VU ED ’E NS 72975 EM BL E MENA DEVELOPMENT REPORT Inclusion et résistance aux chocs Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Joana Silva, Victoria Levin, Matteo Morgandi LA BANQUE MONDIALE Inclusion et résistance aux chocs Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Joana Silva Victoria Levin Matteo Morgandi SEPTEMBRE 2012 This booklet contains the overview from the forthcoming book, Inclusion and Resilience: The Way Forward for Social Safety Nets in the Middle East and North Africa (DOI: 10.1596/978- 0-8213-9771-8), published by the World Bank. © 2012 International Bank for Reconstruction and Development / The World Bank 1818 H Street NW, Washington DC 20433 Telephone: 202-473-1000 Internet: www.worldbank.org Some rights reserved This work is a product of the staff of The World Bank with external contributions. Note that The World Bank does not necessarily own each component of the content included in the work. The World Bank therefore does not warrant that the use of the content contained in the work will not infringe on the rights of third parties. The risk of claims resulting from such infringement rests solely with you. The �ndings, interpretations, and conclusions expressed in this work do not necessarily reflect the views of The World Bank, its Board of Executive Directors, or the governments they represent. The World Bank does not guarantee the accuracy of the data included in this work. The boundaries, colors, denominations, and other information shown on any map in this work do not imply any judgment on the part of The World Bank concerning the legal status of any territory or the endorsement or acceptance of such boundaries. Nothing herein shall constitute or be considered to be a limitation upon or waiver of the privileges and immunities of The World Bank, all of which are speci�cally reserved. 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Perspectives: comment rendre l’assistance sociale plus efficace et novatrice au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ? 41 Annexe A.1 Description des données utilisées 49 Références 51 iii Remerciements L e présent rapport est le fruit de la collaboration au sein d’une équipe dirigée par Joana Silva et comprenant Victoria Levin et Matteo Morgandi (auteurs prin- cipaux), Mohamad Alloush (gestion et analyse de données), Facundo Cuevas, Tarsicio Castañeda et Carole Abi Nahed Chartouni. Par ailleurs, Victoria Levin et Facundo Cuevas ont appuyé la coordination du projet à diverses étapes. Facundo Cuevas a également aidé à la mobilisation des fonds pour la réalisation du sondage MENA SPEAKS et de l’expérience Jordan Gives. Le rapport a béné�cié des contri- butions pertinentes et des orientations de Bénédicte de la Brière, Ruslan Yemtsov, Karla Hoff, et Hana Brixi à différentes étapes. Amy Gaulam et Mary Anderson ont assuré l’édition du rapport. Les documents de référence ont été écrits par Tarsicio Castañeda, Facundo Cue- vas, Abhishek Gupta, Mohamad Alloush, Carole Abi Nahed Chartouni, Yohana Dukhan, Paul B. Siegel, et Quentin Wodon. Anne Hilger, Rania Atieh, Yohana Dukhan, Haneen Sayed, Samira Hillis, Sherine Al-Shawarby, Dorothee Chen, Eze- quiel Molina, Lillian Frost, Maaouia Ben Nasr, Sébastian Trenner, Hala Ballout, Kristen Himelein, et Yasmeen Tabbaa ont aussi contribué utilement à ce rapport. Le rapport a béné�cié de consultations approfondies. Nous tenons particulièrement à remercier les représentants des gouvernements, milieux universitaires, de la so- ciété civile, des ONGs, et des OSC d’Algérie, d’Arabie Saoudite, de Bahreïn, de la Cisjordanie et Gaza, des Emirats Arabes Unis, d’Irak, de Jordanie, du Koweït, du Liban, du Maroc, d’Oman, de Tunisie, de la Commission Economique et Sociale des Nations-Unies pour l’Asie de l’Ouest (CESAO) et de l’Organisation Interna- tionale du Travail pour leur participation aux ateliers régionaux (à Beyrouth, du 13 au 14 janvier 2012, à Tunis, du 16 au 17 janvier, 2012, et à Mascate du 16 au 17 avril 2012), ainsi qu’aux consultations nationales en Jordanie (10 janvier 2012). Nos remerciements s’adressent également à l’équipe d’élaboration de la stratégie de protection sociale de la Banque mondiale pour la Région MENA, et en particulier à Rebekka Grun (chef d’équipe), Surat Nsour, Victoria Levin, Sébastian Trenner, Rania Atieh, et Nicole La Borde pour la co-organisation desdits ateliers avec notre équipe. v Nous remercions Gallup, et notamment, Krista Hoff, Cynthia English et Joe Daly, pour la pertinence de leurs conseils, la mise en œuvre et l’administration efficace des sondages MENA SPEAKS. Nous aimerions remercier le Centre des Etudes Straté- giques de l’université de Jordanie, et particulièrement Musa Shteiwi, Yasmina Suley- man et Walid Alkhatib, pour leurs judicieux conseils et pour la mise en œuvre de l’expérience comportementale Jordan Gives. Nous remercions les membres du comité d’évaluation par les pairs composé de Mar- garet Grosh, Harold Alderman, et Lynne D. Sherburne-Benz pour leurs précieux conseils et Lire Ersado pour ses commentaires avisés. Nous avons apprécié la pers- picacité des discussions et les observations de Jehan Arulpragasam, Trina Haque, David Coady, Haneen Sayed, Samira Hillis, Ghassan N. Alkhoja, Jeffrey Waite, Nadine Poupart, Alaa Mahmoud Hamed, Surat Nsour, Mira Hong, Rasmus Helt- berg, Umar Serajuddin, Hassan Zaman, William Stebbins, May Wazzan, Phillippe Leite, Nidhal Ben Cheikh, Mehdi Barouniand, Patrick Canel et Paolo Verme. Ce travail a reçu l’appui de l’Initiative du monde Arabe et du Fonds �duciaire pour le Développement écologiquement et socialement durable (TFESSD) – Guichet Protection sociale. Ce rapport a en�n béné�cié de l’orientation stratégique de Steen Jorgensen, Caroline Freund, Yasser El-Gammal, et Roberta Gatti. vi Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Abréviations ALC Amérique Latine et Caraïbes AS Assistance sociale CCG Conseil de Coopération du Golfe EAC Europe et Asie centrale FMI Fonds Monétaire International UNHCR Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés HIMO Programme à haute intensité de main d’œuvre IDM Indicateurs du Développement mondial IEG Groupe d’Evaluation Indépendante MENA Moyen-Orient et Afrique du Nord MENA SPEAKS (Social Protection Evaluation of Attitudes, Knowledge, and Support Protection sociale: Evaluation des attitudes, connaissances et adhésion) OSC Organisation de la société civile ONG Organisation non gouvernementale PAS Programme(s) d’assistance sociale PIB Produit intérieur brut PMT Score de ciblage « Proxy Means Test » PNUD Programme des Nations-Unies pour le Développement PPA Parité du pouvoir d’achat S&E Suivi évaluation TCE Transfert conditionnel en espèces UNRWA Office de secours et de travaux des Nations Unies USD Dollar américain vii Synthèse L es transitions constituent des moments déterminants pour les systèmes de protection sociale. La plupart des programmes d’assistance sociale (PAS)1 à travers le monde ont été introduits au cours de périodes de transition (telles que l’indépendance après l’effon- drement de l’ex-Union soviétique, la décentralisation en Indonésie et les changements politiques au Brésil et au Portugal) et ont été mainte- nus par la suite. Lorsque la capacité des PAS à répondre aux aspirations des populations pour une plus grande inclusion sociale et un meilleur accès aux opportunités économiques est examinée de près, les questions suivantes se posent: t Quel devrait être le niveau optimal de redistribution, et à quelles conditions ? t Quels sont les objectifs de base et les priorités des PAS? t Quelle devrait être l’envergure et la portée des systèmes de protec- tion sociale ? t Comment peut-on réformer les systèmes existants pour atteindre ces objectifs ? Le printemps arabe a souligné la nécessité d’une inclusion sociale et d’un nouveau contrat social. Traditionnellement, les pays de la région s’appuyaient sur un système de redistribution qui protégeait de la mi- sère par des subventions universelles, qui garantissaient aux populations un accès abordable au carburant et aux denrées alimentaires, indépen- damment de leurs besoins. Les gouvernements ne pouvaient répondre aux crises que par l’augmentation des subventions, ou par une plus 1 Les programmes d’assistance sociale (PAS) sont dé�nis comme des transferts non contributifs qui ciblent les populations pauvres et vulnérables. Les PAS comprennent l’aide aux revenus, les programmes d’emplois temporaires, les services qui renforcent le capital humain et facilitent l’accès à la �nance des populations pauvres et vulnérables. ix grande générosité en matière d’emplois publics. Malgré sa popularité, ce système s’avère difficilement soutenable et, surtout, il n’a pas permis aux populations de gagner en autonomie. Les PAS ont un rôle à jouer dans la résolution des principaux problèmes de déve- loppement humain que connait la région. Une croissance continue et la réduction de la pauvreté, ainsi que le développement d’une classe moyenne au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, vont souvent de pair avec la pauvreté chronique et une plus grande vulnérabilité. Les enfants et les populations rurales font face à un risque élevé de pauvreté, qui se traduit par des résultats décevants en termes de développement humain. En République arabe d’Egypte, au Maroc et en République arabe de Syrie, plus d’un quart des enfants du quintile de revenu inférieur souffrent de malnutrition chronique. En Egypte et au Maroc, les enfants âgés de 16–18 ans du quintile le plus pauvre sont plus susceptibles d’abandonner l’école que de poursuivre leur scola- rité. Les faibles niveaux d’accumulation du capital humain comportent un risque plus élevé de chômage ou de précarité de l’emploi, avec des chances de promotion limitées. Lorsqu’ils sont bien conçus, les PAS peuvent contribuer à briser le cycle de pauvreté intergénérationnelle, en aidant les familles à maintenir leurs enfants à l’école et en bonne santé. Les PAS et l’accroissement des services sociaux peuvent également permettre de résoudre le problème des poches de pauvreté dans les bidon- villes et les zones rurales en favorisant la demande des services de �lets sociaux et en développant des biens communautaires. En plus des personnes en situation de pau- vreté chronique, une partie importante de la population de la région oscille autour du seuil de pauvreté et présente une faible résistance aux chocs. 15 à 17 pourcent des égyptiens, irakiens, syriens et yéménites, et 10 pourcent des marocains, ont des niveaux de consommation par habitant qui ne dépassent pas le seuil de pauvreté de USD 2 par jour (en parité de pouvoir d’achat) de plus de USD 0.50. Si les PAS permettant d’amortir les effets des chocs ne sont pas mis en place, les ménages vulnérables seront confrontés à une forte probabilité de perte irréversible de capital humain en cas de choc. En plus des couches pauvres et vulnérables, certains groupes sociaux (tels que les femmes et les personnes handicapées) font face à des obstacles particuliers pour accéder aux services sociaux et au marché du travail. En complé- ment de services améliorés, les PAS peuvent contribuer à diminuer ces obstacles. Le moment est venu pour une réforme des PAS au Moyen Orient et en Afrique du Nord. La plupart des dépenses de la région en matière de PAS portent sur les subventions de l’énergie, en détriment d’interventions plus efficaces. Les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord dépensent, en moyenne, 6 pourcent de leur produit intérieur brut (PIB) en subventions. Les subventions du carburant repré- sentent à elles seules 4.6 pourcent du PIB en moyenne. Par opposition, d’autres PAS dans la région sont sous-�nancés – recevant en moyenne moins de 0.7 pourcent du PIB, et fragmentés en de nombreux petits programmes présentant des redondances. La plupart des couches pauvres et vulnérables est ainsi laissée pour compte: dans x Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord le quintile le plus pauvre deux personnes sur trois ne béné�cient pas des PAS, hors subventions. En fait, la couverture du quintile inférieur dans la région est inférieure à la moitié de la moyenne mondiale. En outre, un ciblage inadéquat se traduit par des fuites importantes des allocations des PAS vers les non pauvres, utilisant ainsi des ressources qui pourraient être utilisées pour réduire la pauvreté et améliorer la distribution de l’assistance sociale. Le programme moyen d’assistance sociale dans la région, hors subvention, distribue seulement 23 pourcent du total de ses alloca- tions au quintile inférieur. Pour comparaison, le chiffre est de 59 pourcent pour les programmes comparables en Amérique Latine et aux Caraïbes (ALC), ou en Europe de l’Est et en Asie centrale (EAC). Bien que ces subventions (et surtout celles portant sur le carburant) soient inefficaces et souvent inefficientes par rapport aux autres interventions de PAS, en raison de leur ampleur, de nombreuses personnes en dépendent pour sortir de la pauvreté. A�n d’évoluer vers des PAS efficaces, �ables et équitables, une réflexion approfondie impose, non seulement sur les aspects tech- niques de la réforme, mais aussi, et surtout, sur les questions sensibles liées à l’éco- nomie politique de la réforme. Les considérations d’économie politique ont été l’une des raisons majeures du blocage ou des retards de la réforme des PAS dans certains pays du Moyen- Orient et d’Afrique du Nord ; de nouveaux éléments portent à croire qu’une meilleure information, une meilleure conception et une plus grande transpa- rence des PAS peuvent permettre à la région de progresser. Les populations de la région attendent des pouvoirs publics plus efficaces et proposent des PAS ciblant les pauvres. Des récents sondages d’opinion réalisés en Egypte, en Jordanie, au Liban et en Tunisie dans le cadre de la présente étude (voir encadré ES.1) révèlent que près de 90 pourcent de la population considère l’état comme le principal fournisseur des PAS. Toutefois, en Egypte et au Liban, moins d’un tiers des sondés trouvaient les politiques PAS actuels efficaces, tandis qu’en Jordanie et en Tunisie le niveau d’insa- Encadré ES.1. A l’écoute du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord Les activités menées dans le cadre de la préparation du présent rapport ont touché plus de 4,000 citoyens de la région du Moyen-Orient et Afrique du Nord à travers un sondage représentatif sur le plan national MENA SPEAKS (Social Protection Evaluation of Attitudes, Knowledge, and Support – Protection sociale: Evaluation des attitudes, connaissances et appui) qui a été réalisé en Egypte, en Jordanie, au Liban et en Tunisie en collaboration avec Gallup. En outre, dans le cadre de ce rapport plus de 400 personnes ont été interrogées à travers un jeu de comportement (Jordan Gives) qui a permis de recueillir des informa- tions sur les préférences déclarées en matière de redistribution, à travers des échanges réels, à partir d’un échantillon national représentatif de la classe moyenne en Jordanie. A travers des ateliers de consultation, la préparation du rapport a également impliqué plus de 250 re- présentants de gouvernements, des universitaires, la société civile, des organisations non gouvernemen- tales (ONGs), des organisations communautaires d’Algérie, d’Arabie Saoudite, de Bahreïn, de Cisjordanie et Gaza, des Emirats Arabes Unis, d’Irak, de Jordanie, du Koweït, du Liban, du Maroc, d’Oman, de Tunisie, et des bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux (y compris l’Organisation Internationale du Travail et la Commission Economique et Sociale des Nations Unies pour l’Asie de l’Ouest). Synthèse xi tisfaction était plus élevé chez les pauvres que chez les riches. Les sondages ont éga- lement montré une couverture inégale des PAS, et, dans une certaine mesure, leur caractère régressif. En Egypte, 23 pourcent de tous les répondants, en particulier les pauvres, ne connaissaient aucun des PAS existants, tandis qu’au Liban et en Tunisie les riches avaient plus de chances que les pauvres de connaître un béné�ciaire des PAS. En dépit de leur coût important, les subventions du carburant sont connues par moins de 50 pourcent des sondés dans les quatre pays. L’opposition à la réforme des subventions varie fortement selon le pays (elle est plus élevée en Egypte et plus faible au Liban), et en termes de priorités. Ainsi, par exemple, les réformes de sub- ventions les plus acceptées sont, respectivement : l’essence en Egypte, le tabac au Liban, et le diesel en Jordanie et en Tunisie. En plus des sondages d’opinion, cette étude a mené une expérience comportementale (Jordan Gives) auprès d’un échantil- lon national représentatif de la classe moyenne en Jordanie, en collectant des infor- mations sur les préférences en matière de redistribution aux pauvres, en simulant des arbitrages réels concernant l’utilisation de bons d’essence. Cette expérience a montré non seulement que la classe moyenne est en faveur de la redistribution aux pauvres, mais surtout que ce soutien varie en fonction de la conception de l’assistance et de la crédibilité du ciblage. Au total, ces activités donnent à penser que : a) beaucoup reste à faire pour accroître le soutien à la réforme, à travers la sensibilisation sur l’existence et le coût réel des subventions ; et b) l’adaptation de la conception des PAS peut contribuer au changement de l’opinion publique en faveur de la réforme des PAS. Par exemple, dans tous les pays à l’exception du Liban ceux en faveur de la réforme des subventions ont opté pour des transferts en espèces ciblés vers les pauvres, par rapport à d’autres compensations plus générales ; dans l’ensemble, les populations ont montré une nette préférence pour les PAS ciblés vers les pauvres (plutôt que vers des groupes spéci�ques), et qui offrent des allocations en espèces (plutôt qu’en nature). L’expérience récente a démontré la faisabilité de la réforme des PAS au Moyen- Orient et en Afrique du Nord. Plusieurs exemples de réformes réussies ont eu des résultats positifs importants : t Un registre uni�é de tous les PAS a été créé en Cisjordanie et Gaza. Celui-ci a consi- dérablement amélioré la précision du ciblage et la capacité de réponse aux crises. t Lors de la crise économique mondiale, la République du Yémen a apporté une réponse rapide à travers un programme à haute intensité de main d’œuvre (HIMO), pour combler l’écart de consommation des couches pauvres et vulné- rables, tout en créant des biens communautaires. Des réformes importantes du principal programme de transfert monétaire, le Fonds d’action sociale, ont été mises en œuvre simultanément. Celles-ci incluaient l’amélioration du ciblage de la pauvreté reposant sur une formule de véri�cation indicative des biens (PMT), le renforcement des capacités de prestations de services, et la mise en place d’un nouveau cadre juridique et politique. xii Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord t Le programme Tayssir au Maroc — un programme pilote de transferts condition- nels en espèces visant à promouvoir la scolarisation et ciblant les zones à forte inci- dence d’abandon scolaire et de pauvreté — a eu un impact positif important sur la réduction des abandons scolaires en zones rurales, en particulier chez les �lles. t Djibouti a adopté une conception novatrice pour un programme HIMO destiné aux jeunes et aux femmes. t Le Liban a récemment lancé une base de données de ciblage (Programme natio- nal de ciblage de la pauvreté), jetant ainsi les bases d’un PAS efficace. t La Jordanie a pris des mesures importantes pour rééquilibrer l’écart entre les PAS et les subventions et développer une stratégie de ciblage et de réduction de la pauvreté. A la lumière des défis auxquels les personnes pauvres et vulnérables font face dans la région, et de l’état actuel des PAS, le chemin vers des PAS plus efficaces et novateurs appelle des actions dans plusieurs domaines. Les principaux dé�s en matière de développement humain qui subsistent dans la région, et la mauvaise per- formance des PAS existants appellent des PAS plus efficaces et novateurs favorisant l’inclusion et la aux chocs. Bien qu’il n’y ait pas une solution unique, de meilleurs résultats peuvent être obtenus en agissant sur les quatre points suivants : t Améliorer l’impact des PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, y com- pris leur effet sur la pauvreté actuelle et future. Actuellement, la plupart des PAS, hors subventions, dans la région ont une incidence limitée sur la pauvreté et sur l’inégalité du fait de la combinaison d’une faible couverture (avec des pratiques de ciblage inefficaces) et de l’insuffisance, voire l’inexistence, des systèmes de suivi évaluation (S&E). Par conséquent, les mesures suivantes pourraient être considérées : Z Donner la priorité aux interventions qui favorisent l’investissement dans le capi- tal humain. Les PAS devraient être adaptés pour faire face aux problèmes de développement humain observés, tels que la malnutrition infantile et l’abandon scolaire. Ceci pourrait être réalisé soit par : a) l’élargissement des programmes de transferts conditionnels en espèces (TCE) réussis dans la région (ex. le programme Tayssir au Maroc) et des programmes HIMO (ex. le Fonds d’action sociale au Yémen) ; b) le réajustement de la conception des programmes existants pour les rendre plus efficaces pour les enfants et les femmes (à l’instar des programmes HIMO et nutrition de Djibouti) ; ou c) la création de nouvelles interventions visant à combler les lacunes, sur la base des bonnes pratiques à travers le monde, mais en adaptant leur conception, a�n d’autonomiser les populations pauvres et vulnérables. Compte tenu de la réticence pour les transferts de PAS conditionnels, observée dans les son- dages MENA SPEAKS, une stratégie d’information et de communication sur les avantages de cette approche devrait précéder la mise en œuvre de programmes de TCE dans la région. Synthèse xiii Z Améliorer le ciblage des couches pauvres et vulnérables. L’amélioration du ci- blage peut réduire les coûts, assurer l’équité, permettre aux PAS de jouer le rôle d’assurance, et en accroître l’efficacité. La plupart des programmes de la région restent basés sur le ciblage par catégorie ou zone géographique, alors que l’efficacité de ces méthodes n’est avérée que dans des contextes de concentration de la pauvreté. Dans le même temps, les citoyens interrogés dans le cadre du sondage MENA SPEAKS ont indiqué une préférence nette pour le ciblage basé sur la pauvreté, par opposition au ciblage par catégorie. Un mouvement important a déjà été amorcé dans la région (comme en Cis- jordanie et Gaza, en Irak, en Jordanie, au Liban et au Yémen) en faveur du ciblage basé sur la pauvreté. Les résultats obtenus dans ces pays ont démontré la puissance de telles réformes et dé�ni la voie à suivre. Z Accorder une plus grande attention aux résultats des PAS à travers le S&E et la responsabilité sociale. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, le renforce- ment du S&E des PAS peut permettre d’affecter les ressources budgétaires entre les programmes, d’assurer le suivi des opérations au jour le jour et des résultats des interventions. Le S&E s’est révélé particulièrement efficace lorsque les décisions budgétaires et la restructuration des programmes étaient fondées sur les résultats de l’évaluation et les données empiriques. Ce fut le cas, par exemple, en Cisjordanie et Gaza et au Yémen. En outre, l’introduc- tion de bons systèmes de responsabilité sociale peut améliorer l’efficacité et la responsabilité et combattre la corruption. Z Faire appel aux autres parties prenantes (les citoyens, ONGs, OSCs, le secteur privé, et les organisations à but non lucratif ). La sensibilisation des citoyens aux PAS existants est faible et biaisée vers les riches. L’inscription sur demande suppose la connaissance de l’existence du programme, des critères d’éligi- bilité et des procédures de candidature. Des campagnes de communication globales sont nécessaires pour informer les couches pauvres et vulnérables de l’existence des �lets sociaux de sécurité à leur disposition. En outre, faire participer un plus large éventail de parties prenantes (p.ex. les ONGs, OSCs, le secteur privé, et les organisations à but non lucratif ) au �nancement et à la mise en œuvre des PAS permettrait de mettre à pro�t leurs ressources �nancières et humaines. t Mettre en place une infrastructure de PAS fiable, mais flexible, pouvant ser- vir en période normale comme en période de crise. Un système de PAS efficace peut permettre aux populations d’amortir les effets des chocs idiosyncratiques et systémiques. La récente crise économique mondiale a souligné la faible capacité des PAS existants au Moyen-Orient et en Afrique du Nord à remplir cette fonc- tion. Promouvoir la résistance des ménages aux chocs par les PAS nécessite une bonne infrastructure administrative. La mise en place d’une telle infrastructure avant la survenue d’une crise permet de développer plus rapidement et plus efficacement, des actions correctives et d’atténuation telles que l’augmentation des allocations en faveur des plus vulnérables, ou l’extension de la couverture, xiv Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord améliorant ainsi la résistance. En particulier, la mise en place d’une meilleure infrastructure de PAS pourrait mener à : Z La création de registres unifiés des bénéficiaires pouvant servir au ciblage de multiples programmes. En temps normal, les registres uni�és peuvent ré- duire les coûts et faciliter la cohérence et la convergence, car tous les agents travaillent sur la même base de données. En temps de crise, les registres uni- �és peuvent servir à décaisser rapidement des allocations supplémentaires pour les populations cibles, ou à élargir la couverture en adaptant les critères d’éligibilité. La Cisjordanie et Gaza est un exemple de bonne pratique à cet égard dans la région. Z L’utilisation de mécanismes efficaces de prestations de services. En période nor- male, les systèmes modernes de distribution des allocations sont impor- tants pour réduire les coûts administratifs et les fuites en faveur des non béné�ciaires, éviter la corruption, et rendre le transfert des paiements aux béné�ciaires plus rapide et flexible. L’utilisation effective des technologies modernes, telles que les cartes à puces, les paiements par téléphone, et les paiements aux guichets des établissements bancaires, facilitent une réponse rapide pendant les crises. t Consolider les PAS fragmentés. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, les programmes de transferts directs (en nature ou en espèces) sont souvent de taille modeste et très fragmentés. L’expérience internationale démontre que la méthode consistant à se limiter à quelques programmes, spéci�quement conçus pour atteindre les différents segments des couches pauvres et vulnérables, peut contribuer à résoudre les problèmes actuels de vulnérabilité et de lacunes en matière d’assistance sociale, en augmentant à la fois la couverture (actuellement en dessous de 20 pourcent des pauvres dans la plupart des pays) et les alloca- tions (actuellement à environ 5–10 pourcent de la consommation des pauvres). Quelques pays de la région (ex. la Cisjordanie et Gaza et le Maroc) ont com- mencé à réformer leurs PAS dans ce sens. Pour réaliser des progrès, les gouver- nements peuvent commencer par l’identi�cation des PAS et par l’établissement d’un inventaire des PAS incluant notamment les objectifs du programme, les critères d’éligibilité, et le type d’allocations. Le Maroc a récemment entrepris ce type d’analyse. Forts de telles analyses, les pouvoirs publics peuvent identi�er des programmes susceptibles d’être développés ou consolidés, et formuler une stratégie pour la mise en œuvre de la réforme. t Rééquilibrer le financement et les priorités des systèmes d’assistance sociale, en se concentrant sur les programmes ciblés plutôt que sur les subventions. Les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord dépensent une part importante de leurs �nancements pour PAS en termes de PIB en subventions de l’énergie, et une part faible pour les PAS ciblés. La réduction des subventions coûteuses et régressives (surtout les subventions du carburant) diminuerait les déséquilibres budgétaires et permettrait de libérer des ressources pour d’autres instruments de �let de sécurité. En particulier, cela pourrait entraîner : Synthèse xv Z L’augmentation des dépenses et l’amélioration de la couverture des PAS, hors sub- ventions, pour protéger de la misère. Les réformes réussies de subventions ont démontré qu’il était important de gagner la con�ance des populations sur la capacité des pouvoirs publics à fournir une compensation juste et �able. A la lumière des informations fournies par les sondages MENA SPEAKS et l’expérience Jordan Gives, l’une des étapes essentielles vers la réforme com- plète des subventions serait de mettre en place des PAS efficaces et inclusifs. Z La réforme des subventions des prix à travers des réformes systématiques ou in- ternes. Le séquençage des réformes sensibles comme celle des subventions universelles des prix est crucial pour leur succès. A�n de gagner en crédibi- lité, les pouvoirs publics pourraient commencer par : — Améliorer le ciblage (p.ex. au moyen d’une différenciation du marketing et de l’offre, ce qui pourrait entraîner l’auto ciblage, comme en Tunisie), diminuer la couverture de la subvention (p.ex. tarifs sociaux pour l’élec- tricité), et réduire les fuites dans la chaîne de distribution ; — Identifier les subventions les plus sensibles et se concentrer plutôt sur les sub- ventions les plus régressives. Selon les sondages MENA SPEAKS, les sensi- bilités étaient les plus fortes concernant la réforme des subventions pour l’huile de cuisine en Egypte, le pain au Liban et en Tunisie, et l’élec- tricité en Jordanie. Ces subventions pouvaient n’être reformées qu’après la démonstration par les pouvoirs publics de leur capacité à réformer les subventions moins sensibles. Les �nancements alloués à la subven- tion du carburant représentent plus de trois fois le montant destiné aux subventions alimentaires, la réforme des subventions non alimentaires s’avère plus facile. Lors des sondages MENA SPEAKS, les citoyens ont indiqué qu’ils choisiraient le tabac au Liban, le carburant en Egypte, et le diesel en Jordanie et en Tunisie s’il leur fallait choisir un produit dont les subventions devraient être réformées. — Impliquer les citoyens dès le début dans le dialogue sur les allocations sociales et les sensibiliser à travers des campagnes d’information. Les gouvernements peuvent se servir des résultats des sondages MENA SPEAKS pour ini- tier un dialogue sur le type d’allocations souhaitées dans leurs pays. Les résultats disponibles montrent que les populations du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord préfèrent des compensations en espèces qui ciblent uniquement les pauvres (Egypte, Jordanie et Tunisie), et éventuellement associée à l’investissement de l’épargne de la réforme des subventions en faveur de l’éducation et de la santé (Liban) Le processus de réforme est différent pour chaque pays de la région, compte tenu du stade de développement actuel de chacun et des principaux défis des PAS existants. Les économies du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord se trouvent à différents stades d’avancement en matière de développement humain et de réformes xvi Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord des PAS. Les deux pays les plus avancés en termes de réforme des PAS sont la Cis- jordanie et Gaza et la République du Yémen, présentant des résultats de dévelop- pement humains respectivement moyen et faible (selon les mesures de l’Indice de développement humain du Programme des Nations unies pour le développement). Ces pays ont pu mettre en place des interventions de PAS réussies (à travers l’établis- sement d’un registre uni�é en Cisjordanie et Gaza, et la réforme du Fonds d’action sociale au Yémen) qui permettent de répondre à leurs besoins spéci�ques. Le Ba- hreïn, Djibouti, la Jordanie, le Liban, et le Maroc ont fait des avancées signi�catives en matière de réforme des PAS, à l’instar du programme HIMO et nutrition à Dji- bouti, d’un TCE pilote au Maroc, des réformes dans le système des subventions à Bahreïn et en Jordanie, et d’une base de données de ciblage au Liban. D’autres pays envisagent actuellement de nouveaux programmes ou des réformes de leurs PAS. Dans chaque pays, l’approche à adopter inclut des mesures à court et à moyen termes, avec des objectifs complémentaires qui se renforcent mutuellement. Sur le court terme, les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord peuvent commencer à démontrer de meilleurs résultats en utilisant les PAS existants mais en adaptant leur conception, en établissant des registres uni�és, ou en expérimentant de nou- veaux programmes pilotes, tels que les TCE et « HIMO plus ». Sur le moyen terme, l’accent pourrait être progressivement mis sur les réformes qui nécessitent une plus grande capacité avérée, telle que le perfectionnement de l’infrastructure des PAS et une réforme globale des subventions. Faire participer un large éventail de par- ties prenantes à un dialogue inclusif et ouvert peut faciliter les réformes envisagées et promouvoir un rôle d’autonomisation pour les programmes d’assistance sociale dans la région. Synthèse xvii Vue d’ensemble Introduction Les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ont actuellement une occasion unique d’améliorer leurs programmes d’assistance sociale (PAS)2 afin de mieux promouvoir l’inclusion, les moyens de subsistance et la résistance aux chocs. Un consensus se dégage sur le plan international sur la capacité des PAS à couverture efficace à pro- mouvoir des opportunités économiques et à permettre aux populations vulnérables de lutter contre la pauvreté. Environ 80 pourcent des pays en développement prévoient actuellement d’étendre ou de renforcer leurs PAS (Banque mondiale 2012a), et ceux du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ne font pas exception. Historiquement, les transi- tions et les crises ont souvent représenté une opportunité pour le ren- forcement des PAS. A travers le monde, 70 pourcent des PAS ont été introduits après une transition importante (par exemple l’indépendance après l’effondrement de l’ex-Union soviétique, la transition du Népal vers la démocratie, la décentralisation en Indonésie et les changements politiques au Brésil et au Portugal). Plus récemment, la crise �nancière mondiale a poussé des dizaines de pays à créer de nouveaux PAS, à étendre les programmes existants, ou encore à améliorer l’ensemble des systèmes administratifs pour promouvoir la gouvernance et l’efficacité des programmes (IEG, 2011). Le printemps arabe a souligné la nécessité d’une inclusion sociale et d’un nouveau contrat entre les états et les populations. Traditionnel- lement, de nombreux gouvernements de la région avaient tendance à 2 Les programmes d’assistance sociale (PAS) sont dé�nis comme des transferts non contributifs qui ciblent les populations pauvres et vulnérables. Les PAS comprennent l’aide aux revenus, les programmes d’emplois temporaires, les services qui renforcent le capital humain, et élargissent l’accès aux �nance- ments parmi les populations pauvres et vulnérables. 1 s’appuyer sur un système de redistribution qui favorisait : a) un niveau de vie mini- mum en accordant des subventions universelles aux biens de consommation cou- rante, b) des emplois publics en réponse à la demande d’emplois stables des classes moyennes et supérieures. En période de crise, les gouvernements s’appuyaient sur les mêmes options politiques. Le système de subvention, qui ne requiert pas de ciblage, bien que populaire, n’a pas atteint les résultats escomptés des PAS de manière effi- cace et efficiente. Pendant le printemps arabe, les demandes d’une plus grande inclu- sion sociale et d’un meilleur accès aux opportunités économiques ont représenté un tournant décisif pour la région en général, et nécessitent un examen approfondi du rôle des PAS. Le défi au Moyen-Orient et en Afrique du Nord aujourd’hui est d’investir dans des PAS efficaces qui soient financièrement, politiquement et administrative- ment durables. Les PAS devraient être rigoureusement conçus et mis en œuvre pour promouvoir efficacement l’inclusion, les moyens de subsistance, et la résistance aux chocs, en s’assurant qu’ils atteignent les couches les plus vulnérables et leur per- mettent de développer leur capital humain. Pour des raisons de viabilité budgétaire, certains pays à travers le monde ont consolidé des programmes fragmentés pour se concentrer sur des interventions axées sur des opérations efficaces et rentables, liées à la création d’actifs. Dans le but de préserver une politique viable, certains pays ont conçu des programmes basés sur les opinions publiques en matière de pauvreté et de redistribution; ils ont atteint un niveau élevé de transparence, d’efficacité et d’impact, et ont tenu compte aussi bien de la demande d’inclusion des pauvres que du besoin d’équité de la classe moyenne. Pour assurer la durabilité administrative, certains pays ont dé�ni des responsabilités institutionnelles appropriées et des me- sures incitatives, tout en développant des systèmes de ciblage et de gestion efficaces, ainsi que des budgets administratifs. Une plani�cation et une conception efficaces peuvent permettre aux nouveaux PAS, et aux programmes réformés, d’atteindre les objectifs de durabilité. Objectifs du Rapport Le présent rapport vise à atteindre deux objectifs généraux : a) comprendre l’état actuel des PAS et évaluer leur efficacité à répondre aux nouveaux dé�s auxquels sont confrontés les couches les plus pauvres et les plus vulnérables dans la région, en rassemblant de nouvelles informations, données, et analyses spéci�ques par pays; b) ouvrir et enrichir un débat sur les potentielles options politiques pouvant per- mettre de rendre les PAS du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord plus efficaces et innovants. A cette �n, ce rapport tente de répondre aux quarte questions suivants: t Quels sont les principaux dé�s auxquels sont confrontés les populations pauvres et vulnérables du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord qui demandent une ré- forme des PAS? 2 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord t Les PAS de la région atteignent-ils leurs objectifs de promotion de l’inclusion sociale, de renforcement des moyens de subsistance et de résistance aux crises ? t Quelles sont les réformes de PAS attendues par les citoyens de la région ? t Quels types de politiques peut-on inclure dans le programme de réforme des PAS, et comment développer ces politiques pour une efficacité maximale ? Structure du Rapport t Le Chapitre 1 «Un cadre pour la réforme de l’assistance sociale» décrit et illustre les raisons du besoin croissant de réformes des PAS dans la région, et établit le cadre de réforme des PAS renouvelés. Il identi�e les principaux objectifs des PAS (pro- motion de l’inclusion sociale, des moyens de subsistance, et de la résistance aux chocs) et illustre la démarche utilisée dans certains pays de la région, et ailleurs, pour atteindre ces objectifs. t Le Chapitre 2  «Les principaux défis qui plaident en faveur de la réforme de l’assis- tance sociale» analyse les dé�s auxquels sont confrontés les ménages pauvres et vulnérables de la région sur lesquels les PAS devraient se concentrer en priorité. Deux grands groupes présentent un risque de pauvreté supérieur à la moyenne : les enfants et les populations des zones rurales ou moins développées. Ce cha- pitre examine ensuite les facteurs, tels les inégalités de chances et le manque d’accès aux services, qui risquent de perpétuer les mauvais résultats sur le plan du développement humain parmi les couches pauvres au sein de ces groupes. Il décrit également le problème de la vulnérabilité (c.-à-d. la proximité du seuil de pauvreté et le risque de basculer dans la pauvreté suite à un choc à court terme). Finalement, ce chapitre identi�e les groupes sociaux spéci�ques qui présentent un risque élevé d’exclusion de l’accès aux services et de l’emploi. t Le Chapitre 3 «La situation actuelle de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord » analyse les dépenses liées aux PAS et évalue différents aspects de la performance des PAS (notamment la couverture, le ciblage, la générosité, et l’impact sur la pauvreté et l’inégalité des PAS – subventions ou autres mesures) ; il établit des comparaisons entre ces performances et celles d’autres régions et pays et identi�e les faiblesses des systèmes existants. t Le Chapitre 4 « L’Economie politique des réformes de l’assistance sociale au Moyen- Orient et en Afrique du Nord : que veulent les citoyens ? » apporte de nouveaux arguments sur les préférences des citoyens en matière de redistribution et de conception des PAS, sur la base de données récemment collectées (sondage MENA SPEAKS et expérience comportementale Jordan Gives). Il explique comment prendre en compte les considérations d’économie politique dans la conception de nouveaux PAS dans la région. t Le chapitre 5 « Perspectives : comment rendre l’assistance sociale plus efficace et nova- trice au Moyen-Orient et en Afrique du Nord  ?  »  : propose un programme de réforme et une approche pour avancer, en s’appuyant sur l’expérience mondiale et sur les faits présentés dans les chapitres précédents. Vue d’Ensemble 3 Un cadre pour la réforme de 1 l’assistance sociale L es récentes transitions économiques et sociales au Moyen- Orient et en Afrique du Nord ont souligné la nécessité d’une plus grande inclusion sociale, du renforcement des moyens de subsistance et de la résistance aux chocs. Si la croissance soutenue de nombreux pays de la région a permis à certains de sortir de la pau- vreté, le progrès économique n’a toujours pas atteint de nombreuses familles qui font face à une pauvreté chronique, ou au risque de misère en raison du chômage, de handicap ou de maladie. En outre, de nom- breuses familles au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont vulné- rables aux chocs économiques, aux catastrophes naturelles et à d’autres crises, comme par exemple les crises politiques. En l’absence de PAS, les familles pauvres qui sont systématiquement incapables de subvenir à leurs besoins élémentaires ont tendance à perdre l’espoir d’échapper à la pauvreté; les enfants souffrant de malnutrition ont plus de chances de devenir des adultes pauvres ; et, conséquence des crises, les familles vulnérables sont susceptibles de faire face à des choix difficiles entre la survie immédiate et leur bien-être futur. En fait, l’inquiétude sur la situation économique est en hausse dans le Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Selon un sondage mon- dial de Gallup, en 2011, la part de la population en République arabe d’Égypte, en Jordanie et en Tunisie admettant avoir des difficultés à acheter de la nourriture était signi�cativement plus élevé qu’en 2009 (cf. �gure 1). Parallèlement, les citoyens de certains grands pays de la région ont exprimé une faible satisfaction à l’égard des efforts du gou- vernement pour aider les pauvres, comme indiqué sur la �gure 2. En aidant les pauvres et les plus vulnérables, les PAS peuvent créer un trem- plin pour aider les citoyens à préserver leur indépendance et pour être en mesure de pro�ter du progrès économique. Les PAS peuvent être des instruments importants dans les transi- tions économiques et sociales au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. La �gure 3 présente un cadre pour des PAS efficaces et respon- 5 sabilisants dans la région. Ainsi, les PAS peuvent promouvoir les trois objectifs sui- vants : t L’inclusion sociale, à travers l’investissement dans le capital humain (tel que l’appui à la scolarisation ou une meilleure nutrition pour les enfants) t Les moyens de subsistance, en protégeant de la misère t La résistance aux crises, en aidant les ménages à gérer les effets des chocs. L’expérience de nombreux pays, y compris au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, montre que plusieurs PAS améliorent les investissements dans le capital humain grâce à différents mécanismes. C’est le cas par exemple des transferts conditionnels en espèces (TCE) et des exemptions de frais d’éducation qui per- mettent d’accroître le taux de scolarisation. De même, les TCE et les assurances ma- ladie non contributives augmentent l’utilisation de soins de santé, en particulier les soins préventifs (tels que la santé maternelle et infantile), tandis que les programmes HIMO peuvent augmenter les actifs des pauvres et ceux de leurs communautés. Certains de ces instruments protègent également les pauvres de la misère et leurs enfants de malnutrition et de maladie grâce à l’amélioration de la consommation et des revenus des ménages, sans pour autant être aussi onéreux et engendrer autant de distorsions que les subventions de prix. En cas de chocs, les transferts en espèces atteignent plus efficacement les personnes démunies que les subventions et les trans- ferts en nature en raison de leur plus grande flexibilité. Figure 1 Capacité auto-déclarée des citoyens à se procurer suffisamment de denrées alimentaires au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés 2009–11 Vous est-il arrivé au cours des 12 derniers mois de ne pas avoir assez d'argent pour acheter de la nourriture dont vous ou votre famille aviez besoin ? 50 40 % réponses positives 30 20 10 0 Jordanie Tunisie Rép. arabe d'Égypte 2009 2010 2011 Source: Gallup 2011. 6 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Figure 2 Satisfaction des citoyens du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord à l’égard de l’assistance gouvernementale en faveur des pauvres, pays sélectionnés 2011 Dans votre pays, êtes-vous satisfait ou mécontent des actions en faveur des pauvres? Émirats arabes unis Koweït Arabie Saoudite Bahreïn Tunisie Jordanie Rép. du Yémen Rép. arabe d'Égypte Maroc Liban 0 20 40 60 80 100 % satisfait Source: Gallup 2011. Figure 3 Un cadre pour les programmes d’assistance sociale réformés au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Des PAS qui promouvent L'inclusion sociale Les moyes de La résistance subsistance aux chocs Augmenter le capital Aider les ménages à gérer RESPONSABILISER LES POPULATIONS humain et développer les Protéger de la misère actifs des pauvres les effets des chocs TCE Programmes Programmes Transferts Subventions Transferts HIMO d'exemptions en espèces des prix en nature de frais pour accéder à certains services Si les Les actifs D'autres Flexibles, Coûteux, Coûteux à conditions doivent coûts nécessitent provoquent mettre en provoquent un avoir une peuvent des des œuvre et changement valeur limiter systèmes distorsions à faire comporte- l’accès d’exploitation fonctionner mental Source : Auteurs. Un cadre pour la réforme de l’assistance sociale 7 Les principaux dé�s qui plaident en faveur de la réforme de 2 l’assistance sociale C omprendre les défis spécifiques auxquels sont confrontés les pauvres et vulnérables est une condition préalable impor- tante à la conception des PAS efficaces au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Les PAS couvrent un éventail d’instruments souples qui peuvent être adaptés en fonction des besoins les plus urgents des béné�ciaires ciblés – en faveur du triple objectif de promotion de l’inclusion, des moyens de subsistance et de la résistance aux chocs. Par conséquent, l’efficacité des PAS dépend d’une identi�cation adéquate des principaux dé�s auxquelles sont confrontés les pauvres, comme par exemple ceux qui contribuent à perpétuer la pauvreté d’une génération à la suivante, et ceux qui peuvent conduire à une paupérisation des personnes vulnérables. C’est dans cette perspective que cette section passe en revue les principales caractéristiques relatives à la pauvreté, à la vulnérabilité et à l’exclusion sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ainsi que les dé�s de développement humain auxquels font face les personnes en détresse. Deux groupes particulièrement vulnérables : les enfants et les populations rurales Au cours des dernières décennies les taux de pauvreté absolue ont baissé, mais deux défis restent à relever : la pauvreté infantile et les poches géographiques de pauvreté. Bien que la croissance écono- mique dans la région ait tiré de nombreuses personnes de la pauvreté, la baisse des taux de pauvreté au Moyen-Orient et en Afrique du Nord a été plus lente que dans d’autres régions comme l’Europe de l’Est et l’Asie centrale, ou l’Asie de l’Est et le Paci�que. Deux catégories de personnes font face à un risque de pauvreté supérieur à la moyenne : les enfants et les habitants des zones rurales. Ces catégories souffrent de l’inégalité des chances, exacerbée par le manque d’accès aux services, qui concoure à entraver le développement humain. Ces résultats peuvent se perpétuer 9 en l’absence de PAS permettant de promouvoir efficacement la formation de capital humain au sein des couches pauvres et de les protéger de la misère. Les enfants au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont particulièrement ex- posés au risque de pauvreté. Certains pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord — tels que l’Egypte, l’Irak, et la République du Yémen — ont des niveaux élevés de pauvreté parmi les enfants, avec au moins un enfant sur quatre vivant en dessous du seuil national de pauvreté (cf. tableau 1). Même en Jordanie et au Maroc où la pau- vreté des enfants n’est pas aussi élevée, les enfants sont confrontés à une incidence de pauvreté beaucoup plus élevée que celles des autres catégories d’âge. Un enfant né au sein d’une famille pauvre se trouve dans une situation désa- vantageuse par rapport à ses pairs. Le parent moyen d’un enfant pauvre dans la région n’a pas reçu d’éducation formelle et doit s’occuper d’une famille de cinq membres ou plus. En Egypte et au Maroc, 70 pourcent des ménages du quintile le plus pauvre ont un chef de famille qui n’a jamais été à l’école. Les enfants pauvres vivent souvent dans des logements dépourvus d’accès aux épurations des eaux usées ou aux services de base. En Jordanie, une �llette de 10 ans du quintile le plus pauvre a 40 pourcent moins de chances de boire de l’eau traitée et 50 pourcent moins de chances d’avoir un lit qu’une jeune �lle du quintile le plus riche. Ces inégalités se reflètent aussi dans la taille et la qualité des logements et l’accès des enfants à la technologie. Les progrès liés à certains aspects du développement humain au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont encore décevants, et même dramatiquement faible parmi les couches pauvres, avec des impacts potentiellement irréversibles. La malnutrition des jeunes enfants est particulièrement élevée dans les pays à reve- Tableau 1. Taux de pauvreté infantile dans certains pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, c. 2006–10 Taux de pauvreté parmi les enfants (0–14 ans) Taux de pauvreté Pays (%) global (%) Rép. arabe d’Égypte 29 22 Irak 2007 27 23 Jordanie 2010 20 14 a Maroc 2010 25 20 Rép. du Yémen, 2006 36 35 Source: calculs des auteurs basés sur les données des dernières enquêtes sur les ménages disponibles. Note: les taux de pauvreté sont basés sur les seuils de pauvreté nationaux pour tous les pays, à l’exception du Maroc. a Le seuil de pauvreté est défini comme le seuil du quintile inférieur. 10 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord nus faibles et moyens de la région. Si le niveau de développement économique y contribue, il n’explique pas entièrement l’incidence de la malnutrition comme indiqué par la �gure 4 : Djibouti, le Maroc et la République du Yémen ont des taux de malnutrition élevés par rapport à leurs pairs. Au sein des pays, les taux de malnutrition sont plus élevés parmi les enfants des ménages pauvres (cf. �gure 5). En termes d’éducation, les enfants plus âgés présentent des taux d’abandon plus élevés, et ont plus de chances d’entrer sur le marché du travail comme jeunes peu quali�és. La région présente d’importantes disparités géographiques et les ressortis- sants de régions peu développées de pays relativement riches sont aussi ex- posés à un risque de pauvreté élevé. Le taux de pauvreté rurale en Irak et en République du Yémen sont deux fois plus élevés qu’en zones urbaines (cf. �gure 6). Même les pays à revenu intermédiaire comme l’Egypte, l’Irak, la Jordanie et la Tunisie présentent des poches de pauvreté (telles les bidonvilles dans les zones urbaines et les zones rurales isolées) dans lesquelles l’accès aux services de base tels que les soins prénataux et l’eau potable font défaut et dans lesquelles les indica- teurs de développement humain sont considérablement en dessous de la moyenne nationale. La probabilité d’aller à l’école pour un enfant en zone rurale en Haute Egypte est par exemple 3.4 fois inférieure à celle d’un enfant en zone urbaine en Basse Egypte. Figure 4 Prévalence de l’émaciation par rapport au PIB par habitant au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés 25 TMP Prévalence de l’émaciation parmi les enfants 20 IND de moins de cinq ans (%) BGD DJI SDN 15 ERI MLI YEM LKA PAK IDN NPL MDV CAF ETH NER BFA MMR STP NGA 10ZAR SLE HTI SYR MAR AFG GHA KHM SEN ALB GNQ LBR GNB BEN CIV GIN COG AGONAM KEN CMR GMB TJKLAO PHL EGY TKMAZE OMN TGO UGA MRT IRQ 5 RWA ZMB PNGMDA GUY ARM THA KAZ MOZ TZA MWI LSO UZB SLB BIH SRB DZA ROMGAB MNE LBY SGP KGZ MNG BTN DOM MKD GEO JOR BLZ JAM COLBRA BLR URY MEX NIC HNDBOL PRY SWZSLV PER PAN ARG TUR 0 6 7 8 9 10 11 Log PIB par habitant (en USD constants de 2005, PPA) Source: calculs des auteurs basés sur les données sur la malnutrition de l’UNICEF 2009 ; données sur les PIB par habitant de la Banque mondiale 2012c. Note: PPA = Parité du Pouvoir d’Achat. Les principaux dé�s qui plaident en faveur de la réforme de l’assistance sociale 11 Figure 5 Retard de croissance par quintile de richesse au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés Prévalence d'un retard de croissance chez 50 45 les anfants de moins de 5 ans (%) 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Djibouti Rép. arabe Maroc Irak Rép. arabe Jordanie de Syrie d'Égypte Quintile le plus pauvre 2 3 4 Quintile le plus riche Sources: calculs des auteurs sur la base des dernières enquêtes en grappes à indicateurs multiples (MICS) de l’UNICEF http://www.childinfo.org/mics.html. Figure 6 Clivage rural/urbain: taux de pauvreté au Moyen-Orient et Afrique du Nord, pays sélectionnés, c. 2005–10 Jordanie Tunisie Rép. arabe d'Égypte Irak Rép. du Yémen 0 10 20 30 40 50 Taux de pauvreté (%) Urbain Rural Source : calculs des auteurs basés sur les données des enquêtes sur les ménages suivants : ERDM, Egypte 2009, ESEM, Irak 2007, ERDM, Jordanie 2010, EBM République du Yémen 2006, et estimations de l’équipe PREM de la Banque mondiale (réseau lutte contre la pauvreté et gestion économique), sur la base de l’EBM Tunisie 2005. Pour une identification complète et les descriptions des enquêtes, voir Annexe A.1 à la fin du chapitre. Note : les taux de pauvreté sont basés sur les seuils nationaux de pauvreté 12 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord L’inégalité de chances combinée à un manque d’accès aux services de base limite sérieusement les perspectives des personnes élevées dans les ménages pauvres. Le processus qui permet aux enfants et aux jeunes adultes d’atteindre des résultats en matière d’éducation et de santé au Moyen-Orient et en Afrique du Nord est dans une large mesure tributaire de circonstances indépendantes de leur volonté, telles leur lieu de naissance, leur sexe, les biens et le niveau d’éducation de leurs parents. La richesse est un déterminant important de l’accès aux services de base dans toute la région, tels les soins prénataux, les vaccinations, les crèches de qualité, et l’éducation préscolaire. Au sein des couches pauvres, l’incapacité à couvrir les coûts de santé est importante et affecte surtout les enfants et les femmes enceintes. Grandir dans une famille pauvre et en zone rurale limite également la possibilité d’accumuler du capital humain. La plupart des adultes issus de ménages pauvres au Moyen-Orient et en Afrique du Nord n’ont soit pas d’éducation formelle soit un niveau restreint à l’enseignement pauvre. En 2010, par exemple, 70 pourcent des hommes vivant dans des ménages du quintile de richesse inférieur en Jordanie avaient fait des études pri- maires ou n’avaient pas d’éducation formelle. Ce pourcentage était de 21 pourcent pour les ménages du quintile de richesse supérieur. Une fois sur le marché du travail, les personnes présentant un faible niveau d’accumulation de capital humain présentent plus de risques d’être au chômage ou d’avoir des emplois de mauvaise qualité. La �gure 7 montre que les jeunes hommes pauvres ont plus de chances de ne pas être scolarisés et d’être sans emploi que les jeunes hommes non pauvres. Même lorsqu’ils travaillent, les pauvres ont de fortes chances d’avoir des emplois informels faiblement rémunérés tandis que les jeunes hommes des ménages à revenus élevés ont plus de chances d’avoir des em- Figure 7 Chômage chez les jeunes hommes en milieu urbain, selon le niveau de richesse familiale en Jordanie, au Maroc, en Rép. arabe d’Egypte, c. 2009–10 35 Jeunes hommes en milieu urbain 30 (15–24 ans) non scolarisés et sans emplois, % 25 20 15 10 5 0 Jordanie Maroc Rép. arabe d'Égypte Q1&2 Q4&5 Source : calculs des auteurs sur la base des données des enquêtes sur les ménages : EGMTJ en Jordanie 2010, EJE, Egypte 2009, et EMJM Maroc, 2010. Pour une description complète, voir annexe A.1. Note: Q = quintile de richesse (1 = plus bas, 5 = plus élevé). Les principaux dé�s qui plaident en faveur de la réforme de l’assistance sociale 13 plois formels comme l’illustre la �gure 8. Il est difficile d’échapper à cette situation. La �gure 9 montre que les travailleurs du quintile inférieur en Egypte ont moins d’opportunités de partir d’un « emploi mauvais » (emploi ni protégé, ni bien rému- néré) pour un « bon emploi », et ils sont plus susceptibles de partir d’un emploi bien rémunéré pour un « emploi mauvais » par rapport aux travailleurs plus riches. Figure 8 Statut professionnel des salariés urbains, par quintile de richesse en Jordanie, au Maroc, et en République arabe d’Egypte, 2009–10 100 Citadins (35-64 ans) salariés, % 80 60 40 20 0 Q1&2 Q4&5 Q1&2 Q4&5 Q1&2 Q4&5 Jordanie Maroc Rép. arabe d'Égypte Public Privé formel Privé informel Source: calculs des auteurs sur la base des données des enquêtes sur les ménages : EMJM Maroc, 2010, EGMTJ en Jordanie 2009, EJE, Egypte 2009t. Pour une description complète, voir annexe A. Note: Q = quintile de richesse (1 = plus bas, 5 = plus élevé). Figure 9 Probabilité de transition pour un bon ou un mauvais emploi en 2009, par quintile de consommation et conditions d’emploi des jeunes égyptiens en 2008 100 Hommes (15–34 ans) qui avaient 22 12 80 un emploi en 2008, % 60 73 65 40 76 84 20 11 14 0 Q1&2 Q4&5 Q1&2 Q4&5 Bon emploi 2008 Mauvais emploi 2008 Bon emploi 2009 Mauvais emploi 2009 Autre 2009 Source: calculs des auteurs sur la base de l’ERDM Egypte 2009. Pour une description complète, voir annexe A. Note : « un bon emploi» se définit comme offrant de la sécurité sociale ou des revenus supérieurs à deux tiers de la médiane. Un « mauvais emploi» se définit comme un emploi informel avec des revenus inférieurs à deux tiers de la médiane. « Autre statut » se définit comme étant au chômage ou inactif. Q = quintile de consommation (1 = plus bas, 5 = plus élevé). 14 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Vulnérabilité à la pauvreté, en l’absence de stratégies d’adaptation ef�caces Une large part de la population gravite autour du seuil de pauvreté et présente une faible résistance aux chocs. Même ceux qui ont béné�cié de la croissance économique et qui ont accédé à la classe moyenne restent vulnérables au risque de retomber dans la pauvreté en cas de ralentissement de l’économie. En effet, 15–17 pourcent d’égyptiens, d’irakiens, de syriens, et de yéménites et 10 pourcent de ma- rocains ont des niveaux de consommation qui ne sont pas supérieurs à 50 centimes au-dessus du seuil de pauvreté de USD 2 par jour, comme indiqué par la �gure 10. Les ménages vulnérables ne disposent que de faibles revenus et allouent une part importante de leurs dépenses totales aux biens essentiels. Cela signi�e que ces ménages ne peuvent pas facilement réduire leurs dépenses en cas de chocs, et par conséquent, ils peuvent facilement retomber dans la pauvreté comme l’illustre la �gure 11. Entre 2005 et 2008, par exemple, 55 pourcent d’égyptiens ont connu au moins un épisode de pauvreté ou de quasi pauvreté (Marotta et al. 2011). Il existe une forte probabilité de perte irréversible du capital humain pendant les chocs et les crises si les PAS, qui permettent aux ménages d’amortir les effets de ces évènements, ne sont pas en place. Confrontés à un choc important, les ménages du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord comptent sur leurs propres reve- nus, épargne et biens, ainsi que sur les �lets sociaux informels (tels que le soutien de la famille et des voisins), parce que très peu ont accès aux PAS. 15 pourcent des ménages en Irak, et au Maroc ont déclaré avoir souffert d’au moins un choc impor- Figure 10 Pourcentage de la population vivant entre 2 et 2.5 USD par jour au Moyen- Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés Rép. arabe d'Égypte Irak Rép. du Yémen Djibouti Rép. arabe de Syrie Algerie Maroc Tunisie Iran, Rép. Islamique Jordanie 0 5 10 15 20 pourcentage Source: calcul tiré du site web POVCAL http://iresearch.worldbank.org/povcalnet. Les principaux dé�s qui plaident en faveur de la réforme de l’assistance sociale 15 tant au cours des douze mois précédents. Cependant, seulement 1 pourcent de ces ménages affectés par les chocs a déclaré avoir reçu de l’aide des PAS (c.à.d. de l’aide du gouvernement et des organisations non gouvernementales-ONGs), comme l’illustre la �gure 12. Dans ce contexte, les familles pauvres, avec leurs revenus, épargne, et biens limités, courent à nouveau un plus grand risque. La vulnérabilité des ménages dans la région est exacerbée par l’emploi principalement informel, les emplois précaires, et l’absence d’appui aux revenus pour les chômeurs. En outre, les chocs météorologiques ont considérablement augmenté la vulnérabilité des ménages ruraux. Au Maroc, par exemple, 22 pourcent de tous les ménages avaient déclaré en 2010 avoir expérimenté un choc météorologique important (p.ex. sécheresse, inon- dations, infestations parasitaires, ou maladies de cultures et de bétail). Accès inéquitable aux services sociaux et aux opportunités d’emplois En plus des facteurs susmentionnés, les femmes, les personnes handicapées, et les personnes déplacées peuvent faire face à des difficultés supplémentaires. Les PAS qui favorisent l’inclusion devraient être conçus de façon à tenir compte des be- soins spéci�ques de ces groupes et à promouvoir leur participation aux programmes. Bien que les aptitudes soient également réparties entre hommes et femmes, le taux de participation des femmes à la vie professionnelle au Moyen-Orient et en Afrique du Nord reste faible, pas nécessairement par choix. Parmi les principaux facteurs qui entravent la participation des femmes au marché du travail au Moyen- Orient et en Afrique du Nord, on peut citer entre autres : la faiblesse des systèmes de soutien (transports en commun et crèches), l’absence de responsabilisation, les handicaps éducatifs, la discrimination salariale ainsi que la ségrégation entre les sexes Figure 11 Structure des dépenses par quintile de richesse, Rép. arabe d’Egypte. 2009 Plus riche 4 3 2 Plus pauvre 0 5,000 10,000 15,000 20,000 25,000 30,000 Livres égyptiennes Alimentation Loyer Factures Education Santé Vêtements Télécom Autre Source: données de l’ERDM Egypte 2009. Description complète Annexe A.1. 16 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Figure 12 Mécanismes d’adaptation aux chocs pour les ménages en Irak et au Maroc, 2009–10 Au cours des 12 mois précédents comme mécanisme d’adaptation à un ou plusieurs des problèmes mentionnés ci-dessus, votre ménage a-t-il reçu un appui via:  Une aide reçue du gouv. ou d'une ONG La vente de biens Une aide reçue des amis/voisins Une demande de prêt Une aide reçue de la famille L'utilisation de revenus propres ou d'épargne 0 20 40 60 Ménages ayant répondu "oui", % Maroc Irak Source: données ESEM, Irak 2009, et EMJM, Maroc 2010. Pour une description complète, voir Annexe A.1. Note: ONG = organisation non gouvernementale. dans diverses industries (PNUD, 2005, Banque mondiale 2004, Banque mondiale 2012a). Une enquête comparative auprès des ménages menée par la Banque mon- diale au Caire en Egypte, à Amman en Jordanie, et à Sana’a en République du Yémen montre que moins de 10 pourcent des femmes vivant dans des ménages où un des membres est opposé à leur travail �nissent par participer au marché du travail (Chamlou et al. 2008a, b). Cette situation est particulièrement préoccupante, car plus de 30 pourcent des jeunes hommes s’opposent à la participation des femmes au marché du travail. Par ailleurs, dans plusieurs pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, les avantages �scaux et ceux liés aux prestations familiales passent par les hommes. A l’instar d’autres pays, ceux du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ren- contrent des problèmes pour lutter efficacement contre les difficultés aux- quelles font régulièrement face les personnes handicapées. Il s’agit notamment des taux de chômage élevé ; de soins de santé inaccessibles et coûteux ; de leur faible niveau de scolarisation (par exemple, seulement 20 pourcent des femmes et environ 40 pourcent d’hommes handicapés en Syrie savent lire et écrire) ; de transports et infrastructures pour atteindre les emplois et les services inaccessibles et de la stig- matisation résultant de l’exclusion sociale et de la marginalisation (OMS et Banque mondiale 2010). En 2006, une enquête nationale auprès des personnes handicapées au Maroc a révélé leurs besoins importants pour l’accès à une gamme de services sociaux (Royaume du Maroc 2006). Les transferts en espèces inconditionnels pour Les principaux dé�s qui plaident en faveur de la réforme de l’assistance sociale 17 les personnes handicapées peuvent permettre de commencer à réduire les obstacles supplémentaires auxquels fait face ce groupe, comme par exemple l’accès aux soins de santé et de réinsertion, les transports, l’éducation et l’emploi. Dans certains pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, les personnes dé- placées vers l’extérieur reçoivent moins d’allocations sociales et de services par rapport aux populations locales. Selon le Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés (UNHCR) et l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Cisjordanie et Gaza au Proche-Orient (UNRWA), la région accueille près de la moitié de toutes les personnes enregistrées comme déplacées dans le monde. Le UNHCR estime également que le nombre total de personnes déplacées à l’intérieur de la région est d’environ 10 millions. L’intégration des dépla- cés varie considérablement d’un pays à l’autre, et souvent de catégories à catégories. Dans certains pays, les personnes déplacées font face à des coûts pour accéder à l’enseignement et aux soins de santé plus élevés que la population du pays d’accueil ; un accès limité aux professions du secteur formel ; et une mobilité restreinte en raison de la réglementation sur les permis de conduire. Dans les pays en conflit ou qui connaissent le retour des personnes déplacées, le UNHCR et les ONGs inter- viennent souvent pour apporter les services de base aux personnes déplacées. La situation actuelle de l’assistance sociale au Moyen- 3 Orient et en Afrique du Nord Malgré les besoins décrits précédemment, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord accusent un retard par rapport à d’autres régions en termes d’utilisation efficace des ressources des PAS. La plupart des pays de la région ont adopté l’une des deux approches suivantes en matière de PAS : i) s’appuyer essentiellement sur les subventions univer- selles pro-riches ou sur les programmes de rationnement, au détriment d’interventions plus efficaces ; ou ii) offrir une multitude de petits pro- grammes fragmentés qui n’ont pas d’impact signi�catif sur la pauvreté et l’inégalité en raison de leur faible couverture, de fuites élevés et de niveaux d’allocations limités. Subventions universelles au détriment de programmes plus ef�caces Les dépenses en subventions au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont beaucoup plus élevées, en termes absolus et relatifs que dans d’autres régions. En particulier, les pays de la région dépensent en moyenne 5.7 pourcent de leur PIB en subventions, tandis qu’un pays en développement de référence dépense en moyenne 1.3 pourcent du PIB comme le montre la �gure 13. A l’exception notable de l’Irak, les pays de la région dépensent beaucoup plus pour les subventions du carburant pro-riches, qui ont des effets de distorsion (4.5 pourcent de leur PIB en moyenne) que pour les subventions alimentaires et les cartes de rationnement (1.1 pourcent de leur PIB en moyenne) comme l’illustre la �gure 14. Les subventions absorbent des ressources �nan- cières importantes qui pourraient servir à des PAS plus efficaces et plus efficients comme le montre la �gure 15. En dehors des subventions, les PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont fragmentés en de multiples petits programmes. Les données administratives recueillies dans le cadre de la présente étude (inventaire des PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, voir an- nexe A.1 pour une description de la méthodologie) montrent que les 19 Figure 13 Dépenses pour les PAS avec ou sans subventions, Moyen-Orient et Afrique du Nord par rapport à d’autres pays en développement, c. 2008–11 15 12 9 % du PIB 6 3 0 Moyen-Orient et Afrique du Nord Echantillon comparateur de pays en dével. Liban 2008 Djibouti 2011 Bahreïn 2010/11 Tunisie 2011 Jordanie 2011 Maroc 2008/9 Koweït 2010 Rép. arabe d'Égypte 2009 Irak 2009 Arabie Saoudite 2010 Rép. du Yémen 2008 Subventions alimentaires et du carburant PAS autre que subventions Sources : calculs des auteurs basés sur le Gouvernement de Jordanie 2011b ; Banque mondiale 2009, 2010a, 2011b ; Banque mondiale, FAO et IFAD 2009, Base de données du Département des affaires fiscales du FMI. Note: PAS = programmes d’assistance sociale Figure 14 Subventions alimentaires et du carburant en pourcentage du PIB au Moyen- Orient et Afrique du Nord, pays sélectionnés, c. 2008–11 14 12 10 % du PIB 8 6 4 2 0 Liban 2008 Djibouti 2011 Bahreïn 2010/11 Tunisie 2011 Jordanie 2011 Maroc 2008/9 Koweït 2010 Rép. arabe d'Égypte 2009 Irak 2009 Arabie Saoudite 2010 Rép. du Yémen 2008 Subventions du carburant Subventions alimentaires et cartes de rationnement Sources : calculs des auteurs basés sur le Gouvernement de Jordanie 2011b ; Banque mondiale 2009, 2010a, 2011b ; Banque mondiale, FAO et IFAD 2009, Base de données du Département des affaires fiscales du FMI. 20 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Figure 15 Comparaison des dépenses pour les PAS qui sont des subventions et ceux qui ne sont pas des subventions en faveur des pauvres au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, certains pays, c. 2008–11 Pour chaque USD USD 193.86 ont des PAS autre USD 23.61 ont USD 96.44 ont USD 158.36 ont été dépensés sur que les été dépensés été dépensés en été dépensés en les cartes de subventions reçu en subventions subventions en subventions Rép. rationnement par un pauvre en Jordanie Irak du Yemen en Rép. arabe d'Égypte Source: Calculs des auteurs basés sur les enquêtes sur les ménages et le Gouvernement de Jordanie 2011a ; Banque mondiale 2009, 2010a, 20110c ; Base de données du Département des affaires fiscales du FMI. Note : PAS = programmes d’assistance sociale Figure 16 Combinaison des programmes de PAS autre que les subventions par type, Moyen-Orient et Afrique du Nord, c. 2008–11 20 18 16 14 Nombre de PAS 12 10 8 6 4 2 0 Tunisie Cisjordanie et Gaza Rép. du Yémen Rép. arabe d'Égypte Irak Jordanie Koweït Liban Maroc Arabie Saoudite Rép. arabe de Syrie Bahreïn Transferts en espèces Dispenses des frais, l'éducation, les avantages de la santé Alimentation et autres transferts en nature Logement Le micro-crédit et des activités génératrices de revenus Formation Programmes de travaux publics Autres Source: calculs des auteurs basés sur l’Inventaire des PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord PAS dans la région sont fragmentés en de multiples petits programmes (voir �gure 16) ; au Maroc, par exemple, 12 programmes différents visent à accroître le taux de scolarisation. Faible impact des PAS sur la pauvreté et l’inégalité Partout dans la région, à l’exception de la Cisjordanie et Gaza, deux personnes sur trois dans le quintile le plus pauvre ne bénéficient pas de PAS autre que La situation actuelle de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 21 les subventions. La région du Moyen-Orient et Afrique du Nord dispose d’une vaste marge de manœuvre pour étendre la couverture de ses �lets sociaux, hors sub- ventions, aux couches pauvres et vulnérables. Dans la région, seule la Cisjordanie et Gaza dispose d’une couverture de PAS supérieure à la moyenne mondiale, où les programmes du gouvernement, des bailleurs de fonds, et des ONGs couvrent plus de la moitié du quintile le plus pauvre comme le montre la �gure 17. Dans l’ensemble, la couverture du quintile inférieur au Moyen-Orient et en Afrique du Nord est en dessous de la moitié de la moyenne mondiale et représente moins du tiers de la couverture des PAS en Europe et Asie centrale ou en Amérique Latine et Caraïbes (voir �gure 17). PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ont surtout utilisé les méthodes de ciblage géographique et par catégorie, entraînant des fuites importantes. Différentes méthodes de ciblage s’appliquent à différents contextes. Au Moyen- Orient et en Afrique du Nord, les PAS utilisent majoritairement des méthodes de ciblage géographique et par catégorie (voir �gure 18) qui conviennent à des environnements ayant des poches de la pauvreté concentrée, mais qui fonctionnent moins bien si la pauvreté présente de multiples facettes et est spatialement disper- sée. Dans le dernier cas, les méthodes de ciblage permettant d’identi�er les ménages où les individus en fonction de leurs moyens ou des corrélats de la pauvreté (Proxy Means Test [PMT]) sont préférables. Compte tenu de la dépendance excessive Figure 17 Couverture des PAS autre que les subventions, Moyen-Orient et Afrique du Nord par rapport à d’autres régions 60 Pourcentage couvert, quintile inférieur 50 40 30 20 10 0 Cisjordanie et Gaza 2009 Rép. du Yémen 2005 Jordanie 2010 Maroc 2010 Rép. arabe d'Égypte 2009 Irak 2007 Djibouti 2002 Moyen-Orient et Afrique du Nord Monde Asie de l'Est & Pacifique Europe & Asie centrale Amérique latine et Caraïbes Sources: Moyen-Orient et Afrique du Nord: calculs des auteurs sur la base des enquêtes auprès des ménages. Autres régions : Banque mondiale 2012a. Note: PAS = programmes d’assistance sociale. Toutes les moyennes régionales sont pondérées par la taille de la population. 22 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Figure 18 Combinaison de programmes de PAS autre que les subventions par type de ciblage, Moyen-Orient et Afrique du Nord, 2008–11 Proportion des programmes de PAS, % 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Bahreïn Rép. arabe d'Égypte Irak Jordanie Koweït Liban Maroc Arabie Saoudite Rép. arabe de Syrie Tunisie Cisjordanie et Gaza Rép. du Yémen Catégoriel Géographique Examen des ressources PMT Auto-ciblage Pas précisé Source: calculs des auteurs basés sur l’inventaire des PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Note: PAS = programmes d’assistance sociale. sur les méthodes de ciblage géographique et par catégorie, les fuites sont très éle- vées au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, région où seulement un quart en moyenne des béné�ciaires de PAS, hors subventions, appartiennent au quintile le plus pauvre, tandis qu’environ 15 pourcent appartiennent au quintile le plus riche comme le montre la �gure 19. Une comparaison avec d’autres régions con�rme la sous-performance du Moyen-Orient et l’Afrique du Nord en termes d’incidence sur les béné�ciaires. En effet, sur le plan mondial, plus de 30 pourcent des béné�- ciaires de PAS appartiennent au quintile inférieur, l’Amérique Latine et les Caraïbes venant en tête avec 36 pourcent. Pourtant, certaines parties du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord ont déjà commencé à améliorer leurs méthodes de ciblage. C’est le cas du Fonds national d’assistance sociale en Jordanie qui s’appuie sur l’examen des ressources semi-con�r- mées, associé au ciblage par catégorie, tandis que la Cisjordanie et Gaza, la Répu- blique du Yémen, et plus récemment le Liban, ont introduit le ciblage par PMT. La fixation de la taille des PAS est une décision politique importante mais dif- ficile. D’une part, un PAS solide devrait fournir une protection adéquate de la consommation aux membres les plus vulnérables de la société, c’est-à-dire ceux qui ne peuvent pas subvenir à leurs besoins en raison de leur âge ou d’un handicap, et ceux qui ont besoin d’une aide temporaire leur permettant rebondir après un choc économique ou sanitaire. D’autre part, des allocations trop généreuses peuvent La situation actuelle de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 23 Figure 19 Incidence des PAS autre que les subventions sur les bénéficiaires, Moyen- Orient et Afrique du Nord, par rapport à d’autres régions 45 40 Bénéficiaires des PAS % 35 30 25 20 15 10 5 0 Jordanie 2010 Cisjordanie et Gaza 2009 Rép. arabe d'Égypte 2009 Rép. du Yémen 2005 Maroc 2010 Djibouti 2002 Irak 2007 Moyen-Orient et Afrique du Nord Monde Asie de l'Est & Pacifique Europe & Asie centrale Amérique latine et Caraïbes Quintile le plus pauvre Quintile le plus riche Sources: Moyen-Orient et Afrique du Nord : calculs des auteurs basés sur les enquêtes auprès des ménages. Autres régions : Banque mondiale 2012a. Note: PAS = programmes d’assistance sociale. Toutes les moyennes régionales sont pondérées par la taille de la population. décourager des adultes capables de travailler à participer à la vie active et plutôt les encourager à dépendre de l’aide fournie par les pouvoirs publics. La générosité des PAS, hors subventions, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord est faible. Comme le montre la �gure 20, les transferts des PAS représentent moins d’un quart de l’assistance sociale du quintile inférieur (d’après leur consom- mation, dépenses, ou biens). C’est en Cisjordanie et Gaza, suivi de la Jordanie, que l’on note le plus grand impact des transferts des PAS sur le bien-être du quintile le plus pauvre. Cependant, dans des pays tels la République du Yémen, les niveaux de consommation des béné�ciaires du quintile inférieur sont à peine affectés. Dans l’ensemble, si les PAS au niveau mondial représentent près de 20 pourcent des trans- ferts de l’aide sociale au quintile inférieur, ce chiffre n’est que de 12 pourcent au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, bien en deçà des autres régions. Ceci suggère que la générosité des prestations de PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord peut être accrue, sans pour autant représenter une démission à travailler. La plupart des PAS qui ne sont pas des subventions ont des effets négligeables sur la pauvreté et l’inégalité au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. L’indi- cateur le plus important de l’efficacité des PAS est l’impact sur la pauvreté et l‘iné- 24 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Figure 20 Générosité des allocations des PAS autre que les subventions, Moyen-Orient et Afrique du Nord par rapport à d’autres régions Allocations en % moyens de subsistance 35 30 25 des beneficiaires 20 15 10 5 0 Cisjordanie et Gaza 2009 Jordanie 2010 Irak 2007 Rép. arabe d'Égypte 2009 Rép. du Yémen 2005 Moyen-Orient et Afrique du Nord Monde Asie de l'Est & Pacifique Europe & Asie centrale Amérique latine et Caraïbes Sources: Moyen-Orient et Afrique du Nord: calculs des auteurs basés sur les enquêtes auprès des ménages. Autres régions : Banque mondiale 2012a. Note: PAS = programmes d’assistance sociale. Toutes les moyennes régionales sont pondérées par la taille de la population. galité. Cet indicateur combine la couverture, le ciblage et la générosité des PAS pour évaluer l’effet global de la présence des PAS sur la distribution des ressources du pays. A l’exception de la Cisjordanie et Gaza et de la Jordanie, les PAS dans la région ont des effets négligeables sur les taux de pauvreté, selon les estimations d’une simulation de la pauvreté en l’absence de PAS (voir �gure 21, partie A). L’existence de PAS en Egypte, en Irak, et en République du Yémen a réduit les taux de pauvreté dans ces pays de seulement 3 pourcent environ. Les PAS au Moyen- Orient et en Afrique du Nord donnent de meilleurs résultats en termes d’impact sur la pauvreté que ceux d’Asie de l’Est, mais bien plus faibles que la moyenne mondiale ou que ceux d’Europe et d’Asie Centrale, ou d’Amérique Latine et des Caraïbes. Exceptionnellement, les PAS en Cisjordanie et Gaza ont un impact plus important sur la pauvreté que ceux de la région la plus performante (Europe et Asie Centrale). A l’exception notable de la Cisjordanie et Gaza, la plupart des PAS de la région n’ont pas beaucoup d’impact sur la distribution des ressources. En termes d’im- pact des PAS sur l’inégalité, la Cisjordanie et Gaza est le leader régional, avec des PAS qui réduisent le coefficient de Gini de plus de 7 pourcent et qui surpassant non seulement le reste du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord mais aussi d’autres régions (voir �gure 21, partie B). D’autre part, en Egypte, en Irak, et en République du Yémen, les PAS ont un effet imperceptible sur la distribution des ressources, avec La situation actuelle de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 25 Figure 21 Impact des PAS autre que les subventions sur la pauvreté et l’inégalité au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, économies sélectionnées, c. 2005–10 A. Impact sur le Taux de Pauvreté 20 Impact des PAS sur le taux 15 de pauvreté (%) 10 5 0 Cisjordanie et Gaza 2009 Jordanie 2010 Rép. arabe d'Égypte 2009 Irak 2007 Rép. du Yémen 2005 Moyen-Orient et Afrique du Nord Monde Asie de l'Est & Pacifique Europe & Asie centrale Amérique latine et Caraïbes B. Impact sur l’Inégalité 8 Impact des PAS sur le 6 coefficient Gini % 4 2 0 Cisjordanie et Gaza 2009 Jordanie 2010 Rép. arabe d'Égypte 2009 Rép. du Yémen 2005 Irak 2007 Moyen-Orient et Afrique du Nord Monde Asie de l'Est & Pacifique Europe & Asie centrale Amérique latine et Caraïbes Source: calculs des auteurs sur la base des enquêtes auprès des ménages Note: PAS = programmes d’assistance sociale. un coefficient de Gini qui baisse de moins de 1 pourcent. Les comparaisons avec les autres régions démontrent qu’en termes de réduction de l’inégalité, la performance de la région se situe au milieu du classement régional, en-dessous de l’Europe et l’Asie Centrale ainsi que de l’Amérique Latine et des Caraïbes, mais au-dessous de l’Asie de l’Est. 26 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Le faible taux de couverture, le mauvais ciblage et la générosité insuffisante des PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord expliquent les impacts relative- ment faibles sur la pauvreté et les inégalités. La couverture et la générosité relati- vement faibles des PAS dans la région déterminent les effets sur la pauvreté. L’impact sur l’inégalité mesure l’effet des PAS sur la distribution des ressources, et à ce titre, il est directement lié à la précision du ciblage. Même en excluant les subventions et les cartes de rationnement, les PAS de la région ne ciblent pas suffisamment les pauvres et les personnes vulnérables, expliquant ainsi leur effet négligeable sur le coefficient de Gini. Les subventions universelles sont inef�caces et pro-riches mais de nombreuses personnes en dépendent Les subventions universelles occasionnent des fuites énormes en faveur des non pauvres. La raison la plus fréquemment citée pour les recours aux subventions est la protection des pauvres, a�n de leur assurer l’accès à une nourriture et à d’autres biens essentiels à des prix abordables. Lorsqu’elles sont utilisées comme PAS, les subventions universelles (en particulier les subventions du carburant) présentent des insuffisances importantes en termes de la précision de ciblage (�gure 22, partie A). En effet, en Egypte, en Jordanie et en République de Yémen, le quintile le plus riche pro�te de 40 à 60 pourcent des avantages de la subvention du carburant car ils consomment plus de produits énergétiques que les pauvres. Même si les avantages des subventions alimentaires sont plus équitablement répartis, les inefficacités dues aux fuites des subventions sont stupé�antes : plus de 70 pourcent des dépenses consacrées aux subventions alimentaires en Egypte et en Irak pourraient être écono- misées si ces fuites étaient éliminées (Banque mondiale 2010a, b). Cependant, en raison de leur magnitude et de la grande vulnérabilité au Moyen- Orient et en Afrique du Nord, les subventions ont un impact significatif sur la pauvreté, et toute réforme doit en tenir compte. En dépit de leur inefficacité, la simple suppression des subventions pourrait entraîner des effets d’appauvrissement dans de nombreux pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. En raison de leur large couverture et de leur générosité (en termes de taux de subventionnement des produits de première nécessité dans le panier de consommation), les subventions ont des impacts importants sur la réduction de la pauvreté (voir �gure 22, partie B). En Egypte et en Irak, les cartes de rationnement alimentaire ont réduit les taux de pauvreté de plus de 30 pourcent (soit environ 10 points de pourcentage). Les sub- ventions du carburant ont un impact plus faible sur la pauvreté que les subventions alimentaires. Compte tenu de l’impact signi�catif des subventions (notamment les subventions alimentaires) sur la réduction de la pauvreté, et du faible impact des PAS qui ne sont pas des subventions, une réforme durable des subventions doit être accompagnée d’une expansion considérable d’autres instruments de PAS qui renforcent les moyens de subsistance et la résistance aux chocs. La situation actuelle de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 27 Figure 22 Subventions inefficaces, mais facteur de réduction de la pauvreté au Moyen- Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, c. 2004–10 A. Incidence des avantages des subventions Total avantages subventions, % 70 60 50 40 30 20 10 0 Quintile le plus pauvre Q2 Q3 Q4 Quintile le plus riche Irak 2007: cartes de rationnement Rép. du Yémen 2005: subventions Rép. arabe d'Égypte: subventions au carburant au carburant Jordan, 2010: subventions alimentaires Jordanie 2010: subventions au carburant Source: calculs des auteurs basés sur les enquêtes sur les ménages. B. Impact des subventions sur la pauvreté 40 Impact des subventions sur le taux de pauvreté, % 30 20 10 0 Subventions Cartes de Subventions Subventions Subventions alimentaires rationnement au carburant alimentaires, pétrolières de l'eau et du gaz Rép. arabe d'Égypte Irak Rép. arabe d'Égypte Jordanie Rép. du Yémen 2009 2007 2004 2010 2005 Sources: Banque mondiale 2010a, 2010b; Gouvernement de Jordanie 2011a; Gouvernement du Yémen ; Banque mondiale, et PNUD 2007 28 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord L’économie politique des 4 réformes de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Que veulent les citoyens ? L es données de nombreuses études ont été collectées dans le cadre du présent rapport sur les perceptions et les aspirations des ci- toyens en matière de PAS et ont pour objectif de comprendre les préférences des citoyens pour les PAS du futur. Bien que la plupart des insuffisances techniques des PAS aient été mises en évidence par le passé et en dépit du fait que les pouvoirs publics aient essayé de réformer les subventions universelles à différentes époques, des considérations de politiques économiques ont largement contribué au blocage, ou au non démarrage, des réformes des PAS dans la région. Dans le cadre de la présente étude, de nouvelles données ont été recueillies à l’aide de son- dages d’opinions représentatives sur le plan national «Protection sociale: Evaluation des attitudes, connaissances et systèmes de soutien  » (MENA SPEAKS [Social Protection Evaluation of Attitudes, Knowledge, and Support]), en partenariat avec Gallup, en Egypte, en Jordanie, au Liban et en Tunisie. En outre, cette section présente les conclusions tirées d’une expérience comportementale novatrice (Jordan Gives), qui simulait les compromis réels qu’impliquent les PAS : des bons de carburant éatient proposés aux participants avant de leur donner l’option d’en faire don en échange de différents modèles de PAS en faveur des pauvres de leurs communautés. Les nouvelles données ont fourni des informations sur les éventuels points d’entrée susceptibles d’obtenir l’adhésion des classes moyennes et pauvres, pour le renouvellement et la réforme des PAS. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, ceux qui perçoivent une forte inégalité de revenus dans leurs pays et qui se considèrent comme pauvres ont tendance à réclamer plus énergiquement des politiques de redistribution. Les pauvres auto-déclarés représentent une proportion importante de la population. Ils comprennent à la fois la grande majorité des pauvres et « les pauvres subjectifs », ceux qui ne 29 sont pas dans le quintile inférieur mais qui se considèrent tout de même pauvres (cf. �gure 23), et qui peuvent constituer près du quart de la population comme c’est le cas en Tunisie. Les «  pauvres subjectifs » ont plus tendance à dire que « les riches détiennent la quasi-totalité de la richesse » du pays. En outre, ceux qui croient que l’inégalité de revenus est élevée, ont tendance à exiger plus de politiques redistribu- tives. Les « pauvres subjectifs » sont ceux qui perçoivent les inégalités de façon plus accentuée. Ce groupe est également plus enclin à être insatisfait de l’efficacité des PAS du gouvernement. La demande de redistribution varie également en fonction des convictions per- sonnelles sur les causes de la pauvreté et de la promotion sociale. Dans le ques- tionnaire utilisé après l’expérience comportementale (Jordan Gives) en Jordanie, les participants de la classe moyenne ont exprimé une croyance répandue selon laquelle le succès résulte généralement du travail; cette croyance est plus présente chez ceux qui se classent eux-mêmes dans les catégories de revenus moyens et élevés. Ceux qui estimaient que leurs revenus étaient plus proches de ceux des pauvres étaient plus enclins à déclarer que la réussite relevait plus de la chance et des relations, plutôt que du travail (voir �gure 24). Ces perceptions sont conformes à celles d’Amérique Latine et d’Europe de l’Ouest, mais moins extrême, qu’aux Etats-Unis où les gens sont généralement convaincus que le succès résulte des efforts individuels. Figure 23 Pauvreté auto-déclarée et perception de forte inégalité par quintile de revenus au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, 2012 90 Répondants qui se disent pauvres,% 80 70 " Pauvres 60 auto-déclarés " 50 40 30 20 10 0 Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 Rép. arabe d'Égypte Jordanie Liban Tunisie Source: calcul des auteurs basés sur le sondage MENA SPEAKS. Note: Q = quintile de revenus (1 = Plus bas, 5 = plus élevé). 30 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Figure 24 Opinions sur les causes de réussite dans la classe moyenne en Jordanie, 2012 Selon vous, quelle est la principale cause de réussite professionnelle? Revenu moyen supérieur Revenu intermédiaire Revenu moyen inférieur 0 20 40 60 80 Réponses, % Travail Chance et relations Source: calcul des auteurs basés sur les données du sondage Jordan Gives 2012. Les pouvoirs publics sont les principaux responsables des PAS, mais sont souvent considérés inef�caces La majorité des personnes interrogées considéraient le gouvernement comme le principal acteur de la lutte contre la pauvreté ; en même temps, une grande par- tie de la population, en particulier en Egypte et au Liban, juge les efforts actuels des pouvoirs publics en matière de PAS inefficaces. A la question de savoir à qui incombait principalement la responsabilité de l’assistance aux pauvres, la grande majorité des répondants du sondage MENA SPEAKS a affirmé « les pouvoirs pu- blics » (voir �gure 25, partie A). En Jordanie et en Tunisie, les pauvres étaient net- tement plus critiqués de l’efficacité des pouvoirs publics en matière de PAS comme le montre la �gure 25, partie B. Par ailleurs, l’analyse de régression dans les pays concernés par le sondage MENA SPEAKS montre qu’en Egypte et en Tunisie, mais pas au Liban, les populations qui con�rmaient que « la corruption de l’administra- tion était très répandue » avaient plutôt tendance à dire que les PAS existants étaient inefficaces. De même, d’après l’expérience Jordan Gives, ceux qui exprimaient des doutes sur la �abilité du ciblage des PAS existants envers les pauvres étaient moins disposés à faire don de leurs bons aux pauvres de leurs communautés. La connaissance sur des PAS existants varie fortement selon le pays, et est plus élevée chez les riches. Les égyptiens ont une très faible connaissance des PAS autres que les subventions tandis que les PAS tunisiens et libanais sont bien connus. 23 pourcent des personnes interrogées en Egypte, par exemple, n’avaient jamais enten- du parler d’un seul PAS, même après qu’on leur ait listé les noms des programmes. La connaissance des PAS était de loin plus faible au sein des populations pauvres que parmi les répondants à revenus élevés (voir �gure 26). L’économie politique des réformes de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 31 Figure 25 Opinions sur la responsabilité des PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, 2012 A. Responsabilité de l’assistance aux pauvres 100 80 Réponses, % 60 40 20 0 Rép. arabe d'Égypte Liban Jordanie Tunisie Gouvernement Org. bienfaisance Org. religieuse Famille et amis Aucun groupe B. Efficacité des pouvoirs publics à fournir des PAS 80 Government quelque peu ou très 70 efficace à fournir des PAS, 60 % de répondants 50 40 30 20 10 0 Rép. arabe d'Égypte Liban Jordanie Tunisie Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 Source: calcul des auteurs basés sur le sondage MENA SPEAKS Note: PAS = programmes d’assistance sociale. Q = Quintile de revenus (1 = plus bas, 5= plus élevé). En Tunisie, et dans une moindre mesure au Liban, les riches ont beaucoup plus de chances de connaître personnellement un bénéficiaire d’un PAS que les pauvres,  ce qui pourrait être une approximation imparfaite des importantes fuites. En Tunisie, la probabilité de connaître un béné�ciaire du Programme Natio- nal des Familles Nécessiteuses était quasiment deux fois plus élevée chez les per- sonnes du quintile de revenus supérieur et intermédiaire que chez les pauvres (�gure 27, partie A). En revanche, en Jordanie, la plupart des programmes sont mieux connus des deux quintiles inférieurs que des deux quintiles supérieurs, comme le montre la �gure 27, partie B). La connaissance du public des subventions alimentaires au Moyen-Orient et en Afrique du Nord est beaucoup plus grande que la connaissance des subventions du carburant, et la connaissance des subventions s’améliore avec le revenu, en 32 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Figure 26 Connaissance des PAS, par quintile de revenus, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, 2012 Moyenne des programmes de PAS 5 reconnus par les répondants 4 3 2 1 0 Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 Rép. arabe d'Égypte Liban Jordanie Tunisie Source: calculs des auteurs basés sur le sondage MENA SPEAKS. Note: PAS = programmes d’assistance sociale. Q = Quintile de revenus (1 = plus bas, 5 = plus élevé). Figure 27 Connaissance des bénéficiaires des PAS, par quintile de revenus en Tunisie et en Jordanie, 2012 A. Tunisiea personnellement un bénéficiaire 40 Répondants connaissant 30 de PAS, % 20 10 0 Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 PNAFN Fonds de solidarité nationale THIMO CNSS cartes de santé Transferts en nature du MAS (suite à la page suivante) particulier pour le carburant. 25 pourcent des sondés en Jordanie étaient informés de l’existence d’une subvention du carburant contre 47 pourcent en Tunisie. La connaissance de l’existence d’une subvention du pain, elle varie de 47 pourcent au Liban à 87 pourcent en Egypte. Le dégrée d’information plus élevé en matière de subventions alimentaires est particulièrement intéressant, car les subventions du car- burant ont tendance à être plus régressives et à consommer plus de ressources que les subventions alimentaires dans les pays de la région. Par exemple, l’Egypte dépense beaucoup plus en subventions des produits pétroliers (6.9 pourcent de son PIB en L’économie politique des réformes de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 33 Figure 27 Connaissance des bénéficiaires des PAS, par quintile de revenus en Tunisie et en Jordanie, 2012 (continué) B. Jordanieb personnellement un bénvficiaire 70 Répondants connaissant 60 50 de PAS, % 40 30 20 10 0 Q1 Q2 Q3 Q4 Q5 NAF MDS Assistance d'urgence Programme de productivité améliorée Programme de nutrition scolaire Makrame du roi Fonds Zakat Source: Calculs des auteurs basés sur le sondage MENA SPEAKS. Note: PAS = programmes d’assistance sociale. Q = Quintile de revenus (1 = plus bas, 5 = plus élevé). a PNAFN = Programme nationale des familles nécessiteuses. THIMO = Travaux à haute intensité de main d’œuvre. MAS = ministère des affaires sociales. CNSS = Caisse nationale de sécurité sociale. b FNA = Fonds national d’aide. MDS = ministère du développement social. 2009) qu’en subventions alimentaires (1.8 pourcent de son PIB). La sensibilisation sur les coûts occasionnés par les subventions du carburant pourrait être le point de départ d’un dialogue honnête sur les réformes des PAS. Préférences pour les PAS ciblant les pauvres et des transferts en espèces par rapport aux allocations en nature Contrairement à la conception dominante sur les PAS dans la région, la majori- té des personnes interrogées préfère l’utilisation du ciblage basé sur la pauvreté par rapport au ciblage par catégorie et les transferts en espèces aux transferts en nature. Plus de 85 pourcent de la population préfèreraient des PAS ciblés sur les pauvres plutôt que sur différentes catégories de personnes, telles les veuves, les orphelins et les personnes handicapées comme le montre la �gure 28, partie A. Cette préférence est plus forte chez les pauvres eux-mêmes, ce qui est compréhen- sible parce que le ciblage par catégorie est susceptible d’occasionner plus de fuites en faveur des non pauvres, ou de ne pas couvrir les pauvres qui n’appartiennent pas aux catégories ciblées. En outre, plus des deux tiers des personnes interrogées dans chacun des quatre pays étudiés ont exprimé une préférence pour les PAS basés sur les transferts en espèces soit respectivement 68 pourcent au Liban et 85 pourcent en Jordanie, comme le montre la �gure 28, partie B. 34 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord La majorité de la population du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ne semble pas adhérer à l’utilisation de conditionnalités pour les PAS; mais parmi les par- tisans des TCE, les conditions préférées portent sur la scolarisation des enfants et sur la recherche active d’un emploi. Contrairement à l’Amérique Latine où la conditionnalité des transferts en espèces a augmenté le soutien aux PAS, les répon- dants du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ne semblent pas prêts à imposer des conditions aux béné�ciaires des PAS. Environ deux tiers des personnes interrogées en Egypte et au Liban, et à peu près trois quarts des répondants en Jordanie et en Tunisie ont rejeté l’idée de conditionner les transferts de PAS (voir �gure 29). Pour ceux qui ont accepté d’imposer certaines conditions aux béné�ciaires des PAS, celles Figure 28 Préférences en matière de conception des PAS, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, 2012 A. Préférence pour le ciblage de la pauvreté vs. ciblage de catégorie 100 Préférences méthodes de ciblage, % de 90 80 70 répondants 60 50 40 30 20 10 0 Rép. arabe d'Égypte Liban Jordanie Tunisie Différentes catégories de personnes Pauvres B. Préférence pour les allocations en espèces vs. allocations en nature Préférences allocations % de répondants 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Rép. arabe d'Égypte Liban Jordanie Tunisie Biens (nourriture, vêtements, etc) Espèces Source: calcul des auteurs basés sur le sondage MENA SPEAKS. Note: PAS = programmes d’assistance sociale. L’économie politique des réformes de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 35 liées à la scolarisation des enfants et aux efforts dans la recherche active d’un emploi étaient les plus plébiscitées. Il est intéressant de constater qu’en Egypte, les pauvres « auto-identi�és » étaient beaucoup plus ouverts à cette idée que la classe moyenne et les pauvres. Si les pouvoirs publics devaient développer des programmes condi- tionnels, il serait nécessaire d’organiser des campagnes de communication efficaces expliquant le bien-fondé de cette méthode. L’Adhésion à la réforme des subventions varie, avec une préférence pour les allocations ciblant les pauvres L’adhésion à la réforme des subventions varie pays en pays, elle est faible en Egypte et élevée au Liban. La �gure 30 illustre la tolérance relative à la réforme des subventions par rapport à une liste de produits subventionnés. Dans tous les pays, le groupe à revenus moyens inférieurs paraît moins disposé à s’opposer à la réforme des subventions que les groupes à revenus moyens supérieurs et élevés. Dans trois pays sur les quatre (exception faite du Liban), le groupe à revenus moyens inférieurs est plus disposé à envisager la réforme des subventions que les pauvres « auto-identi- �és ». Cela pourrait s’expliquer par le fait que le groupe à revenus moyens inférieurs ne dépend pas des subventions autant que les pauvres et que leurs allocations ne représentent pas la plus grosse part de la subvention, comme cela peut-être le cas pour les membres du groupe moyen supérieur et pour les riches. Les citoyens qui étaient disposées à envisager la réforme d’au moins une des subventions étaient plus enclins à adhérer à la réforme des subventions du car- burant qu’à la réforme des subventions alimentaires. Au Liban, une majorité écrasante de la population semblait en faveur de la suppression de la relativement Figure 29 Adhésion aux conditionnalités des PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, 2012 80 70 60 Répondants, % 50 40 30 20 10 0 Rép. arabe d'Égypte Liban Jordanie Tunisie Pas de conditionnalités Conditionnalités Source: calculs des auteurs basés sur le sondage MENA SPEAKS. Note: PAS= programmes d’assistance sociale. 36 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Figure 30 Résistance à la réforme des subventions de tout produit, par le groupe de revenu auto-déclaré au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, 2012 70 Répondants opposés, % 60 50 40 30 20 10 0 Pauvre Revenu intermédiaire Revenu moyen supérieure et riche Rép. arabe d'Égypte Liban Jordanie Tunisie Source: calculs des auteurs basés sur le sondage MENA SPEAKS. méconnue subvention à la tabaculture (voir �gure 31). Les pouvoirs publics peuvent se servir de ces informations pour créer une coalition pro-réforme. La majorité des populations du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord préfère uti- liser les économies générées par la réforme des subventions pour les transferts en espèces ciblés sur les pauvres (complétés dans le cas du Liban par l’augmen- tation des investissements dans l’éducation et la santé). A la question de savoir comment les économies réalisées sur les réformes des subventions pouvaient être utilisées, la plupart des répondants en Egypte, en Jordanie et en Tunisie favorisaient les transferts en espèces, ciblés uniquement vers les pauvres, au détriment de l’aug- mentation des dépenses en biens publics, des transferts mal ciblés, ou des allocations universelles (voir �gure 32). Au Liban, cependant, la majorité des personnes interro- gées préférait compléter les transferts en espèces aux pauvres par l’augmentation des investissements dans l’éducation et la santé. Toutefois, l’appui pour les transferts en espèces étroitement ciblés vers les pauvres diminue à mesure que les revenus augmentent. Les répondants s’iden- ti�ant comme appartenant aux groupes à revenus moyens inférieurs, à revenus moyens supérieurs, ou riches étaient moins enclins à adhérer aux transferts moné- taires étroitement ciblés sur les pauvres y la plupart d’entre ceux ont plutôt opté soit pour les transferts en espèces plus flexibles ou pour l’augmentation des dépenses de santé et d’éducation a�n de pouvoir béné�cier de ces réformes. Il est important de lire ces résultats en tenant compte du fait qu’une plus large proportion de la popu- lation s’était identi�ée comme pauvre comparé au nombre réel de personnes appar- tenant au quintile inférieur de revenus. Ces pauvres subjectifs seraient plus enclins à se considérer comme le groupe cible des allocations, et pourraient, in fine, être très déçus s’ils se retrouvaient parmi les perdants de la réforme. L’économie politique des réformes de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 37 Figure 31 Produit préféré en termes de suppression des réformes (dans l’hypothèse de la nécessité d’une réforme) au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, 2012 Huile de cuisson 6 Rép. arabe d'Égypte Sucre 14 Pain Baladi 17 GPL 35 Diesel 31 Essence 53 97 Tabac (producteurs) Liban Pain / farine 7 Mazot (diesel) 20 Essence 25 Eau 33 Jordanie Electricité 12 GPL / bouteilles de gaz 20 Diesel 50 Pain / farine 34 Diesel 42 Huile de cuisson 28 Tunisie Sucre 28 Semoule 15 Pain / farine 13 0 20 40 60 80 100 Source: sondage MENA SPEAKS. Note: GPL =Gaz de pétrole liquéfié. Chaque barre affiche le pourcentage des sondés qui, dans chaque pays, a nommé le produit comme première ou seconde préférence pour la réforme de ses subventions. Figure 32 Ciblage préféré des transferts après la réforme des subventions, au Moyen- Orient et en Afrique du Nord, pays sélectionnés, 2012 80 71 70 61 60 54 56 Répondants, % 50 40 35 30 23 27 20 17 16 16 8 10 10 3 1 1 1 0 Rép. arabe d'Égypte Jordanie Liban Tunisie Seulement les pauvres Tous sauf les riches Tous Seulement les pauvres + investissement dans la santé et l'éducation Source: calcul des auteurs basés sur le sondage MENA SPEAKS. 38 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord L’Expérience « Jordan Gives » analyse l’adhésion à la conception des PAS L’expérience comportementale Jordan Gives fournit des informations empi- riques sur les caractéristiques qui ont suscité la préférence pour des méthodes de distribution particulières. Dans l’ensemble, environ deux tiers des 420 partici- pants à cette enquête avaient décidé de faire don de leurs bons de carburant d’une valeur de 10 dinars jordaniens (JD) à n’importe quelle station d’essence en échange de l’aide aux pauvres de leurs communautés. Le concept de PAS ayant obtenu le taux le plus élevé de dons de bons de carburants était les transferts en nature incon- ditionnels, suivi des transferts en espèces inconditionnels. Le concept qui a obtenu le taux de dons le plus bas était celui des transferts en espèces conditionnels à la participation à une formation. Ceci con�rme les conclusions de MENA SPEAKS selon lesquelles les populations du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ne semblent pas disposées à demander aux béné�ciaires de PAS d’agir en échange de l’assistance. Par ailleurs, l’expérience a permis, à travers la méthode des essais contrôlés aléa- toires d’évaluer l’impact de l’introduction d’informations destinées à renforcer la confiance des participants sur le fait que leurs dons en espèces parviendraient à la cible visée (voir �gure 33). Dans l’ensemble, les personnes du groupe expé- rimental avaient légèrement plus tendance à donner que ceux du groupe témoin mais cette différence n’est pas statistiquement signi�cative. L’effet du traitement était cependant important auprès des personnes qui avaient peu de con�ance dans la précision du ciblage des PAS existants : ce groupe a démontré une tendance générale Figure 33 Propension du groupe de traitement et du groupe témoin des PAS à offrir les bons d’achat en Jordanie, 2012 de carburant pour aider les pauvres,% Répondants qui donneraient les bons 75 70 65 60 55 50 Transfert inconditionnel Transfert en nature Transfert inconditionnel Transfert conditionnel en espèces (nourriture) en espèces + transfert en espèces à l'école locale Traitement Contrôle Source: calculs des auteurs basés sur les données de l’Expérience Jordan Gives 2012. Note: PAS = programmes d’assistance sociale. L’économie politique des réformes de l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord 39 inférieure pour les dons en espèces mais cette tendance a été contrecarrée dans les groupes expérimentaux où la transparence du service a été renforcée. L’expérience suggère qu’il est possible pour les pouvoirs publics d’améliorer l’adhésion des popu- lations aux PAS, même lorsque le niveau de con�ance est faible, à travers le renfor- cement des mesures de transparence. Par ailleurs, les caractéristiques des participants étaient associées à des modèles spécifiques de dons : t Toutes choses égales, les personnes qui se considèrent comme classe moyenne (par rapport aux personnes ayant déclaré appartenir soit aux ménages à revenus faibles soit à revenus supérieurs) étaient plus enclins à donner dans tous les cas de �gure sauf le transfert conditionnel en espèces (sur lequel le niveau de revenus n’a eu aucun impact); t Ceux qui pensaient que l’assistance sociale des pouvoirs publics était inefficace avaient moins tendance à choisir les options associées aux services offerts par les pouvoirs publics (écoles et formations) par rapport aux personnes qui pensaient que le gouvernement déposait de PAS efficaces ; t Ceux pour qui la pauvreté résultait de la paresse plutôt que de l’injustice sociale ou de la malchance avaient moins souvent tendance à faire des dons aux écoles, tandis que ceux qui pensaient qu’une carrière réussie découlait du travail (par opposition à la chance ou aux relations) étaient plus enclins à faire des dons aux écoles ; t Il est intéressant de noter que le niveau d’éducation des participants n’a pas semblé jouer de rôle dans la propension à donner sorte des transferts en espèces, en nature ou à l’école ; cependant, les participants avec un diplôme de l’ensei- gnement supérieur avaient une propension plus forte à soutenir les transferts conditionnels en espèces ; t Par rapport aux participants dans la force de l’âge, les jeunes et les personnes âgées étaient plus disposés à faire dons de leurs bons de carburant en échange de paniers de nourriture aux familles pauvres de leurs communautés. Perspectives : comment rendre l’assistance sociale plus efficace 5 et novatrice au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ? L es PAS peuvent devenir un instrument déterminant des transitions écono- miques et sociales au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Tel que décrit dans le cadre de la réforme des PAS (�gure 3), les �lets sociaux de sécurité peuvent promouvoir les trois objectifs suivants : a) l’inclusion sociale, à travers l’investissement dans le capital humain (comme l’appui à la scolarisation ou à une meilleure nutrition des enfants) ; b) les moyens de subsistance, en protégeant de la misère et c) la résistance aux crises, en permettant aux ménages d’amortir les effets des chocs. L’atteinte de ces objectifs nécessite le recentrage des objectifs des PAS de la région. L’instrument prédominant en matière de PAS dans le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord — les subventions du carburant et subventions alimentaires — garantit un meilleur accès à des biens de première nécessité pour un coût budgétaire élevé. Cet instrument atteint uniquement l’un des objectifs des PAS, à savoir l’appui aux moyens de subsistance. La région n’accorde actuellement que très peu d’atten- tion à la promotion de l’inclusion et de la résistance aux chocs. L’atteinte des trois objectifs va requérir une réorientation des PAS vers les objectifs suivants : t renforcer l’accent sur les personnes pauvres et vulnérables t donner aux citoyens les outils nécessaires pour améliorer leur existence t assurer un appui temporaire rapide en réponse aux crises t donner la parole aux citoyens, promouvoir l’engagement civique et l’appropria- tion des politiques. Les PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Le moment d’une réforme des PAS au Moyen Orient et en Afrique du Nord est venu. La région s’appuie trop sur les subventions de prix généralisés et sur les cartes de rationnement. Celles-ci font perdre des ressources déjà limitées aux Etats, en raison des taux élevés de fuites. Si l’on laisse de côté les subventions, les PAS au 41 Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont sous-�nancés et fragmentés. La plupart des personnes pauvres et vulnérables ne béné�cient pas des petits programmes uti- lisant les méthodes de ciblage géographique et par catégorie. Par ailleurs, des mé- thodes inadéquates de ciblage aboutissent à des fuites importantes des allocations des PAS vers les non pauvres, limitant de fait les ressources qui pourraient servir à d’autres programmes en vue de réduire la pauvreté et d’améliorer la distribution des ressources dans la région. Bien que les subventions (et surtout les subventions du carburant) soient très inefficaces par rapport à d’autres interventions, beaucoup de personnes en dépendent pour échapper à la pauvreté. Partir de la situation actuelle pour constituer des PAS plus efficaces, �ables et équitables nécessite une réflexion approfondie portant non seulement sur les aspects techniques de la réforme, mais aussi, et surtout, sur les questions sensibles liées à l’économie politique de la ré- forme. Les PAS au Moyen-Orient et en Afrique du Nord peuvent faire mieux en termes de promotion de l’inclusion, de renforcement des moyens de subsistance et de la résistance aux chocs et c’est ce que les citoyens de la région attendent. Le sondage MENA SPEAKS et l’expérience Jordan Gives ont démontré que les popula- tions tiennent les pouvoirs publics pour principaux responsables de la prestation de PAS, et très peu de personnes sont satisfaites de l’efficacité des politiques et des PAS actuels. En effet, le type de programme préféré par les populations dans plusieurs pays de la région est conforme aux meilleures pratiques en matière de conception des PAS. Par conséquent, les pouvoirs publics béné�cient d’un environnement pro- pice permettant de rallier une majorité à la réforme des PAS. En outre, des réformes réussies présentant des résultats positifs importants ont déjà été mises en place dans plusieurs parties de la région. Par exemple, la Cisjor- danie et Gaza a créé un registre uni�é à travers tous ses PAS, ce qui a considérable- ment amélioré la précision du ciblage et la capacité de réponse aux crises. Au cours de la dernière crise, le gouvernement de la République du Yémen a apporté une ré- ponse rapide à travers un programme de haute intensité de main d’œuvre (HIMO) pour combler l’écart de consommation des couches pauvres et vulnérables, tout en créant des actifs communautaires. Simultanément, des réformes importantes ont été faites au niveau du principal programme de transfert en espèces (le fonds d’action sociale), à savoir a) l’amélioration du ciblage de la pauvreté reposant sur une formule de véri�cation indicative des biens (PMT), b) le renforcement des capacités de pres- tations de services, et c) la mise en place d’un nouveau cadre juridique et politique. A la lumière des défis spécifiques auxquels les populations pauvres et vulné- rables du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord font face, et au vu de l’état actuel des PAS, la mise en place de PAS plus efficaces et novateurs demande des actions dans plusieurs domaines. S’il est vrai qu’il n’existe pas une solution idéale de meil- leurs résultats pourraient être obtenus en actionnant les quatre leviers suivants : 42 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord t améliorer l’impact des PAS, y compris leur effet sur la pauvreté présente et future ; t établir une infrastructure fiable, mais flexible, de PAS qui pourrait être utilisée en période normale comme en période de crise ; t consolider les programmes fragmentés de PAS et intégrer lesdits programmes dans les systèmes de protection sociale, et t réorienter les financements et les priorités des systèmes de sécurité sociale, en met- tant l’accent sur les programmes ciblés plutôt que sur les subventions univer- selles. Faire participer les citoyens et les autres parties prenantes aux programmes de ré- forme pourrait améliorer leur faisabilité et en faciliter la réussite. Améliorer l’Impact des PAS En ce moment, la plupart des PAS qui ne sont pas des subventions au Moyen- Orient et en Afrique du Nord ont un impact limité sur la pauvreté et l’inégalité en raison de leur faible couverture, combinée à des pratiques de ciblage inefficaces et à des systèmes de S&E inadéquates ou inexistants. Par conséquent, la voie à suivre pourrait impliquer les actions suivantes: t La priorisation des interventions qui favorisent l’investissement dans le capital hu- main. Ceci pourrait être obtenu par : a) l’augmentation de la taille des TCE à succès dans la région (ex. le programme Tayssir au Maroc) et des programmes à HIMO (ex. le Fonds de protection sociale en République du Yémen) ; b) le réajus- tement de la conception des programmes existants, pour les rendre plus efficaces, en faveur des enfants, des jeunes et des femmes (à l’instar du programme HIMO et nutrition de Djibouti) ; ou c) la création de nouvelles interventions visant à combler les lacunes, sur la base des meilleures pratiques mondiales en adaptant leur conception a�n d’autonomiser les populations pauvres et vulnérables. t L’amélioration du ciblage des personnes pauvres et vulnérables. L’amélioration du ciblage peut contenir les coûts, améliorer l’équité, permettre aux PAS de jouer un rôle d’assurance et accroitre leur efficacité. La plupart des programmes de la région restent basés sur le ciblage géographique et par catégorie bien que l’effica- cité de ces méthodes ne soit avérée que dans des contextes de concentration de la pauvreté. Dans le même temps, les populations interrogées dans le cadre de l’enquête MENA SPEAKS ont indiqué leur préférence marquée pour le ciblage basé sur la pauvreté, par opposition au ciblage géographique et par catégorie. Un mouvement important peut déjà être observé dans la région (Cisjordanie et Gaza, Djibouti, Irak, Jordanie, Liban et République du Yémen) en faveur du ciblage basé sur la pauvreté. Les résultats dans ces pays ont démontré la puissance de telles réformes et soulignent la marche à suivre. t Une plus grande concentration des efforts sur les résultats des PAS à travers le S&E et la responsabilité sociale. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, le renfor- Perspectives 43 cement du S&E des PAS peut permettre de réallouer des ressources budgétaires entre programmes, d’assurer le suivi des opérations au jour le jour, et de suivre les résultats des interventions. Le S&E s’est avéré particulièrement efficace lorsque les décisions budgétaires et la réforme des programmes étaient appuyées sur les résultats de l’évaluation et sur des données empiriques. Ce fut le cas, par exemple, en Cisjordanie et Gaza et en République du Yémen. En outre, l’introduction des systèmes de responsabilité sociale performants peut améliorer l’efficacité et la responsabilité et de combattre la corruption. t Faire appel aux autres parties prenantes (citoyens, ONGs, organisations de la société civile [OSCs], secteur privé, et organisations à but non lucratif ). Comme l’a révélé le sondage MENA SPEAKS, la sensibilisation sur les PAS existants est faible, déséquilibrée et dirigée vers les riches. Des campagnes de communication ex- haustives sont nécessaires a�n d’informer les pauvres et vulnérables de l’existence des �lets de sécurité à leur disposition. En outre, faire participer un plus large éventail de parties prenantes (p.ex. ONGs, OSCs, secteur privé, et organisations à buts non lucratifs) au �nancement et à la mise en œuvre des PAS permettrait de mettre à pro�t leurs ressources �nancières et humaines. Mettre en place une infrastructure �able et flexible Un système de PAS efficace peut permettre aux populations d’amortir les effets des chocs idiosyncratiques en temps normal et des chocs systémiques en pé- riode de crise. La récente crise économique mondiale a souligné la faible capacité des systèmes de PAS existants au Moyen-Orient et en Afrique du Nord à remplir cette fonction. Promouvoir la résistance des ménages aux chocs à travers les PAS nécessite une bonne infrastructure administrative. La mise en place d’une telle infrastructure avant la survenue d’une crise permet de développer plus rapidement et plus efficace- ment des actions correctives et d’atténuation — telles le déploiement des allocations pour les plus vulnérables ou l’expansion de la couverture — améliorant ainsi la résistance aux chocs. En particulier, la mise en place d’une meilleure infrastructure de PAS pourrait comporter : t La création de registres unifiés des bénéficiaires. Ces registres pourront servir au ci- blage de programmes multiples. En temps normal, les registres uni�és peuvent réduire les coûts et faciliter la cohérence et la convergence, car tous les agents travaillent sur la même base de données. En temps de crise, les registres uni�és peuvent servir à décaisser rapidement des allocations supplémentaires pour les populations cibles, ou à élargir la couverture en ajustant les critères d’éligibilité. La Cisjordanie et Gaza est un exemple de bonne pratique à cet égard dans la région. t L’utilisation de mécanismes efficaces de prestations des services. En temps normal, les systèmes modernes de distribution des allocations sont importants pour réduire 44 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord les coûts administratifs et les fuites en faveur des non béné�ciaires, éviter la corruption, et rendre les transferts des paiements aux béné�ciaires rapides et flexibles. L’utilisation effective des technologies modernes, telles que les cartes à puce, les paiements par téléphone, et les paiements aux guichets des établisse- ments bancaires, facilitent une réponse rapide en cas de crise. Consolider les PAS fragmentés en Afrique du Nord et au Moyen-Orient Les programmes de transferts directs (en nature ou en espèces) sont souvent de petite taille et très fragmentés. L’expérience internationale suggère que la méthode consistant à se limiter à quelques programmes complets, spéci�quement conçus pour atteindre les personnes pauvres et vulnérables, peut résoudre les problèmes actuels de vulnérabilité et les lacunes en matière de protection sociale en augmen- tant à la fois la couverture (actuellement en dessous de 20 pourcent des pauvres dans la plupart des pays) et les allocations (actuellement à environ 5–10 pourcent de la consommation des pauvres). Certaines parties de la région (p.ex. la Cisjordanie et Gaza et le Maroc) ont commencé à réformer leurs PAS dans ce sens. La consolidation des PAS ne demande pas beaucoup de préalables ; ainsi, les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord peuvent avancer assez rapidement dans ce domaine. Pour y parvenir, les pouvoirs publics peuvent commencer par identi�er les faiblesses des PAS et établir un inventaire des PAS, notamment leurs objectifs, les critères d’éligibilité, et le type d’allocations. Le Maroc, par exemple, a récemment entrepris ce type d’analyse (Banque mondiale 2011b). Forts de telles études, les pouvoirs publics peuvent identi�er des programmes susceptibles d’être développés ou consolidés et formuler une stratégie pour la mise en œuvre de la réforme. Rééquilibrer le �nancement et les priorités des PAS La réduction des subventions universelles coûteuses et régressives (en particu- lier les subventions du carburant) diminuerait les déséquilibres budgétaires et permettrait de libérer des ressources pour d’autres PAS. Au lieu de se concentrer sur des programmes ciblés, les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord en- gagent une part importante des dépenses de PAS sur les subventions de l’énergie et seulement une faible part sur des programmes d’assistance sociale ciblés. La réduc- tion des subventions universelles coûteuses et régressives diminuera les déséquilibres �scaux et libèrera des ressources pour d’autres instruments de �lets de sécurité. Spé- ci�quement, cela pourrait se traduire par les mesures suivantes : t Augmenter les dépenses et améliorer la couverture des PAS, hors subventions, pour protéger de la misère. Partout dans le monde, les réformes réussies de subventions Perspectives 45 ont démontré l’importance de gagner la con�ance des populations sur la capa- cité du gouvernement à offrir des allocations justes et �ables en compensation de la réduction ou de la perte de ces subventions. A la lumière des informations fournies par MENA SPEAKS et Jordan Gives, il est important de démontrer la volonté de mettre en place des PAS efficaces et inclusifs pour arriver à une réforme complète des subventions. Ceci pourrait être réalisé à travers la créa- tion de nouveaux programmes, le renforcement des programmes efficaces, et la réforme des programmes inefficaces. t Réformer les subventions des prix à travers des réformes systématiques ou internes. Le séquençage des réformes sensibles — comme les réformes des subventions universelles des prix — est crucial pour leur succès. Pour gagner en crédibilité, les pouvoirs publics pourraient commencer par : Z Améliorer le ciblage des subventions (par exemple au moyen d’une différen- ciation du marketing et de l’offre, ce qui pourrait entraîner l’auto ciblage, comme en Tunisie), diminuer la couverture de la subvention (p.ex. à travers des tarifs sociaux pour l’électricité) et réduire les fuites dans la chaîne de distribution. Z Identifier les subventions les plus sensibles et se concentrer plutôt sur les subven- tions les plus régressives. Selon le sondage MENA SPEAKS, les sensibilités étaient les plus fortes concernant la réforme des subventions pour l’huile de cuisine en Egypte, le pain au Liban et en Tunisie, et l’électricité en Jorda- nie. Ces subventions pourraient n’être réformées qu’après la démonstration par les pouvoirs publics de leur capacité à réformer des subventions moins sensibles. Les �nancements alloués à la subvention du carburant représen- tant plus de trois fois le montant destiné aux subventions alimentaires, la réforme des subventions non alimentaires s’avère plus facile. Lors des son- dages MENA SPEAKS, les citoyens ont indiqué qu’ils choisiraient le tabac au Liban, le carburant en Egypte, et le diesel en Jordanie et en Tunisie, s’il leur fallait choisir un produit dont les subventions devraient être réformées. Z Impliquer les citoyens dès le début du dialogue sur les allocations et les sensibiliser à travers des campagnes d’information. Les gouvernements peuvent se servir des résultats de l’enquête MENA SPEAKS pour initier un dialogue sur le type d’allocations souhaité dans leurs pays. Selon les données disponibles actuellement, les populations du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord pré- fèrent que les pouvoirs publics a) ciblent les compensations en espèce sur les pauvres après la réforme des subventions (Egypte, Jordanie et Tunisie) ou b) combinent les transferts en espèces aux pauvres à l’investissement de l’épargne de la réforme des subventions en forme de l’éducation et la santé (Liban). 46 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Le processus de réforme des PAS diffère d’un pays à l’autre au sein de la région, compte tenu du stade actuel de développement de chacun et des principaux défis des PAS existants. Les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord se trouvent à différents stades d’avancement en matière de développement humain et de réformes des PAS. Les deux pays les plus avancés de la région en matière de réformes des PAS sont la Cisjordanie et Gaza et la République du Yémen, présentant respectivement des niveaux de développement moyens et faibles (selon l’estimation de l’Indice de Développement Humain du Programme des Nations Unies pour le développement). Ces pays ont pu mettre en œuvre des interventions réussies de PAS (établissement d’un registre uni�é en Cisjordanie et Gaza et réforme du Fonds d’action sociale en République du Yémen) qui ont permis de répondre à leurs besoins spéci�ques. Le Ba- hreïn, le Djibouti, la Jordanie, le Liban et le Maroc ont pris des mesures importantes pour une réforme de leurs PAS, à l’instar du programme HIMO et nutrition à Dji- bouti, d’un programme pilote TCE au Maroc, des réformes du système de subven- tions en Jordanie et à Bahreïn, et une base de données de ciblage au Liban. D’autres pays envisagent actuellement de nouveaux programmes de réforme de leurs PAS. Dans chaque pays, l’approche à adopter pourrait inclure des mesures à court et à moyen termes, avec des objectifs complémentaires qui se renforcent mutuelle- ment. Sur le court terme, les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord peuvent commencer à démontrer de meilleurs résultats en utilisant les PAS existants, en peau�nant la conception des programmes existants et en créant des registres uni�és, ou en pilotant de nouveaux programmes tels que les TCE et les « HIMO plus ». Sur le moyen terme, plus d’importance pourrait être accordé aux réformes qui requièrent une plus grande capacité avérée tels le raffinement de l’infrastructure des PAS exis- tants et une réforme globale des subventions. Faire participer un large éventail de parties prenantes à un dialogue inclusif et ouvert pourrait faciliter les réformes envi- sagées et promouvoir un rôle d’autonomisation pour les PAS dans la région. Perspectives 47 Annexe A.1 Description des données utilisées Pays Enquête Année Description Rép. arabe Enquête panel sur le marché du 2006 ELMPS a été réalisée par le Conseil de la population d’Égypte travail (ELMPS) et CAPMAS avec le soutien de l’USAID Egypte et de la Fondation Ford. Rép. arabe Enquêtes sur le revenu, les 2005 et HIECS ont été réalisées par CAPMAS (Agence centrale pour d’Égypte dépenses et la consommation 2008/9 la mobilisation publique et les statistiques). des ménages (HIECS) Rép. arabe Enquête sur les jeunes en 2009 Le Conseil de la population a réalisé l’Enquête sur les d’Égypte Egypte (SYPE) jeunes en Egypte (SYPE) en collaboration avec le Cabinet égyptien, Centre d’Information et Aide à la Décision. Irak Enquête socio-économique des 2006–07 Le Ministère de la Planification et de la Coopération ménages en Irak (IHSES) Internationale et l’Organisation centrale de la statistique et des technologies de l’information a réalisé l’IHSES avec le soutien de la Banque mondiale. Jordanie Enquête démographiques et de 2009 L’enquête sur la population et la santé des familles en santé (DHS) Jordanie (JPFHS) a été réalisée par la direction de la statistique (DOS). Jordanie Enquêtes sur le revenu et les 2010 L’enquête sur le revenu et les dépenses des ménages dépenses des ménages (HIES) en Jordanie (HIES) a été réalisée par la direction de la statistique (DOS). Jordanie Enquête panel sur le marché du 2010 L’enquête panel sur le marché du travail en Jordanie travail en Jordanie (JLMPS) (JLMPS) a été réalisée par le Forum de recherche économique en coopération avec le Centre National pour le développement des ressources humaines (NCHRD) et la direction de la statistique (DOS). Jordanie Jordan Gives expérience 2012 Expérience comportementale conçue par la Banque comportementale mondiale pour cette étude, et réalisée par le Centre pour les études stratégiques, Université de Jordanie, sur un échantillon représentatif de la classe moyenne jordanienne. (suite à la page suivante) 49 Pays Enquête Année Description Liban Enquête nationale sur les 2004 L’enquête nationale sur les conditions de vie des ménages conditions de vie des ménages (NHS) a été réalisée par le Ministère des Affaires Sociales, (NHS) l’Administration Centrale de la Statistique et l’Organisation des Nations Unies pour le développement (PNUD) en 2004. Maroc Enquête sur les ménages et les 2010 L’enquête sur les ménages et les jeunes en Maroc (MHYS) jeunes en Maroc (MHYS) 2009–10 a recueilli des informations auprès d’un échantillon national représentatif de 2.000 ménages à travers le pays. Rép. arabe Enquête sur le revenu et les 2004 L’enquête sur le revenu et les dépenses des ménages en de Syrie dépenses des ménages (HIES) Rép. arabe syrienne (HIES) 2003–04 a été réalisée par le Bureau centrale de la statistique. Rép. du Enquête sur le budget des 2005–06 L’enquête sur le budget des ménages 2005–06 a été Yémen ménages (HBS) réalisée par l’Organisation centrale de la statistique au Yémen. Plusieurs Enquête en grappes à 2006 Les enquêtes en grappes à indicateurs multiples (MICS) pays Indicateurs Multiples (MICS) sont une initiative de l’UNICEF pour aider les pays dans la collecte et l’analyse de données pour combler les lacunes de données pour le suivi de la situation des enfants et des femmes. Plusieurs Enquête MENA SPEAKS 2012 Nouvelle base de données comprenant des données pays administratives des PAS, créée pour cette étude. Un questionnaire standard a été créé afin d’obtenir des informations détaillées sur les PAS, y compris leur nombre de bénéficiaires et leurs coûts budgétaires. Les questionnaires ont été complétés par des informations obtenues des gouvernements et de l’internet. La collecte des données a été suivie par des consultations élargies avec les points focaux de la Banque mondiale dans la région et/ou des informateurs clés au sein des gouvernements respectifs, y compris les participants des ateliers de consultation qui se sont tenus à Beyrouth, Mascate et Tunis. Il est important de noter que les données recueillies dans l’inventaire peuvent différer des dernières estimations officielles. La Banque mondiale envisage de continuer cet inventaire pour stimuler l’étude continue des PAS dans la région, et encourage la soumission des informations actualisées aux auteurs. 50 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord Références Chamlou, N., S. Muzi, and H. Ahmed. 2008a. “MENA Home-Based Work: Evidence from Amman, Cairo, and Sana’a.� Unpublished re- port, World Bank, Washington, DC. ———. 2008b. “Women Labor Force Participation, Education and Non-Economic Factors: The Case of Middle East and North Africa Countries.� Unpublished report, World Bank, Washington, DC. Gallup Inc. 2011. World Poll Survey. Government of Jordan. 2011a. “An Analysis of Consumption Subsi- dies.� Note prepared for the Hashemite Kingdom of Jordan by the World Bank, Washington, DC, and the Government of Jordan, Amman. Government of Jordan. 2011b. “The Hashemite Kingdom of Jordan: Social Protection Review.� Unpublished report for the Hashemite Kingdom of Jordan, Amman. Government of Yemen, World Bank, and UNDP (United Nations De- velopment Programme). 2007. “Yemen Poverty Assessment.� World Bank, Washington, DC. IEG (Independent Evaluation Group). 2011. Social Safety Nets: An Evaluation of the World Bank Support, 2010–2011. Washington, DC: World Bank. Kingdom of Morocco. 2006. “Childhood and Disabled Persons: The Na- tional Survey on Disability.� Data set, Kingdom of Morocco, Rabat. Marotta, D. M., R. Yemtsov, H. El-Laithy, H. Abou-Ali, and S. Al- Shawarby. 2011. “Was Growth in Egypt Between 2005 and 2008 51 Pro-Poor? From Static to Dynamic Poverty Pro�le.� Policy Research Working Paper 5589, World Bank, Washington, DC. PovcalNet (database). Online poverty analysis tool. World Bank, Washington, DC. http://iresearch.worldbank.org/povcalnet. UNDP (United Nations Development Programme). 2005. Arab Human Devel- opment Report 2005: Towards the Rise of Women in the Arab World. New York: UNDP. UNICEF (United Nations Children’s Fund). 2009. State of the World’s Children. New York: UNICEF. ———. n.d. Multiple Indicator Cluster Surveys (database). http://www.childinfo. org/mics.html. WHO (World Health Organization) and World Bank. 2010. World Report on Dis- ability. Geneva: WHO. 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Egypt’s Food Subsidies: Bene�t Incidence and Leakages.� Report 57446, World Bank, Washington, DC. ———. 2010b. “Iraq: First Programmatic Fiscal Sustainability DPL Program Doc- ument.� Report 51528–IQ, World Bank, Washington, DC. ———. 2010c. “Yemen: Private Sector Growth and Social Protection Develop- ment Policy Grant Program Document.� Report 55649-YE, World Bank, Wash- ington, DC. ———. 2011a. “Poverty in Egypt 2008–9: Withstanding the Global Economic Crisis.� Report 60249-EG, World Bank, Washington, DC. 52 Perspectives pour l’assistance sociale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ———. 2011b. “Royaume du Maroc: Note Stratégique sur le Ciblage et la Pro- tection Sociale. Ciblage et protection sociale: Note d’orientation stratégique.� Report AAA65–MA, World Bank, Washington, DC. ———. 2012a. Atlas of Social Protection: Indicators of Resilience and Equity (AS- PIRE). 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