VUE D’ENSEMBLE L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE Maitreyi Bordia Das Sabina Anne Espinoza L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   a © 2019 Banque internationale pour la reconstruction et le développement/La Banque mondiale 1818 H Street NW, Washington, DC 20433 Téléphone : 202–473–1000 ; Internet : www.worldbank.org Certains droits réservés La publication originale de cet ouvrage est en anglais sous le titre “Inclusion Matters in Africa” en 2019. En cas de contradictions, la langue originelle prévaudra. Cet ouvrage a été établi par les services de la Banque mondiale avec la contribution de collaborateurs extérieurs. Les observations, interprétations et opinions qui y sont exprimées ne reflètent pas nécessairement les vues de la Banque mondiale, de son Conseil des Administrateurs ou des pays que ceux-ci représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données citées dans cet ouvrage. 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Image de couverture : © Geoffrey Ernest Katantazi Mukasa, Red Face A, 21st century, mixed media collage on paper. Artiste de l’Ouganda. Image reproduite avec la permission du programme d’Art du Groupe de la Banque mondiale. Conception de la page de couverture : Takayo Muroga Fredericks VUE D’ENSEMBLE L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE Maitreyi Bordia Das Sabina Anne Espinoza TABLE DES MATIÈRES Vue d’ensemble Préface 4 Remerciements 6 Principaux messages 9 Pourquoi ce rapport ? Pourquoi maintenant ? 10 L’inclusion sociale : Une introduction 12 Qu’ajoute le concept d’inclusion sociale à la discussion sur la 14 réduction de la pauvreté ? L’Afrique avance à grands pas : Qui est laissé pour compte ? 16 Comment l’exclusion sociale se produit-elle en Afrique ? 25 L’inclusion sociale peut être réalisée si les sociétés 29 s’y engagent sciemment Le changement à l’égard de l’inclusion sociale 30 est à portée de main Notes en fin de texte 42 Références 43 L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   3 PRÉFACE Au cours des dernières années, les pays africains ont connu des progrès remarquables en matière de santé, de nutrition, d’éducation et d’autonomisation des femmes, et les percées dans certains secteurs se sont produites plus rapidement en Afrique que dans n’importe quelle région. L’innovation foisonne en Afrique et se reflète dans de nombreux domaines, notamment dans la future génération de filets de protection sociale ; les nouvelles plateformes fournissant des services aux communautés reculées et fragiles ; l’expansion de la technologie numérique ; et les mouvements de défense des droits, entraînant la reconnaissance par le public des personnes auparavant rejetées. Tandis que des développements prometteurs se profilent, le continent reste confronté à de nombreux défis – qu’il s’agisse de réduire la pauvreté et de venir à bout de la fragilité, ou de gérer les impacts croissants du changement climatique. Pourtant, là où ces éléments positifs se sont produits, nombre de groupes de personnes n’en ont pas tiré parti. Qui sont ces groupes ? Et pourquoi n’ont-ils pas bénéficié de manière équitable des progrès et du développement  ? Pourquoi ont-ils plus de risque d’être pauvres ou de manquer de capital humain ? La réponse à ces nombreuses questions concerne l’exclusion sociale. En 2013, la Banque mondiale a publié un rapport mondial, phare : L’inclusion sociale : Nécessaire fondation pour une prospérité partagée, qui a permis de nous guider afin de mieux analyser et de prendre des mesures plus efficaces pour combattre l’exclusion. L’Inclusion sociale en Afrique est tirée des conclusions du rapport mondial et paraît alors que l’Afrique se trouve au cœur de rapides changements sociaux et économiques, et qu’elle est susceptible de subir une transformation encore plus impressionnante. Il reprend le message principal des Objectifs de développement durable à ne laisser personne pour compte. Et il complète la stratégie du Groupe de la Banque mondiale pour l’Afrique qui a mis tout particulièrement l’accent sur le concept d’inclusion sociale en s’attachant au renforcement du capital humain, à la promotion de l’autonomisation de la femme, à l’amélioration de l’économie numérique, à la lutte contre le changement climatique et à la prise en compte des causes sous-jacentes de la fragilité. 4  VUE D’ENSEMBLE L’Inclusion sociale en Afrique nous dit que la paix et la sécurité sont inexorablement liées à l’inclusion sociale. Et que, même en poursuivant notre mission privilégiant la réduction de la pauvreté, elle ne suffit pas pour mettre fin à l’exclusion de certaines personnes et certains groupes. Le rapport attire l’attention sur les structures et les processus qui animent l’exclusion sociale, façonnant trop souvent les attitudes, les perceptions, les sentiments et les comportements des populations. De manière importante, le rapport a conclu que bien que l’exclusion soit coûteuse, une société inclusive n’était pas gratuite. C’est une décision prise sciemment, quel que soit le pays. Et elle doit être prise avec une réelle compréhension des coûts et des avantages. Assortie d’un contrat social solide et d’une responsabilisation accrue de l’État et des prestataires de service envers les citoyens, l’inclusion sociale en Afrique est à portée de la main, comme le prouvent des centaines d’initiatives à travers l’Afrique. Le rapport repose sur l’expérience des pays africains, mais il montre aussi que les difficultés de l’Afrique en matière d’inclusion sociale ne sont pas uniques ou exceptionnelles. Nous espérons qu’il changera la manière dont les décideurs, les citoyens et les partenaires mondiaux conçoivent le développement, et qu’il nous aidera à remplir la promesse d’égalité des chances pour tous en Afrique. Hafez Ghanem Laura Tuck Vice-président, Afrique Vice-présidente, Développement durable L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   5 REMERCIEMENTS Ce rapport a été écrit par Maitreyi Bordia Das et Sabina Anne Espinoza, sous la Direction stratégique des directeurs de la Banque mondiale Diarietou Gaye (Directrice, Stratégie et opérations, Bureau de la vice-présidence régionale en Afrique [AFRVP]), Maninder Gill (Directeur global, Cadre environnemental et social) et Ede Ijjasz- Vasquez (Directeur régional pour l’Afrique, Développement durable). Les auteures souhaitent exprimer leur gratitude pour le soutien qu’ils leur ont apporté à Louise Cord (Directrice globale, Cadre social), Simon Ehui (Directeur régional pour l’Afrique, Développement durable), Sameh Wahba (Directeur global, Développement urbain, rural et résilience), Anna Wellenstein (Directrice régionale, Région Amérique latine et Caraïbes [ALC]) et Albert G. Zeufack (Économiste en chef, Afrique). L’équipe de gestion régionale pour l’Afrique, dirigée par Hafez Ghanem (Vice-président) a tenu une réunion dédiée pour discuter de ce rapport et a offert des conseils que les auteures ont grandement appréciés. Ce rapport a bénéficié de l’engagement soutenu et des contributions inestimables de Senait Assefa (Administrateur des pratiques, Afrique), Robin Mearns (Administrateur des pratiques, Afrique), Aly Rahim (Administrateur des pratiques, Afrique) et Varalakshmi Vemuru (Spécialiste senior du développement social, Afrique). Les pairs évaluateurs pour ce rapport étaient Tom Bundervoet, Helene Carlsson Rex, Shanta Devarajan, German Freire et Angela Khaminwa de la Banque mondiale, et Cyprian Fisiy (Fondateur, Fisiy Foundation et Leadership Center, Cameroun). Les auteures sont reconnaissantes de leurs commentaires judicieux et de l’opportunité de discuter plus avant avec eux. D’autre part, elles remercient Emcet Tas (Banque mondiale) pour sa contribution au chapitre 2, et Angela Khaminwa (Banque mondiale) pour sa collaboration à l’Annexe 2. Les lectures approfondies des versions antérieures du rapport par Soumya Kapoor (Consultante principale) et par Shruti Majumdar (ONU Femmes) se sont avérées précieuses. Plusieurs autres collègues ont donné leurs avis et fait leurs recommandations, apporté leur concours en matière de contexte et envoyé des commentaires écrits lors des diverses phases de préparation du rapport. Ces personnes incluent Kathleen Beegle, Chifundo Chilera, Louise Cord, Gina Cosentino, Clifton Cortez, Raphael A. Espinoza, Patricia Fernandes, Jana El-Horr, Kamila Galeza, Michael Gboyega Ilesanmi, Marek Hanusch, Bernard Harborne, Somik Lall, Gloria Malia Mahama, Charlotte McClain-Nhlapo, Gayle Martin, Erwin de Nys, Helidah Refiloe Atieno Ogude, Daniel Owen, Margarita Puerto Gomez, Siddhartha Raja, Deepti Samant Raja, Lisa Schmidt, Nicholas Meitaki Soikan, Ruchi Singh, Simon Sottsas, Victor Sulla et Najat Yamouri. Suite aux premiers messages émanant du rapport, des débats très instructifs ont été organisés avec Andre Bald, Paolo Belli, Adrian Cutler, Kevin Heraniah, Muratha Kinuthia, Emma Mistiaen, 6  VUE D’ENSEMBLE Johan Mistiaen, Shamis Musingo, Abdu Muwonge, Margaret Ombai, Annette Omollo, Utz Pape, Abla Safir, Nadia Selim et Vanessa Tilstone. Les discussions menées avec divers partenaires du gouvernement, de la société civile et du milieu universitaire ont enrichi ce rapport. L’Annexe 1 décrit certains de ces engagements. Par ailleurs, les auteures tiennent à remercier Wanjiru Kamau- Rutenberg (AWARD), Winnie Mitullah et Karuti Kanyinga (Institut pour les études de développement, Université de Nairobi), Shadrack Musyoka (Comté de Kitui, Kenya), Munawwar Alam (Agence des États-Unis pour le développement international [USAID]/Kenya), les membres du parlement de Sierra Leone, Yvonne Aki-Sawyerr (Maire de Freetown, Sierra Leone) et les membres du Système des Nations Unies en Sierra Leone, avec lesquels ils ont abordé les résultats préliminaires du rapport. Paul Gallagher, Maura Leary, Kristyn Schrader-King et Andy Shuai Liu ont été d’une assistance remarquable pour formuler les messages clés de même que les conseils concernant les communications relatives au rapport. Elizabeth Acul et Lucie Albert- Drucker ont apporté un soutien administratif essentiel, et Michelle Morandotti a prêté assistance à l’équipe de production. Nous sommes très reconnaissants à Flavia Carbonari pour sa contribution a la traduction de la Vue d’ensemble en portugais. Enfin, Takayo Fredericks a assuré la conception et la mise en page du rapport, et Dina Towbin and Associates a fourni les services d’édition. L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   7 VUE D’ENSEMBLE Principaux messages 1. Au cours des dernières décennies, l’Afrique a fait des progrès significatifs en matière d’inclusion sociale, avec de nombreuses régions progressant plus rapidement qu’à l’échelle mondiale. 2. Certains groupes et certaines régions d’Afrique n’ont pu bénéficier des progrès économiques et sociaux et restent exposés à des risques. Le concept d’inclusion sociale nous aide à comprendre qui est exclu, de quoi on est exclu, de quelles façons et pour quelles raisons. 3. Le concept d’inclusion sociale attire l’attention sur les facteurs de pauvreté en Afrique et permet de comprendre que même si nous devons nous concentrer sur la réduction de la pauvreté, il reste aussi beaucoup à faire pour mettre fin à l’exclusion de certains individus et groupes. 4. Les structures et les processus qui aident et encouragent l’exclusion sociale ont souvent des origines historiques et culturelles. 5. Les régions qui sont en situations de conflit ou de fragilité se distinguent par le fait d’avoir les plus médiocres résultats en terme d’inclusion sociale. Inversement, la paix et la sécurité sont importantes pour l’inclusion sociale. 6. Les sociétés encourent des coûts importants du fait de l’exclusion sociale. Pourtant, réaliser l’inclusion sociale entraîne également des coûts. Par conséquent, investir dans l’inclusion sociale doit être un choix délibéré des États et des sociétés. 7. Avec un contrat social solide, l’inclusion sociale en Afrique est parfaitement à portée de main, comme le prouvent des centaines d’initiatives à travers le continent. L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   9 Pourquoi ce rapport ? Pourquoi maintenant ? L’Afrique est aujourd’hui au centre de l’attention mondiale en raison de ses nombreux accomplissements et de son dynamisme, mais aussi à cause de défis de taille qu’elle doit confronter. La pauvreté a diminué, les résultats de développement humain se sont améliorés et des mouvements sociaux dynamiques aident à transformer les communautés et à attirer l’attention sur les problèmes de stigmatisation et sur les populations qui en sont victimes. Les innovations technologiques se sont répandues dans nombre de régions éloignées. Des nouvelles politiques et des nouveaux programmes à travers le continent ont souligné l’importance de l’inclusion sociale. Dans certains domaines, les pays africains ont pris le devant en matière de progrès ; par exemple, ces dix dernières années, l’Afrique a mis en place plus de réformes visant à promouvoir l’égalité des genres que toute autre région du monde. Et pourtant, comme ailleurs en Afrique aussi les développements positifs ont été inégaux. Ils ont laissé pour compte beaucoup de régions et de groupes. La technologie numérique, par exemple, peut renforcer l’exclusion des personnes qui n’ont pas de téléphones mobiles ou de connexion à Internet. De même, une meilleure infrastructure améliore les conditions de vie, mais comporte aussi des risques, par exemple, de saisie abusive de terres appartenant aux plus démunis, ou d’atteinte à l’environnement ou aux moyens d’existence. Les améliorations en matière d’éducation et de santé peuvent être concentrées dans certains endroits et au profit de certains groupes. Les régions où l’état et la société sont fragiles accusent aussi un retard dans divers domaines de développement. L’objectif d’inclusion sociale a recueilli un soutien considérable au cours de ces dernières années. Le cri de ralliement des Objectifs de développement durable visant à ne laisser personne pour compte a généré une vague de demandes et d’actions à divers niveaux. Suite aux discussions sur les Objectifs du Millénaire pour le développement, la Banque mondiale a publié son rapport phare sur l’inclusion sociale, L’inclusion sociale : Nécessaire fondation pour une prospérité partagée (2013). Le rapport établit une définition claire de l’inclusion sociale. Plus récemment, le Groupe de la Banque mondiale (GBM) a annoncé sa nouvelle Stratégie régionale pour l’Afrique  1 — cette stratégie puise également son origine dans les principes de l’inclusion sociale. La recrudescence de la réflexion et de l’action au sein de la Banque mondiale comme ailleurs a abouti à plusieurs engagements entre le GBM et un éventail de ses partenaires. Par exemple, les diagnostic systématique pays (DSP) effectués par le GBM pour chacun de ses pays partenaires ont montré que l’inclusion sociale était indissociables de la réduction de la pauvreté, mais sans être la même chose. Le présent rapport tire parti de ces éléments et d’autres documents. Il est destiné à une grande variété de lecteurs : les gouvernements, le secteur privé, la société civile, les milieux universitaires, les médias et d’autres. Il devrait aussi influencer la façon dont le GBM mène ses activités en Afrique. Comme tous les rapports régionaux, il ne peut rendre justice que d’une manière limitée à la vaste hétérogénéité du continent. 10  VUE D’ENSEMBLE L’inclusion sociale : Une introduction L’expression inclusion sociale (ou simplement inclusion) a fait de nombreux adeptes dans les débats portant sur le développement et les politiques publiques ; il est donc important de définir ce que nous entendons. Le présent rapport définit l’inclusion sociale comme : le processus visant à améliorer les conditions dans lesquelles les individus et les groupes peuvent participer à la vie de la société (Banque mondiale, 2013). En pensant l’inclusion sociale, il met l’accent sur le préjudice basé sur l’identité sociale. Même si cette insistance peut parfois être sensible sur le plan politique, sa reconnaissance est importante pour l’avancement de l’inclusion sociale. Les marqueurs de l’identité sociale peuvent être dérivés du genre, de l’âge, du handicap, de l’orientation sexuelle, de l’identité du genre, de l’emplacement géographique, de la profession, de la race, de l’ethnicité, de la religion, ou du statut de la citoyenneté, parmi d’autres marqueurs. Pour autant, aucune identité unique ne décrit vraiment un individu  ; l’intersection des identités confère un avantage ou un désavantage réel. En réponse à la question « L’inclusion dans quoi ? », la Banque mondiale (2013) répond : dans les marchés, les services et les espaces. La notion de marché inclut  les terres, le logement, le travail et le crédit, alors que les services comprennent l’éducation, la santé, les transports, l’eau, la protection sociale, l’électricité, l’information, la communication et les technologies, parmi d’autres services. La notion d’espace inclut l’espace physique, mais aussi l’espace au sens plus large : les espaces sociaux, politiques et culturels peuvent tous renforcer l’exclusion ou favoriser l’inclusion. L’inclusion sociale consiste, par ailleurs, à améliorer les capacités, les opportunités et la dignité des individus et des groupes à prendre part à la société. Alors que les thématiques de capacités et d’opportunités sont reconnues depuis longtemps par les économistes du développement, une perspective d’inclusion sociale attire particulièrement l’attention sur l’idée de dignité qui, une fois compromise, peut avoir des conséquences inattendues et graves pour les individus et les groupes, et pour la société et l’économie dans son ensemble. Le rapport formule ses principales questions en recourant à l’approche de l’Outil d’évaluation de l’inclusion sociale (voir Banque mondiale 2017d et Das 2016). Suite aux avancées prodigieuses accomplies par l’Afrique au fil des ans, il cherche à savoir qui est exclu, de quoi, comment et pourquoi. Il suit l’analyse en soulignant ce qui a été tenté dans la quête des pays africains pour l’inclusion sociale. Le rapport met en lumière les tendances et les transitions majeures qui forment le contexte pour l’inclusion sociale en Afrique. Tirant parti d’éléments factuels récents et recourant à des données d’Enquêtes démographiques et de santé (EDS), d’Indicateurs du développement dans le monde (WDI), d’enquêtes de l’Afrobaromètre et d’Enquêtes mondiales sur les valeurs (World Values Surveys ou WVS), le rapport met en évidence les questions clés et détermine les groupes qui pourraient être exclus. Il fournit en outre des indices sur les processus qui sous-tendent l’exclusion et l’inclusion et mène à une réflexion sur les attitudes et les perceptions. Le rapport soulève des questions importantes : Qui sont les acteurs essentiels  ? Quelles sont les innovations favorisant l’inclusion sociale en Afrique ? Quelle preuve avons-nous de ce qui a eu un impact positif ? Enfin, il donne des idées pour poser les bonnes questions, nécessaires pour trouver des solutions inclusives. 12  VUE D’ENSEMBLE Figure O.1 Propulser l’inclusion sociale : un cadre MARCHÉS SERVICES TERRESFEMALES PROTECTION SOCIALE LOGEMENT INFORMATION TRAVAIL ELECTRICITÉ CRÉDIT TRANSPORT EDUCATION SANTÉ EAU ESPACES POLITIQUE PHYSIQUE CULTUREL SOCIAL CAPACITÉS OPPORTUNITÉS DIGNITÉ Source : Banque mondiale 2013. L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   13 En conclusion, le présent rapport permet d’accomplir ce qui suit : • Il place la notion de l’inclusion sociale au centre d’une analyse des réalisations de l’Afrique et des défis auxquels la région est confrontée en terme de réduction de la pauvreté et de formation du capital humain. • Le rapport adopte une approche interdisciplinaire, utilisant des données provenant d’une variété de sources afin de répondre à des questions souvent débatues par le biais de la mobilisation et de la contestation. • Il aborde en détail qui est exclu, de quoi et comment. Il collecte et intègre des éléments de preuve sur les groupes historiquement invisibles, tels que les personnes avec un handicap, les personnes atteintes d’albinisme, les personnes LGBTI, certains groupes ethniques et professionnels, les personnes qui vivent dans des « régions en retard », et les jeunes en particulier. • Le rapport est fondé sur l’expérience des pays africains, mais il montre aussi que les défis de l’Afrique en matière d’inclusion sociale ne sont pas uniques ni exceptionnels. • Il montre les canaux par lesquels les individus et les économies peuvent encourir des coûts dus à l’exclusion sociale. Le rapport précise que ces coûts peuvent être directs ou indirects, à court ou à long terme. Lorsqu’ils sont pris en compte de manière cumulative, ces coûts peuvent gêner les efforts des gouvernements et des sociétés. • Il avance des exemples d’innovations remarquables qui abondent en Afrique, et des exemples de changement de programmatique et de politique en faveur de l’inclusion sociale. Il met en lumière des domaines pour lesquelles des normes et des pratiques profondément ancrées ont changé. • Enfin, le rapport fait valoir que l’inclusion sociale doit être un choix délibéré pour les sociétés et leur gouvernement. Elle doit être fondée sur un contrat social transparent qui reconnaît à la fois les coûts et les avantages de politiques et d’interventions en faveur de l’inclusion sociale. Qu’ajoute le concept d’inclusion sociale à la discussion sur la réduction de la pauvreté ? La majorité des discussions sur l’inclusion sociale en Afrique se sont déroulées dans le contexte de la réduction de la pauvreté et en réponse à des crises humanitaires. Ces discussions sont motivées par le fait qu’en dépit de progrès significatifs, plus de 400 millions de personnes continuent à vivre dans la pauvreté(Beegle et Christiaensen 2019). La pauvreté est un résultat ; l’inclusion sociale est à la fois un processus et un résultat. Les processus d’exclusion peuvent avoir des effets à long terme sur l’état d’esprit, la psyché et la dignité des groupes subordonnés ou exclus. Cette exclusion, à son tour, affecte l’aptitude de ces groupes à accéder aux opportunités qui leur sont données. L’esclavage a été l’un des processus les plus flagrants d’exclusion, comme l’étaient l’apartheid et l’intouchabilité (en Asie du Sud). Des pratiques moins explicites peuvent aussi avoir des effets dévastateurs sur les groupes exclus. Prenez le harcèlement comme 14  VUE D’ENSEMBLE exemple de processus d’exclusion insidieux : partout dans le monde, certains groupes sont harcelés jusqu’à ce qu’ils se soumettent. Il peut s’agir de personnes lesbiennes, gay, bisexuelles, transgenres et intersexuées (LGBTI),  de personnes qui peuvent parler avec un accent autre que celui du groupe dominant, de personnes qui ont des habitudes alimentaires différentes, ou qui possèdent d’autres caractéristiques uniques. Le harcèlement peut limiter les possibilités d’éducation de ceux qui le subissent, causer de graves problèmes de santé mentale ou d’autres conséquences dévastatrices, et pour finir entraîner les victimes à se désengager d’un système qu’elles perçoivent comme approuvant l’intimidation. Et cela peut se produire, et se produit, dans un système éducatif très performant par ailleurs. Ainsi, les victimes de harcèlement peuvent ne pas souffrir de la pauvreté, mais dans ces situations, elles peuvent être affectées par des processus d’exclusion qui les empêchent de réaliser pleinement leur potentiel. Pour donner un autre exemple, une personne à la mobilité réduite mais qui appartient à un ménage aisé ne souffre pas de pauvreté, mais elle peut être exclue en raison d’infrastructures ou de services inaccessibles. Il est donc important de reconnaître que même si l’exclusion sociale peut tirer son origine de la pauvreté, tel n’est pas le cas dans certaines situations. L’inclusion sociale ajoute une autre dimension au discours sur la pauvreté et l’inégalité. En posant la question « qui sont les pauvres ? » et en décomposant les chiffres de la pauvreté, nous découvrons une plus grande complexité. Prenons le cas de la relation entre le genre et la pauvreté, pour laquelle il existe une longue littérature. En général, les femmes ne sont pas nécessairement plus pauvres que les hommes, ni les ménages à chef masculin obligatoirement mieux servis. De plus, dans de nombreux pays d’Afrique, la réduction de la pauvreté pour les ménages dirigés par des femmes a été plus rapide que pour les ménages dirigés par des hommes (Milazzo et van de Walle 2017). Des Encadré O.1 L’ethnicité est-elle importante pour la pauvreté en Afrique ? En recourant à une enquête démographique et de • La taille des groupes ethniques ne semble pas santé (EDS), qui contient des données sur l’ethnicité et avoir d’importance. Ce n’est pas une surprise car, à la richesse basée sur la propriété de certains actifs par travers le monde, la taille d’un groupe ethnique est le ménage, nous avons analysé les données de neuf rarement associée linéairement avec son niveau de pays, dont la République démocratique du Congo, le bien-être. Kenya, le Malawi, le Mozambique, le Nigeria, la Sierra Leone, l’Afrique du Sud, l’Ouganda et la Zambie. • La plus grande variabilité due au critère ethnique, En examinant les 10 groupes ethniques les plus en termes de surreprésentation dans le quintile importants dans les zones rurales et urbaines, nous de richesse le plus pauvre en zone rurale, semble avons constaté que l’ethnicité est en fait importante se produire au Kenya, au Nigeria et en Ouganda, pour le niveau de richesse des ménages, mais les suivie d’une dispersion moindre au Mozambique et effets sont plus prononcés dans les zones rurales que en Zambie. Dans les zones urbaines, la plus grande dans les zones urbaines. variabilité est constatée au Kenya, au Mozambique et en Afrique du Sud. Bien que la surreprésentation • Dans l’ensemble, certains groupes ethniques sont de groupes ethniques dans le quintile de richesse le surreprésentés dans le quintile de richesse le plus plus bas soit plus prononcée dans certains pays, ceci bas, pour chacun des neuf pays. Les disparités entre ne reflète pas nécessairement des écarts absolus les groupes ethniques sont plus grandes dans les plus grands entre ces groupes. zones rurales que dans les zones urbaines. L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   15 constatations plus nuancées apparaissent lorsque le genre est examiné en même temps que l’âge et l’état matrimonial : les femmes mariées jeunes, mais encore plus les femmes jeunes et les veuves, sont particulièrement vulnérables. En outre, les hommes plus âgés sont en général 8 pour cent plus pauvres que les femmes (Milazzo et van de Walle 2017 ; Munoz Boudet et al. 2018). Une analyse récente du Kenya présente des résultats similaires : les femmes entre 20 ans et 59 ans sont plus susceptibles de vivre dans des ménages pauvres et, comparativement aux hommes, les taux de pauvreté sont plus élevés pour les femmes séparées, divorcées ou veuves. En dehors du genre, d’autres marqueurs comme l’état du handicap, la race et l’ethnicité sont également importants pour la pauvreté (Banque mondiale 2018d). L’Afrique avance à grands pas : Qui est laissé pour compte ? Les transformations sociales, économiques et politiques déferlent sur le continent africain. Nous abordons les transitions, classées en plusieurs grandes catégories : les changements démographiques et leur lien avec l’accumulation de capital humain  ; les changements économiques, parmi lesquels la réduction de la pauvreté représente une part importante  ; les transitions spatiales et leurs ramifications sociales, dont l’urbanisation, l’inégalité spatiale et le changement climatique  ; les progrès technologiques et leurs implications pour l’inclusion sociale ; et la nature envahissante des conflits et de la fragilité des États, avec leurs implications pour les résultats en terme de développement dans une série de domaines. Enfin, nous attirons l’attention sur la nature de la participation politique et civique et les mouvements sociaux dynamiques. Les tendances démographiques et l’accumulation de capital humain L’Afrique connaît la croissance démographique la plus rapide au monde, mais cependant la fertilité baisse dans presque tous les pays. La moitié de la population dans la région a moins de 25 ans ; d’ici 2050, le continent comptera 362 millions de jeunes âgés de 15 à 24 ans (Banque mondiale 2014). Parallèlement, beaucoup de pays d’Afrique verront vieillir leur population : d’ici 2050, la population de plus de 50 ans en Afrique devrait plus que tripler, passant de 69 millions en 2017 à 226 millions (Département des affaires économiques et sociales de l’ONU, Division de la population, 2017a). Même si l’inclusion des jeunes représente le défi immédiat auquel la région est confrontée, l’inclusion de cohortes d’Africains plus âgés entrera bientôt en jeu. Néanmoins, la population en plein essor des jeunes d’aujourd’hui en Afrique a le potentiel de favoriser le développement de manière spectaculaire et de réduire plus avant la pauvreté, si des politiques et des opportunités adéquates sont en place. Comme pour la fertilité, l’Afrique a aussi vu des améliorations en matière de santé et de longévité, bien que la mortalité des moins de cinq ans soit encore élevée. La survie des enfants jusqu’à l’âge de cinq ans est un indicateur clé du bien-être, mais elle a aussi d’autres ramifications : les taux élevés de mortalité infantile et juvénile sont associés à une fertilité plus élevée, par exemple. En outre, les pays ayant des taux élevés de mortalité juvénile sont affectés par l’impératif le plus élémentaire, celui de la survie des enfants, et ne peuvent investir autant dans le capital humain. Selon les estimations 16  VUE D’ENSEMBLE de l‘Organisation des Nations Unies (ONU) sur la mortalité juvénile, d’après le projet Our World in Data et AfricaInData.org, une forte baisse de la mortalité juvénile a été enregistrée entre 1980 et 2015 2. En fait, l’Afrique est la région qui a enregistré la baisse la plus rapide entre 1990 et 2016. Malgré ces améliorations, l’Afrique connaît toujours le taux de mortalité le plus élevé chez les moins de cinq ans, avec 78 décès pour 1000 naissances viables en 2016. En d’autres termes, encore 1 enfant sur 13, environ, décède avant son cinquième anniversaire (Suzuki et Kashiwase 2017). Il existe une variation considérable entre les pays, et les États fragiles ont les taux de mortalité les plus élevés chez les moins de cinq ans. En matière d’éducation également les progrès ont été importants, mais il existe des inégalités patentes de résultats entre différents groupes, comme dans d’autres parties du monde. Le taux moyen brut de scolarisation primaire dans la région a augmenté, passant de 68 pour cent en 1990 à 98 pour cent en 2015, et le nombre d’élèves inscrits est passé de 63 millions à 152 millions. Pourtant, malgré une augmentation des taux de scolarisation primaire, il est estimé que 52,3 millions d’enfants du primaire Encadré O.1 Le handicap en Afrique : L’importance des mouvements de défense des droits, des données et de l’analyse Environ 15 pour cent de la population à travers le monde d’être travailleurs indépendants dans le domaine agricole que souffre d’un handicap. L’Afrique ne fait pas exception. d’être employés (Hoogeveen 2005 ; Mitra 2018). Mais des Pourtant, intervenir au nom de personnes atteintes d’un variations existent aussi dans le domaine de l’emploi entre les handicap exige une compréhension nuancée du handicap et différents types de handicap et en fonction de l’intensité du de la façon selon laquelle le type et le niveau d’incapacité, handicap. Dans une étude utilisant des données de l’Éthiopie, le genre, l’importance dans le cycle de vie, l’emplacement du Malawi, de Tanzanie et de l’Ouganda, Mitra (2018) a géographique, l’ethnicité, l’orientation sexuelle, l’identité constaté les plus grands écarts en Tanzanie, où 53 pour cent du genre, l’état matrimonial, le statut socioéconomique et des personnes avec d’importantes difficultés fonctionnelles d’autres facteurs se recoupent pour générer un désavantage sont employées, par rapport à 85 pour cent des personnes ou un avantage. sans difficultés fonctionnelles. Les résultats en terme de pauvreté présentent des nuances similaires : « même si les Le mouvement de défense des droits des personnes personnes avec des difficultés fonctionnelles représentent handicapées en Afrique est sans doute l’un des mouvements une part disproportionnellement grande des pauvres, toutes sociaux contemporains les plus dynamiques sur le continent. les personnes atteintes de difficultés fonctionnelles ne sont Recourant au principe « Rien pour nous sans nous », il a pas pauvres » (Mitra 2018, 156). influencé les allocations budgétaires et les priorités en matière de recherche, sensibilisé et permis de réduire la discrimination Les données indiquent également qu’en Afrique, le niveau largement répandue contre les personnes atteintes d’un d’instruction des personnes atteintes d’un handicap est handicap. Le mouvement de défense des personnes atteintes plus faible (consultez Eide et Mmatli 2016 ; Filmer 2008 ; d’albinisme se déroule sous nos yeux, si l’on peut dire. Hoogeveen 2005 ; Loeb et Eide 2004 ; Loeb et al. 2008 ; Mitra 2018 ; Mitra, Posarac et Vick 2013 ; Mizunoya, Mitra et L’importance des données et de l’analyse a bénéficié Yamasaki 2016). Lorsque le statut de handicapé est combiné des mouvements de défense des droits des personnes au genre, nous constatons les effets réels du désavantage lié handicapées et a renforcé à son tour le pouvoir des à l’intersectionnalité. Les résultats diffèrent encore par type de mouvements de défense. La disponibilité de données dans handicap, cependant le manque de données fiables présente un nombre croissant de pays africains a permis d’accorder de sérieuses contraintes pour l’analyse et l’action. Concernant plus d’attention aux faits, qui ont montré les conditions les déficiences intellectuelles, par exemple, les données sont défavorables vécues par les personnes atteintes d’un particulièrement insuffisantes, comme le sont les services handicap. Plusieurs études récentes montrent que les pour les personnes avec de tels handicaps. personnes avec un handicap ont une probabilité plus élevée L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   17 et des premières années du secondaire (6 à 14 ans et 7 à 15 ans) ne sont toujours pas scolarisés, représentant 45 pour cent de la population juvénile non scolarisée à travers le monde (Bashir et al. 2018). L’alphabétisation est le résultat éducatif le plus élémentaire, et même dans ce cas, certaines personnes sont laissées pour compte. Il existe un écart hommes-femmes important d’alphabétisation, l’Afrique occidentale ayant la disparité la plus importante et l’Afrique australe la moins importante. La superposition du genre avec d’autres marqueurs d’identité confère des désavantages supplémentaires en matière d’éducation, comme c’est le cas dans d’autres domaines. Recourant à des données de recensement, un article de Taş, Reimão et Orlando (2014) montre que les femmes appartenant à des minorités ethniques au Sénégal et en Sierra Leone subissaient des désavantages cumulatifs en termes d’alphabétisation et d’achèvement des études primaires et secondaires. Au Sénégal, par exemple, un individu a une probabilité inférieure de 10 points de pourcentage de terminer l’école primaire s’il est de sexe féminin, 1,6 points de pourcentage supplémentaires s’il fait partie d’une minorité ethnique, et 3,8 points de pourcentage supplémentaires s’il est une femme de minorité ethnique. Par conséquent, au Sénégal, cumulativement, les femmes appartenant à des groupes ethniques minoritaires ont une probabilité inférieure d’environ 15,4 points de pourcentage de terminer les études primaires par rapport aux hommes appartenant à des groupes ethniques majoritaires. En Afrique du Sud, en dépit de progrès significatifs depuis la fin de l’apartheid, les résultats de scolarisation chez les Sud-africains noirs et « métis » restent faibles. Bien que la presque totalité des Blancs soit parvenue à achever 12 ans de scolarité dès 1920, de nos jours, la population noire n’a pas encore atteint ces niveaux. Ceci perpétue l’héritage laissé par la fracture raciale en matière d’éducation en Afrique du Sud, qui continue à être l’un des principaux facteurs de pauvreté et d’inégalité (Banque mondiale 2018f, 13). Le rapport diagnostic systématique pays (DSP) du Bénin fait remarquer, de la même façon, que le manque d’enseignement dans la langue maternelle à l’école primaire place les enfants autochtones dans une situation défavorable et les mène à abandonner prématurément l’école (Banque mondiale 2017b, 57). Transitions économiques : la pauvreté et l’emploi La période couvrant  les années 1990 à nos jours a vu une réduction impressionnante des taux de pauvreté ; pourtant, le nombre de pauvres, en value absolue, a augmenté de manière spectaculaire. Même si le taux de pauvreté a baissé régulièrement, de 57 pour cent de la population africaine en 1990 à 41 pour cent en 2015 3, le nombre absolu de personnes vivant dans la pauvreté est passé d’environ 278 millions d’habitants à plus de 413 millions. Il existe une divergence importante entre pays africains, sous l’effet de plusieurs facteurs, parmi lesquels se distinguent la fragilité des états, les conflits, et la dotation en ressources naturelles (Beegle et al. 2016) . Transitions spatiales et implications sociales La géographie spatiale de l’Afrique est en mutation rapide ; c’est la région qui s’urbanise le plus vite dans le monde, par exemple (figure O.2). À l’heure actuelle, environ 472 millions de personnes vivent dans des villes— un chiffre qui devrait doubler au cours des 25 prochaines années (Lall, Henderson et Venables 2017). Il existe toutefois de 18  VUE D’ENSEMBLE Figure O.2 Augmentation de l’urbanisation dans le monde, 1950–2050 Afrique Asie Europe Africa Asia Europe (pourcentage) 100 population 90 80 of total Percent totale 70 74.5% Proportion de la population 60 50 49.9% 40 42.5% 30 20 10 0 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020 2030 2040 2050 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020 2030 2040 2050 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020 2030 2040 2050 Année Year Latin America Amérique latine and et the Caribbean Caraïbes America Northern du Amérique Nord Oceania Océanie (pourcentage) population 100 90 of total 80 80.7% 82.2% Percenttotale 70 Proportion de la population 68.2% 60 50 40 30 20 10 0 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020 2030 2040 2050 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020 2030 2040 2050 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020 2030 2040 2050 Année Year Population urbaine Population rurale Source : Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies, Division de la population. 2018.  World Urbanization Prospects 2018. L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   19 grandes variations sous-régionales. La plupart des habitants en Afrique du Nord et Afrique australe vivent déjà dans des villes. L’Afrique de l’Ouest devrait avoir une population en majorité urbaine juste après 2020, alors que les taux d’urbanisation sont toujours inférieurs à 20 pour cent en Afrique de l’Est (ONU-Habitat 2014). Le Nigeria figure parmi les trois pays les plus urbanisés au monde, et en incluant l’Inde et la Chine, il représente, d’après les estimations, 35 pour cent de la croissance projetée de la population urbaine mondiale entre 2018 et 2050, ajoutant 189 millions de citadins 4. L’urbanisation présente à la fois des opportunités et des défis pour l’inclusion sociale. La migration depuis les villages vers les villes a tendance à être accompagnée d’aspirations pour une nouvelle vie, une plus grande mobilité sociale et économique et un meilleur accès aux marchés, services et espaces. Elle signifie aussi souvent l’éloignement des familles et une rupture des liens sociaux et un sentiment d’isolement pour ceux qui n’ont pas de contact dans leur nouveau lieu de résidence. Une étude de 2016 sur l’Afrique du Sud montre que l’exode rural vers la ville entre 2008 et 2012 avait été accompagné d’une baisse de 8,3 pour cent du bien-être subjectif des migrants (Mulcahy et Kollamparambil 2016). Par ailleurs, dans la mesure où les villes sont souvent dépourvues de planification attentive, environ 60 pour cent de la population urbaine d’Afrique vit dans des zones d’habitation informelles, un nombre à comparer au 34 pour cent observé dans les autres pays en développement (ONU, Département des affaires économiques et sociales, Division des statistiques 2015 ; cité dans Lall, Henderson et Venables 2017, 38). Enfin, les travailleurs informels, tels les récupérateurs de déchets, les employés de maison, les vendeurs ambulants et autres, font face à des obstacles importants pour exercer leurs activités dans la plupart des villes. Pourtant, les villes offrent souvent un espace plus anonyme que les zones rurales et permettent aux individus appartenant à des groupes exclus d’échapper à la discrimination et de poursuivre des possibilités d’emploi et d’éducation qu’ils n’auraient pas dans un contexte rural. Même si une recherche plus approfondie est nécessaire pour comprendre les mécanismes expliquant ces résultats, l’encadré O.2 explique que les disparités en matière de richesses entre les groupes ethniques sont moins prononcées dans les zones urbaines que dans les zones rurales. En même temps, les groupes ethniques et les migrants tendent à se regrouper dans les zones urbaines pour le logement et l’emploi, avec des effets divers pour l’inclusion sociale. Même si une attention considérable est accordée en Afrique à la croissance urbaine et aux progrès concernant la prestation de services, il apparaît aussi que l’emplacement géographique est important et que de nombreuses régions accusent un retard. En général, les pays et les régions en plein conflit ou en situation de fragilité ont des résultats moins bons que les autres. Clairement, il existe des régions en retard à l’intérieur des pays et les personnes vivant dans ces régions peuvent également posséder d’autres caractéristiques identitaires comme le fait d’appartenir à un groupe ethnique particulier ou à d’autres groupes. À travers le monde, les régions en retard sont aussi celles dans lesquelles les habitants ont moins de poids et de pouvoir politique que dans d’autres régions. Les pays africains ne font pas exception ; le discours populaire dans de nombreux pays d’Afrique énonce expressément les liens entre le pouvoir politique et le développement régional inégal, faisant remarquer que les régions jouissant de meilleurs contacts politiques avec les détenteurs du pouvoir ont tendance à mieux s’en sortir. 20  VUE D’ENSEMBLE Encadré O.3 L’importance de l’emplacement géographique et de la paix pour l’inclusion sociale La paix n’est pas simplement l’absence de n’étaient pas riches en ressources, après avoir pris en conflit ; la paix consiste à créer un environnement compte d’autres caractéristiques des pays (Beegle et où toute personne peut s’épanouir, sans al. 2016). Une mise en garde s’impose ici. Les pays distinction de race, de couleur, de croyance, dotés de ressources naturelles peuvent aussi tomber de religion, de sexe, de caste ou de tout autre dans le piège de la « malédiction des ressources », marqueur de différence sociale. La religion, susceptible d’exacerber la fragilité et le conflit, à l’ethnicité, la langue, les pratiques sociales et moins que les institutions soient suffisamment solides. culturelles sont des éléments qui nourrissent la civilisation humaine, ajoutant à la richesse de Le conflit, la menace de conflit et le déplacement de notre diversité. population qui s’en suit affectent à la fois les personnes Nelson Mandela a déplacées et les communautés qui les accueillent. Tout La congruence entre le conflit et la fragilité et les d’abord, même si le déplacement est accompagné de résultats de développements médiocres est bien grandes souffrances, la fuite peut atténuer les effets comprise des décideurs, comme du personnel préjudiciables du conflit (Etang-Ndip, Hoogeveen et humanitaire, des militants et des communautés. Les Lendorfer 2015) et les personnes déplacées ne sont individus et les groupes qui résident dans des zones pas toujours les plus pauvres (Beegle et al. 2016). prédisposées à un conflit, ou en plein conflit, doivent D’ailleurs, les communautés d’accueil sont affectées lutter pour accéder aux marchés, aux services et aux par l’afflux des migrants forcés et, dans certains espaces. Les moins puissants parmi eux sont parfois endroits, en particulier dans des zones frontalières confrontés à de terribles atrocités. Bien que ni le conflit, isolées et sous-développées, elles sont plus pauvres ni les urgences humanitaires ne soient exclusivement que les personnes déplacées et les réfugiés. Les des problèmes africains ou uniquement des problèmes effets du déplacement sur les communautés d’accueil de situations pauvres ou fragiles, l’Afrique fait face interviennent de différentes manières. Le camp de à des défis particuliers. À titre d’exemple, en 2016, réfugiés de Kakuma au Kenya, par exemple, est situé l’Afrique a été témoin de 3,9 nouvelles personnes dans le comté de Turkana, qui enregistre un taux de déplacées dans leur propre pays pour raison de conflit, pauvreté de près de 80 pour cent, comparativement à violence ou catastrophes soudaines. Avec la région du la moyenne nationale de 36 pour cent (KNBS 2015). En Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, l’Afrique sub- Tanzanie, l’afflux de réfugiés du Burundi et du Rwanda saharienne abrite le plus grand nombre de groupes dans les années 1990 avait affecté négativement les déplacés de force, enregistrant une forte hausse ces travailleurs occasionnels tanzaniens, en raison de dernières années. Par exemple, même si chacune des l’augmentation de la concurrence sur les marchés de deux régions comptait environ 8 millions de personnes l’emploi et de la flambée des prix de divers produits. déplacées en 2012, ce chiffre avait atteint 21,5 millions Les femmes et les jeunes filles dans les zones affectées au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, et 18,4 par un conflit peuvent avoir des risques d’exposition millions en Afrique sub-saharienne en 2017. Au sein de plus élevés aux violences sexuelles et peuvent être l’Afrique sub-saharienne, la majorité des déplacements activement ciblées par les groupes rivaux. Des forcés ont eu lieu dans pays : parmi les 18,4 millions de éléments de preuve de la région des Grands Lacs (RGL) personnes déplacées en 2017, 12,5 millions étaient des montrent que les anciennes combattantes qui tentent personnes déplacées dans leur propre pays et 5,9 pour de réintégrer leur communauté sont confrontées à cent étaient des réfugiés b. diverses sortes de stigmatisation. Leur exposition Entre 1996 et 2012, le déclin de la pauvreté dans accrue à la violence sexuelle pendant le conflit en est les états fragiles était moindre comparativement aux une des causes sous-jacentes. Dans certaines parties états non fragiles en Afrique : une fois pris en compte de la RGL, la stigmatisation est si forte que certaines l’ensemble des caractéristiques d’un pays, la réduction anciennes combattantes évitent de s’auto-identifier en de la pauvreté dans les états fragiles était plus faible tant qu’anciennes combattantes et renoncent à l’accès de 15 points de pourcentage que dans les états non à une aide ciblée qui leur est destinée à ce titre (Rhea fragiles. Les pays qui étaient riches en ressources 2014, 28). naturelles avaient une réduction de pauvreté plus Enfin, les effets du changement climatique peuvent rapide de 13 points de pourcentage que les pays qui exacerber l’inégalité et l’exclusion ; les effets sont L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   21 Encadré O.3 suite prononcés dans certaines régions. Lorsque des certains groupes sont plus touchés que d’autres. Ils phénomènes météorologiques extrêmes frappent des peuvent inclure les personnes atteintes d’un handicap, régions avec des niveaux élevés de fragilité des états les jeunes enfants et les personnes âgées, entre autres. et des sociétés, toute la population en souffre, mais a Extrait du message de Nelson Mandela à la Convention mondiale sur la paix et la non-violence, New Delhi, Inde, 31 janvier 2004 (UN DPI 2018). b P. Connor et J. M. Krogstad, 2018, “Record Number of Forcibly Displaced People Lived in Sub-Saharan Africa in 2017,” Pew Research Center, https://www.pewresearch.org/fact-tank/2018/08/09/record-number-of-forcibly-displaced-people-lived-in-sub- saharan-africa-in-2017 (Source consultée le 24 août 2019). Enfin, la majorité de la population en Afrique vit toujours dans des zones rurales, et un fossé important existe entre les zones rurales et les zones urbaines en matière d’opportunité. Prenez le cas des services de santé : environ 56 pour cent de la population rurale dans le monde n’a pas de couverture santé, comparativement à 22 pour cent de la population urbaine, la population rurale la plus démunie vivant en Afrique (Scheil-Adlung 2015, 6). Au sein des zones rurales, l’exclusion des services de santé peut être plus grave pour les femmes, les personnes âgées, certains groupes ethniques et les migrants (Scheil-Adlung 2015, 30). En Afrique du Sud, malgré la gratuité de la prestation de soins prénatals, les femmes non blanches et celles qui habitent en zone rurale ont moins de chance de recevoir des soins prénatals ou d’avoir une accoucheuse qualifiée présente au moment de l’accouchement que les femmes blanches vivant en milieu urbain (Burgard 2004 ; Say et Raine 2007 ; Silal et al. 2012 ; tous cités dans Banque mondiale 2013, 95). Les transitions liées au changement climatique sont suceptibles d’affecter de nombreux aspects de la vie dans le monde, et certainement en Afrique. Les événements météorologiques extrêmes affectent les moyens d’existence, la santé, l’éducation et le bien-être en général ; ils peuvent potentiellement réduire à néant nombre des progrès accomplis par les pays africains. Certains événements climatiques contribuent aussi à des mouvements involontaires de population à grande échelle. L’Afrique devrait accueillir 86 millions de personnes qui migreront probablement en raison des effets des changements climatiques d’ici 2050 (Rigaud et al. 2018). Les événements qui apparaissent rapidement, telles les tempêtes extrêmes ou les inondations, tendent à mener à des déplacements de population à court terme, suivis du retour dans les régions touchées, mais ils peuvent aussi générer des mélanges de déplacement à court et plus long terme ou une émigration. Les événements à évolution lente comme les sécheresses ou la désertification, comme au Sahel par exemple, ont tendance, par contraste, à aboutir à une migration graduelle hors de la région à long terme plutôt que d’affecter immédiatement le schéma de migration. Beaucoup de migrants internes vont s’installer dans des villes importantes  ; de fait, la migration interne contribue grandement à l’urbanisation (Tacoli, McGranahan et Satterthwaite 2015 ; cité dans Rigaud et al. 2018, 18). Nairobi est un exemple de ville qui verra probablement une migration accrue liée au climat. Parallèlement, les villes à très faible altitude, ainsi que les côtes vulnérables à l’élévation du niveau de la mer et les zones à fort stress hydrique et agricole, risquent de voir leur population émigrer. Addis-Ababa et Dar- 22  VUE D’ENSEMBLE es-Salaam figurent parmi les villes susceptibles d’avoir une croissance démographique ralentie en raison de l’élévation du niveau de la mer et des ondes de tempête (Rigaud et al. 2018). Quand des programmes pour l’adaptation aux changements climatiques et l’atténuation de leurs effets sont conçus, il est important de reconnaître que les situations d’urgence peuvent souvent exacerber les inégalités et les relations de pouvoir asymétriques et que la prévention comme l’intervention doivent tenir compte de ce fait. Les technologies peuvent être le fer de lance de l’inclusion sociale, mais elles peuvent aussi exclure certaines personnes C’est l’époque de la mondialisation des technologies, mais ce phénomène est inextricablement lié à la mesure dans laquelle les pays, les régions, les communautés et les ménages ont accès à ces moyens puissants. À bien des égards, l’Afrique semble avoir bondi dans l’économie numérique, mais il existe de grandes variations entre les pays. Par exemple, malgré une augmentation relativement rapide du nombre d’abonnés à la téléphonie mobile dans les pays fragiles, le nombre de ces abonnements est toujours plus élevé dans les pays non fragiles (Calderon et al. 2019, 49). De même, la technologie financière (« fintech ») s’est aussi répandue à travers l’Afrique ces dernières années : 21 pour cent des adultes en Afrique possèdent désormais un compte bancaire mobile, ce chiffre ayant doublé depuis 2014, le niveau le plus élevé de n’importe quelle région dans le monde (Demirgüç-Kunt et al. 2018). M-PESA est l’un des premiers exemples, et peut-être l’un des plus révélateurs de fintech en Afrique. Les technologies numériques peuvent également stimuler l’emploi, comme le fait remarquer le rapport récent de la Banque mondiale sur l’avenir de l’emploi en Afrique (Choi, Dutz et Usman 2019 ). Figure O.2 Utilisation du smartphone en fonction de l’age, du genre, de l’éducation et du niveau de revenu Ghana Kenya Nigeria Sénégal Afrique du Sud Tanzanie 50 Pourcentage Percent 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Hommes par Male vs. rapport female 18–29 Ages ans vs. 18–29 parages rapport 50+ Avec une With vs.éducation without Revenu du Household ménage income above Domaine de aux femmes à 50 ans +” secondaire secondarypar rapport à education supérieur à la moyenne vs. below median par différence Area of sans éducation secondaire rapport à inférieur difference Source : Pew Research Center. 2018. ”Internet Connectivity Seen as Having Positive Impact on Life in Sub-Saharan Africa, But Digital Divides Persist.” http://www.pewglobal.org/2018/10/09/internet-connectivity-seen-as-having-positive-impact-on-life-in-sub-saharan-africa. L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   23 Comme il faut s’y attendre, le pourcentage de particuliers ayant accès à l’Internet dans chaque pays africain est en étroite corrélation avec le niveau de revenu du pays. L’Afrique du Sud est le seul pays dans la région où pratiquement 60 pour cent de la population est en ligne  5. Par ailleurs, une enquête du Pew Research Center (Global Attitudes Survey) menée dans six pays au printemps 2017 a montré que les hommes avec un niveau d’éducation et des revenus plus élevés ont plus de chance d’utiliser des smartphones (figure O.2). Ce qui signifie que les non utilisateurs de smartphones sont exclus de nombreuses opportunités pour accéder aux marchés, services et espaces. Participation politique et mouvements sociaux L’inclusion sociale progresse souvent lorsque les personnes ou les groupes de personnes qui se sentent exclus affirment leur identité par le biais de la participation sociale et politique ; la nature de cet engagement a changé dans nombre de pays africains. Les dernières enquêtes attirent l’attention sur une baisse de participation aux processus politiques et civiques formels, surtout parmi les femmes en Afrique, mais la situation est complexe. La probabilité que les jeunes Africains votent est plus faible que pour leurs aînés, et les données provenant de l’enquête Afrobaromètre indiquent que la participation politique chez les jeunes connaît un déclin depuis les onze dernières années. La jeunesse africaine a moins tendance à participer à des activités civiques que leurs aînés. Les jeunes femmes prennent encore moins part aux affaires publiques  ; en comparaison avec leurs homologues masculins, elles témoignent nettement moins d’intérêt aux affaires et débats publics ayant lieu dans leurs communautés (Lekalake et Gyimah-Boadi 2016). Une telle baisse de participation aux processus politiques formels pourrait signaler plusieurs choses. Il pourrait s’agir d’un manque d’enthousiasme ou de confiance dans ces processus, ou encore du fait que les jeunes gens ont recours à d’autres voies de communication pour exprimer leurs préférences. L’importance des réseaux sociaux mérite d’être mentionnée ici. L’Internet offre la possibilité de rester anonyme, ce qui permet aux groupes qui autrement n’auraient pas la chance d’exprimer leur opinion, de le faire par les médias numériques. La jeunesse d’Afrique est beaucoup plus présente sur les réseaux sociaux et les plateformes numériques que leurs homologues plus âgés. La montée des mouvements sociaux montre aussi que les jeunes gens sont susceptibles d’utiliser d’autres canaux de communications pour les activités civiques qui leur importent. Quoiqu’il en soit, le désenchantement plausible à l’égard des processus politiques peut indiquer une désillusion plus grande envers l’État. Bien que la participation aux processus politiques formels semble baisser, les mouvements sociaux continuent à rehausser le profil de l’inclusion sociale à l’échelle de l’Afrique. L’Afrique est bien connue pour l’histoire vibrante de ses mouvements sociaux et politiques. Ces derniers incluent les mouvements légendaires pour l’indépendance et la décolonisation, les mouvements importants des milieux universitaires contre l’eurocentrisme, et les mouvements pour la paix et les libertés civiles, et contre diverses politiques économiques. Le mouvement étudiant Fees Must Fall (les frais de scolarité doivent baisser) en Afrique du Sud illustre bien que, même si les jeunes participent sans doute moins aux processus politiques formels, ils manifestent néanmoins beaucoup d’enthousiasme en matière de politique. De même, le mouvement qui revendique les droits des peuples autochtones à leurs cultures, leurs terres et leur identité unique date 24  VUE D’ENSEMBLE de longtemps. Deux mouvements sociaux contemporains doivent être mentionnés ici : le premier a attiré l’attention sur le VIH/Sida, et le second sur les droits des personnes handicapées. Chacun prouve que la mobilisation et l’éducation publique contribuent à changer les normes et les pratiques. Par ailleurs, la société civile a aussi galvanisé les citoyens contre la corruption dans plusieurs pays d’Afrique. En Afrique du Sud, par exemple, des organisations de la société civile se sont mobilisées pour des campagnes contre la corruption à la fin des années 90 qui ont abouti au premier sommet contre la corruption organisé par le gouvernement en 1999 et au lancement du Forum national contre la corruption en 2001, qui a réuni la société civile, le monde des affaires et le gouvernement pour lutter contre la corruption.  6Au Kenya, des organisations de la société civile ont coordonné des manifestations (Occupy Parliament - occuper le parlement) contre les salaires des membres du parlement (MP) et ont donné lieu à des réductions des salaires des MP et du président en 2013. D’autre pays ont organisé des formes semblables de protestation. Enfin, les mouvements féministes radicaux ont pris de l’ampleur au cours des ans et ont coordonné leurs efforts pour obliger l’État et la société à rendre des comptes sur les possibilités moindres offertes aux filles et aux femmes. Comment l’exclusion sociale se déroule-t-elle en Afrique ? À la base, l’exclusion sociale est une question de rapports de force dans la société. Dans le monde entier, les sociétés conçoivent des processus complexes pour consolider les structures sociales et maintenir le statu quo. Les attitudes, les croyances, les perceptions et les pratiques, incluant les superstitions, la stigmatisation et les rites, sont certains des processus par le biais desquels les sociétés rendent certains groupes subordonnés et d’autres groupes dominants. Les structures et les systèmes comprennent, entre autres, les familles, les communautés, les systèmes juridiques, la main d’œuvre, les marchés fonciers et les systèmes de connaissances. Les processus englobent les attitudes, les croyances, les perceptions et les pratiques. Il y a lieu de relever que les structures et les processus se renforcent mutuellement et sont confortés par les institutions formelles et informelles. La culture joue un rôle central dans la vie politique, économique et sociale des communautés. En fait, la culture peut être le maillon manquant au développement de l’Afrique. La culture est dynamique et évolue au fil du temps, rejetant sciemment les traditions rétrogrades, comme la mutilation génitale féminine (MGF), et adoptant pleinement des aspects qui sont bons et utiles. Wangari Maathai 7 À travers le monde, les systèmes de croyances, les superstitions, la stigmatisation et d’autres pratiques sont d’énormes obstacles à l’inclusion de certains groupes. L’intimidation et le harcèlement inspirent la crainte qui empêche certains à s’épanouir pleinement et « les force à rester à leur place ». Les normes sociales peuvent affecter les hommes et les femmes à des métiers bien spécifiques, ou peuvent caractériser certaines habitudes comme «  impures  ». D’autres pratiques comme la stigmatisation ou le L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   25 rejet peuvent rendre certains groupes invisibles, comme les personnes handicapées ou celles qui sont atteintes d’albinisme. Par ailleurs, dans certaines cultures, les personnes handicapées sont cachées. Ce manque de visibilité peut avoir plusieurs conséquences, notamment celle de ne pas prendre en compte ces groupes dans les statistiques officielles ; ils restent ainsi dans l’ombre et livrés à eux-mêmes, au niveau familial comme national. Souvent, ces pratiques d’exclusion sont adoptées au nom de la religion ou par ceux qui interprètent les textes religieux. Les personnes présentant une identité de genre non conforme sont exclues au point d’être criminalisées dans plusieurs cultures ; ces réactions sont fréquemment soutenues par l’invocation de textes religieux. Les tabous concernant la menstruation chez les femmes sont courants dans de nombreux endroits du monde  ; les croyances relatives à la pureté et la pollution justifient l’exclusion de certains groupes pendant certaines périodes ou tout le temps. Généralement, ces pratiques sont des mécanismes visant à renforcer l’ordre social et le contrôle social. Pourquoi les processus et les pratiques ont-ils de l’importance dans le cadre des politiques et des programmes ? Ils ont de l’importance dans la mesure où ils affectent les actions et les comportements des groupes dominants et exclus, des prestataires de services et de l’État lui-même. Les groupes traditionnellement exclus peuvent eux- mêmes réagir de différentes manières. Ils peuvent parfois décider de vivre en marge de la société ou rejeter les conditions de leur inclusion. Les groupes exclus peuvent abandonner l’école ou quitter le marché du travail, ou se désengager des processus politiques. D’autres fois, et ces deux possibilités sont liées, les ressentiments peuvent s’accumuler au point de créer des tensions sociales et d’avoir des effets à long terme sur l’économie et la société. Enfin, il arrive aussi que les groupes qui se sentent exclus coordonnent leurs efforts pour créer des lobbies puissants et utiliser l’espace politique pour exiger un changement. Les processus et les structures ont des effets importants sur les sentiments et les perceptions des gens et des groupes. Dans notre quête visant à n’abandonner aucun laissé-pour-compte, à réaliser l’accès universel et à éradiquer l’extrême pauvreté, nous devons être conscients des comportements, ce qui est la première étape vers un changement durable. Pourtant, même si nous savons que les systèmes de croyances, les sentiments et les perceptions influencent les comportements, l’évaluation et l’interprétation desdits systèmes et des fondements affectifs sous-jacents représentent une tâche complexe qui requiert une profonde connaissance du contexte, ainsi que des données et des outils analytiques solides. La violence est l’une des manifestations les plus graves d’exclusion et un mécanisme visant à maintenir les groupes minoritaires « à leur place » au sein du système social. Les attaques physiques sont souvent justifiées par un ensemble défini de croyances et de tabous qui servent à créer une « exclusion logique », parfois instituée comme un précepte religieux. Par exemple, de nombreuses religions considèrent que les femmes devraient rester à la maison et peuvent implicitement tolérer la violence contre les femmes qui osent transgresser cette norme. Globalement, la violence domestique envers les femmes reste largement admise en Afrique, même s’il y a eu quelques changements au cours des ans. Beegle et al. (2016) trouvent qu’entre les périodes de 2000–2006 et 2007–2013 l’acceptation par les femmes de la violence domestique avait baissé pratiquement de 10 pour cent, mais, à hauteur de 30 pour cent, l’acceptation de la violence domestique dans la région est encore extrêmement élevée et elle est plus du 26  VUE D’ENSEMBLE Figure O.4 Perceptions de traitement inégal en vertu de la loi Pays Namibia Botswana Maurice Malawi Zambie Tanzanie Madagascar Ouganda Mozambique Nigeria Ghana Zimbabwe Burundi Niger République arabe d'Égypte Guinée Total Liberia Lesotho Afrique du Sud Sierra Leone Cap-Vert Eswatini São Tomé-et-Príncipe Algérie Kenya Togo Maroc Cameroun Bénin Soudan Tunisie Burkina Faso Sénégal Gabon Côte d´Ivoire Mali Pourcent 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Jamais Rarement Souvent Toujours Ne sais pas Source : Calculs de la Banque mondiale basés sur les données tirées de l’enquête de l’Afrobaromètre 2014/2015, 6e volet (http://afrobarometer. org/sites/default/files/summary_results/ab_R6_afrobarometer_global_release_highlights.pdf). Remarque : Les personnes interrogées répondaient à la question : « À votre avis, dans ce pays, arrive-t-il souvent que les personnes soient traitées inégalement en vertu de la loi ? » L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   27 double de la moyenne relevée dans le reste du monde en développement (14 pour cent). Pour autant, on constate une grande hétérogénéité entre les pays. Certaines pratiques, comme la mutilation génitale féminine (MGF), bien qu’elles aient une valeur culturelle pour certains groupes, sont à la fois des exemples de violence et des symboles d’exclusion extraordinaires, accompagnés d’effets dévastateurs sur la santé, l’éducation et les opportunités dans la vie. La MGF peut agir directement sur la santé reproductive et mentale, et causer des maladies infectieuses. Justifiée et maintenues par la religion et la culture, la MGF a pour effet de renforcer le statut de subordination des femmes et des filles. Les attitudes, les perceptions et les sentiments peuvent révéler dans quelle mesure les personnes se sentent incluses dans les marchés, les services et les espaces. Le fait d’appartenir à un groupe ethnique peut créer une affinité et un certain réconfort parmi les membres du groupe ; de la même manière, exprimer son attirance envers une identité nationale indique que les personnes interrogées se sentent solidaires de leur pays. L’Afrobaromètre de 2014/2015 demandait aux participants qui avaient révélé leur identité ethnique au début de l’enquête s’ils considéraient que leur identité nationale ou ethnique était la plus importante. Les résultats sont instructifs ; auprès d’une faible minorité seulement, l’appartenance ethnique semble prévaloir. Les sentiments d’identité nationale ou ethnique peuvent être déterminés par plusieurs facteurs, liés à l’étendue du pluralisme ou de la concurrence dans la société, à l’histoire de l’État-nation ou de conflits et au milieu politique actuel. Il est aussi possible que ces questions suscitent des réponses acceptables sur le plan social ou politique ; elles ne devraient pas être prises comme des « vérités » et doivent être interprétées avec prudence. Des sentiments négatifs envers l’État sont répandus dans de nombreuses parties d’Afrique. Dans plusieurs pays, cette désaffection est apparente dans les colonnes des journaux, sur les réseaux sociaux et dans les conversations informelles. Elle apparaît aussi dans les enquêtes de perception. L’Afrobaromètre de 2014/2015 avait demandé aux participants s’ils pensaient que leur pays traitait souvent les personnes de manière inégale « en vertu de la loi » (c’est-à-dire, par l’État) ; une réponse positive indique sans doute des mécontentements et des sentiments d’injustice et d’exclusion. La figure 0.4 présente les résultats. Il existe, bien entendu, de grandes variations entre les pays africains ; le Botswana et la Namibie se distinguent comme étant des pays où presque 60 pour cent des répondants avaient l’impression que les gens n’étaient jamais ou rarement traités de façon inégale en vertu de la loi. Au Malawi, à Maurice et en Tanzanie, environ la moitié, ou un peu plus, des participants trouvaient que le traitement inégal en vertu de la loi ne se manifestait jamais ou rarement. À l’autre extrême, au Mali et à São Tomé-et-Príncipe, plus de la moitié des participants à l’enquête disaient que le traitement inégal en vertu de la loi était toujours manifeste. Dans l’ensemble, dans la plupart des pays, plus de la moitié des répondants mentionnaient que les gens étaient traités de manière inégale en vertu de la loi, souvent ou toujours. Lorsqu’une majorité de citoyens trouvent que les personnes de leur pays sont traitées de façon inégale, c’est souvent un signe d’accaparement des ressources par les élites ; autrement dit, l’État est perçu comme répondant aux besoins d’une petite frange de la société. Dans cette situation, l’exclusion n’est pas une question de minorité, mais 28  VUE D’ENSEMBLE touche beaucoup, ou la plupart des citoyens. Les Diagnostics systématiques pays (DSP) de la Banque mondiale en Afrique considèrent l’accaparement des ressources par les élites et le manque de confiance du public comme d’importants obstacles à la prestation de services inclusifs et, plus généralement, à la mise en place d’un contrat social stable. Consultez pour cela, par exemple, les DSP pour le Bénin (Banque mondiale 2017b) ; la Guinée-Bissau (Banque mondiale 2016) ; le Liberia (Banque mondiale 2018e) et Madagascar (Banque mondiale 2015). D’autres enquêtes ou anecdotes révèlent également des perceptions suggérant que l’État et ses institutions ne sont pas transparents et qu’ils ne favorisent que quelques privilégiés. Une enquête de perception menée par le Pew Research Center a trouvé que 64 pour cent des Kenyans, 63 pour cent des Nigérians et 69 pour cent des Sud-Africains interrogés dans le cadre de l’enquête pensaient que beaucoup d’emplois revenaient aux personnes qui avaient des relations 8. En dépit des vives appréhensions à propos de leurs économies et souvent aussi de leurs gouvernements, de nouvelles preuves viennent confirmer que les habitants de plusieurs pays africains font preuve de grand optimisme. Par exemple, dans le cadre de l’Enquête sur les attitudes mondiales menée par le Pew Research Center au printemps 2017, environ la moitié des Africains (médiane de 49 pour cent) et des Latino-Américains (48 pour cent) ayant fait l’objet de l’enquête disaient que leur journée se déroulait «  particulièrement bien  », alors que dans d’autres régions, les personnes interrogées étaient très nombreuses à répondre «  normalement  ». De même, Graham et Hoover (2006), en se basant sur les données de l’Afrobaromètre, ont trouvé en Afrique des niveaux d’optimisme qui surpassaient ceux d’autres régions, en notant qu’ils étaient spécialement élevés chez les répondants les plus pauvres et les plus précarisés, qui avaient de grands espoirs pour l’avenir de leurs enfants. Dans la même ligne de ces observations, le DSP du Liberia (Banque mondiale, 2018e, 72) cite une enquête de 2014 qui avait observé que la plupart des Liberiens croyaient que leur pays était sur la bonne voie, et ce en partie parce que le Liberia jouissait à nouveau de paix et de stabilité relatives. L’inclusion sociale peut être réalisée si les sociétés s’y engagent sciemment L’inclusion sociale est importante parce que l’exclusion entrave les compétences, les opportunités et la dignité de certains groupes et personnes, et revient cher aux sociétés et à l’économie des pays. Mais l’évaluation des coûts de l’exclusion sociale n’est pas un projet facile à entreprendre. Certaines évaluations du coût de l’exclusion sont axées sur des groupes spécifiques ; ces groupes incluent les femmes, les personnes handicapées, les groupes ethniques ou raciaux, les couples du même sexe et les immigrés. Ce rapport décrit les mécanismes et les niveaux où sont encourus les coûts. Les coûts peuvent être décomptés au niveau de la personne, du ménage, du groupe ou de la communauté ; ils peuvent aussi être estimés aux niveaux local, infranational et national. Les coûts de l’exclusion sociale peuvent être directs ou indirects, à court terme ou à long terme. Les coûts cumulatifs à long terme peuvent être importants et affecter la trajectoire de croissance d’économies entières. Par exemple, une baisse des revenus ou une perte d’emploi au niveau individuel peut être due à un niveau de capital humain faible, qui à son tour peut être causé par un désavantage subi en termes d’éducation ou de L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   29 discrimination à l’embauche ou sur le lieu de travail (par exemple, Buckup 2009 ; Lamichhane et Sawada 2013 ; Morgon Banks et Polock 2015). L’expérience d’exclusion peut se traduire par des coûts physiques ou mentaux aux niveau personnel, du ménage, du groupe et, en fin de compte, au niveau national (consultez, par exemple, Lereya et al. 2015). Enfin, les coûts d’opportunités peuvent aussi revenir cher. Hunt, Layton et Prince (2015) et Hunt et al. (2018) ont trouvé que les entreprises se trouvant dans le premier quartile en terme de diversité de genre, race et ethnie ont entre 15 et 35 pour cent de plus de chance d’avoir des bénéfices supérieurs aux médianes nationales du secteur. Les gains provenant de l’inclusion des groupes laissés pour compte ne se produisent pas uniquement en raison de l’ajout de travailleurs à l’effectif ; la diversité en elle-même est susceptible d’accroître la productivité (Ostry et al. 2018). À terme, l’inclusion sociale doit être un choix que les sociétés et les gouvernements font sciemment en appréhendant parfaitement les coûts et les avantages associés. Investir dans une société inclusive n’est pas gratuit et doit s’accompagner d’une action concertée pour transformer l’investissement en situation avantageuse pour tous. Les programmes sociaux, par exemple, peuvent être coûteux et ont un impact sur la viabilité budgétaire. Les gouvernements ont souvent besoin de faire des concessions, soit en réduisant les coûts pour d’autres initiatives, soit en augmentant les impôts. Des coûts politiques peuvent aussi s’ensuivre, puisque les initiatives axées sur les groupes traditionnellement exclus peuvent perturber les rapports de force. Les gouvernements et les politiques doivent élaborer des contrats sociaux précis avec les citoyens afin de garantir leur soutien pour l’inclusion sociale. Partout dans le monde, les exemples de citoyens disposés à payer pour l’inclusion sociale sont nombreux. Le mode de soutien le plus efficace se manifeste dans le domaine fiscal, où les citoyens paient des impôts sachant qu’ils permettront de financer des politiques et des programmes appuyant une plus grande inclusion sociale. Au Brésil, au Mexique et au Népal, par exemple, le soutien pour les programmes de protection sociale est important ; et au Bangladesh, la réduction de la pauvreté est reconnue comme une priorité nationale, avec l’élite appuyant des initiatives contre la pauvreté (Hossain et Moore 2002). Certains signes provenant du Ghana, Kenya, Nigeria et de l’Ouganda tendent à indiquer que les attitudes concernant la redistribution pourraient être favorables en général (Langer, Stewart et Schroyens 2016). Le changement à l’égard de l’inclusion sociale est à portée de main Comment se produit le changement ? Qui sont les principaux acteurs ? Quels sont les voies par lesquelles l’inclusion sociale se réalise ? Que pouvons-nous apprendre pour l’avenir et pour les pays qui veulent avancer dans cette direction ? Nous avons recours au cadre d’inclusion sociale de la Banque mondiale (Banque mondiale 2013) et abordons l’inclusion dans les domaines suivants  : les marchés, les services et les espaces. L’inclusion, comment y arriver ? Nous répétons ce que nous avons dit plus haut dans ce rapport : en améliorant les capacités, les opportunités et la dignité des personnes et des groupes les plus à risque d’être laissés pour compte. Ce rapport donne un aperçu d’initiatives en matière de politique et de programme dans les pays 30  VUE D’ENSEMBLE africains à la recherche de l’inclusion sociale. Parfois, documenter ces processus aide ceux en quête de solutions créatives, aussi concentrons-nous nos efforts sur certaines innovations et solutions génériques que les pays africains ont essayées. Il existe d’autres acteurs importants de changement en faveur de l’inclusion sociale en Afrique, comme ailleurs. En font partie un nombre d’acteurs non gouvernementaux : des groupes religieux, des organisations non gouvernementales (ONG), le secteur privé et, encore plus important, des organisations de groupes historiquement exclus. Les changements durables se produisent généralement lorsque les acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux agissent de concert. Les élites prennent souvent part aux actions gouvernementales et non gouvernementales et jouent un rôle primordial permettant de faire avancer l’inclusion sociale. L’importance de l’épidémie du VIH/Sida qui a sévi dans de nombreuses régions du continent est un bon exemple. Ce qui avait permis au départ de susciter beaucoup d’attention sur une urgence de santé publique s’est rapidement étendu à l’identification des groupes affectés ; ils comprenaient entre autres, des hommes gays et bisexuels et d’autres hommes qui avaient des rapports sexuels avec des hommes (HSH), des veuves et des orphelins. Porter attention à l’orientation sexuelle dans nombre de pays africains était légitime parce qu’elle était liée à une crise sanitaire publique, et que des groupes jusque-là invisibles étaient désormais visibles. Ceci ne veut pas dire que la stigmatisation n’existe plus ; parfois elle peut simplement avoir changé de forme. Pour autant, l’épidémie a été le déclencheur. Elle a permis à des groupes auparavant marginalisés de se mobiliser et de s’associer aux efforts que la politique et les programmes lançaient. Grâce au processus visant à attaquer l’épidémie, les gouvernements et la société civile obtenaient le ralliement des élites comme celui des membres de la communauté. Des méthodes novatrices ayant recours aux technologies de l’information et des communications pour solliciter des réponses anonymes aux questions devenaient de plus en plus répandues. De telles technologie peuvent aussi servir à amplifier la voix des minorités. En Tanzanie et au Sud-Soudan, deux initiatives pilotes appelées “Listening to Africa” (À l’écoute de l’Afrique) ont été très efficaces pour recueillir des données de panel par le biais d’interviews par téléphone mobile. Quel que soit l’acteur qui sponsorise un programme visant à promouvoir l’inclusion sociale, peu de programmes s’avèrent utiles sans prise en charge par les communautés. Les communautés qui adhèrent au mouvement favorisant l’inclusion sociale sont capables de visualiser une nouvelle société car elles se sont sans doute elles-mêmes investies pour voir ces programmes aboutir. Par contre, lorsque des programmes sont conçus sans participation communautaire, ils mettent plus longtemps à démarrer et se confrontent aussi à une résistance de la part de la communauté. Le processus d’abolition de la mutilation génitale féminine au Burkina Faso illustre bien ce point. Tout en réprimant la pratique en 1997, le gouvernement a aussi mis en œuvre un éventail de mesures qui favorisaient l’adhésion pleine et entière de la communauté au changement. Outre la formation d’avocats, de juges, de la police et d’agents de sécurité afin de garantir qu’ils souscrivaient à l’idée, le gouvernement a appuyé les « patrouilles communautaires » qui sensibilisaient aux conséquences nuisibles de la MGF et tenaient les communautés au courant de la criminalisation de la pratique. L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   31 La majorité des pays en Afrique, comme ailleurs, disposent d’une série de politiques, programmes et projets pour faire progresser l’inclusion sociale. Ces politiques sont susceptibles de cibler certains groupes ou certaines régions, ou elles peuvent être universelles et accessibles à tous. Au niveau le plus élevé, les constitutions de la plupart des pays garantissent l’égalité et les libertés fondamentales. Au niveau suivant se trouvent les lois qui favorisent le changement ; elles peuvent être progressives or régressives. L’Encadré O.4 montre que l’Afrique a fait les progrès les plus rapides en promulguant des lois destinées à encourager l’égalité des genres. Des documents, des manifestes et des déclarations d’aperçu général indiquent plus précisément les priorités d’un gouvernement. Les politiques occupent le niveau inférieur  ; elles décrivent les directives et précisent davantage comment le gouvernement compte réaliser l’inclusion sociale. De nombreuses politiques signalent les groupes qu’elles privilégient ou ignorent en passant sous silence certains sujets ou groupes, ou par la portée de l’application de certaines politiques. Aussi, bien que des politiques n’excluent pas directement des personnes ou des groupes, elles peuvent le faire de manière passive, soit sans préciser celles qui sont incluses, soit sans investir les ressources ou l’attention nécessaires pour la mise en œuvre  9. Quelques exemples de politiques et programmes sont présentés dans le tableau O.1. Dans le monde entier, des programmes bien conçus et mis en œuvre de manière efficace ont radicalement transformé l’exclusion sociale. Parmi ceux-ci, les filets de protection sociale sont réputés pour la sécurité qu’ils offrent aux ménages contre les effets négatifs des chocs, et plus récemment, parce qu’ils augmentent les ressources des ménages et des communautés. Ces programmes ont été d’abord mis en œuvre en Afrique en réaction aux crises alimentaires et catastrophes humanitaires et complètent encore aujourd’hui les interventions d’urgence lors de crises ou de chocs, réduisant ainsi le coût et renforçant l’efficacité de l’action humanitaire. Les filets de protection sociale fournissent souvent des supports tout prêts qui permettent d’intervenir lors de crise. En réponse à la crise d’Ébola, les gouvernements ont tiré parti des programmes en cours et ont amplifié les transferts d’argent en espèce et les programmes de travaux publics (Beegle, Coudouel, et Monsalve 2018, 67). Au fil du temps, l’Afrique est devenue chef de file en matière de conception et de mise en œuvre de filets de protection sociale. Chaque pays de la région dispose au moins d’un programme de filet de protection sociale. Un large éventail de programmes vaguement appelés «  programmes d’autonomisation  » ciblent souvent les groupes historiquement exclus et peuvent avoir des effets positifs importants. En Ouganda, le programme Empowerment and Livelihood for Adolescents (ELA– Autonomisation et moyens d’existence pour les adolescents) fut élaboré et mis en œuvre par Building Resources Across Communities (BRAC-Développer des ressources entre communautés) afin de fournir une formation aux petites entreprises et une éducation promouvant la santé et la réduction de comportements à risques. Le projet d’Autonomisation des femmes et dividende démographique au Sahel (SWEDD) qui couvre le Burkina Faso, le Tchad, la Côte d’Ivoire, le Mali, la Mauritanie et le Niger a innové pour atteindre ses objectifs visant à autonomiser les femmes et les adolescentes en leur donnant accès aux services de qualité en matière de santé reproductive, infantile et maternelle, et pour œuvrer de concert avec des partenaires locaux afin de renforcer les capacités locales. Le projet a reçu le soutien des chefs religieux sur des sujets tels 32  VUE D’ENSEMBLE Encadré O.4 Réforme juridique pour les femmes en Afrique À l’échelle mondiale, l’Afrique est la région qui a relatives à la violence familiale et au harcèlement appliqué le plus de réformes en faveur de l’égalité des sexuel sur le lieu de travail. Parmi les pays les plus genres, avec 71 réformes au cours des 10 dernières actifs en matière de réforme, au cours de la dernière années. La plupart de celles-ci (plus de 50 pour cent) décennie, sont inclus la République démocratique du concernaient des lois affectant la violence de genre, Congo, la Guinée, le Malawi, Maurice, São Tomé-et- et le Burundi, les Comores, le Rwanda, São Tomé- Príncipe, et la Zambie (voir la figure B O.4.1). et-Príncipe et la Zambie ont tous proposé des lois Figure B O.4.1 Amélioration de l’Indice : Les femmes, l’entreprise et le droit » (WBL), 2009–2018 Changement de score entre WBL 2009 et WBL 2018 100 WBL WBL index 91.88 90 Indice 83.75 82.50 76.88 78.75 80 73.75 73.75 70 68.13 70 75.00 68.13 60 63.75 61.88 58.75 56.88 50 53.13 49.38 40 42.50 30 Congo, République Bolivia Bolivie Maldives Maldives Guinea Guinée São São Tomé Tomé-et- Mauritius Maurice Samoa Samoa Malawi Malawi Zambia Zambie Pays Rep. Dem.Congo dém. and Príncipe Príncipe Country Source : Banque mondiale 2018g, 11, d’après la base de données du rapport Les femmes, l’entreprise et le droit. Remarque : WBL = Women, Business and the Law (Les femmes, l’entreprise et le droit) La République démocratique du Congo a connu 2013, le gouvernement a ordonné une rémunération la plus forte croissance de son indice WBL (d’un égale pour un emploi de valeur égale, et a augmenté, score de 42,50 en 2009, il est passé à 70 en 2018). en 2015, la durée du congé de maternité rémunéré Les améliorations en République démocratique du de 12 à 14 semaines. Ces réformes ont entraîné un Congo étaient basées sur des réformes permettant accroissement du score de Maurice à hauteur de 16,88 aux femmes mariées d’enregistrer leurs entreprises, points ; entre 2009 et 2018, le taux de participation d’ouvrir des comptes en banque, de signer des des femmes à la population active a augmenté de contrats, d’obtenir un emploi et de choisir leur lieu de 6,82 pour cent par rapport à celui des hommes. résidence au même titre que les hommes. L’obligation juridique pour les femmes d’obéir à leurs maris a été São Tomé-et-Príncipe a proposé un projet de loi supprimée, de même que les restrictions imposées relatif à la violence domestique en 2009, adopté une aux femmes travaillant dans des secteurs spécifiques, loi contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, comme les industries extractives ou manufacturières, et assortie de sanctions pénales en 2012, et en 2014, le le bâtiment. La République démocratique du Congo a pays a apporté des réformes aux lois sur la retraite pour aussi déposé des projets de lois contre la discrimination les hommes et les femmes pour le droit à une retraite sexuelle dans l’emploi et l’accès au crédit. à taux plein, fixant le même âge de retraite obligatoire pour les hommes et les femmes. Entre 2009 et 2018, Maurice a entamé des réformes en 2008 en proposant la participation des femmes à la population active a des recours civils pour le harcèlement sexuel au travail, augmenté de 1,75 % par rapport à celle des hommes. interdisant le licenciement des employées enceintes, Source: Banque mondiale 2018g. instituant le congé de paternité rémunéré et interdisant la discrimination pour l’accès au crédit. En L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   33 que le mariage d’enfants, la santé maternelle et infantile, la planification familiale, l’éducation des filles, la violence sexospécifique et l’autonomisation économique et sociale des femmes. Grâce à une autre initiative, le projet procure des vélos, des kits scolaires et des trousses d’hygiène pour les jeunes filles. Le projet organise aussi des cours de coaching pour des compétences spécifiques afin que les filles puissent maintenir leur niveau scolaire, et forment les jeunes femmes pour des métiers non traditionnels. Une autre manière de focaliser les politiques sur des personnes ou groupes particuliers est d’avoir recours à des mesures de discrimination positive ou quotas. Des dispositions particulières pour des personnes ou des groupes sont courantes dans les pays-membres de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), comme dans les pays non-membres de l’organisation. Bien qu’elles soient parfois controversées, surtout dans le contexte d’inégalités tenaces axées sur les groupes, les politiques de discrimination positive sont toujours considérées comme les mécanismes de politique les plus efficaces (Langer, Stewart et Schroyens 2016). De nombreux pays africains disposent de politiques de discrimination positive pour les femmes et les personnes handicapées. L’Ouganda a inscrit un système de quotas pour le parlement dans la Constitution de 1995 (Article 78), stipulant que le parlement devait inclure une femme parlementaire dans chaque district, ainsi que des représentants de l’armée, de la jeunesse, d’ouvriers, de personnes handicapées et d’«  autres groupes selon les dispositions du parlement  ». Des dispositions semblables ont été faites pour garantir aux femmes des sièges au sein des gouvernements locaux (Muriaas et Wang 2012, 311). Bien sûr, l’ensemble le plus important et le plus complet d’initiatives est en Afrique du Sud. Comme le prouvent quelques tendances régionales, l’évolution du contexte de développement du continent annonce de nouvelles possibilités pour les pays africains dans les prochaines décennies. Premièrement, le déclin de la pauvreté presque partout, le progrès de l’éducation et les améliorations dans le domaine de la santé signifient (et il en sera ainsi de plus en plus) que les décideurs doivent se concentrer sur ceux qui n’ont pas bénéficié de ces progrès globaux. Parmi ceux-ci ressortent les personnes touchées par les conflits et la fragilité, mais certains groupes dans des contextes non fragiles risquent aussi d’être laissés pour compte. Ce sont entre autres certaines catégories de femmes, de minorités sexuelles et sexospécifiques, de personnes handicapées, de personnes plus âgées, certaines catégories de jeunes et d’enfants, certains groupes raciaux et ethniques et ceux qui vivent dans des régions accusant un retard dans le développement. Certains de ces groupes sont plus affirmés, d’autres peuvent ressentir des griefs depuis longtemps. Au fur et à mesure que la situation des personnes et des groupes s’améliorera, ils deviendront plus exigeants ; ceci aura des conséquences sur la manière dont les gouvernements répondront aux aspirations plus profondes. Le rapport indique que les citoyens de nombreux pays d’Afrique sont à la fois désabusés par l’État et remplis d’optimisme et d’espoir pour des vies meilleures. Tandis qu’un nombre croissant de pays atteignent un statut de pays à revenu intermédiaire, ils porteront leur attention sur les questions de prospérité de « deuxième génération ». Les tendances et les transitions qui structurent et modèrent le dynamisme de l’Afrique sont susceptibles d’avoir des implications importantes en matière d’inclusion sociale dans les années à venir. Bien qu’une attention spéciale sur la pauvreté doive être en 34  VUE D’ENSEMBLE première ligne pour répondre aux questions d’inclusion sociale, les États et les sociétés devront aussi envisager les facteurs de pauvreté et les raisons pour lesquelles certains groupes sont laissés pour compte. L’Afrique a fait d’énormes progrès en matière de développement économique et d’inclusion sociale, mais il reste beaucoup à accomplir. Il existe plusieurs domaines dans lesquels les progrès les plus rapides sont réalisés dans des pays d’Afrique. Mais, comme l’indique la Banque mondiale (2013), l’inclusion sociale n’est pas un processus linéaire. Le progrès peut stagner pour diverses raisons, mais il peut reprendre. Les groupes autrefois désavantagés pourraient éclipser des groupes auparavant dominants, qui pourraient à leur tour entraver les progrès faits vers l’inclusion sociale parce qu’elle nuit à leurs intérêts. Aussi l’inclusion sociale reste-t-elle un projet inachevé (Banque mondiale, 2013). L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   35 Tableau O.1 Interventions indicatives pour l’inclusion sociale dans les marchés, les services et les espaces Domaine Voie d’intervention Actions indicatives ciblant les personnes les Exemples indicatifs de politiques, programmes d’inclusion plus à risque d’être laissées pour compte et projets MARCHÉS Travail Dispositions · Garantir aux exclus l’accès à l’emploi République démocratique du Congo. législatives et la capacité d’ouvrir des comptes en Réforme du code de la famille afin permettant l’accès banque et des entreprises. d’améliorer l’égalité des genres et réformes au marché du travail interdisant la discrimination sexuelle dans · Supprimer l’obligation des femmes l’accès à l’emploi. d’obéir à leur mari. Zambie. Loi sur l’égalité et l’équité entre · Lever les restrictions pour les femmes les sexes. travaillant la nuit. Éthiopie. Réformes de la loi sur la · Inscrire l’interdiction de la propriété, requérant le consentement des discrimination dans la législation deux époux dans l’administration des biens de l’emploi (incluant l’embauche, la matrimoniaux ; changement simultané rémunération et les promotions). relevant l’âge minimum légal du mariage · Bannir le harcèlement sur le lieu du pour les femmes. travail. Burundi, les Comores, Maurice, Rwanda, · Mettre en place des recours civils pour São Tomé-et-Príncipe et Zambie. Lois le harcèlement sexuel et autres formes contre le harcèlement sexuel sur le lieu de de harcèlement en milieu de travail. travail et contre la violence domestique. · Interdiction du licenciement des Maurice. Interdiction du licenciement des femmes enceintes. employées enceintes, institution du congé de paternité rémunéré et prolongation du · Mise en place des congés de maternité congé de maternité rémunéré. et de paternité rémunérés. Mesures de · Appliquer des mesures permettant Afrique du Sud. Loi de 1998 sur l’équité en discrimination d’attirer, de valoriser et de fidéliser matière d’emploi et la loi générale de 2003 positive et quotas les personnes issues de groupes sur l’émancipation économique des noirs historiquement désavantagés. pour les « Noirs (y compris les Africains, les Métis et les Indiens), les femmes et les · Envisager des quotas d’emplois pour personnes handicapées » a. les groupes sous-représentés. Nigeria. La commission dite Federal · Mettre en place des systèmes de Character Commission (FCC) établie en données et de suivi et évaluation, et 1996. Supervise la mise en œuvre de la mesurer l’impact de la discrimination discrimination positive dans l’administration, positive. les services sociaux, le développement de · Établir des institutions devant l’infrastructure et le secteur privé. lesquelles porter les plaintes. Compétences et · Appuyer les activités génératrices République démocratique du Congo. formation de revenus pour les groupes exclus Renforcer les possibilités de réintégration (anciens combattants, jeunes et socioéconomiques pour les ménages femmes). vulnérables d’anciens combattants démobilisés par le bais du PNDDR. · Élaborer une formation comportementale et technique. Liberia. Le Ministère des Travaux publics (avec l’appui de la MINUL, du PNUD et de · Formation pour les petites entreprises la BM) a lancé un projet d’emploi à forte ciblant des groupes spécifiques, par intensité de main d’œuvre pour la réfection exemple, les femmes. des routes, l’offre d’emplois aux anciens combattants et aux jeunes touchés par la guerre. Ouganda. Programme Empowerment and Livelihood for Adolescents (ELA). 36  VUE D’ENSEMBLE Tableau O.1, suite Domaine Voie d’intervention Actions indicatives ciblant les personnes les Exemples indicatifs de politiques, programmes d’inclusion plus à risque d’être laissées pour compte et projets Finances Technologie · Interdire la discrimination dans l’accès République démocratique du Congo bancaire mobile au crédit et aux transactions financières et Maurice. Législation contre la et mettre en place des systèmes pour discrimination concernant l’accès au crédit. leur mise en vigueur. Kenya. M-PESA, un système de transfert · Procurer l’accès à la technologie d’espèces introduit la première fois en 2007 financière (fintech) à ceux qui sont ; dès 2018, 96 pour cent des ménages en traditionnellement privés de services dehors de Nairobi avaient au moins un bancaires. compte M-PESA. · Former pour l’utilisation de Tanzanie. Programme Business Women produits financiers mobiles, Connect (BWC- Développer des ressources formation professionnelle pour les entre communautés). microentrepreneurs. Terres Dispositions · Adopter des lois destinées à assurer Rwanda. Réforme législative a d’abord juridiques pour la la parité des sexes en matière de éliminé les préjugés contre les biens propriété foncière succession et de propriété foncière. fonciers possédés par les femmes, suivie de la Organic Land Law (OLL-Loi organique · Délivrer des titres fonciers ou portant régime foncier) de 2005 pour établir reconnaissance de fait de l’utilisation un régime unique de propriété foncière et des terres et reconnaître les droits d’en finir avec le dualisme des systèmes coutumiers des groupes exclus. fonciers coutumier et formel. Kenya. Décision de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples de reconnaître les droits de propriété des Endorois (agropasteurs) à leurs terres ancestrales situées autour de la Réserve nationale du lac Bogoria. Réforme foncière · Moyennant les réformes foncières, Mozambique. Loi foncière de 1997 autorise autoriser la redistribution qui permet, les témoignages oraux à être utilisés dans par exemple, aux groupes exclus les tribunaux fonciers. (femmes, groupes indigènes) d’être des copropriétaires fonciers dans le cadre Rwanda. Programme de régularisation des de projets de redistribution des terres régimes fonciers (LTR) à l’échelle nationale et de réinstallation. en 2010. · Réserver les quotas pour l’utilisation des terres. · Renforcer la représentation des femmes et des autochtones dans les négociations foncières. · Faciliter la participation des groupes exclus aux procédures, par exemple, en autorisant les témoignages oraux dans les tribunaux fonciers. SERVICES Services Documents · Veiller à ce que tous les groupes Groupe de la Banque mondiale – a appuyé intersectoriels (d’identité) disposent des documents appropriés l’initiative ID4D (Identification pour le pour accéder aux services. développement) (Botswana, Cameroun, Tchad, République démocratique du Congo, Côte d’Ivoire, Éthiopie, Guinée, Kenya, Liberia, Madagascar, Maroc, Namibie, Nigeria, Rwanda, Sierra Leone, Tanzanie et Zambie). L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   37 Tableau O.1, suite Domaine Voie d’intervention Actions indicatives ciblant les personnes les Exemples indicatifs de politiques, programmes d’inclusion plus à risque d’être laissées pour compte et projets Interventions · Intensifier les programmes de transferts Interventions multinationales face à la d’urgence pour monétaires et de travaux publics. grande menace posée par l’épidémie protéger les groupes d’Ebola, aux évènements climatiques vulnérables extrêmes et aux conflits. Susciter l’intérêt des · Former les gouvernements régionaux Kenya. Processus budgétaire participatif à communautés et et municipaux au processus budgétaire West Pokot. former les autorités participatif. gouvernementales Soudan du Sud. Gouvernance locale · Exiger et permettre la participation des et projet de prestation de services groupes exclus (femmes, groupes de (LOGOSEED). pastoraux) aux réunions de consultation budgétaire. Attention spéciale · Garantir l’égalité des droits pour des Nigeria. Commission à caractère fédéral axée sur les groupes services de qualité. (FCC) supervise la mise en œuvre de la historiquement discrimination positive dans les services exclus · Interdire la discrimination dans la sociaux. prestation de services. Ghana. Politique d’éducation inclusive. · Mettre en place des mécanismes de suivi et d’application des lois. Ouganda. Loi de 2006 en faveur des handicapés. · Rendre les services gratuits et obligatoires. Tanzanie. Éducation primaire gratuite et obligatoire. Kenya. Transfert monétaires pour les orphelins et les enfants vulnérables. Éducation Accessibilité · Garantir que l’infrastructure éducative est Ghana. Politique en faveur d’une éducation accessible aux personnes handicapées. inclusive. · Adapter des systèmes d’éducation qui garantiront l’inclusion de tous les apprenants, surtout ceux ayant des besoins éducatifs spéciaux, y compris l’accessibilité physique des écoles. · Encourager l’approche de la Conception universelle de l’apprentissage (UDL) et les environnements d’apprentissage conviviaux afin d’améliorer la qualité de l’éducation pour tous les apprenants. Formation des · Former les enseignants afin qu’ils Éthiopie. Politique sur les Langues enseignants et sachent répondre aux divers besoins en d’enseignement (LOI). élaboration des matière d’éducation. programmes Ghana. Politique en faveur d’une éducation d’enseignement · Fournir une formation des enseignants inclusive. dans les langues locales. Guinée-Bissau et Niger. Essais de · Envisager l’éducation bilingue. programmes bilingues de transition. · Garantir que les programmes d’éducation sont conçus de manière à atteindre les groupes exclus. ESPACES Physiques Sécurité dans les · Créer des forums comme des clubs Ouganda. Clubs de filles de Nkingo à espaces publics de femmes et de filles qui procurent Kemwenge et Kabarole b mis en œuvre par des espaces sûrs pour les victimes de BRAC. b violence de genre, et offrir l’accès aux services de santé sexuelle, à l’assistance judiciaire et à des cours de formation sur l’autonomisation. 38  VUE D’ENSEMBLE Tableau O.1, suite Domaine Voie d’intervention Actions indicatives ciblant les personnes les Exemples indicatifs de politiques, programmes d’inclusion plus à risque d’être laissées pour compte et projets Politiques et Dispositions · Reconnaître formellement l’égalité Afrique du Sud. Égalité des LGBTI dans la sociaux constitutionnelles et de statut et des droits des différents constitution. juridiques groupes dans la constitution du gouvernement. Mozambique et Seychelles. Relations homosexuelles dépénalisées (2015 et 2016, · Créer des dispositions juridiques pour respectivement). institutionnaliser l’égalité et l’inclusion des groupes autrefois exclus. Botswana. En 2017, une décision de la Cour suprême requiert que le · Établir des quotas pour les groupes gouvernement reconnaisse légalement exclus, par exemple, la représentation l’identification du genre des personnes politique. transgenres. Namibie. Décision du tribunal de permettre la reconnaissance officielle du changement de genre. Interdiction de discrimination des LGBTI. (Angola, Botswana, Cap-Vert, Maurice, Mozambique, Seychelles, Afrique du Sud). Kenya. Loi régissant la violence domestique. Ouganda. Constitution de 1995 (Art.78) stipulant que le parlement doit inclure une femme parlementaire dans chaque district, ainsi que des représentants de l’armée, d’ouvriers, de personnes handicapées, d’autres groupes selon les dispositions du Parlement. Changer les normes · Former des coalitions entre le République démocratique du Congo. sociales et faire face gouvernement, la société civile, le Renforcer les moyens de réinsertion à la discrimination système judiciaire et les communautés. socioéconomiques pour les ménages vulnérables des anciens combattants · Lancer des campagnes d’information, démobilisés grâce au PNDDR. par exemple, par le biais d’émissions de radio nationales, la télévision, les Burkina Faso. Criminalisation de la MGF journaux et les réseaux sociaux. et mesures pour la mise en vigueur de la législation et changement normatif. · Mettre en place des systèmes qui garantiront la participation de plusieurs Campagnes d’information dans toute la parties prenantes. région, portant sur le VIH. · Promouvoir la participation à part entière de la communauté grâce aux contacts et conversations continus avec la communauté. · Veiller à ce que la loi soit comprise par tous ; traduction de la loi, des règlements et des procédures dans les langues locales. · Former et favoriser les changements normatifs au sein du personnel de l’État (par exemple, avocats, juges, personnel de la police et agents de sécurité). · Procurer des espaces pour les mouvements qui exhortent les groupes exclus à prendre part aux réformes de politique. L’INCLUSION SOCIALE EN AFRIQUE   39 Tableau O.1, suite Domaine Voie d’intervention Actions indicatives ciblant les personnes les Exemples indicatifs de politiques, programmes d’inclusion plus à risque d’être laissées pour compte et projets Possibilités · Envoyer de jeunes citoyens vivre dans Nigeria. Brigades nationales pour la de cohésion d’autres régions du pays. jeunesse (NYSC). intergroupe · Prendre en considération les Commissions de vérité et réconciliation Commissions de vérité et réconciliation en Gambie, à Maurice, au Rwanda et en (TRC) pour surmonter les conflits. Afrique du Sud. Autonomisation et · Programmes de transferts monétaires Kenya, Mozambique, Zambie. dignité et d’autre protection sociale qui Programmes de transferts d’argent en améliorent la confiance en soi et espèce. contribuent à renforcer la dignité. Soudan du Sud et Tanzanie Initiative · Avoir recours aux réseaux sociaux et à « Listening to Africa ». la technologie pour que les groupes exclus se fassent entendre. Sahel. Projet d’Autonomisation des femmes et dividende démographique au Sahel · Promouvoir les droits et les services en (SWEDD). matière de santé reproductive. Ouganda. Programme Empowerment and · Habiliter les victimes de violence de Livelihood for Adolescents (ELA) de BRAC. genre à la signaler anonymement. Réhabilitation à base communautaire (RBC) pour les personnes handicapées. Amélioration des · Améliorer la collecte de données Laboratoire d’innovation sur le genre et données et des ventilées sur les groupes et les l’égalité des sexes analyses processus sociaux Initiative « Listening to Africa » (« à l’écoute · Promouvoir les plateformes qui de l’Afrique ») publient l’information · Favoriser les innovations en matière de collecte de données, comme la collecte de données de haute fréquence grâce aux téléphones mobiles · Investir dans les données géospatiales et d’autres données massives · Encourager et financer l’amélioration des analyses Remarque : BRAC = Building Resources Across Communities (Développer des ressources entre communautés) ; MGF = Mutilation génitale féminine ; ID4D = Identification pour le développement ; LGBTI = Lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intergenres ; PNDDR = Programme national pour le désarmement, la démobilisation et la réinsertion ; PNUD = Programme des Nations Unies pour le développement ; MINUL = Mission des Nations Unies au Liberia ; BM = Banque mondiale. a. Burger et Jafta 2010. b. Grâce au projet dit Supporting Children’s Opportunities through Protection and Empowerment Project, mis en oeuvre par le Ministère de l’égalité des sexes, du travail et du développement social. 40  VUE D’ENSEMBLE Notes en fin de texte See https://www.worldbank.org/en/region/afr/overview#2. 1 See https://africaindata.org/#/2. 2 Based on $1.90 a day in 2011 purchasing power parity (PPP). Source: PovcalNet, http://iresearch. 3 worldbank.org/PovcalNet. From UN DESA Population Division “2018 Revision of World Urbanization Prospects,” https:// 4 www.un.org/development/desa/publications/2018-revision-of-world-urbanization-prospects. html (accessed September 19, 2019). Pew Research Center, 2018, “Internet Connectivity Seen as Having Positive Impact on Life 5 in Sub-Saharan Africa, but Digital Divides Persist,” http://www.pewglobal.org/2018/10/09/ internet-connectivity-seen-as-having-positive-impact-on-life-in-sub-saharan-africa. A.-M. 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