des sûretés adoptées par l’OHADA Difficulté d’accès Créer le cadre légal pour les bureaux d’information sur le crédit Ministère de L’Economie/Ministère de la au crédit pour Court terme Promouvoir la micro finance Justice/ BEAC les PME/PMI Développer le crédit-bail Coût élevé et Préparer un schéma directeur optimisé de l’énergie électrique qui permettrait d’anticiper faible qualité Ministère du Pétrole, de l’Energie et des la préparation et la réalisation des projets (production et transport) et leur mise en œuvre Court terme des services Ressources Hydrauliques dans la plus grande transparence et selon des mécanismes compétitifs. d’électricité Coûts élevés et Ministère de la Promotion des Court terme faible qualité Préparer sur la base des rapports produits dans le cadre des accords de services de la SFI Investissements, des Travaux Publics, des des services de et de la Banque mondiale, un plan d’action pour l’amélioration des services de transport Transports, de l’Habitat, et du Tourisme, transport et de et de logistique chargé de l’Administration du territoire. logistique  III. Assouplir la législation sociale Assouplir les conditions du licenciement économique ; Rigidité du code Rétablir les dispositions du contrat de travail à durée déterminée (CDD) du code du MEED/Parlement Court terme du travail travail de 1994 pour faciliter la création d’emplois tout en protégeant le travailleur ; Adapter la législation du le travail des étrangers à la situation actuelle du marché. Déséquilibre Lancer des études actuarielles pour la CNSS et la CNAMGS afin de déterminer les structurel du paramètres qui assurent l’équilibre à long terme des deux caisses système de PM/MEED, MBCPFP Court terme protection Négocier avec les partenaires sociaux (employeurs, syndicats de travailleurs) la sociale modification des paramètres sur la base des études actuarielles IV. Renforcer le cadre institutionnel et les politiques de promotion de l’emploi Absence d’une Organiser une concertation nationale sur l’emploi qui regroupera l’ensemble des parties politique concernées (Etat, Secteur privé, Travailleurs) et les partenaires techniques et financiers PM/MEEDD Court terme nationale de afin d’échanger les expériences et de s’entendre sur un programme prioritaires des l’emploi réformes. Accélérer la mise en place de l’observatoire national de l’emploi et de la formation MEED  Moyen terme Manque d’information Développer les statistiques sectorielles dans le cadre de la Stratégie nationale exhaustive, de développement de la Statistique avec en priorité les secteurs de l’éducation, fiable et l’agriculture, le tourisme, le travail, les infrastructures, le commerce et autres secteurs MEED Moyen terme régulière sur qui seraient identifiés comme prioritaires. Utiliser l’OHADA pour améliorer le fichier l’emploi, le des entreprises. chômage, les qualifications et Conduire une enquête auprès du secteur informel MEED Court terme les métiers Entreprendre des enquêtes régulières sur le marché du travail MEED Continu Faiblesse de Court terme Poursuivre la déconcentration de l’ONE et augmenter son budget de fonctionnement l’intermédiation publique sur Créer une Bourse du Travail MEED le marché du Libéraliser la fonction de placement travail Faible impact Court terme des programmes Procéder à une évaluation des performances des programmes de promotion de l’emploi  MEED de seconde en vue de les redéployer et augmenter leurs ressources chance 25 26 1. Introduction 1. Pays riche en ressources naturelles, le Gabon est, avec un PIB par habitant de 11.114 dollars US en 2011, l’un des rares pays à revenu intermédiaire d’Afrique subsaharienne. Sa population est estimée à 1,6 millions d’habitants en 2010 et est concentrée dans ses principales agglomérations urbaines, Libreville, la capitale administrative, Port-Gentil, la capitale économique, et Franceville–Moanda, le pôle minier. Le reste du pays a une densité de moins de 2 habitants par km2. Sur le plan politique, le pays jouit d’une stabilité depuis son indépendance en 1960. 2. Bien que bénéficiant d’un niveau de revenu par habitant relativement élevé, provenant en très grande partie de l’exploitation de ses matières premières (pétrole, manganèse, forêt), comme beaucoup d’autres pays riches en ressources naturelles, le Gabon n’a pas été, jusqu’ici, en mesure de surmonter le défi du développement humain. Les données disponibles montrent que le tiers de sa population vit en dessous du seuil de pauvreté et que le chômage frappe le quart de sa population active, principalement les jeunes (un sur trois) qui constituent la moitié de la population. 3. Conscient de ce défi, les autorités gabonaises ont défini, en 2009, une nouvelle vision de développement dont les orientations stratégiques sont détaillées dans un plan opérationnel, le Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE), dont l’objectif est de faire du Gabon un pays émergent en une génération. Le PSGE comprend un ambitieux programme d’investissements publics visant à mettre en place les infrastructures de base et l’environnement économique nécessaire à l’émergence d’une économie diversifiée. Le grand enjeu du PSGE, ce en quoi il pourrait être différent des plans 27 de développement antérieurs, c’est de devenir par sa mise en œuvre un modèle de croissance soutenue, durable et inclusive qui conduise à l’amélioration significative des revenus et des conditions de vie de tous les Gabonais. 4. Le présent rapport est une contribution à la réflexion sur les modalités pour réaliser cet objectif. Il a été élaboré dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle stratégie d’intervention de la Banque mondiale au Gabon dont la compétitivité et l’emploi constituent le premier pilier. Il identifie les principaux obstacles au faible impact de la croissance économique sur l’emploi au Gabon, et formule des recommandations qui vont alimenter le dialogue entre la Banque mondiale et les autorités gabonaises sur le sujet. Ces recommandations pourraient servir de contributions aux états généraux de l’emploi que l’Etat prévoit d’organiser au second semestre 2013. 5. Cette analyse a été difficile à mener, en raison de l’indisponibilité de statistiques régulières, exhaustives et fiables. Un saut qualitatif a certes été effectué par les autorités gabonaises avec la réalisation de la première enquête nationale sur l’emploi et le chômage qui, pour la première fois, permet d’avoir des données clés sur le marché du travail. Cependant des aspects importants d’une analyse du marché du travail ne sont pas documentés et en réduisent le champ. Ainsi, aucune enquête sur les entreprises du secteur informel n’étant disponible, aucune analyse fine de ce secteur qui représente près de la moitié de la population active occupée n’est possible. De même, l’analyse des coûts et de la productivité du travail envisagée dans le cadre du présent rapport s’est heurtée à l’insuffisance de données. 6. Le rapport est divisé en trois parties: (i) une analyse de la performance économique du Gabon depuis l’indépendance et de son impact sur l’emploi, (iii) une analyse des caractéristiques principales du marché du travail et, (iii) une revue des principaux obstacles à la création d’emplois. La conclusion recommande quelques options de réforme sur l’offre et la demande de travail ainsi que sur le cadre légal et institutionnel de la promotion de l’emploi au Gabon. 28 2. Contexte Economique 1. Ce chapitre est consacré à l’analyse de la perspective historique et aux sources de la croissance économique entre 1960 et 2010, ainsi qu’à son impact sur l’emploi. Il montre que bien qu’ayant été globalement positive, elle a été fragile et vulnérable parce que soumise aux aléas du marché international des matières premières. Le chapitre montre également la faible performance de la croissance en matière de création d’emplois. Performances économiques du Gabon depuis l’indépendance  2. La performance économique du Gabon au cours des quatre dernières décennies a été globalement positive. Entre 1960 et 2010, le PIB réel par tête a été multiplié par 30, passant de 291 dollars US à 8.729 dollars US (graphique 1) suite à une croissance moyenne annuelle de 4,5% sur la période. Cette performance se situe au-dessus de la moyenne régionale et pratiquement au même niveau que la moyenne des pays à niveau de revenus similaire. Sur la période en revue, le revenu moyen par habitant des pays d’Afrique subsaharienne a été multiplié par 10 et celui des pays à revenu intermédiaire tranche supérieur (PRI) par 25. L’économie gabonaise a également été 29 plus performante que l’économie motrice de la CEMAC, le Cameroun, dont le produit réel par tête n’a été multiplié que par 10 entre 1960 et 2010. Graphique 1 : Evolution du PIB du Gabon, 1960-2010 (En Mds de FCFA constants 2000) Source: Calcul des auteurs à partir des données du FMI et des autorités nationales 3. Cette croissance globalement positive depuis l’indépendance masque cependant une évolution volatile marquée par les prix du pétrole. D’un point de vue historique, la tendance de croissance économique du Gabon entre 1960 et 2010 peut être divisée en quatre périodes distinctes déterminées en fonction des évènements clés marquant l’évolution des cours du pétrole au cours des quatre dernières décennies. Graphique 2 : Evolution PIB réel par habitant, 1960-2010 (En dollars US) 12000 10000 8000 Pays à Revenu intermédiaire 6000 Gabon Cameroun 4000 Afrique Subsaharienne 2000 0 1960 1962 1964 1966 1968 1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Source: calcul des auteurs à partir des données du FMI et des autorités nationales 1960-1972: Une période de croissance stable et soutenue qui s’accompagne de changements structurels importants au niveau de l’économie. Durant cette période, le PIB réel par habitant a cru à un taux moyen de 7,5% par an. 1973-1985: Une période de boom pétrolier et de politiques 30 macroéconomiques expansionnistes au cours de laquelle le produit réel a cru à un taux supérieur à la tendance de longue période (4,7% par an en moyenne). 1986-2002: Une période caractérisée par divers chocs importants ainsi que par des tentatives malheureuses d’ajustement structurel de l’économie. Durant cette période, le taux de croissance du PIB réel ne fut que de 2% par an, en deçà de la tendance à long terme. 2003-2010: Une période marquée par une hausse des prix des produits primaires qui a permis à l’Etat gabonais d’entreprendre des réformes macroéconomiques ayant conduit à une reprise de l’économie. Durant cette période, le niveau de revenu par tête a augmenté, en moyenne de 2,5% par an. La période de croissance stable et régulière : 1960-1972 4. Pendant la première décennie de l’indépendance (1960), le Gabon a connu une croissance économique forte et stable, d’environ 7,5% en moyenne de 1960 à 1972. Cette croissance était essentiellement portée par les secteurs forestier, minier (manganèse et uranium) et pétrolier, qui étaient les priorités de l’Etat en raison de leur apport en devises. Cette expansion régulière s’est accompagnée de changements structurels importants. La valeur ajoutée des industries extractives qui était de 15,4% entre 1960 et 1965 passa à 29,2% entre 1965 et 1972. L’agriculture qui contribuait pour 15% de la valeur ajoutée au cours de la période 1960-1965, ne représentait plus que 8% au cours de la période 1966-1972. 5. La baisse de la valeur ajoutée agricole fut le résultat de : (i) la diminution de la main-d’œuvre consécutive à l’exode vers les chantiers forestiers et miniers en développement ; (ii) le faible niveau des prix à la production et ; (iii) l’insuffisance des infrastructures (les dépenses d’investissement dans le secteur agricole représentaient moins de 1% des dépenses totales d’équipements durant la période). La contribution de l’industrie dominée par les BTP et la manufacture légère était stable autour de 14% entre 1965 et 1972 tandis que le secteur tertiaire dominé par le commerce et les activités de transport représentaient 7,9% du PIB entre 1965 et 1972. Le boom pétrolier : 1973-1985 6. La combinaison d’une hausse du prix international du pétrole dans les années 1970 (+ 165% entre 1970 et 1976) et d’un doublement de la production gabonaise de pétrole (de 5,4 millions de tonnes en 1970 à 11,3 millions de tonnes en 1976) a contribué à une forte et rapide hausse du revenu réel qui a quasiment doublé entre 1972 et 1985 passant de 706 milliards de francs CFA à 1.356 milliards de francs CFA. 7. Cet afflux massif et soudain des revenus pétroliers a permis au Gouvernement de mettre en œuvre une politique budgétaire expansionniste qui a affecté l’économie réelle à travers les canaux suivants: (i)  Un programme ambitieux d’investissements publics incluant notamment : 31 Un chemin de fer de plus de 600 km, dont le coût estimé fut de 3 milliards de dollars US entre 1973 et 1986, construit pour relier le pôle minier à l’Est à la côte atlantique à l’Ouest du pays. Le développement d’un large secteur parapublic incluant une filière agro- industrielle (huile de palme, caoutchouc, café, cacao, bétail), les transports, les télécommunications, le secteur forestier, ainsi que les services de distribution de l’électricité et de l’eau. En 1993, le secteur parapublic représentait 12% de la valeur ajoutée nationale, 25% de l’emploi et environ 100 milliards de francs CFA de salaires. Le développement de secteurs sociaux incluant des hôpitaux publics ainsi qu’un généreux système de sécurité sociale. Le financement de ce large programme d’investissements publics fut favorisé par un accès aisé aux marchés internationaux de capitaux qui a entraîné une hausse du stock de la dette extérieure de 1% du PIB en 1965 à 39% en 1985. (ii)  Une politique salariale généreuse dans les secteurs public et parapublic qui a permis une certaine redistribution des revenus pétroliers. Le salaire minimum légal (SMIG) a triplé entre 1973 et 1977, et doublé entre 1979 et 1984. En conséquence, le salaire moyen dans la fonction publique gabonaise fut plus trois fois supérieur à celui du Congo et deux fois et demi supérieur à celui du Cameroun. (iii)  Un accroissement important des transferts sociaux et des subventions, ainsi que des dépenses publiques de biens et de services. Les transferts sociaux et les subventions, qui représentaient entre 6% et 10% des dépenses courantes totales entre 1977 et 1983, ont augmenté rapidement en termes réels, surtout pour venir en appui aux entreprises publiques, mais aussi pour financer des bourses d’études à l’étranger aussi bien que pour subventionner la consommation de produits de base comme le sucre, les huiles et le pain. La consommation de biens et de services a augmenté en moyenne de 10% par an entre 1973 et 1985. 8. Cette politique budgétaire expansionniste a introduit de nombreuses distorsions au sein de l’économie. L’augmentation continue des salaires publics a exercé des pressions à la hausse au sein du secteur privé et a contribué à nourrir l’inflation des prix à la consommation. La hausse des prix à la consommation a atteint un taux de 28,5% en 1975 et les prix ont augmenté en moyenne de 11,4% par an entre 1975 et 1985. Cette inflation a ensuite contribué à augmenter le coût des facteurs de production, à dégrader la compétitivité du pays et à amplifier l’effet d’éviction des activités non-pétrolières comme l’agriculture. Ce fut la première expérience gabonaise du syndrome hollandais. 32 Décroissance et échec des tentatives d’ajustement structurel de l’économie : 1986-200 9. En 1986, les prix internationaux du pétrole, qui avaient crus en moyenne de 4% par an entre 1983 et 1985, chutèrent de 50%. Ce déclin brutal des prix du pétrole conduisit à une chute de 4% du PIB réel par habitant en 1986 et de 19% en 1987. Entre 1989 et 1993, le PIB par tête s’accru en moyenne de 4% par an grâce à la reprise de la production pétrolière, notamment avec l’exploitation off-shore de Rabi-Kounga qui représente la source la plus importante des réserves prouvées du Gabon. 10. Cependant, la reprise de la croissance, tirée par l’exploitation de Rabi-Kounga, ne fut pas suffisante pour inverser la tendance à la baisse du produit national auquel le Gabon a dû faire face en 1986-87. Le PIB par habitant en 1993 était d’environ 4.590 dollars US, soit 11% en dessous du niveau de 1985 ou encore 37% en dessous du niveau de 1977. En moyenne, entre 1986 et 1993, le PIB par habitant a diminué à un taux de 1% par an. Les effets induits par le contre-choc pétrolier de 1986 ont perduré jusqu’en 1993, et ont souligné la fragilité et la vulnérabilité de l’économie gabonaise aux chocs externes, tout en mettant en avant le besoin de diversification économique du pays. 11. La chute du produit par habitant fut accentuée par l’abrupte phase d’ajustement budgétaire qui suivit la crise de 1986. En effet, la chute des prix du pétrole provoqua une forte contraction des recettes budgétaires qui poussèrent le Gabon vers l’ajustement structurel. Entre 1986 et 1993, le Gabon a connu plusieurs plans d’ajustements structurels soutenus par le FMI. Les politiques économiques élaborées dans le cadre des programmes d’ajustements furent essentiellement caractérisées par d’importantes coupes dans les dépenses budgétaires d’investissement. Le budget d’investissement de l’Etat fut divisé par 3, entre 1985 et 1987, et la part de l’investissement public dans le PIB passa de 29% en 1985 à 17% en 1993. La contraction de l’investissement public a conduit à une réduction substantielle du PIB non pétrolier. 12. La chute brutale des prix du pétrole en 1985-86 a aussi contribué à une expansion rapide de la dette publique extérieure, ainsi qu’à une accumulation des arriérés de paiement de la part de l’Etat. A la fin du mois de décembre 1993, les arriérés de paiement accumulés sur la dette externe représentaient environ 1,1 milliard de dollars US, et les arriérés de paiement sur la dette intérieure constituaient environ 450 million de dollars US. Les engagements externes publiquement garantis s’élevaient quant à eux à 3,4 milliard de dollars US (96% du produit national) en 1994. L’encours de la dette extérieure passa de 1% du PIB en 1965 à 54% en 1993. En 1994, la dette extérieure du Gabon, qui était constituée d’environ un tiers d’arriérés de paiement, représentait 113% du revenu national, alors qu’elle n’en représentait que 39% en 1985. 13. Par ailleurs, à partir de 1990, les tentatives de mise en œuvre des programmes d’ajustements structurels furent affaiblies par des troubles politiques et sociaux résultant de la transition politique vers le multipartisme. Cette transformation politique augmenta la demande sociale et contribua à augmenter l’indiscipline budgétaire. Après la dévaluation du franc CFA en 1994, le gouvernement gabonais a changé l’orientation 33 de sa politique économique. Il a ainsi décidé d’abandonner l’intervention directe dans les secteurs productifs de l’économie et de redéployer ses interventions vers ses fonctions régaliennes. Réformes structurelles et stabilisation macroéconomique : 2003-2010  Graphique 3 : Croissance du PIB pétrolier et non pétrolier, 1990-2010 (Variations annuelles en pourcentage) Source : Baqnue mondiale 14. Entre 2003 et 2010, le PIB réel du Gabon a cru en moyenne de 2,5% par an. Cette croissance est restée positive durant toute la période à l’exception de l’année 2009, où le Gabon a connu une croissance négative à la suite de l’effondrement du cours des principales matières premières du pays (pétrole, manganèse et bois). De surcroît, et pour la première fois depuis les trois dernières décennies, la croissance de la valeur ajoutée a été tirée par le secteur non pétrolier. Le taux de croissance du PIB hors pétrole s’est accéléré, passant de 2,3% en 2004 à 6,1% en 2010, reflétant un rebond d’activité dans les secteurs forestier et minier, la production de caoutchouc, ainsi que l’expansion des secteurs de l’agro-alimentaire et des télécommunications en raison de la privatisation des compagnies de télécommunications et de production d’huile de palme et de caoutchouc. 15. Cette relative bonne performance économique sur la période 2003-2010 peut s’expliquer par trois raisons principales : a. Un contexte de prix des matières premières particulièrement élevé : La hausse des prix du pétrole observée après 2003, ainsi que la hausse du prix de l’aluminium et du bois ont contribué à augmenter fortement les revenus perçus par l’Etat gabonais et à attirer des flux d’IDE dans les secteurs pétrolier et non pétrolier. Ces nouveaux revenus générés ont permis d’augmenter l’espace fiscal du Gabon et ont amélioré les perspectives économiques du pays. Graphique 4 : Evolution du prix des matières premières, 1960-2009 (Indice des prix, base 100 = 1960) 34 Source: Banque mondiale b. Une politique budgétaire plus saine et plus prudente avec un ensemble de réformes favorisant la croissance. En rupture avec les pratiques anciennes, les autorités gabonaises ont saisi l’opportunité, offerte par le boom des prix du pétrole à partir de 2003, de considérablement améliorer la situation des finances publiques. Les revenus pétroliers ont été utilisés pour rembourser une grande partie de la dette publique et alimenter un Fonds pour les générations futures. Parallèlement, un effort important a été consenti pour contenir le niveau des dépenses courantes et pour améliorer le taux de recouvrement des impôts non pétroliers. Le solde budgétaire (sur la base de la caisse) est demeuré largement positif sur la période 2003-2010 (en moyenne de 5% du PIB par an). Le Gabon a pu ainsi affronter la crise financière internationale de 2008-2009 avec une position macroéconomique relativement saine et suffisamment d’espace budgétaire. Le solde primaire non pétrolier s’est en revanche détérioré sur la période, passant de 8,2% du PIB non pétrolier en 2003 à 21,1% en 2010. Graphique 5 : Evolution du solde budgétaire global et du déficit primaire non pétrolier, 1990-2011 (En pourcentage du PIB) Source : FMI c. Des progrès considérables dans le programme des réformes structurelles. Alors que, entre 1997 et 2003, seule la Société d’Energie et d’Eau du Gabon (SEEG) avait été privatisée, le rythme des privatisations d’entreprises publiques et parapubliques initiées en 1996, s’est accéléré. En 2004, quatre compagnies agro-industrielles ont été privatisées: Agrogabon, spécialisée dans la production et la transformation du palmier à huile et de l’élevage ; ainsi que la société de développement de l’hévéaculture du Gabon (HÉVÉGAB) ont toutes les deux été 35 cédées à la multinationale Belge SIAT. 16. En 2005, la Société d’Exploitation du Transgabonais (SETRAG), filiale de Comilog (elle-même filiale de la compagnie française ERAMET), s’est vu attribuer une concession de 30 ans pour gérer le chemin de fer Transgabonais. La Société Meunière et Avicole du Gabon (SMAG) et la Société Sucrière du Haut-Ogooué ont quant à elle été cédées au groupe français CASTEL 17. En janvier 2006, le gouvernement a procédé à la liquidation de Gabon Poste, en raison d’importants problèmes de viabilité financière. Cette liquidation a ensuite donné lieu à une restructuration de la compagnie. La même année, la compagnie aérienne Air Gabon fut elle aussi liquidée pour donner naissance à une compagnie aérienne privée, Gabon Airlines, qui obtint les droits d’exploitation auparavant détenus par Air Gabon. Enfin, en 2007, le gouvernement a conclu la vente de 51% de ses parts dans l’entreprise nationale de télécommunications Gabon Télécom au bénéfice de Maroc Telecom, une filiale de Vivendi, pour un montant de 40 milliards de francs CFA. Perspectives de croissance 18. A moyen terme, les perspectives de croissance de l’économie gabonaise sont favorables grâce à la tendance haussière anticipée des prix des matières premières, principalement les cours du pétrole, qui permettront la poursuite de la politique budgétaire expansionniste mené par l’Etat, dans le cadre de la mise en œuvre du Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE), le plan opérationnel de la nouvelle stratégie de développement durable du pays dont l’objectif général est de faire du Gabon une économie émergente à l’horizon 2025. 19. Le PSGE repose sur trois piliers : (i) Le Gabon Vert qui vise à valoriser durablement les 22 millions d’hectares de forêt, et ses 800 kilomètres de littoral maritime à travers l’industrie du bois, l’agriculture et l’écotourisme ; (ii) le Gabon Industriel, pour promouvoir la diversification de l’économie nationale par la valorisation locale des matières premières, l’exportation de produits à forte valeur ajoutée, et (iii) le Gabon des Services dont l’ambition est de développer les infrastructures et valoriser les ressources humaines gabonaises afin de faire du Gabon une référence régionale dans les services financiers, les nouvelles technologies de l’information, les métiers de l’économie verte, de l’enseignement supérieur et de la santé. 20. Dans le cadre de la première phase de la mise en œuvre du PSGE, le gouvernement a préparé un programme ambitieux d’infrastructures 2012-2016 d’un coût de 12.000 milliards de francs CFA avec pour objectif de doter le pays d’infrastructures structurantes afin de le rendre plus attractif à l’investissement direct étranger. 21. Les projections de croissance pour le PIB non pétrolier sont de l’ordre de 36 9,5% par an entre 2013 et 2017. En l’absence de découvertes majeures, la production pétrolière devrait quant à elle baisser en moyenne de 1%. Globalement, une croissance annuelle de l’ordre de 7% est envisagée sur la période 2010-2017. Graphique 6 : Perspectives de croissance de l’économie gabonaise, 2008-2017 (Variations annuelles du PIB réel en pourcentage) Source : FMI et Ministère de l’Economie, de l’Emploi et du Développement Durable 22. Bien qu’en déclin, l’exploitation pétrolière demeurera, au cours des prochaines années, la principale source de richesse du Gabon. Ce qui signifie que la croissance sera comme par le passé, tributaire des fluctuations des prix des matières premières ; et que la réalisation de l’ambitieux programme d’infrastructures publiques du gouvernement en dépendra significativement. En cas de retournement de conjoncture, comme en 1986, à la fin des années 1990 ou en 2008-2009, les ressources de l’Etat en seraient significativement affectées. Ce qui risquerait de compromettre le programme d’investissement de l’Etat. Un tel contexte recommande une certaine prudence, un arbitrage entre la nécessité de combler le déficit en infrastructures structurantes indispensables au développement du secteur hors pétrole et la constitution de réserves qui s’avèreraient nécessaires en cas de mauvaise conjoncture du marché pétrolier. Les sources de la croissance gabonaise 23. Cette section examine les différentes composantes de la valeur ajoutée gabonaise selon trois angles différents. Nous examinons d’abord les composantes de la croissance du côté de l’offre. Puis, nous nous tournons vers les composantes de la demande. Enfin, après avoir estimé une fonction de production agrégée inspirée par Solow (1986), nous offrons une décomposition factorielle de la croissance en examinant en particulier les rôles respectifs de l’accumulation du capital physique et du capital humain. Du côté de l’offre: une économie toujours fortement dépendante du pétrole 24. Le secteur primaire a contribué en moyenne pour 45% à la formation du PIB nominal entre 1980 et 2010. Il est constitué principalement des branches pétrolière, minière et forestière. La contribution du secteur agricole est marginale et n’a cessé de baisser depuis la découverte du pétrole. 25. La production pétrolière s’est fortement contractée entre 1997 et 2010, passant de 18 millions de tonnes à 12,2 millions en 2010, mais le secteur pétrolier 37 reste la principale source de richesse du Gabon. Sa contribution au PIB a représentée en moyenne 39% du PIB nominal entre 1980 et 2010. Le Gabon est le cinquième producteur de pétrole en Afrique au sud du Sahara, avec environ 12.2 millions de tonnes en 2010. Les réserves prouvées s’élèvent à 3,7 milliards de barils. Au rythme de production actuel, ces réserves devraient s’épuiser à l’horizon 2050-2060. Après avoir enregistré une baisse tendancielle entre 1998 et 2002, en raison de la chute de la productivité du principal gisement (Rabi-Kounga), l’utilisation de technologies nouvelles qui a permis d’augmenter le rendement des vieux puits et l’exploitation de champs marginaux rendus rentables par la hausse des cours du pétrole, ont permis de stabiliser la production autour de 12 millions de tonnes par an. A moyen et long terme, le Gabon compte sur le potentiel de son offshore profond et ultra profond, qui présente des caractéristiques géologiques semblables à celle du Brésil, où d’importantes découvertes ont récemment été réalisées. 26. Bien que sa contribution à la formation du PIB soit d’environ 3%, le secteur minier constitue une source potentielle de diversification pour l’économie gabonaise. Le Gabon possède en effet le quart des réserves mondiales de manganèse, estimées à 200 millions de tonnes. Il possède également le plus grand gisement de fer non encore exploité au monde et a le potentiel nécessaire pour produire jusqu’à 15% du niobium mondial. D’autres ressources minières existent, parmi lesquelles : l’or. le phosphate, les terres rares et les diamants alluvionnaires très répandus sur toute l’étendue du territoire. Graphique 7 : Origines du PIB, 1980-2010 (En pourcentage du PIB) 100% 80% 60% 40% 20% 0% 1980-85 1986-1993 1994-2002 2003-2010 1980-2010 Agriculture, Elevage, Pêche Exploitation forestière Pétrole brut Mines Secteur secondaire Secteur tertiaire Services non marchands Source : FMI et Comptes nationaux du Gabon 27. Depuis la fin de l’exploitation d’uranium en 1999, l’exploitation minière est principalement limitée à l’extraction et l’exportation de manganèse. La Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog), filiale du groupe français Eramet, exploite le manganèse depuis 1962 dans la région de Moanda (Sud-est). Sa production est en nette augmentation du fait de la demande soutenue de l’acier sur le marché mondial, 38 principalement de la Chine. Elle est passée de 2,75 millions de tonnes en 2005 à 3,4 millions de tonnes de manganèse en 2011. 28. La contribution de l’exploitation forestière au PIB est demeurée faible (en moyenne de 2 pourcent entre 1980 et 2010). Les marges de croissance de cette branche sont cependant importantes. Les inventaires d’aménagement pilotes réalisés dans les années 1990 ont révélé la présence dans la forêt gabonaise de près de 400 essences potentiellement exploitables, dont seulement 80 sont commercialisées, parmi lesquelles l’Okoumé qui possède d’excellentes aptitudes au déroulage et permet, de ce fait, la fabrication du contreplaqué de très bonne qualité. 29. La contribution du secteur agricole à la valeur ajoutée est faible en dépit d’un potentiel considérable en terres cultivables. Le secteur agricole, dont l’importance est estimée à environ 15% du PIB dans les années 1960, ne représente plus que 4% de la richesse nationale aujourd’hui. La production est essentiellement orientée vers la culture vivrière, dont les principaux produits sont la banane plantain, le manioc, le maïs et le riz. De petits volumes de cacao, de café, d’huile de palme et d’arachide sont toutefois cultivés pour l’exportation. Le secteur comprend également de grandes plantations industrielles d’hévéas et de palmiers à huile. L’essor du secteur a été entravé par de nombreux facteurs structurels parmi lesquels l’exode rural, le vieillissement de la population rurale, le mauvais état des routes, la faible capacité des exploitations agricoles aussi bien que des choix stratégiques privilégiant la création de complexes agro-industriels organisés par filières (hévéa, huile de palme, cacao, café, viande bovine, poulet de chair). Un secteur secondaire embryonnaire mais en expansion 30. Le secteur secondaire est en grande partie constitué de l’agro-industrie, l’industrie du bois, le raffinage, la production d’électricité et les BTP. L’industrie agroalimentaire est composée d’une sucrerie, d’une usine de production d’huile de palme, d’une usine d’eau minérale, de cinq brasseries et d’une usine de cigarettes. Les autres industries de transformation comprennent la chimie, les matériaux de construction et la seconde transformation des métaux dont les activités sont essentiellement liées à la demande de l’industrie pétrolière et du BTP. Le Gabon compte également une cimenterie d’une capacité de production de 130.000 tonnes par an. La production et la distribution d’eau et d’électricité sont assurées par la Société d’Energie et d’Eau du Gabon (SEEG). La branche des BTP qui connaît un regain de dynamisme depuis 2010 à la suite du triplement du budget d’investissement de l’Etat, constitue la principale composante du secteur secondaire. Dans l’ensemble, le secteur secondaire a contribué en moyenne de 11% à la formation du PIB sur la période en revue. 31. L’industrie du bois (jusque-là axée sur les activités de sciage, découpage, tranchage et menuiserie) devrait augmenter sa contribution au PIB au cours des prochaines années grâce a la mesure d’interdiction d’exportation des grumes décidée par l’Etat en 2009 et la création d’une zone économique spéciale près de Libreville, principalement dédiée à cette branche d’activité. Résultat d’un partenariat entre l’entreprise singapourienne OLAM et l’Etat gabonais, la Zone économique spéciale de Nkok devrait disposer d’une capacité de traitement d’un million de mètres cubes de bois brut. 39 Un secteur tertiaire dominant 32. En moyenne, sur la période 1980-2010, le secteur tertiaire a représenté 30% du PIB. Les services, le transport et le commerce représentent l’essentiel de ce secteur qui est en partie tributaire de la demande publique. Les services ont crû en moyenne au rythme de 5% par an sur la période 1980-2010. La branche télécommunications a également enregistré une forte croissance au cours des dix dernières années, dopée par l’expansion de la téléphonie mobile. 33. La contribution du secteur touristique reste marginale dans l’économie. Le nombre d’arrivées internationales au Gabon a certes augmenté de 39 % entre 1990 et 2009, pour atteindre un total de 151.000 visiteurs mais le tourisme représentait la même année seulement 6% du PIB, soit 470 milliards de francs CFA. L’ambition e l’Etat gabonais est de faire du pays une destination de référence mondiale en matière d’écotourisme et sur plan régional dans le tourisme d’affaires. A cet effet, le Ministère du Tourisme a finalisé en 2011 un plan opérationnel sectoriel du tourisme 2011-2016 sur la base des orientations du Plan Stratégique Gabon Emergent. Ledit plan a quatre axes : Mettre en place une gouvernance efficace du tourisme; Lever les obstacles au développement du tourisme; Constituer une masse critique d’hébergements touristiques; Faire de Libreville un hub en Afrique centrale. L’objectif majeur visé par ce programme est d’attirer 100.000 touristes par an dans les segments du moyen et du haut de gamme d’ici à 2020. Du côté de la demande : la prépondérance de la demande intérieure 34. Du côté de la demande, la consommation finale, qui a contribué à près de deux tiers du PIB sur la période 1980-2010, est la première source de croissance du Gabon. Après avoir connu un taux de croissance à deux chiffres pendant la décennie qui a suivi le premier boom pétrolier, elle s’est contractée sur la deuxième moitié de la décennie 1980 après la forte contraction de l’activité économique qui a résulté des premiers plans d’ajustement structurel. Elle a ensuite vu son rythme de croissance s’accélérer, passant de 0,8% par an en 1991-2003, à la faveur de la satisfaction des revendications sociales qui ont marqué le retour du multipartisme au Gabon en 1990. En 2003-2010, elle a crû encore plus vite, en moyenne de 5,8% à la faveur de la reprise économique, particulièrement dans le secteur non pétrolier, à l’augmentation du SMIG en 2006 et des effectifs de la fonction publique. Tableau 1 : Utilisation du PIB, 1980-2010 (en pourcentage du PIB) 1980-2010 40 Part du PIB Taux de croissance Contribution au PIB Consommation Finale 58,0 4,2 2,4 Consommation publique 16,2 4,1 0,7 Consommation privée 41,8 4,2 1,8 Formation Brute de Capital 29,9 3,1 0,9 Formation Brute de Capital Fixe (FBCF) 29,7 3,2 1,0 FBCF publique 7,2 5,9 0,4 FBCF privée 22,5 2,1 0,5 Variation de stocks 0,2 . . Exportations de Biens et de Services 44,7 0,6 0,3 Exportations de biens 41,8 0,6 0,2 Exportations de services 2,9 1,6 0,0 Écart statistique 3,5 . . Demande agrégée 96,5 2,5 2,5 PIB Réel 100,0 2,6 2,6 Importations de biens et de services 3,.1 3,3 -1,2 Source : FMI et Direction Générale de l’Economie 35. L’investissement représente environ un tiers du PIB sur la période 1980-2010. Il est principalement constitué des investissements dans les secteurs pétrolier et minier. En volume, cependant, les investissements du secteur pétrolier ont connu une baisse sur la période. A contrario, l’investissement public a crû en moyenne de 17,7% sur la période 2003-2010, à cause des besoins de financement du programme prioritaire du DSCRP, adopté en 2006, et au triplement du budget d’investissement de l’Etat en 2010. 36. La contribution du solde du commerce extérieure au PIB est atténuée par la forte dépendance du Gabon à l’égard des importations qui représentent 36% du PIB sur la période en revue. Le Gabon importe l’essentiel de ses consommations intermédiaires, ses équipements et ses biens de consommation finale. La structure des exportations est restée relativement stable. Elle est dominée (plus de 90%) par les matières premières (pétrole, bois et manganèse). Les principaux clients du Gabon sont les États-Unis (pétrole) et la Chine (pétrole, bois, manganèse). La France, d’où proviennent en moyenne 35% des importations, demeure le principal fournisseur du pays. Le commerce avec les autres pays de la CEMAC est très limité. Comptabilité de la croissance : une productivité globale des facteurs négative au cours des quarante dernières années 37. Cette section procède à une analyse de la décomposition des facteurs de croissance, s’appuyant sur un cadre conceptuel qui repose sur un modèle de croissance à la Solow (1986). Cette méthodologie permet de mettre en valeur les rôles respectifs de l’accumulation du capital physique, de l’accumulation du capital humain, et de la productivité totale des facteurs. En théorie, la productivité totale des facteurs mesure les gains d’efficience de la production et peut être considéré comme un indicateur de progrès technique. Dans le cas de la présente analyse, elle mesure plutôt l’efficacité de la gestion macroéconomique, le niveau d’utilisation des capacités de production, les habitudes de travail et la conjoncture internationale. Graphique 8 : Contribution factorielle à la croissance du PIB, 1970-2010 (en pourcentage) 41 Source : Calcul des auteurs à partir des données de la Banque mondiale et du FMI 38. La productivité totale des facteurs de production a été négative au cours des quarante dernières années. Elle a diminué à un rythme annuel de 1,4%. Cette tendance négative reflète l’impact des chocs externes négatifs subis par le pays pendant la période de décroissance économique et d’échecs des tentatives d’ajustement structurel de l’économie, mais aussi l’impact des mesures de politique économique inefficaces qui ont suivi le premier choc pétrolier de 1973. La croissance économique au Gabon au cours des quarante dernières années a résulté principalement d’une accumulation du capital. L’on observe cependant que, sur la période 2003-2010, la productivité globale des facteurs est moins négative que sur les sous-périodes précédentes, reflétant les efforts de stabilisation macroéconomique rendue possible par une bonne conjoncture internationale, caractérisée par des prix des matières premières très élevés. L’impact de la croissance sur l’emploi 39. La dynamique du marché de l’emploi entre 1960 et 2010 permet de distinguer deux grandes périodes, une période de plein emploi, entre 1960 et 1985, porté par la politique budgétaire expansionniste de l’Etat ; et une longue période de baisse de l’emploi formel, entre 1986 et 2010, qui a été compensé par les hausses de l’emploi informel et des effectifs de l’administration publique. La période de plein d’emploi : 1960-1985  40. Pendant la période de croissance qui a précédé le contre choc pétrolier de 1986, le niveau de l’emploi a observé la même tendance que celle de l’activité économique. Entre 1969 et 1977, les effectifs du secteur moderne ont observé un bond de plus de 122%, passant de 61.781 à 137.645, à la faveur de la réalisation de grands travaux publics rendue possibles par les énormes ressources tirées du boom pétrolier. Les principaux secteurs pourvoyeurs d’emplois étaient les BTP, l’exploitation forestière et les services. Ces trois secteurs qui représentaient 24% du PIB employaient 42 près de 70% des effectifs des salariés du secteur privé. En revanche, malgré sa forte contribution à la production nationale, l’industrie pétrolière contribuait faiblement à l’emploi. Sur l’ensemble de la période, ses effectifs représentent moins de 2% des effectifs globaux du secteur moderne. 41. En raison de sa faible démographie et du déficit en main d’œuvre qualifiée, déjà perceptible à l’époque, le pays signe avec plusieurs Etats d’Afrique de l’Ouest, des accords d’importation de main d’œuvre pour travailler principalement dans les grands chantiers des travaux publics, dont la construction du chemin de fer Transgabonais de 1973 à 1986 et les travaux de préparation du Sommet des Chefs d’Etats de l’OUA en 1977. En 1993, la main d’œuvre étrangère représentait un peu plus du quart des actifs occupés (25,7%). Dans les BTP et le commerce, elle représentait respectivement 50% et 68% de l’emploi. 42. La hausse des effectifs du secteur moderne s’est essoufflée entre 1978 et 1980 suite à la crise financière qu’a traversée le Gabon après la surchauffe qui a résulté de la mise en œuvre des d’infrastructures réalisées dans le cadre de la préparation du Sommet des Chefs d’Etat de l’OUA. Les mesures de rigueur budgétaire, prises dans le cadre du plan de stabilisation de 1978, ont entraîné un ralentissement du programme d’investissement public, qui s’est traduit par une contraction des carnets de commandes des entreprises du BTP. Cette contraction du BTP s’est propagée dans les services et le commerce. Au total, les effectifs du secteur moderne ont observé une baisse de 36% entre 1978 et 1980. 43. A partir de 1980, l’emploi a repris son rythme de croissance , à la suite de la mise en œuvre du programme d’investissement public prévu dans le Plan intérimaire de développement économique intérimaire et social 1980-1982 ; puis du 5ème Plan de développement économique et social 1984-1988. Comme pendant la période suivant de boom pétrolier, le BTP constitua le principal pourvoyeur d’emploi du secteur privé avec 21% des effectifs, suivi de l’industrie (15%), le commerce (11%) et les transports (10%). 44. La période de plein emploi a également été marquée par une forte hausse des effectifs dans l’Administration publique qui s’élevaient à 14.800 en 1969 et atteignirent 41.000 en 1985, soit une augmentation de 275%. Au cours de cette période, le taux de chômage était d’environ 3%. Dégradation continue du marché de l’emploi : 1986-2010 45. Entre 1986 et 2010, le Gabon a observé une dégradation du marché de l’emploi caractérisée par une contraction de l’emploi formel, un niveau élevé du chômage et une montée du secteur informel. 46. Entre 1986 et 1994, le secteur formel a enregistré une baisse de 30.000 emplois représentant 24% des effectifs de 1985. Cette contraction n’a affecté que les entreprises formelles dont les effectifs ont baissé en moyenne de 6% par an alors que les effectifs du secteur public augmentaient de 1,3% par an en dépit des recommandations des programmes d’ajustement structurels qui invitaient à la réduction du train de vie de l’Etat, y compris, la limitation de ses effectifs. 43 47. Après une embellie observée entre 1995 et 2002, à la suite de dévaluation du franc CFA, le niveau de l’emploi privé formel a poursuivi sa baisse (en moyenne de 2%) entre 2003 et 2009. La hausse des embauches observée à partir de 1995 a résulté de la reprise de l’activité forestière suite aux gains de compétitivité entrainée par la dévaluation du Franc CFA et à la reprise des programmes d’investissements publics de l’Etat, rendue possible par l’amélioration des finances publiques résultant de l’ajustement monétaire. Graphique 9 : Tendances de l’emploi, 1985-2010 (nombre d’emplois) Sources : Ministère du Travail, RGPH1993, EGEP2005, ENEC 2010 48. Comme le montre le tableau 2 ci-dessous, l’ensemble des branches du secteur formel a subi une baisse des effectifs sur l’ensemble de la période 1985- 2010. Cependant, l’effort d’ajustement structurel entre 1986 et 2002 ayant porté sur le programme d’investissements publics, ce sont les secteurs d’activités qui en dépendent le plus (BTP, services, transport…) qui ont été le plus affectés. Les effectifs du BTP par exemple ont été réduits de plus de 300% entre 1985 et 2000, passant de 21.800 à 5.253. En 2010, ils étaient estimés à près de 4.000 soit 1/5ème de ce qu’ils représentaient en 1985. La chute des effectifs des BTP a résulté de la division par trois du budget d’investissement public entre 1986 et 1987. 49. Dans les industries extractives, les effectifs du secteur pétrolier ont baissé de 43% entre 1985 et 2000 à cause du recours aux procédés hautement capitalistiques de production et d’exploitation qui limite le recours à la main d’œuvre. Cette baisse s’est accentuée à partir de 1995 en relation avec la baisse de la production de Rabi-Kounga, le plus gros gisement jamais exploité au Gabon. Depuis 2003, l’accroissement des activités des entreprises juniors, rendu possible par l’envolée des cours du pétrole, a permis un accroissement sensible des effectifs du secteur pétrolier ; mais sa contribution à l’emploi demeure faible. Les effectifs du secteur minier ont régressé à partir de 1999 après la cessation des activités d’exploitation de l’uranium. Les effectifs du secteur des transports ont également observé une forte contraction à partir de 2005, après la liquidation d’Air Gabon, la compagnie nationale de transport 44 aérien. La baisse des effectifs des services et du commerce entre 1985 et 2010 est liée, quant à elle, à la contraction observée dans les autres secteurs d’activités. Tableau 2 : Evolution des effectifs du secteur privé formel: 1985-2010 (nombre d’emplois)   1985 1990 1995 2000 2005 2006 2007 2008 2009 2010 Agriculture 2524 2300 2201 2190 2011 2076 2149 2090 2084 2113 Pétrole & forages 2636 2420 1732 1511 1547 1678 2082 1833 2337 2447 Mines 3116 2580 1842 1464 1502 1479 1498 1484 1477 1492 Industries agro 4517 4464 3363 2919 1875 2203 2254 2196 3084 3120 alimentaires & boissons Autres industries 4677 2830 2408 2053 1790 1798 1820 1625 1817 1820 Electricité & raffinage 2476 2487 2022 1892 1955 1910 1918 1928 1963 2263 BTP 21810 3991 4343 5253 4847 4901 4941 4340 3256 3907 Transports 11213 9562 9550 9589 11193 7032 7718 6720 7240 8302 Services 9645 7443 8689 11670 11180 11505 11896 11510 8091 9023 Commerce 9084 5547 5202 5926 5732 5873 6085 3502 4741 4835 Banques & assurances 2355 2297 1995 2010 2161 2040 2081 1982 2052 2195 Total 74053 45921 43347 46477 45793 42495 44442 39210 38142 41517 Source : DGS et DGELF 50. L’emploi public a permis de compenser la baisse tendancielle de l’emploi privé formel et de stabiliser le niveau global de l’emploi formel. Les graphiques 10 et 11 ci-dessous montrent l’évolution contrastée des effectifs du secteur public et ceux du secteur privé. Alors que la part des effectifs du secteur privé a significativement diminué à partir de 1986, pour atteindre 37% du total des emplois moderne en 2009 contre 67% en 1985, les effectifs du secteur public ont continuellement augmenté sur toute la période, et représentaient en 2009, 62% des effectifs totaux du secteur moderne. Les données de l’ENEC 2010 montrent une hausse des effectifs du secteur moderne en 2010 comparée au niveau de 2009, ce qui est cohérent avec la décision g de tripler le budget d’investissement pour financer son ambitieux plan de développement des d’infrastructures. Cette tendance haussière devrait se poursuivre au moins à moyen terme. Graphique 10 : Evolution de l’emploi formel, 1985-2010 (nombre d’emplois) Source : calculs des auteurs à partir des données de la DGS et de la DGELF 45 Graphique 11 : Evolution des parts relatives des effectifs privés et publics dans l’emploi formel, 1985-2010 (en pourcentage de l’emploi formel total) Source : calculs des auteurs à partir des données de la DGS et de la DGELF 51. Le poids du secteur informel sur le marché du travail gabonais n’a cessé de croître depuis 1986. Evalués à 98 000 en 1985, soit 44% des actifs occupés, sa part dans l’emploi total (formel et informel) est estimée à 57% en 2010. Le secteur informel a joué, avec l’Administration publique, un rôle d’amortisseur en servant de refuge à un nombre croissant d’individus en situation d’exclusion et de précarité à la recherche d’un emploi. La crise de 1986 a également entraîné une intensification de la multi-activité, en réponse à la réduction des opportunités d’emplois dans le secteur moderne. Du côté des entreprises, elle a permis l’émergence de nouvelles modalités d’ajustement sur le marché du travail, dont le recours à des contrats de courte durée et le développement du travail intérimaire. La croissance sans emploi : 2003-2010 52. Entre 2003 et 2009, bien que la croissance ait été positive, à l’exception de l’année 2009 et que le secteur non pétrolier, plus intensif en main-d’œuvre ait crû plus vite que le secteur pétrolier, le niveau de l’emploi formel a régulièrement baissé, en moyenne de 3% par an. La baisse de l’emploi durant cette période s’explique en grande partie par les efforts de restructuration de l’économie. L’accélération du calendrier des privatisations des entreprises publiques à partir de 2004 a permis de ramener les effectifs de ces différentes entreprises à des niveaux compatibles avec leurs niveaux d’activité et de rentabilité. Elle a entraîné une réduction d’environ 4.000 emplois  entre 2004 et 2007. La seule entreprise Gabon Télécom, privatisée en 2007, a enregistré 700 départs sur un effectif total de 1.050 salariés. La crise financière de 2008-2009 a également eu un impact dépressif sur l’emploi, principalement dans les secteurs forestiers et miniers. Les effectifs du secteur privé moderne ont accusé un repli de 10% en 2008 puis de 11% en 2009. 46 Conclusion du chapitre 53. L’analyse de la tendance et des sources de la croissance économique au Gabon montre qu’aucun changement structurel ne s’est produit dans l’économie depuis le choc pétrolier de 1973. L’exploitation pétrolière en est demeurée la principale source de richesse. En raison de la volatilité des prix du pétrole, l’économie est demeurée vulnérable aux chocs externes. Les résultats de l’analyse des origines factorielles de la croissance qui montrent une contribution négative à la croissance de la productivité globale des facteurs, révèlent l’insuffisance et/ou l’inefficacité des réformes structurelles engagées par les autorités gabonaises pour diversifier l’économie. L’accumulation du capital à travers la réalisation des grands programmes d’infrastructures n’est pas suffisante. Il faudrait en plus une réorientation des priorités de l’Etat vers l’augmentation du capital humain, l’amélioration de la gouvernance et du climat d’investissement, dans la mesure où ces variables contribuent à augmenter la productivité de l’économie. 54. Un autre grand constat est le faible impact de la croissance sur l’emploi. Il est en partie étroitement lié aux deux constats faits plus haut, la forte dépendance à l’égard d’un secteur très peu intensif en main d’œuvre et les échecs des tentatives de promotion d’une économie hors pétrole. Dans le chapitre 3, il est procédé à l’examen des autres grands facteurs du faible impact de la croissance sur l’emploi. 3. Le marché du travail gabonais 1. Ce chapitre est consacré à l’analyse des principales caractéristiques du marché du travail gabonais. Il est basé sur l’exploitation des résultats de la première enquête nationale sur l’emploi et le chômage (ENEC 2010) et d’autres sources écrites et orales (statistiques administratives, entretiens et divers rapports). L’analyse des caractéristiques du marché du travail est précédée d’une présentation du profil démographique du Gabon. En raison de la vulnérabilité des jeunes et des femmes sur le marché du travail, une analyse des rendements de l’éducation et de l’impact de l’éducation sur l’insertion professionnelle a été réalisée pour ces deux catégories de la population. Contexte démographique : une population jeune et urbaine 2. Les caractéristiques sociodémographiques d’une population déterminent la structure du marché du travail d’un pays. La répartition spatiale de la population (urbain/rural), le poids de la jeunesse en relation avec la structure par âge, les rapports hommes/femmes et le niveau d’éducation sont des éléments structurants du marché du travail. 47 3. Le Gabon est un pays faiblement peuplé. Répartie sur une superficie de 267.667 Km2, la population totale du Gabon est estimée par l’ENEC3 à 1.601.125 habitants en 2010 soit une densité de 6,14 habitants/km². C’est une des plus faibles densités de la sous-région CEMAC. Les femmes représentent 51% de la population. L’espérance de vie est de 62 ans pour les femmes, et de 57 ans pour les hommes. La faiblesse de la population gabonaise est en grande partie imputable à son climat équatorial humide, favorable au développement des maladies endémiques. Le niveau de stérilité féminine et masculine a pendant longtemps été une cause majeure de l’hypofécondité au Gabon. 4. La population gabonaise est relativement jeune. Près de 58% de la population a moins de 25 ans, et l’âge moyen des gabonais est de 24 ans. La population de moins de 20 ans représente 47,2% et 36% de la population est âgée de moins de 15 ans. La population scolarisable dans le primaire (5-14 ans) représente 22,3% et 11,5% de Gabonais ont entre 15 et 19 ans. La pyramide des âges ci-dessous montre que cette structure par âge est sensiblement la même quel que soit le sexe. 5. La jeunesse de la population est à la fois un atout et un défi. Elle est un atout du fait qu’elle constitue un réservoir potentiel de main-d’œuvre dont le pays aura besoin pour mettre en œuvre sa nouvelle vision de développement. Elle est par 3  Les données les plus récentes sur la population sont celles de l’ENEC 2010. Les deux derniers Recensements Généraux de la Population et de l’Habitat (RGPH) datent de 1993 et 2003. L’exploitation des données issues des données du RGPH de 2003 avait été suspendue après une décision de la Cour constitutionnelle. Les travaux préparatoires du RGPH 2013 sont en cours. contre un défi du fait qu’elle représente une forte demande sociale qui, si elle n’est pas satisfaite, peut constituer une source de contestation sociale. Elle représente aussi un défi pour l’économie qui doit absorber cette population active et lui fournir des emplois dans le présent et dans le futur. Graphique 12 : Pyramide des âges de la population gabonaise, 2010 (en milliers par tranche d’âges) 80 et + 75-79 70-74 65-69 60-64 55-59 50-54 45-49 40-44 Féminin 35-39 Masculin 30-34 25-29 20-24 15-19 10-14 5-9 0-4 150 125 100 75 50 25 0 25 50 75 100 125 150 En milliers Source : ENEC 2010 6. Huit Gabonais sur 10 vivent en milieu urbain. Les deux grandes agglomérations urbaines que sont Libreville et Port-Gentil concentrent plus de la moitié de la population (51,2%). L’ensemble de la population urbaine représente 82% de la population totale contre 4,2% en 1960. Le reste de la population est concentré le long 48 des axes routiers et fluviaux. Cette situation, singulière en Afrique, est la conséquence d’un exode rural massif des populations, essentiellement pour des motifs économiques. La croissance rapide et sans préparation des populations urbaines, notamment à Libreville et à Port-Gentil, se traduit par une forte pression sur les équipements socio- économiques. A l’inverse, le dépeuplement du monde rural a progressivement entraîné une diminution de la main d’œuvre agricole et une augmentation de la population rurale dépendante (les moins de 15 ans et les plus de 65 ans). Enfin, l’inégale répartition spatiale de la population pose de véritables problèmes de développement, notamment d’aménagement du territoire et d’organisation des services sociaux. Graphique 13 : Structure de la population gabonaise par milieu de résidence et par sexe, 2010 Structure de la population rurale Structure de la population urbaine (en milliers par tranche d’âge) (en milliers par tranche d’âge) 80 et + 70-74 60-64 50-54 40-44 30-34 20-24 10-14 0-4 100 75 50 25 0 25 50 75 100 En milliers Femmes Hommes Source : calcul des auteurs à partir des données de l’ENEC 2010 7. La population immigrée était estimée à 200.000 personnes en 2010, soit 12,5% de la population totale. 68% des immigrés sont originaires de l’Afrique de l’Ouest, 22% des pays de la CEMAC et 7% des pays d’Afrique centrale hors CEMAC. Les principaux motifs de l’immigration internationale sont la quête d’un emploi (52,1%), le regroupement familial (21,8%) et le mariage (18,1%). Plus de 50% du total des immigrés sont des actifs occupés et seulement 3% sont frappés par le chômage. Ayant en moyenne un niveau d’instruction faible, les immigrés exercent, aussi bien en tant qu’artisans, vendeurs, salariés indépendants, dans les secteurs du commerce, des services et de l’agriculture. 8. Le niveau d’instruction de la population est relativement élevé. Bien que décroissant avec l’âge, la proportion de G scolarisés est relativement élevée. 74% à un niveau secondaire premier cycle, 18% un niveau secondaire second cycle et 6% un niveau supérieur. Moins de 1% de la population n’a pas d’instruction. Lorsque l’on combine l’âge et le cycle d’instruction, l’on observe que le taux de scolarisation est de 99% au primaire pour les individus âgés de 6-9 ans, de 63% au cours secondaire premier cycle pour les élèves âgés de 15-19 ans, de 34% au secondaire second cycle pour les personnes âgées de 20-24 ans et de 17% au supérieur pour les 25-29 ans. Selon le sexe, les résultats montrent que 78% des femmes et 71% d’hommes ont au plus un niveau secondaire premier cycle. Les écarts de niveau d’instruction en défaveur des femmes sont observés pour les niveaux secondaires seconds cycle (21% contre 16%) et supérieur (8% contre 6%). Les populations urbaines ont en majorité un niveau 49 secondaire premier cycle alors que les populations rurales ont en majorité un niveau primaire. Tableau 3 : Proportion de la population scolarisée par groupe d’âge, 2010 (en pourcentage de la population totale) Groupe d’âge % Scolarisé % Non scolarisé 6 - 9 ans 93,7 6,3 10 - 14 ans 98,6 1,4 15 - 19 ans 98,2 1,8 20 - 24 ans 96,2 3.8 25 - 29 ans 94,3 5,7 30 - 34 ans 94,5 5,5 35 - 39 ans 92,9 7,1 40 - 44 ans 92,5 7,5 45 - 49 ans 91,8 8,2 50 - 54 ans 86,2 13,8 55 - 59 ans 88,1 11,9 60 ans et + 49,2 50,8 Source: ENEC 2010, DGRH-DGS 9. Les projections démographiques disponibles indiquent, que la population gabonaise atteindrait 2,1 millions en 2025 puis 3,2 millions en 2050. Bien que la proportion de la population jeune (moins de 30 ans) doive baisser progressivement pour atteindre 50% de la population totale en 2050 contre 68% en 2000, la population gabonaise demeurera très jeune et fera peser sur le pays une forte demande en termes d’infrastructures sociales de base (éduction, santé, habitat) et en termes de demande d’emplois. La population en âge de travailler pourrait représenter 68% de la population totale en 2025 et 74% en 2050 soit une force de travail de 1,4 million de personnes en 2025 et de 2,4 millions en 2050. Graphique 14 : Projections démographiques, 1960-2025 (en milliers par tranche d’âges) Source: Nations Unies, Département des Affaires économiques et sociales Caractéristiques principales du marché du travail gabonais 10. La population active gabonaise au sens du BIT était évaluée par l’ENEC en 50 2010 à 494.183 personnes. En face de cette offre, l’économie employait la même année 393.440 actifs. Le marché du travail dégageait donc un déficit de 100.750 emplois, équivalent à un taux de chômage de 20,4%. En intégrant les chômeurs découragés, évalué à 49.341 personnes, la population gabonaise active atteignait 543.524. Outre la présence d’un niveau de chômage très élevé qui affecte principalement les jeunes et les diplômés, le marché du travail gabonais se singularise par sa population active occupée urbaine et l’importance du secteur public. Par contre, comme les autres économies africaines, le marché gabonais comprend une forte proportion d’emplois informels. Tableau 4 : Structure de la population active, 2010 (nombre d’actifs)   Total Femmes Hommes Actifs occupés 393.440 244.020 149.420 Chômeurs 100.743 41.130 59.613 Chômeurs découragés 49.341 16.268 33.073 Population active totale       définition BIT 494.183 285.150 209.033 y compris les chômeurs découragés 543.524 301.418 242.106 Source : ENEC 2010 Un chômage très élevé et en augmentation 11. Le niveau du chômage est le point le plus frappant du marché du travail gabonais. Evalué à 18% lors du recensement général de la population de 1993, le taux de chômage au Gabon au sens du BIT4, a été estimé par l’ENEC à 20,4% en 2010 et le taux de chômage élargi (incluant les « chômeurs découragés »), à 27,6%. Il est en accroissement de 5 points entre 2005 et 2010 puisque l’enquête gabonaise d’évaluation de la pauvreté (EGEP) de 2005 l’évaluait à 16,3% pourcent. Graphique 15 : Evolution du taux de chômage (au sens du BIT) au Gabon, 1993-2010 (en pourcentage) Source : RGPH1993, EGEP 2005, ENEC 2010 12. La comparaison avec un ensemble de pays et groupe de pays de différentes régions du monde pour lesquels nous avons pu disposer d’un taux national confirme le caractère particulièrement élevé du chômage au Gabon. Le graphique 16 ci-dessous montre qu’il est d’environ 10 fois plus élevé qu’au Cameroun, quatre fois plus que dans la moyenne des pays à revenu intermédiaire, et de deux à trois fois plus que dans les autres pays sélectionnés pour la comparaison, à l’exception de l’Afrique du Sud et de l’Ethiopie. Graphique 16 : Taux de chômage au Gabon et dans les pays comparateurs, 20105 51 (en pourcentage) Source: Banque mondiale 13. Une comparaison du taux de chômage à Libreville et Port Gentil avec ceux observés dans d’autres grandes villes d’Afrique centrale et de l’Ouest témoigne également de l’ampleur du chômage au Gabon. A Libreville, le taux de chômage est d’environ 5 points au-dessus de celui observé à Yaoundé, 9 points au-dessus de celui observé à Douala, de 4 points supérieur à celui observé à Brazzaville et 8 points au- 4  Chômeur au sens du BIT : actif qui n’a pas travaillé au cours des 7 jours précédant l’enquête, ne serait-ce que 1 heure, et qui cherche un emploi et qui est disponible pour l’exercer immédiatement. Chômage au sens élargi : chômeurs BIT + « chômeurs découragés » (= inactifs qui, bien que n’ayant pas cherché d’emploi au cours des 7 derniers jours précédant l’enquête, restent malgré tout disponibles si on leur proposait un emploi). 5  Le taux de chômage du Gabon est celui de l’ENEC 2010 alors que ceux des autres pays est de 2009. dessus de celui de Pointe Noire. Les deux métropoles gabonaises affichent un niveau de chômage de deux à six fois supérieur à celui observé dans les métropoles de l’UEMOA, où le taux de chômage, à l’exception de la Guinée Bissau, n’atteint pas 7% pourcent. Graphique 17 : Taux de chômage dans les principales villes d’Afrique de l’Ouest et centrale, 2010 (en pourcentage) Sources : ENEC 2010, DGRH-DGS ; EDM-IHPC UEMOA 2008 ; EESI 2005-2010 ; EESIC 2009/2010 14. Le taux de chômage est presqu’aussi élevé en milieu urbain (environ 21%) qu’en milieu rural (19%). Cependant en relation avec la forte urbanisation du Gabon, la grande masse des chômeurs (9 sur 10) se trouve dans les villes, principalement dans les deux grands bassins d’emploi, Libreville et Port-Gentil, où les taux de chômage 52 sont respectivement de 21,2% et 14,3%. Le niveau élevé du chômage en milieu urbain et la proportion des chômeurs découragés renseignent sur le potentiel de main- d’œuvre non employée et la nécessité de mettre en œuvre des mesures pour augmenter leur employabilité. Les provinces de l’Estuaire (hors Libreville), le Moyen Ogooué et l’Ogooué Ivindo sont les plus affectées par le chômage avec des taux respectifs de 28,5% (les deux premières) et 23,5%. Le Woleu Ntem avec un taux de 7% est la province la moins affectée par le chômage. Graphique 18 : Taux de chômage par province, 2010 (en pourcentage) Source : ENEC 2010 15. Le chômage au Gabon est de longue durée  (en moyenne 6 ans). La proportion de personnes au chômage depuis plus d’un an représente 75% des chômeurs. Les femmes mettent en moyenne plus de temps au chômage (77,9 mois) que les hommes (73,8 mois). Les chômeurs de courte durée représentent environ 20% des primo-demandeurs d’emploi et environ 30% des anciens occupés. Cette durée1 exceptionnellement longue au chômage s’explique principalement par (i) le manque de formation continue, puisqu’en 6 ans on peut reconvertir entièrement un chômeur pour qu’il puisse saisir des opportunités d’emplois ; (ii) l’inadéquation du système d’éducation et de formation ; (iii) la déficience du cadre institutionnel, notamment les organismes de placement, (iv) la faible création d’emplois. En l’absence d’assurance chômage, ce chômage de longue durée n’est possible qu’en raison des mécanismes de solidarité traditionnelle. 16. Les jeunes sont les plus affectés par le chômage. Le taux de chômage atteint 35,7% chez les jeunes de 15 à 24 ans quel que soit le milieu de résidence (ville ou campagne). Les jeunes rencontrent beaucoup de difficultés à s’insérer professionnellement en sortant du système scolaire. Il décroît ensuite avec l’âge, baissant à 26% chez les individus de 25-34 ans et 17% pour la tranche d’âge 34-44 ans. Il est naturellement encore plus bas (presque 5%) pour les séniors (plus de 60 ans). Un taux de chômage aussi important parmi les jeunes est une source potentielle de problèmes économiques et sociaux, et révèle l’urgence à mettre en œuvre des mesures énergiques encourageant la création massive d’emplois. Graphique 19 : Taux de chômage par tranche d’âge, 2010 (en pourcentage) 53 Source : Calcul des auteurs à partir des données de l’ENEC 2010 17. L’accès à l’éducation ne protège pas contre le chômage au Gabon. Les individus ayant le niveau secondaire 1er cycle général et technique sont les plus touchés par le chômage (respectivement 24% et 27%). Parmi ceux ayant un niveau secondaire 2ème cycle, les diplômés des filières techniques (10%) en sont moins victimes que ceux ayant reçu une formation générale (20%). Par contre, les individus qui ont suivi des études supérieures accusent un taux de chômage (12%) supérieur à ceux ayant un niveau d’études secondaire technique 2ème cycle (10%). Moins de 1% des actifs n’ayant pas été à l’école sont affectés par le chômage. Le faible taux de chômage chez les personnes n’ayant pas d’instruction devrait cependant être nuancé. Il s’agit dans la grande majorité des cas des occupations précaires et pénibles. 18. L’ampleur du chômage chez les actifs diplômés a été aussi observée dans d’autre pays de la sous-région, notamment au Cameroun (Lachaud, 1995) et au Congo (Kuépié et Nordman, 2011). Ceci s’explique peut-être, d’une part, par le niveau d’instruction sans cesse croissant au sein de la population, mais aussi par la rotation des effectifs et une inadaptation du système éducatif aux besoins réels du marché, que les employeurs mettent en avant pour justifier leurs difficultés à recruter les jeunes diplômés. Les entrepreneurs offrent des postes avec des qualifications spécifiques que les chômeurs, aussi bien les anciens travailleurs que les primo-demandeurs, n’arrivent pas à satisfaire entièrement. Graphique 20 : Taux de chômage par niveau d’instruction, 2010 (en pourcentage) Source : ENEC 2010 19. Les données sur l’activité de placement de l’Office National de l’Emploi montrent que, en dépit d’une demande d’emplois supérieure aux offres, plus de deux tiers des offres d’emploi des entreprises ne sont pas satisfaites faute de profils correspondants. Ce faible taux de satisfaction est relevé pour toutes les 54 catégories de qualifications. Il est cependant plus faible pour les demandeurs ayant un profil d’ouvriers qualifiés, de techniciens et d’ingénieurs. Ce déséquilibre structurel du marché n’est pas un phénomène récent au Gabon. Le rapport d’activités de 1978 de la Direction de la main d’œuvre et de l’emploi du Ministère du Travail relevait déjà un faible taux d’absorption des offres d’emploi. Sur 1.338 emplois offerts, seulement 938 offres avaient été satisfaites. De même, sur 2.768 demandes d’emplois, seules 588 avaient pu être satisfaites. Ce déséquilibre s’expliquant par l’inadéquation entre les offres et les demandes d’emploi, l’opacité du marché du travail et le manque de qualification professionnelle des demandeurs d’emplois. 20. Un taux de chômage moins élevé chez les diplômés des filières techniques que chez ceux ayant une formation générale tend à confirmer la prépondérance de la composante structurelle du chômage au Gabon et la nécessité de rendre plus professionnelles et techniques les filières de formation. 21. Le faible taux de chômage des non-scolarisés s’explique en partie par le fait qu’ils ont de faibles prétentions, aussi bien en salaire qu’en conditions de travail. En outre, cette catégorie d’actifs doit être plus nombreuse dans le secteur informel, où l’accès à l’emploi est plus aisé. Le taux relativement bas chez les personnes ayant un niveau d’études supérieures s’explique par le fait qu’elles visent en grande partie le secteur public. 22. Les femmes sont très vulnérables vis-à-vis du marché du travail. D’abord elles sont 39,1% à travailler pour leur propre compte, essentiellement dans des emplois informels agricoles et du commerce, ou à exercer des emplois non rémunérés ; contre 27,6% chez les hommes. Ensuite, le chômage des femmes est d’environ deux fois celui des hommes et c’est parmi elles que l’on observe plus de chômeurs découragés. En conséquence, elles sont moins présentes sur le marché du travail avec un taux d’activité évalué à 34,5% ,soit plus de 15 points d’écart avec celui des hommes qui s’élève à 49,6%. Tableau 5 : Taux de satisfaction des offres et demandes d’emploi par niveau de qualification, 2010 (nombre d’actifs)   Taux de Taux de Demandes Offres Offres satisfaction satisfaction des d’emploi d’emploi satisfaites des offres demandes (en %) (en %) Cadres/Ingénieurs 971 188 64 34,0 6,6 Techniciens supérieurs 1.324 321 149 46,4 11,2 Techniciens 302 217 68 31,3 22,5 Ouvriers qualifiés 1.086 82 19 23,2 1,7 Ouvriers spécialisés 835 142 67 47,2 8,0 Main-d’œuvre banale 142 42 25 59,5 17,6 Total 4.660 992 392 39,5 8,4 Source : ONE 23. La vulnérabilité des femmes vis-à-vis du marché du travail est principalement la conséquence des écarts observés au niveau des enseignements 55 secondaire et supérieur. Alors que le ratio fille/garçon est proche de 1 au niveau primaire, les écarts importants de niveau d’instruction en défaveur des femmes sont observés, pour les niveaux secondaire second cycle et supérieur avec respectivement 21% contre 16%; et 8% contre 6%. 23% des jeunes filles ayant arrêtées de fréquenter l’école affirment que c’est à cause des grossesses et des mariages précoces (23%), et 42% répondent que c’est en raison de l’incapacité financière des parents. En raison de ce qui précède, comme dans la grande majorité des pays africains, les femmes perçoivent des revenus moins élevés. Les résultats de l’EGEP révélaient déjà en 2005 que plus de la moitié des femmes actives occupées déclarent un revenu mensuel inférieur à 50.000 francs CFA, alors qu’un homme sur cinq seulement est dans cette situation. A l’autre extrême, elles ne sont que 12% à percevoir un revenu mensuel supérieur à 200.000 francs CFA. contre plus de 28% des hommes. 24. Le chômage élevé explique en partie la forte proportion de la population dépendante. La proportion d’inactifs au sein de la population du Gabon est de 69,1% au sens du BIT et de 66% au sens élargi, ce qui révèle une proportion de 3,1% d’actifs gagnés par le découragement par rapport à leur insertion sur le marché de l’emploi : il s’agit de chômeurs découragés. Ceci augmente d’autant plus la charge économique et sociale que supportent les actifs. Ainsi, le taux de dépendance est de 1,9 au sens élargi et de 2,2 au sens BIT. Les femmes et les jeunes (15-24 ans) sont ceux qui supportent le plus cette charge économique et sociale avec respectivement des taux de dépendance de 2,3 contre 1,62 au sens élargi et 2,9 contre 1,8 au sens du BIT. Chez les jeunes, le taux de dépendance est de 3,7 au sens élargi et de 4,7. Ce qui montre que les femmes et les jeunes supportent des charges économiques et sociales largement supérieures à la moyenne nationale. Ceci est révélateur de la situation de vulnérabilité dans laquelle vivent ces deux groupes d’individus. Graphique 21 : Taux de chômage par sexe et en fonction du niveau d’instruction, 2010 (en pourcentage) Source : ENEC 2010 Encadré 1 : L’enquête nationale sur l’emploi et le chômage (ENEC) Les travaux de l’Enquête nationale sur l’emploi et le chômage (ENEC), fondée sur la méthodologie des enquêtes de type 1-2-3, ont été conduits conjointement par la Direction générale des ressources 56 humaines (DGRH) et la Direction générale de la statistique (DGS), deux structures techniques du Ministère chargé de l’emploi et de l’économie. L’enquête 1-2-3 est une enquête mixte (ménages/entreprises) modulaire mise au point par des chercheurs de DIAL (Amegashie et al. 2005 ; Razafindrakoto et al. 2009 ; Nordman et Roubaud, 2010). Dans sa version complète, il s’agit d’un système de trois enquêtes imbriquées, visant différentes populations statistiques, les individus, les unités de production, les ménages ; et qui se réalise en trois phases. La première phase est une enquête sur l’emploi, le chômage et les conditions de travail des ménages et des individus. Elle permet de documenter et d’analyser le fonctionnement du marché du travail et est utilisée comme filtre pour la deuxième phase, où un échantillon représentatif des Unités de Production Informelles (UPI) est étudié. Il s’agit de l’enquête sur le secteur informel qui cherche à mesurer les principales caractéristiques économiques et productives des unités de production (production, valeur ajoutée, investissement, financement), les principales difficultés rencontrées dans le développement de l’activité, et le type de soutien que les entrepreneurs du secteur informel attendent des pouvoirs publics. La troisième phase, une enquête spécifique sur les dépenses de consommation des ménages, porte sur un sous-échantillon de ménages sélectionnés lors de la phase 1. Elle permet d’évaluer le poids des secteurs formel et informel dans la consommation, le niveau de vie des ménages et de la pauvreté monétaire, basée sur les dépenses. Au Gabon, seule la phase 1 (ENEC) a été réalisée en 2010. Il La réalisation de la phase 2, portant sur le secteur informel, est prévue dans un proche avenir. L’ENEC est une enquête à couverture nationale qui a concerné un échantillon de 3.675 ménages dont 2.575 urbains et 1.100 ruraux. 12.037 individus âgés de 10 ans et plus (dont 8.631 urbains et 3.406 ruraux) ont été soumis au questionnaire individuel sur l’emploi. Mais l’analyse de l’emploi s’est intéressée aux personnes de 15 ans et plus. Les résultats de l’ENEC, globalement satisfaisants, sont utilisés en grande partie dans la présente étude. 26. Le profil des taux d’activité en fonction de l’âge montre une entrée relativement tardive dans la vie active. En effet, le taux d’activité est de 18,3% pour les jeunes (15 – 24 ans), alors qu’il est très élevé pour la tranche 35-44 ans (79,2%). Le niveau d’activité diminue ensuite pour s’établir à 24,2% pour les séniors (60 ans et plus). Généralement, l’entrée tardive dans l’activité est due à l’allongement de la scolarité, mais aussi à la dégradation d’un marché du travail qui a du mal à créer des emplois. Le faible niveau d’activité des seniors (60 ans et plus) est dû à l’existence d’autres sources de revenus telles que le loyer d’habitation, la rente viagère, la pension de retraite, la contribution des enfants et à une sortie progressive du marché de travail. Une population active occupée majoritairement urbaine et informelle 27. L’emploi est concentré dans les trois grandes villes du pays. Libreville, Port-Gentil et Franceville-Moanda (principales villes du Haut Ogooué) regroupent 70% des actifs occupés. Libreville, la capitale administrative, concentre la majorité des activités administratives et l’essentiel des activités non pétrolières (services, industries, commerce…) tandis que Port-Gentil et le reste de l’Ogooué maritime abritent l’activité pétrolière. La région de Franceville-Moanda est spécialisée dans l’exploitation minière, principalement l’exploitation de manganèse. Les régions du Nord (Woleu-Ntem) et du Sud (Ngounié et Nyanga) sont essentiellement agricoles, alors que les provinces du Moyen Ogooué, de l’Ogooué Lolo et de l’Ogooué Ivindo abritent des activités d’exploitation et de transformation du bois. En plus des activités forestières, l’Ogooué Ivindo abrite des activités minières artisanales. Graphique 22 : Distribution géographique de l’emploi au Gabon, 2010 57 (en pourcentage du total des actifs occupés) Source : ENEC 2010 28. Près de la moitié des actifs occupés (47%) est employée par les entreprises du secteur informel6. Etant donné que la grande majorité les travailleurs exerçant dans les ménages et dans les entreprises associatives n’est pas déclarée à la caisse nationale de sécurité sociale, la proportion de l’emploi informel avoisine en réalité 57% de l’emploi global. Le Gabon n’échappe donc pas à l’informalisation qui caractérise les économies africaines. Comme le montre le graphique 23 ci-dessous, au Gabon, l’emploi informel est largement dominé par les activités de services (transport, restauration, couture, réparation mécanique…) qui en représentent 38% des effectifs globaux du secteur contre 29% dans le commerce et 19% dans l’agriculture. Les industries et le BTP (principalement la construction) représentent respectivement 9% et 5%. 6  La population active occupée est d’environ 393.000 actifs. 29. Les activités informelles sont exercées en grande partie par la population active immigrée qui est présente principalement dans le commerce de détail des marchés et des boutiques, le transport urbain et interurbain et l’agriculture. Les nationaux sont plus visibles dans la construction, la menuiserie et les services. Dans l’ensemble, les personnes exerçant dans les entreprises informelles n’ont pas de niveau d’éducation et de formation de base élevé. En général, ils acquièrent leur formation sur le tas. Graphique 23 : Distribution de l’emploi informel par branches d’activités, 2010 (en pourcentage du total de l’emploi informel) BTP 5% Industries Agriculture 9% 19% Services Commerce 38% 29% Source: Estimations des auteurs à partir des données de l’ENEC 2010 30. Le secteur informel au Gabon, comme dans beaucoup de pays africains, s’est 58 développé à la suite de l’effondrement de pans entiers du secteur formel après la chute drastique des prix du pétrole en 1986 ayant entraîné une forte contraction des effectifs du secteur formel (voir section 2 du chapitre1). Le surplus de main-d’œuvre du secteur formel, principalement en milieu urbain, a trouvé refuge dans l’économie informelle. L’entrée dans le secteur informel constituant ainsi face à la crise, la seule solution au chômage pour nombre des travailleurs licenciés du secteur formel et les nouveaux arrivants sur le marché de l’emploi. Graphique 24 : Répartition de l’emploi par secteur institutionnel, 2010 (en pourcentage du total des actifs) Source : ENEC 2010 31. Le secteur public, avec 21% du total de la population active occupée, soit deux tiers de l’emploi formel, est le deuxième employeur du pays. L’emploi public comprend les effectifs permanents de la fonction publique, le personnel des collectivités locales et la main-d’œuvre non permanente de l’Etat. Les effectifs des administrations sociales qui en représentaient 36% en 2010 et les forces de sécurité qui constituent près de la moitié des agents publics en sont les plus importantes composantes. Evalué à environ 47.000 agents en 1985, l’emploi public a plus que doublé en 25 ans, pour atteindre plus de 100.000 agents en 2010 d’après les résultats de l’ENEC7, après les recrutements massifs de personnel n’obéissant à aucune programmation ni à une quelconque expression de besoins réels de l’administration. L’accès à la fonction publique est perçu comme le seul moyen d’avoir une situation professionnelle stable. 32. La répartition de la main-d’œuvre, selon la branche d’activité révèle une prédominance du secteur tertiaire. Au total, les services marchands et non marchands emploient 66% de la population active occupée. Le poids des actifs agricoles est de 8% en y incluant aussi bien les salariés des grandes exploitations agricoles (palmier à huile, hévéa), celles des cultures de rente (café, cacao) et les petits exploitants des zones rurales et périurbaines. Les industries extractives (mines et pétrole), principales sources de la valeur ajoutée du pays, emploient à peine 2% de la population active occupée. Graphique 25 : Répartition de l’emploi global par branches d’activités (en pourcentage du total des actifs occupés) 59 Source : Calcul des auteurs à partir des données de l’ENEC 2010 33. La part du BTP dans l’emploi, évaluée actuellement à 7%, devrait s’accroître au cours des prochaines années avec la mise en œuvre du schéma directeur des infrastructures qui comprend 21 grands projets donc le coût annoncé par le gouvernement gabonais est de 6.000 milliards de dollar Us sur 6 ans. Le reste de l’emploi est réparti entre les industries de transformation (5%) et la filière bois (3%). 34. La structure de l’emploi par catégories socioprofessionnelles montre que le salariat est le mode le plus dominant au Gabon. 65% des travailleurs sont des ouvriers, des cadres d’entreprises et des manœuvres. Les travailleurs indépendants et les chefs d’entreprises représentent respectivement 30% et 3% des actifs occupés. Le salariat est prédominant en milieu urbain et dans le secteur public tandis que les travailleurs indépendants sont plus nombreux en milieu rural et en grande majorité des femmes. 35. Le secteur public gabonais se singularise par un taux d’encadrement très élevé. Les cadres représentent la moitié (52%) des effectifs du secteur public qui par ailleurs absorbe 72% des cadres occupés. La structure inversée des effectifs du secteur 7  Les statistiques administratives de la Direction générale de l’Economie relèvent 77.576 agents en 2010. public (1,4 cadre pour 1 ouvrier qualifié et 4,6 cadres pour 1 manœuvre) est révélateur de très gros écarts de revenus entre les fonctions d’encadrement et les autres positions dans le secteur public. Ces écarts poussent les agents de l’Etat à accéder par divers procédés (concours administratifs, promotions à titre exceptionnel…) aux catégories administratives les plus élevées et aux fonctions administratives et politiques qui sont les mieux rémunérées. 36. Globalement, l’administration publique absorbe l’essentiel de la main- d’œuvre qualifiée. Deux tiers des travailleurs ayant un niveau supérieur travaillent dans l’administration publique, en grande partie dans les secteurs de l’éducation et de la santé. A contrario, deux tiers des travailleurs sans instruction et la moitié de ceux ayant un niveau primaire exercent dans l’agriculture. Les actifs ayant un niveau d’instruction intermédiaire se retrouvent en grande partie dans les secteurs de l’exploitation forestière, la construction, le transport et une partie de l’industrie de transformation et des services Tableau 6 : Répartition de l’emploi principal par secteur institutionnel et catégorie socioprofessionnelle, 2010 (n d’actifs occupés) Entreprises Secteur Entreprises privées Ensemble public formelles informelles Cadres 53.498 11.223 9.514 74.235 Ouvriers et employés qualifiés 37.153 31.878 45.765 114.796 60 Manœuvres Patrons/Employeurs 11.594 9.783 3.340 47.074 6.667 68.451 10.007 Travailleurs indépendants 9.161 109.124 118.285 Apprentis 693 2.146 2.839 Aides familiaux 279 4.548 4.827 Total 10.2245 66.357 22.4838 393.440 Source : Calcul des auteurs à partir des données de l’ENEC 2010 37. La forte concentration des cadres dans l’administration, au détriment du secteur privé, est en réalité la conséquence d’une offre d’éducation dans le supérieur, en grande partie dominée par les enseignements généraux et de lettres (la question est examinée au chapitre suivant). qui prédispose- plus facilement à l’entrée dans la fonction publique plutôt qu’au secteur productif dont la moitié (48%) des effectifs est constituée d’ouvriers et d’employés qualifiés. Dans tous les cas, la structure inversée des effectifs du secteur public révèle une gestion inefficace des personnels de l’Etat, dont les recrutements correspondent moins à ses réels besoins qu’au souci de redistribuer la rente pétrolière. Conscient de cette réalité, le gouvernement a entrepris un audit des effectifs de l’Etat en 2009, avec l’objectif de les réduire et de les redéployer. Les résultats de cet audit n’ont pas toujours été publiés. 38. Un autre constat émergeant de la répartition de la force de travail par catégories socioprofessionnelles est la forte proportion de patrons/employeurs et de travailleurs indépendants dans le secteur informel. 67% des patrons/employeurs et 92% des travailleurs indépendants exercent dans le secteur informel. Ce constat est cohérent avec le poids du secteur informel. Il s’agit donc en grande partie de patrons de très petites entreprises. Une proportion aussi importante de patrons et de travailleurs indépendants peut s’expliquer par un climat de l’investissement contraignant qui augmente le coût d’être dans le secteur formel. Un approfondissement de la connaissance du secteur informel est nécessaire afin de mieux saisir les causes de cette informalité (fiscalité lourde, législation sociale contraignante…), et mettre en place des mesures d’accompagnement pour progressivement transformer ces patrons et travailleurs indépendants informels en actifs formels susceptibles de créer plus d’emplois. 39. Le marché du travail gabonais se caractérise également par la forte proportion d’emplois vulnérables. Le tiers de la population active exerce un emploi vulnérable au Gabon. 32% des travailleurs déclarent exercer un emploi non rémunéré. Du fait des activités agricoles de subsistance qu’elles pratiquent, les populations féminines, âgées de plus de 60 ans, semblent être les plus exposées (84%). Les personnes âgées, ayant pour la plupart passé l’âge de la retraite, présentent également un taux d’emploi vulnérable très élevé (71%) tout comme les jeunes de 15 à 25 ans dont 29,5% exercent un emploi vulnérable. Par contre, la population dont l’âge varie entre 25 et 34 ans semble bénéficier d’emplois moins vulnérables (29% ). 40. L’on observe également un taux de sous-emploi élevé au Gabon, principalement en milieu rural et chez les femmes. En milieu rural, il est d’environ 30% contre 24% en milieu urbain (le taux global est de 22,5%). Les femmes en sont plus victimes que les hommes, avec respectivement des taux de 28% et 19,1%. Le niveau de sous-emploi dans les zones urbaines s’explique par la pluriactivité, principalement 61 chez les jeunes exerçant dans le secteur informel. En milieu rural, il est plus lié à l’exercice d’activités saisonnières. Un coût du travail relativement élevé 41. Les données actuellement disponibles sur les entreprises et le marché du travail en général ne permettent pas de faire une analyse fine du coût et de la productivité du travail au Gabon. Cependant, deux indicateurs permettent de confirmer l’existence d’un coût du travail relativement élevé: le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) et le coût moyen par travailleur. Le SMIG au Gabon est fixé à 80.000 francs CFA depuis 2006. Mesuré à travers ces deux indicateurs, le coût du travail au Gabon, bien qu’étant comparable aux autres économies à forte composante pétrolière de la sous-région CEMAC, est très élevé comparé à l’économie la plus structurée de la sous- région qui est le Cameroun. Comme le montre le graphique 26 ci-dessous, le SMIG au Gabon est près de trois fois plus élevé qu’au Cameroun et le salaire moyen d’un travailleur plus de deux fois. 42. La comparaison avec les autres pays est en réalité sans intérêt car le Tchad, le Congo et la Guinée équatoriale sont affectés par le syndrome hollandais et souffrent donc de la même contrainte que le Gabon. Le différentiel de compétitivité entre ces économies voisines et celle du Gabon ne peut donc se jouer sur la variable coût du travail. En raison de son enclavement et de son instabilité sociale et politique, la Centrafrique ne constitue pas non plus une bonne référence. 43. L’étude récente du BIT sur les emplois générés par la stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté adoptée en 2006 a cependant révélé des salaires très bas dans le secteur privé, malgré un coût moyen national élevé. Elle a en effet révélé que dans les secteurs privés formel et informel 44% des salaires distribués sont inférieurs à 50.000 francs CFA, donc plus bas que le SMIG ; et que presque les deux-tiers des salaires (62%) sont inférieurs à 100.000 francs CFA. Ces bas salaires se retrouvent principalement dans l’agriculture, la pêche et le commerce, où l’informalité est plus importante. Les industries de transformation, la construction et le transport ont des salaires qui tendent vers la moyenne alors que les salaires les plus élevés (plus d’un million de francs CFA) sont observés dans les secteurs pétrolier, minier et les services (principalement les télécommunications). 44. Les résultats de l’ENEC 2010 (graphique 27) ont tendance à montrer que ce sont les revenus versés par le secteur public qui tirent à la hausse le coût du travail au Gabon. Les actifs occupés du secteur public gagnent en moyenne 308.300 francs CFA par mois tandis que ceux du secteur privé formel ont un revenu mensuel moyen de 250.500 francs CFA, le revenu moyen du secteur informel étant en moyenne 158.800 francs CFA. Comme relevé au chapitre 1, le boom pétrolier de 1973 a été l’élément déclencheur de la dynamique haussière des salaires dans le secteur public qui, à son tour, l’a propagée au reste de l’économie du fait des rigidités à la baisse. 62 Avec le secteur pétrolier, le secteur public contribue donc au renchérissement du coût de la vie et à maintenir une rigidité à la baisse des salaires dans le secteur productif non pétrolier. Graphique 26 : Coût du travail dans les pays de la CEMAC Source : Banque mondiale et administrations nationales 45. Bien que le maintien des revenus très élevés dans le secteur public ne soit pas soutenable à long terme, en raison de l’épuisement inévitable des ressources pétrolières et du fait que ceux-ci contribuent à obérer la compétitivité globale de l’économie, il serait socialement et politiquement très coûteux de s’engager vers une révision à la baisse de la grille des salaires publics. La multiplication des grèves, principalement dans les secteurs de l’éducation et la santé dont la principale revendication est l’augmentation des salaires, confirme du reste cette idée. Graphique 27 : Revenu mensuel moyen par secteur d’activité au Gabon, 2010 (en milliers de francs CFA) Source : ENEC 2010 46. En revanche, l’existence d’un coût du travail assez élevé recommande d’investir dans le capital humain afin d’augmenter la qualité de la main-d’œuvre et de se spécialiser dans les niches à forte valeur ajoutée. Cette orientation nécessitera une restructuration du système éducatif. L’Education et l’insertion professionnelle des jeunes et des femmes au Gabon 63 47. Cette section est consacrée à l’analyse de deux préoccupations importantes liées à deux groupes vulnérables sur le marché du travail, les femmes et les jeunes : l’insertion professionnelle et le rendement de l’éducation. Les facteurs explicatifs de l’insertion des femmes et des jeunes sur le marché du travail gabonais ont été analysés à travers un modèle LOGIT multinomial, alors que l’estimation du rendement de l’éducation s’est faite à l’aide du modèle augmenté de Mincer. 48. L’estimation des modèles porte sur deux sous-ensembles, aussi bien pour les femmes que pour les jeunes. Pour les femmes, les sous-ensembles considérés sont: la tranche d’âge 15 ans et plus, et les femmes actives de 15 ans et plus. Pour les jeunes, la tranche d’âge considérée est de 15-29 ans. Un modèle spécifique a été aussi construit pour les actifs de cette même tranche d’âge. Education et insertion professionnelle 49. L’insertion sur le marché du travail est appréhendée à travers deux dimensions : la participation à l’activité économique et la nature du secteur d’activité. La première permet de considérer l’insertion sur le marché du travail sous l’angle de la disponibilité ou de l’indisponibilité des individus à participer à la production économique ; alors que la seconde permet d’analyser le problème de l’insertion sous l’angle du secteur institutionnel de l’activité menée par l’actif. Les principaux résultats de l’analyse sont les suivants: 50. Les femmes ayant un niveau d’instruction supérieur ont plus de chance d’accéder à un emploi que celle ayant un niveau d’instruction inférieur. Après avoir contrôlé pour toutes les autres variables, l’on constate que le niveau d’instruction des femmes a globalement un effet significatif sur leur participation au marché du travail (voir tableau des effets du modèle). Ce résultat est en adéquation avec celui obtenu au Mali8 où les auteurs qualifient cet impact d’une prime à l’enseignement supérieur. Mais, l’on ne sait pas si cette prime à l’enseignement supérieur est en faveur des actives occupées ou des chômeuses. C’est la raison pour laquelle, dans ce cas-ci, une analyse détaillée selon la situation d’activité a été faite et a permis de révéler que la différence de chance relative d’être active occupée sur le marché du travail plutôt que d’être inactive entre les divers niveaux d’instruction et le niveau supérieur n’est pas significative. Toutefois, elle l’est pour les femmes qui sont en position de chômage. En d’autres termes, pour les femmes qui ont fait le primaire ou le premier cycle du secondaire, le risque qu’elles soient chômeuses plutôt qu’inactives est au moins deux fois plus élevé que celui des femmes ayant un niveau d’instruction « supérieur ». Les femmes qui ont reçu une formation générale ont moins de chance que celle ayant une formation professionnelle de s’insérer dans le marché du travail. Une femme ayant reçu une formation générale uniquement a environ 54% de chance de moins que celle qui a reçu une 64 formation technique d’être active occupée plutôt que d’être inactive. Celle n’ayant reçu aucune formation a 29% de chance de moins que celle ayant un niveau supérieur. Le niveau d’instruction favorise l’insertion des femmes dans le secteur formel. La chance relative d’être recrutée dans le secteur public plutôt que d’être chômeuse ou inactive augmente avec le niveau d’instruction. Une femme ayant un niveau primaire ou secondaire, a 20% de la chance relative de celle qui a un niveau « supérieur ». celles qui n’ont pas d’instruction comparativement à celles qui ont le niveau universitaire, n’ont aucune chance de s’insérer sur le marché privé formel. La probabilité de s’insérer professionnellement pour les jeunes décroît avec le niveau d’instruction : exprimée par rapport à la chance d’un universitaire de s’insérer, elle est respectivement de 2,7 fois, 2,2 fois ou une fois pour le jeune qui a le niveau primaire, secondaire premier cycle ou secondaire deuxième cycle. Par contre, le jeune qui n’a que le niveau primaire ou secondaire premier cycle a respectivement 5 fois et 3 fois plus de risque que l’universitaire d’être en chômage. 51. Globalement, le modèle montre que les jeunes avec un niveau d’instruction peu élevé (1er cycle secondaire) s’insèrent plus facilement dans le secteur privé 8  Doumbia Gakou, A. et Kuépié M. (2008), Niveau et déterminants de l’insertion des femmes sur le marché du travail malien, document de travail n° DT/2008-09, Dial. (formel et informel) alors que le secteur public accueille davantage les jeunes mieux formés (enseignement supérieur et secondaire 2). Une explication sommaire de cette différence entre les deux secteurs serait que le secteur public (notamment la fonction publique) classe ses recrues suivant le niveau du diplôme (BEPC ou Bac ou Bac + n) ; alors que le secteur privé a une approche du recrutement par compétences (qu’importe le diplôme, l’essentiel est dans le savoir-faire et/ou l’expérience.  De plus, à compétences égales, le secteur privé prend probablement le moins diplômé pour une question de rapport qualité/prix). Rendement de l’éducation 52. L’objectif visé dans cette section est de savoir si un niveau d’études supplémentaire dans l’enseignement technique et professionnel, et/ou dans l’enseignement général apporte une rémunération supplémentaire chez les femmes et chez les jeunes 53. Pour vérifier l’impact du niveau d’éducation sur celui des rémunérations, une analyse du rendement marginal de l’éducation d’un cycle à un autre a été effectuée à l’aide d’une fonction linéaire par morceaux. Cette spécification permet de mettre en évidence le caractère convexe des rendements de l’éducation. Les résultats de l’analyse (tableau ci-dessous) montrent que les dernières années du secondaire et du supérieur sont les plus rentables. Le même phénomène a été observé au Congo (Kuépié et Nordman, 2011). Dans le cas du Gabon, les gains les plus élevés sont observés en 65 passant : i) du primaire au secondaire ; ii) de la licence à la maîtrise et iii) de la maîtrise au master. Toutefois, l’on note un déficit de gain entre les travailleurs sans instruction et ceux ayant le niveau primaire. Tableau 7 : Variations des gains moyens par niveau d’instruction au Gabon (en pourcentage) Gain moyen par rapport au cycle Cycle d’études Rémunération moyenne d’études précédent (%) 234.352 Sans instruction [227.797 – 240.906]* 195.473 Primaire terminé -16,6 [193.392 – 197.555]* Secondaire 1er cycle 323.755 65,6 terminé [317.419 – 330.090]* Secondaire 2ème cycle 342.666 5,8 terminé [338.828 – 346.505]* 355.589 Licence 3,8 [351.527 – 359.651]* 442.768 Maîtrise 24,5 [436.426 – 449.110]* 715.522 Master 61,6 [703.040 – 728.005]* 720.751 Doctorat 0,7 [690.802 – 750.701]* Source : Calculs des auteurs à partir des données de l’ENEC 2010 54. Par ailleurs, l’analyse a également montré qu’une année supplémentaire d’éducation chez la femme augmenterait son revenu de 5,3% sur le marché. Ce taux est de 6,1% pour les femmes ayant reçu une formation d’enseignement général et de 4,6% pour celles ayant reçu une formation technique et/ou professionnelle. Pour les jeunes occupés (tous sexes confondus), ce taux est de 5,8%, tous types de formation confondus, et de 6,1% pour les jeunes ayant fait une formation générale et 1% (mais non significatif) pour ceux d’entre eux qui ont fait une formation technique ou un autre type de formation. Conclusion du chapitre 55. La résorption du chômage, principalement celui des jeunes, demeure le plus gros défi auquel est confronté le gouvernement gabonais. Cette pression devrait s’accroître à moyen et long terme en raison de l’augmentation croissante du poids démographique de cette tranche de la population qui fait peser sur le pays, principalement dans les centres urbains où elle est concentrée, une forte demande en termes d’emplois. 56. Les données de l’Office national de l’emploi qui montrent que près de la moitié des d’emplois offerts par les entreprises ne sont pas satisfaits ; et suggèrent que ce chômage est principalement structurel. L’ajustement des profils de formation aux besoins du secteur productif apparaît comme une des voies pour sortir de la trappe du 66 chômage des jeunes et permettre à la croissance, dont les perspectives sont positives à moyen et long terme, de se traduire en emplois décents. 57. Le poids du secteur informel (principal employeur du pays) montre également la nécessité d’approfondir la connaissance de ce secteur dont les données parcellaires disponibles sont très anciennes et incomplètes pour rendre compte de sa dynamique. 4. Contraintes et défis du marché du travail gabonais 1. La conclusion du deuxième chapitre, consacré aux caractéristiques du marché du travail, montre que le système éducatif en décalage avec les besoins du secteur productif est un facteur majeur du chômage au Gabon. Cependant, ce décalage n’est pas le seul facteur expliquant un taux de chômage aussi élevé. Le climat de l’investissement réputé contraignant, la législation sociale rigide et coûteuse pour l’employeur, l’inefficacité du cadre institutionnel et l’absence d’une politique de l’emploi constituent autant de freins à la création d’emplois au Gabon. Ces différents facteurs sont examinés dans le présent chapitre. Du côté de l’offre : l’inadéquation entre la structure du système éducatif et les opportunités d’emploi 2. Un diagnostic détaillé du système éducatif gabonais (RESEN) vient d’être effectué par l’Agence Française de Développement et a été présenté au Ministère de l’Education nationale en juillet 2012. Sur la base des données de l’EGEP (seules données disponibles), le rapport de l’AFD a réalisé un bilan formation-emploi en comparant la structure des sortants du système éducatif gabonais sur la période 2000- 2005 à celle des emplois offerts aux jeunes dans l’économie nationale. La structure des emplois a été estimée sur la base de la situation professionnelle et de l’emploi occupé 67 en 2005 par des individus jeunes et d’expérience variable sur le marché du travail9. 3. Les résultats de cette analyse qui sont synthétisés dans le tableau 3.1 révèlent que la relation entre l’éducation et l’emploi au Gabon est caractérisée par les trois grands déséquilibres majeurs suivants : Une forte proportion d’actifs n’ayant pas les acquis minimum pour s’insérer dans le marché du travail (partie inférieure du tableau) : 14% des effectifs de la cohorte observée n’ont pas terminé le cycle primaire dont 1% n’a jamais été à l’école ; Une insuffisance de main-d’œuvre ayant des qualifications intermédiaires (ouvriers, techniciens, techniciens supérieurs) qui représentent plus du quart des opportunités d’emplois qualifiés. Un nombre de diplômés du supérieur au moins deux fois plus élevé que celui des emplois offerts correspondant à ce niveau d’instruction (partie supérieure du tableau). Alors que 12% de jeunes sortants du système 9  Le rapport mentionne que ces données ne sont que des ordres de grandeur, mais que l’expérience montre que cette façon de procéder produit des chiffres qui se révèlent raisonnablement proches de ceux obtenus avec des procédures plus complexes et plus spécifiques (lorsque ces données existent) et raisonnablement proches de la réalité. éducatif ont accompli des études supérieures, la demande du secteur productif en matière de cadres n’est que de 5%. Tableau 8 : Bilan quantitatif éducation – formation (en pourcentage des effectifs de la cohorte) Niveau terminal d’études Distribution des emplois offerts Niveau terminal d’études % Type d’emplois % Cadres 5% Supérieur 12% Emplois qualifiés 26% Secondaire 2nd cycle 20% Emplois non qualifiés 8% Secondaire 1er cycle 45% Emplois informels non-agri- 15% coles Chômage 19% Primaire complet 9% Primaire incomplet 13% Inactivité 22% Jamais fréquenté 1% Total de la cohorte 100% Total des emplois offerts 100% Source: Rapport d’état du système éducatif gabonais, AFD, Avril 2012 4. Le déséquilibre entre l’offre du système éducatif et les besoins en main- 68 d’œuvre des entreprises vient également d’être confirmé par l’évaluation des besoins en main-d’œuvre de la société OLAM Gabon. L’état des besoins de cette entreprise, réalisé dans le cadre de la mise en œuvre de ses 5 grands projets au Gabon (voir encadré 4 ci-dessous), montre que cette entreprise aura besoin de près de 2.000 emplois qualifiés (niveau BAC et plus) sur la période 2012-2016. La structure de cette demande révèle que 75% des besoins de cette entreprise concernent les métiers de l’industrie agronomique, de la maintenance industrielle et de la logistique. En face, la structure des inscrits dans les établissements d’enseignement supérieur montre que 63% d’entre eux sont inscrits dans des filières littéraires, de sciences humaines et de sciences économiques. La demande d’OLAM Gabon, comme celle de plusieurs autres entreprises, sera difficilement satisfaite sans avoir recours à la main-d’œuvre étrangère. Anticipant ce déficit, l’entreprise a obtenu de l’Etat la possibilité d’importer de la main-d’œuvre étrangère au-delà des limites prévues par le code du travail (10% des effectifs de l’entreprise) pendant 7 ans avec, en contrepartie, l’obligation de former des nationaux pendant la période d’exception. 5. D’autre part, dans le cadre de la mise en œuvre du pilier Gabon industriel du PSGE, le ministère des mines et de l’industrie a réalisé une cartographie des besoins en compétences nécessaires à la mise en œuvre des projets miniers et industriels du PSGE. Cette cartographie qui figure en annexe 2 du présent rapport montre que la demande d’emplois pour ce pilier sera constituée des métiers du bâtiment, du génie civil, de la logistique et du transport, de la production industrielle, de l’exploitation de sites miniers, de la maintenance industrielle et du froid. Elle confirme ainsi la nécessité de restructurer l’offre de l’Education nationale. Encadré 2 : Déséquilibre entre les besoins du secteur productif et la structure du système éducatif gabonais: le cas des projets d’OLAM au Gabon Dans le cadre d’un partenariat stratégique avec l’État gabonais, le Groupe singapourien OLAM a lancé un programme d’investissement de 2,7 milliards US, pour développer 5 grands projets au Gabon sur la période 2011-2022. Les 5 projets sont : (i) la construction d’une grande usine d’engrais à Port-Gentil, (ii) le développement à Bitam, dans le nord du Gabon, d’une plantation d’hévéas sur 28.000 ha ;(iii) un projet intégré d’exploitation forestière sur 860.000 ha (1,15 M ha à terme) et de transformation de bois, (iv) le développement à Kango et Mouila d’une plantation de palmiers à huile de 100.000 ha et (v) le développement à Nkok, à 25 km de Libreville, d’une Zone Economique Spéciale multisectorielle sur 1.125 ha, en grande partie dédiée à la transformation du bois (40% des entreprises). OLAM Gabon a effectué une évaluation de la force de travail nécessaire au développement de ces projets qui a conclu à un besoin de 14.651 emplois dont près de 2.000 emplois qualifiés (niveau BAC +) durant la période 2012-2016. L’analyse de la structure de cette demande qualifiée illustre le décalage entre les besoins du secteur productif et l’offre du système éducatif gabonais. La structure des besoins d’OLAM (graphique 29) montre que 41% de sa demande de main-d’œuvre concernent les métiers spécifiques à l’agro-industrie (chimiste, contrôleurs des procédés, ingénieur HSE) et 27% les qualifications en maintenance industrielle. 8% des besoins sont liés aux métiers de la logistique. Les besoins en métiers de l’administration (ressources humaines, sciences sociales, nursing, médecine, marketing…) et la finance représentent quant à eux respectivement 18% et 7%. En comparant la structure de la demande d’OLAM à l’offre d’éducation dans l’enseignement supérieur (graphique 29), l’on observe qu’elle devra recourir à la main-d’œuvre étrangère pour une grande partie de ses besoins, notamment ceux relatifs aux métiers de l’agro-industrie, de la maintenance industrielle et de la logistique. L’offre d’éducation est en effet composée de 63% d’étudiants inscrits en séries littéraire, sciences humaines et sciences économiques. Les 2% d’étudiants inscrits en agronomie et eaux et forêts concernent en grande partie les étudiants de l’école nationale des eaux et forêts qui sont 69 prioritairement destinés à l’Administration. Graphique 28 : Structure de la demande de main-d’oeuvre qualifiée des projets d’OLAM Gabon, 2012-2016 (en pourcentage de la demande totale) Source : Calculs des auteurs à partir des données de la compagnie OLAM Gabon Graphique 29 : Structure de l’offre d’éducation dans l’enregistrement supérieur, 2011 (en pourcentage des effectifs totaux) Source : Ministère de l’Education Nationale 6. L’inadéquation entre l’offre d’éducation et les besoins du secteur productif résultent de plusieurs facteurs, parmi lesquels  : (i) une faible efficacité interne du système d’enseignement général de base ; (ii) une faible couverture scolaire et un rendement externe bas de l’enseignement technique et professionnel et ; (iii) des allocations budgétaires limitées et inefficaces en faveur du secteur de l’éducation. Ces facteurs sont examinés ci-dessous. Une faible efficacité interne du système d’enseignement général de base Graphique 30 : Taux de redoublement primaire au Gabon et dans le monde, 2008 (en pourcentage du total des effectifs du cycle primaire) 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Source : Rapport PASEC Gabon 7. Le taux de redoublement très élevé à tous les niveaux d’enseignement est la manifestation la plus flagrante du faible rendement interne du système éducatif gabonais. Dans l’enseignement primaire, le taux de redoublement est le plus élevé de tous les pays du monde pour lesquels cette statistique est connue. Il a atteint 37% en 2008 (dernières statistiques connues), soit deux fois la moyenne africaine. En outre, 70 moins de 5% des élèves admis en première année terminent le cycle primaire sans avoir redoublé. Le taux de redoublement au cycle primaire est amplifié par l’existence d’un concours d’entrée en première année du secondaire qui ne se justifie que par l’absence de places disponibles suffisantes. A la suite de la tenue des états généraux de l’éducation, de la recherche et de l’adéquation formation-emploi organisés en mai 2010, le gouvernement a décidé la suppression du concours d’entrée en 6ème qui sera remplacé à partir de la rentrée 2013 par une moyenne pondérée des résultats obtenus au CEPE (Certificat d’Etudes Primaires Elémentaires) et les notes de la 5éme année. Graphique 31 : Ratio nombre d’élèves par enseignant, par niveau d’enseignement, Gabon et pays à revenu intermédiaire, 2008 (nombre d’élèves pour un enseignant) Source : Rapport d’état du système éducatif gabonais, AFD, Avril 2012 8. Dans l’enseignement secondaire, le taux de redoublement est de 265 au premier cycle et de 23% au second. Il est encore plus élevé en fin de cycle, où il atteint 30% à la fin de la 3ème année du premier cycle et 255 à la fin de la dernière année du second cycle (Terminale). Le taux de redoublement élevé explique en grande partie le faible taux de transition vers le supérieur. En moyenne, l’on estime à 17 années- élèves le temps nécessaire pour obtenir le premier diplôme du cycle secondaire (le BEPC) que l’on devrait obtenir au bout de 12 années d’études. 9. Un taux de redoublement aussi élevé, qui révèle une gestion inefficace des flux d’élèves, est le résultat de plusieurs facteurs dont la faible performance en matière d’encadrement (quantitatif et qualitatif) des élèves, la faiblesse des allocations budgétaires et une allocation intersectorielle aux dépens des cycles primaire et secondaire premier cycle et des enseignants. 10. La faible performance en matière d’encadrement quantitatif des élèves est perceptible à travers deux indicateurs  : le ratio enseignant/élève et l’indisponibilité de matériel pédagogique. Le ratio élève/enseignant au Gabon est très élevé, comparativement aux pays à niveaux de revenus similaires (graphique 32 ci-dessous). Dans le primaire, il est de 45,6 alors que la moyenne pour des pays à revenu similaire que le Gabon est de 21. Il est encore plus élevé au collège (secondaire premier cycle) où il se situe à 48,3 au Gabon alors que pour le groupe de référence il est de 20. Un ratio élève/enseignant très élevé traduit des conditions d’enseignement et d’apprentissage difficiles qui ont naturellement un impact négatif sur la qualité des enseignements. Graphique 32 : Disponibilité de matériel et équipement pédagogiques dans les salles de classes au primaire, 2008 (en pourcentage du nombre total de classes) 71 Source: Rapport PASEC Gabon, 2008 11. En outre, une forte proportion d’enseignants des lycées et collèges (62,6%) ne dispose pas du bagage pédagogique nécessaire. Peu de stages de formation continue sont en effet organisés du fait du nombre marginal de personnel d’encadrement (inspecteurs et conseillers pédagogiques). Globalement, la faiblesse de l’encadrement qualitatif est liée à la gestion inefficace du personnel qui se traduit par l’absentéisme non sanctionné et les postes de travail abandonnés. 12. Le graphique 33 ci-dessous montre que les élèves du primaire sont scolarisés dans un contexte d’indisponibilité de matériels et d’équipements scolaires. Seulement 1% des classes de 2ème année et 5% de ceux de 5ème année disposent de la totalité des équipements et matériels. La moitié des salles de classes n’a pas de bureaux et chaises en nombre suffisant et seulement un quart des classes dispose de dictionnaires. De même, seulement la moitié des élèves du primaire dispose d’un manuel scolaire pour travailler en classe. L’autre moitié partage leur manuel avec au moins deux autres élèves. Une faible couverture scolaire et un faible rendement externe de l’enseignement technique et professionnel 13. Le Gabon a accompli des progrès considérables en matière d’accès à l’éducation dans l’enseignement général de base mais l’accès à l’enseignement technique et professionnel est très limité. Avec des taux bruts de scolarisation dans le primaire et secondaire estimés respectivement à 147,3% et 88,8%, le Gabon a quasiment atteint l’objectif d’accès universel à l’éducation de base. L’on observe cependant une faible couverture en matière de formation professionnelle. Le ratio nombre d’élèves inscrits dans un établissement technique et professionnel pour 100.000 habitants, estimé à 377 est à peine au-dessus de la moyenne africaine (364) et plus de trois fois moins élevé qu’au Cameroun et en Tunisie et une fois et demi moins élevé qu’à Maurice. Les effectifs de l’enseignement technique et professionnel représentent à peine 8% des effectifs totaux du système éducatif gabonais. Un faible accès à la formation professionnelle et technique réduit les opportunités d’accès au marché du 72 travail, principalement dans le secteur productif. Il existe au total, 16 établissements d’enseignement technique et professionnel, 11 centres de formation professionnelle qui sont réputés être sous-équipés. Graphique 33 : Couverture scolaire dans l’enseignement technique et professionnel au Gabon et dans d’autres pays (nombre d’élèves dans l’ETP pour 100.000 habitants) Source: Rapport d’état du système éducatif, AFD et Banque Mondiale 14. Le rendement externe du système de formation professionnelle est très faible. Plus de 80% des diplômés de l’enseignement technique et professionnel ne sont pas recrutés dans les secteurs pour lesquels ils ont été formés et seulement un diplômé sur 3 trouve un emploi. Dans l’ensemble, l’offre de formation actuelle est en inadéquation avec les besoins des entreprises et ne permet pas aux jeunes Gabonais de trouver des solutions d’insertion, notamment pour les raisons suivantes : (i) inadéquation des formations existantes avec les qualifications demandées par les entreprises, (ii) déficit d’apprentissage des pratiques professionnelles au profit de formations trop théoriques, (iii) moyens matériels insuffisants dans les centres de formation, notamment en termes de matière d’œuvre, (iv) équipements non conformes avec les réalités de terrain, (v) déficit de compétence des formateurs. 15. Les formations professionnelles dans l’enseignement supérieur sont également insuffisantes. Le parcours dans les facultés est conçu comme un tronc commun jusqu’à la fin de la licence 2. C’est à partir de la licence 3 que l’on observe un début de spécialisation avec la possibilité qui est offerte de préparer des licences professionnelles. 74% des étudiants inscrits au supérieur suivent des formations en sciences humaines ou sociales et seulement 25% des études scientifiques et techniques. En 4ème année, les étudiants scientifiques ne représentent que 12% des inscrits. De même, les étudiants de 1er cycle (1ère et 2ème année) représentent 67% des effectifs et ceux de 2ème cycle (3ème et 4ème année) 25% des effectifs. Enfin, l’on peut constater qu’en 1ère année, les formations technologiques courtes (3 ans) ne rassemblent que 8,7% des effectifs, ce qui est insuffisant pour les besoins de l’économie. La forte proportion d’étudiants dans les formations générales limite les opportunités d’emploi dans le secteur public. Ils montrent également que les disciplines scientifiques et techniques 73 ne sont pas suffisamment prises en compte dans le cycle secondaire. 16. La formation continue est très peu développée dans l’enseignement supérieur gabonais. Les formations continues sont dispensées seulement dans deux instituts, l’Institut National de Sciences de Gestion (pour les trois BTS) et à l’IST où le DUT technique de commercialisation peut être préparé soit en cours du soir soit en alternance. Par ailleurs, il n’existe pas de licence et de maîtrise en sciences, en dehors des mathématiques, ce qui explique en grande partie l’insuffisance d’enseignants en sciences pour l’enseignement de base. En outre, les formations accessibles aux salariés (sous forme de formation continue ou de perfectionnement professionnel) ou aux demandeurs d’emploi en quête d’une formation de base sont insuffisantes. Des allocations budgétaires insuffisantes et inefficaces au secteur de l’éducation 17. La part du budget allouée à l’éducation qui représente 13,4% des dépenses totales, soit 2.7% du PIB en 2009, est en dessous de la moyenne d’un ensemble représentatif de pays d’Afrique subsaharienne et de pays à revenu intermédiaire, présenté dans le tableau 9 ci-dessous, dont la part du budget de l’éducation est en moyenne 19% du budget, soit près de 5% du PIB. Tableau 9 : Dépenses publiques d’éducation, Gabon et pays comparateurs, 1989 (en pourcentage du PIB) Dépenses Dépenses Dépenses Dépenses publiques publiques publiques publiques d’éducation en d’éducation en Pays d’éducation en Pays d’éducation en pourcentage pourcentage pourcentage du pourcentage des dépenses de des dépenses de PIB du PIB l’Etat l’Etat Afrique du Gabon 13,4 2,7 17,9 5,7 Sud Mauritanie 11,1 4,0 Sénégal 18,9 3,7 Algérie 11,4 5,3 Thaïlande 19,1 4,2 Pérou 13,7 2,7 Syrie 19,5 3,9 Nicaragua 15,0 3,1 Tunisie 20,8 7,3 Yémen 15,2 5,8 Jordanie 20,9 4,6 Côte Ethiopie 15,9 3,0 24,5 4,2 d’Ivoire Cameroun 15,9 3,1 Malaisie 25,2 6,3 Egypte 16,0 4,8 Ghana 25,3 5,4 Maurice 16,5 3,3 Maroc 27,2 6,8 Moyenne des pays comparateurs 18,88 4,73 Source : Banque mondiale 74 18. La structure des allocations du secteur éducation révèle une forte proportion des dépenses allouées au supérieur et au secondaire aux dépens du pré-primaire et de l’enseignement professionnel d’une part et d’autre part des enveloppes limitées pour les dépenses de biens et services au profit des salaires du personnel. 19. L’enseignement supérieur et le second cycle absorbent près de 40% du budget de l’éducation contre 6% pour la formation professionnelle et 4% pour le pré-primaire. De même, la structure de la dépense par nature révèle que 72% du budget est affecté aux salaires du personnel contre 16% aux biens et services et 12% aux aides sociales. 20. A l’intérieur des dépenses de fonctionnement, les dépenses de salaires des personnels non enseignants représentent presqu’autant que ceux des enseignants. Ce qui signifie soit qu’il y a plus de personnel administratif que d’enseignants, soit les salaires du personnel non enseignant sont en moyenne plus élevés que ceux des enseignants. Dans les deux cas, ce déséquilibre constitue une incitation négative pour la fonction enseignante. Un audit organisationnel du ministère de l’éducation et/ou une enquête de suivi des dépenses dans le secteur pourrait fournir des éléments pertinents pour améliorer l’efficacité allocative des dépenses publiques d’éducation. La distribution du budget du secteur de l’éducation montre qu’autant il faudrait envisager une augmentation des crédits qui lui sont alloués, autant il est nécessaire de travailler sur une réallocation intra-sectorielle des ressources du secteur. Graphique 34 : Distribution des dépenses publiques d’éducation par niveaux d’études et par nature, 1988 (en pourcentage des dépenses publiques totales) Dépenses publiques d'éducation par Dépenses publiques d'éducation par nature niveaux d'études Préscolaire Dépenses 4% sociales 12% Supérieur Biens & 21% services 16% Enseignants Primaire EFTP 32% 39% 6% Lycée Non 18% enseignants Collège 33% 19% Source : Rapport d’état du système éducatif, AFD La réforme en cours du système éducatif  21. Le gouvernement a entamé une réforme du système éducatif et de recherche en 2010 qui a abouti à l’adoption d’une loi d’orientation générale de l’éducation, de la formation et de la recherche. Celle-ci jette les bases d’une nouvelle école gabonaise. La loi s’appuie sur les conclusions pertinentes des « Etats Généraux de l’Education, de la Recherche et l’Adéquation Formation-Emploi » de mai 2010. 75 Elle prévoit un nouveau système éducatif qui comporte plusieurs innovations,  parmi lesquelles : (i)  le développement de la formation continue et des passerelles à tous les niveaux entre l’enseignement général (du primaire au supérieur) et l’enseignement technique et la formation professionnelle ; (ii)  l’instauration de la promotion des partenariats public-privé (PPP) en matière d’enseignement, de formation et de recherche; (iii)  la création d’un Conseil national de l’Education, de la Formation et de la Recherche, le CNEFOR (article 12), chargé de l’évaluation de la mise en œuvre des offres de formation et des projets d’infrastructure et d’équipement. Il se réunit une fois par an sous la présidence du Chef de l’Etat. Il est à noter que le secteur privé n’est pas membre du CNEFOR, ce qui pourrait constituer une limite quant à la définition des offres de formation. 22. Sur le terrain, un début de mutations est à noter dans l’enseignement technique et professionnel. Depuis 2010, tous les lycées professionnels ont été progressivement transformés en lycées techniques. Ces changements sont soutenus par la Banque Africaine de Développement qui finance l’acquisition des équipements et du matériel didactique. Il reste cependant à résoudre l’épineuse et récurrente question du corps professoral spécialisé. 23. En prélude aux PPP prévus dans la loi d’orientation, la coopération entre le ministère de l’enseignement technique et les sociétés pétrolières a abouti à la création de l’Institut du Pétrole et du Gaz (IPG) qui assure une formation de pointe dans les métiers du pétrole (encadré 3). La première promotion sortie de l’IPG a été formée dans le domaine de la production. L’institut compte étendre son champ d’intervention aux autres métiers du pétrole et du gaz. 24. Le partenariat entre l’Etat et le secteur public privé a aussi permis la création à Port-Gentil d’un centre de spécialisation avec le concours de la société Total Gabon. Le centre recrute des candidats titulaires d’un baccalauréat technologique, d’un BEP ou d’un BT qu’il forme dans la soudure ou la maintenance des équipements utilisés dans le domaine pétrolier. Un autre exemple est le partenariat entre la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog), le ministère de l’éducation nationale et l’office national de l’emploi pour la formation de 500 jeunes en vue de satisfaire les besoins en ressources humaines nécessaires au fonctionnement des deux usines de manganèse métal et de silico-manganèse du complexe métallurgique de Moanda (C2M) qui seront livrées en juin 2013. 25. A la demande de la Comilog, l’ONE a organisé la sélection de 400 jeunes qui ont été formés conformément aux besoins du demandeur (en chimie, en électricité et en mécanique industrielles) pendant 15 mois au centre de formation et de perfectionnement professionnel de Franceville. A l’issue de cette formation théorique, ils ont été admis en stage de trois mois en entreprise. 300 d’entre eux seront recrutés au 76 Complexe industriel de Moanda. Le reste pourra être recruté par les autres entreprises de la région. De telles initiatives permettent une meilleure insertion des étudiants dans l’entreprise qui a pris une part active à leur formation. OLAM Gabon a également un projet analogue qui est en cours d’étude sur une échelle plus grande pour les secteurs agroalimentaire et de la transformation du bois. 26. Il faudrait aller plus loin en généralisant la formation en alternance et l’apprentissage, comme en Allemagne. L’idée principale de la réorganisation de la formation professionnelle et de la formation continue consisterait alors à revenir aux fondamentaux en redonnant aux formations dispensées dans les centres de formation professionnelle leur sens initial. Ainsi, qu’il s’agisse de la formation et du perfectionnement professionnel ou de la formation continue, les centres dispenseraient des formations à la carte, en fonction des besoins réellement exprimés par les entreprises. Les formations à la carte permettent de tenir compte de l’évolution des emplois. Elles obligeraient à instaurer un cadre permanent de concertation et d’échanges entre les centres de formation et les entreprises. Une telle démarche nécessiterait un éventail suffisamment large des spécialisations des formateurs pour permettre ces adaptations. 27. Dans le même ordre d’idées, les formations continues dispensées dans les établissements d’enseignement supérieur publics (Institut National des Sciences de Gestion, Institut Supérieur de Technologie ou Institut Universitaire des Sciences de l’Organisation) ou privés, seraient réformées dans la même logique. Leur accès, comme dans la situation actuelle, ne serait plus ouvert uniquement aux nouveaux bacheliers mais aussi aux salariés ou aux demandeurs d’emploi en quête de perfectionnement professionnel ou d’une formation professionnelle de base définie, dans un cas comme dans l’autre, en fonction des besoins réellement exprimés par les entreprises. Une telle construction oblige également d’établir un cadre de relation et de concertation entre les ministères concernés (travail et emploi/enseignement supérieur/enseignement technique), les entreprises et les représentants des salariés ou des demandeurs d’emploi. 28. Les équipes du Ministre de l’Education nationale en charge de l’Enseignement Technique et de la Formation réfléchissent sur la capitalisation de toutes ces expériences. Toutefois, il est nécessaire de leur apporter de l’assistance technique en matière d’engineering pour la « modélisation » de tous ces cas afin de les intégrer dans le nouveau système éducatif et l’opérationnaliser. Encadré 3 : Un exemple de partenariat public privé en matière d’éducation : L’institut du Pétrole et du Gaz (IPG) Dans le cadre de la mise en œuvre du PSGE, le gouvernement gabonais, en partenariat avec des compagnies pétrolières exerçant au Gabon (Total Gabon, Addax Petroleum, ENI, Perenco et Shell Gabon) et l’assistance de l’Institut français du pétrole (IFP), a créé, en 2010, l’Institut du pétrole et du gaz basé à Port-Gentil. Son objectif est de développer une compétence locale dans le secteur pétrolier. Doté d’un budget de 12 millions de dollars, l’IPG peut accueillir jusqu’à 60 élèves par an. Il dispense deux types de formations : - la formation initiale : elle s’étend sur une durée de 12 mois et est destiné aux titulaires de diplômes de techniciens et d’ingénieurs à l’issue de leur formation dans les établissements d’enseignement requis (IUT, universités et/ou grandes écoles…). Pour y être éligible, chaque candidat doit être de nationalité gabonaise, âgé de 25 ans, avoir un niveau Terminale scientifique ou pro-technique (type instrumentation, électricité, électromécanique, mécanique, etc.) et être admis aux tests psychotechniques et entretiens individuels. - la formation continue : organisée en stages de courte durée avec des modules de 5-10 jours 77 en formations professionnalisantes (géosciences pétrolières, ingénieurs réservoir, ingénieurs d’exploitation) et de management (contrats internationaux, économie pétrolière, économie des projets, trading, comptabilité pétrolière, environnement/sécurité opérationnelle, HSE). Elles s’adressent aux techniciens et cadres de l’industrie ou des organismes publics souhaitant parfaire leur formation. L’IPG s’appuie sur les meilleurs spécialistes des filières professionnelles de l’industrie pétrolière et gazière internationale et les instituts nationaux de formation technique, scientifique et commerciale. Les cours sont dispensés par des spécialistes provenant des grands organismes de formation spécialisée, universités, grandes écoles, entreprises de l’industrie pétrolière et gazière, service public, ayant signé une convention avec l’IPG. Il est dirigé par deux organes : le Conseil d’administration et un Comité académique. Le Comité académique assume les missions de conseil scientifique et pédagogique. Le Conseil d’administration est l’organe de décision de l’Institut. Il délibère sur toute matière se rapportant à l’objet de l’Institut. Les deux organes comprennent des représentants de l’Etat et de l’industrie pétrolière. Source : Ministère du pétrole, de l’énergie et des ressources hydrauliques 29. La réorganisation du système de formation professionnelle nécessitera la sécurisation de son financement. La taxe professionnelle fixée à 1,2% de la masse salariale des entreprises par la loi de finances de 2000 n’est pas prélevée, officiellement parce que les modalités de versement et le mode opératoire de sa gestion ne sont pas encore définis. En réalité, les entreprises résistent à payer cette taxe car certaines d’entre elles financent déjà la création de centres de formation personnalisée pour les besoins spécifiques de leurs employés. C’est le cas de BGFI School qui a été créée par la holding BGFI. La réticence des entreprises s’explique également par le rendement faible des établissements publics de formation professionnelle. Une option pour surmonter cette difficulté pourrait être la mise en place d’un fonds pour la formation professionnelle, qui serait alimenté par la taxe professionnelle, les financements des bailleurs de fonds et d’autres financements de l’Etat ; et dont la gestion serait assurée à parité par le gouvernement et le secteur privé. Ce fonds pourrait résulter de la transformation de l’actuel Fonds d’insertion et de réinsertion professionnelle -FIR- (voir chapitre suivant) dont les missions seraient élargies pour y intégrer celles évoquées ci-dessus. Du côté de la demande : un climat d’investissement contraignant 30. En dépit de l’amélioration du cadre macroéconomique et la mise en œuvre de plusieurs réformes structurelles ces dernières années, le climat d’investissement demeure contraignant au Gabon. Le pays est classé 170éme sur 183 pays dans le rapport Doing Business 2013 du Groupe de la Banque mondiale sur la facilité à faire des affaires et fait donc partie des 23 économies du monde où le climat des affaires est le plus difficile. Dans 6 domaines, le Gabon fait partie du dernier quart (protection des investisseurs, création d’entreprises, exécution des contrats, transferts de propriété, gestion de l’insolvabilité, paiement des taxes et impôts). Pour tous les autres, il se 78 place dans la dernière moitié  Graphique 35 : Classement du Gabon dans le rapport Doing Business 2013 (rang par indicateur sur 189 pays) Source : Rapport Doing Business 2013, Banque mondiale 31. L’enquête de la Banque mondiale sur le climat d’investissement réalisée en 2009 auprès d’un échantillon de l’appareil productif gabonais a permis de révéler que pour l’ensemble des entreprises (graphique 36 ci-dessous), l’électricité est de loin le principal obstacle auquel sont confrontées les entreprises, suivie par le transport et la qualité de la main-d’œuvre. Pour les petites et moyennes entreprises, l’accès au crédit est le deuxième obstacle après l’électricité. A ces quatre principaux obstacles, l’on peut ajouter l’absence d’un dispositif institutionnel efficace d’appui au secteur privé. Ces contraintes, à l’exception de la qualité de la main-d’œuvre qui a été abordée dans la section précédente, sont examinées ci-après. Graphique 36 : Principaux obstacles au développement du secteur privé, 2009 (en pourcentage des entreprises sondées) Source : Enquête auprès des entreprises sur le climat d’investissement: Gabon -2009 Un dispositif d’appui au développement du secteur privé inefficace 32. Comme la plupart des économies subsahariennes, le tissu économique gabonais est constitué essentiellement de très petites entreprises et moyennes entreprises. L’essentiel des créations d’emplois est réalisé par ces structures dont certaines sont dans ou à la périphérie de l’informel. Du fait de leurs faibles capacités (en ressources humaines et financières), elles sont démunies devant un cadre institutionnel fragmenté. Une assistance particulière devrait donc leur être accordée. 79 33. Dès 1980, le Gabon a adopté une Loi de promotion et de développement des PME. Les objectifs de cette loi étaient de (i) créer une classe d’hommes d’affaires gabonais, (ii) augmenter la part des PME dans le PIB, et (iii) freiner l’exode rural, en créant dans le zones rurales, des activités génératrices de revenus. Les dispositifs légaux et institutionnels prévoyaient un ensemble d’incitations, dont le bénéfice de la priorité d’accès aux marchés publics et des avantages fiscaux et douaniers après l’obtention d’un agrément octroyé par une commission dirigée par le Ministre des PME. Afin de mettre en œuvre cette politique, le gouvernement a mis en place deux institutions : (i) Promo Gabon, établissement public créé en 1972 et placé sous la tutelle du Ministère des Petites et Moyennes Entreprises, dont les missions sont d’assister les promoteurs d’entreprises dans le montage des projets, les études de faisabilité, l’élaboration des plans de financement et des business plan, et (ii) le Fonds d’Aide et de Garantie Gabonais (FAGA), créé en 1981, dont la mission étaient d’accorder aux promoteurs agréés au régime des PME/PMI des avances ou des garanties auprès des banques. 34. Ce dispositif a été complété en 1993 par le Fonds de Développement et d’Expansion (FODEX), dont la mission était le financement des études de faisabilité de projets, des prêts participatifs aux fonds propres nécessaires au lancement des projets et des garanties. Le FAGA et le Fodex ont été supprimés en 2010 pour n’avoir pas atteint leurs objectifs respectifs. Leurs ressources ont été transférées à la Banque Gabonaise de Développement (BGD) dont les missions ont été recentrées sur le financement des PME/PMI. L’action de la BGD en faveur des PME reste cependant contrainte par le fait qu’elle est soumise aux mêmes règles prudentielles que les banques commerciales. Ce qui en fait une entité très averse au risque et, par conséquent, inadaptée au financement de la petite et moyenne entreprise. 35. Les états généraux des PME, organisés en 2011, ont fait le constat de l’échec de la politique en matière de promotion de la PME au Gabon. Les raisons diffèrent selon l’interlocuteur. Les autorités reprochent aux promoteurs des PME leur manque de rigueur et de sérieux dans la gestion des affaires, la faible surface financière des entreprises, la non-exécution de tous ou partie des marchés obtenus et les détournements des fonds de l’objet à financer. Les PME, quant à elles, dénoncent l’insuffisance d’incitations et de soutien de l’Etat. Dans tous les cas, un tel échec est révélateur de deux choses, l’absence d’esprit d’entreprise et de compétence managériale des promoteurs des PME et l’inefficacité du dispositif institutionnel d’appui à la PME et à entrepreneuriat. 36. Le dispositif d’assistance aux petites et moyennes entreprises et de promotion du secteur privé a été réformé en 2010, mais il demeure fragmenté et inefficace et manque d’orientation stratégique. Outre Promo Gabon, dont les misions ont été présentées ci-dessus, le cadre actuel est composé de trois acteurs majeurs : 37. Le Centre de développement des entreprises (CDE). Le décret portant création du CDE dispose qu’il est un établissement public à caractère administratif doté de la personnalité juridique dont les missions sont, entre autres : (i) la facilitation 80 dans l’accomplissement des formalités administratives nécessaires à la création des entreprises, à leur exercice, à la modification de leur statut juridique, à l’extension ou la cessation de leurs activités par la mise en place d’un guichet unique ; (ii) l’appui et l’accompagnement des promoteurs dans la réalisation de leurs projets ou de leurs activités éligibles à la charte des investisseurs et aux codes spécifiques  ; et (iii) le suivi des activités des entreprises. Conformément à sa première mission, le CDE abrite le guichet unique des formalités administratives qui délivre divers agréments et immatriculations, principalement aux petits opérateurs économiques. 38. Il est également prévu, au sein du CDE, l’ouverture d’un guichet unique d’aide à l’investissement, qui regroupera les services des douanes pour l’analyse des demandes des exonérations, les services de l’immigration pour l’établissement des cartes de séjour pour les travailleurs étrangers, l’inspection du travail pour examiner les contrats du travail, la caisse nationale de sécurité sociale, ainsi que les compagnies Gabon Telecom pour l’accès à l’Internet et la Société d’Energie et d’Eau du Gabon (SEEG) pour l’accès à l’électricité et l’eau. 39. En dépit des efforts réalisés, le CDE n’a pas encore atteint l’objectif fixé par le gouvernement : celui de créer une entreprise en 48 heures. Le manque d’informatisation et le fait que toutes les administrations qui doivent y être présentes n’y siègent pas encore constituent les principales raisons de ce retard. 40. La Chambre de Commerce, d’Agriculture, d’Industrie et des Mines du Gabon est identifiée comme un pôle possible pour abriter une partie des services de conseil aux entreprises. En effet, un décret présidentiel de janvier 2011 a réorganisé la structuration et le fonctionnement de la Chambre de Commerce. Elle est désormais dirigée par une équipe élue par le secteur privé, et non nommée par le gouvernement. Elle contribue à la mise en œuvre de la politique du gouvernement en matière de promotion des investissements privés, en plus d’être un organisme représentatif et consultatif des intérêts de l’ensemble des opérateurs économiques exerçant légalement sur le territoire national. Avec l’appui de la Banque mondiale, le gouvernement prévoit d’y développer l’appui au secteur privé à travers le développement des services clés suivants : (i) un centre d’arbitrage, de médiation et de conciliation pour limiter les recours aux juridictions (processus long, coûteux, non prévisible) ; (ii) un centre d’affaires ; (iii) un centre de formation et (iv) le centre de gestion agréé pour aider les PME dans la gestion. 41. L’Agence de Promotion des Investissements et des Exportations (APIEX) est une transformation de l’Agence de Promotion des Exportations (APEX). Elle n’avait pas encore au moment de la rédaction du rapport d’existence légale, mais s’était vu octroyer par le gouvernement les missions suivantes : (i) accompagner le développement continu et durable des investissements et des exportations gabonaises, en favorisant la diversification économique ; (ii) conseiller les opérateurs économiques locaux et étrangers et les encourager à investir dans l’économie gabonaise ; (iii) promouvoir et permettre aux entreprises gabonaises de mieux s’insérer dans le commerce international ; (iv) promouvoir l’origine Gabon ; et (v) concevoir et proposer 81 les réformes nécessaires à l’amélioration du climat des affaires, en vue de favoriser l’investissement direct étranger et dynamiser le secteur privé national. 42. Comme l’on peut le relever, il y a nécessité à clarifier les rôles et responsabilités de ces trois institutions qui ont toutes les mandats de promotion des investissements et d’assistance au secteur privé. Un coût élevé et une faible qualité de l’énergie 43. Le coût élevé et la faible qualité de l’énergie freinent la croissance économique et entravent la création d’emplois. Selon l’enquête de la Banque mondiale sur le climat de l’investissement réalisé en 2009, deux tiers des entreprises opérant au Gabon considèrent que l’électricité est une contrainte majeure au développement des affaires. Plus du quart des petites entreprises (moins de 20 employés) et près de 30% des moyennes entreprises (entre 20 et 99 employés) considèrent que l’électricité est le premier frein à l’exercice de leur activité. 44. D’une façon générale, les entreprises se plaignent de payer l’électricité la plus chère de la sous-région. Une étude comparative des tarifs d’électricité réalisée en décembre 2009 par l’union des producteurs, transporteurs, et distributeurs d’électricité d’Afrique (UPDEA) a démontré que les tarifs d’électricité à usage commercial sont plus élevés au Gabon que dans les pays de la région. A titre d’exemple, le prix du KWh à usage commercial pour une entreprise consommant plus de 1800 kW par mois est de 2,7 fois plus cher au Gabon qu’en République du Congo, 1,2 fois plus cher qu’au Cameroun, 1,4 fois plus cher qu’à Maurice, une des meilleures économies en matière de climat d’investissement du continent. Le Rapport Doing Business 2013 confirme ces difficultés du secteur puisque pour l’indicateur «  obtention de l’électricité  » ou raccordement électrique le Gabon est classé 133ème sur 183 pays.  En effet, pour obtenir un raccordement, il faut accomplir 6 procédures, attendre en moyenne 160 jours, et payer des frais équivalents à plus de 2,5 fois le revenu par habitant du Gabon. 45. Le coût élevé de l’électricité au Gabon résulte principalement de l’option thermique qui représente plus de 53% des capacités installées. L’opérateur électrique national, la SEEG a choisi cette option plus facile à réaliser (au détriment du gaz ou de l’hydroélectricité, moins chers) pour satisfaire une demande rapide de 5,5% par an. Cela a augmenté le coût moyen de l’électricité et rend difficile la viabilité financière du secteur. En outre, la forte différence entre la capacité de puissance installée, 349 MW, et le niveau de consommation, 1752 GWH, en 2010, laisse supposer une sous- utilisation des capacités installées et/ou des pertes considérables d’énergie dans le transport et la distribution. Dans les deux cas, le consommateur supporte des coûts liés à l’inefficience de la gestion du réseau électrique. 46. La qualité des services d’électricité s’est fortement dégradée au cours des huit dernières années. L’audit comptable, tarifaire, financier et technique de la convention de concession avec la SEEG réalisé en 2011 par le cabinet d’audit Deloitte, pour le compte du gouvernement gabonais, a révélé que, sur le réseau interconnecté de Libreville, les durées de coupures ont en moyenne été multipliées par 3 entre 2003 82 et 2010. Les entreprises enregistrent en moyenne 5,5 coupures d’électricité par mois et une coupure dure en moyenne 5,3 heures par jour. Le coût de ces coupures pour les entreprises représente en moyenne 2% du chiffre d’affaires mensuel. L’audit de la SEEG a également révélé que le niveau de tension électrique distribuée aux abonnés n’est pas partout conforme aux cahiers des charges de la SEEG et, qu’entre 2002 et 2008, le rendement du réseau électrique a baissé en moyenne de 4% sur Libreville et Port‐Gentil, les deux principales villes et pôles économiques du pays. 47. La dégradation de la qualité des services d’électricité résulte en grande partie de l’insuffisance d’investissements de renouvellement et d’extension des équipements de production et de transport, dont une partie significative est vétuste et saturée. Selon le contrat de concession signé avec le gouvernement, la Société d’Energie et d’Eau du Gabon devrait investir au moins 200 millions de dollars US dans le renouvellement des équipements tout au long de la période de concession (1997-2017). La faible capacité électrique retarde ou rend impossible la réalisation de grands projets industriels et structurants pour le Gabon. 48. Afin de faire face au déficit énergétique et créer les conditions de l’industrialisation du pays, le gouvernement a établi un plan de développement des infrastructures énergétiques 2011-2020, dont l’objectif principal est de porter la capacité nationale de production électrique à 1.200 MW en 2020 comparée à 374 MW actuellement. En 2013, la capacité nationale de production électrique devrait dépasser à 400 MW après la mise en exploitation du barrage hydroélectrique de Poubara (160 MW) dans la province du Haut Ogooué. Ce barrage alimentera principalement le complexe sidérurgique et métallurgique de Moanda de la Comilog. D’autres projets sont prévus à moyen terme. Il s’agit de la construction d’une centrale hydroélectrique de 36 MW à FE2, sur la rivière Okano, au sud-est de Mitzic, dans la province du Woleu-Ntem, la réalisation du barrage et d’une centrale de 42 MW à partir des chutes de l’impératrice Eugénie sur le fleuve Ngounié, près de Fougamou et la construction d’une centrale hydroélectrique (400 KW) à Iboundji dans le sud du pays. Tableau 10 : Tarifs d’électricité pratiqués au Gabon et en Afrique, 2009 (en cents de dollars US)   Usage commercial Semi-industrie Moyenne triphasé et force motrice Tension (E=1800kW/mois) (E=2500kWh)/mois)   12kW 15kW 20kW 25kW 250kW Maroc 11,52 12,76 12,62 13,44 12,27 Tunisie 12,44 12,48 12,53 12,58 8,7 Ghana 14,61 14,61 13,22 13,22 14,06 Sénégal 23,53 24,91 24,63 25,31 20,09 Rwanda 13,99 13,99 13,99 13,99 13,99 Cameroun (2009) 14,94 15,7 14,09 15 13,17 Tchad (2009) 26,75 26,75 23,26 23,26 19,33 Congo, Rep. 6,40 6,40 5,64 5,64 7,60 (2009) Gabon (2009) 17,20 17,60 14,80 15,80 16,20 Mozambique 14,75 14,75 9,28 10,13 8,08 Maurice (2009) 12,45 12,94 8,03 8,53 7,05 Source: UPDEA, étude comparative sur les tarifs d’électricité en Afrique, décembre 2009 83 Une faible qualité des infrastructures et des services de transport et de logistique 49. Doté de faibles liaisons avec les pays voisins, le Gabon cumule les handicaps pour la logistique commerciale, avec des coûts élevés pour tous les types de transports et services connexes. Les résultats des enquêtes menées pour le calcul de l’indice de performance logistique -Logistical Performance Index- du Groupe de la Banque mondiale montrent que, comparativement à leur expérience dans d’autres pays, 40% des entreprises estiment « élevés ou très élevés » les tarifs de transport terrestre, les frais de port, ainsi que les frais d’entreposage et de manutention au Gabon. 60% pensent la même chose pour le transport ferroviaire. Pour les frais d’aéroport, ce pourcentage est de 20%. En outre, 80% à 100% estiment faible ou très faible la qualité des infrastructures de transport : ports, aéroports, routes, chemin de fer, entreposage, manutention, télécommunications. 50. La compétence des opérateurs et la qualité des services d’infrastructures sont jugées très faibles par les opérateurs économiques. Ainsi les infrastructures routières, de chemin de fer, d’entreposage/manutention/distribution, de douane, d’inspection des normes et qualité, des services d’hygiène et de santé ont obtenu la note zéro auprès des entreprises. Seules 40% des entreprises estiment que les infrastructures de transport maritime et aérien sont de qualité élevée ou très élevée, et seulement 20% estiment que les services de douanes, de fret et de transit sont de bonne qualité. 51. Les données quantitatives disponibles sur les infrastructures confirment la perception des entreprises. En effet, le pays dispose d’un réseau routier comparativement peu développé. Sur près de 10.000 km de routes, seuls 1.200 km sont bitumés. Une lacune importante illustre ce problème : il n’y a pas de route reliant Libreville à la capitale économique du pays, Port-Gentil. Les prix très élevés des marchandises dans cette ville sont une autre illustration, puisque l’essentiel du fret est effectué par voie aérienne. 52. D’une façon générale, les coûts d’accès sont élevés dans le pays, renchérissant les prix des biens fabriqués ou consommés. Pour lever cet obstacle majeur à la croissance et à l’emploi, le gouvernement a décidé d’exécuter, de 2012 à 2016, un programme exceptionnel de 3.600 km de routes bitumées. Cela représentera 30% du réseau routier. 215 kilomètres ont d’ores et déjà été bitumés pour un coût de 180 millions de dollars en 2011. Graphique 37 : Pourcentage de routes bitumées, 2009 (en pourcentage du total des routes) Singapour Maurice 84 Gabon Costa Rica Congo, Rep. Botswana 0 20 40 60 80 100 Source : Banque mondiale 53. Le chemin de fer est aujourd’hui loin de fournir la qualité de service et les prix bas qui seraient pourtant possibles pour tous les types de fret. La ligne de 697 kilomètres, reliant Libreville à Franceville, dont l’état actuel nécessite des travaux d’extension et de réhabilitation, est en grande partie dédiée à l’acheminement des produits miniers et forestiers de l’Est vers le Port d’Owendo à Libreville. 54. L’intégration du marché gabonais aux marchés sous-régionaux et mondiaux, par des infrastructures de communication appropriées, pourrait constituer un facteur majeur de compétitivité et d’attrait des investissements privés étrangers. Or, les faibles liaisons avec les pays voisins, limitent sérieusement les possibilités de commerce régional, rendant difficile le développement de projets d’envergure et limitant l’attractivité du pays. 55. Les coûts du transport maritime et les coûts des services portuaires au Gabon sont très élevés. Le rapport Doing Business 2013 mentionne qu’un container de 20 pieds venant d’Europe coûte en moyenne 1.955 dollars soit 1,4 fois plus cher qu’en Guinée équatoriale, un pays qui a la même vocation que le Gabon à être un hub maritime ; et 4,5 fois plus cher qu’en Malaisie et à Singapour. Il s’agit, avec le Botswana, de l’un des pays où les coûts de ce type de services sont les plus élevés au monde. Ces frais n’incluent pas le fret maritime qui, par ailleurs, est très élevé du fait de la faiblesse des volumes traités. Le coût total des frais exposés de l’Europe vers Libreville est estimé à 3.125 dollars pour un container de 20 pieds. Le coût élevé des transports maritimes et des prestations portuaires est principalement dû à la situation monopolistique dans les opérations portuaires et la distribution du fret qui passe par le port. Une plus grande concurrence entre opérateurs portuaires pourrait faire diminuer les prix. 56. La logistique commerciale en général a fait l’objet d’un diagnostic par la Société Financière Internationale (SFI), dans le cadre de l’Accord d’assistance qui la lie au gouvernement du Gabon. Un plan d’action est en cours d’élaboration avec tous les acteurs du secteur. L’orientation politique du gouvernement est la modernisation et l’extension des ports d’Owendo (sud de Libreville) et la construction d’un port multimodal à Port-Gentil et d’un port en eaux profondes à Mayumba qui sera destiné à l’exportation des minerais et des bois transformés Un accès difficile au crédit 85 57. L’accès au crédit bancaire pour le secteur privé reste faible. Le volume de crédits accordés par le système bancaire à toute l’économie gabonaise atteint à peine 10% du PIB et le taux de pénétration bancaire est de 15%. En 2009, seuls 6,3% des entreprises se sont adressées aux banques pour le financement de leurs investissements et environ 93% ont utilisé leurs fonds propres pour financer leurs investissements. D’une manière générale, le problème de financement se pose pour la petite et moyenne entreprise. Les grandes entreprises, souvent filiales des multinationales européennes ou asiatiques arrivent avec leurs financements mobilisés sur le marché financier international. 58. Les taux d’intérêt très élevés dans l’ensemble de la sous-région de la CEMAC est le principal frein au financement de la PME. Les taux d’intérêt s’élèvent en moyenne à 15% dans la région et le différentiel entre les taux d’intérêt créditeurs et les taux débiteurs, bien qu’en diminution, demeure haut, à plus de 10%. 59. Un coût du crédit très élevé représente une contrainte significative pour beaucoup d’investisseurs, dont plusieurs hésitent à saisir les opportunités d’investissement et de création d’opportunités d’emploi. Il reflète un certain nombre de contraintes structurelles qui ont été identifiées par le ROSC 2011 de la Banque mondiale, pour qui deux facteurs importants expliquent le maintien des taux d’intérêt élevés par le système bancaire. 60. Le premier facteur est la perception, souvent inexacte, des informations sur les emprunteurs à haut risque qui résulte de l’absence de bureaux de crédit public et privé. Dans les pays où ces bureaux existent, ils disposent presque de toutes les informations sur le crédit : les emprunteurs, le montant du crédit, les conditions, les remboursements, les défauts, etc. Ainsi, l’organisme fournisseur de crédit, qu’il soit une banque, un opérateur de téléphonie, un grossiste de biens de consommation, d’équipements, etc. peut avoir sur simple consultation l’état de solvabilité de l’emprunteur qui s’adresse à lui. Cette information permet de mieux analyser le risque, de le personnaliser et de ne pas le reporter à l’ensemble de l’économie. Graphique 38 : Taux d’intérêt débiteurs au Gabon, dans les pays de CEMAC, 2010 et d’autres pays à revenu intermédiaire (en pourcentage) Source: Banque mondiale 61. Le second facteur est relatif à la structure du système bancaire lui-même. Les opérations bancaires sont extrêmement concentrées, avec quelques grandes 86 banques qui dominent le secteur. Dans ces conditions, les banques ont un grand pouvoir sur le marché pour élever les coûts des crédits et abaisser les taux des dépôts. Un des moyens pour lever l’asymétrie d’information est d’encourager les entreprises à produire des éléments comptables fiables. Des solutions alternatives au crédit bancaire sont également proposées : il s’agit du développement du capital-risque pour permettre aux banques de récupérer leurs créances en cas de réalisation du risque. De même, il faut prévoir l’instauration de fonds de garantie avec le soutien de l’Etat. 62. Pour améliorer l’accès au crédit, les réformes suivantes devraient être mises en œuvre : (i)  Mettre en place une centrale de risque au niveau de la BEAC, afin de mieux apprécier les risques, et fournir aux responsables de la politique monétaire tous renseignements, en matière de crédit, susceptibles d’éclairer leurs décisions ; (ii)  Mettre en place une centrale des bilans consultable par la profession bancaire pour permettre l’accès aux résultats comptables des entreprises. La Centrale des Risques (BEAC) devrait élargir les crédits suivis au niveau des entreprises et des personnes physiques et fixer un seuil des crédits suivis relativement bas (à un million de francs CFA, par exemple) ; (iii)  Mettre en place un cadre réglementaire instituant et organisant des bureaux privés d’information sur le crédit ; (iv)  Appliquer la réforme majeure de l’OHADA du 15 décembre 2010 sur les sûretés. Cette réforme a réglé la contrainte juridique sur les sûretés10 en l’internalisant dans le dispositif juridique du pays. Du côté du cadre légal et institutionnel : Une législation du travail rigide 63. En voulant trop protéger le salarié, la législation du travail a fini par développer beaucoup de rigidités qui étouffent la création d’emplois. Il s’agit principalement des dispositions relatives à la résiliation du contrat de travail, à la protection individuelle, au contrat à durée déterminée, au licenciement économique et à celle relative à l’emploi de la main-d’œuvre étrangère. La résiliation du contrat de travail 64. Fortement inspirée du droit français, la législation du travail au Gabon est extrêmement protectrice, soucieuse des droits des salariés, principalement en ce qui concerne la résiliation du contrat de travail. Cherchant à équilibrer le rapport inégalitaire entre l’employeur et le travailleur, le législateur gabonais a organisé la protection du salarié en agissant dans deux directions. En premier lieu, l’article 10, alinéa 1, du code du travail rend nulle et de nul effet « toute renonciation, limitation ou 87 cession par voie d’accord ou autre des droits reconnus aux travailleurs » par le code du travail. En second lieu, ce caractère d’ordre public du droit du travail est renforcé par l’interdiction du licenciement d’un salarié qui exerce les droits que lui reconnaît la loi. La protection individuelle 65. En ce qui concerne la protection individuelle, le salarié est protégé par les dispositions des articles 12 et 13 du code du travail. Le premier institue le principe de l’interprétation la plus favorable au salarié. En vertu de ce principe, lorsqu’il existe un doute dans l’interprétation des dispositions légales, le juge doit retenir l’interprétation la plus favorable au salarié. Le second article prévoit le principe de l’application de la norme la plus favorable au salarié. Selon ce principe, en cas de conflit entre plusieurs normes du droit du travail, il convient d’appliquer la norme la plus favorable au travailleur. Ainsi, en dépit du caractère d’ordre public du droit du travail, il est possible, dans le contrat de travail ou la convention collective, de consentir au salarié des avantages supérieurs aux minima légaux. 10  La réforme de l’Acte uniforme de l’OHADA sur les sûretés a (i) simplifié la création et le publication des sûretés, (ii) élargi la gamme des biens meubles qui peuvent servir de garantie mobilière (en fait tout type de biens présents et futurs), (iii) simplifié les modalités de réalisation des sûretés réelles mobilières, (iv) assoupli le régime des hypothèques, y compris l’autorisation de biens immeubles futurs et les droits portant sur des bâtiments construits sur le domaine public ou national (pour faciliter le financement des infrastructures). Extrait d’un article de la SFI sur le Doing Business dans les Etas OHADA Ces dispositions font que, dans la pratique, les décisions des inspecteurs du travail et des juges du travail ne vont jamais dans le sens d’un équilibre mais sont très souvent favorables au travailleur. La procédure de licenciement économique 66. La procédure de rupture du contrat de travail en cas de difficultés économiques est longue et coûteuse pour l’employeur. Le code du travail fait obligation à l’employeur de mettre en place un plan social en cas de licenciement économique de plus de dix salariés. La procédure est particulièrement longue et compliquée. Elle prend beaucoup de temps et d’énergie au chef d’entreprise et à son staff technique et administratif à un moment critique où l’entreprise est en difficulté. En effet, si le licenciement pour motif économique touche au moins 10 salariés, l’employeur, en application de l’article 59 du code du travail, est tenu de présenter aux représentants du personnel un plan social ainsi que son plan de financement élaboré en accord avec l’Office National de l’Emploi (ONE). Ce plan social ne peut être élaboré qu’au bénéfice des salariés dont l’employeur a apporté aux représentants du personnel et à l’inspecteur du travail la preuve que le licenciement ne peut être évité. Le salarié concerné a le choix entre le plan social et les indemnités de licenciement. Dans la pratique, compte tenu des précédents du secteur public et de la confusion dans les interprétations, le salarié opte toujours pour les indemnités de licenciement qui oscillent entre 28 et 52 mois de salaire. Ces difficultés expliquent en partie la 88 réticence des entreprises à embaucher en contrat à durée indéterminée (CDI). Le contrat à durée déterminée (CDD) 67. L’ordonnance du 25 avril 2010 a modifié l’architecture de l’article 23 du code du travail en supprimant l’alinéa 2 qui instituait le CDD de courte durée. Désormais, le CDD de l’article 23 est obligatoire et conclu par écrit pour une période initiale qui ne peut être inférieure à 2 ans. Il ne peut être renouvelé qu’une seule fois, soit une durée totale, renouvellement compris, qui ne peut excéder 4 ans. 68. La modification des dispositions sur le CDD introduite en 2010 est un recul par rapport au code de 1994 qui avait déjà introduit une certaine flexibilité. Il prévoyait par exemple deux types de CDD : l’un de longue durée conclu initialement pour 2 ans et renouvelable une seule fois pour la même durée, soit une durée totale de 4 ans ; l’autre de courte durée, pouvant être conclu et renouvelé plus d’une fois, sans toutefois que la durée totale puisse excéder 2 ans. C’est cette dernière catégorie de CDD qui était la plus utilisée par les entreprises, ce qui leur permettait d’utiliser une main-d’œuvre qui ne pouvait prétendre à la conclusion d’un CDI. L’emploi de la main-d’œuvre étrangère 69. Le principe de priorité d’embauche des travailleurs nationaux a conduit le législateur à encadrer strictement l’emploi des travailleurs étrangers. C’est ce qui ressort des articles 104 et suivants du code du travail. Ces textes conditionnent l’emploi d’un travailleur étranger à la délivrance d’une autorisation d’emploi par le ministère du travail. L’autorité administrative ne délivre en principe l’autorisation que s’il n’existe pas de nationaux qualifiés dans l’emploi considéré. Le législateur gabonais va plus loin en précisant que la main-d’œuvre étrangère ne doit pas dépasser 10% des effectifs globaux de l’entreprise. 70. Cette limitation du recours à la main-d’œuvre étrangère peut être préjudiciable pour les entreprises qui sont fréquemment confrontées à une carence de main- d’œuvre nationale qualifiée, dans les secteurs techniques mais aussi dans les métiers de base, où l’on observe une carence. Il en est ainsi par exemple, des plantations agro-industrielles, où la main-d’œuvre (planteurs) est rare et où l’on constate que le recours à la main-d’œuvre étrangère est nécessaire pour avoir la productivité liée au projet d’investissement. D’ailleurs, il n’est pas rare que les entreprises se dispensent d’appliquer les dispositions légales, par exemple en ne déclarant pas la main-d’œuvre étrangère. Il est donc nécessaire d’assouplir cette disposition du code du travail qui date de 1968. Un système de protection sociale structurellement déséquilibré 71. La protection sociale des travailleurs est principalement assurée par deux organismes sociaux que sont la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) et la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de Garantie Sociale (CNAMGS). En plus de ces deux organismes publics, il existe des compagnies privées d’assurance 89 maladie auxquelles les entreprises recourent pour compléter les prestations des organismes publics. Le rôle de la CNSS 72. Organisme privé chargé de la gestion d’un service public, la C.N.S.S fonde son action sur deux textes majeurs : le code de la sécurité sociale et son décret d’application, datant respectivement de 1975 et de 1981. Elle assure les prestations familiales et de maternité, les accidents du travail et la retraite. La branche maladie (à l’exception des centres médicaux sociaux et des services de protection maternelle et infantile) est en cours de transfert à la CNAMGS. 73. Les ressources de la CNSS sont constituées des cotisations des assurés soit 22,6% de la masse salariale. Les employeurs contribuent à hauteur de 20,1% et les salariés 2,5%. Lorsque le transfert de la branche maladie à la CNAMGS sera terminé, le taux de cotisation globale tombera à 18,5% car les cotisations pour cette branche, soit 4,1% (supportées par l’employeur), seront désormais versées à la CNAMGS. 74. En ce qui concerne les charges, la CNSS doit supporter la branche vieillesse structurellement déficitaire, malgré le relèvement de l’âge de la retraite à 60 ans en versant, sous certaines conditions (20 ans de cotisation par exemple), une pension de retraite de base de 45% du salaire net moyen des 5 dernières années et 1% de plus par année supplémentaire au-delà de 20 ans. Cette pension ne peut être inférieure à 80% du SMIG fixé à 80.000 francs CFA net par mois, soit 64.000 francs CFA. Les prestations familiales sont de 21.000 francs CFA/enfant/trimestre et l’allocation scolaire de 20.000 francs CFA/enfant/an. En 2010, le total des cotisations de la CNSS s’est élevé à 100 milliards de francs CFA qui ont été consacrés pour 35 milliards au paiement des pensions de retraite, 30 milliards aux prestations familiales et aux risques professionnels et le solde, soit 40 milliards. a servi à couvrir les charges de fonctionnement CNSS (y compris les frais de personnel pour 1.600 agents11) et le fonds d’action sanitaire et sociale. Les réserves de la CNSS sont actuellement inférieures aux 10% réglementaires fixés par la loi. Tableau 11 : Financement de la CNSS, 2012 (en pourcentage) Détermination du risque Part Part patronale salariale Allocations familiales 8% Accidents du travail et maladies 3% professionnelles Pension de vieillesse 2,5% 5% Fonds d’évacuation sanitaire 0,6% Distribution de médicaments 2% Hospitalisation 1,5% Total 2,5% 20,1% Source : CNSS 75. Depuis plusieurs années, la CNSS est confrontée à un déficit structurel qui résulte essentiellement de la baisse de l’emploi, de l’accroissement du nombre 90 d’assujettis et du non versement des cotisations sociales par de nombreuses entreprises privées. Selon une étude récente de l’UNICEF, le déficit de la branche vieillesse s’accroît au taux moyen de 19,24% par an, principalement en raison de l’accroissement plus important des dépenses liées aux prestations techniques (retraites et pensions des survivants), alors que les cotisations n’augmentent en moyenne que de 6,9% par an. 76. Afin de résorber le déficit structurel de la CNSS, sa direction a entamé un plan de redressement incluant la réorganisation et la redynamisation du recouvrement des cotisations, la redéfinition de ses activités et la réduction de ses charges. Ses efforts se sont soldés par une nette amélioration de la situation financière de l’organisme, qui a enregistré un résultat excédentaire de 10,9 milliards de francs CFA en 2010, qui lui a permis d’absorber le déficit global de 4,2 milliards enregistrés en 2009. La décision gouvernementale de prendre en charge les arriérés de pension résultant de l’augmentation du SMIG a également contribué à cette embellie. 77. Ces efforts sont cependant insuffisants pour résorber le déficit structurel de la CNSS car celui-ci résulte du paramétrage du système qui assure de faibles niveaux de contribution contre des prestations sociales généreuses. L’on relève par exemple que 20 ans de cotisation d’un cadre correspondent à deux années et demie de pension de retraite. Le taux de rendement interne de la CNSS est évalué à 11% alors que la moyenne africaine est de l’ordre de 3% à 4%. Par ailleurs, ce déficit structurel 11  L’Etat reprend, à la valeur comptable nette, les 3 hôpitaux construits par la CNSS sur fonds propres avec 900 agents). est aggravé par l’effet de ciseaux engendré par un marché de l’emploi récessif alors que les départs en retraite s’amplifient. 78. L’On peut constater que ce système porte les germes de son déséquilibre structurel. Les ressources permanentes (dont le poids est déjà très lourd pour les entreprises) sont insuffisantes pour couvrir durablement les charges. Une étude actuarielle est donc indispensable et urgente. Elle permettrait de paramétrer à nouveau le système en définissant le niveau optimal de cotisation et de réformer le Code de Sécurité Sociale dont les dispositions sont aujourd’hui obsolètes car datant de 1962 et en décalage avec la situation actuelle de la CNSS. La CNAMGS 79. En plus de la CNSS, un système d’assurance maladie obligatoire a été institué avec la création de la CNAMGS, par l’ordonnance n° 0022/PR/2007 du 21 août 2007. En application de l’article 4 de cette ordonnance, sont assujettis au régime obligatoire de l’assurance maladie, les agents publics, les travailleurs salariés du secteur privé et parapublic, les salariés de l’Etat et des administrations publiques, les travailleurs indépendants, les titulaires d’une rente ou d’une pension, quel que soit leur régime d’affiliation. Toute personne de nationalité gabonaise ne rentrant pas dans une de ces catégories et les travailleurs indépendants étrangers peuvent être volontairement assujettis au régime obligatoire de l’assurance maladie. 80. La création de la CNAMGS a entraîné la dissolution de la Caisse Nationale de Garantie Sociale (CNGS) et le transfert, à son profit, des activités de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) liées à l’hospitalisation, à la distribution gratuite 91 des médicaments et aux évacuations sanitaires. 81. Les prestations servies au titre de l’assurance maladie obligatoire sont: les frais de consultation, d’hospitalisation, de médicaments, des actes médicaux et paramédicaux, les frais d’évacuation sanitaire, des vaccins obligatoires et d’appareillage,  les frais de prestations de santé liés à l’état de grossesse et à l’accouchement. Toutes ces prestations sont payées selon le principe du tiers payant, les assujettis participant aux frais selon le principe du ticket modérateur. Malgré l’ampleur des charges techniques, la couverture des soins est assurée à 80% par le tiers payant et 20% par le bénéficiaire sous forme de ticket modérateur. 82. La mise en œuvre des activités de la CNAMGS s’est faite de manière progressive. Son activité a débuté avec l’immatriculation des personnes économiquement faibles (personnes ayant un revenu inférieur au SMIG) en 2008 et 2009, puis celle des agents du secteur public en 2010. Au moment de la rédaction du rapport, les salariés du secteur privé et les travailleurs indépendants n’étaient pas encore totalement immatriculés. 83. Le financement de la CNAMGS est assuré par trois fonds distincts  : (i) le fonds d’assurance maladie des agents publics de l’Etat, (ii) le fonds d’assurance maladie des travailleurs salariés des secteurs privé et parapublic, des travailleurs indépendants, des professions artisanales, commerciales et libérales, et (iii) le fonds de garantie sociale des gabonais économiquement faibles, des étudiants, des élèves et des réfugiés. Le fonds d’assurance maladie des agents publics de l’Etat est financé par les cotisations des agents du secteur public. Celui des agents du secteur privé et parapublic est alimenté par un prélèvement de 6,6% sur le salaire imposable de chaque agent, dont 2,5% payés par l’employé lui-même et 4,1% par l’employeur. Les retraités cotisent à hauteur de 1,5%. Le fonds de garantie sociale est alimenté par un prélèvement de 10% sur le chiffre d’affaires hors taxes des compagnies de téléphonie mobile opérant au Gabon et de 1,5% sur toutes les transactions internationales conclues à partir du Gabon, à l’exception de celles de l’Etat. 84. La CNAMGS étant de création récente et n’ayant pas terminé la mise en place de toutes ses activités, il est trop tôt pour se prononcer sur sa viabilité à long terme. L’on peut cependant s’interroger sur la viabilité à terme du fonds de garantie sociale des gabonais économiquement faibles, qui repose essentiellement sur le chiffre d’affaires des entreprises des télécommunications dont on observe un tassement ces dernières années, après une dizaine d’années de forte croissance. Une étude actuarielle serait nécessaire dès maintenant afin d’identifier un système de financement plus durable. 85. En conclusion, la protection sociale au Gabon est très généreuse pour le travailleur et coûteuse pour l’employeur, ce qui peut constituer un frein à l’enregistrement des travailleurs. Sur 22,5% de cotisations prélevées sur les salaires, 92 les employeurs en supportent 20,1% et les salariés seulement 2,5%. Ce système alourdit les charges des entreprises qui, pour éviter une charge sociale trop lourde, ne déclarent pas une partie de leurs personnels ou préfèrent recourir à des contrats à durée déterminée même pour des emplois stables et durables. 86. L’équilibre à long terme du système de sécurité sociale gabonais pourrait nécessiter une contribution plus importante des travailleurs. Cette question pourrait faire l’objet d’une concertation tripartite employeurs-Etat-travailleurs. En contrepartie d’une augmentation de leur contribution, les travailleurs pourraient se voir attribuer des responsabilités dans les organes de décision des deux caisses. Des études actuarielles solides devraient pouvoir sous-tendre les réformes indispensables pour assurer cet équilibre. L’absence d’un système d’information fiable sur le marché de l’emploi 87. Le cadre institutionnel et règlementaire de promotion de l’emploi est en mutation. Le Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Prévoyance Sociale a été supprimé en février 2012 et ses attributions ont été transférées au Ministère de l’Economie, de l’Emploi et du Développement durable. Il a été mis en place au sein de ce nouveau Ministère, un pôle emploi qui reprend les fonctions de l’ancien du Ministère du Travail (définition et mise en œuvre de la politique de l’emploi, application de la règlementation du travail, suivi du marché de l’emploi et des relations professionnelles et recherche en matière d’emploi). 88. L’objectif de cette réorganisation est de rendre plus cohérente la politique de diversification économique et la politique de l’emploi. Les réformes en cours prévoient également l’élaboration d’une politique nationale de l’emploi, après l’organisation des états généraux sur l’emploi prévus pour le second semestre 2013. La réforme envisage également avec l’appui de la BAD de renforcer les capacités institutionnelles et techniques du pôle emploi par la définition d’un cadre méthodologique approprié pour l’exercice des missions à réaliser. Le renforcement des capacités concernera l’équipement, la formation et le recrutement d’un personnel spécialisé afin de doter le pôle emploi de moyens nécessaires à l’accomplissement de ses missions. Malgré ces réformes en cours, des insuffisances persistent. 89. Le Gabon souffre de l’absence d’un système d’information fiable sur le marché de l’emploi. Alors que le secteur privé informel emploie près de la moitié de la population active, il ne fait l’objet d’aucun suivi par des études régulières. Il en est de même pour le chômage, dont les seules données disponibles sont celles du recensement général de la population et de l’habitat de 1993 (celui de 2003 n’ayant pas été validé), de l’enquête gabonaise sur l’évaluation de la pauvreté de 2005 (EGEP) et celle de l’enquête nationale sur l’emploi et le chômage de 2010 (ENEC). On relève par ailleurs des décalages entre les chiffres issus de ces sources et ceux provenant des déclarations des salaires versés publiées par la Direction Générale de la Statistique. 90. Plusieurs organismes collectent des informations sur l’emploi formel, mais celles-ci sont insuffisantes pour suivre les évolutions et la nature des emplois existants, effectuer des analyses approfondies, informer de façon pertinente les utilisateurs potentiels et alerter les pouvoirs publics pour d’éventuelles actions de correction. Les 93 données de l’ONE sont focalisées sur les demandes et les offres d’emploi, et celles de la comptabilité nationale, collectées à partir des déclarations des salaires versées, sont très agrégées et ne concernent qu’une partie du secteur formel. La CNSS pourrait également constituer une importante source de données sur l’emploi, mais son système d’information actuel ne permet pas de générer des données sur la répartition sectorielle et les qualifications. Les inspections du travail présentes sur l’ensemble du territoire national sont également une source potentielle d’informations sur le marché du travail mais elles font face à d’importantes difficultés matérielles. Il est difficile dans ces conditions, de suivre les tendances et la nature des emplois existants, effectuer des analyses approfondies, informer de façon pertinente les utilisateurs potentiels et alerter les pouvoirs publics aux fins d’éventuelles actions correctives. 91. Conscient des limites en matière d’information sur l’emploi, le Ministère de l’Economie et de l’Emploi envisage la création d’un Observatoire National de l’Emploi et de la Formation. Cette nouvelle institution sera chargée de : (i) centraliser et traiter les données portant sur la situation de l’emploi et de la formation, (ii) construire les outils d’analyse et analyser les statistiques sur l’emploi, (iii) conduire des études et enquête sur l’emploi et mesurer l’impact des mesures mises en œuvre en matière d’emploi et de formation, afin d’alimenter les orientations et décisions en matière de politique d’emploi et de formation. La mise en place d’une telle institution nécessitera au préalable une répartition claire des rôles entre elle, l’ONE et la Direction Générale de l’Emploi, afin de délimiter les champs de compétence de chacune des administrations. Elle nécessitera également de rendre compatibles et homogènes les différentes statistiques publiques (CNSS, inspections du travail, ONE, données d’enquêtes, etc.) 92. Enfin, la mise en place de cet observatoire devrait se faire dans le cadre d’une politique nationale de l’emploi, et s’inscrire de manière cohérente dans le système statistique national. Il ne devrait pas dupliquer les fonctions de la Direction Générale de la Statistique et des services statistiques sectoriels, mais s’inscrire harmonieusement dans l’appareil statistique national, en mettant en place un système d’accès et de transfert des données entre les agences. Une intermédiation limitée sur le marché du travail 93. L’Office National de l’Emploi (ONE) assure l’activité de placement des travailleurs. Créé le 1er octobre 1993, il est chargé: (i) d’assister les personnes à la recherche d’un emploi ou d’une formation pouvant faciliter leur insertion professionnelle; (ii) d’assister les employeurs dans l’embauche ou le reclassement (interne ou externe) de leur personnel; et (iii) de mettre en œuvre les mesures spécifiques arrêtées par le gouvernement en faveur de l’emploi. Pour ce faire, l’ONE assure la collecte et le traitement des données sur le marché du travail, l’accueil et l’orientation des demandeurs d’emploi vers les offres disponibles, la sélection et l’encadrement 94 des candidats désirant créer de très petites entreprises (auto-emploi) dans le montage de leur dossier de faisabilité. Entre 1994 et 2010, l’ONE a reçu 57.975 demandeurs d’emplois et 11.411 offres d’emploi, avec seulement 5.532 embauches directes enregistrées. L’action de l’ONE est limitée en raison de la faiblesse de son budget de fonctionnement et du fait qu’il n’est actuellement présent que sur trois provinces. En outre, les résultats de l’ENEC 2010 montrent que les demandeurs d’emploi préfèrent avoir recours aux relations personnelles (37% à 39%), au dépôt direct de candidatures auprès des employeurs (20% à 26%) aux petites annonces (85 à 14%) plutôt qu’à l’ONE (2%. Ce constat montre la nécessité de repenser le rôle de l’ONE, le renforcer et le déployer sur l’ensemble du territoire national. 94. Logé au sein de l’ONE, le Fonds d’Aide à l’Insertion et à la Réinsertion Professionnelles (FIR) est géré par un conseil d’administration qui regroupe des représentants de l’Etat, des employeurs et des salariés. Il a pour mission de consentir des aides aux jeunes diplômés à la recherche d’un premier emploi et aux licenciés économiques des entreprises publiques ou privées sollicitant un nouvel emploi. Ces aides se font sous la forme (i) du financement de toute ou partie de l’organisation et de l’exécution des stages de formation établis conformément aux exigences du marché du travail, et (ii) de la participation au financement des études sectorielles sur les opportunités d’emplois disponibles ou potentiels. Ce dernier type d’activité est moins fréquent. 95. L’action du FIR est limitée à cause de la faiblesse de son budget annuel. En effet, 100 millions de francs CFA sont annuellement affectés aux actions de formation menées par le FIR, et ce budget est souvent mis à disposition en retard. Si l’on tient compte de ce que le coût moyen de la formation d’un demandeur d’emploi se situe entre 400.000 francs CFA et 500.000 francs CFA, l’on comprend que le FIR ne peut répondre efficacement et durablement à la demande de formation exprimée par les entreprises. 96. La population cible du FIR est extrêmement réduite par la loi. Seuls les jeunes diplômés et les licenciés économiques sont concernés par les actions de formation du FIR. Or, ainsi que le prouvent les statistiques de l’ONE et les résultats de l’ENEC, de nombreux demandeurs d’emploi ont un grand besoin de formation. En outre, il y a plus de licenciés pour motif personnel que pour motif économique. Et il n’est pas rare que ce motif personnel soit la conséquence de l’insuffisance professionnelle du salarié. Il en résulte qu’en restreignant le champ d’application du FIR, la loi prive de nombreux demandeurs d’emploi d’une formation dont ils auraient grandement besoin. En même temps que l’enveloppe globale serait augmentée, tous les demandeurs d’emploi, et non plus seulement les jeunes diplômés et les licenciés économiques, pourraient bénéficier des actions de formation dès lors qu’une entreprise aura exprimé un besoin. 97. D’autre part, depuis son lancement effectif en 1994, l’action du FIR en faveur de l’auto-emploi est limitée. Entre 1994 et 2004, il n’a pu mener que 32 campagnes de sensibilisation à l’auto-emploi et n’a initié que 327 formations de promoteurs d’auto- emploi. En conséquence, il n’a pu aider à créer que 251 emplois indépendants entre 1994 et 2010. La réorganisation du FIR pourrait être intégrée dans le cadre plus large de la réorganisation de la formation professionnelle évoquée au chapitre précédent. 95 Un impact limité des programmes de promotion de l’emploi 98. Afin de lutter contre le chômage et promouvoir l’auto-emploi, le gouvernement gabonais a mis en place à partir des années 90, avec le concours des partenaires techniques et financiers, des programmes spécifiques de promotion de l’emploi, des programmes dits de seconde chance. 99. Les principaux d’entre eux sont : (i) le Programme d’Appui à la Formation et à l’Insertion Professionnelle (AFOP/AFIP), (ii) le Programme National de Développement de la Commande et de la Gestion Publiques de Travaux d’Intérêt Public pour la Promotion de l’Entrepreneuriat et l’Emploi (PN TIPPEE), (iii) le Programme d’Appui au Développement du Microcrédit au Gabon (PADMG), (iv) le programme en faveur des jeunes filles mères et (v) les programmes mis en œuvre par l’Institut Gabonais d’Appui au Développement (IGAD). Si l’on excepte l’IGAD, l’impact de ces programmes est limité, principalement en raison de la faiblesse des ressources qui leur sont allouées. Les programmes de l’Institut Gabonais d’Appui au Développement (IGAD) 100. Créé en 1992 sous la forme d’une association régie par la loi de 1962, l’IGAD vise à augmenter la part de l’agriculture dans le revenu national, en mettant l’accent sur la création et le développement d’un tissu agricole périurbain qui s’intègre dans la perspective du développement durable. Pour atteindre cet objectif, l’IGAD mène des actions de formation dans le domaine agricole sur toute l’étendue du territoire national, pour insérer dans le circuit économique des personnes en situation de précarité, en les aidant à devenir des petits entrepreneurs agricoles. Depuis 1992, l’IGAD a permis la création de plus de 1.200 très petites entreprises (TPE) agricoles dans les neuf (9) provinces du pays qui ont généré plus de 2.000 emplois durables. 101. Bâtissant sur les résultats passés de l’IGAD, le gouvernement gabonais à lancé le Projet de Développement et d’Investissement Agricole au Gabon (PRODIAG) avec l’appui financier de l’Agence Française de Développement (AFD). Prévu pour la période 2011-2015, soit une durée de cinq (5) ans, le PRODIAG est doté d’un budget de 12,7 milliards de francs CFA résultant d’un prêt consenti par l’AFD qui représente 79% du financement du projet. Les 21% restants ont été financés par l’Etat. 102. L’objectif du PRODIAG est de contribuer au renforcement de la sécurité alimentaire, à la réduction de la pauvreté et à l’augmentation de la part de l’agriculture dans la richesse nationale. Plus spécifiquement, le PRODIAG est conçu comme un projet d’appui au développement de la production et de la commercialisation des produits agricoles. Il vise aussi à structurer la profession agricole. A cet effet, il devrait générer plus de 1.000 exploitations agricoles, 2.200 emplois directs et 1.000 emplois indirects en cinq ans. Il est attendu du projet une augmentation significative 96 du niveau des revenus des exploitants, qui bénéficieront d’un accompagnement dans la structuration de la profession. Les programmes d’appui à la formation et à l’insertion professionnelles 103. Financé par le Fonds Européen de Développement (FED), le Programme d’Appui à la Formation Professionnelle (AFOP) a pour cible les jeunes de 16 à 25 ans exclus du système éducatif et qui, pour une raison ou une autre (milieu social défavorisé, niveau scolaire insuffisant, éloignement géographique, absence de structures d’enseignement ou capacités d’accueil limitées, etc.), n’ont pas la possibilité de poursuivre une scolarité normale. Le projet leur offre une formation professionnelle ou une formation « professionnalisante » de courte durée (3 à 6 mois) pour acquérir des compétences dans des métiers de l’agriculture du bois et du BTP. A la fin de l’année 2010, le projet AFOP avait permis, dans le secteur agricole, la formation de 257 apprentis-compagnons parmi lesquels 15% ont obtenu un emploi temporaire et 4% un emploi stable. La faible insertion des jeunes formés a conduit à la restructuration du programme pour tenir compte du volet insertion professionnelle. 104. La suite du programme, qui se fera sous la forme du programme d’Appui à la Formation et à l’Insertion Professionnelles (AFIP), prévue pour la période 2012 – 2015, organisera des formations courtes qualifiantes en alternance dans des centres de formation publics et privés en tenant compte des besoins définis par bassin d’emplois, c’est-à-dire en tenant compte de la localisation géographique des entreprises. Le Programme National de Développement de la Commande et de la Gestion Publiques de Travaux d’Intérêt Public pour la Promotion de l’Entrepreneuriat et l’Emploi (PN TIPPEE) 105. L’objectif du PN-TIPPEE est de faire accéder les petites et moyennes entreprises locales, principalement celles qui interviennent dans le BTP, à la commande publique à travers la réalisation d’infrastructures communautaires. Le programme vise ainsi à promouvoir les micros, petites et moyennes entreprises (MPME), tout en permettant la formation des dirigeants et des cadres de ces entreprises. Il vise également la promotion de l’emploi des nationaux en encourageant l’embauche en priorité des gabonais issus des localités bénéficiaires des infrastructures. Entre 2006 et 2011, le projet a permis à 150 PME de conclure 632 marchés de travaux, de fournitures ou de services par la voie d’appels d’offres pour une valeur de 15 milliards. Soutenu jusqu’en 2011 par un financement conjoint de la Banque mondiale et du gouvernement gabonais, le programme est suspendu, faute de nouveaux financements. L’enquête de satisfaction des bénéficiaires réalisée par la Commission Nationale de Travaux d’Intérêt Public pour la Promotion de l’Entrepreneuriat et l’Emploi (PN TIPPEE) ayant montré un fort intérêt des populations pour ce programme, il serait bon de réaliser un audit opérationnel du programme, en vue d’en assurer un financement stable et durable. En plus de promouvoir l’accès des micros et petites moyennes entreprises à la commande publique, ce type de programme aide à créer des emplois peu qualifiés et peut aider la transition de l’informel vers le secteur formel. 97 Le programme d’Appui au Développement du Microcrédit au Gabon (PADMG) 106. L’objectif du PADMG est de rendre les femmes autonomes en finançant leurs activités dans des domaines aussi divers que l’agriculture, l’élevage, la pêche, l’artisanat, le négoce et les prestations de services. Ce financement, octroyé avec l’aide du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), de la Banque Gabonaise de Développement (BGD) et du Ministère de l’agriculture et de l’élevage, sous la forme de prêts allant, pour les personnes physiques, de 200.000 francs CFA à 500.000 francs CFA et, pour les associations, de 500.000 francs CFA à 5.000.000 francs CFA. 107. Ces prêts permettent de constituer des fonds de roulement ou d’acquérir les équipements nécessaires à l’accomplissement de l’activité. Ils sont octroyés moyennant un taux dégressif de 4% par an, frais de dossier et commissions compris. Le crédit est assorti de garanties offertes par le bénéficiaire. Ces garanties vont du cautionnement solidaire au parrainage, en passant par la domiciliation bancaire, la délégation de recettes ou le nantissement. Initialement lancé dans la province de la Nyanga, le PADMG a ensuite été étendu aux provinces du Haut Ogooué et du Woleu- Ntem. Aucune évaluation des résultats obtenus par le projet n’était disponible au moment de la réalisation du rapport. 108. Cependant, les administrateurs du projet ont mentionné quelques difficultés auxquelles fait face le projet. La plus importante tient au volume du crédit qui ne peut dépasser 50.000.000 francs CFA par province. Ce faible montant contraste avec la forte demande exprimée par les femmes dans les provinces couvertes par le projet. D’autres difficultés sont liées au fonctionnement du projet qui nécessite des missions de sensibilisation, de suivi et de contrôle ; mais aussi des sessions de formation en faveur du public ciblé. Ces difficultés rendent aléatoire l’extension à l’ensemble du pays d’un projet qui peut être une importante source d’auto-emploi, contribuant ainsi à réduire sensiblement la pauvreté, surtout en milieu rural. Le programme en faveur des jeunes filles mères 109. Les grossesses précoces étant l’une des principales causes de l’abandon scolaire et de la vulnérabilité des femmes face à l’emploi, le gouvernement gabonais a mis en place en 2001, un fonds d’aide aux jeunes filles mères économiquement faibles. Sont considérées comme économiquement faibles, les personnes ayant un revenu mensuel inférieur au SMIG. Ce fonds a permis de financer : La construction de 13 haltes-garderies et des cases communautaires qui ont accueilli, 2.015 enfants, âgés de trois (3) mois à cinq (5) ans, des filles-mères. Ces haltes-garderies permettent aux jeunes filles mères économiquement faibles d’exercer une activité donnée sans se s’inquiéter de la garde de leur enfant. Des formations qualifiantes assorties de paquets minimum d’installation. En 2008, l’on recensait 95 jeunes filles ayant bénéficié de formation en coiffure, couture, soudure, bureautique, plomberie, mécanique automobile, 98 éducatrice préscolaire, personnel de maison et cuisine, et mécanique engin lourd. Quatre-vingt filles mères sont sorties de la précarité en trouvant un emploi dans une entreprise ou en exerçant un métier à leur compte personnel. 110. Les administrateurs de ce programme ont mentionné l’insuffisance de ressources financières comme principal obstacle à son expansion. Il devrait également faire l’objet d’un audit opérationnel afin de le redimensionner et augmenter le nombre de filles mères bénéficiaires. 111. De manière générale, il est souhaitable que les autorités gabonaises procèdent à une évaluation de l’impact socio-économique de ces différents programmes, afin d’en mesurer l’efficacité. Cette étude d’impact permettrait de distinguer les programmes pertinents et de les redéployer sur l’ensemble du territoire national, après les avoir dotés de ressources suffisantes. 5. Conclusion : Créer les conditions d’une croissance inclusive 1. L’analyse des contraintes et des défis à la création d’emplois vient de montrer que celles-ci sont de diverses natures et que la lutte contre le chômage, principalement celui des jeunes, nécessite une approche multiforme agissant à la fois sur l’offre et la demande de travail. Le plus urgent nous semble être la réforme du système éducatif afin d’améliorer sa qualité et de le rendre plus compatible aux besoins du secteur productif pour que les opportunités d’emplois se transforment en emplois de qualité. Parallèlement, il est nécessaire que le climat d’investissement soit amélioré pour augmenter les opportunités d’emplois. 2. Il sera également nécessaire d’assouplir la législation du travail qui aujourd’hui tend à protéger ceux qui ont du travail et freine la création de nouveaux emplois. De même, afin d’assurer la viabilité à terme du système de protection sociale, il semble nécessaire de lancer des études actuarielles des deux organismes publics de protection sociale. De telles réformes vont nécessiter que s’accélère la mise en place du nouveau cadre institutionnel qui a été lancé en février 2012 par le regroupement au sein d’un seul ministère, le département de l’Economie, de l’Emploi et du Développement Durable. 99 Pour mettre en place ces réformes les actions suivantes sont proposées : Adapter le système éducatif aux besoins de l’économie 3. Les enjeux de la réforme en matière d’éducation pour résoudre le problème de « l’adéquation formation-emploi » se situent à deux niveaux : l’opérationnalisation de la loi d’orientation de l’éducation et la mise en place d’un système de formation qualifiante basé sur les besoins du secteur productif. 4. L’opérationnalisation pragmatique et rapide des dispositions de la loi 21/2011 portant orientation générale de l’Education, de la Formation et de la Recherche est le défi à long terme du gouvernement. Celle-ci passera par : (i) une meilleure programmation pour améliorer la gestion des flux scolaires et réduire les taux de redoublement et d’abandon scolaire, (ii) l’amélioration des conditions matérielles d’enseignement, et (iii) le renforcement de la capacité et de la motivation du personnel. Ces réformes pourront difficilement se faire sans une augmentation des budgets alloués à l’éducation et sans améliorer l’efficacité des allocations à l’intérieur de ce secteur. Une analyse détaillée des allocations intersectorielles et une enquête de suivi des dépenses de l’éducation et un audit organisationnel et de performance du Ministère de l’Education nationale et de la Formation Professionnelle pourraient aider à la mise en place d’un plan séquencé de l’opérationnalisation de la loi d’orientation générale adoptée en 2011. 5. A court terme, le principal défi du gouvernement est de transférer, dans la pratique courante de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, les expériences de formation qui partent de la demande réelle du marché de l’emploi (i.e. les besoins actuels et futurs des entreprises), pour concevoir puis élaborer les programmes et former les formateurs et les apprenants. Pour ce faire, il est nécessaire de lancer dans les plus brefs délais, l’évaluation des besoins en qualification professionnelle des principaux secteurs prioritaires du Plan Stratégique Gabon Emergent (PSGE) et d’organiser, en concertation avec le secteur privé, un système de formations qualifiantes de courte durée et modulables sur la base des expériences en cours, telles que celles de l’Institut du Pétrole et du Gaz à Port-Gentil et du partenariat entre l’ONE, la Comilog et le centre de formation et de perfectionnement professionnel de Franceville. 6. Il semble également urgent de sécuriser le financement de l’enseignement professionnel et technique, aux fins d’augmenter la couverture de ce type d’enseignement. A cet effet, il est recommandé la création d’un Fonds National de la Formation et du Perfectionnement Professionnel (FNFPP),  doté d’une personnalité juridique propre et de l’indépendance financière et alimenté par la taxe de formation professionnelle, les financements des bailleurs de fonds et les autres contributions de l’Etat, y compris les fonds actuellement alloués au Fonds d’Insertion Professionnelle (FIR). Afin de surmonter la réticence des opérateurs du secteur privé à payer la taxe professionnelle créée en 2000 et dont l’objectif est de financer l’enseignement professionnel, il est souhaitable que le secteur privé et l’administration cogèrent ce fonds. Il est également souhaitable d’insérer le secteur privé dans les instances de définition de la politique nationale d’éducation notamment le Conseil National de l’Education, de la Formation et de la Recherche (CNEFOR) prévu dans la loi 21/2011 portant orientation générale 100 de l’éducation, de la formation et de la recherche. Renforcer le dispositif institutionnel d’appui au secteur privé 7. La conduite de réformes clés permettant d’améliorer significativement le climat de l’investissement nécessite un dialogue permanent de haut niveau entre le secteur public et le secteur privé et une clarification des rôles dans le dispositif d’appui au secteur privé. 8. Le dialogue entre l’Etat et le secteur privé pourrait se formaliser par la mise en place d’un Conseil Présidentiel de l’Investissement (CPI), organe prévu dans le PSGE. Cet organe serait chargé du dialogue de haut niveau entre le secteur public et le secteur privé sur les réformes visant à faciliter les affaires. Le CPI serait un organe consultatif composé de représentants du secteur privé et de l’administration et des travailleurs - choisis pour leur compétence, leur expérience et leur intégrité - et qui se réunirait une ou deux fois par an sous la présidence du Chef de l’Etat entouré des ministres concernés, pour définir et évaluer les réformes. Une équipe restreinte d’experts de haut niveau animerait le processus de mise en œuvre et d’évaluation des dites réformes. Des groupes de travail thématiques composés de spécialistes du secteur privé et des administrations diagnostiqueraient les problèmes, mèneraient les études nécessaires et proposeraient les projets de réformes. Ces réformes seraient ensuite soumises à l’appréciation de la réunion biannuelle du CPI pour décision. La mise en œuvre des réformes arrêtées serait assurée par les administrations sous le contrôle d’un comité de suivi placé sous l’autorité du Premier ministre ou du Secrétaire général du gouvernement. 9. Il semble ensuite utile de clarifier les rôles et de renforcer les capacités opérationnelles des organismes d’appui au développement du secteur privé de la manière suivante : (i) focaliser l’action du Centre de Développement des Entreprises (CDE) sur le guichet unique des formalités administratives de création d’entreprises, et (ii) regrouper les fonctions d’information sur les opportunités d’affaires, les études et services d’appui et de conseil aux PME et la promotion des investissements au sein de la Chambre de Commerce, et (iii) spécialiser l’Agence de Promotion des Investissements et des Exportations (APIEX) dans la promotion des exportations et la recherche des investisseurs internationaux. A terme, une fois que ces trois entités auront acquis une expérience avérée dans leurs responsabilités respectives, elles pourraient être regroupées au sein d’une même institution. Assouplir la législation du travail et réformer le système de sécurité sociale 10. L’assouplissement de la législation du travail consisterait principalement à la réduction du délai d’obtention de l’autorisation administrative en cas de licenciement, ainsi qu’à la réduction du niveau des indemnités en cas de licenciement économique, qui devrait être fixé en fonction des capacités financières des entreprises en difficulté. Les dispositions relatives à l’embauche des travailleurs étrangers, qui imposent un seuil de 10% des effectifs étrangers par entreprise et la fourniture de la preuve qu’il n’y a pas de travailleurs gabonais disponibles pour les postes offerts, sont anachroniques par rapport à la situation actuelle du marché, caractérisée par un déficit substantiel en main-d’œuvre qualifiée nationale. Plutôt que des dispositions générales, la définition du quota des travailleurs étrangers devrait être discutée secteur par secteur pour 101 tenir compte de la situation de chacun d’entre eux. Il semble également nécessaire de libéraliser la fonction de placement des employés. 11. Pour ce qui est de la réforme du système de sécurité sociale, le déficit structurel du système recommande que soit rapidement menées deux études actuarielles distinctes, pour la CNSS et la CNAMGS, qui permettront de revoir les paramètres de chaque caisse, le mode de financement et le rééquilibrage des pouvoirs dans les organes de gouvernance. Ce travail servirait de base à la mise à jour du code de Sécurité Sociale dont les dispositions datant de 1962 sont aujourd’hui obsolètes. Renforcer le cadre institutionnel de promotion de l’emploi 12. L’expérience gabonaise, caractérisée par une croissance globalement positive sur une longue période et une aggravation du chômage, confirment que le lien entre la croissance économique et la création d’emplois n’est pas mécanique et qu’il est nécessaire d’avoir une politique de l’emploi qui organise les conditions d’une croissance génératrice d’emplois de qualité. Il est donc utile que la politique nationale de l’emploi, en cours d’élaboration, soit définie de manière cohérente avec les objectifs du PSGE et en concertation avec le secteur privé et les travailleurs. Les éléments des recommandations développés plus haut, relatifs à l’éducation et à la formation professionnelle, à l’amélioration du climat d’investissement et à la législation sociale, pourraient contribuer à la formulation de cette politique. 13. La mise en œuvre de cette politique nécessitera la poursuite de la réforme du cadre institutionnel qui a débuté avec la fusion entre les départements de l’économie et de l’emploi. Une telle restructuration nécessite un audit organisationnel et des moyens des institutions et services existants, afin de clarifier leurs rôles respectifs, de juger de l’opportunité de les maintenir et d’identifier les besoins de création de nouveaux services ou institutions. L’audit organisationnel permettrait également de définir un programme de renforcement de capacités pour l’ensemble de ces services et institutions. 14. Le suivi et l’évaluation de la politique nationale de l’emploi nécessite la mise en place d’un système d’information sur le marché du travail. Une première étape dans ce sens pourrait être la mise en place d’une base de données informatisée au sein du ministère en charge de l’emploi sur l’éducation, la formation professionnelle et l’emploi, à partir des données de l’ONE, de la CNSS des inspections du travail, de la DG impôts, de la DGS et des enquêtes systématiques auprès des entreprises. 102 Annexe 1 : Liste des compétences nécessaires pour la réalisation des projets miniers du PSGE Niveau ouvriers qualifiés Bâtiment, gros œuvre et finition Logistique et transport Maçon gros œuvre finition Conducteur de poids lourds Ouvriers qualifiés du bâtiment génie civil : Conducteur véhicules légers Spécialiste coffrage en béton armé Façadier Transformation des métaux Peintre en bâtiment Tuyauteur industriel Installateur sanitaires (plombier) Chaudronnier Calorifugeur en tôlier en isolation Génie civil, routes et voies ferrées industrielle Conducteur de grues mobiles Soudeur à l’arc électrique enrobé et TIG Conducteur de pelle hydraulique et chargeuse- Soudeur semi-automatique MIG MAG et fil pelleteuse fourré Monteur d’échafaudages Froid & climatisation Construction métallique Monteur dépanneur frigoriste et Monteur levageur climatisation Monteur assembleur en construction soudée Réparation des véhicules et engin Equipement électrique Mécanicien première maintenance Électricien d’équipement industriel Mécanicien automobile 103 Électricien du bâtiment Monteur de réseaux électriques aéro- souterrains Électricien monteur câbleurs Mécanicien réparateur d’engins de chantier Niveau techniciens et techniciens supérieurs Bâtiment, gros œuvre et finition Froid & climatisation Chef d’équipe gros œuvre Technicien d’intervention et de maintenance Métreur bâtiment et génie civil en conditionnement d’air Conducteur de centrale à béton Réparation des véhicules et engins Chef d’équipe finition Carrossier réparateur Plaquiste Électricien automobile Carreleur Mécanicien réparateur de matériel ferroviaire Génie civil, route et vous ferrées Mécanicien réparateur de véhicules poids lourd Chef d’équipe génie civil Technicien reconstructeur de moteurs Métreur génie civil Technicien supérieur d’étude en construction thermiques et d’organes métallique Logistique et transport Bois Cariste entrepôt Charpentier poseur bois Agent magasinier Menuisier d’agencement Conducteur d’engins ferroviaires Production industrielle Equipements électriques Chef d’équipe d’opérateurs Technicien de bureau d’études en électricité Transformation des métaux Technicien d’études en chaudronnerie et tuyauterie industrielle Les spécialistes Il s’agit de compétences mobilisées, soit de manière ponctuelle, soit en quantités limitées. Les métiers qui seront recherchés peuvent être classés en 8 secteurs Transformation des métaux Bâtiment, gros œuvre et finitions Chef de chantier en chaudronnerie et Conducteur de travaux et ingénieur bâtiment tuyauterie industrielle Chef de chantier gros œuvre Technicien en soudage Technicien d’étude du bâtiment Technicien de contrôle non destructif Constructeur en thermique industrielle (briques Opérateur régleur sur fraiseuse réfractaires) Opérateur régleur sur tour Conducteur de grues à tour Plâtrier Logistique et transport Génie civil, routes et voies ferrés Technicien supérieur en transport Conducteur de travaux et ingénieur de génie logistique civil Chef de chantier génie civil Production industrielle Conducteur d’engins de profilage (niveleuse) Construction métallique Contremaître d’unité de production Chef d’équipe échafaudeur industrielle Bois Conducteur de scie automatisée, affûteur Exploitation de site minier Ébéniste Géologue contremaître de production de mines Source : Ministère des mines et de l’industrie 104 Annexe 2 : Quelques concepts et indicateurs du marché du travail Population en âge de travailler : Ensemble des personnes de 10 ans et plus. Emploi : Les personnes au travail se trouvent, durant les 7 derniers jours dans les catégories suivantes de salariés (personnes qui ont effectué un travail moyennant un salaire ou un traitement en espèces ou en nature) ou d’emploi non salarié (personnes qui ont effectué un travail en vue d’un bénéfice ou d’un gain familial, en espèces ou en nature). Les personnes n’ayant pas effectué de travail durant la période de référence, mais qui restent formellement attachées à leur travail (congé annuel, congé maladie, congé de maternité, congé technique, grève, formation professionnelle, etc.) sont considérées comme disposant d’un emploi. Actif occupé : Toute personne de 10 ans ou plus qui a travaillé ne serait-ce qu’une heure au cours des 7 jours précédant l’enquête, moyennant un salaire, un traitement en espèces ou en nature, un bénéfice, un gain familial, en espèces ou en nature est considérée comme active occupée. Chômeur  : Un chômeur est une personne de 10 ans ou plus, sans emploi (au sens précédent), à la recherche d’un emploi et disponible pour travailler. Inactif : Une personne qui n’est ni active occupée, ni chômeur. Population active : Ensemble des actifs occupés et des chômeurs. 105 Population inactive : Ensemble des inactifs. Taux d’activité : Rapport des actifs occupés sur la population en âge de travailler. Taux de chômage : Rapport des chômeurs sur la population active. Pluriactif : Une personne qui exerce plus d’un emploi. Migration : Changement de la résidence habituelle, pour une durée de séjour minimale conventionnelle. Migrant : Individu qui effectue une migration, par opposition au non migrant qui n’a jamais fait de changement de résidence selon les critères retenus. Contrat de travail : Convention, écrite ou orale, par laquelle un salarié met son activité au service d’un employeur en échange d’un salaire. Licenciement : Rupture, à l’initiative d’un employeur, d’un contrat de travail à durée indéterminée, ou rupture avant terme pour un contrat à durée déterminée 106 Références bibliographiques 1. Agence Française Développement (AFD), Rapport d’état du système éducatif gabonais, avril 2012. 2. Banque Africaine de Développement, Fonds Africain de Développement, République Gabonaise. Etude sur la Diversification des sources de la Croissance Economique, novembre 2008. 3. Banque Africaine de Développement (BAD), République Gabonaise. Etude économique et sectorielle développement du secteur privée, 2010. 4. Banque mondiale, République du Congo (2011) : Etude sur la Croissance et l’Emploi : de la croissance sans emploi à la croissance inclusive. Département Réduction de la Pauvreté et Gestion Economique 3 ; Région Afrique. 5. Banque mondiale. La pauvreté dans une économie de rente. Rapport sur le Gabon, volume 1 : Résumé ; volume 2 : rapport principal, 19 mars 1997. 6. 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